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L’Encéphale (2008) 34, 347—351
Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com
journal homepage: www.elsevier.com/locate/encep
MÉTHODOLOGIE
Quelques réflexions sur le double insu夽
Some reflexions about double blind
R. Boussageon a,∗, F. Gueyffier b, A. Moreau a, Y. Gansel c,
V. Boussageon d
a
Département de médecine générale, université Claude-Bernard, 69600 Lyon, France
Service de pharmacologie clinique, centre d’investigation clinique, hôpital Louis-Pradel, 69677 Bron, France
c
Hôpital Édouard-Herriot et LEPS, EA 4148, université Lyon 1, 5, place d’Arsonval, 69437 Lyon cedex 03, France
d
Département de médecine générale, université Claude-Bernard, 69000 Lyon, France
b
Reçu le 18 octobre 2006 ; accepté le 15 mai 2007
Disponible sur Internet le 11 janvier 2008
MOTS CLÉS
Essai clinique
randomisé ;
Rupture du double
insu ;
Effets indésirables ;
Effet placebo
KEYWORDS
Randomized clinical
trial;
The double blind
breach;
Side effects;
Placebo effect
夽
∗
Résumé L’essai clinique randomisé contre placebo et en double insu est le meilleur moyen
actuel de prouver l’efficacité clinique spécifique des médicaments. Pour cela, la procédure
double insu, quand elle est éthiquement et techniquement réalisable, est une condition indispensable à la validité des résultats et à l’attribution causale de la différence observée entre
les deux groupes à l’effet pharmacologique du médicament. Or, il apparaît qu’en pratique, les
malades et les investigateurs peuvent deviner qui reçoit le médicament et qui reçoit le placebo,
par exemple, en raison de la survenue d’effets indésirables plus fréquents chez les malades qui
reçoivent le médicament. Ce phénomène, connu sous le nom de « rupture de l’insu », constitue alors un biais méthodologique impossible à éviter parce qu’il est inséparable de l’effet du
médicament. Mais l’impact de cette rupture de l’insu « inévitable » reste à préciser. Si l’on peut
raisonnablement penser qu’elle peut modifier les symptômes subjectifs comme l’anxiété ou la
douleur par auto ou hétérosuggestion, son influence sur des critères objectifs reste à démontrer.
© L’Encéphale, Paris, 2008.
Summary
Literature findings. — Randomized, double blind, placebo-controlled clinical trials are currently
the best means of demonstrating the clinical effectiveness of drugs. The double blind procedure,
when ethically and technically feasible, is a necessary condition for validating results and for
causal attribution of the observed difference between the two groups to the tested drug’s
pharmacological effect.
Comments. — In practice, however, it appears that patients and independent investigators can
guess who receives the drug and who receives a placebo through side effects, which are usually
more frequent in patients receiving the drug. This phenomenon effectively ‘‘breaks the blind’’
Sources de financement et conflits d’intérêts : aucun.
Auteur correspondant.
Adresse e-mail : [email protected] (R. Boussageon).
0013-7006/$ — see front matter © L’Encéphale, Paris, 2008.
doi:10.1016/j.encep.2007.05.001
348
R. Boussageon et al.
and represents as such a major methodological bias, which cannot be avoided as it is inseparable
of the drug’s effect.
Conclusion. — The impact of this ‘‘unavoidable’’ double blind breach nevertheless remains
unclear. While it can reasonably be assumed that it may modify subjective symptoms such as
anxiety or pain through suggestion, its influence on objective criteria remains to be demonstrated.
© L’Encéphale, Paris, 2008.
