Adaptation d’un modèle d’équilibre général calculable

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Sébastien Houde
Adaptation d’un modèle d’équilibre général calculable
aux politiques pour lutter contre les changements
climatiques
Mémoire présenté
à la Faculté des études supérieures de l ’Université Laval
dans le cadre du programme de maîtrise en économique
pour l’obtention du grade de Maîtrise (M.A.)
Département d’économique
Faculté des sciences sociales
Université Laval
Québec
© Sébastien Houde, 2005
2005
Economy is the basis of society. When
The economy is stable, society develops.
The ideal economy combines the spiritual
and materials, and the best commodities to
trade in are sincerity and love.
-Morihei Ueshiba
Remerciements
Ce travail de recherche a été rendu possible grâce au financement du groupe de recherche
en économie de l’énergie, de l’environnement et des ressources naturelles (GREEN) et du
Ministère de l’Environnement du Québec. Je remercie Louise et Normand qui m’ont
toujours apporté un soutien moral et financier durant mes études. Je remercie mon
directeur de recherche, Michel Roland, d’abord pour m’avoir initié à la recherche et aussi
pour m’avoir suivi et aidé dans toutes les étapes du cheminement du mémoire. Je
remercie mon co-directeur de recherche, Bernard Decaluwé, pour avoir partagé sa
connaissance des modèles d’équilibre général calculables et sa connaissance de la science
économique en général. Je remercie aussi Nabil Annabi pour m’avoir aidé à solutionner
de nombreux problèmes techniques et des problèmes de programmation avec le logiciel
GAMS. Je remercie spécialement Sandra et Louise pour m’avoir aidé à la correction du
mémoire.
Je dédie ce mémoire à ceux et celles sur la voie de l’harmonie et particulièrement à AnneMarie, témoin et complice de toutes les heures que j’ai passées à travailler sur ce projet;
une source infinie d’enthousiasme, d’humour et surtout d’amour.
Résumé
Nous adaptons un modèle d’équilibre général calculable (MEGC) de l’économie
canadienne à l’étude des politiques pour lutter contre les changements climatiques. Bien
que le modèle adapté puisse servir à simuler plusieurs types de politiques, nous nous
concentrons sur les systèmes de permis échangeables (SPÉ). Nous introduisons ainsi un
SPÉ et les caractéristiques ayant une influence sur l’estimation de l’ampleur et la
répartition de son fardeau. Ces caractéristiques sont la sphère énergétique de l’économie,
les émissions de gaz à effets de serre anthropogéniques, le format du SPÉ et les
ajustements des agents aux politiques. Pour chaque caractéristique, nous relevons de la
littérature différentes approches pour les introduire dans un MEGC. Nous proposons
ensuite une approche et nous la simulons. Nous concluons que, pour adapter un MEGC
aux changements climatiques, les quatre caractéristiques sont importantes à considérer,
car elles ont une grande incidence sur l’ampleur et la répartition du fardeau du SPÉ.
V
Table des matières
Introduction …………………………………………………………………….. p.1
Chapitre 2 Une matrice de comptabilité sociale et un MEGC
de l’économie canadienne ……………..………………………..p.5
2.1 Fondements théoriques des MEGC …………………………………………… p.5
2.2 Une matrice de comptabilité sociale canadienne …………………………….. p.6
2.2.1 La MCS bi-régionale agrégée
du Ministère des Finances du Québec …………………………….. p.6
2.2.2 Notre MCS canadienne ……………………………………………. p.8
2.3 La structure d’un MEGC de base canadien: EXTER-C ………………………
2.3.1 Le bloc de la production …………………………………………….
2.3.2 Le bloc du revenu et de l’épargne …………………………………..
2.3.3 Le bloc de la demande ……………………………………………....
2.3.4 Le bloc des prix ……………………………………………………..
2.3.5 Le bloc du commerce international …………………………………
2.3.6 Le bloc des conditions d’équilibre ………………………………….
p.10
p.10
p.12
p.15
p.16
p.18
p.19
Annexe 2.1 : Matrice de comptabilité sociale du Canada,
interprétations et données réelles ……………………..……...…….. p.21
Annexe 2.2 : Variables et paramètres exogènes d’EXTER-C ………....…………. p.25
Chapitre 3 La sphère énergétique ……………………….……..………….… p.27
3.1 Revue de littérature ……………………………………………………………
3.1.1 La demande d’énergie ………………………………………………
3.1.1.1 L’énergie et les ménages ……………………………………...
3.1.1.2 La demande d’énergie par les producteurs ……………….......
3.1.1.2.1 Les approches top-down, bottom-up et hybride ………..
3.1.1.2.2 Structure de la production sous les approches
top-down et hybride …………………………………….
p.27
p.27
p.27
p.28
p.28
p.29
VI
3.1.2 L’offre d’énergie ………………………………………………….... p.30
3.2 Protocole de modélisation d’un MEGC avec une sphère
énergétique : le modèle ENER-J ……………………………………………… p.31
3.3
Les données …………………………………………………………………. p.35
3.3.1 Les données utilisées ………………………………………………... p.35
3.3.2 Le traitement des données ………………………………………….. p.36
Annexe 3.1 : Matrice de comptabilité sociale du Canada
avec sphère énergétique, données réelles ………………………….. p.38
Chapitre 4 Les émissions de gaz à effet
de serre anthropogéniques ……………………………………….. p.40
4.1 Revue de littérature …………………………………………………….……… p.40
4.1.1 Les émissions de GES en tant qu’externalité négative ………….….. p.40
4.1.2 Les émissions de GES en tant qu’input …………………………….. p.42
4.2 Protocole de modélisation d’un MEGC avec émissions de GES
anthropogéniques : le modèle ENVIRON ……………………………….…… p.42
4.3 Les données …………………………………………………………………... p.42
Chapitre 5 Le système de permis échangeables …………………..………. p.46
5.1 Fondements théoriques du système de permis échangeables (SPÉ) ……….…. p.47
5.2 Le SPÉ dans les MEGC …………….………………..…………………….…. p.49
5.2.1 Revue de littérature …………………………..…………………..…. p.49
5.2.2 Protocole de modélisation pour introduire un SPÉ
dans un MEGC: le modèle POLENVI ……………..………………. p.51
5.2.2.1 SPÉ avec allocation aux enchères …………………………..… p.51
5.2.2.2 SPÉ avec allocation gratuite des permis fonction d’un
niveau de production passé
(allocation des permis grand-père) …………………….……… p.54
5.3 Impacts structurels d’un SPÉ …………………………………..……….……... p.56
VII
5.3.1 Un SPÉ simple : POLENVI_1 ………………………….………...… p.56
5.3.1.1 Protocole de modélisation de POLENVI_1 …………...………. p.56
5.3.1.2 Simulation de POLENVI_1 ………………………………..….. p.56
5.3.1.2.1 Analyse du mécanisme déterminant
le prix du permis ………………………………….….… p.57
5.3.1.2.2 Analyse des impacts structurels ……………………..…... p.58
5.3.2 Un SPÉ couvrant les émissions fugitives : POLENVI_2 ...….……. p.60
5.3.2.1 Protocole de modélisation de POLENVI_2 ……………....…... p.60
5.3.2.2 Simulation de POLENVI_2 ……………………………..…..… p.61
5.3.2.2.1 Analyse du mécanisme déterminant
le prix du permis …………………………………...…... p.61
5.3.2.2.2 Analyse des impacts structurels …………………….…… p.61
5.3.3 Un SPÉ ne couvrant que l’industrie : POLENVI_3 ….………….….. p.62
5.3.3.1 Protocole de modélisation de POLENVI_3 ………..………….. p.62
5.3.3.2 Simulation de POLENVI_3 ………………………………...…. p.63
5.3.3.2.1 Analyse des impacts structurels ……………………..….. p.63
5.3.3.2.2 Courbe de coût marginal de dépollution
du secteur industriel ……………………………….…..... p.63
5.3.4 Un SPÉ avec achats de permis internationaux : POLENVI_4 …….... p.66
5.3.4.1 Protocole de modélisation de POLENVI_4 ………………...…. p.66
5.3.4.2 Simulation de POLENVI_4 ………………………………..….. p.67
5.3.4.2.1 Ampleur du fardeau pour le gouvernement canadien .…... p.67
5.3.4.2.2 Analyse des impacts structurels ……………………….… p.68
5.4 La neutralité de la méthode d’allocation des permis : POLENVI_5 ……….…. p.69
5.4.1 Les distorsions du système fiscal ………………………………….... p.69
5.4.2 Revue de littérature ………………………………………………..... p.70
5.4.3 Protocole de modélisation de POLENVI_5 ……………..………..... p.71
5.4.4 Simulation de POLENVI_5 ………………………………………... p.72
5.5 Conclusion ……………………………………………………………...…….. p.74
Annexe 5.1 Une sélection des résultats de POLENVI ……………………………. p.76
VIII
Chapitre 6 Les ajustements des agents aux
politiques environnementales ........……………………………… p.80
6.1 Les ajustements dynamiques ……………………………………….…………. p.81
6.1.1 Revue de littérature ………………………………………….………. p.82
6.1.1.1 Les MEGC dynamiques séquentiels ……………….…….….... p.82
6.1.1.2 Les MEGC dynamiques inter-temporels …………...………… p.83
6.1.2 Protocole de modélisation d’un MEGC dynamique séquentiel :
ENDYMO ……………………………………………………..….…. p.84
6.1.3 Simulation d’ENDYMO …………………………………….…….… p.85
6.2 Les effets de substitution ……………………………………………………… p.89
6.2.1 Les effets de substitution inter-énergétiques ………………………... p.89
6.2.1.2 Protocole de modélisation d’un MEGC avec de faibles
possibilités de substitution énergétique : le modèle SASUE …. p.89
6.2.1.2 Simulation de SASUE ………………………………...…….… p.90
6.2.1 Les effets de substitution inter-factoriels ……………………………. p.91
6.2.1.1 Revue de littérature …………………………………..………... p.91
6.2.1.2 Protocole de modélisation d’un MEGC avec possibilités de
substitution inter-factorielles : le modèle INTERFAC …….…p.92
6.2.1.3 Les données ……………………………………………….……p.94
6.2.1.4 Simulation d’INTERFAC …………………...………………… p.95
6.3 Le changement technologique …………………………………………...…… p.96
6.3.1 Le changement technologique exogène ………………………….….. p.96
6.3.1.1 Revue de littérature ………………………………………….... p.97
6.3.1.2 Protocole de modélisation d’un MEGC avec changement
technologique exogène : le modèle EXOTECH ……….…….... p.98
6.3.1.3 Simulation d’EXOTECH ……………………………..…….… p.98
6.3.2 Le changement technologique endogène ……………………….….... p.100
6.3.2.1 Revue de littérature ………………………………………..…... p.100
6.3.2.1.1 L’approche de Dellink et al. (2004) ……………...……... p.101
6.3.2.1.1.1 Les extensions de l’approche de Dellink et al. .….... p.103
6.3.2.1.1.2 L’approche de Capros et al. (1999) ………...….….. p.103
6.3.2.2 Protocole de modélisation d’un MEGC avec changement
technologique endogène : le modèle ENDOTECH ..….…... p.104
IX
6.3.2.3 Les données ………………………………………………...…. p.109
6.3.2.4 Simulation d’ENDOTECH ………………………..………...... p.109
6.4 Conclusion …………………………………………………………….……… p.112
Annexe 6.1 Matrice de comptabilité sociale du Canada avec technologies de
dépollution et prix du permis égal à un (données réelles) ………….... p.113
Conclusion …………………….………………………………………………… p.115
Bibliographie …………………………………………………….……………… p.118
X
Liste des tableaux
Chapitre 2
Tableau 2.1 : Matrice de comptabilité sociale
du Canada (interprétations) ………….…………….…. p.21-22
Tableau 2.2 : Matrice de comptabilité sociale
du Canada (données réelles) ……………………….…. p.23-24
Tableau 2.3 : Variables exogènes d’EXTER-C …………………..…..p.25
Tableau 2.4 : Paramètres exogènes d’EXTER-C …………………… p.26
Chapitre 3
Tableau 3.1 : Matrice de comptabilité sociale du Canada
avec sphère énergétique (données réelles) ……....…… p.38-39
Chapitre 4
Tableau 4.1 : Données sur les émissions du CREAP et coefficients
d’émissions …………………………………………… p.44
Tableau 4.2 : Émissions de GES dérivée des valeurs
de la MCS du Canada …………………………….……p.44
Tableau 4.3 : Émissions fugitives pour les secteurs de
l’agriculture et de l’industrie ………………….………. p.45
Chapitre 5
Tableau 5.1 : Coût marginal de dépollution du secteur industriel et
paramètre de la fonction de coût marginal
de dépollution ………………………………………..…p.64
Tableau 5.2 : Une sélection des résultats des simulations des cinq
scénarios de POLENVI ………………………..……... p.76-79
Chapitre 6
Tableau 6.1 : Élasticité de substitution pour les agrégats énergie/capital
et énergie/valeur ajoutée ……………………………… p.95
Tableau 6.2 : Matrice de comptabilité sociale du Canada avec
technologies de dépollution et prix du permis
égal à un (données réelles) ………………………..….. p.113-114
XI
Liste des figures
Chapitre 3
Figure 3.1 : Structure de production dans ENER-J …………………….…. p.33
Figure 3.2 : Compte de la production du CREAP …………………….…... p.36
Figure 3.3 : Compte des intrants du CREAP ………………………….…... p.36
Figure 3.4 : Transformation du compte des intrants du CREAP pour
expliciter les secteurs énergétiques ……………………….….. p.37
Chapitre 4
Figure 4.1 : Structure de production d’ENVIRON …………………….….. p.43
Chapitre 5
Figure 5.1 : Détermination du prix du permis dans un SPÉ ………………. p.48
Figure 5.2 : Égalité des coûts marginaux de dépollution dans un SPÉ ….…p.48
Figure 5.3 : Détermination du prix du permis dans le SPÉ
de POLENVI_1 ………………………………………….……p.58
Figure 5.4 : Courbe de coût marginal de dépollution pour l'
industrie …….. p.65
Figure 5.5 : Perte sèche d’un impôt sur le revenu …………….……………p.70
Chapitre 6
Figure 6.1 : Volume d’émissions de GES lié à la combustion de
l’énergie de tous les secteurs productifs dans ENDYMO
avec et sans SPÉ ………………………………………….…...p.86
Figure 6.2 : Prix d’équilibre du permis dans ENDYMO …………….……. p.86
Figure 6.3 : Part de marché du charbon dans ENDYMO
avec et sans SPÉ ……………………………………….……...p.87
Figure 6.4 : Prix au coût des facteurs du charbon dans ENDYMO
avec et sans SPÉ ………………………………………….…...p.88
Figure 6.5 : Prix d’équilibre du permis dans SASUE et ENDYMO …….... p.90
Figure 6.6 : Structure de production d’INTERFAC ………………..……... p.93
Figure 6.7 : Prix d’équilibre du permis dans ENDYMO et INTERFAC …..p.95
XII
Figure 6.8 : Niveau d’émissions du scénario de référence dans
INTERFAC et EXOTECH ………………………………….. p.98
Figure 6.9 : Prix d’équilibre du permis dans EXOTECH
et INTERFAC ………………………………….………….…. p.99
Figure 6.10 : Proportion de l’énergie dans la production totale pour
l’industrie dans EXOTECH et INTERFAC ……….………... p.99
Figure 6.11: Structure de la production du modèle de Dellink et al. (2002) .p.102
Figure 6.12 : Structure de production d’ENDOTECH ………….……….…p.106
Figure 6.13 : Prix d’équilibre du permis dans ENDOTECH
et EXOTECH …………………………………….……….… p.110
Figure 6.14 : Demande intermédiaire du charbon dans ENDOTECH
et ENDYMO ………………………………………..……….p.110
Figure 6.15 : Ratio de la demande intermédiaire, en volume, du charbon
sur celle des autres énergies fossiles dans ENDOTECH
avec et sans SPÉ …………………………………….……….p.111
Figure 6.16 : Ratio de la production totale du secteur des technologies de
dépollution du charbon sur celle du secteur des technologies
de dépollution des autres énergies fossiles dans
ENDOTECH avec et sans SPÉ ……………………….……..p.111
Introduction
C’est depuis la Convention-Cadre des Nations Unies sur les changements climatiques
(CCNUCC) de 1992 que les changements climatiques ont été reconnus comme un
problème environnemental global. La CCNUCC, sans être contraignante, stipule que la
réglementation des émissions de gaz à effets de serre (GES) anthropogéniques est
devenue un objectif souhaitable. C’est avec le Protocole de Kyoto, adopté en 1997, que la
communauté internationale s’est dotée d’un outil légal pour contraindre les émissions de
GES. Les États ayant ratifié le Protocole s’engagent à diminuer de 5,2% les émissions
annuelles de GES par rapport à 1990 et ce, d’ici à la fin de la période 2008-2012.
Dans l’élaboration d’un cadre pour lutter contre les changements climatiques, la
modélisation économique contribue à formuler des alternatives et à les évaluer en
permettant de montrer le fonctionnement des différentes politiques, de juger de leur
efficacité et d’estimer l’ampleur de même que la répartition du fardeau économique
qu’elles généreront. Dans la littérature, de même qu’auprès des décideurs politiques, les
modèles d’équilibre général calculables (MEGC) se sont avérés des modèles
économiques d’une grande popularité pour formuler et évaluer les différentes politiques
pour lutter contre les changements climatiques.
La popularité des MEGC au domaine des changements climatiques repose sur deux faits.
•
Premièrement, les politiques pour réduire les émissions de GES concernent
prioritairement le secteur de l’énergie. Or, l’énergie interagit avec plusieurs
marchés de l’économie de façon directe et indirecte, ce que les MEGC peuvent
comptabiliser.
•
Deuxièmement, les MEGC peuvent quantifier le coût de politiques qui n’ont pas
de précédents, comme le contrôle des émissions de GES.
L’objectif de notre travail de recherche est d’adapter un MEGC de l’économie
canadienne à l’étude des politiques pour lutter contre les changements climatiques.
Les MEGC portant sur les changements climatiques ont une grande hétérogénéité dans
leur structure et les caractéristiques qu’ils considèrent. Pour les modélisateurs et les
utilisateurs de ces modèles, cette disparité pose deux problèmes. Premièrement, il n’y a
Introduction
2
pas de procédure formelle pour adapter un MEGC aux changements climatiques.
Deuxièmement, cela crée une grande variabilité dans les résultats entre différents
modèles. À titre illustratif, Weyant et Hill (1999) ont relevé que, pour seize MEGC
différents, l’estimation du coût marginal de dépollution des émissions de GES variait
d’un facteur de cinq. Ces problèmes ont déterminé la façon de procéder à notre travail
d’adaptation.
Notre point de départ est d’identifier les caractéristiques fondamentales aux MEGC
portant sur les changements climatiques. Pour chacune de ces caractéristiques, nous
faisons systématiquement trois exercices. Premièrement, nous relevons de la littérature
les approches pour modéliser une caractéristique donnée. Nous voulons ainsi identifier
l’approche la plus commune ou celle qui semble en voie de devenir la norme.
Deuxièmement, nous proposons un protocole de modélisation pour introduire une de ces
approches dans un MEGC de base. Cet exercice nous permet d’identifier les problèmes
méthodologiques. Troisièmement, lorsque cela est pertinent, nous simulons l’approche
retenue. Le fonctionnement et l’incidence sur les résultats de chacune des approches sont
ainsi illustrés.
D’après Fischer et Morgenstern (2003) les principaux éléments à la source de la
variabilité dans les résultats entre les modèles économiques portant sur les changements
climatiques sont :
• le niveau de désagrégation de la sphère énergétique
•
le scénario de base quant aux émissions de GES anthropogéniques
•
le type de politique environnementale
•
la structure des modèles quant aux ajustements des agents aux politiques.
Nous considérons les quatre éléments identifiés par Fischer et Morgenstern (2003)
comme étant les caractéristiques fondamentales des MEGC portant sur les changements
climatiques. Chacune des caractéristiques fondamentales est l’objet d’un chapitre.
Au chapitre 2, nous présentons le MEGC de base servant à l’incorporation des
caractéristiques fondamentales. Nous présentons les données nécessaires à sa
construction et sa structure. Ce MEGC représente l’économie canadienne. Cette étape est
importante, car le format du MEGC de base contraint les extensions possibles.
Le chapitre 3 porte sur la sphère énergétique, la première étape dans l’adaptation d’un
MEGC aux changements climatiques. Cette étape permet d’expliciter la cause des
Introduction
3
émissions de GES anthropogéniques et de représenter les interactions entre les marchés
de l’énergie et le reste de l’économie. La modélisation de la sphère énergétique dans un
MEGC est particulièrement dépendante des données disponibles. Nous présentons donc
en détail le traitement des données. Aucune simulation n’est pertinente à ce niveau.
Le chapitre 4 introduit les émissions de GES anthropogéniques, l’objet de la lutte aux
changements climatiques, dans le MEGC. Il s’agit alors de représenter adéquatement les
niveaux d’émissions de GES anthropogéniques par rapport à leurs différentes sources. Le
traitement des données joue alors un rôle crucial.
Suite à l’introduction des émissions de GES anthropogéniques, il est possible de les
réglementer. Le chapitre 5 porte donc sur les politiques environnementales, l’objet
d’étude des MEGC portant sur les changements climatiques. Étant donné que dans le
débat sur les changements climatiques, le système de permis échangeables (SPÉ) a
occupé une place centrale, nous nous concentrons sur les aspects liés à la modélisation de
cet outil de marché. Plus particulièrement, nous voulons maîtriser la méthodologie pour
développer un MEGC permettant l’analyse des impacts structurels du SPÉ et l’étude de la
neutralité de la méthode d’allocation des permis. Il s’agit des deux questions les plus
communément étudiées dans les MEGC introduisant un SPÉ. Après avoir relevé les
différentes approches pour modéliser un SPÉ dans un MEGC et proposé un protocole de
modélisation de base, nous modélisons et simulons cinq scénarios quant aux modalités de
notre SPÉ. Nous commençons par considérer un scénario où le SPÉ couvre les émissions
de GES liées à la combustion de l’énergie de tous les secteurs productifs de l’économie.
Par la suite, nous considérons un SPÉ semblable au précédent, mais couvrant en plus les
émissions dites fugitives. Ces deux scénarios montrent le fonctionnement du SPÉ dans
notre modèle, ce qui est une condition nécessaire à la maîtrise du travail d’analyse des
impacts structurels. Nous présentons un troisième scénario où le SPÉ ne couvre que les
émissions liées à la combustion de l’énergie pour le secteur industriel. Ce scénario
montre le fonctionnement lorsqu’un secteur précis est visé, comme ce sera probablement
le cas au Canada. Ce troisième scénario montre aussi une application possible des
MEGC, soit estimer les courbes de coût marginal de dépollution d’une région ou d’un
secteur donné. Pour le quatrième scénario, un marché international des permis est
considéré. Ce scénario montre le fonctionnement d’un SPÉ national intégré dans un SPÉ
international. Le cinquième scénario considère un SPÉ où les permis sont vendus aux
enchères et où les revenus servent à diminuer les taxes préexistantes de l’économie. Ce
scénario sert à maîtriser la méthodologie pour l’étude de la neutralité de la méthode
Introduction
4
d’allocation des permis. Nous montrons que dès que les taxes induisent des distorsions, le
recyclage des revenus du SPÉ compromet la neutralité de la méthode d’allocation.
Le chapitre 6 porte sur les ajustements des agents aux politiques. Face à une politique
environnementale, les ajustements des agents aux politiques sont, à court terme, la
réduction de l’activité économique, à court et moyen termes, la substitution entre les
intrants et, à plus long terme, le changement technologique. Ces ajustements sont des
caractéristiques fondamentales des MEGC parce que la façon de modéliser ces trois types
d’ajustements dans les MEGC a une grande incidence sur les résultats (Burniaux et
Truong 2002, Fischer et Morgenstern 2003). Les ajustements sur lesquels nous nous
concentrons dans le chapitre 6 sont la substitution entre les intrants énergétiques, la
substitution entre les intrants énergétiques et non énergétiques ainsi que le changement
technologique exogène et endogène. Dans ce chapitre, nous traitons aussi de la nature
dynamique des ajustements. Nous verrons que l’étude des ajustements des agents aux
politiques peut s’avérer coûteuse en termes de modélisation et de données. Nous
adoptons le principe de parcimonie. Les approches que nous retenons pour notre modèle
s’avèrent celles qui permettent d’enrichir notre MEGC à moindre coût.
Chapitre 2 : Une matrice de comptabilité sociale et MEGC de l’économie canadienne
5
Chapitre 2
Une matrice de comptabilité sociale et
un MEGC de l’économie canadienne
Après une présentation succincte des fondements théoriques des MEGC, ce chapitre
présente un MEGC de base et les données nécessaires à sa construction. Les données sont
celles de l’économie canadienne. Elles sont présentées sous la forme d’une matrice de
comptabilité sociale. Le modèle présenté dans ce chapitre est le point de départ pour la
modélisation et la simulation des différentes caractéristiques fondamentales des MEGC
portant sur les changements climatiques.
2.1 Fondements théoriques des MEGC
Les MEGC reposent sur la théorie de l’équilibre général concurrentiel attribuable à
Walras et formalisée par Arrow et Debreu (1954) et McKenzie (1954). La force d’un
modèle reposant sur cette théorie provient :
•
•
•
de sa capacité à représenter et comptabiliser les transactions entre les différents
secteurs et marchés de l’économie, qui peuvent être représentés par centaines ;
à caractériser le comportement des agents, qui peuvent aussi être nombreux, selon
la théorie micro-économique;
à utiliser des prix qui tiennent compte du phénomène de rareté et du traitement
fiscal.
Par différents algorithmes de résolution (Scarf, 1973), les MEGC déterminent une
solution numérique où une frontière de prix relatif unique assure l’équilibre entre l’offre
et la demande dans tous les marchés. Un système de prix relatifs implique qu’un choc
donné se répercute dans tous les marchés selon diverses interactions directes, indirectes et
effets de rétroactions. Les MEGC sont donc un outil pour l’analyse de politiques. Cet
outil permet de quantifier l’ampleur du fardeau d’une politique, mais surtout sa
répartition dans l’économie.
Chapitre 2 : Une matrice de comptabilité sociale et MEGC de l’économie canadienne
6
2.2 Une matrice de comptabilité sociale canadienne
D’après Decaluwé et al. (2001), les étapes suivant l’identification de la problématique
dans le processus de construction et de simulation d’un MEGC sont la collecte de
données et la construction d’un cadre comptable cohérent avec l’équilibre général. Ces
deux étapes se résument habituellement à la construction d’une matrice de comptabilité
sociale (MCS)1. Une MCS donne « (…) les équilibres comptables qui doivent
nécessairement être satisfaits à la période ou au moment du temps observé, pour les
différentes catégories de flux ou de stocks. »2 Les transactions entre les différents agents
de l’économie, autant du côté des dépenses que du côté des revenus, y sont représentées.
La convention habituelle est que la lecture horizontale d’une MCS donne la ventilation
des revenus de chaque compte tandis que sa lecture verticale donne la ventilation des
dépenses pour ces mêmes comptes. Nous respectons cette convention.
La construction d’une MCS soulève plusieurs difficultés. Notamment, la disponibilité et
la disparité des sources d’approvisionnement des données sont causes de déséquilibres et
d’incohérences auxquels les modélisateurs doivent pallier. La construction d’une MCS
pourrait faire à elle seule l’objet d’un projet de mémoire.
Pour ce mémoire, l’étape de la construction d’une MCS a été court-circuitée étant donnée
l’existence et la disponibilité d’une MCS bi-régionale canadienne. Cette MCS, publiée
par le Ministère des Finances du Québec, détaille « (…)les économies du Québec et du
reste du Canada ainsi que les interactions entre les deux régions pour l’année de base
1996. »3 La MCS publiée est la version agrégée de celle qu’utilise le Ministère des
Finances du Québec dans leurs travaux de recherche et de simulations de politiques.
