Cellules tumorales et ADN libre circulant thématique La biopsie liquide en oncologie : le temps est-il venu ? Paul Hofman Coordonnateur du dossier Laboratoire de pathologie clinique et expérimentale, Institute for Research on Cancer and Aging (IRCAN), Inserm, U1081/UMR CNRS 7284, université de Nice Sophia­Antipolis. L a notion de biopsie liquide définit l’analyse d’un échantillon sanguin pour apprécier des biomarqueurs diagnostiques, pronostiques ou “théranostiques” chez des patients atteints d’un cancer. Ainsi, au même titre que la “biopsie tissulaire”, la biopsie liquide pourrait être bientôt prescrite par le médecin oncologue dans le cadre de l’offre de soins aux patients cancéreux. L’étude de la biopsie liquide peut s’orienter vers l’analyse de plusieurs facteurs circulants différents, en particulier les cellules tumorales circulantes, l’ADN tumoral libre circulant, ou d’autres facteurs, comme les micro-ARN plasmatiques. Plusieurs raisons devraient conduire à l’arrivée prochaine de la biopsie liquide pour l’optimisation de la prise en charge des patients atteints d’un cancer solide. Elles sont reprises dans les différents articles de ce numéro thématique. On peut ainsi brièvement souligner que cette approche non invasive permettrait de mieux “monitorer” les patients, soit après la résection chirurgicale de leur tumeur pour appréhender précocement une éventuelle progression tumorale et métastatique, soit pour suivre l’efficacité d’une chimiothérapie ou d’une thérapie ciblée. La biopsie liquide peut aussi participer à une médecine stratifiée sur les différentes altérations génomiques sensibles aux nouvelles thérapies et à la détection précoce des mutations de résistances secondaires à ces traitements. Compte tenu de l’hétérogénéité moléculaire tumorale possible à la fois sur la tumeur primitive et sur les sites métastatiques, l’étude des altérations génomiques réalisée à partir du sang pourrait être le reflet d’un “statut moléculaire global” de la prolifération tumorale et permettre de donner le meilleur traitement adapté à ces anomalies moléculaires. Au-delà de l’intérêt pour le pronostic et le ciblage thérapeutique, la biopsie liquide pourrait permettre un diagnostic plus précoce de certains cancers ou bien orienter vers l’origine primitive d’une prolifération en cas de métastase occulte. Malgré toutes ces promesses, certains écueils empêchent encore une application immédiate de la biopsie liquide en routine quotidienne. La spécificité et la sensibilité des différentes techniques utilisées doivent être contrôlées sur de larges cohortes de patients grâce à des validations multicentriques. L’impact socioéconomique de cette approche doit être finement évalué. Enfin, la faisabilité médicotechnique et le développement des techniques doivent être appréciés pour une mise en place au quotidien dans la plupart des établissements de soins. Ainsi, l’analyse tissulaire et cellulaire des biomarqueurs oncologiques reste incontournable à ce jour, mais pourrait aussi être optimisée dans le futur grâce à ces analyses réalisées à partir des biopsies liquides. Correspondances en Onco-Théranostic - Vol. II - n° 4 - octobre-novembre-décembre 2013 INTRODUCTION dossier P. Hofman déclare ne pas avoir de liens d’intérêts. 161