Les psychoses aigues : bouffée délirante et confusion mentale I. Introduction :

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Les psychoses aigues : bouffée délirante et confusion
mentale
La bouffée délirante aigue
I. Introduction :
C’est en 1893 que Magnan isole « les délires polymorphes des dégénérés » et,
en 1895, il distingue à l’intérieur de ce groupe « les bouffées délirantes
polymorphes » ; sa description reste d’actualité.
La bouffée délirante survient surtout chez l'adolescent ou l'adulte jeune et peut
être favorisée par la prise de toxique ou par un stress.
Le diagnostic peut être évoqué devant l'association d'une agitation
psychomotrice ou plus rarement d'une sidération, d'une anxiété importante et
d'un état délirant.
Le début, en général brutal (coup de tonnerre dans un ciel serein), a pu être
précédé de prodromes non spécifiques (troubles du sommeil, anxiété,
bizarreries du comportement).
Les idées délirantes sont polymorphes, tant en ce qui concerne les thèmes, qui
sont multiples et variables ( les plus fréquents sont d'ordre mystique, sexuel,
messianique, mégalomaniaque ou persécutif) qu'en ce qui concerne les
mécanismes : les hallucinations psychosensorielles (organes des sens) sont
riches et multiples (acoustico-verbales, visuelles, cénesthésiques (génitales),
olfactives (gaz) parfois), les hallucinations psychiques sont très fréquentes (voix
intérieures , les intuitions et les interprétations sont présentes.
L'automatisme mental est toujours présent, il s'agit d'une mécanisation et
d'une perte d'intimité de la pensée : les idées, les intentions, les actes sont
devinés, répétés, commentés ou imposés.
Le délire est non systématisé, il se distingue en général du délire paranoïde de
la schizophrénie par la richesse et le polymorphisme des thèmes et des
mécanismes et par l'absence de dissociation.
La dépersonnalisation est souvent importante, s'exprimant en termes de
dédoublement, de transformation, de dissolution affectant le corps autant que
l'esprit.
Le délire engage l'affectivité du sujet. Il est vécu de façon intense.
La participation thymique est fréquente ; l'humeur très variable subit les
fluctuations du délire, passant ainsi d’une tristesse à l'exaltation, parfois en
quelques minutes. L'angoisse est souvent importante en réaction au délire.
C'est dans ce contexte que des actes médico-légaux peuvent survenir. La
conscience n'est pas réellement altérée, à la différence des confusions, mais
l'attention est dispersée.
Les troubles du sommeil sont fréquents.
L'examen somatique, indispensable, sera pratiqué dès que possible ainsi que le
bilan biologique.
Ils sont en règle normaux en dehors d'une déshydratation modérée, parfois
retrouvée si l'agitation est importante. Ils permettent d'éliminer une étiologie
organique éventuelle. L’éventualité d’une telle étiologie (bien que rare) justifie
des examens complémentaires (scanner, EEG, TSH, dosage de vitamine B12,
recherche de toxiques dans les urines).
Dans la plupart des cas on ne retrouve pas d'étiologie. Toutefois,
l'interrogatoire doit rechercher les antécédents personnels et familiaux,
psychiatriques et somatiques du sujet, ainsi que la prise de toxiques
(amphétamines, cocaïne, cannabis, LSD ou autres psychodysleptiques) ou
encore la consommation de médicaments (en particulier antidépresseurs,
corticoïdes, antituberculeux tel que Rimifon , antipaludéens tel que Lariam et
antiparkinsonien tel que Artane ).
Les bouffées délirantes aiguës peuvent être engendrées par une consommation
de toxiques, on parle alors de pharmacopsychoses, les amphétamines peuvent
ainsi induire des psychoses délirantes aiguës interprétatives, les hallucinogènes
(LSD, phencyclidine), l'ecstasy peuvent induire des états psychotiques aigus
hallucinatoires, qui peuvent évoluer pour leur propre compte pendant
quelques semaines après l'arrêt de l'intoxication.