Notre travail sur les données n’en est donc pas un de construction, mais un de
transformation d’une MCS. Pour exposer clairement les transformations faites sur cette
MCS, nous présentons d’abord sa forme originale.
2.2.1 La MCS bi-régionale agrégée du Ministère des Finances du
Québec
La terminologie bi-régionale attribuable à une MCS signifie qu’un détail identique est
apporté à deux régions. D’autres régions peuvent également y être représentées, mais à
moindre niveau de détail. Par exemple, la MCS du Ministère des Finances du Québec
1
Les données utilisées dans les MEGC ne sont pas obligatoirement organisées avec une MCS, mais ce sont
sans contredit la majorité des MEGC qui reposent sur ce cadre comptable.
2
Decaluwé et al., (2001), p.96
3
Bahan et al., (2003), p.1
Chapitre 2 : Une matrice de comptabilité sociale et MEGC de l’économie canadienne
7
donne une représentation précise entre deux régions, le Québec et le reste du Canada
(RdC), et inclut une troisième région au niveau agrégé, le reste du monde (RdM).
Dans cette MCS, trois niveaux de gouvernement sont représentés pour chacune des
régions représentées, soit les gouvernements locaux, les gouvernements provinciaux et le
gouvernement fédéral. Il y a une distinction entre les revenus, les transferts et les
dépenses pour chacun de ces paliers de gouvernement.
Pour les régions du Québec et du RdC, les ménages sont répartis en six classes de
revenus. Les revenus de ces ménages sont constitués des salaires de travail, des revenus
de placement et des transferts. Ces transferts proviennent des différents paliers de
gouvernements, du RdM, des entreprises et du reste des ménages. Les dépenses des
ménages sont ventilées entre les impôts, la consommation, l’épargne, les placements et
les transferts. Les dépenses de consommation sont regroupées selon les achats de biens
durables, de biens non durables et de services.
Les transactions des entreprises sont regroupées dans un seul compte. Les entreprises
sont donc un agent à part entière de l’économie. Le détail de la ventilation des revenus et
des dépenses est sensiblement identique à celui des ménages.
Le côté productif de l’économie se limite à trois branches d’activité : le secteur des biens,
le secteur des services marchands et le secteur des services non marchands. Le secteur
des biens et celui des services marchands sont les branches dites commerciales. La
branche des services non marchands correspond à la production des différents paliers de
gouvernement. À chaque branche est associé un produit portant le même nom.
Les facteurs primaires de production sont au nombre de deux : le travail et le capital.
Pour le capital, l’amortissement est enregistré au même compte que l’épargne des agents,
soit à celui de l’accumulation.
Une caractéristique particulière de la MCS est la désagrégation des comptes des produits.
Il y a quatre comptes des produits : les comptes des produits de consommation, les
comptes des produits intermédiaires, les comptes des produits d’investissement et les
comptes des produits composites. L’expression « produit composite » réfère à
l’utilisation intérieure4 que les agents font des biens et services. Ces comptes « (…) font
4
« Intérieur » pour à l’intérieur de chaque région.
Chapitre 2 : Une matrice de comptabilité sociale et MEGC de l’économie canadienne
8
la réconciliation entre l’offre et la demande de chaque bien et service (…) »5 et ce, pour
les deux régions. La désagrégation des comptes composites en plusieurs sous-comptes a
pour but de détailler le traitement fiscal des produits composites selon qu’ils sont utilisés
dans des activités de consommation, de production ou d’investissement. Il faut noter que
pour les produits d’investissement, il y a une distinction entre les investissements en
machine et matériel, les constructions et les stocks.
La présence de l’agent RdM implique l’existence d’un compte pour le marché des
importations, qui contribue à augmenter l’offre des produits, et l’existence d’un compte
pour le marché des exportations, qui constitue la demande extérieure. La présence de
commerce international donne aussi naissance à un troisième compte, celui des
réexportations. Les réexportations correspondent à des biens et services importés et qui
transigent au Canada sans qu’une quelconque transformation ne leur soit apportée. Le
RdM rachète ces biens sur lesquels s'
applique une marge sur le transport. Dans le système
de comptabilité nationale, les réexportations sont habituellement agrégées avec le compte
des importations.
Ce sont là les principales caractéristiques de la MCS bi-régionale agrégée qui est publiée
par le Ministère des Finances du Québec. Une lectrice ou un lecteur intéressé par les
méthodes utilisées pour résoudre les problèmes de construction de la présente matrice
devrait se référer à Bahan et al. (2003).
2.2.2 Notre MCS canadienne
La première transformation que nous avons apportée à la MCS du Ministère des Finances
du Québec a été l’agrégation du Québec et du reste du Canada, pour avoir une MCS ne
portant que sur le Canada dans son ensemble. Nous avons donc regroupé les comptes des
deux régions.
Nous avons jugé que le fait de considérer le Canada dans son ensemble ne rendait plus
nécessaire le fait de différencier les gouvernements provinciaux du gouvernement
fédéral. De plus, la présence des gouvernements locaux n’était pas réellement pertinente
pour nos simulations. Les trois paliers de gouvernement ont donc été agrégés en une
seule entité.
L’impact d’une politique environnementale n’est sûrement pas le même pour les
différentes catégories de ménages d’une économie. Nous croyons cependant que le
5
Bahan et al., (2003), p.6
Chapitre 2 : Une matrice de comptabilité sociale et MEGC de l’économie canadienne
9
simple classement des ménages par tranche de revenus ne soit pas suffisant pour analyser
ce type de questions. Étant donné que ces questions ne sont pas l’objectif central de notre
recherche et que leur coût d’opportunité en termes de recherche de données et de
modélisation sont non négligeables, nous ne faisons pas de désagrégation par catégories
de ménages. Notre matrice n’a donc qu’un agent représentatif pour les ménages.
Par souci de simplicité, nous avons aussi éliminé la distinction entre les différents
comptes des produits et le classement des dépenses de consommation selon les catégories
de biens. Les utilisations intérieures des biens et services sont donc tous comptabilisées
directement au compte des produits composites.
Pour le compte des investissements, la dichotomie entre matériel et machine versus
construction a été éliminée. Nous nous retrouvons donc avec deux catégories de comptes
d’investissement. Il y a celui des biens d’investissement qui contribuent au stock de
capital de la période suivante (machine, matériel et construction) et le compte des stocks,
sans effet dynamique.
Au niveau du commerce international, la seule transformation a consisté à éliminer le
compte des réexportations. La procédure formelle aurait été d’agréger ce compte à celui
des importations vers le RdM. Cette façon de faire aurait cependant nécessité que nous
connaissions l’élasticité–prix des produits réexportés. Nous avons donc évité la question
en élimant directement le compte, ce qui équivaut à une baisse de 4,85% de l’activité
économique du RdM.
Les transformations présentées jusqu’à maintenant ont permis de simplifier la MCS pour
obtenir un modèle conceptuel où il sera facile de s’y retrouver. Nous avons cependant
jugé certaines désagrégations nécessaires, notamment au niveau des secteurs d’activités.
Deux secteurs marchands nous semblaient trop peu. Nous avons donc désagrégé le
secteur des biens en deux sous-secteurs : l’agriculture et l’industrie. Ces deux soussecteurs ont été choisis étant donnée la relation particulière qu’ils entretiennent avec
l’énergie. Notre MCS a donc quatre branches d’activité : l’agriculture, l’industrie, les
services marchands et les services non marchands.
Les données du secteur agricole proviennent des comptes nationaux de Statistique
Canada au niveau de l’agrégat S. Dans les tableaux d’agrégation S, quatre secteurs
peuvent êtres considérés comme faisant partie de la branche agricole. Ces secteurs sont :
les cultures agricoles et l’élevage, la foresterie et l’exploitation forestière, la chasse,
Chapitre 2 : Une matrice de comptabilité sociale et MEGC de l’économie canadienne
10
pêche et piégeage et les activités de soutien à l’agriculture et à la foresterie. Les données
de ces quatre secteurs ont donc été mises en commun pour former le secteur agricole de
la MCS. Pour respecter le cadre comptable de la MCS initiale par rapport à celui de
Statistique Canada, les données de Statistique Canada n’ont pas été intégrées directement
à la MCS. Nous avons plutôt calculé les parts relatives de la branche agricole par rapport
à la branche des biens, d’après les comptes nationaux de Statistique Canada au niveau de
l’agrégat S. Ces parts relatives ont ensuite été appliquées à la MCS pour reproduire
l’ensemble des valeurs du secteur agricole. Cette procédure nous assure que l’intensité
sectorielle et les parts du marché dans la MCS sont conformes avec les données réelles.
Pour ce qui est des données du secteur industriel, elles ont tout simplement été obtenues
de façon résiduelle. C’est-à-dire que le secteur industriel correspond au secteur des biens
sans le secteur agricole.
En annexe de ce chapitre, le tableau 2.1 présente la MCS canadienne dérivée de la MCS
du Ministère des Finances du Québec pour laquelle nous avons les interprétations des
différentes cases. Le tableau 2.2 présente la même matrice avec les données réelles.
2.3 La structure d’un MEGC de base canadien: EXTER-C
Ce chapitre présente un MEGC de base s’inspirant du modèle EXTER de Decaluwé et al.
(2001). Le modèle diffère cependant sur certains points dans le but d’être cohérent avec
la MCS canadienne présentée à la section précédente. Notre modèle se nomme EXTER-C
pour EXTER-Canada. Les variables et les paramètres exogènes du modèle sont présentés
aux tableaux 2.3 et 2.4, à l’annexe 2.2 de ce chapitre.
EXTER-C, conformément à notre MCS canadienne, a quatre branches d’activité :
l’agriculture, les industries, les services marchands et les services non-marchands. Les
agents sont au nombre de quatre : les ménages, les entreprises, l’État et le RdM. L’État
correspond à l’agrégat des gouvernements locaux, provinciaux et fédéral. Les facteurs
primaires de production sont le capital et le travail. Dans ce chapitre, le modèle est
statique. Une version dynamique du modèle sera présentée au chapitre 6.
2.3.1 Le bloc de la production
La production est caractérisée par une fonction nichée. La production totale ( XS ) est
constituée de la valeur ajoutée ( VA ) et des produits finis, soit les consommations
intermédiaires ( CI ). Il y a une parfaite complémentarité entre les consommations
Chapitre 2 : Une matrice de comptabilité sociale et MEGC de l’économie canadienne
11
intermédiaires et la valeur ajoutée. Les équations spécifiant la production totale sont
donc :
VA j
(2.1)
XS j =
vj
CI j = io j XS j
(2.2)
où indice j : indice désignant l’ensemble des branches d’activité ;
vj
: coefficient fixe (Leontief) de valeur ajoutée de la branche d’activité j ;
io j
: coefficient fixe (Leontief) ou volume d’intrants intermédiaires ;
nécessaire à la production d’une unité de produit j , avec io j + v j = 1.
La valeur ajoutée est caractérisée par une Cobb-Douglas :
α
1− α j
VA j = A j LD j j KD j
(2.3)
où LD j : demande de main-d’œuvre de la branche j ;
KD j : demande de capital de la branche j ;
α j : paramètre de partage de la Cobb-Douglas ;
Aj
: paramètre d’échelle de la Cobb-Douglas.
La consommation intermédiaire de chaque branche j est constituée de la demande de la
branche j en intrant intermédiaire tr ( DItr, j ) selon une relation fixe (Leontief) :
(2.4)
DItr, j = aij tr, j CI j
où indice tr
: indice désignant l’ensemble des branches d’activité commerciales;
aij tr. j : volume de l’intrant intermédiaire tr par unité de demande
intermédiaire de la branche j .
La main d’œuvre et le capital sont parfaitement mobiles entre toutes les branches
d’activité. Cela reflète une situation de long terme, ce qui est le cas pertinent pour l’étude
des changements climatiques. La demande de main-d’œuvre par la branche d’activité j
est obtenue des conditions de premier ordre du problème de la maximisation des profits.
Sa forme est la suivante :
Chapitre 2 : Une matrice de comptabilité sociale et MEGC de l’économie canadienne
LD j =
(2.5)
où s
12
α j Pv jVA j
s
: salaire ;
Pv j : prix de la valeur ajoutée.
La demande de capital par la branche d’activité j est obtenue de la même façon que pour
la main-d’œuvre. Sa forme est :
(2.6)
KD j =
(1− α j )Pv jVA j
r
où r : rendement du capital.
L’amortissement ( AMT ) est une part fixe de la rémunération du capital :
(2.7)
AMT = (1− λ − λg ) ⋅ r
KD j
j
où λ : part de la rémunération du capital allant aux entreprises ;
λg : part de la rémunération du capital allant au gouvernement.
2.3.2 Le bloc du revenu et de l’épargne
Le revenu des ménages ( YM ) provient des versements de salaire, des transferts
gouvernementaux ( TG ), des dividendes versés par les entreprises ( DIV ), des transferts
du RdM ( TMW ) en devise étrangère et des revenus de placement ( RPM ) :
(2.8)
YM = s
LD j + TG + DIV + e ⋅ TMW + RPM
j
où e : taux de change extérieur nominal (en dollars canadien par unité de devise
étrangère)
Le revenu des ménages disponible à l’épargne ou à la consommation ( YDM ) est le
revenu net d’impôts ( TD ), des placements ( DPM ) et des transferts faits au reste du
monde ( TWM ) :
(2.9)
YDM = YM − TD − DPM − TWM
L’épargne des ménages ( SM ) est une proportion fixe du revenu disponible :
Chapitre 2 : Une matrice de comptabilité sociale et MEGC de l’économie canadienne
13
SM = ϕ YDM
(2.10)
où ϕ : proportion fixe du revenu épargné.
Le revenu des entreprises ( YE ) est une proportion fixe de la rémunération du capital :
YE = λ ⋅ r
(2.11)
KD j
j
où
λ : part des revenus du capital allant aux entreprises.
L’épargne des entreprises est calculée de façon résiduelle :
SE = YE − DIV − TDE − DPE − DIVRdm
(2.12)
où TDE
DPE
: impôts levés sur le revenu des entreprises ;
: dépenses en placement faites par les entreprises ;
DIV Rdm : dividendes versés au reste du monde.
Les impôts levés sur le revenu des ménages ( TD) sont une proportion fixe du revenu
total :
TD = ty ⋅ YM
(2.13)
où ty : taux d’imposition pour les ménages.
Les impôts levés sur le revenu des entreprises ( TDE ) sont une proportion fixe du revenu
total :
TDE = tye ⋅ YE
(2.14)
où
tye : taux d’imposition pour les entreprises.
Des taxes indirectes intérieures ( TI ) sont prélevées sur la part non exportée de la
production locale et sur les importations internationales aux prix intérieurs :
(2.15)
où tx tr
TItr = tx tr (Ptr XStr − Petr EX tr ) + tx tr (1+ tmtr )e ⋅ Pwmtr M tr
: taux de taxation indirect ;
Chapitre 2 : Une matrice de comptabilité sociale et MEGC de l’économie canadienne
Ptr
: prix de la production du secteur tr au coût des facteurs ;
Petr
: prix payé à l’exportateur du produit tr , libellé en monnaie nationale ;
EX tr
: exportation du produit tr en volume ;
tm tr
: taux de taxation douanière (net) à l’importation du produit tr ;
Pwmtr
: prix international à l’importation du produit tr , libellé en
14
devise étrangère;
M tr
: importation du produit tr en volume.
Des tarifs douaniers ( TIM ) sont prélevés sur les importations internationales :
(2.16)
TIM tr = tmtr ⋅ e ⋅ Pwm tr M tr
Des taxes à l’exportation ( TIE ) vers le reste du monde sont aussi en vigueur :
(2.17)
TIE tr = tetr PE tr EX tr
où tetr : taux de taxation applicable sur les exportations du produit tr .
La masse salariale et le capital sont taxés. Un taux moyen de taxation sur la valeur de la
production totale ( tp ) représente ces deux taxes. Les recettes fiscales de la taxe sur la
masse salariale et de la taxe sur le capital pour chaque secteur j sont données par :
(2.18)
TNPj = tp j Pj XS j
La valeur de l’investissement total en matériel, machine et constructions ( IM ) est taxée.
Les recettes fiscales sur l’investissement en matériel, machine et construction ( TNV ) sont
données par :
(2.19)
TNV = tn ⋅ IM
où tn : taux de taxation sur l’investissement en matériel, machine et constructions.
Chapitre 2 : Une matrice de comptabilité sociale et MEGC de l’économie canadienne
15
Les revenus de l’État (YG ) sont donc la somme des recettes fiscales auxquelles s’ajoutent
les revenus de placement gouvernemental ( RPG ), les transferts provenant du RdM
( TGW ) et une certaine part ( λ g ) des revenus de capital, soit:
(2.20)
YG = λg ⋅ r
KD j +
TIM tr +
tr
+ TDE +
TIE tr +
tr
TItr + TD
tr
TNPj + TNV + RPG + TGW
j
L’épargne gouvernementale ( SG ) est déterminée de façon résiduelle :
(2.21)
où
SG = YG − G − TG − TWG − DPG
TWG : sont les transferts gouvernementaux à l’endroit du reste du monde ;
DPG : sont les dépenses en placement.
2.3.3 Le bloc de la demande
La consommation finale de chaque produit marchand par les ménages ( C tr ) est obtenue
par la maximisation de l’utilité. L’utilité est caractérisée par une fonction Cobb-Douglas :
(2.22)
où
Ctr =
γ trYDM
Pc tr
γ tr : part budgétaire allouée par les ménages à la consommation du produit tr ;
Pc tr : prix composite du produit tr .
Les biens servant à l’investissement ont leur origine des deux secteurs pouvant produire
des actifs tangibles : le secteur agricole ou le secteur industriel. Nous appelons ces biens
« les biens d’investissement par origine » ( INV ). Chaque bien d’investissement par
origine est substituable à un autre. L’élasticité de substitution retenue est l’unité ; la
fonction de demande est donc de la forme :
(2.23)
où
INVtr =
µtr IM(1− tn)
Pc tr
µ tr : part en valeur du produit tr dans l’investissement total en matériel, machine
et construction ( IM ) nette de taxe sur l’investissement ( tn ).
Chapitre 2 : Une matrice de comptabilité sociale et MEGC de l’économie canadienne
16
L’investissement total en matériel, machine et construction ( IM ) est déterminé par la
valeur de l’investissement total ( IT ) diminué des variations des stocks ( SK tr ):
(2.24)
IM = IT −
Pc tr SK tr
tr
Les variations des stocks sont une proportion fixe de la production totale :
(2.25)
SK tr = σ trk ⋅ XStr
où SK tr : stocks par secteurs d’origine ;
σ trk : proportion fixe des stocks par rapport à la production totale.
Les dépenses gouvernementales, ici synonymes de consommation publique ( G),
correspondent à l’entièreté de la production du secteur non marchand :
(2.26)
G = Pgvt XS gvt
La demande intermédiaire de l’intrant tr ( DITtr ) est la somme de toutes les demandes de
cet intrant par les j branches :
(2.27)
DITtr =
aij tr, j CI j
j
2.3.4 Le bloc des prix
La présence de l’État et du RdM engendre de nombreux prix dans le modèle. Il y a
d’abord les prix composites ( Pc ) déterminés par l’équilibre des marché des produits
(équation 2.40). Les prix de la valeur ajoutée ( Pv ) sont déterminés par ces prix
composites et les prix à la production ( P ). La valeur de la valeur ajoutée est égale à la
valeur de la production totale nette de taxes et subventions moins la valeur des dépenses
en consommations intermédiaires :
(1− tp j ) ⋅ P j XS j −
(2.28)
Pv j =
Pc tr DItr, j
tr
VA j
Chapitre 2 : Une matrice de comptabilité sociale et MEGC de l’économie canadienne
17
Les prix des importations ( Pm) sont égaux aux prix internationaux incluant les taxes et
les tarifs intérieurs :
(2.29)
Pmtr = e ⋅ Pwmtr (1+ tmtr )(1+ tx tr )
Pour les exportateurs, les prix des produits exportés correspondent aux prix
internationaux ( Pfob ), libellées en monnaie nationale et excluant la taxe aux
exportations :
(2.30)
Petr =
e ⋅ Pfobtr
(1+ tetr )
où Pfobtr : prix franco de bord6 des exportations.
Le prix du produit local vendu sur le marché intérieur aux coûts du marché ( Pd ) est égal
à la différence entre la valeur de l’offre totale du produit ( Q), au prix composite ( Pc ), et
celle de l’importation de ce produit ( M ) à son prix intérieur ( Pm), par unité vendue
localement ( D) :
(2.31)
Pdtr =
Pc trQtr − Pmtr M tr
Dtr
Les prix reçus par le producteur pour ses ventes sur le marché intérieur ( Pl ) sont donc :
(2.32)
Pltr =
Pdtr
(1+ tx tr )
Les prix perçus par les producteurs ( P ), incluant les taxes sur la masse salariale et le
capital, sont une moyenne pondérée de la valeur de la production locale et de la valeur
des exportations :
Pl D + Pe tr EX tr
(2.33)
Ptr = tr tr
XS tr
6
Ce prix correspond au prix d'
un bien à la frontière du pays exportateur ou prix d'
un service fourni à un
non-résident. Il comprend la valeur des biens ou des services au prix de base, des services de transport et de
distribution jusqu'
à la frontière, les impôts moins les subventions.
Chapitre 2 : Une matrice de comptabilité sociale et MEGC de l’économie canadienne
18
2.3.5 Le bloc du commerce international
La présence de l’agent « Reste du monde » implique que notre économie a des biens
d’importations ( M ) et d’exportations ( EX ). Concernant les producteurs, l’hypothèse
retenue est que la production peut être affectée en proportion variable à l’exportation
( EX ) ou à la vente locale ( D). Cette relation entre EX et D est caractérisée par une
fonction à élasticité de transformation commerciale constante et finie (ETTC), soit :
(2.34)
où
[
XStr = B β EX
e
tr
k tre =
e
tr
− ktre
tr
− ktre
tr
+ (1− β )D
e
tr
]
−
1
ktre
1 − τ tre
τ tre
k tre : paramètre de substitution de la fonction ETTC
τ tre : élasticité de substitution
Btre : paramètre d’échelle de la fonction ETTC
β tre : paramètre de partage de partage de la fonction ETTC
D’après la maximisation des profits, la relation entre EX et D est caractérisée par :
Dtr =
(2.35)
1− β tre
β tre
Petr
Pltr
τ tre
EX tr
Un marché des importations signifie que les utilisateurs de ressources se voient offrir un
volume de ressources ( Q ) qu’ils achètent en proportion variable au Reste du Monde ( M )
ou sur le marché intérieur ( D). L’hypothèse de l’Armington est ici retenue, c’est-à-dire
que le choix entre M ou D est défini par une fonction à élasticité de substitution
commerciale constante et finie (ESTC) :
(2.36)
où
[
Qtr = A α M tr
m
tr
ρ trm =
m
tr
− ρ trm
+ (1− α )Dtr
m
tr
− ρ trm
]
−
1
ρ trm
1− σ trm
σ trm
ρ trm
: paramètre de substitution de la fonction ETTC
σ trm
: élasticité de substitution
Atrm : paramètre d’échelle de la fonction ETTC
Chapitre 2 : Une matrice de comptabilité sociale et MEGC de l’économie canadienne
19
α trm : paramètre de partage de partage de la fonction ETTC
D’après la maximisation des profits, la relation entre M et D est caractérisée par :
(2.37)
α trm
M tr =
1− α trm
Pdtr
Pmtr
σ trm
Dtr
La demande pour les exportations internationales ( EXD) a une élasticité-prix finie :
(2.38)
EXDtr = EXD
O
tr
PWE tr
Pfobtr
ε tre
où EXDtr : volume demandé à l’exportation du produit tr ;
EXDtrO : volume demandé à l’exportation qui est indépendant du prix relatif à
l’exportation ;
ε tre
: élasticité de la demande mondiale pour le produit exporté tr .
2.3.6 Le bloc des conditions d’équilibre
Il ne reste plus qu’à présenter les conditions d’équilibre du modèle. L’équilibre sur le
marché de la main-d’œuvre est donné par :
(2.39)
LS =
LD j
j
où LS : dotation de main-d’œuvre totale de l’économie.
L’équilibre sur le marché du capital est donné par :
(2.39)
KS =
KD j
j
L’équilibre des marchés des produits est :
(2.40)
Qtr = DITtr + Ctr + INVtr + SK tr
L’investissement est financé par l’épargne des agents, le déficit du compte courant ( SR)
et l’amortissement :
Chapitre 2 : Une matrice de comptabilité sociale et MEGC de l’économie canadienne
(2.41)
20
IT = SM + SE + SG + SR + AMT
La balance des paiements extérieurs est déterminée par :
(2.42)
SR = e
Pwmtr M tr + TWM + TWE + TWG + RPW
tr
−e
Pfobtr EX tr + DPW + e ⋅ TMW + TGW
tr
où RPW : les revenus de placement du RdM
DPW : les dépenses en placements du RdM
L’offre d’exportation est égale à la demande étrangère pour chaque produit:
(2.43)
EX tr = EXDtr
ce qui clôt le modèle EXTER-C.
Le modèle EXTER-C est un système de cent vingt équations indépendantes et cent
quarante-huit variables. Pour assurer une solution unique au modèle, il faut donc rendre
exogène vingt huit variables. Ces variables se retrouvent au tableau 2.3.
Les paramètres du modèle sont calibrés, lorsque possible, selon les données de notre
MCS canadienne. Les taux de taxation, les parts de consommation, les parts
d’investissement, les paramètres de partage des fonctions caractérisant la production et le
commerce international sont tous obtenus selon cette méthode. Pour les fonctions
comportant plus de deux types de paramètres, telles les ETTC et les ESTC,7 un des
paramètres ne peut être calibré avec la MCS.
Dans notre cas, les élasticités de
substitution des fonctions ETTC et ESTC sont donc exogènes. Les valeurs de celles-ci
sont présentées au tableau 2.4.
7
Les paramètres de ces fonctions sont le paramètre d’échelle, le paramètre de partage et le paramètre
d’élasticité.
Annexe 2.1
Tableau 2.1 : Matrice de comptabilité sociale du Canada (interprétations)
21
Annexe 2.1
Tableau 2.1 (suite) : Matrice de comptabilité sociale du Canada (interprétations)
22
Annexe 2.1
Tableau 2.2 : Matrice de comptabilité sociale du Canada (données réelles)
23
Annexe 2.1
Tableau 2.2 (suite) : Matrice de comptabilité sociale du Canada (données réelles)
24
Annexe 2.2
Tableau 2.3 : Variables exogènes d’EXTER-C
25
Annexe 2.2
Tableau 2.4 : Paramètres exogènes d’EXTER-C
26
Chapitre 3 : La sphère énergétique
27
Chapitre 3
La sphère énergétique
La première étape pour adapter un MEGC à l’étude des changements climatiques est
l’introduction des sources d’émissions de GES. Pour ce faire, il faut expliciter les
marchés de l’énergie, c’est-à-dire la sphère énergétique de l’économie. Par une revue non
exhaustive de la littérature, les types d’énergie qu’on retrouve communément dans les
MEGC sont le charbon, le gaz naturel, le pétrole brut, le pétrole raffiné et l’électricité.
Ce chapitre comporte une revue de littérature traitant des points à considérer dans la
modélisation de la sphère énergétique dans les MEGC. Nous présentons par la suite
l’approche que nous avons retenue pour l’introduire dans EXTER-C. Le traitement et la
présentation des données de notre sphère énergétique sont présentés en dernier lieu.