Introduction
L’essai clinique randomisé (ECR) contre placebo en double
insu permet le plus haut niveau de preuve de l’efficacité
du médicament. La procédure du double insu est l’un des
principaux critères de qualité méthodologique d’un essai
clinique contrôlé [17,23]. Elle permet de maintenir la comparabilité des deux groupes tout le long de l’étude, en
éliminant théoriquement les biais liés à la suggestion, liés
au fait de savoir quel patient reçoit le « vrai » traitement, ainsi que les biais d’évaluation. Elle fût admise par
la communauté scientifique suite aux travaux de Greiner
et Gold dans l’angine de poitrine qui montrèrent que
l’efficacité de la khelline (vasodilatateur) dans les études
en simple insu disparaissait dans les études en double insu
[13,18]. L’utilisation de la procédure du double insu est
rendue possible grâce à l’utilisation de placebo. Celui-ci
permet théoriquement de « contrôler » en le répartissant de
façon homogène entre les deux groupes ce qu’on appelle
communément l’effet placebo, c’est-à-dire l’ensemble des
influences thérapeutiques liées à la prise du remède, à la
relation médecin—malade, au contexte thérapeutique [23].
Par ce stratagème, l’égalité des effets placebos entre les
deux groupes (médicament versus placebo) est admise de
principe. La différence observée est alors imputable uniquement à l’effet pharmacologique. Elle est par ailleurs
nécessaire à l’inférence statistique. Si la procédure double
insu n’est pas respectée, les biais mentionnés plus haut
peuvent intervenir et fausser les résultats car l’évolution
des groupes ne diffère plus seulement par l’effet que l’on
cherche à mettre en évidence : la différence entre le groupe
traité par le médicament et le groupe traité par le placebo
peut être liée à un effet placebo supérieur dans le groupe
médicament et non à l’effet pharmacologique spécifique du
médicament évalué [19].
Un certain nombre de questions se posent : peut-on considérer que l’effet placebo induit par le médicament est
réellement identique à l’effet placebo du placebo [19,22] ?
La différence entre les deux groupes peut-elle résulter
davantage d’une différence d’effet placebo que d’effet
pharmacologique [20] ? Quelle influence a le fait de percevoir (ou non) les effets du médicament, qu’ils soient
souhaités ou indésirables ? Que devient dans ces conditions
la validité du double insu ? La rupture du double insu seraitelle inévitable ?
le début des ECR, des critiques concernant sa réelle possibilité pratique se faisaient entendre [8,32,39]. En dehors
des problèmes de confection du placebo qui peut être
différent du médicament par son aspect, son goût, son
odeur, il y a des facteurs de rupture d’insu inévitablement liés au « principe actif » comme les effets indésirables
perceptibles [2,23]. De nombreuses études, et plus particulièrement dans l’évaluation des psychotropes [10], montrent
que les patients et les investigateurs peuvent deviner dans
une certaine mesure, c’est-à-dire de façon significative
sur le plan statistique, le traitement attribué à chaque
patient.
Sans être exhaustif, nous avons regroupé à titre
d’exemple certaines de ces études dans le Tableau 1. Tous
Tableau 1 Quelques études démontrant une rupture du
double insu.
Auteurs
Années
Médicaments évalués
Lipman et al [24]
Rickels et al [34]
1966
1970
Karlowski et al [21]
1975
Marini et al [26]
1976
Brownell et al [3]
Howard et al [14]
Byington et al [4]
1982
1982
1985
Hugues et al [15]
1985
Rabkin et al [33]
1986
Munjack et al [31]
1989
Margraf et al [25]
1991
White et al [40]
1992
Bystritsky et al [5]
1994
La rupture du double insu : un fait connu
Greenberg et al [12]
1994
Le problème de la rupture du double insu est en fait
bien connu par les méthodologistes de l’ECR [2,23,36]. Dès
Turner et al [38]
2002
Chlordiazépoxide
Méprobamate dans
l’anxiété
Acide ascorbique dans la
prévention du rhume
Lithium dans la maladie
maniacodépressive
Fenfluramine
Aspirine
Propranolol dans le post
infarctus de myocarde
Nicotine dans le sevrage
tabagique
Imipramine et phénelzine
dans la dépression
Alprazolam et propanolol
dans l’attaque de
panique
Alprazolam et
imipramine dans la
dépression
Étopéridone dans la
dépression
Étopéridone et
clomipramine dans la
dépression
Fluoxétine dans la
dépression
Amitriptyline dans la
douleur chronique
Quelques réflexions sur le double insu
ces auteurs concluent que leurs résultats confirment la rupture du double insu malgré toutes les précautions prises pour
l’éviter.