Les psychoses puerpérales, certaines psychoses post-opératoires, s'expriment
parfois sur le mode d'un délire aigu. Certaines pathologies organiques
(encéphalite aiguë, thyroidite de Hashimoto, tumeur cérébrale) ou
exceptionnellement un traumatisme crânien ou une carence en vitamine B12
peuvent occasionner des épisodes délirants aigus.
Ces causes organiques doivent être systématiquement recherchées lorsque le
tableau clinique est atypique et que le traitement neuroleptique est peu
efficace.
II. Evolution
L'évolution est favorable dans la majorité des cas et ce, d'autant plus que le
traitement neuroleptique est instauré rapidement.
La bouffée délirante évolue sous forme d'accès, la guérison peut être brusque,
ou le plus souvent progressive, en quelques semaines.
Sa guérison est écourtée par le traitement neuroleptique. La critique de son
délire par le sujet est un indice d'amélioration de la bouffée délirante.
Dans un tiers des cas environ, la bouffée délirante reste un accident unique
dans la vie d'un sujet.
Dans un bon tiers des cas, une évolution intermittente peut être observée, soit
sous la forme de récidives d'accès délirants de même type, soit de la survenue
secondaire d'épisodes maniaques.
La bouffée délirante a alors représenté l'épisode inaugural d'un trouble
bipolaire, ce qui est d'autant plus fréquent que le sujet est adolescent.
Le risque essentiel, sur le plan du pronostic, est celui de l'évolution vers une
schizophrénie, dans un peu moins d'un tiers des cas. Celle-ci peut s'installer au
décours d'un premier épisode ou après plusieurs récidives.
Sont considérés comme étant de pronostic défavorable dans l'évolution d'une
bouffée délirante :
La notion de personnalité prémorbide (schizotypique ou schizoïde),
Un délire peu riche sans polymorphisme des thèmes et des mécanismes,
Une évolution subaiguë,
Une mauvaise réponse ou une réponse incomplète au traitement
neuroleptique,
Une critique incomplète de l'épisode délirant,
L’existence d'un syndrome dissociatif, des antécédents familiaux de
schizophrénie.
Cependant aucun élément sémiologique ne permet d'établir le pronostic de la
bouffée délirante de façon certaine et ce n'est qu'après plusieurs mois qu'une
évolution vers une schizophrénie doit être redoutée.
III. Diagnostics différentiels
L'accès maniaque est facile à évoquer dans les formes typiques où l'on retrouve
une exaltation euphorique de l'humeur, une fuite des idées.
Le diagnostic est plus difficile à évoquer lorsque l'euphorie est peu marquée et
que les éléments délirants sont intenses, ce qui est parfois observé dans les
manies débutant à l'adolescence.
L'accès dépressif mélancolique est facilement évoqué lorsque la thymie est
triste, avec une douleur morale intense, et une inhibition psychomotrice.
Le diagnostic peut être plus difficile chez l'adolescent dans les formes
délirantes de mélancolie.
La confusion mentale est facilement éliminée devant l'absence de
désorientation temporo-spatiale.
IV. Traitement
Il s'agit d'une urgence psychiatrique qui nécessite une hospitalisation.
Le recours à une hospitalisation à la demande d'un tiers est souvent nécessaire.
Le traitement neuroleptique s'impose pour obtenir rapidement une sédation et
pour améliorer le pronostic évolutif de l'accès.
Au début la voie intra-musculaire peut être nécessaire. Les neuroleptiques dits
atypiques seront préférés en première intention compte-tenu de leur meilleure
tolérance neurologique (risque moindre de dyskinésies aiguës et de
symptomatologie extrapyramidale) (par exemple : amisulpride ou Solian 400 à
800 mg/j, rispéridone ou Risperdal 4 à 8 mg/j, olanzapine ou Zyprexa 5 à 20
mg/j, ce dernier pouvant être prescrit par voie IM).