3.1
Revue de littérature
3.1.1 La demande d’énergie
3.1.1.1 L’énergie et les ménages
Pour les ménages, l’énergie est un bien de consommation finale non durable. L’énergie
est cependant particulière parce que, bien qu’elle soit de nature non durable, sa demande
est dépendante, en majeure partie, des biens durables. Une modélisation adéquate de la
demande d’énergie par les ménages implique donc l’introduction d’une dichotomie entre
biens durables et non durables, pour ensuite spécifier une relation d’interdépendance
entre ces deux catégories de biens.
Les modélisateurs portent cependant rarement attention à ce point et caractérisent les
fonctions de demande d’énergie comme pour les autres produits. Capros et al. (1999)
sont de ceux qui font exception. Leur approche consiste à lier l’utilisation de l’énergie à
l’utilisation des biens durables par une relation linéaire. Selon cette approche, l’énergie
impute un coût supplémentaire à l’utilisation des biens durables. Une hausse du prix de
l’énergie signifie donc nécessairement une baisse de la demande pour ce type de biens.
Or, les biens durables achetés à la période présente sont habituellement moins
énergivores et polluants que ceux des périodes précédentes. L’obsolescence et par
Chapitre 3 : La sphère énergétique
28
conséquent, le taux de renouvellement des biens durables, augmentent avec le prix de
l’énergie. Le signe de la variation de la demande de biens durables suite à une hausse du
prix de l’énergie est donc ambigu. L’effort de Capros et al. pour modéliser la demande
d’énergie de façon plus réaliste néglige le fait que les prix de l’énergie n’ont pas
seulement un effet sur l’utilisation, mais aussi sur le taux de renouvellement du stock de
biens durables. Excepté Conrad et Schröder (1991), nous n’avons pas relevé de MEGC
considérant ce point, ce qui est probablement dû aux difficultés méthodologiques que
cela comporte.
3.1.1.2
La demande d’énergie par les producteurs
3.1.1.2.1 Les approches top-down, bottom-up et hybride
La modélisation de la demande d’énergie du côté productif de l’économie dépend de la
forme des technologies de production énergétique. Trois approches traditionnelles sont
préconisées pour caractériser les technologies de production du secteur énergétique dans
les MEGC : l’approche top-down, l’approche bottom-up et l’approche hybride.
L’approche bottom-up consiste à utiliser l’information des modèles d’ingénierie pour
discrétiser les technologies de production de l’énergie. Le système énergétique est fort
détaillé, au contraire du reste de l’activité économique. L’activité économique est
exogène et la demande d’énergie est conséquemment donnée. Sous cette approche, ce
sont les technologies qui sont optimisées. Le modèle cherche donc à minimiser le coût de
satisfaire la demande d'
énergie. C’est-à-dire que le programme de la firme a pour but de
choisir la technologie optimale pour produire un service énergétique donné et non pas de
maximiser les profits ou de minimiser les coûts de production. On ignore ainsi la
possibilité de modifier la demande de services énergétiques (comme on peut le faire en
substituant d’autres inputs à l’énergie, par exemple). Les modèles bottom-up ne
formalisent donc pas les décisions de production selon la théorie économique
néoclassique. Cette approche permet de représenter le changement technologique dans la
sphère énergétique.
L’approche top-down consiste à utiliser les fonctions de production néoclassiques
standards nichées8 pour caractériser les processus de production. Sous cette approche, les
8
Les fonctions néoclassiques standards nichées sont des emboîtements de fonctions. Par exemple, une
fonction g est nichée si :
z = g(x,y)
avec x = f(u,v).
où z,x,y,u,v représentent des variables;
g et f
représentent des fonctions néoclassiques standards.
Chapitre 3 : La sphère énergétique
29
fonctions de demande de l’énergie sont les conditions de premier ordre dérivées du
programme de maximisation du profit ou de la minimisation des coûts de la firme. Il faut
noter que ces conditions de premier ordre ont comme propriétés la continuité et la
monotonicité. Or, la demande d’énergie par les producteurs ne respecte pas toujours ces
propriétés, notamment dans le court terme. L’approche top-down est donc plus adéquate
pour représenter les interactions économiques globales de long terme, ce qui est en
correspondance avec les problématiques des changements climatiques. La
correspondance entre l’approche top-down et les changements climatiques n’est
cependant pas parfaite, car la forme agrégée des fonctions de demande ne permet pas
d’expliciter le détail du changement technologique. Au chapitre 6 de ce mémoire, nous
montrons que cela est une cause de biais importants dans l’estimation du fardeau des
politiques.
L’approche hybride est un compromis des approches top-down et bottom-up. Avec
l’approche hybride, certaines technologies de la sphère énergétique sont discrétisées,
mais l’ensemble du coté productif de l’économie reste d’influence top-down. De plus,
contrairement aux modèles bottom-up, ce n’est plus les technologies qui sont optimisées,
mais le profit ou le bien-être comme le veut la théorie économique néoclassique.
L’approche hybride a pour principal but de sophistiquer le processus du changement
technologique, tout en gardant une bonne représentation des interactions économiques
(Tol, 1999).
3.1.1.2.2 Structure de la production sous les approches top-down et hybride
Dans les modèles top-down et hybride, l’utilisation des fonctions de production
néoclassiques standards nichées nécessite que les modélisateurs posent la forme de la
structure de production. Lorsqu’il y a présence de la sphère énergétique dans le processus
de production, deux questions d’importances se posent. La première est : quel est le lien
entre les différents intrants énergétiques ? La seconde, qui sera l’objet d’une sous-section
au chapitre 6, est : quel est le lien entre les intrants énergétiques et les intrants non
énergétiques ? La réponse à ces deux questions pourrait être simple s’il y avait un
consensus clair sur les élasticités de substitution qui doivent être utilisées dans les
MEGC, mais il n’y en a pas.
Concernant la relation entre les intrants énergétiques, on peut mentionner les
caractérisations qui apparaissent le plus souvent dans les MEGC top-down et hybrides.
•
Premièrement, le plus haut niveau d’agrégation entre les intrants énergétiques se fait
habituellement entre l’énergie électrique et l’énergie non électrique. La production de
Chapitre 3 : La sphère énergétique
30
l’électricité est un processus distinct des autres types de production d’énergie et
occupe une place importante du bilan énergétique (Conrad 2001). Les modélisateurs,
comme Manne et al. (1995), qui veulent réduire la sphère énergétique à sa plus simple
expression, considèrent donc qu’il y a au minimum deux types de biens énergétiques :
l’énergie électrique et l’énergie non électrique.
•
Deuxièmement, la valeur de l’élasticité de substitution qui est généralement admise
pour agréger l’énergie électrique et non électrique est l’unité (Burniaux et Truong,
2002), ce qui correspond à une forme fonctionnelle Cobb-Douglas.
•
Troisièmement, lorsqu’il y a différenciation des différents combustibles fossiles, c’est
le charbon qui est d’abord explicité. Le charbon est habituellement traité
distinctivement parce qu’il est fortement émetteur par rapport aux autres combustibles
fossiles et qu’une fois introduit dans le processus de production des industries, il a
peu de substituts9. Au contraire, les autres combustibles fossiles, principalement le
gaz naturel et les produits pétroliers, ont une intensité en émissions de GES semblable
et sont mutuellement substituables. Certains auteurs, tel que Borges et Goulder
(1984), explicitent le charbon en considérant directement que les combustibles
fossiles se limitent à deux produits : les produits du charbon et le reste des
combustibles fossiles. D’autres auteurs, tels que Babiker et al. (1997) et Burniaux et
Truong (2002), font la distinction entre les produits pétroliers et le gaz naturel, mais
utilisent une structure de production nichée où le charbon s’agrège à un niveau
différent des autres combustibles fossiles. L’utilisation du charbon par les producteurs
est donc aussi explicitée.
Nous considérons ces trois caractérisations comme des critères de base auxquels les
MEGC top-down et hybrides portant sur les changements climatiques devraient obéir.
3.1.2 L’offre d’énergie
Introduire une offre d’énergie dans un MEGC implique que la production de l’énergie est
explicitée. La production de chaque type d’énergie peut être propre à un secteur ou elle
peut être un sous-secteur d’une branche d’activité préexistante. Certains modélisateurs,
tels que Burniaux et al. (1992), tiennent aussi compte que l’offre d’énergie est fonction
des stocks de ressources énergétiques disponibles.
9
D’après une revue de littérature de Burniaux et Truong (2002), la valeur de l’élasticité de substitution entre
le charbon et les autres combustibles retenue dans les MEGC est 0,5.
Chapitre 3 : La sphère énergétique
31
3.2 Protocole de modélisation d’un MEGC avec une sphère
énergétique : le modèle ENER-J
Notre modèle EXTER-C fait place à un nouveau modèle introduisant la sphère
énergétique: le modèle ENER-J. Dans ENER-J, la sphère énergétique est constituée de
trois nouveaux produits : l’électricité, le charbon et un agrégat d’énergie fossile formé du
gaz naturel, du pétrole brut et du pétrole raffiné.
Bien que les données que nous utilisons nous permettent de différencier les produits
pétroliers et le gaz naturel, nous considérons, comme Borges et Goulder, que les
combustibles fossiles se limitent à deux produits. Cette approche a été retenue parce
qu’elle permet de garder notre modèle simple et que nous croyons qu’elle est
conceptuellement correcte. En effet, étant donnée que l’intensité en GES des produits
pétroliers et du gaz naturel est relativement du même ordre de grandeur, une politique
environnementale aura donc un effet sensiblement équivalent sur les prix de ces deux
types d’énergie.
Concernant l’offre d’énergie, nous considérons que chaque type d’énergie est produit par
un secteur distinct. La désagrégation porte donc sur les comptes des produits et les
comptes des branches d’activités. Notre modèle a donc trois nouvelles branches
d’activité : le secteur du charbon, le secteur des autres énergies fossiles et le secteur de
l’électricité. Bien que les données que nous utilisons ne nous permettent pas de
désagréger directement les secteurs énergétiques, nous avons trouvé important qu’un
MEGC portant sur les changements climatiques puisse considérer cette approche. Cela
permet de représenter explicitement les technologies de production pour chaque type
d’énergie. Dans le cas contraire, il aurait fallu faire l’hypothèse que la production
d’énergie provient d’autres secteurs. La technologie de production propre à l’énergie
serait alors difficilement discernable. La section 3.3 montre comment nous avons traité
les données pour expliciter la production énergétique.
Les technologies de la production énergétique sont caractérisées par les fonctions
néoclassiques nichées du modèle de base. Nous adoptons donc une approche top-down.
Les secteurs énergétiques sont soumis aux mêmes hypothèses de modélisation que les
autres secteurs marchands du modèle : les biens énergétiques sont soumis au commerce
international et leur demande est normale. La production des secteurs énergétiques est
donc allouée au marché des exportations ou au marché intérieur. L’énergie consommée
sur le marché intérieur provient soit de la production locale ou des importations du RdM.
Dans le marché intérieur, la demande d’énergie du côté des ménages obéit au même
32
Chapitre 3 : La sphère énergétique
arbitrage que celui en vigueur pour les autres biens. C’est-à-dire que chaque bien
marchand est consommé en proportion fixe du revenu des ménages. Les difficultés
méthodologiques de modéliser la relation entre l’énergie et les biens durables expliquent
que nous retenions cette approche simple pour caractériser la demande d’énergie par les
ménages.
La demande d’énergie du côté productif de l’économie est caractérisée différemment des
autres produits finis marchands. Rappelons que dans EXTER-C, chaque type de
production avait recours à une proportion fixe de chaque produit fini marchand. Ici, nous
allons modifier la structure de production de la façon illustrée dans la figure 3.1. Les
biens énergétiques sont utilisés pour la production, mais il y a possibilité de substituer
entre chacun d’eux. Les consommations intermédiaires énergétiques sont réparties sur
deux niveaux dans le but de différencier les possibilités de substitution entre :
•
l’énergie électrique et non électrique ;
•
le charbon et les autres types d’énergies fossiles.
Notre structure de production respecte donc les trois critères de base concernant la
relation entre les intrants énergétiques dans les MEGC.
L’agrégation pour les deux niveaux supplémentaires se fait selon une fonction à élasticité
de substitution technique constante (ESTC) dans le but de saisir l’aspect imparfait des
possibilités de substitution.
Pour l’agrégat des consommations intermédiaires de charbon avec celles de l’agrégat des
énergies fossiles, la fonction est de la forme :
NEL j = Z (ε DICHA, j
nel
j
(3.1)
où
x
nel
j
=
nel
j
−x nel
j
+ (1− ε )DI FOS, j
nel
j
− x nel
j
−
)
1
x nel
j
1 − µ nel
j
µ nel
j
x nel
j
: paramètre de substitution de la fonction ESTC;
µ nel
j
: élasticité de substitution;
Z nel
j
: paramètre d’échelle de la fonction ESTC;
ε nel
j
: paramètre de partage de la fonction ESTC;
NEL j
: agrégat énergie non électrique dans la branche j ;
33
Chapitre 3 : La sphère énergétique
DI CHA, j : consommation intermédiaire de charbon par la branche j ;
: consommation intermédiaire d’énergie fossile autre que le charbon par
DI FOS , j
la branche j .
La valeur de l’élasticité de substitution pour la fonction 3.1 est 0,5 pour tous les secteurs.
Production
Totale
(Leontief)
Valeur Ajoutée
Consommations
Intermédiaires
(Leontief)
(Cobb-Douglas)
Capital
Agrégat
Énergétique
Travail
Agriculture
Industries
Services
(ESTC)
Énergie Non électrique
Énergie Électrique
(ESTC)
Autres énergies
fossiles
Charbon
Figure 3.1 : Structure de production dans ENER-J
La fonction caractérisant l’agrégation de l’énergie électrique avec l’agrégat d’énergie non
électrique est de la même forme que l’équation 3.1 :
AE j = Z (ε DIELEC , j
AE
j
(3.2)
où
x
AE
j
=
AE
j
− x AE
j
+ (1− ε ) NEL j
AE
j
− x AE
j
)
−
1
x AE
j
1 − µ jAE
µ jAE
x AE
j
: paramètre de substitution de la fonction ESTC;
µ jAE
: élasticité de substitution;
Z jAE
: paramètre d’échelle de la fonction ESTC;
ε jAE
: paramètre de partage de la fonction ESTC;
Chapitre 3 : La sphère énergétique
AE j
34
: agrégat énergétique dans la branche j ;
DI ELEC , j : consommation intermédiaire électrique par la branche j ;
NEL j
: consommation intermédiaire d’énergie non électrique par la branche j .
La valeur de l’élasticité de substitution de la fonction 3.2 est 1,0, ce qui implique que
l’équation est en fait une Cobb-Douglas.
L’ajout des nouveaux agrégats NEL et AE dans le modèle engendre de nouveaux prix.
Le prix de l’énergie non électrique ( PNEL ) est une moyenne pondérée de la valeur des
consommations intermédiaires du charbon et des autres énergies fossiles, soit :
(3.3)
PNEL j =
PcCHA DICHA, j + Pc FOS DIFOS, j
NEL j
Le prix de l’agrégat énergétique ( PAE ) est une moyenne pondérée de la valeur des
consommations intermédiaires énergétiques électriques et non électriques, soit :
(3.4)
PAE j =
Pc ELEC DIELEC , j + PNEL j NEL j
AE j
Le prix de l’agrégat énergétique affecte par la suite le prix de la valeur ajoutée. La
nouvelle forme de l’équation 2.28 est :
(1− tp j ) ⋅ P j XS j −
(3.5)
où
Pv j =
Pc NE DINE, j − PAE j AE j
NE
VA j
l’indice NE représente les consommations intermédiaires non énergétiques par les
secteurs j .
Les variations des prix de l’énergie affectent donc l’ensemble de la frontière de prix du
modèle via l’équation 3.5.
Les fonctions de demande de charbon par les producteurs sont les conditions de premier
ordre dérivées de la maximation des profits sous la contrainte de la technologie (équation
3.1) :
Chapitre 3 : La sphère énergétique
(3.6)
DICHA , j = DIFOS , j
ε nel
j
1− ε nel
j
µ nel
j
Pc FOS
PcCHA
35
µ nel
j
Nous pouvons noter que dans l’équation 3.6, la demande de charbon est directement
affectée par la variation de son prix relativement à celui des autres énergies fossiles. Une
politique environnementale ayant un effet différent sur le prix de ces deux types
d’énergie crée donc une substitution.
De la même façon, la demande d’énergie électrique par les producteurs est obtenue par la
maximisation des profits sous la contrainte de la technologie (équation 3.2) :
(3.7)
DIELEC , j
ε AE
j
= NEL j
1− ε AE
j
µ AE
j
PNEL j
µ AE
j
Pc ELEC
Ceci complète la modélisation de la sphère énergétique du modèle ENER-J.
3.3 Les données
3.3.1 Les données utilisées
Les données utilisées pour les secteurs énergétiques proviennent du Canadian Regional
Economic Analysis Project (CREAP) (voir Wigle et Tronodon, 2004, pour leur
présentation). Le CREAP désagrège les comptes nationaux de niveau S de Statistique
Canada pour les produits énergétiques suivants : le charbon, le pétrole raffiné, le pétrole
brut, le gaz naturel et l’électricité. L’année considérée est 1998. La désagrégation porte
uniquement sur les comptes des produits, ce qui signifie la production des produits
énergétiques n’est pas explicitée. Elle est incluse dans celle du secteur industriel, du
secteur des services et du secteur public.
3.3.2 Le traitement des données
L’introduction de la sphère énergétique à notre MCS s’est faite en trois étapes.
Premièrement, il a fallu transformer les données du CREAP pour expliciter des secteurs
propres aux différents types d’énergie. Pour ce faire, nous avons utilisé les comptes de la
production (figure 3.2) et les comptes des intrants (figure 3.3) du CREAP. Les comptes
de la production permettent de calculer la valeur de la production totale de chaque secteur
énergétique (équation 3.8) et de calculer la proportion de la production de chaque secteur
en produits énergétiques (équation 3.9). Cette proportion a deux utilisations. D’abord,
elle est utilisée pour désagréger le compte des intrants. Ensuite, elle est utilisée pour
Chapitre 3 : La sphère énergétique
36
expliciter les secteurs énergétiques selon la règle suivante: les intrants qui sont crédités
aux secteurs énergétiques, sont débités au secteur industriel, au secteur des services et au
secteur public en proportion de leur production énergétique. Par exemple, si la moitié de
la production du secteur industriel est une production de charbon, alors la moitié de ce
qu’utilise le secteur industriel est crédité au compte de la production du charbon. Le
compte des intrants du secteur du charbon est donc une somme de ce qu’utilise
l’industrie, les services et le secteur public pour produire le charbon. La figure 3.4 illustre
cette étape de traitement des données.
Figure 3.2 : Compte de la production du CREAP
où XSN j
XSE
: valeur de la production en produits non énergétiques par le secteur j
j
: valeur de la production en produits énergétiques par le secteur j
La valeur de la production totale en produits énergétique ( XSéne ) est déterminée par :
(3.8)
XSéne =
XSE j
j
La proportion de la production du secteur j en produits énergétiques ( ρ j ) correspond
à:
(3.9)
ρj =
XSE j
XSE j + XSN j
Figure 3.3 : Compte des intrants du CREAP
Chapitre 3 : La sphère énergétique
37
Figure 3.4 : Transformation du compte des intrants du CREAP pour expliciter les secteurs
énergétiques
La deuxième étape pour introduire la sphère énergétique à notre MCS a été d’agréger les
données des secteurs du pétrole raffiné, du pétrole brut et du gaz naturel. Comme il a été
mentionné précédemment, nous avons voulu limiter notre sphère énergétique à trois
secteurs et à trois produits : le charbon, les autres énergies fossiles et l’électricité.
Finalement, la troisième étape a eu pour but d’assurer la cohérence des données du
CREAP avec ceux de notre MCS. Pour cette étape, nous avons fait l’hypothèse que
l’économie canadienne n’avait pas subi de changements structurels importants entre
l’année de référence de notre MCS, 1996, et l’année de référence des données du
CREAP, 1998. Sous cette hypothèse, nous avons pu construire les comptes des secteurs
énergétiques en appliquant les proportions calculées à partir des données du CREAP aux
données de notre MCS. Notre MCS introduisant la sphère énergétique est présentée au
tableau 3.1 à l’annexe de ce chapitre.
Les paramètres propres à la sphère énergétique sont obtenus par la procédure de
calibration utilisant la MCS lorsque c’est possible. Les paramètres exogènes sont les
élasticités de substitution des fonctions ESTC et ETTC qui caractérisent la structure de
production et le commerce international. Pour définir le commerce international du
charbon et de l’électricité, nous retenons les mêmes paramètres que pour le secteur
industriel (voir tableau 2.4, annexe 2.2). Pour les autres énergies fossiles, nous posons
qu’il y a substitution parfaite avec les produits locaux et internationaux.
Annexe 3.1
Tableau 3.1 : Matrice de comptabilité sociale du Canada avec sphère énergétique
(données réelles)
38
Annexe 3.1
Tableau 3.1 (suite): Matrice de comptabilité sociale du Canada avec sphère énergétique
(données réelles)
39
Chapitre 4 : Les émissions de gaz à effet de serre
40
Chapitre 4
Les émissions de gaz à effet de serre
anthropogéniques
La seconde étape pour adapter un MEGC aux changements climatiques est l’introduction
des émissions de gaz à effet de serre (GES) anthropogéniques. Le défi pour les
modélisateurs est de relier les émissions de GES à l’activité économique de la façon la
plus juste possible. Ce chapitre traite donc de la méthodologie pour modéliser les
émissions de GES en rapport avec leurs sources dans l’activité économique.
Il y a deux grandes catégories de sources aux émissions de GES anthropogéniques, soit la
consommation des produits énergétiques et les sources fugitives. La consommation des
produits énergétiques est en fait synonyme de combustion de l’énergie. Les sources
d’émissions fugitives sont les activités de production conduisant à l’émission de GES
sans qu’il n’y ait de combustion d’énergie. Par exemple, au Canada, le transport et la
manutention d’hydrocarbure, de même que l’élevage de bétail sont reconnus comme étant
des sources d’émissions fugitives non négligeables.
4.1 Revue de littérature
Il y a deux philosophies pour définir les émissions de GES par rapport à l’activité
économique et par conséquent, deux façons de les modéliser dans les MEGC. La
première philosophie est de considérer les émissions de GES comme une externalité
négative, un rejet de l’activité économique. La seconde philosophie consiste à les
considérer comme des inputs.
4.1.1 Les émissions de GES en tant qu’externalité négative
Suivant la philosophie des émissions de GES en tant qu’externalité négative, le protocole
de modélisation consiste habituellement (Bagnoli et al., 1999) à relier les émissions de
GES aux consommations énergétiques et à la production par un coefficient fixe. Par
exemple, dans le présent modèle, la consommation de biens énergétiques par les ménages
génèrerait un volume d’émissions correspondant à :
Chapitre 4 : Les émissions de gaz à effet de serre
EMIM =
(4.1)
41
emtr Ctr
tr
où EMIM : niveau d’émissions engendré par les ménages;
emtr : coefficient fixe d’émissions, applicable sur toutes les consommations
finales, mais ayant une valeur non nulle que pour les biens
énergétiques émetteurs;
Ctr
: consommation finale du bien marchand tr en volume.
En suivant la même approche, la consommation de produits énergétiques dans le
processus de production générerait un volume d’émissions correspondant à :
EMIP j =
(4.2)
em tr DItr, j
tr
où EMIPj : niveau d’émissions généré par la consommation d’énergie dans le
processus de production du secteur j ;
emtr
: coefficient fixe d’émissions, ici applicable sur toutes les
consommations intermédiaires, mais ayant une valeur non nulle que
pour les biens énergétiques émetteurs;
DI tr , j : consommation intermédiaire du bien tr par le secteur j en volume.
Pour ce qui est des émissions fugitives, elles proviennent d’activités très spécifiques
comme la digestion du bétail ou le transport par pipeline des produits pétroliers. Le
niveau de détail des MEGC ne permet habituellement pas de représenter ces activités.
Cependant, en fixant des coefficients d’émissions directement au niveau de la production
à la façon de l’équation 4.3, on obtient une représentation satisfaisante des émissions
fugitives :
EMIF j = fug j XS j
(4.3)
où EMIF j : émissions fugitives du secteur j ;
fug j
: coefficient fixe d’émissions fugitives ;
XS j
: production totale du secteur j .
Suivant cette approche, les émissions fugitives sont liées à l’activité économique, sans
pour autant qu’il y ait de relation directe avec l’utilisation d’énergie. La réduction des
émissions fugitives n’est donc possible que par une réduction de la production ou
Chapitre 4 : Les émissions de gaz à effet de serre
42
l’utilisation de nouvelles technologies. Or, dans le cas des émissions provenant de la
consommation de l’énergie, il est plus facile de réduire le niveau d’émissions, car la
substitution vers des intrants faiblement émetteurs est aussi possible.10
4.1.2 Les émissions de GES en tant qu’input
La deuxième philosophie pour définir les émissions de GES est plus marginale. Cette
philosophie consiste à considérer les émissions polluantes comme un input à la
production ou littéralement comme un bien de consommation. Cela se motiverait par le
fait que lorsque qu’émettre devient coûteux, les agents font le même type d’arbitrage
qu’avec les autres inputs ou biens. Les modèles qui considèrent les émissions de GES
comme des inputs (DICE de Nordhaus 1992, FUND de Tol 1999 et EPPA de Babiker et
al. 2001) les définissent habituellement par une fonction Leontief, c’est-à-dire en
proportion fixe des autres inputs. Les émissions de GES sont donc des produits
contingents à l’utilisation des autres biens et services. Dans les MEGC, poser des
coefficients fixes d’émissions au niveau des variables ou introduire une relation Leontief
entre les intrants est mathématiquement équivalent : dans les deux cas, les émissions sont
des compléments à la production. Le protocole de modélisation proposé pour représenter
les émissions comme une externalité négative répond donc simultanément aux deux
philosophies si l’hypothèse que les émissions sont des intrants non substituables est
retenue.
4.2 Protocole de modélisation d’un MEGC avec émissions de GES
anthropogéniques : le modèle ENVIRON
Le modèle introduisant les émissions de GES dans ENER-J est le modèle ENVIRON.
Avec des paramètres représentant des coefficients fixes d’émissions, il est simple
d’endogéniser les émissions de GES dans un MEGC. L’approche que nous retenons suit
en tout point celle des équations 4.1, 4.2 et 4.3. Nous adoptons l’école de pensée
considérant les émissions comme un input nécessaire pour la consommation et la
production. Notre structure de production peut donc être schématisée comme à la figure
4.1.
4.3 Les données
Si modéliser les émissions de GES dans un MEGC est simple, s’assurer que les
paramètres utilisés reproduisent les niveaux d’émissions désirés est une tâche plus ardue.
Ce point est particulièrement important, car le niveau d’émissions du scénario de
10
Le prochain chapitre comporte une simulation montrant l’importance de ce point.
43
Chapitre 4 : Les émissions de gaz à effet de serre
Production
Totale
(Leontief)
Valeur Ajoutée
(Cobb-Douglas)
Consommations
Intermédiaires
GES fugitifs
(Leontief)
Agrégat Énergétique
Consommations
Intermédiaires (Leontief)
(ESTC)
Énergie Non électrique (ESTC)
Autres énergies fossiles
(émettrices) (Leontief)
Charbon (émetteur)
(Leontief)
Charbon
Énergie Électrique (émettrice) (Leontief)
GES
Autres énergies
fossiles
Électricité
GES
GES
Figure 4.1 : Structure de production d’ENVIRON
référence est un des principaux facteurs expliquant la variabilité des résultats entre les
modèles développés pour analyser les coûts de réglementations sur les GES (Weyant et
Hill 1999).