Les causes de la rupture de l’insu
Le mécanisme le plus fréquent qui permet de distinguer
correctement les médicaments des placebos est la survenue d’effets indésirables [4,24,29,40]. À titre d’exemple,
Thomson a testé l’hypothèse suivante : les effets anticholinergiques (sécheresse buccale, constipation, etc.) des
antidépresseurs tricycliques peuvent amplifier leur effet
thérapeutique en augmentant l’effet placebo. Pour cela,
il réalisa une revue de la littérature comparant les essais
cliniques contrôlés évaluant l’efficacité des antidépresseurs
tricycliques de 1958 à 1972 utilisant l’atropine comme
placebo impur, censée être dépourvue d’effet antidépresseur mais qui produit les mêmes effets anticholinergiques,
aux essais cliniques contrôlés utilisant un placebo non
atropinique. Sur 68 études utilisant un placebo non atropinique, l’antidépresseur tricyclique fût supérieur au placebo
dans 43 essais (63,2 %) ; et sur les sept études utilisant
l’atropine comme placebo, seule une montra la supériorité
de l’antidépresseur (14,9 %) avec une différence statistiquement significative [37].
Les autres mécanismes invoqués sont ceux des autres
effets « perceptibles » comme la fréquence cardiaque abaissée sous ␤-Bloquant (propranolol) [4] ou l’amélioration
subjective des patients [26].
L’évaluation de la rupture du double insu
Comparer le taux d’effets indésirables dans les
deux groupes ?
Il s’avère que dans de nombreux ECR, le taux d’effets
indésirables diffère sans surprise significativement entre
les deux groupes (au désavantage du médicament le plus
souvent). Par exemple, Greenberg et al. ont étudié par
une méta-analyse l’efficacité de la fluoxétine dans la
dépression. Ils ont montré que les taux d’effets indésirables
étaient significativement supérieurs dans les groupes traités
par fluoxétine et donc que les études, pourtant réalisées
en double insu, étaient biaisées car les groupes n’étaient
dès lors plus strictement comparables [12]. Même si les
ECR évaluant l’efficacité des médicaments n’ont pas pour
premier but d’étudier précisément les effets indésirables,
il pourrait être intéressant de comparer le taux d’effets
indésirables dans chaque groupe. Mais il faut pouvoir
démontrer que la différence du taux d’effets indésirables
entre les deux groupes entraîne bien une rupture d’insu.
La différence du taux d’effets indésirables entre le groupe
traité par le médicament et celui traité par placebo est donc
plus un critère « intermédiaire » permettant seulement de
suspecter une rupture de l’insu qu’une preuve formelle de
rupture. En présence d’une différence significative et cliniquement pertinente, on peut alors suspecter une rupture du
double insu et prévoir une vérification de la procédure en
fin d’étude qui est la seule façon de l’évaluer précisément.
349
Questionnaire de fin d’étude : mesurer la rupture
de l’insu ?
Au vu des études montrant que la rupture du double insu
peut exister lorsque les patients comme les médecins sont
capables de deviner la nature des traitements en raison de la
présence ou non d’effets perceptibles (indésirables ou non),
une condition nécessaire à la validité de l’ECR serait de vérifier que l’insu a bien été respecté tout au long de l’étude.
Depuis l’étude de Goodnow et al. [11], de nombreux auteurs
ont proposé un questionnaire de fin d’étude aux patients et
aux médecins visant à savoir s’ils avaient deviné la distribution des médicaments et des placebos [6,7,15,17].
En fait, si le taux de patients ou de médecins capables de
deviner les traitements est supérieur à 50 % de façon significative sur le plan statistique et donc non lié au hasard, on
peut dès lors penser que l’étude n’est pas strictement en
double insu et qu’il s’est constitué un biais pouvant fausser
l’interprétation des résultats [7]. L’étude devient en partie
« non insu » et la différence observée entre les deux groupes
ne peut plus être attribuée en toute confiance à l’unique
effet spécifique du médicament.