La posologie sera rapidement progressive. L'association d'une benzodiazépine
pourra être préconisée afin de potentialiser la sédation.
L'association d'une phénothiazine sédative (cyamémazine ou Tercian 50 à 200
mg/j par exemple) pourra également être utilisée pour obtenir une action
rapide sur l’agitation et/ou les troubles du sommeil.
Le traitement tiendra compte de la découverte d'une étiologie médicale et de
la correction d'éventuels désordres hydro-électrolytiques.
Le traitement neuroleptique sera surveillé et adapté quotidiennement à l'état
du patient.
Les effets secondaires doivent être recherchés et corrigés (en particulier les
effets neurologiques ou l'hypotension orthostatique).
Le traitement sera poursuivi au moins 1 an après l'amélioration des troubles,
afin de limiter le risque de récidive ou d'évolution vers une schizophrénie.
Les doses pourront être réduites de moitié environ, dès le troisième mois et la
monothérapie neuroleptique sera préférée.
En cas de mauvaise observance du traitement, le recours éventuel à un
traitement neuroleptique retard pourra être envisagé (ex Haldol decanoas ou
Risperdal Consta ). Une psychothérapie de soutien sera associée.
Critères du DSM IV
Dans le DSM IV la bouffée délirante aiguë est reprise sous le nom de « trouble
psychotique bref »
Confusion mentale
Objectifs : diagnostiquer un état confusionnel, identifier les situations d’urgence
et planifier leur prise en charge
I Introduction :
La confusion est un problème clinique extrêmement fréquent. La cause en est le
plus souvent facile à déterminer, à condition d’avoir appréhendé la situation
clinique dans sa globalité.
II Définition :
• Le syndrome confusionnel est caractérisé par l'association :
• d'une baisse de la vigilance,
• d'une désorientation temporo spatiale,
• d'un ralentissement et d'une perturbation diffuse des activités
intellectuelles,
•
avec souvent illusions ou hallucinations et perturbations du
cycle veille-sommeil, des troubles du comportement (activité
générale, état affectif, conduites sociales).
• Syndrome d’installation aiguë ou subaigu, le plus souvent réversible.
• C’est une Urgence +++
III Aspects cliniques
La sémiologie de l’état confusionnel est riche. Les signes principaux, faciles à
reconnaître, Il s'agit d'un état aigu transitoire, réversible, associant :
-une obnubilation de la conscience
- une désorientation spatiale et temporelle, toujours présente, très évocatrice
-un état de délire onirique, (« rêve éveillé » pathologique) définit l’état
confuso-onirique, orientant verse des causes toxiques, médicamenteuses ou le
delirium tremens.
-Le tableau peut s’enrichir d’hallucinations souvent angoissantes, de délires,
d’un état d’agitation parfois violente, ou au contraire d’un état stuporeux.
- des troubles de la mémoire
-des troubles somatiques, traduisant un état de souffrance cérébrale dont
l'étiologie est à repérer le plus rapidement possible afin de proposer une
thérapeutique salvatrice.
Compte tenu des causes très variées à l’origine d’un état confusionnel, l’analyse
sémiologique doit aussi s’attacher à rechercher les autres signes de souffrance
du système nerveux central, principalement syndrome pyramidal, syndrome
extrapyramidal, syndrome méningé, paralysie des paires crâniennes,
convulsions, hyporéflexie, anomalies de la motricité pupillaire, signes
neurovégétatifs, déficits moteurs focalisés…Les déficits sensitifs ou sensoriels
sont d’interprétation très difficile chez ces patients dont la collaboration à
l’examen clinique est le plus souvent inexistante.
A Symptômes initiaux
Une insomnie nocturne
Une somnolence diurne
Des cauchemars
Des céphalées
Une asthénie, une anorexie
Une obnubilation
Un mutisme, des idées délirantes
Ces signes ont une recrudescence nocturne
B Début de la confusion
Progressif en quelques jours, céphalées, troubles du sommeil, irritabilité,
troubles de l'humeur.