Notre niveau d’émissions de GES du scénario de référence repose sur les données du
CREAP et du Canadian Emission Outlook Updates (CEOU) de Ressources Naturelles
Canada.
Les données du CREAP comptabilisent, pour l’année 1998, les émissions de GES liées à
la consommation et à la production des cinq types d’énergies considérées. Les niveaux
d’émissions totaux n’incluent donc pas seulement les émissions liées à la combustion,
mais aussi les émissions fugitives provenant des processus de production des produits
énergétiques. Les GES comptabilisés sont le CO2, le méthane et le NO2. La proportion
d’émissions fugitives n’est pas distinguée des totaux. Il n’est donc pas possible de
Chapitre 4 : Les émissions de gaz à effet de serre
44
calculer un coefficient propre à ce type d’émission. Sauf exception, les émissions
fugitives ne seront donc pas explicitées dans les secteurs énergétiques. Il faut noter que
dans le cas du pétrole brut, le niveau total d’émissions correspond entièrement à des
sources fugitives. Nous pouvons donc calculer un coefficient d’émission fugitive pour le
pétrole brut.
Les coefficients d’émissions provenant du CREAP se retrouvent au tableau 4.1. Les
coefficients d’émissions sont un ratio du volume d’émissions sur la valeur des produits
énergétiques consommés et produits pour l’année 1998. Pour reproduire le niveau
d’émissions de 1996 aux deux dernières colonnes du tableau 4.2, nous appliquons ces
coefficients sur les valeurs de notre MCS. Par cette approche, nous sous-entendons que
les prix des produits énergétiques sont les mêmes en 1996 et en 1998. Dans le cas
contraire, il aurait fallu ajuster les coefficients d’émissions pour les deux périodes en
fonction du différentiel de prix. Nous faisons aussi l’hypothèse que les prix des produits
énergétiques consommés et produits sont égaux à l’unité. Les valeurs sont donc égales
aux volumes et par conséquent, les coefficients d’émissions sont des ratios
volume/volume.
Tableau 4.1 : Données sur les émissions du CREAP et coefficients d’émissions
Tableau 4.2 : Émissions de GES dérivée des valeurs la MCS du Canada
Les données du CEOU permettent de compléter le calcul des coefficients d’émissions
fugitives pour les secteurs industriel et agricole (tableau 4.3). Le CEOU comptabilise
directement les émissions de GES provenant d’activités non liées à l’énergie pour
l’industrie, ce qui permet d’obtenir facilement le calcul du coefficient d’émissions
Chapitre 4 : Les émissions de gaz à effet de serre
45
fugitives. Le CEOU fournit aussi le volume d’émissions de GES provenant des
agrosystèmes, de la gestion des déchets et de l’utilisation des sols. Nous considérons ces
émissions comme étant toutes attribuables aux émissions fugitives de l’agriculture, bien
que dans, le cas des déchets, ce sont plutôt les ménages qui sont à la source de ces
émissions.
Tableau 4.3 : Émissions fugitives pour les secteurs de l’agriculture et de l’industrie
Les émissions de GES de notre situation de référence somment à 800 Mt en équivalent de
CO2. L’estimé du CEOU pour le total des émissions de GES du Canada pour l’année
1996 est 670 Mt en équivalent de CO2. Cette surestimation de 130 Mt peut-être
attribuable au fait qu’il est difficile de retracer les émissions de GES à l’utilisation de
l’énergie lorsque le niveau d’agrégation est important (Wigle et Tronodon, 2004).
Chapitre 5 : Les politiques environnementales
46
Chapitre 5
Les politiques environnementales
Une fois les GES introduits, il est possible de modéliser les politiques pour les
réglementer. Dans ce mémoire, nous nous concentrons sur le système de permis
échangeables (SPÉ). Cela est motivé par le fait que le Protocole de Kyoto et le Plan
canadien pour la lutte aux changements climatiques préconisent le recours à cet outil de
marché. Le premier objectif de ce chapitre est donc de maîtriser la méthodologie pour
modéliser un SPÉ dans un MEGC.
Deux des aspects du SPÉ les plus communément étudiés avec les MEGC sont l’analyse
des impacts structurels du SPÉ et la neutralité de la méthode d’allocation des permis. Le
deuxième objectif de ce chapitre est donc de maîtriser la méthodologie pour étudier ces
deux aspects avec les MEGC.
Concernant l’analyse des impacts structurels, nous analysons divers scénarios quant aux
modalités du SPÉ.
• Le premier scénario est un SPÉ ne couvrant que les émissions de GES liées à la
combustion de l’énergie de tous les secteurs productifs de l’économie. Ce scénario a
été choisi uniquement pour permettre de bien comprendre le fonctionnement du
MEGC lorsqu’il intègre un SPÉ, notamment le mécanisme déterminant le prix du
permis.
• Le second scénario est un SPÉ semblable au précédent, mais couvrant en plus les
émissions dites fugitives. Ce scénario a aussi été choisi parce qu’il permettait
d’éclairer le fonctionnement du SPÉ. Plus précisément, nous montrons que de
considérer différents types d’émissions affecte l’élasticité de la demande de permis et
donc, le prix du permis.
•
Le troisième scénario est un SPÉ ne couvrant que les émissions liées à la combustion
du secteur industriel. Ce scénario a été choisi non seulement parce que c’était la
meilleure représentation du SPÉ proposé par le Plan canadien pour la lutte aux
changements climatiques que nous puissions faire dans notre MEGC, mais aussi
parce qu’il permet de montrer une application possible des MEGC, soit estimer les
coûts marginaux de dépollution d’une région ou d’un secteur donné.
Chapitre 5 : Les politiques environnementales
•
47
Le quatrième scénario est un SPÉ national où il est possible d’acheter des permis d’un
marché international des permis. Ce scénario montre le fonctionnement d’un SPÉ
national intégré dans un SPÉ international. Il a été choisi parce que c’est un scénario
fortement plausible au Canada.
La neutralité de la méthode d’allocation des permis dans un cadre d’équilibre général est
en lien avec l’aspect « double dividende » des politiques environnementales.
L’expression « double dividende » signifie qu’une politique environnementale, en plus de
faire respecter une cible environnementale, peut réduire les distorsions dues au système
fiscal. L’étude de la neutralité de la méthode d’allocation des permis est donc intimement
liée à l’étude des distorsions du système fiscal. Dans cette section, après avoir relevé
comment certains auteurs avaient traité la neutralité de la méthode d’allocation, nous
présentons un modèle permettant d’étudier la question. Dans ce scénario, nous montrons
notamment que la neutralité de la méthode d’allocation est conditionnelle à la possibilité
de réaliser le double dividende.
L’organisation de ce chapitre est la suivante. Nous présentons d’abord les fondements
théoriques du SPÉ. Par la suite, nous abordons les questions méthodologiques reliées à sa
modélisation. Nous modélisons et simulons ensuite des scénarios quant aux modalités du
SPÉ permettant de saisir la méthodologie pour adapter un MEGC à l’analyse des impacts
structurels et à l’étude de la neutralité de la méthode d’allocation des permis.
5.1 Fondements théoriques du système de permis échangeables (SPÉ)
Le SPÉ répond directement à ce que la théorie économique identifie comme une des
principales causes des problèmes environnementaux, soit l’absence de droits de propriété.
En obligeant les émetteurs d’émissions polluantes à posséder des permis en proportion de
leurs émissions, le niveau d’émissions totales peut être contrôlé par une agence
régulatrice qui, selon le cas, diminue ou augmente les permis disponibles. Il y a donc des
droits de propriété bien définis à l’émission de GES.
La courbe de demande de permis du marché correspond à la courbe de coût marginal de
dépollution pour l’ensemble des agents de l’économie. Concrètement, les coûts
marginaux de dépollution (CmD) rendent compte des coûts reliés à la baisse de l’activité
économique et les effets de substitution et ce, pour une technologie donnée. Une fois les
coûts marginaux déterminés pour l’ensemble du marché, le prix du permis est donc
déterminé par contrainte sur les émissions, comme illustré à la figure 5.1.
48
Chapitre 5 : Les politiques environnementales
Coûts marginaux de
dépollution (CmD) en $
Prix du
permis
D = CmD du marché
Quantité totale
de permis offerte
Émissions
dépollution
Figure 5.1 : Détermination du prix du permis dans un SPÉ
La possibilité d’échanger les permis fait en sorte que le prix de ceux-ci se fixe de façon à
ce que la cible environnementale soit atteinte au moindre coût. En effet, les agents
réglementés par le système reçoivent, selon une méthode d’allocation quelconque, un
certain nombre de permis et font l’arbitrage suivant : émettre et utiliser des permis ou
dépolluer et ne pas utiliser de permis. À la marge, les agents qui peuvent facilement
dépolluer auront un nombre excédentaire de permis et les vendront à ceux pour qui il est
plus coûteux de réduire leurs émissions. L’échange des permis amène donc, comme
l’illustre la figure 5.2, l’égalité des coûts marginaux de dépollution, la condition
nécessaire de l’efficacité économique.
Coûts marginaux de
dépollution (CmD) en $
Prix du
permis
A
B
C
CmDA d’un agent A
CmDB d’un agent B
O
D
E
Émissions
Figure 5.2 : Égalité des coûts marginaux de dépollution dans un SPÉ
Chapitre 5 : Les politiques environnementales
49
Il faut noter que les agents ne supportent cependant pas le même fardeau. À la figure 5.2,
le fardeau du SPÉ pour l’agent A est l’aire OACE, tandis que celui de l’agent B est l’aire
OABD.
5.2 Le SPÉ dans les MEGC
5.2.1 Revue de littérature
Pour suivre en tout point la théorie, la modélisation du SPÉ dans un MEGC nécessite:
•
une agence régulatrice du SPÉ,
•
un mécanisme de décision pour imposer une cible d’émissions, ou plus simplement
une offre de permis;
•
les fonctions de coût marginal de dépollution.
Étant donnée qu’une agence régulatrice de permis est habituellement sous la juridiction
gouvernementale, la modélisation de l’agence régulatrice dans un MEGC revient
habituellement à l’introduction de l’agent gouvernement.
Pour ce qui est de la modélisation de l’offre de permis, deux mécanismes peuvent être
considérés. L’agence régulatrice peut établir une cible d’émissions de façon à maximiser
le bien-être social ou elle peut adopter une cible en fonction de critères plus heuristiques.
Pour le modélisateur, il est plus simple de considérer que la cible d’émissions est fixée
par ce dernier processus, car cela revient à poser l’offre de permis comme une variable
exogène au modèle. La modélisation d’une offre de permis maximisant le bien-être social
correspond à l’égalité des dommages et des bénéfices marginaux. Le modèle doit donc
comptabiliser les dommages environnementaux, ce qui complexifie le modèle et fait
intervenir un problème de données.
La modélisation de la demande de permis se fait en introduisant les fonctions de coût
marginal de dépollution, comme il a été expliqué précédemment. Pour un modèle
comportant beaucoup de secteurs et de régions, il est cependant difficile d’obtenir des
estimés empiriques de ces fonctions. Dans ce qui suit, nous présentons deux approches
pour modéliser un SPÉ sans fonction de coût marginal de dépollution.
La première approche repose sur la correspondance en concurrence parfaite entre le prix
du permis librement négocié et le niveau de la taxe qui permet d’atteindre le niveau
d’émissions fixé comme plafond (Bréchet, 1999). Cette approche revient à considérer une
taxe sur les émissions et à déterminer un processus par lequel le niveau de la taxe est
déterminé de façon endogène par les conditions de marché. L’hypothèse retenue est que
Chapitre 5 : Les politiques environnementales
50
toutes les émissions de GES anthropogéniques doivent être couvertes par le SPÉ.
L’équation reliant les émissions à l’activité économique est donc la demande de permis
du marché. En imposant une contrainte exogène sur le niveau d’émissions total, on crée
une rareté relative et il en résulte un prix aux émissions : la taxe par unité d’émissions. Si
l’émission d’une tonne de GES fait l’objet d’une demande d’une unité de permis, le prix
du permis est exactement égal à la taxe. La contrainte sur les émissions étant globale, cela
confère le caractère échangeable aux permis. La réduction des émissions se fait donc dans
les secteurs et les régions où il est plus facile de réduire les niveaux d’émissions. Il faut
noter qu’avec cette approche, la taxe sur les émissions est transformée en une taxe sur
l’énergie (Burniaux et al., 1992). Le SPÉ ou la taxe conduit donc à deux ajustements
possibles pour les producteurs : la réduction des niveaux de production et la substitution
entre les intrants. Le modèle GREEN de Burniaux et al. (1992) est un des MEGC
classiques utilisant cette méthode pour modéliser le SPÉ.
Une deuxième approche a été développée par McKibbin et Wilcoxen (1999) pour leur
modèle G-CUBED. Le SPÉ est intégré explicitement dans la structure de production.
L’utilisation de chaque intrant se fait en proportion fixe d’un permis. Le permis est donc
un intrant de production. Mathématiquement, considérer les permis comme des intrants
ou considérer que chaque intrant génère une quantité fixe d’émission qui nécessite ellemême une quantité fixe de permis revient au même. En considérant les permis comme
des intrants, l’économie a donc une dotation initiale de ceux-ci. La méthodologie
employée dans G-Cubed permet donc de caractériser les ménages comme les détenteurs
de permis, comme c’est aussi le cas pour le reste du capital. Les décisions quant à
l’utilisation des permis reviennent cependant aux entreprises. Cette approche induit les
mêmes ajustements que pour l’approche de GREEN.
Avec les approches de GREEN et de G-Cubed, le prix du permis est déterminé par les
conditions de marché, mais l’absence de fonction de coût marginal de dépollution ne
permet pas d’estimer le véritable fardeau que chaque agent supporte pour le contrôle des
émissions. Les coûts totaux liés au contrôle des émissions sont donnés en mesurant l’aire
sous les courbes de coût marginal de dépollution, comme illustré à la figure 5.2. Avec les
approches de GREEN et G-Cubed les coûts marginaux de dépollution ne sont pas
directement estimés et il est difficile de les retracer dans le modèle. Le seul coût qui peut
être mesuré avec exactitude est la valeur des permis que chaque agent possède, ce qui ne
correspond pas aux coûts totaux de dépollution.
Chapitre 5 : Les politiques environnementales
51
D’après Ellerman et Decaux (1998), cette lacune peut cependant être corrigée. Ceux-ci
ont utilisé un modèle considérant un SPÉ de façon semblable à GREEN, soit le modèle
EPPA. Ils ont démontré qu’il était possible de générer les fonctions de coût marginal de
dépollution pour les différentes régions du modèle sans information préalable sur ces
fonctions. Leur approche repose sur le fait théorique que le prix d’équilibre du permis est
égal au coût à la marge de dépolluer. En simulant différentes cibles d’émissions, ils
retrouvent donc la correspondance entre le coût marginal de dépollution et le niveau de
réduction des émissions. Ces données permettent ensuite d’estimer les fonctions de coût
marginal de dépollution et de tracer les courbes correspondantes. En soumettant une
région ou un secteur précis au SPÉ, il est donc possible d’estimer sa fonction de coût
marginal de dépollution et de mesurer son coût exact du contrôle des émissions.
Ellerman et Decaux proposent d’estimer les fonctions avec une forme quadratique, soit :
(5.1)
CMD = α ⋅ AB 2 + β ⋅ AB
où CMD : prix du permis fonction de la cible de réduction des émissions
AB : cible de réduction
α
: paramètre à estimer
β
: paramètre à estimer
Klepper et Peterson (2003) proposent une forme différente aux fonctions :
(5.2)
CMD = α ⋅ AB β
Dans ce qui suit, nous présentons un protocole de modélisation pour introduire un SPÉ
dans ENVIRON. Nous traitons ainsi des aspects particuliers liés à la modélisation du
SPÉ.
5.2.2 Protocole de modélisation pour introduire un SPÉ dans un MEGC: le modèle
POLENVI
Le modèle POLENVI introduit un SPÉ dans notre modèle ENVIRON.
5.2.2.1 SPÉ avec allocation aux enchères
La philosophie que nous retenons pour modéliser un SPÉ dans notre modèle maquette
s’inspire de celle du modèle GREEN: la demande des permis est donnée par l’équation
reliant les émissions à l’activité économique.
Chapitre 5 : Les politiques environnementales
52
La demande de permis de chaque secteur ( DPT j ) correspond aux émissions nécessaires à
l’utilisation de l’énergie dans le processus de production (équation 4.2) et aux émissions
fugitives (équation 4.3):
(5.3)
DPT j =
emtr DI tr, j + fug j XS j
tr
où DPT j : demande de permis pour les émissions générées par la consommation
d’énergie dans le processus de production et par les émissions fugitives;
La demande de permis des ménages (DPM) est :
(5.4)
DPM =
em trCtr
tr
La demande totale de permis du marché (DEP) est donc :
(5.5)
DEP =
DPT j + DPM
j
L’offre totale de permis ( SP ) est exogène. La condition d’équilibre sur le marché des
permis est :
(5.6)
DEP = SP
La valeur des permis mis en circulation est donnée par :
(5.7)
où
RP = PPERMIS × SP
PPERMIS : prix du permis
La méthode d’allocation des permis détermine la façon dont est distribuée cette valeur.
Dans le cas d’une vente aux enchères des permis,11 le gouvernement en bénéficie. Son
équation du revenu (équation 2.20) est alors ajustée pour devenir:
11
Une enchère où tous les permis sont vendus au même prix.
Chapitre 5 : Les politiques environnementales
(5.8)
YG = λg
r j KD j +
TIM tr +
tr
+ TDE +
TIE tr +
tr
53
TItr + TD
tr
TNP j + TNV + RPG + TGG + TGW + RP
j
Le SPÉ modifie les frontières de prix de l’économie comme suit. D’abord, cela signifie
que les coûts d’utilisation de l’énergie émettrice au niveau de la production sont modifiés
pour inclure le prix du permis. Le prix du permis affecte le prix des consommations
intermédiaires énergétiques émettrices en proportion de l’intensité des émissions de GES
que leur utilisation dégage (le coefficient em ). Le nouveau prix composite ( PEP ) de
chaque consommation intermédiaire énergétique émettrice est donc donné par :
(5.9)
PEPEP = Pc EP + PPERMIS × emEP
où l’indice EP correspond aux secteurs ayant des produits émetteurs (polluants), dans
ce cas-ci le charbon ( CHA ) et les autres énergies fossiles ( FOS ), et Pc EP est le prix
composite de ces produits déterminés par l’équilibre de l’offre totale du produit
( QEP ) et la somme de ses utilisations intérieures.
Ces prix modifient ensuite le prix de l’agrégat des énergies fossiles ( PNEL ). L’équation
3.3 devient:
(5.10)
PNEL j =
PEPCHA DICHA, j + PEPFOS × DIFOS, j
NEL j
Finalement, les prix de l’équation précédente se répercutent dans les prix de l’agrégat de
l’énergie électrique et non électrique ( PAE , équation 3.4). PAE affecte par la suite le
prix de la production au coût des facteurs ( P ). L’achat de permis pour la combustion de
l’énergie est donc comptabilisé implicitement dans l’équation du prix de la valeur ajoutée
(équation 2.28).
La présence d’émissions fugitives signifie aussi l’achat de permis en conséquence. Les
émissions fugitives sont liées au plus haut niveau de la structure de production. Elles
doivent donc être comptabilisées en dernier lieu. L’équation de la valeur ajoutée
(équation 2.28) introduit explicitement l’achat de permis pour les émissions fugitives,
soit :
54
Chapitre 5 : Les politiques environnementales
P j XS j −
(5.11)
Pv j =
Pc NE DI NE, j − PAE j AE j − PPERMIS × EMIF j
NE
VA j
Les nouveaux prix des consommations intermédiaires de produits émetteurs sont intégrés
dans les fonctions de demande des produits émetteurs des producteurs. L’équation 3.6
devient :
(5.12)
DICHA, j = DIFOS , j
ε nel
j
1− ε nel
j
µ nel
j
PEPFOS
PEPCHA
µ nel
j
Nous voyons que les nouveaux prix composites de l’énergie incluant le prix du permis
( PEPEP )
modifient
l’arbitrage
entre
les
consommations
intermédiaires
énergétiques. L’ampleur des effets de substitution est fonction de l’élasticité de
substitution ( µ nel ) et des coefficients d’émissions ( em ).
Pour un SPÉ couvrant les émissions des ménages, cela signifie qu’ils doivent aussi
posséder des permis lorsqu’ils consomment de l’énergie émettrice. Ils paient le prix
PEPEP pour ce type d’énergie. L’équation de décision de consommation finale pour
l’énergie émettrice devient :
(5.13)
CEP =
γ EPYDM
PEPEP
où γ EP : part budgétaire allouée par les ménages à la consommation des produits
émetteurs.
5.2.2.2 SPÉ avec allocation gratuite des permis fonction d’un niveau de production
passé (allocation des permis grand-père)
L’allocation des permis dans un SPÉ peut se faire selon diverses méthodes. Pour un SPÉ
ne couvrant que les entreprises, outre les enchères, une allocation gratuite fonction d’un
niveau de production passé est aussi possible. Cette méthode d’allocation revient à
allouer une fois pour toutes les permis aux entreprises selon un critère hors de contrôle,
soit la production d’une période précédente. C’est ce que nous appelons une « allocation
grand père ».
Chapitre 5 : Les politiques environnementales
55
La modélisation de la méthode d’allocation grand-père dans les MEGC a deux écoles de
pensée. La première est celle suivant une approche semblable au modèle GREEN où les
permis gratuits sont pris en compte dans le programme d’optimisation des firmes. Selon
cette philosophie, les permis gratuits réduisent le fardeau de celui qui les possède au
niveau de l’utilisation des intrants émetteurs, ce qui implique que pour une entreprise
dont l’allocation gratuite de permis couvre entièrement ses émissions, le coût d’utilisation
de l’énergie sera le même que s’il n’y avait pas de SPÉ. Il y aura donc une différence par
rapport à une allocation aux enchères, car la demande des intrants émetteurs sera plus
importante, faisant ainsi des pressions à la hausse sur les émissions et donc, sur le prix du
permis. Cette philosophie fait l’hypothèse que les agents sont myopes par rapport à la
possibilité de revendre les permis. Ils ne tiennent donc pas compte du coût d’opportunité
des permis, ce qui va à l’encontre de l’idée même des permis échangeables.
L’autre école de pensée, retenue entre autres par Jensen et Rasmussen (2000), consiste à
ne pas distinguer les permis gratuits des permis obtenus par enchères. Les permis gratuits
représentent un transfert forfaitaire aux entreprises. Cette philosophie sous-entend que
dans le cas d’une allocation grand-père, le permis a un coût d’opportunité dont sa valeur
d’équilibre est la même que si l’allocation se fait aux enchères. Allouer les permis aux
enchères ou de façon grand-père a donc la même incidence sur les décisions d’utiliser ou
non les intrants émetteurs. Dans un cas, les permis sont des actifs ayant un coût direct
pour l’entreprise, dans l’autre, ils sont des actifs ayant un coût d’opportunité.
L’approche que nous retenons pour modéliser le SPÉ avec allocation grand-père suit la
philosophie de Jensen et Rasmussen (2000). Dans notre modèle, cela revient donc à
retenir le même protocole de modélisation que pour l’allocation aux enchères. Cependant,
le flux des revenus des permis (la variable RP donnée par l’équation 5.7) est alloué de
façon forfaitaire aux entreprises. La variable RP n’est donc plus intégrée à l’équation du
revenu gouvernemental, mais à celle de l’agent entreprise qui devient :
(5.14)
YE = λ
r j KD j + RP
j
En suivant l’approche de modélisation présentée ci-dessus, les simulations du SPÉ avec
allocation grand-père conduisent exactement aux mêmes résultats que si l’allocation se
faisait aux enchères. Pour les deux méthodes, c’est l’épargne, déterminée de façon
résiduelle, qui absorbe tous les revenus supplémentaires. La valeur de l’investissement
total est donc affectée de façon identique, conduisant aux mêmes effets d’équilibre
Chapitre 5 : Les politiques environnementales
56
général12. De plus, étant donnée que la demande des intrants énergétiques émetteurs n’est
pas affectée par les permis gratuits, il n’y a pas de nouvelle dynamique dans le processus
de production des entreprises. Nous reproduisons ainsi le théorème classique de Coase
(1960) disant que dans un monde de compétition et d’information parfaite où les droits
de propriété sont bien définis et où les coûts de transaction sont nuls, la méthode
d’allocation des droits de propriétés est neutre.
5.3 Impacts structurels d’un SPÉ
5.3.1 Un SPÉ simple : POLENVI_1
Dans un premier temps, nous considérons un SPÉ que nous qualifions de simple, car il ne
va couvrir que les émissions de GES liées à la combustion de l’énergie provenant des
entreprises, tous secteurs confondus. Les émissions fugitives et celles provenant des
activités des ménages ne sont pas considérées dans ce scénario.
5.3.1.1 Protocole de modélisation de POLENVI_1
Pour ce premier scénario, la demande de permis pour chaque secteur ne correspond
qu’aux émissions provenant de la combustion de l’énergie. L’équation 5.3 doit donc être
remplacée par :
(5.15)
DPT j =
em tr DItr, j
tr
5.3.1.2 Simulation de POLENVI_1
Le SPÉ simple a été simulé en s’inspirant de l’objectif du Canada en vertu du Protocole
de Kyoto. L’objectif du Canada est d’émettre, pour la période 2008-2012, un niveau de
GES correspondant à ceux de 1990 moins 6%, ce qui correspond à un volume de 571 Mt
de GES en équivalent de CO2. Sachant que le Canada est censé émettre environ 809 Mt
en 2010, la cible de réduction du Canada est de 240 Mt, ce qui en pourcentage équivaut à
29,67%. En simulant une réduction de 30% de l’offre de permis, nous reproduisons donc
un ordre de grandeur réaliste de la cible de réduction de GES auquel le Canada est
confronté13. Le fait que notre modèle soit statique signifie que l’année 1996 joue le rôle
12
Dans un modèle où les propensions marginales à épargner du gouvernement et des entreprises seraient
différentes de un et non identiques, allouer un revenu à l’État ou aux entreprises ne générerait pas les
mêmes niveaux d’épargne et donc les mêmes effets. Ce point est démontré à la section 5.4 portant sur le
double dividende.
13
Notre cible de réduction retenue pour notre simulation s’inspire de la contrainte globale du Canada en
matière de réglementations sur les GES. Elle n’est cependant pas une bonne représentation du Plan
canadien pour la lutte aux changements climatiques qui prévoit le recourt au SPÉ pour réduire d’environ
13% et non 30 % les émissions de ceux qui sont visés par cette politique.
Chapitre 5 : Les politiques environnementales
57
de l’année 2010. Nous simulons donc un protocole fictif qui aurait été adopté une dizaine
d’années avant celui de Kyoto et fixant une cible d’émissions pour 1996. La sélection des
résultats de la simulation (la colonne identifiée scénario 1 au tableau 5.2 de l’annexe)
indique comment l’économie canadienne aurait alors réagi.
5.3.1.2.1 Analyse du mécanisme déterminant le prix du permis
Le prix du permis étant endogène, cela en fait une des principale variable d’intérêt de la
simulation. Dans les modèles économiques portant sur les changements climatiques, le
prix du permis joue un excellent rôle de mesure des variations de bien-être, comme l’ont
souligné Weyant et Hill (1999). En effet, cela est une mesure nécessairement produite
par tous les modèles, contrairement aux autres mesures de bien-être, ce qui facilite les
comparaisons. Pour cette simulation, le prix du permis se fixe à 15,67 $. Avant d’analyser
l’impact d’un prix du permis positif, voyons d’abord le mécanisme par lequel il est
déterminé.