Discussion
Le statut du double insu dans la littérature
médicale
Le respect de la procédure double insu est un facteur primordial de la qualité méthodologique d’un ECR [17,36]. Or
le statut de l’insu dans les ECR est la plupart du temps très
mal rapporté [30]. À titre d’exemple, sur 191 ECR sélectionnés de façon aléatoire, quatre seulement ont évalué le
statut double insu. Les auteurs de cette revue en concluent
que la plupart des études ne mentionnent pas le succès de
l’insu et émettent des doutes sur la réussite de la procédure
[9].
De plus, il faut signaler que les effets indésirables
(cause principale de la rupture de l’insu) sont également
mal rapportés dans les essais étant donné que le but
principal des ECR est d’abord d’évaluer l’efficacité du
médicament. À titre d’exemple, une méta-analyse [16]
sur la description des effets indésirables a repris 192 ECR
publiés entre 1980 et 1990, dont 61 % en double insu, ayant
inclus au moins 100 patients (ce qui faisait une total de
130 000 patients) et concernant sept classes diverses de
médicaments : anti-inflammatoires non stéroidiens, antihypertenseurs, antirétroviraux. . . Elle a montré que les
espaces réservés aux effets indésirables dans les publications correspondaient à 0,3 page, soit autant que l’espace
occupé par les noms des auteurs. La sévérité des effets indésirables cliniques n’a été rapportée de façon adéquate que
dans 39 % des cas et le nombre des arrêts de traitement pour
effet indésirable que dans 25 % des essais. La raison précise de ces arrêts n’a pas été donnée dans 54 % des essais.
Souvent en effet, seuls les effets indésirables graves sont
rapportés. Les symptômes bénins, tels que les nausées, sont
très rarement mentionnés. Or il est probable qu’un patient
ressentant des nausées pense qu’il reçoit le médicament et
que le médecin attribue ces nausées à la prise du médicament et non du placebo.
350
La rupture du double insu concerne tous les essais
cliniques, qu’ils soient « explicatifs » ou
« pragmatiques »
On pourrait penser que le fait de pouvoir deviner la nature du
traitement administré (médicament ou placebo) par le biais
des effets indésirables rapproche l’essai clinique contrôlé
de la réalité soignante (essai dit « pragmatique »). Mais
la procédure double insu n’a de sens que dans un essai
expérimental (ou tous les facteurs susceptibles de modifier
le critère de jugement doivent être parfaitement contrôlés (essai appelé « explicatif ») pour permettre l’attribution
causale de la différence observée entre les deux groupes
uniquement à la molécule pharmacologique et à son effet
« spécifique ». Ainsi, dans tous les essais où l’on cherche à
mettre en évidence la supériorité du médicament par rapport au placebo ou à un autre médicament, le respect du
double insu est indispensable.
R. Boussageon et al.
nausées ou la douleur) induite par le fait de savoir (ou plutôt
de croire) que l’on reçoit le « vrai » médicament, il reste à
démontrer que cette suggestion a une influence sur des critères de jugement plus objectifs comme la morbimortalité.
Les différences entre procédure simple insu et double insu
concernent en effet avant tout des symptômes subjectifs
[1], comme la douleur de l’angine de poitrine [13].
Dans l’estimation de l’impact potentiel de la rupture du
double insu, il faut aussi remarquer que la survenue des
effets recherchés, favorables, explique une partie des cas
de détermination correcte de la nature du traitement. Or la
situation la plus regrettable serait de proposer un médicament dont l’effet serait entièrement dû à un effet placebo
renforcé par des effets indésirables. Si l’effet pharmacologique propre et recherché renforce l’effet placebo dans le
cadre d’un essai clinique, il le fera sans doute aussi dans
la pratique clinique. Se pose alors la question du possible
renforcement de l’effet placebo par le contexte de l’essai
clinique.