Parfois brutal, obnubilations, désorientation, accès d'onirisme entraînant des
troubles du comportement
C Phase d’Etat de la confusion
-présentation : hébété, maladroit, négligé, hagard
- obnubilation de la conscience variable, discours peu cohérent
- difficultés perceptives, fausses reconnaissances, accès de perplexité anxieuse
traduisant le désarroi du patient qui a conscience de son état
troubles intellectuels :
-troubles de l'attention,
-inadaptation aux perceptions,
-désorientation temporo-spatiale,
-trouble de la mémoire,
-trouble du jugement et de la critique,
-propos décousus incohérents,
-comportements inappropriés
-délire onirique, rencontré dans un cas sur deux environ. Très variable selon les
étiologies (zoopsies du Delirium tremens) et selon la journée (soir, obscurité).
D Signes organiques
a les signes somatiques associés :
-désordres neurovégétatifs.
-Hyperthermie sans origine infectieuse
-trouble du rythme respiratoire
-Déshydratation
-hypotension artérielle
-insomnie constante avec somnolence diurne
b Troubles neurologiques
Céphalées, raideur de la nuque, modification réflexe.
IV Evolution
Dépend de l'étiologie
dans les formes psychiques, guérison sans séquelles mais avec amnésie
lacunaire fréquente : il peut subsister des idées fixes post-oniriques fondement
d'un état délirant chronique.
Mais L'état confusionnel peut évoluer vers un processus démentiel.
V Diagnostic Différentiel
-Les troubles psychotiques
-La bouffée délirante
-hallucinations auditives plus marquées,
-troubles de l'identité plus que de la conscience,
-négativité des explorations complémentaires
-état d'agitation maniaque : dans les formes agitées, existence d'antécédents, pas
de véritable trouble de la conscience.
- Mélancolies stuporeuses moins variables dans le temps, existence
d'antécédents familiaux, négativité des explorations.
Les autres troubles psycho-organiques
Les démences : la perplexité est moindre, ainsi que le délire onirique.
L'évolution est chronique, sans fluctuation, mais beaucoup de personnes âgées
présentent des états confuso-démentiels
VI Causes de Confusion Mentale
Multiples, il faut toujours rechercher une cause organique.
A Causes toxiques
A1 Exogènes :
* alcoolisme : ivresse confusionnelle, delirium tremens, sevrage brutal,
amélioration rapide actuellement mais pronostic en fonction de la dépendance à
l'alcool, encéphalopathie de Gayet-Wernicke
* intoxication psychoactive : Haschich ; éther à forte dose, solvant,
hallucinogènes, amphétamines, barbituriques, opiacées. Evoquer aussi le
sevrage.
* Intoxication professionnelle ou accidentelle : oxyde de carbone, plomb,
arsenic.
* intoxication médicamenteuse, notamment chez la personne âgée :
antidépresseurs, benzodiazépines, lithium, corticoïdes, antibiotiques ...
A2 Toxiques Endogènes :
B Troubles métaboliques :
Hyper ou déshydratation, hyponatrémie par carence sodée (Addison),
Troubles glucidiques (hypoglycémie),
Troubles cardiologiques et respiratoires,
Causes rénales,
Pancréatites
C Troubles endocriniens :
hypo ou hyperthyroïdie, insuffisance surrénale,
D Causes neurologiques
Encéphalite (Herpès)
Tumeur cérébrale
Hypertension intracrânienne
A.V.C.
Encéphalite hypertensive
T.C. avec hématome extra-dural
Épilepsie.
E Causes infectieuses
Typhoïde
Brucellose
Syphilis
Paludisme
Sida
Rickettsiose
Tuberculose…
F Causes psychiatriques
Émotion au cours de catastrophes naturelles, d'accident, de guerre. La frayeur
fait éclater les défenses psychiques naturelles
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