À la situation de référence, l’offre totale de permis (SP) est égale à la demande totale de
permis (DEP). Cet équilibre implique que ce sont les demandes intermédiaires pour les
énergies émettrices (les variables DITCHA, j et DITFOS , j ) qui doivent s’ajuster pour
respecter la cible d’émissions, ce qui est démontré dans ce qui suit :
SP = DEP
=
j
EMIPj
=
j
=
j
tr
emtr DI tr , j
emCHA DI CHA, j +em FOS DI FOS , j
= emCHA DITCHA, j + em FOS DITFOS , j
Dans cette simulation, la somme des variables DITCHA et DITFOS pondérées par les
coefficients d’émissions doit donc être inférieure de 30% par rapport au scénario de
référence. Ex ante, cette baisse importante d’une composante de la demande, crée un
déséquilibre sur les marchés des énergies émettrices. Les prix d’équilibre de ces marchés
(les variables PcCHA et Pc FOS ) subissent donc des pressions à la baisse. Cependant, ces
pressions n’ont pas obligatoirement un effet dominant. D’après les résultats, PcCHA baisse
de 4,96%, mais Pc FOS est en légère hausse de 0,11%, ce qui sera expliqué
subséquemment.
Chapitre 5 : Les politiques environnementales
58
Une restriction sur les DITEP signifie aussi que les énergies émettrices sont des
consommations intermédiaires moins disponibles pour la production. Il y a donc un
phénomène de rareté qui pousse leur coût d’utilisation au niveau de la production
( PEPEP ) à la hausse. Ces hausses sont de l’ordre de 319,73% pour le charbon et 16,99%
pour les autres énergies fossiles. Le différentiel entre PEPEP et Pc EP détermine le prix
du permis. Le prix du permis est donc déterminé à la façon de la figure 5.3, c’est-à-dire
de façon résiduelle.
Défini par l’équilibre
sur le marché des biens :
Qtr = DITtr + Ctr + INVtr + SK tr
Défini de façon résiduelle
PEPep = Pc EP + PPERMIS × em ep
Défini par la demande des énergies
émettrices au niveau de la production :
DI CHA, j = DI FOS , j
ε nel
j
1 − ε nel
j
µ nel
j
PEPFOS
PEPCHA
µ nel
j
Figure 5.3 : Détermination du prix du permis dans le SPÉ de POLENVI_1
5.3.1.2.2 Analyse des impacts structurels
Les impacts structurels du SPÉ sont causés par deux ajustements pour atteindre la cible
d’émissions. Le premier ajustement est l’effet de substitution inter-énergétique. Cette
substitution réduit les demandes intermédiaires des énergies émettrices en faveur de
l’énergie non émettrice, dans ce cas-ci l’électricité. Les secteurs producteurs d’énergie
émetrices sont donc défavorisés par ce premier ajustement, car ils sont moins en
demande.
Le second ajustement est la baisse des niveaux d’activité que nous mesurons par la
production totale. Cet ajustement provient du fait que le SPÉ augmente les coûts de
Chapitre 5 : Les politiques environnementales
59
production, ce qui pousse les producteurs à diminuer leur volume de production pour
écouler leurs produits. Cet ajustement s’opère dans les secteurs intensifs en énergie
émettrice, soit le secteur industriel, le secteur du charbon et le secteur des autres énergies
fossiles, qui voient leur volume de production baisser de 0,63%, 23,54% et 2,32%,
respectivement.
La chute des niveaux de production dans le secteur des énergies émettrices et industriel
libère de la main d’œuvre et du capital qui, dans un monde de plein emploi des ressources
et de complète mobilité des facteurs de production, fait augmenter l’offre de ces facteurs
dans les autres secteurs. Il en résulte une baisse de leurs prix d’équilibre qui
correspondent ici à leurs productivités marginales. Avec cette baisse de la rémunération
des facteurs de production, les revenus des ménages vont donc être forcément à la baisse.
En considérant une allocation aux enchères, il en sera de même du revenu des entreprises.
Pour ce qui est du gouvernement, nous observerions le même effet, si ce n’était des 6
milliards de revenu qu’il retire du SPÉ.
Les effets du SPÉ sur la production ( XS ) des secteurs agricole et des services marchands
sont légèrement positifs. La cause de la hausse de la production est la diminution des prix
aux coûts des facteurs ( P ). Les produits peuvent donc être écoulés plus facilement. La
baisse du prix au coût des facteurs ( P ) s’explique par le fait que ces secteurs sont peu
intensifs en énergies émettrices. La hausse de leurs coûts de production due à
l’augmentation des coûts d’utilisation de l’énergie est contrecarrée par la baisse de la
rémunération des facteurs primaires de production. Les composantes de la demande de
l’économie canadienne sont généralement en baisse. L’économie nationale ne peut donc
supporter la hausse de la production agricole et des services marchands. Par conséquent,
la production est allouée en plus grande proportion au marché des exportations que sur le
marché intérieur. Au total, le volume de ressources des produits de ces secteurs dans
l’économie nationale ( Q ) diminue donc.
Le secteur des services non-marchands bénéficie aussi de la baisse du salaire et du taux
de rémunération du capital pour diminuer ses coûts de production et augmenter sa
production.
Les composantes de la demande de l’économie sont, rappelons-le, la consommation
finale, les consommations intermédiaires et l’investissement. Dans cette simulation, la
baisse du revenu des ménages réduit les niveaux de consommation finale et les baisses
prononcées des niveaux de production dans certains secteurs réduisent les niveaux de
Chapitre 5 : Les politiques environnementales
60
consommation intermédiaire. Pour ce qui est de l’investissement, elle est en légère hausse
de 0,73%. Cela est dû au fait que les revenus du SPÉ sont tous épargnés par le
gouvernement (dans le cas d’une enchère, sinon par l’agent entreprise dans le cas de
l’allocation grand-père), ce qui augmente les ressources disponibles pour
l’investissement. La hausse de l’investissement est donc un stimulant allant à l’encontre
de l’impact négatif du SPÉ.
En résumé :
•
Les impacts structurels du SPÉ sont négatifs pour les secteurs producteurs ou
fortement utilisateurs des énergies émettrices.
•
L’électricité, la seule énergie non émettrice, est en forte demande. Elle augmente sa
place de plus de 8% dans le bilan énergétique canadien.
•
Les secteurs agricole et des services marchands accroissent leur niveau de production
qui est allouée principalement à l’exportation. L’effet du SPÉ sur ces secteurs aurait
été certainement négatif s'
il n'
y avait pas eu une baisse du salaire et du taux de
rémunération du capital, qui ont compensé pour la hausse du coût d’utilisation des
énergies émettrices.
•
La production totale de l’économie, mesurée par la production intérieure brute (PIB)
au prix du marché, diminue de 1,12%.
•
Les ménages et les détenteurs de capital voient leurs revenus diminuer, mis à part
l’agent (le gouvernement ou l’agent entreprise) recevant les revenus substantiels du
SPÉ.
•
Les revenus du SPÉ augmentent le niveau d’épargne total de l’économie, ce qui
stimule l’économie par le canal de l’investissement.
5.3.2 Un SPÉ couvrant les émissions fugitives : POLENVI_2
5.3.2.1 Protocole de modélisation de POLENVI_2
Pour modéliser un SPÉ ne couvrant que le secteur productif, toutes émissions
confondues, la demande de permis de chaque branche est donnée par l’équation 5.3. La
condition d’équilibre est donc :
(5.16)
DEP =
DPT j
j
Les permis sont alloués aux enchères.
Chapitre 5 : Les politiques environnementales
61
5.3.2.2 Simulation de POLENVI_2
La simulation faite est la même que la précédente, soit une réduction de 30% des
émissions de GES. Il faut cependant noter que la cible de réduction en terme absolue est
différente du premier scénario. Cette façon particulière de modéliser le SPÉ a pour but
d’observer le comportement du modèle lorsque les émissions sont en relation différente
avec les intrants de production. Il convient donc de maintenir l’économie sous la même
contrainte environnementale, ce qui implique une cible réduction relative et non absolue.
Une sélection des résultats se retrouve au tableau 5.2 sous la colonne identifiée scénario
2.
5.3.2.2.1 Analyse du mécanisme déterminant le prix du permis
Suite à cette simulation, le prix du permis est de 24,10$. Cette hausse par rapport au
scénario précédent s’explique par le fait que la réduction des émissions fugitives est plus
difficile que pour les d’émissions provenant de la combustion de l’énergie. Il n’est pas
possible de substituer avec les autres intrants pour réduire les émissions fugitives. Seule
la baisse des niveaux d’activités permet la réduction du niveau d’émissions.
Formellement, nous pouvons dire que la demande de permis est plus inélastique lorsque
les émissions fugitives sont couvertes par le SPÉ. Plus la composante de la demande
correspondant aux émissions fugitives sera importante, plus celle-ci sera inélastique. Une
réduction du même pourcentage de l’offre totale de permis génère donc un prix
d’équilibre du permis plus élevé.
5.3.2.2.2 Analyse des impacts structurels
Un prix du permis supérieur amplifie les impacts structurels suivants :
•
l’ajustement par la substitution inter-énergétique;
•
l’ajustement par la baisse des niveaux d’activités dans les secteurs fortement intensifs
en énergies émettrices;
•
les chutes du salaire et du taux de rémunération du capital;
•
La chute du PIB au prix du marché.
Dans ce deuxième scénario, la baisse des revenus des agents est si importante que le
niveau global d’épargne de l’économie chute, bien que les recettes de plus de 11 milliards
du SPÉ soient entièrement épargnées. Les revenus supplémentaires retirés du système ne
réussissent pas à stimuler l’économie par le canal de l’investissement. Au total, le PIB au
prix du marché est en baisse de 2,65%.
Chapitre 5 : Les politiques environnementales
62
Dans le scénario précédent, les entreprises productrices d’énergies émettrices et les
entreprises industrielles supportaient la majeure partie du fardeau du SPÉ. Ici, le fardeau
reste important pour ces entreprises, même qu’il s’accroît. À cette liste d’entreprises,
nous pouvons aussi ajouter les entreprises agricoles. La branche agricole est maintenant
touchée fort négativement par le SPÉ, car son processus de production est le plus polluant
en termes d’émissions fugitives. Les entreprises de ce secteur voient donc leur coût de
production grimper, ce qui implique que les produits agricoles sont délaissés par les
agents. Le volume de la production agricole chute de 6,78%. La substitution favorise
principalement le secteur des services, qui contrairement au scénario précédent, est en
légère expansion. Sa production augmente de 0,19% en volume.
En résumé :
•
L’introduction des émissions fugitives augmente le coût à la marge de respecter une
cible d’émissions par rapport à un SPÉ où elles sont négligées.
•
Les impacts structurels, notamment ceux découlant des effets de substitution, sont
amplifiés par un prix de permis plus élevé.
•
Le secteur agricole, le plus intensif en émissions fugitives, a maintenant un fardeau
dû au SPÉ. La redistribution du fardeau du SPÉ est donc aussi affectée lorsque les
émissions fugitives sont considérées.
•
Au total, le PIB au prix du marché est en baisse de 2,65%.
5.3.3 Un SPÉ ne couvrant que l’industrie : POLENVI_3
Le Canada prévoit restreindre l’utilisation du SPÉ aux grands émetteurs industriels.
Cependant, le niveau de désagrégation de notre modèle ne nous permet pas de
différencier les grands émetteurs industriels. La meilleure représentation de ce scénario
que nous pouvons faire est de considérer un SPÉ ne couvrant que le secteur industriel. En
restreignant le SPÉ à un secteur, cela nous permet de mettre en pratique l’approche
d’Ellerman et Decaux (1998). Il faut noter que, contrairement à ceux-ci, nous générerons
des fonctions de coût marginal de dépollution pour un secteur et non une région.
5.3.3.1 Protocole de modélisation de POLENVI_3
Simuler ce scénario revient à considérer que la demande de permis de l’économie ( DEP )
provient seulement des émissions liées à la combustion et des émissions fugitives du
secteur industriel ( DPTind ). L’équation 5.3 , la demande de permis totale, devient :
(5.17)
avec
DEP = DPTind
Chapitre 5 : Les politiques environnementales
(5.18)
DPTind =
63
emtr DItr,ind + fugind XSind
tr
La fonction de coût marginal de dépollution du secteur industriel est générée en simulant
le modèle sous diverses cibles d’émissions. Les paramètres de la fonction sont
approximés suivant la forme proposée par Klepper et Peterson (2003) (équation 5.2).
5.3.3.2 Simulation de POLENVI_3
La simulation consiste à réduire de 30% les émissions de GES au secteur industriel. Les
impacts d’une telle réduction de l’offre de permis sont présentés au tableau 5.2.
5.3.3.2.1 Analyse des impacts structurels
Le secteur industriel est bien sûr touché négativement par le SPÉ, de même que le secteur
du charbon, qui est délaissé de façon importante. L’effet négatif du SPÉ sur l’industrie
s’explique par la hausse des coûts de production, ce qui laisse les produits industriels
moins en demande. Les chutes des niveaux de production de la branche industrielle et
celle du charbon sont suffisantes pour que l’économie nationale soit touchée
négativement dans son ensemble. Le PIB au prix du marché diminue en effet de 0,77%
par rapport au scénario de référence. Le salaire et le taux de rémunération du capital
baissent. Ces réductions ne sont cependant pas suffisantes pour que l’épargne totale soit
en baisse. Les revenus du SPÉ contrecarrent cet effet dépressif. Les secteurs autres
qu’industriel et du charbon voient leur coût de production diminuer. Ils haussent leur
production. Cette hausse de production est cependant principalement allouée aux marchés
des exportations, car le marché extérieur est relativement plus intéressant que le marché
local. En effet, les prix aux exportations sont relativement en hausse par rapport aux prix
locaux, ce qui s’explique par la baisse des composantes de la demande intérieure.
5.3.3.2.2 Courbe de coût marginal de dépollution du secteur industriel
En suivant le raisonnement d’Ellerman et Decaux, nous pouvons interpréter le prix du
permis comme le coût marginal de dépollution. Dans cette simulation, le prix du permis
se fixe à 14,08$. Le coût marginal de dépollution des émissions de GES du secteur
industriel est donc presque de moitié inférieur à celui de l’ensemble du secteur productif
pour une cible de réduction donnée, ici 30%. Cela peut s’expliquer par le fait qu’une
réduction à la marge des énergies polluantes est moins coûteuse étant donné que le
processus de production de l’industrie est fortement intensif en ce type d’énergie. Le
secteur de l’économie qui est le plus grand demandeur de permis en termes absolus
(68,5% des émissions proviennent du secteur industriel) n’est donc pas forcément celui
qui a le plus de difficulté à dépolluer. Le faible coût marginal de dépollution des
Chapitre 5 : Les politiques environnementales
64
industries pourrait faire en sorte que le secteur industriel se retrouverait à être un vendeur
de permis dans un SPÉ couvrant tous les secteurs de l’économie.
Le tableau 5.1 présente les paramètres de la fonction de coût marginal de dépollution
pour le secteur industriel et la figure 5.4 trace la courbe correspondante. Les paramètres
de la fonction sont approximés suivant la forme générale de Klepper et Peterson
(2003) (équation 5.2). Nous fixons le paramètre β à deux, car c’est la forme donnant le
plus grand R2 à la régression. Les fonctions sont donc quadratiques.
Tableau 5.1 : Coût marginal de dépollution du secteur industriel et paramètre de la
fonction de coût marginal de dépollution
Le coût total du contrôle des émissions pour l’industrie est donné par :
(5.19)
CT =
AB
CMD
o
=
AB
0,009 ⋅ x 2 ⋅ dx
o
0,009 ⋅ AB 3
3
où CT : coût total de contrôle des émissions
=
Chapitre 5 : Les politiques environnementales
65
Pour une cible de réduction de 30%, le coût total de contrôle des émissions du secteur
industriel est de plus de 1,05 milliards de dollars.
Figure 5.4 : Courbe de coût marginal de dépollution pour l'
industrie
Il faut noter que la fonction a été générée dans un contexte où tous les autres secteurs
adoptent un statu quo sur leur activité de dépollution. L’interprétation de la courbe de
coût marginal de dépollution n’est donc valable que dans cette situation particulière. Pour
une situation où le secteur agricole devrait aussi réduire ses émissions, par exemple, cela
aurait des impacts structurels influençant les coûts marginaux de dépollution des autres
secteurs, dont celui industriel. Il faudrait alors régénérer la fonction de coût marginal de
dépollution. En reprenant la terminologie d’Ellerman et Decaux, nous disons que les
fonctions de coût marginal de dépollution ne sont pas robustes. Elles sont en effet
sensibles au contexte dans lequel elles ont été estimées.
En résumé :
•
•
Au Canada, l’industrie a un coût à la marge de dépollution inférieur au secteur
productif pris dans son ensemble. Pour un SPÉ couvrant tous les secteurs productifs
de l’économie, les entreprises industrielles pourraient être des vendeuses de permis.
Les MEGC portant sur les changements climatiques peuvent être utilisés pour estimer
les fonctions de coût marginal de dépollution d’un secteur ou d’une région sans
données préalables sur ces fonctions.
Une extension à la présente section serait de générer les fonctions de coût marginal de
dépollution pour chacun des secteurs et l’ensemble du secteur productif. Nous pourrions
Chapitre 5 : Les politiques environnementales
66
étudier l’équité du SPÉ au Canada, c’est-à-dire quels sont les coûts totaux de dépollution,
qui sont les acheteurs et les vendeurs du système, etc. Cette extension serait d’autant plus
intéressante si le secteur industriel était désagrégé et que nous pourrions générer les
fonctions pour les différents types d’entreprises de ce secteur. La question de la
robustesse des fonctions poserait cependant rapidement une limite à l’éventail de
scénarios envisageables.
5.3.4 Un SPÉ avec achats de permis internationaux : POLENVI_4
Il y a de nombreuses raisons poussant à modéliser un SPÉ national intégré à un SPÉ
international. D’abord, le Protocole de Kyoto propose l’implantation d’un SPÉ à l’échelle
internationale. Ensuite, le Plan canadien pour lutter contre les changements climatiques
prévoit la participation au SPÉ international. La question de l’intégration d’un SPÉ
national à un SPÉ international est importante pour le Canada, car il propose d’assurer un
prix plafond de 15$ aux permis du SPÉ national à concurrence d’un maximum de 15% du
volume des permis alloués.
Outre les impacts structurels d’un SPÉ avec achats de permis internationaux, la
simulation faite dans cette section permet d’évaluer le fardeau auquel s’expose le
gouvernement fédéral canadien par le mécanisme de plafonnement du prix du permis. En
effet, pour un prix du permis dépassant les 15$, le gouvernement fédéral subventionne
d’un montant correspondant à la marge supérieure. Une des questions que nous nous
posons est de déterminer l’incitation des entreprises canadiennes à réduire leurs
émissions et, par le fait le même, le volume de permis internationaux que le Canada devra
acquérir à 15$ le permis.
5.3.4.1 Protocole de modélisation de POLENVI_4
Pour ce scénario, le SPÉ considéré est celui couvrant l’ensemble des secteurs pour tous
les types d’émissions avec l’allocation aux enchères des permis, tel qu’au second
scénario. Le prix du permis est fixé au prix international étant donné que le Canada est un
petit joueur dans le SPÉ international. Nous le fixons à celui prévu par le mécanisme de
plafonnement du prix du permis canadien, soit 15$.
La modélisation d’un SPÉ avec achat de permis internationaux ne nécessite que quatre
transformations par rapport aux SPÉ modélisés précédemment. Premièrement, le prix du
permis devient une variable exogène. Deuxièmement, la condition d’équilibre du SPÉ
devient non contraignante, car la demande de permis des entreprises ( DEP ) est égale à
Chapitre 5 : Les politiques environnementales
67
l’offre intérieure de permis ( SP ) à laquelle s’ajoute les permis internationaux
(WPERMIS ) si nécessaire. L’équation 5.5 d’équilibre du SPÉ devient donc :
(5.20)
DEP = SP + WPERMIS
Troisièmement, l’achat de permis étrangers affecte la balance des paiements extérieurs (le
déficit courant). L’équation 2.42 doit maintenant inclure l’achat de permis étrangers :
(5.21)
SR = e
Pwmtr M tr + TWM + TWE + TWG + RPW
tr
Pfobtr EX tr + DPW + e ⋅ TMW + TGW + PPERMIS ⋅ WPERMIS
−e
tr
Il faut noter que dans notre modèle, la balance des paiements extérieurs est fixée, ce qui
aura un impact sur la façon dont le modèle s’ajuste pour l’achat des permis
internationaux.
Finalement, l’agence régulatrice des permis, que nous considérons comme une division
de l’agent gouvernement de notre modèle, se charge de l’achat des permis internationaux.
La valeur des achats de permis internationaux vient donc réduire l’épargne
gouvernementale de cette façon :
(5.22)
SG = YG − G − TG − TWG − DPG − PPERMIS ⋅ WPERMIS
5.3.4.2 Simulation de POLENVI_4
La présente simulation consiste à réduire de 30% l’offre de permis intérieure à un prix du
permis fixé à 15$. Le SPÉ couvre tous les secteurs d’activités et les émissions fugitives,
comme au second scénario. L’analyse de simulation de ce quatrième scénario se fait donc
en comparaison de celle du deuxième scénario. Les résultats se retrouvent au tableau 5.2.
5.3.4.2.1 Ampleur du fardeau pour le gouvernement canadien
À un prix de 15$ le permis, l’incitation pour les entreprises canadiennes est de diminuer
d’environ 25% leur niveau d’émissions. Le gouvernement canadien doit donc acheter des
permis internationaux pour le 5% restant pour s’assurer de respecter sa cible d’émissions.
Le volume de permis internationaux demandé est donc de 37,12 Mt.
Chapitre 5 : Les politiques environnementales
68
5.3.4.2.2 Analyse des impacts structurels
Les variations du présent scénario vont dans le même sens que celles du second. Leur
ampleur est cependant moins importante. Par exemple, la chute du PIB au prix du marché
est de 0,70% comparativement à 2,65%. Les baisses des niveaux d’activités dans les
secteurs émetteurs, de même que la rémunération des facteurs primaires de production,
sont aussi moins grandes. Le prix du permis plus faible explique ces résultats.
Relativement au second scénario, la participation au SPÉ international réduit l’épargne
gouvernementale, car l’achat des permis internationaux est débité aux revenus du
gouvernement. En considérant une allocation aux enchères, l’épargne publique augmente
seulement de 20,91% dans le présent scénario par rapport à 36,70% dans le second
scénario. La hausse réduite de l’épargne gouvernementale diminue les ressources
allouées à l’investissement. Cette composante de la demande de l’économie nationale est
donc en plus forte baisse quoique les revenus de salaire et de capital soient plus
importants. La baisse des niveaux de consommation finale et intermédiaire est cependant
moins importante. Au total, les composantes de la demande de l’économie sont donc
touchées moins négativement, relativement au second scénario.
L’achat de permis internationaux influence aussi la dynamique des échanges avec le
RdM. En effet, le fait de poser la balance des paiements extérieurs fixe dans le modèle
implique qu’une hausse de l’achat de produits étrangers, comme les permis échangeables
internationaux, doit être contrebalancée par une hausse des exportations ou par une baisse
des importations. Le flux des échanges internationaux pour les produits réels entre le
Canada et le RdM est donc stimulé par une participation au SPÉ international.
En résumé :
•
En terme du PIB au prix du marché, l’ampleur du fardeau du SPÉ canadien est réduite
lorsqu’il est intégré dans un SPÉ international.
•
Pour un prix de 15$ le permis et une cible de réduction de 30%, le Canada se retrouve
à être un acheteur de permis sur le SPÉ international.
•
Dans ce scénario, l’achat des permis internationaux se chiffre à 556 millions de
dollars et devrait contribuer pour environ 5% de la cible de réduction du Canada.
•
Les flux du commerce international pour les produits réels sont stimulés par la
participation à un SPÉ international. La répartition du fardeau du SPÉ est donc
affectée.
Chapitre 5 : Les politiques environnementales
69
5.4 La neutralité de la méthode d’allocation des permis : POLENVI_5
Dans un cadre d’équilibre général, la neutralité des méthodes d’allocation peut être
remise en question. En effet, il est possible que, sans déroger aux hypothèses de base du
théorème, des distorsions de marché compromettent la neutralité de la méthode
d’allocation des permis. L’allocation des permis d’un SPÉ est une redistribution de
richesses. Dans un monde sans distorsions, cette redistribution est sans effet. La perte de
revenu d’un agent est exactement compensée par un gain pour un autre agent. Cette
section montre que si certaines distorsions sont considérées, la méthode d’allocation des
permis n’est plus neutre, car elle peut possiblement réaliser le double dividende.
5.4.1 Les distorsions du système fiscal
Le système fiscal est à la source de distorsions lorsqu’il induit des changements dans les
prix relatifs. Cela s’explique par le fait qu’une variation des prix relatifs conduit l’agent
taxé à faire des substitutions dans son panier de consommation. Ces substitutions créent
une perte de bien-être. La perte de bien-être totale de l’agent taxé provient donc de la
diminution de ses revenus net de taxes et de l’effet de substitution. Or, le gain maximum
de bien-être d’une taxe ne peut être égal qu’aux recettes de la taxe. Les pertes de bienêtre sont supérieures aux gains. Le différentiel est une perte sèche : la distorsion du
système fiscal.
Un impôt sur le revenu crée une perte sèche lorsque l’offre de travail n’est pas
parfaitement inélastique. L’élasticité de l’offre de travail est habituellement due à la
possibilité de substituer le loisir au travail. La présence d’un impôt a pour effet de
diminuer le coût d’opportunité du loisir. L’impôt sur le revenu favorise donc une
substitution vers des activités autres que le travail, créant ainsi la perte sèche, tel que
représentée par le triangle ABC de la figure 5.5.
De la même façon, si la demande des ménages en produits de consommation n’est pas
parfaitement inélastique, une taxe à ce niveau induit des distorsions. Seule la taxe
forfaitaire, qui est sans effet sur les prix relatifs, ne crée pas de perte sèche.
En présence de distorsions préexistantes dans l’économie, la méthode d’allocation des
permis peut permettre au SPÉ de réaliser le double dividende. En effet, en plus de
conduire au respect d’une cible environnementale (première dividende), les revenus du
SPÉ peuvent être recyclés pour réduire les impôts ou autres taxes à la source de
distorsion (deuxième dividende). Dans le cas d’une allocation gratuite, cela n’est pas
Chapitre 5 : Les politiques environnementales
70
possible. L’économie se retrouve donc affectée différemment par la méthode
d’allocation.
$
Offre de travail
(non parfaitement inélastique)
Salaire brut
C
A
impôt
Salaire net
B
Demande de travail
Main-d’oeuvre
Figure 5.5 : Perte sèche d’un impôt sur le revenu
Il faut cependant noter que le recyclage des revenus d’un SPÉ ne conduit pas
obligatoirement à la réalisation du double dividende. Sachant qu’une politique
environnementale affecte les frontières de prix relatifs, l’introduction d’un SPÉ exacerbe
donc les distorsions créées par les taxes préexistantes, autres que forfaitaires. Il est donc
possible qu’un SPÉ, avec ou sans recyclage des revenus, ne conduisent qu’à un
dividende, le respect de la cible environnementale. Pour un prix de permis trop élevé, il
est même possible que les distorsions induites par le SPÉ dominent les bénéfices du
respect de la cible environnementale. Dans ce cas, il n’y a aucun dividende.
5.4.2 Revue de littérature
Parry et Williams (1999) ainsi que Jensen et Rasmussen (2000) sont de ceux qui ont traité
la question du double dividende pour un SPÉ. Ces auteurs ont tous considéré l’impôt sur
le revenu en présence d’une offre de travail non parfaitement inélastique comme étant la
distorsion préexistante dans leur modèle. Les revenus de l’enchère des permis sont
recyclés pour réduire cet impôt. Ils concluent unanimement que la méthode d’allocation
n’est pas neutre. Jensen et Rasmussen (2000) soulignent que cette conclusion n’est valide
que si l’offre de travail n’est pas parfaitement inélastique, c’est-à-dire que le système
fiscal induit des distorsions.