Le problème des effets indésirables liés au placebo
Il faut aussi soulever un problème qui peut relativiser
l’importance de la rupture du double insu : le placebo peut
lui aussi être responsable d’effets indésirables, mimant ceux
du médicament évalué. Ces effets indésirables sous placebo, qui sont à distinguer stricto sensu de l’effet nocebo
(celui-ci étant l’aggravation des symptômes ou de la maladie
sous placebo), peuvent tromper les malades et les médecins
dans leurs intuitions. Ils sont par ailleurs relativement fréquents et sont un bon reflet de l’effet de la suggestion ou
de l’anticipation à l’œuvre dans la prise d’un médicament.
Ces effets indésirables sous placebo, dont le taux peut parfois avoisiner celui des médicaments, témoignent donc bien
du doute instauré par la procédure double insu, les patients
pensant évidemment avoir reçu le traitement actif.
La rupture de l’insu reste donc à démontrer
En pratique, il reste à évaluer l’influence réelle de la conviction des patients et des investigateurs sur la mesure du
critère de jugement. En outre, il faut ici rappeler que
la procédure double insu a pour but d’insinuer un doute
dans l’esprit du malade comme celui du médecin. Même
si le malade comme le médecin peuvent avoir la conviction d’avoir deviner l’allocation du traitement (médicament
ou placebo) grâce aux effets perceptibles du médicament
(effets désirés ou indésirables), il persistera le doute jusqu’à
la fin de l’étude. Au niveau individuel, la procédure double
insu conserve là tout son intérêt. De plus, si l’on peut penser
que le respect du double insu peut être difficile à assurer dans certaines situations (où les effets indésirables des
médicaments sont importants et plus fréquents que dans le
groupe traité par placebo par exemple), il reste à démontrer
que cette rupture d’insu a une influence sur les critères de
jugement ou sur sa mesure. En effet, cette rupture d’insu
n’est d’abord que « potentielle ». D’une part, les malades
et les investigateurs n’ont pas de certitudes concernant la
prise de médicament ou du placebo, et d’autre part, il peut
exister des effets indésirables sous placebo. Ensuite, si l’on
peut penser que certains symptômes subjectifs sont sensibles à l’auto ou l’hétérosuggestion (comme l’anxiété, les
Conclusion
L’ECR reste le meilleur moyen actuel d’évaluer l’efficacité
des médicaments. Néanmoins, il semble que l’on puisse
encore améliorer sa validité interne par deux moyens :
• Tout d’abord, l’étude des taux d’effets indésirables entre
les deux groupes peut être un moyen de suspecter une
rupture du double insu. La survenue d’effets indésirables
plus fréquente sous traitement que sous placebo peut être
responsable d’un biais lié à la connaissance du traitement
reçu par le patient, voire le médecin, dans la mesure
où cette connaissance peut soit influencer le paramètre
choisi pour estimer l’effet du médicament, soit affecter
sa mesure.
• Mais surtout, la vérification systématique du respect de la
procédure double insu, en demandant aux patients et aux
investigateurs s’ils ont deviné l’allocation des traitements
(sachant qu’ils auront au moins une chance sur deux d’y
parvenir au hazard), est le meilleur moyen de vérifier la
procédure double insu.
Quant on sait que l’absence de double insu peut surestimer l’effet du médicament de 17 à 34 % [27,35], l’enjeu
d’une telle vérification peut être important lorsque la différence clinique entre le médicament et le placebo est
faible comme c’est le cas avec les antidépresseurs [28].
Mais, l’impact d’une éventuelle rupture du double insu
reste malgré tout à évaluer. Si elle est bien respectée,
on peut considérer que l’effet placebo est identique entre
les deux groupes et que les biais liés à la connaissance du
traitement sont minimes, voire inexistants. La différence
peut être attribuée au médicament, même si son efficacité
peut être amplifiée par des phénomènes de suggestion ou
d’anticipation liés à la croyance d’avoir pris un « vrai » médicament. Même si cette efficacité est potentialisée, on peut
alors affirmer que le médicament présente une efficacité
propre, distincte de l’effet placebo et transposable dans la
pratique clinique.
Quelques réflexions sur le double insu
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