Chapitre 5 : Les politiques environnementales
71
5.4.3 Protocole de modélisation de POLENVI_5
La modélisation du double dividende est, pour les modélisateurs de MEGC, qu’une
question de fermeture macro-économique.
Dans notre modèle, nous considérons jusqu’à maintenant une fermeture où la valeur de
l’investissement total est déterminée par les niveaux d’épargne des agents de l’économie.
Modéliser le recyclage des revenus provenant des enchères du SPÉ peut simplement se
faire en posant l’hypothèse que le gouvernement adopte un objectif d’épargne et qu’il
ajuste le système fiscal en conséquence. Les revenus du SPÉ ne contribuent donc plus à
gonfler l’épargne, mais sont plutôt recyclés pour diminuer les taxes ou les impôts. Notre
modèle considère donc une nouvelle fermeture macro-économique où l’épargne
gouvernementale est une variable exogène tandis que les taux d’imposition sur le revenu
des ménages est maintenant un paramètre endogène.
Comme le souligne la littérature, le recyclage des revenus des enchères n’a un impact
distributif que si le système fiscal est à la source de distorsions préexistantes dans
l’économie. Pour notre modèle, il n’est pas nécessaire d’apporter de transformation
supplémentaire à ce niveau, car le système fiscal considéré jusqu’à maintenant est à la
source de distorsions. En effet, les décisions d’épargne et de consommation finale ne sont
pas parfaitement inélastiques. Elles sont caractérisées par une fonction Cobb-Douglas, ce
qui implique, rappelons-le, que les élasticités-revenu de l’épargne et de la consommation
sont unitaires. L’impôt sur le revenu des ménages crée donc une perte sèche parce qu’il
influence le revenu disponible, qui affecte lui-même le niveau d’épargne et de
consommation des ménages. Notre protocole de modélisation du double dividende se
distingue donc des approches retenues dans la littérature. Les distorsions préexistantes
considérées ne sont pas reliées à l’offre de travail, mais aux décisions d’épargne et de
consommation des ménages.
Pour saisir si, formellement, le double dividende est réalisé, nous introduisons une
mesure exacte de la variation de bien-être : la variation équivalente. La variation
équivalente est le montant d’argent qui ferait renoncer un individu à un changement de
prix, compte tenu qu’il conserve le niveau d’utilité correspondant aux nouveaux prix. En
terme de fonction de dépense cela correspond à :
(5.23)
VE = e(PC 0,v1 ) − e(PC1,v1)
où VE
: variation équivalente;
e( PC , v) : fonction de dépense;
Chapitre 5 : Les politiques environnementales
v1
: niveau d’utilité obtenu avec PC1;
PC
: vecteur des prix composites ( Pctr ).
72
Lorsque l’individu a une fonction d’utilité de forme Cobb-Douglas, comme dans notre
modèle, la fonction de dépense est de la forme14 :
(5.24)
Pc tr
e(PC,v) = ∏
γ tr
tr
γ tr
v
où γ tr : paramètre de partage de la Cobb-Douglas.
En introduisant l’équation 5.24 dans l’équation 5.23, l’équation de la variation
équivalente pour une Cobb-Douglas est donnée par :
(5.25)
VE = ∏
tr
0 γ tr
Pc tr
1
Pc tr
YDH1 − YDH 0
Si le scénario avec recyclage des revenus des enchères conduit à une variation positive de
bien-être, nous pourrons conclure que le double dividende est réalisé.
5.4.4 Simulation de POLENVI_5
La simulation pour cette version de notre MEGC considère le SPÉ couvrant tous les
secteurs d’activités et tous les types d’émissions. La cible de réduction est encore de 30%
par rapport au scénario de référence. Pour montrer l’importance de l’aspect distributif
des méthodes d’allocation, cette simulation est comparée à celle du SPÉ avec l’allocation
grand-père (second scénario tableau 5.2)15.
Le prix du permis n’est pas une source importante d’hétérogénéité entre les résultats des
deux méthodes d’allocation. Il est légèrement plus élevé dans le cas de l’allocation grandpère. La différence est de l’ordre de 2,5%. La substitution inter-énergétique est donc de la
même ampleur pour les deux méthodes d’allocation. La valeur moins élevée du prix du
permis dans le cas de l’allocation aux enchères avec recyclage des revenus s’explique par
la baisse plus prononcée du niveau d’activité du plus grand demandeur de permis, le
secteur industriel, ce qui est expliqué subséquemment.
14
Pour un détail de la dérivation complète voir Varian 1992.
Le second scénario considère une allocation aux enchères, mais sans recyclage des revenus. Cela revient
à l’allocation grand-père comme il a été expliqué précédemment. Les seuls résultats du tableau 5.2 n’étant
pas valables sont ceux pour les revenus et de l’épargne des agents entreprise et gouvernement.
15
Chapitre 5 : Les politiques environnementales
73
En comparant les deux méthodes d’allocation, le premier facteur à la source des
disparités est l’investissement. Nous observons une baisse plus prononcée de la valeur de
l’investissement totale lorsque l’allocation aux enchères tente de réaliser le double
dividende. Cela est la conséquence que l’épargne totale ne hausse pas du plein montant
des revenus supplémentaires provenant du SPÉ. En effet sous ce scénario, les revenus du
SPÉ sont tous alloués aux ménages qui voient leur revenu après taxes augmenter.
Toutefois, la décision d’épargne de ceux-ci n’est pas parfaitement inélastique.Toute
hausse de revenu des ménages n’est pas entièrement dédiée à l’épargne, une partie est
aussi consommée.
La diminution des ressources disponibles pour l’investissement cause une baisse plus
importante, par rapport au second scénario, du niveau d’activité dans le secteur
industriel, étant donné que celui-ci est le principal producteur des biens
d’investissements.
Nous aurions pu anticiper que l’allocation « grand-père », avec l’important transfert
qu’elle implique aux entreprises, devrait être la méthode d’allocation minimisant la chute
de production. Or, ce n’est pas le cas. Le niveau de production globale est affecté moins
négativement dans ce cinquième scénario. Le PIB au prix du marché baisse de 2,65 %
avec une allocation « grand-père » comparativement à 2,41% avec une allocation aux
enchères et recyclage des revenues. Pour cette dernière méthode d’allocation, la chute
plus importante de la production industrielle n’a pas un effet dominant. Il y a donc un
effet qui contrecarre la chute de l’investissement.
La hausse des revenus disponibles des ménages est synonyme d’une hausse des dépenses
de consommation. Cette hausse est un deuxième facteur à la source des disparités entre
les méthodes d’allocation. Nous pouvons aussi conclure qu’elle compense pour la chute
de l’investissement, car c’est la seule raison pouvant expliquer que le PIB au prix du
marché soit en hausse comparativement au second scénario.
Pour les ménages, l’allocation aux enchères avec recyclage des revenus a un double effet
positif : le taux d’imposition sur leur revenu baisse et le taux de salaire hausse. Ce double
effet est synonyme d’une hausse de 0,69% de leur bien-être par rapport au scénario sans
SPÉ et de 1,39% par rapport à l’allocation grand-père. Le double dividende est donc
réalisé.
Chapitre 5 : Les politiques environnementales
74
La hausse du salaire est indirectement due à la hausse de la consommation finale. En
effet, la hausse de la consommation finale bénéficie aux secteurs des services, des autres
énergies fossiles et de l’électricité, qui voient leur volume total de ressources dans
l’économie ( Q) augmenter par rapport au second scénario. Cette hausse se traduit par des
prix composites ( Pc ) relativement plus élevés pour ces produits. La hausse de ces prix
composites est à la source de toute une série de rétroactions expliquant la hausse du
salaire :
•
La hausse des prix composites dans les secteurs des services, des autres énergies
fossiles et de l’électricité fait des pressions à la hausse sur les coûts de production, car
ces produits constituent des consommations intermédiaires.
•
Les coûts de production sont en hausse, ce qui est synonyme de prix au coût des
facteurs ( P ) plus élevés, toujours par rapport au second scénario.
•
Finalement, ces prix plus élevés augmentent les productivités marginales des facteurs
primaires de production, car celles-ci sont calculées en valeur16.
Il faut noter que la hausse du salaire amplifie la hausse des niveaux de consommation
finale. La hausse de la consommation a donc un effet circulaire.
En résumé :
•
La méthode d’allocation des permis n’est plus neutre s’il y a présence de distorsions
préexistantes dues au système fiscal.
•
L’allocation grand-père est dominée à tous les niveaux par l’allocation aux enchères
avec recyclage des revenus, que ce soit en termes de croissance du PIB ou en termes
de variation de bien-être.
•
Le recyclage des recettes des enchères des permis permettrait de réaliser le double
dividende au Canada.
•
La répartition du fardeau du SPÉ est différente. Ici, le gouvernement supporte le
fardeau aux bénéfices des ménages.
5.5 Conclusion
Ce chapitre a étudié la méthodologie pour introduire un SPÉ dans un MEGC et, plus
particulièrement pour adapter un MEGC pour l’analyse des impacts structurels d’un SPÉ
ainsi que pour l’étude de la neutralité de la méthode d’allocation des permis. Nos
16
Les productivités marginales des facteurs primaires de production (Pm) sont mesurées en valeur. Leur
forme générale est :
∆Pmvaleur = ∆Pi × Pmvolume
Les variations des prix au coût des facteurs influencent donc la valeur des productivités marginales
Chapitre 5 : Les politiques environnementales
75
simulations ont aussi montré qu’il était possible d’apporter une certaine lumière sur les
questions économiques reliées à la lutte aux changements climatiques au Canada.
Nous pouvons conclure que la modélisation d’un SPÉ nécessite relativement peu d’effort
de modélisation. Il faut noter qu’il existe deux types de MEGC introduisant les politiques
environnementales. Il y a les MEGC développés pour étudier les impacts économiques
d’une cible prédéterminée de contrôle de la pollution et ceux développés pour déterminer
le niveau optimal de contrôle. Notre MEGC appartient à la première catégorie. Dans le
cas contraire, la modélisation de la politique environnementale est un exercice plus ardu.
Il faut notamment que les dommages environnementaux soient pris en compte pour
déterminer l’optimalité de la politique.
Pour la maîtrise du travail d’analyse des impacts structurels d’un SPÉ dans un MEGC,
cela est fortement dépendant de la compréhension du fonctionnement du SPÉ. Nous
avons donc montré le fonctionnement du SPÉ en considérant plusieurs scénarios quant
aux modalités du SPÉ.
La maîtrise de l’étude la neutralité de la méthode d’allocation des permis nécessite quant
à elle la compréhension des distorsions fiscales dans les MEGC. Nous avons montré que
pour un MEGC considérant des distorsions fiscales pré-existantes (peu importe leur
nature), la méthode d’allocation des permis n’était plus neutre.
Un exercice important à la modélisation par MEGC a cependant été négligé dans ce
chapitre, soit la sensibilité des résultats aux hypothèses de modélisation. Le prochain
chapitre est dédié à ce volet. Nous considérerons notre MEGC sous différentes
hypothèses et mécanismes concernant l’ajustement des agents aux politiques
environnementales.
76
Annexe 5.1
Tableau 5.2 : Une sélection des résultats des simulations des cinq scénarios de POLENVI
Variables
Définition
Symbole
Sitaution de référence
Volume
Valeur
Scénario 1
Volume
Scénario 2
Valeur
Volume
Valeur
En millions de dollars canadiens
Scénario 3
Volume
Valeur
Scénario 4
Volume
Valeur
Scénario 5
Volume
Valeur
Salaire
w
-
1,000
-
0,988
-
-1,15
Taux de rémunération du capital
r
-
1,000
-
0,986
P
industrie
P
services marchands
P
agr
-
1,000
-
0,997
ind
-
1,000
-
1,005
ser
-
1,000
-
0,993
-
-
1,000
-
1,006
P
fos
-
1,000
-
1,004
électricité
P
elec
-
1,000
-
1,002
P
1,037
-
1,001
cha
-
0,980
-
1,001
-
1,012
-
0,996
0,43
-
1,000
-
0,991
Pc
industrie
Pc
services marchands
Pc
charbon
Pc
autres énergies fossiles
Pc
électricité
Pc
agr
-
1,000
-
0,997
ind
-
1,000
-
1,004
-
1,000
-
0,993
1,029
-
1,000
-
1,000
-
0,950
-
1,000
-
1,001
-
1,000
-
1,003
-
agriculture
Pv
industrie
Pv
services marchands
Pv
charbon
Pv
autres énergies fossiles
Pv
électricité
Pv
services non marchands
Pv
agr
-
1,000
-
0,987
ind
-
1,000
-
0,987
ser
-
1,000
-
0,987
0,934
-
1,005
-
0,987
-
-
1,000
-
0,987
-
1,000
-
0,987
-
1,000
-
0,988
-1,18
0,993
-
0,996
-
1,005
1,000
-
1,007
-
0,957
-
0,997
-
0,997
0,991
-2,97
-0,89
0,970
0,991
-2,99
-0,90
-
0,970
0,991
-2,97
-0,89
0,970
0,991
-2,99
-0,90
-
0,970
0,991
-2,99
-0,90
-
0,970
0,991
-2,97
-0,89
0,972
0,992
-2,80
-0,83
1,002
-
0,982
3,73
0,23
-1,82
-
1,002
-
1,013
-
0,997
0,24
0,67
-
1,31
0,985
-0,27
-
-1,54
-
1,017
-
0,999
-
1,029
-
1,001
-
0,982
2,88
-0,08
-
0,986
0,05
-1,37
-
0,949
-
1,003
-1,77
-
0,935
-
1,006
-
0,999
-5,14
-6,47
0,27
-
0,998
0,59
-0,25
-
0,980
-
0,980
-
0,980
-0,13
-
0,973
-
0,973
-
0,973
-
0,973
-
0,973
-
0,973
-
0,974
-2,02
-2,73
-2,04
-2,75
-2,03
-
0,980
-2,73
-2,04
-
0,980
-
0,980
-2,75
-2,04
-2,75
-2,02
-
0,981
-1,91
0,98
-2,03
1,69
-0,31
0,997
1,037
-
-0,34
-4,30
-
-
0,00
-0,60
0,970
-
-
0,55
0,994
0,970
-3,00
-1,40
-0,43
-
-
-0,01
-0,66
-
-1,25
ntser
-
-
-
0,986
-0,40
-0,34
-1,26
elec
0,997
-
-0,36
-0,28
-1,26
fos
0,996
0,50
-1,26
1,000
-
1,022
1
-0,36
-6,58
-1,26
-
0,980
-
-1,25
cha
0,996
-1,97
0,33
Prix valeur ajoutée
0,996
0,975
-2,50
2,18
0,64
-
0,978
-
-0,62
-0,01
0,11
elec
0,994
2,86
-4,96
fos
0,978
-
-0,68
cha
-
-
-2,22
-0,50
-2,24
0,42
-
-
1,006
-0,41
-0,26
ser
0,995
-
1,20
0,25
ntser
-
0,11
0,981
-1,86
-
0,10
0,58
-
0,99
-0,98
-2,02
-0,85
Prix composite
agriculture
-
3,69
0,50
autres énergies fossiles
services non marchands
-
-0,70
P
0,967
0,992
-0,81
-3,25
-0,28
charbon
-
-2,73
-1,37
Prix au coût des facteurs
agriculture
0,973
-2,72
-2,57
77
Annexe 5.1
Tableau 5.2 (suite) : Une sélection des résultats des simulations des cinq scénarios de POLENVI
Variables
Définition
Symbole
Sitaution de référence
Volume
Valeur
Scénario 1
Volume
Scénario 2
Valeur
Volume
Valeur
En millions de dollars canadiens
Scénario 3
Volume
Valeur
Scénario 4
Volume
Valeur
Scénario 5
Volume
Valeur
Production totale
agriculture
XS
agr
50630,000
50630,000
50731,551
XS
0,20
-0,10
-6,77
-3,32
0,63
0,13
-4,08
-1,96
-6,92
-3,47
industrie
ind
595198,000
595198,000
591465,297
594422,623
589646,825
590236,472
591021,255
594567,383
591064,336
591064,336
586083,536
587255,703
-0,63
-0,13
-0,93
-0,83
-0,70
-0,11
-0,70
-0,69
-1,53
-1,33
701732,657
696820,528
703006,694
688946,560
702051,611
697839,301
702577,523
692741,438
706142,632
693432,065
0,01
-0,69
0,19
-1,81
0,06
-0,54
0,13
-1,27
0,64
-1,17
1297,712
1305,498
1251,235
1252,486
1386,015
1380,471
1320,580
1320,580
1248,867
1251,365
-23,53
-23,07
-26,27
-26,19
-18,33
-18,65
-22,18
-22,18
-26,41
-26,26
services marchands
charbon
XS
XS
autres énergies fossiles
XS
électricité
XS
services non marchands
ser
1697,000
cha
fos
elec
XS
701654,000
ntser
701654,000
1697,000
50579,356
36126,083
50949,055
37741,713
50694,310
37590,746
48566,666
36473,698
49635,133
36729,014
47128,730
35660,416
48872,493
37602,000
37602,000
36731,276
-2,32
-1,92
-5,06
-3,93
0,37
-0,03
-3,00
-2,32
-5,16
-3,93
23955,000
26154,248
26206,556
27280,849
27171,726
25407,412
25305,782
26155,382
26076,916
27298,017
27216,123
9,18
9,40
13,88
13,43
6,06
5,64
9,19
8,86
13,96
13,61
170978,385
169439,580
173403,477
169588,601
170652,084
169457,519
172173,243
169590,644
173027,977
169567,417
0,86
-0,05
2,29
0,04
0,67
-0,04
1,57
0,04
2,07
0,03
13442,519
13892,238
13892,238
13420,916
13420,916
13751,588
13751,588
13877,121
13877,121
169520,000
35697,710
48950,472
23955,000
169520,000
36878,201
47203,927
36124,001
Importation
agriculture
M
agr
13544,000
13544,000
13442,519
-0,75
-0,75
2,57
2,57
-0,91
-0,91
1,53
1,53
2,46
2,46
industrie
M
ind
199090,000
199090,000
198747,656
198747,656
197107,531
197107,531
198890,466
198890,466
197433,503
197433,503
195990,873
195990,873
-0,17
-0,17
-1,00
-1,00
-0,10
-0,10
-0,08
-0,83
-1,56
-1,56
44877,163
44808,454
44808,454
44906,725
44906,725
44851,533
44851,533
45035,182
45035,182
services marchands
M
ser
charbon
M
cha
autres énergies fossiles
M
fos
électricité
M
elec
Exportation
agriculture
EX agr
industrie
EX
services marchands
charbon
EX
EX
ind
ser
cha
autres énergies fossiles
EX
fos
électricité
EX
elec
44951,000
44951,000
44877,163
-0,16
-0,16
-0,32
-0,32
-0,10
-0,10
-0,22
-0,22
0,19
0,19
1102,000
1102,000
529,758
529,758
443,287
443,287
609,496
609,496
534,724
534,724
445,870
445,870
-51,93
-51,93
-59,77
-59,77
-44,69
-44,69
-51,48
-51,48
-59,54
-59,54
10958,167
10822,958
10822,958
11047,489
11047,489
10968,075
10968,075
10872,786
10872,786
11231,000
11231,000
10958,167
-2,43
-2,43
-3,63
-3,63
-1,63
-1,63
-2,34
-2,34
-3,19
-3,19
1038,000
1038,000
1142,897
1142,897
117,394
117,394
1093,999
1093,999
1128,832
1128,832
1181,795
1181,795
10,11
10,11
13,43
14,09
5,40
5,39
8,75
8,75
13,85
13,85
22191,000
22191,000
22283,145
0,42
3,23
-7,96
-5,38
0,93
3,75
-4,81
-2,14
-8,09
-5,52
221392,000
221392,000
219733,793
225886,339
219530,812
220189,404
219461,337
220119,721
220080,374
220740,615
218271,191
218926,005
-0,75
2,03
-0,84
-0,54
-0,87
-0,57
-0,59
-0,29
-1,41
-1,11
37793,987
38852,219
38227,729
37998,363
37784,742
37558,034
38030,939
37802,753
38296,499
38066,720
0,54
3,35
1,69
1,08
0,51
-0,09
1,17
0,56
1,87
1,26
966,925
993,999
948,191
1014,564
1019,886
1091,278
983,898
1052,771
945,758
1011,961
-16,86
-14,53
-18,47
-12,76
-12,31
-6,17
-15,40
-9,48
-18,68
-12,99
21349,767
20238,137
20541,709
21301,987
21621,517
20618,577
20927,856
20196,949
20499,903
37593,000
1163,000
37593,000
1163,000
22907,073
20424,744
20996,637
22396,397
23023,496
21124,382
21715,865
20395,235
20966,302
21147,000
21147,000
20768,256
-1,79
0,96
-4,30
-2,86
0,73
2,24
-2,50
-1,04
-4,49
-3,06
1103,000
1103,000
1166,621
1199,286
1207,847
1171,612
1151,773
1117,220
1173,556
1138,349
1206,587
1170,389
5,77
8,73
9,51
14,09
4,42
1,29
6,40
3,20
9,39
6,11
50948,270
49659,658
51099,788
51198,099
50993,307
50286,661
51141,534
49585,629
51023,612
Ressource
agriculture
Q
agr
51220,000
51220,000
51101,575
Q
-0,23
-0,53
-3,05
-0,23
-0,04
-0,44
-1,82
0,38
-3,19
-0,15
industrie
ind
610253,000
610253,000
607686,180
610116,925
604210,117
604210,117
607656,821
610695,105
605479,982
604874,502
600567,921
601168,489
-0,42
-0,02
-0,99
-0,99
-0,43
0,07
-0,78
-0,86
-1,59
-0,50
726936,030
721847,478
727721,619
713167,187
727303,126
722939,307
727530,876
717345,444
731101,584
717941,755
-0,03
-0,73
0,08
-1,92
0,02
-0,58
0,05
-0,62
0,55
0,67
904,816
859,575
776,882
725,608
1030,335
986,031
915,934
869,221
780,094
729,388
-48,12
-50,71
-55,45
-58,39
-40,92
-43,46
-47,48
1,12
-55,27
0,52
services marchands
charbon
Q
Q
autres énergies fossiles
Q
électricité
Q
ser
cha
fos
elec
727138,000
1744,000
727138,000
1744,000
28429,000
28429,000
27643,392
-2,76
-2,67
-5,07
-4,60
-0,72
-1,02
-3,12
-0,17
-4,88
0,30
24680,000
24680,000
26994,174
27075,157
27671,035
28150,837
26986,650
28066,384
27121,583
26187,791
28224,499
26109,228
28139,826
26973,798
27542,625
26919,850
27625,253
28174,370
27041,671
28146,196
27203,921
9,38
9,70
14,06
13,72
6,11
5,79
9,29
-0,57
14,16
0,28
78
Annexe 5.1
Tableau 5.2 (suite): Une sélection des résultats des simulations des cinq scénarios de POLENVI
Variables
Définition
Symbole
Sitaution de référence
Volume
Valeur
Consommation finale
agriculture
C
agr
10782,000
10782,000
10733,455
C
-0,45
-0,75
-4,41
-1,64
-0,06
-0,46
-2,79
-1,14
industrie
ind
199653,000
199653,000
197415,075
198204,735
196316,768
196316,768
197584,692
198572,615
197537,263
197339,726
-1,12
-0,73
-1,67
-1,67
-1,04
-0,54
-1,06
-1,16
254702,436
252919,519
255527,144
250416,601
255051,157
253520,850
255357,828
251782,818
services marchands
C
ser
charbon
C
cha
autres énergies fossiles
C
électricité
C
Demande intermédiaire
agriculture
DIT
industrie
DIT
services marchands
DIT
10701,255
10306,467
Scénario 3
Volume
10605,355
10775,227
Scénario 4
Volume
Valeur
10732,126
10481,226
Valeur
10659,407
254775,000
-0,03
-0,73
0,30
-1,71
0,11
-0,49
0,23
-1,17
-
-
-
-
-
-
-
-
-
-
5703,000
5703,000
5656,092
5661,748
5579,103
5606,999
5692,208
5675,131
5622,848
5639,717
-0,82
-0,72
-2,17
-1,68
-0,19
-0,49
-1,41
-1,11
9433,000
9433,000
9335,062
9363,067
9300,401
9272,500
9417,907
9389,653
9348,491
9329,794
-1,04
-0,74
-1,41
-1,70
-0,16
-0,46
-0,90
-1,09
agr
36891,000
36891,000
36797,684
36687,291
35982,312
37025,799
36843,416
36696,042
36317,496
36934,893
-0,25
-0,55
-2,46
0,37
-0,13
-0,53
-1,56
0,12
ind
277187,000
277187,000
27643,310
27753,883
275642,864
275642,864
276472,786
277855,150
276086,341
275810,255
-0,27
-89,99
-0,56
-0,56
-0,26
0,24
-0,40
-0,50
464519,921
461268,282
464504,987
455214,887
464548,186
461760,897
464559,037
458055,210
-0,05
-0,75
-0,05
-2,05
-0,05
-0,64
-0,04
-1,44
3797,513
776,882
4605,356
1030,335
3992,548
915,934
3715,944
fos
elec
ser
DIT
cha
autres énergies fossiles
DIT
fos
DIT
Scénario 2
Valeur
Volume
Valeur
En millions de dollars canadiens
254775,000
charbon
électricité
Scénario 1
Volume
elec
Investissement par secteur d'origine
INV
agriculture
agr
464758,000
464758,000
1744,000
1744,000
904,816
-48,12
117,75
-55,45
164,07
-40,92
128,93
-47,48
113,07
22726,000
22726,000
21987,300
25725,141
21407,547
27080,547
22532,291
25889,602
21919,777
25514,620
-3,25
13,20
-5,80
19,16
-0,85
13,92
-3,55
12,27
17659,112
17712,089
18850,436
18793,885
16769,884
16719,574
17625,308
17590,057
15,82
16,17
23,63
23,26
9,99
9,66
15,60
15,37
2021,907
2061,952
1,13
133395,781
0,14
7703,783
1,30
-
15247,000
15247,000
2039,000
2039,000
2059,411
INV
1,00
0,70
-3,63
-0,84
industrie
ind
133208,000
133208,000
133635,080
134169,620
2053,233
132047,397
1964,924
132047,397
INV
0,32
0,72
-0,87
-0,87
services marchands
ser
7605,000
7605,000
7713,673
7659,677
7689,488
7535,698
1,43
0,72
1,11
-0,91
-
-
-
-
2053,704
1979,939
2013,598
0,72
-2,90
-1,25
134062,760
131651,378
131519,727
0,64
-1,17
-1,27
7657,560
7614,011
7507,415
0,69
0,12
-1,28
-
-
-
Scénario 5
Volume
10476,239
-2,84
199469,437
-0,09
259252,266
1,76
-
Valeur
10780,050
-0,02
199668,906
0,01
254585,725
-0,07
-
5667,316
-0,63
9441,828
0,09
5701,320
35830,060
-2,88
274902,291
-0,82
464523,011
-0,05
780,094
-55,27
21374,355
-5,95
18732,542
22,86
36869,132
1875,614
-8,01
125994,332
-5,42
7326,308
-3,67
-
-0,03
9432,386
-0,01
-0,06
275177,193
-0,73
456161,597
-1,85
4527,666
159,61
26910,313
18,41
18713,809
22,74
1930,007
-5,35
126120,326
-5,32
7194,434
-5,40
charbon
INV
autres énergies fossiles
INV
fos
-
-
-
-
-
-
-
-
-
-
-
-
électricité
INV
elec
-
-
-
-
-
-
-
-
-
-
-
-
-
145364,000
-
146423,492
-
144035,315
-
146352,966
-
143591,745
-
137587,863
-5,35
-
808984,654
cha
-
-
-
Investissement total
IT
0,73
Produit intérieur brut au prix du marché
PIB
-
828923,000
-
819672,491
-1,12
-0,91
-
806957,439
-2,65
0,68
-
822514,027
-0,77
-1,22
-
823094,949
-0,70
-2,41
79
Annexe 5.1
Tableau 5.2 (suite) : Une sélection des résultats des simulations des cinq scénarios de POLENVI
Variables
Définition
Sitaution de référence
Volume
Valeur
Symbole
Scénario 1
Volume
Scénario 2
Valeur
Volume
Valeur
En millions de dollars canadiens
Scénario 3
Volume
Scénario 4
Volume
Valeur
Scénario 5
Volume
Valeur
Valeur
Revenu
ménages
YM
entreprises
YE
agr
647727,000
647727,000
-
643224,093
178245,000
178245,000
-
175796,407
-
637056,702
-
172450,902
-0,70
ind
-1,37
gouvernement
YG
ser
326938,000
326938,000
-
331814,673
SM
entreprises
SE
37106,000
37106,000
-
36842,902
ind
28587,000
28587,000
-
26498,858
ser
-20996,000
agr
-
SG
36482,551
-
23645,837
-
-16119,327
RP
-13291,221
640470,580
-
174291,839
-
712359,573
36921,701
-
27092,722
-
-17279,427
331884,459
-
36682,019
-
25215,774
-
326938,000
-
37090,981
-
24027,085
-1,51
-3,00
0,00
-1,14
-5,23
-
172897,961
1,51
-0,50
36,70
637979,827
-
-2,22
0,52
-
-
-1,12
-0,98
-17,29
-
-
-0,49
-1,68
-7,31
-20996,000
334642,779
-
23,23
Revenus du SPÉ
176492,783
2,36
-0,71
gouvernement
644572,735
-
-3,25
1,49
Épargne
ménages
-
-1,65
-0,04
-11,79
-
17,70
-16606,341
-15,95
-
-20,91
-20996,000
0,00
-
-
-
6648,627
-
12465,926
-
4989,669
-
8315,248
-
12153,418
-
-
-
15,670
-
24,101
-
14,084
-
15,000
-
23,497
-
1,000
-
4,197
-
5,928
-
3,875
-
4,057
-
Prix du permis
PPERMIS
Coût d'utilsation de l'énergie émetrice
PEP
charbon
cha
autres énergies fossiles
PEP
319,73
fos
-
1,000
-
1,170
492,80
-
16,99
Émissions de chaque secteurs couvertes par le SPÉ
DPT
agriculture
agr
-
10,631
-13,78
industrie
DPT
ind
-
-
322,311
services marchands
DPT
ser
-
-
55,809
charbon
DPT
cha
-
-
0,765
autres énergies fossiles
DPT
-
-
18,806
électricité
DPT
elec
-
-
11,518
ntser
-
-
4,442
services non marchands DPT
166,588
5050,613
-32,76
874,527
-13,50
11,988
-48,62
fos
294,690
-32,27
180,487
-24,47
69,606
-18,00
1,265
287,51
-
26,46
89,856
-8,68
322,585
-36,26
52,987
-17,88
0,679
-54,37
35,860
-24,82
11,114
-27,12
4,150
-23,39
2165,619
7774,621
1277,040
16,365
864,262
267,859
100,019
1,149
305,66
-
14,86
99,070
0,68
354,288
-30,00
64,723
0,31
1,232
-17,20
48,216
1,09
16,372
7,36
5,470
0,98
1395,302
4989,792
911,559
17,351
679,074
230,583
77,039
1,164
-
1,259
89,605
-8,94
322,265
-36,33
53,428
-17,19
0,682
-54,17
35,908
-24,72
11,177
-26,71
4,165
-23,11
2105,449
16,42
94,585
-3,88
353,488
-30,16
56,044
-13,14
0,879
-40,93
38,483
-19,32
11,556
-24,22
4,458
-17,70
1418,775
5302,320
840,660
13,185
577,245
173,340
66,870
5,804
480,39
25,90
7572,261
1255,398
16,025
843,730
262,626
97,865
Émissions totales couvertes par le SPÉ
Variation équivalente
DEP
-
-
424,281
-30,00
6648,627
517,230
-30,00
12465,926
354,288
-30,00
4989,669
VE
-
0,000
-
-
-
-0,702
-
-
559,494
-24,28
-
8315,248
517,230
-30,00
12153,418
-
-
0,690
Chapitre 6 : Les ajustements des agents aux politiques
80
Chapitre 6
Les ajustements des agents
aux politiques environnementales
La réduction des niveaux d’activités, la substitution vers des intrants moins polluants et
l’adoption de nouvelles technologies sont les réponses des agents face aux politiques
environnementales. Les résultats des MEGC quant à l’ampleur et la répartition du fardeau
d’une politique environnementale sont très sensibles à la façon de modéliser ces trois
types d’ajustements.
L’objectif de ce chapitre est de maîtriser la méthodologie pour enrichir un MEGC au
niveau des ajustements des agents aux politiques environnementales. Nous voulons
notamment montrer la sensibilité des résultats d’un MEGC portant sur les changements
climatiques à l’égard de ces ajustements.
Dans notre MEGC, nous avons jusqu’à maintenant limité les agents de l’économie
canadienne à deux ajustements : la baisse des niveaux d’activités et la substitution entre
les divers types d’énergie. De plus, nous avons modélisé ces ajustements dans un cadre
d’analyse statique, ce qui sous-entend que les ajustements se font instantanément. Or, le
phénomène des changements climatiques est un processus dynamique et de long terme,
de même que la réponse des agents face au phénomène (Nordhaus, 1992). Il est donc
difficile de justifier un cadre d’analyse statique plutôt que dynamique. Il est aussi
fortement restrictif de négliger le changement technologique, qui est un élément
indissociable du domaine des changements climatiques, et de ne pas considérer que
l’énergie se substitue aux autres intrants primaires (Burniaux et Truong, 2002).
L’organisation de ce chapitre est semblable au précédent. Cependant, au lieu de présenter
divers scénarios concernant les politiques environnementales, nous nous limitons qu’à un
seul. Le scénario retenu est celui où le SPÉ canadien couvre tous les secteurs productifs
de l’économie, ne tient pas compte des émissions fugitives et n’est pas intégré à un SPÉ
international. Nous simulons ce scénario sous cinq versions de notre MEGC. Les versions
considérées sont réparties dans trois sections.
Chapitre 6 : Les ajustements des agents aux politiques
81
La première section porte sur les ajustements dynamiques. Nous y présentons une version
dynamique de notre modèle où les agents sont myopes.
La seconde section porte sur les effets de substitution. Nous traitons distinctivement des
effets de substitution survenant à l’intérieur de la sphère énergétique, soit les effets de
substitution inter-énergétique, et des effets de substitution survenant entre l’énergie et les
autres intrants, soit les effets de substitution inter-factoriels. Nous présentons une version
de notre modèle pour chacun de ces deux types d’ajustements, ce qui permet ainsi de
montrer leur incidence.
La troisième section porte sur le changement technologique. Nous traitons du
changement technologique exogène, c’est-à-dire indépendant des incitations
économiques, et du changement endogène, qui répond à ces incitations. L’introduction du
changement technologique endogène est une tâche ardue. Nous présentons une approche
qui, bien que loin d’être complète, permet tout de même de montrer l’importance de la
question.
6.1 Les ajustements dynamiques
L’aspect dynamique est un élément important des changements climatiques, mais selon
DeCanio (2003), il est souvent mal représenté ou tout simplement ignoré dans les
modèles économiques portant sur le sujet. Pourtant, face aux politiques
environnementales, il est fort probable que la réponse des agents soit fonction de ce qui a
été fait dans le passé et de ce que réserve l’avenir.
Dans le domaine des changements climatiques, les ajustements dynamiques aux
politiques s’opèrent par le canal de l’investissement dans la technologie et dans le capital.
Ces ajustements sont de nature anticipative et réactionnelle. Les ajustements dynamiques
sont de nature anticipative lorsque les agents ne sont pas myopes par rapport au futur.
Dans ce cas, les agents modifient leurs décisions d’investissement de façon à minimiser
le coût du contrôle des émissions à travers le temps. Au contraire, lorsque les agents sont
parfaitement myopes et sans mémoire, les ajustements dynamiques sont de nature
réactionnelle. Dans un modèle économique dynamique, cela signifie que les agents
optimisent à chaque période selon les conditions en vigueur. Mais étant donné que les
conditions en vigueur à cette période découlent des événements passés, les agents
réagissent donc inconsciemment aux chocs passés. Cette section présente une version
dynamique dite séquentielle de notre MEGC, le modèle ENDYMO.
Chapitre 6 : Les ajustements des agents aux politiques
82
6.1.1 Revue de littérature
Il existe deux grandes catégories de MEGC dynamiques, respectivement les MEGC
dynamiques séquentiels et les MEGC dynamiques inter-temporels.
6.1.1.1 Les MEGC dynamiques séquentiels
Les MEGC dynamiques séquentiels font l’hypothèse que les agents sont myopes par
rapport au futur. Il n’y a donc pas de comportement d’optimisation inter-temporelle. Les
ajustements dynamiques de nature anticipative ne peuvent donc être pris en compte. Les
ajustements dynamiques réactionnels sont cependant bien représentés, car chaque période
est un état stationnaire dépendant du précédent. Les MEGC dynamiques séquentiels
portant sur les changements climatiques sont donc plus appropriés pour analyser les
ajustements post-implantations des réglementations sur les émissions de GES.
Le protocole de modélisation d’un MEGC dynamique séquentiel a trois étapes :
• premièrement, assurer le lien entre les états stationnaires;
•
deuxièmement, caractériser l’expansion de l’économie à travers le temps;
•
troisièmement, définir le marché de l’investissement.
Le lien entre les états stationnaires se fait par l’accumulation du capital, qui est
communément donnée par :
K t +1 = (1− δ ) ⋅ K t + It
(6.1)
où K t : stock de capital à la période t ;
It : investissement à la période t ;
δ : taux de dépréciation du capital.
La croissance de la population et le progrès technologique à la Solow (1956) assurent
l’expansion de l’économie à travers le temps. Ceux-ci sont donnés par des équations
dynamiques autorégressives d’ordre un. Dans le cas de la population, nous avons :
LSt +1 = (1+ g) ⋅ LSt
(6.2)
où
g
: taux de croissance de la population (paramètre exogène);
LSt : volume de main-d’œuvre totale à la période t .
Le progrès technologique est habituellement donné par la croissance du paramètre
d’échelle de la fonction caractérisant la valeur ajoutée, soit :
Chapitre 6 : Les ajustements des agents aux politiques
(6.3)
83
At +1 = (1+ n ) ⋅ At
où n : taux de croissance de la technologie (paramètre qui peut être endogénéisé);
At : paramètre d’échelle de la fonction de la valeur ajoutée à la période t .
La dynamisation d’un MEGC avec l’approche séquentielle nécessite finalement de
distinguer l’offre et la demande de bien d’investissement. Dans notre MEGC statique,
nous avons explicité l’offre de ces biens selon leur secteur d’origine sans se soucier de
leur réallocation dans l’économie. Toutefois, dans un MEGC dynamique, la réallocation
des biens d’investissement ne peut être négligée, car le secteur qui reçoit ces biens accroît
son stock de capital et par le fait même son potentiel de production des périodes futures.
Il faut aussi noter que celui qui produit les biens servant à l’investissement n’en bénéficie
pas nécessairement. Il faut donc définir une demande de bien d’investissement, que nous
qualifions de « biens d’investissement par destination ». Dans un MEGC dynamique, le
marché de l’investissement est donc explicite, il y a une offre, les biens d’investissement
par origine et une demande, les biens d’investissement par destination.
6.1.1.2 Les MEGC dynamiques inter-temporels
Les MEGC dynamiques inter-temporels font l’hypothèse que les agents anticipent le
futur et qu’ils prennent leurs décisions en optimisant à travers le temps. La solution du
modèle est le chemin d’expansion vers l’état stationnaire. Chaque période n’est donc pas
une situation d’équilibre, mais une situation intermédiaire menant à l’état final. Ce type
de MEGC permet ainsi de tenir compte des deux types d’ajustements dynamiques. Il est
cependant difficile de distinguer les effets nets propres à chacun d’eux.
La majorité des MEGC dynamiques inter-temporels se basent sur le cadre proposé par
Ramsey (1928), bien que certains adoptent une approche à générations imbriquées du
type Blanchard (Conrad, 2001). Peu importe le cadre retenu, ce type de dynamique est
plus complexe que la précédente. Nous évitons donc d’en faire la présentation. Une
lectrice ou un lecteur intéressé devrait se référer à Rutherford (2004) et Palstev (2000).
Les MEGC dynamiques inter-temporels portant sur les changements climatiques sont très
nombreux. Déjà le modèle DICE de Nordhaus (1992), l’un des premier MEGC dans le
domaine, utilisait ce type de dynamique. Depuis, plusieurs l’ont utilisé pour des travaux
appliqués. Par exemple, au niveau canadien, Dissou et al. (2000) ont eu recours à cette
dynamique pour analyser le Plan national pour la lutte aux changements climatiques.
C’est aussi ce type de dynamique qui est utilisée dans les études sur les politiques
Chapitre 6 : Les ajustements des agents aux politiques
84
optimales pour les changements climatiques (Nordhaus, 1992, Goulder et Schneider
1999, Tol 1999).
6.1.2 Protocole de modélisation d’un MEGC dynamique séquentiel : ENDYMO
Notre modèle POLENVI est dynamisé selon l’approche séquentielle. Pour ce faire, nous
introduisons d’abord une fonction d’accumulation du capital qui suit en tout point
l’équation 6.1. Il faut cependant porter attention au fait que les biens d’investissement qui
contribue au stock de capital ne sont pas les biens d’investissement par origine
(variables INVtr , données par l’équation 2.23) que nous avons considéré jusqu’à
maintenant. Les biens d’investissement contribuant au stock de capital sont les biens
d’investissement par destination, que nous notons ID j . La demande pour ces biens est
donnée par une équation distincte. La forme que nous retenons est celle proposée par
Bourguignon et al. (1989), soit :
r
ID j = KD j γ1
u
(6.4)
2
+ γ2
r
u
où γ1 et γ 2 : paramètre de la fonction d’investissement rendant compte de
r
u
l’élasticité-prix de l’investissement par destination;
: rendement du capital;
: coût d’usage du capital17.
Selon l’équation de Bourguignon, l’intensité capitalistique des secteurs et les élasticitésprix par rapport au rendement et au coût d’usage du capital déterminent la réallocation
des biens d’investissement.
Nous posons que la valeur de l’investissement total ( IT ) détermine la valeur de
l’investissement par destination offerte:
(6.5)
IT = PK ⋅
ID j
j
avec
(6.6)
µtr Pc tr
PK =
tr
17
Le coût d’usage du capital correspond ici à un indice de prix donnant la valeur des biens investis, ce qui
est fort différent du rendement de ces mêmes biens.
Chapitre 6 : Les ajustements des agents aux politiques
85
où PK : indice de prix pour l’investissement par destination.
µ tr : part en valeur du produit tr dans l’investissement total en matériel, machine
et construction ( IM ) net de taxe sur l’investissement ( tn ).
Nous considérons que l’expansion de l’économie à travers le temps est due à la
croissance de la main-d’oeuvre à un taux de 1% par année. La dotation totale de maind’œuvre évolue donc selon l’équation 6.2. Nous négligeons cependant le progrès
technologique à la Solow (équation 6.3).
Pour la calibration de l’investissement par destination, nous avons utilisé l’approche
d’Abbink et al. (1995). Sous cette approche, l’investissement net de taxe est réparti à la
période initiale selon les parts sectorielles de la rémunération du capital, soit :
(6.7)
θj =
rj KD j
r j KD j
j
La valeur de l’investissement par destination de chaque secteur pour la calibration est
donc :
(6.8)
ID j = θ j IM ⋅ (1− tv)
ce qui complète le protocole de modélisation pour la dynamisation de notre MEGC selon
l’approche séquentielle.
6.1.3 Simulation d’ENDYMO
Pour la simulation d’ENDYMO, nous posons l’hypothèse que l’agence régulatrice des
permis veut maintenir le volume d’émissions à celui de la période initiale. L’économie
étant en expansion, le SPÉ devient donc graduellement contraignant à travers le temps.
Notre modèle est solutionné sur quinze périodes. Nous pouvons donc suivre le
comportement de l’économie de 1996 jusqu’au cœur de la période cible du Protocole de
Kyoto, 2010. Les résultats de cette simulation sont comparés à un scénario de référence.
Ce scénario de référence a été obtenu en simulant la même version du MEGC, mais en
considérant que le SPÉ n’était pas contraignant.
En comparant le volume d’émissions de GES de la période de référence à celui en
vigueur sous le SPÉ (figure 6.1), nous pouvons voir l’ampleur de la contrainte sur les
86
Chapitre 6 : Les ajustements des agents aux politiques
émissions pour chaque année. La réduction demandée est d’environ 6 % après cinq
périodes, de 20% après dix périodes et de 35% après quinze périodes. La contrainte sur
les émissions à la période cible est donc plus sévère que celle considérée pour les
scénarios avec le MEGC statique.
Figure 6.1 : Volume d’émissions de GES lié à la combustion de l’énergie de tous les
secteurs productifs dans ENDYMO avec et sans SPÉ
Sous cette simulation, le prix du permis (figure 6.2) se fixe à 12,46$ à la période cible,
comparativement à 15,67$ dans la version statique.
$CAN 12
10
8
6
4
2
0
1 99 6
1 99 8
2 00 0
2 00 2
2 00 4
2 00 6
2 00 8
2 01 0
Périodes
Figure 6.2 : Prix d’équilibre du permis dans ENDYMO
87
Chapitre 6 : Les ajustements des agents aux politiques
Nous concluons qu’une réduction graduelle des émissions diminue le fardeau du SPÉ au
Canada, car cela produit une transformation permanente de la structure de l’économie de
façon à la rendre moins intensive en énergies émettrices. Cela a été vérifié en soumettant
notre modèle au SPÉ pour les dix premières périodes seulement. Nous avons alors
observé des changements irréversibles à l’économie, car après ces périodes, le niveau
d’émissions non contraint était inférieur de plus de 1% à celui qu’y aurait été en vigueur
si le SPÉ n’avait jamais été mis en place. Après les transformations permanentes, il est
donc moins contraignant de respecter la cible d’émissions, ce qui explique que le prix du
permis soit plus bas sous une réglementation graduelle des émissions de GES.
La transformation permanente de la structure de l’économie est due aux ajustements
dynamiques réactionnels. Ceux-ci s’opèrent par le canal de l’investissement. La fonction
d’investissement par destination retenue (équation 6.4) stipule que le volume
d’investissement est fonction du taux de rendement du capital ( r ) relativement au coût
d’usage du capital pour le marché ( u ). Selon cette fonction, un bas taux de rendement
dans un secteur implique un faible taux d’investissement. Dans un cadre dynamique, un
faible taux d’investissement réduit le capital disponible pour la période suivante. Le
secteur au faible taux de rendement est donc en contraction relativement au reste de
l’économie. L’économie devient donc moins intensive à travers le temps en produits de
ces secteurs. Pour notre part, c’est effectivement ce que nous observons pour les secteurs
des énergies émettrices, principalement le charbon (figure 6.3).
%
0,115
0,11
0,105
0,1
0,095
0,09
Scén
Scénario
ario de
de réf
référence
érence (ENDY MO)
Scénario
ENDY
MO avec SPÉ
0,085
1 99 6
1 99 8
2 00 0
2 00 2
2 00 4
2 00 6
2 0 08
2 01 0
P ériodes
Figure 6.3 : Part de marché du charbon dans ENDYMO avec et sans SPÉ
Chapitre 6 : Les ajustements des agents aux politiques
88
Il faut noter que la contraction due à la chute de l’investissement est synonyme d’une
plus grande rareté, ce qui fait des pressions à la hausse sur le prix au coût des facteurs.
Les incitations à substituer les produits de ce secteur sont donc plus importantes, ce qui
contribue à augmenter l’effet de contraction et par le fait même accroît la chute du
rendement sur le capital lorsqu’il est rémunéré à sa productivité marginale. L’effet sur le
prix au coût des facteurs est donc ambigu. Il y a un choc d’offre négatif qui fait des
pressions à la hausse, mais parallèlement une baisse des coûts de production due à la
contraction. Cela nous porte à conclure que la prise en compte des effets dynamiques a
une influence non seulement sur l’ampleur des variations, mais possiblement sur leur
direction. Dans la présente simulation, cela nous a été confirmé. Le prix au coût des
facteurs du charbon est en baisse à travers le temps (figure 6.4) tandis que dans la version
statique de notre MEGC, ce prix est plutôt à la hausse.
$CAN 1,02
1
0,98
0,96
0,94
0,92
0,9
Scénario
Scénario
de rde
éférréférence
ence ( ENDYMO)
0,88
ENDY
MO
Scénario
0,86
avec SPÉ
0,84
1 99 6
1 99 8
2 00 0
2 00 2
2 00 4
20 0 6
2 00 8
2 0 10
P ériodes
Figure 6.4 : Prix au coût des facteurs du charbon dans ENDYMO avec et sans SPÉ
Nous pouvons aussi conclure que négliger les ajustements dynamiques anticipatifs
surestime les coûts de dépollution. En effet, le pouvoir d’anticipation des agents devrait
les conduire à adopter une réduction graduelle de leurs émissions, ce qui réduit le fardeau
du SPÉ comme nous venons de montrer.
En résumé :
•
Si le gouvernement introduit graduellement le SPÉ, les ajustements dynamiques
réactionnels contribuent à réduire le fardeau de celui-ci.
•
Les impacts structurels du SPÉ ne sont pas nécessairement les mêmes dans un cadre
dynamique que statique.
•
Les ajustements dynamiques anticipatifs devraient contribuer à réduire le fardeau
d’un SPÉ.
Chapitre 6 : Les ajustements des agents aux politiques
89
6.2 Les effets de substitution
La modélisation des effets de substitution se résume à la substituabilité entre les diverses
sources d’énergie ainsi qu’entre l’énergie et les facteurs primaires de production, ce que
nous appelons respectivement les effets de substitution inter-énergétiques et les effets de
substitution inter-factoriels. Cette section traite distinctivement des questions concernant
ces deux types d’effets de substitution.
6.2.1 Les effets de substitution inter-énergétiques
Dans le troisième chapitre de ce mémoire portant sur l’introduction de la sphère
énergétique, nous avons souligné que les effets de substitution inter-énergétiques
dépendent de deux éléments : de l’intensité en GES et des élasticités de substitution des
fonctions caractérisant l’agrégation de l’énergie dans le processus de production.
Dans ce qui suit, nous présentons une version de notre MEGC, le modèle SASUE, où il
est difficile de substituer entre les différents types d’énergie. Nous testons ainsi la
sensibilité des résultats de notre MEGC à l’égard des élasticités de la sphère énergétique
présentées au chapitre trois.
6.2.1.2 Protocole de modélisation d’un MEGC avec de faibles possibilités de
substitution énergétique : le modèle SASUE
Pour la sphère énergétique de notre MEGC, nous avons jusqu'
à maintenant utilisé les
élasticités de substitution les plus communes d’après la littérature, soit l’unité pour la
fonction agrégeant l’énergie électrique et non électrique et 0,5 pour celle agrégeant le
charbon et les autres énergies fossiles. Pour illustrer l’importance des effets de
substitution inter-énergétique, nous fixons ces paramètres à des niveaux reproduisant de
faibles possibilités de substitution. Les élasticités de substitution sont fixées à 0,2 pour la
fonction ESTC agrégeant l’énergie électrique et non électrique et à 0,25 pour la fonction
ESTC agrégeant le charbon et l’agrégat des autres énergies fossiles.
Bien que nous aurions pu utiliser la version statique de notre MEGC, le modèle SASUE
est plutôt une transformation du modèle ENDYMO. La raison pour laquelle nous avons
recours au cadre dynamique est que nous voulons permettre les comparaisons entre
SASUE avec une version subséquente de notre MEGC où le changement technologique
est introduit et modifie la nature des effets de substitution.
90
Chapitre 6 : Les ajustements des agents aux politiques
6.2.1.3 Simulation de SASUE
Cette simulation est la même que dans la section précédente : l’offre des permis est
maintenue à celle de la période initiale. Avec l’expansion de l’économie, il y a donc une
baisse nette de l’offre de permis à chaque période.
Pour de faibles possibilités de substituer entre les différents types d’énergie, la baisse des
niveaux d’activités est la principale façon de réduire les émissions. Or, nous avons vu que
considérer les émissions fugitives sous le SPÉ était synonyme d’une demande de permis
plus inélastique. Le prix d’équilibre du permis est donc plus élevé. Dans le cas présent,
c’est exactement ce qui se produit. Le prix du permis atteint rapidement des niveaux
élevés (figure 6.5). À la dernière période, il se fixe à 184,90$, soit une augmentation de
plus de 1555 % par rapport au cas où il est possible de substituer l’énergie.
$CAN
200
180
160
140
120
100
80
60
40
20
0
1 99 6
SASUE
ENDYMO
1 99 8
2 00 0
2 00 2
2 00 4
2 00 6
2 00 8
2 01 0
Périodes
Figure 6.5 : Prix d’équilibre du permis dans SASUE et ENDYMO
En résumé :
•
La question de la substitution inter-énergétique est non négligeable dans la
détermination de l’ampleur du fardeau d’un SPÉ.
•
L’absence d’effet de substitution inter-énergétique amplifie la baisse des niveaux
d’activités dans les secteurs du charbon et des autres énergies fossiles et réduit la
substitution vers le secteur de l’électricité. La répartition du fardeau du SPÉ dans les
secteurs énergétiques est donc modifiée. Pour ce qui est des autres secteurs la
répartition du fardeau reste cependant la même.
Chapitre 6 : Les ajustements des agents aux politiques
91
6.2.1 Les effets de substitution inter-factoriels
La question des effets de substitution inter-factoriels est la source d’une abondante
littérature (Magnus 1979, Vinals 1984, Kemfert et Welsch 2000, Kemfert 2000). De cette
littérature émerge deux conclusions importantes. Premièrement, la substituabilité entre
l’énergie et le capital est différente de celle entre l’énergie et le travail. Deuxièmement, la
relation entre l’énergie et le capital est à court terme complémentaire, mais à long terme
substitut.
Après avoir relevé comment les modélisateurs tiennent compte de ces conclusions dans
les MEGC, nous présentons une version de notre MEGC, le modèle INTERFAC,
respectant celles-ci.
6.2.1.1 Revue de littérature
Dans les MEGC top-down, pour saisir les différences dans la substituabilité
énergie/capital versus énergie/travail, il suffit de définir une structure de production dans
laquelle l’énergie et le capital forment un agrégat distinct du facteur travail. Whalley et
Wigle (1991), Burniaux et al. (1992) ainsi que Burniaux et Truong (2002) sont quelques
exemples d’auteurs qui utilisent cette spécification.
Dans la construction d’un MEGC respectant les effets de substitution inter-factoriels, le
véritable enjeu est cependant de considérer que la relation entre l’énergie et le capital est
à court terme complémentaire, mais à long terme substitut. Ce point est crucial, car il
détermine la direction de l’ajustement de la production totale suite à un changement des
prix de l’énergie, comme l’a démontré Vinals (1984).
Il existe deux approches pour modéliser l’évolution de la complémentarité vers la
substituabilité entre l’énergie et le capital. La première provient de Borges et Goulder
(1984) et est reprise par Burniaux et Truong (2002). Cette approche repose sur le fait que
dans les fonctions néoclassiques nichées, la valeur d’une élasticité de substitution donnée
varie selon la niche où elle est mesurée. La valeur de l’élasticité que nous portons
habituellement attention est celle de la fonction caractérisant directement l’agrégat. La
formule de Keller (1980) permet cependant de mesurer une élasticité par rapport aux
autres niches de la fonction. L’approche de Borges et Goulder consiste donc à utiliser une
structure de production nichée dans laquelle les élasticités de substitution énergie/capital
sont supérieures à l’unité lorsqu’elles sont mesurées directement par rapport à la niche
agrégeant l’énergie et le capital, mais inférieures à l’unité lorsqu’elles sont mesurées au
niveau des niches supérieures. La substituabilité et la complémentarité sont alors prises
Chapitre 6 : Les ajustements des agents aux politiques
92
en compte simultanément. Cette approche est en fait un artifice mathématique où l’on
donne des valeurs suffisamment petites aux élasticités de substitution énergie/capital par
rapport à celle du niveau d’agrégation supérieur pour que leurs valeurs finales soient
comprises entre 0 et 1. Le changement temporel n’est pas explicité. L’approche suivante
corrige cette lacune. La deuxième approche a été développée par Mensbrugghe (1992,
2003) sous le nom de « vintage capital ». On retrouve son application aux changements
climatiques dans le modèle GREEN (1992). L’approche « vintage capital » repose sur la
modélisation de différents niveaux de flexibilité du capital. L’idée est que le capital
nouvellement installé permet une forte substitution entre les intrants tandis que le capital
datant des périodes précédentes a une certaine rigidité. L’accumulation du capital permet
alors l’évolution de la complémentarité vers la substituabilité entre les intrants.
6.2.1.2 Protocole de modélisation d’un MEGC avec possibilités de substitution
inter-factorielle : le modèle INTERFAC
Dans le but de capter les effets de substitution inter-factoriels, nous adoptons une
structure de production semblable à celle de Borges et Goulder (1984) et de Burniaux et
Truong (2002) dans la version dynamique de notre MEGC. Nous utilisons donc
l’approche la plus simple pour caractériser la complémentarité et la substituabilité entre
l’énergie et le capital. Dans la section suivante, nous allons cependant enrichir la présente
approche par l’introduction du changement technologique modifiant la nature des effets
de substitution. La figure 6.6 représente la structure de production de cette troisième
version de notre MEGC.
L’agrégat énergie/capital ( EKD) est caractérisé par la fonction ESTC suivante :
EKD j = Z
(6.9)
où
x
ekd
j
=
ekd
j
(ε
ekd
j
AE j
−x ekd
j
+ (1− ε
ekd
j
)KD j
−x ekd
j
−
)
1
x ekd
j
1 − µ ekd
j
µ ekd
j
x ekd
j
: paramètre de substitution de la fonction ESTC;
µ ekd
j
: élasticité de substitution;
Z ekd
j
: paramètre d’échelle de la fonction ESTC;
ε ekd
j
: paramètre de partage de la fonction ESTC;
AE j
: agrégat énergie non électrique dans la branche j ;
KD j
: capital utilisé dans la branche j .
93
Chapitre 6 : Les ajustements des agents aux politiques
Production Totale
(Leontief)
Énergie/
Valeur Ajoutée
(ESTC)
Consommations Intermédiaires
(Leontief)
Énergie/
Capital
(ESTC)
Travail
Agriculture
Industries
Services
Agrégat
Énergétique
(ESTC)
Capital
Énergie Non électrique
(ESTC)
Charbon
Énergie Électrique
Autres énergies
fossiles
Figure 6.6 : Structure de production d’INTERFAC
La demande de l’agrégat énergétique ( AE ) est la condition de premier ordre du
programme de minimisation des coûts, soit :
ε elkd
j
AE j = KD j
1− ε ekd
j
(6.10)
où r j
µ nel
j
rj
µ ekd
j
PAE j
: taux de rendement du capital spécifique au secteur;
PAE j : prix de l’agrégat énergétique donné par l’équation 3.4.
L’agrégat énergie/capital est agrégé avec une fonction ESTC au facteur main-d'
oeuvre
pour former l’agrégat énergie/valeur ajoutée ( LEK ) :
LEK j = Z (ε LD j
lek
j
(6.11)
où
x
lek
j
=
1 − µ lek
j
µ lek
j
lek
j
− x lek
j
+ (1− ε )EKD j
lek
j
− x lek
j
)
−
1
x lek
j
Chapitre 6 : Les ajustements des agents aux politiques
x lek
j
: paramètre de substitution de la fonction ESTC;
µ lek
j
: élasticité de substitution;
Z lek
j
: paramètre d’échelle de la fonction ESTC;
ε lek
j
: paramètre de partage de la fonction ESTC;
LD j
: main-d’œuvre utilisée dans la branche j .
94
La demande de main-d’œuvre est aussi obtenue par la condition de premier ordre du
programme de minimisation des coûts :
LD j = EKD j
(6.12)
où s
1− ε lek
j
µ lek
j
PEKD j
ε lek
j
µ lek
j
s
: salaire de travail;
PEKD j : prix de l’agrégat énergie/capital.
L’introduction de nouveaux agrégats engendre de nouveaux prix. Le prix de l’agrégat
énergie/capital (PEKD) est obtenu de façon résiduelle, en soustrayant la masse salariale à
la valeur de l’agrégat énergie/valeur ajoutée :
(6.13)
PEKD j =
PLEK j LEK j − s ⋅ LD j
EKD j
Le prix de l’agrégat énergie/valeur ajoutée est aussi obtenu de façon résiduelle en
soustrayant la valeur des consommations intermédiaires à la valeur de la production au
coût des facteurs, soit :
(1− tp j ) ⋅ P j XS j −
(6.14)
PLEK j =
Pc NE DINE, j
NE
LEK j
6.2.1.3 Les données
Les élasticités de substitution pour les fonctions ESTC des agrégats énergie/capital et
énergie/valeur ajoutée s’inspirent de celles qui sont proposées par Burniaux et Truong
(2002). Elles sont présentées au tableau 6.1.
95
Chapitre 6 : Les ajustements des agents aux politiques
Tableau 6.1 : Élasticité de substitution pour les agrégats énergie/capital et énergie/valeur ajoutée
6.2.1.4 Simulation d’INTERFAC
Nous faisons la même simulation que pour les versions précédentes de ce chapitre, soit
une offre de permis fixée à celle de la période initiale.
Le nouveau mécanisme d’ajustement de la production fait en sorte que la hausse du prix
de l’agrégat énergétique induit un effet de substitution. Ici, le capital peut être substitué à
l’énergie. Par le même processus, l’agrégat énergie/capital peut être substitué au facteur
travail. Cette caractérisation du processus de production permet donc un plus grand
éventail de possibilités de substitution suite à une hausse du prix de permis. Cela
implique qu’il est moins contraignant pour les producteurs de réduire leurs émissions de
GES. Le prix du permis est donc moins élevé que dans ENDYMO (figure 6.7).
$CAN
12
10
ENDYMO
8
INTERFAC
6
4
2
0
1 99 6
1 99 8
2 00 0
2 00 2
2 00 4
2 00 6
2 00 8
2 01 0
Périodes
Figure 6.7 : Prix d’équilibre du permis dans ENDYMO et INTERFAC
En résumé :
•
La présence d’effets de substitution inter-factoriels influence l’ampleur du fardeau du
SPÉ.
Chapitre 6 : Les ajustements des agents aux politiques
•
96
Une analyse plus poussée montrerait aussi que la répartition du fardeau est affectée
lorsque cet ajustement est considéré. En effet, la hausse des prix de l’énergie favorise
une substitution vers les intrants primaires de production. Cette substitution est
synonyme d’une hausse de la demande pour ces intrants. Étant donnée que l’offre
totale des intrants primaires fixe, une hausse de la demande fait des pressions à la
hausse sur leur taux de rémunération. Les salaires sont donc en hausse, ce qui
influence la répartition du fardeau.
6.3 Le changement technologique
D’après la théorie économique, les outils de marché pour lutter contre les problèmes
environnementaux ont deux avantages par rapport aux simples normes réglementaires :
leur efficacité économique et l’incitation au changement technologique. Dans le domaine
des changements climatiques, la question de l’adoption de nouvelles technologies est
particulièrement importante. En effet, les politiques pour contraindre les gaz à effet de
serre (GES) s’échelonnent sur un horizon de temps assez long pour favoriser les
ajustements dynamiques tels que les changements technologiques.
Les déterminants à la source du changement technologique peuvent être classés en deux
catégories. Ils peuvent être de nature exogène, c’est-à-dire indépendants des conditions
économiques. Ils peuvent être de nature endogène, c’est-à-dire qu’ils sont une réponse
des agents aux incitations économiques.
L’introduction du changement technologique dans les MEGC suit cette catégorisation.
Nous en présentons les grandes lignes et proposons les approches retenues pour le
caractériser dans notre modèle.
Cette section montre que, sans égard à la nature de ses déterminants, le changement
technologique réduit le fardeau d’un SPÉ au Canada.
6.3.1 Le changement technologique exogène
D’après Solow (1956), les systèmes économiques seraient caractérisés par une croissance
minimale du progrès technologique indépendamment de la conjoncture. S’inspirant de
cela, les modélisateurs introduisent certains éléments du changement technologique de
façon exogène.
Nous présentons dans cette section le modèle EXOTECH qui introduit le changement
technologique de façon exogène.
Chapitre 6 : Les ajustements des agents aux politiques
97
6.3.1.1 Revue de littérature
À la base, tous les modèles portant sur les changements climatiques traitent du
changement technologique exogène (Löschel, 2002), car ils introduisent une croissance
exogène du progrès technologique global, conformément au modèle de Solow (1956). Il
y a deux autres types de changement technologique exogène qui sont communément
modélisés, mais qui sont plus spécifiques au domaine des changements climatiques.
Le premier type est la discrétisation de technologie de production « sans émissions » : les
« backstops technologies ». Ces technologies produisent des énergies non émettrices
parfaitement substituables aux énergies conventionnelles à partir d’un prix donné. Leur
rôle dans les MEGC est de fixer une borne supérieure au coût du contrôle des émissions à
long terme (Löschel, 2002). Les technologies « sans émissions » les plus communes dans
les MEGC sont l’énergie solaire et les réacteurs à fusions nucléaires (Jacoby et al. 1996),
comme substituts à l’électricité et la biomasse, et les carburants synthétiques dérivés des
énergies fossiles (Burniaux et al., 1992) comme substituts aux énergies fossiles.
Le second type de changement technologique exogène est connu sous l’expression :
Autonomeous Efficiency Energy Improvment (AEEI). Les AEEI sont en partie fondées
sur les études empiriques (Kaufman, 1992) montrant que la quantité d’énergie utilisée par
unité de production baisse à travers le temps. Elles représentent aussi le niveau minimal
d’innovation présent dans le secteur de l’énergie (Löschel, 2002).
La modélisation des AEEI dans un MEGC se fait en introduisant un paramètre exogène
dans les fonctions de coûts ou de production pour assurer la décroissance, à travers le
temps, de la part relative des intrants énergétiques. Par exemple, dans le modèle MERGE
de Manne et al. (1995), la production (Y) est définie par une fonction ESTC de la forme :
(6.15)
Y = [a(K α L1−α )γ + b(E β N1− β )γ ]
1/ γ
où K , L , E , N : représentent respectivement le capital, le travail, l’énergie électrique
et l’énergie non-électrique.
a et b
: paramètres de partage de la fonction ESTC;
α et β
: paramètres de partage des fonctions agrégeant respectivement le
γ
capital et le travail et l’énergie électrique et non électrique;
: élasticité de substitution de la fonction ESTC.
Le paramètre b diminue exogènement à travers les périodes pour caractériser la
décroissance de l’intensité énergétique de la production.
Chapitre 6 : Les ajustements des agents aux politiques
98
L’introduction des AEEI produit un effet prix, car une demande décroissante de
l’énergie à travers le temps fait des pressions à la baisse sur le prix de l’énergie. Kemfert
et Welsch (2000) ont souligné que, dû à cet effet prix, les AEEI ne peuvent réduire la part
relative de l’énergie sur la production dans une fonction ESTC que si les élasticités de
substitution sont inférieures à l’unité. À long terme, il est difficile de mesurer l’effet net
de ce changement technologique exogène, car c’est une source parmi plusieurs de
variations des prix relatifs (Jones, 1994). Toutes choses étant égales par ailleurs, plus
élevé est le paramètre caractérisant les AEEI, plus bas est le niveau d’émissions sans SPÉ
et plus faible est le coût pour atteindre une cible d’émissions (Löschel, 2002).
6.3.1.2 Protocole de modélisation d’un MEGC avec changement technologique
exogène : le modèle EXOTECH
Pour cette quatrième version de notre MEGC, nous introduisons les AEEI dans
INTERFAC. Nous nommons cette version EXOTECH. Le paramètre modifié à travers le
temps est le paramètre de partage ε ekd de l’équation 6.9, qui est la fonction ESTC
agrégeant l’énergie et le capital dans INTERFAC. Ce paramètre décroît à un taux de 1%,
ce qui est la valeur commune pour les AEEI.
6.3.1.3 Simulation d’EXOTECH
La simulation d’EXOTECH est la même que pour les autres versions dynamiques de
notre MEGC.La figure 6.8 confirme que la présence des AEEI réduit le niveau
d’émissions de GES du scénario de référence. Avec les AEEI, il est donc plus aisé de
maintenir le niveau d’émissions à celui de la période initiale. À la quinzième période, la
réduction demandée est maintenant de l’ordre de 30%, comparativement à 35% sans
AEEI. Cela explique que les prix d’équilibre du permis soient plus faibles avec les AEEI
(figure 6.9).
Figure 6.8 : Niveau d’émissions du scénario de référence dans INTERFAC et EXOTECH
99
Chapitre 6 : Les ajustements des agents aux politiques
$CAN 9
8
7
INTERFAC
6
EXOTECH
5
4
3
2
1
0
1996
1998
2000
2002
2004
2006
2008
2010
Périodes
Figure 6.9 : Prix d’équilibre du permis dans EXOTECH et INTERFAC
Un prix du permis plus faible fait des pressions à la baisse sur le prix de l’agrégat
énergétique ( PAE ) , qui était déjà à la baisse due à l’effet prix causé par les AEEI. Les
effets prix semblent donc pouvoir compromettre la réduction de l’intensité énergétique.
En prenant pour exemple la production industrielle, nous observons cependant une
réduction de la part de l’énergie dans la production et ce, relativement au cas où il n’y a
pas de AEEI (figure 6.10). Nos résultats sont donc compatibles avec l’affirmation de
Kemfert et Welsch.
Figure 6.10 : Proportion de l’énergie dans la production totale pour l’industrie dans
EXOTECH et INTERFAC
En résumé :
•
L’ampleur du fardeau du SPÉ est réduite par l’introduction des AEEI.
Chapitre 6 : Les ajustements des agents aux politiques
•
100
Les AEEI forcent la baisse des niveaux d’activité dans les secteurs énergétiques
relativement aux autres secteurs. La répartition du fardeau du SPÉ est donc différente.
6.3.2 Le changement technologique endogène
Schumpeter (1942) fut l’initiateur d’une définition du processus de changement
technologique endogène, c’est-à-dire dicté par les incitations économiques. Selon cette
définition, le changement technologique s’opère en trois étapes : l’invention, l’innovation
et la diffusion. La première et la deuxième étapes sont communément appelées les actions
de recherche et développement (R&D). La description du processus de changement
technologique peut donc être séparée en deux parties : les déterminants des actions de
R&D et l’interaction entre la R&D et la diffusion.
Il existe deux écoles de pensée quant aux déterminants de la R&D (Jaffe et al., 2002). La
première, la théorie de l’innovation induite, est celle qui est retenue dans les modèles
économiques. Elle stipule que la R&D est une décision d’investissement provenant de la
maximisation inter-temporelle du profit par les firmes.
La seconde école de pensée est la théorie de la
partie attribuée à Nelson et Winter (1982). Selon
sur les firmes incitent celles-ci à reconsidérer
décisions d’investissement ne découleraient pas
plutôt d’un arbitrage plus subjectif.
perspective évolutionnaire qui est en
cette théorie, de nouvelles contraintes
leurs méthodes de production. Les
d’un processus d’optimisation, mais
Les deux écoles de pensée sont en accord sur un point : les déterminants des
investissements en R&D répondent à des incitations économiques. L’endogénisation du
processus du changement technologique est donc souhaitable.
Dans ce qui suit, nous présentons comment certains auteurs ont traité du changement
technologique endogène dans le domaine des chargements climatiques. Nous présentons
par la suite notre approche pour le caractériser dans notre MEGC. Cette version de notre
MEGC est le modèle ENDOTECH.
6.3.2.1 Revue de littérature
Il y a deux représentations du changement technologique endogène dans les modèles
économiques portant sur les changements climatiques. La première s’efforce de détailler,
de la façon la plus rigoureuse possible, tout le processus du changement technologique
pour l’ensemble de l’économie. Dans cette représentation, il n’y a pas d’attention
Chapitre 6 : Les ajustements des agents aux politiques
101
particulière portée sur les technologies de dépollution des émissions de GES. C’est plutôt
toute la dynamique menant de l’innovation jusqu’aux effets tangibles de l’amélioration
des technologies existantes qui est modélisée. Les auteurs qui font cette représentation du
changement technologique endogène (Nordhaus 1999, Goulder et Schneider 1999,
Buonamo, Carraro et al. 1999 et Goulder et Mathai 2000) ont habituellement comme
objectif d’identifier la politique optimale pour lutter contre les changements climatiques.
La deuxième représentation du changement technologique endogène est spécifique aux
technologies de dépollution des émissions de GES. Cette représentation se concentre à
modéliser le lien entre les politiques environnementales et l’utilisation de nouvelles
technologies permettant de réduire le niveau d’émissions par unité de production.
Beauséjour et al.(1989), Capros et al. (1997), Ryan et al. (2003) et Dellink et al. (2002)
sont de ceux qui intègrent ces technologies dans des MEGC portant sur les changements
climatiques. Les approches de Capros et al. (1997) et Dellink et al. (2002) sont cependant
les plus intéressantes. Les technologies de dépollution sont caractérisées par les fonctions
de coûts marginaux de dépollution des émissions. Comme il a été souligné
précédemment, l’introduction de ces fonctions dans un MEGC a plusieurs avantages,
notamment d’expliciter l’arbitrage entre l’achat de permis et les activités de dépollution.
Dans ce qui suit, nous présentons une revue des approches de Dellink et al. et. Capros et
al. Une lectrice ou un lecteur intéressé par une synthèse de ces approches devrait se
référer à Conrad (2001).
6.3.2.1.1 L’approche de Dellink et al. (2002)
Dellink et al. utilisent un MEGC dynamique inter-temporel fermé au commerce
international de l’économie hollandaise pour expliciter les activités de dépollution. Les
technologies de dépollution sont introduites de façon à représenter des fonctions de coûts
marginaux de dépollution. Ces fonctions comptabilisent toutes les technologies de
dépollution disponibles, que ce soit les technologies « sans émissions » ou celles de
restructuration du processus de production (process-integrated) des Pays-Bas. La
construction de ces fonctions est une des difficultés de l’approche de Dellink et al. Il faut
noter que les coûts marginaux de dépollution sont comptabilisés en termes de coûts
annuels : les sommes payées à la période présente pour une technologie doivent être
repayées à la période suivante pour avoir accès à cette même technologie. Les
investissements dans la dépollution sont donc réversibles, ce qui simplifie la
modélisation.
102
Chapitre 6 : Les ajustements des agents aux politiques
Une fois construites, les fonctions de coûts marginaux de dépollution sont transposées
sous une forme fonctionnelle dans le MEGC, dans ce cas-ci une ESTC. Au contraire des
technologies « sans émissions », ces technologies de dépollution ne sont pas discrètes,
mais continues et progressives. Dellink et al. appellent la courbe associée à la
fonction ESTC « la courbe de substitution pour la réduction de la pollution » (pollution
abatement substitution curve, PAS curve ). Cette approche se distingue de celle de
Nordhaus (1991), où des fonctions de dépollution de forme quadratique sont estimées et
sont directement introduites dans le modèle. La courbe de substitution pour la réduction
de la pollution permet de caractériser une substitution imparfaite entre la pollution et la
dépollution. À l’équilibre, elle assure l’égalité entre le coût marginal de dépollution et le
coût à la marge d’émettre, comme le stipule la théorie économique.
Pour permettre une relation de substituabilité entre la pollution et la dépollution, il faut
cependant faire l’hypothèse que les émissions sont des inputs à la production. Dellink et
al. adoptent donc une structure de production semblable à celle représentée à la figure
6.11 (la structure de consommation est de la même forme en termes de technologies de
dépollution). La réduction des émissions est rendue possible lorsque l’input « émission »
est remplacé par le produit dépolluant selon la fonction ESTC. Le produit dépolluant et
l’input « émission » forment l’agrégat : « service environnemental ». Cet agrégat est par
la suite nécessaire à la production ou à la consommation des produits finis. Les agents
font donc un arbitrage statique entre dépolluer ou émettre pour un niveau donné de
« service environnemental ».
Production totale d’une
branche d’activité
(ESTC)
« Service
environnemental »
Main-d’oeuvre
(ESTC)
Input
Émissions de
GES
Capital
Consommations
intermédiaires
Produit
dépolluant
Figure 6.11: Structure de la production du modèle de Dellink et al. (2002)
Chapitre 6 : Les ajustements des agents aux politiques
103
Le prix du produit dépolluant est obtenu de la même façon que pour les prix des biens et
services des autres secteurs de l’économie, c’est-à-dire par l’équilibre sur le marché des
biens. Il y a donc un nouveau secteur dans le modèle, celui de la dépollution. Cela permet
d’expliciter l’utilisation de la main-d’œuvre, du capital et de différents intrants
intermédiaires nécessaires pour fournir les technologies dépolluantes.
Une autre difficulté de l’approche de Dellink et al. est la calibration de la fonction ESTC.
Ils proposent de minimiser le carré de la somme verticale entre la fonction de coûts
marginaux de dépollution construite avec les données réelles et celle transposée sous la
forme ESTC. Cette procédure a l’avantage de permettre d’obtenir les paramètres de la
ESTC sans se soucier des prix à la situation de référence. Par exemple, il est possible de
poser que le prix du permis est zéro.
6.3.2.1.1.1 Les extensions de l’approche de Dellink et al.
Dans le cas des courbes quadratiques, il est toujours possible de réduire les émissions par
la dépollution. Or, d’après Hueting (1996), il est important de considérer que les
technologies environnementales ont une limite d’efficacité. Pour ce faire, Dellink et al.
considèrent tout simplement que ce n’est qu’une partie des émissions qui sont soumises à
la substitution avec le produit dépolluant.
Dellink et al. proposent aussi d’introduire, de façon exogène, certains aspects dynamiques
propres au processus du changement technologique endogène. Par exemple, la présence
d’innovation peut être reproduite dans le modèle en appliquant un paramètre augmentant
la proportion des émissions soumises à la dépollution. Cela n’aura pas d’effet direct sur le
prix des biens polluants à court terme, ce qui, d’après les auteurs, en fait une assez bonne
représentation du concept d’innovation. Les effets d’apprentissage et autres externalités
reliées au changement technologique peuvent aussi être représentés de façon exogène en
forçant une diminution des prix des produits dépolluants.
6.3.2.1.1.2 L’approche de Capros et al. (1997)
L’approche de Capros et al. est semblable à celle de Dellink et al., mais elle se différencie
cependant au niveau de la structure de la production et de la consommation. Les
structures font en sorte que les coûts d’émission et de dépollution affectent le coût
d’utilisation de l’énergie au lieu d’affecter directement le prix au coût des facteurs. Dans
GEM-E3, cela signifie que les émissions proviennent de l’utilisation des énergies
Chapitre 6 : Les ajustements des agents aux politiques
104
émettrices tandis que pour Dellink et al., ce sont les produits finaux qui sont émetteurs18.
L’avantage de l’approche de Capros et al. est de permettre les effets de substitution interénergétiques et inter-factoriels.
6.3.2.2 Protocole de modélisation d’un MEGC avec changement technologique
endogène : le modèle ENDOTECH
Nous enrichissons notre MEGC du changement technologique endogène en introduisant
les technologies de dépollution. Pour isoler les effets découlant de cette extension, nous
laissons tomber la structure de production permettant d’introduire les effets de
substitution inter-factoriels et les AEEI. Le modèle ENDOTECH est donc une extension
directe d’ENDYMO.
Notre approche s’inspire à la fois de Dellink et al. (2002) et de Capros et al. (1997). Tout
comme Dellink et al., nous considérons que les émissions sont des inputs et qu’ils
peuvent être substituables, de façon imparfaite, à un produit dépolluant. À la différence
de Dellink et al., notre processus de production comporte trois types d’émissions plutôt
qu’un seul. En effet, nous comptabilisons les émissions reliées à la combustion du
charbon, celles reliées aux autres énergies fossiles et les émissions fugitives. Les
technologies de dépollution pourraient donc intervenir à trois niveaux dans la production.
Nous restreignons cependant la possibilité d’utiliser des technologies dépolluantes
seulement pour les émissions liées à la combustion des énergies fossiles. Les
technologies de dépollution interviennent donc à deux endroits dans la production. Nous
faisons l’hypothèse que les technologies sont spécifiques aux deux types d’énergies
fossiles. Nous associons un secteur propre à chacune des technologies. Par conséquent,
notre MEGC comporte deux nouveaux secteurs : les secteurs produisant les technologies
de dépollution pour le charbon et un secteur de même nature pour les autres énergies
fossiles. Ces secteurs n’ont qu’une composante à leur demande : les consommations
intermédiaires. Nous faisons l’hypothèse que les produits de ces secteurs sont soumis au
commerce international. Il est donc possible d’importer ou d’exporter les technologies de
dépollution. La structure de production modifiée pour introduire les technologies de
dépollution est représentée à la figure 6.12.
L’agrégat des émissions et des produits dépolluants forme l’agrégat appelé « service
environnemental » pour reprendre la terminologie de Dellink et al. Pour le charbon, cet
agrégat est donné par la fonction ESTC suivante :
18
Selon ce qui a été présenté au chapitre 4 de ce mémoire, l’approche de Dellink et al. revient à poser que
toutes les émissions sont fugitives.
105
Chapitre 6 : Les ajustements des agents aux politiques
EScha, j = Z (ε DI abac, j
sec
j
(6.16)
où
x sec
=
j
sec
j
− x sec
j
+ (1− ε )EMIPcha, j
sec
j
− x sec
j
−
)
1
x sec
j
1 − µ sec
j
µ sec
j
x sec
j
: paramètre de substitution de la fonction ESTC;
µ sec
j
: élasticité de substitution;
Z sec
j
: paramètre d’échelle de la fonction ESTC;
ε sec
j
: paramètre de partage de la fonction ESTC;
EScha , j
: « service environnemental » pour le charbon;
EMIPcha , j : émissions de GES liées à la combustion du charbon;
DI abac , j
: consommations intermédiaires du secteur des technologies de
abac
dépollution pour le charbon;
: indice représentant le secteur des technologies de dépollution pour le
charbon
L’agrégat des émissions et des produits dépolluants est donné par la fonction ESTC
suivante pour les autres énergies fossiles, soit :
ES fos, j = Z (ε DIabaf , j
sef
j
(6.17)
où
x sef
=
j
sef
j
− x sef
j
+ (1− ε )EMIPfos, j
sef
j
− x sef
j
−
)
1
x sef
j
1 − µ sef
j
µ sef
j
x sef
j
: paramètre de substitution de la fonction ESTC;
µ sef
j
: élasticité de substitution;
Z sef
j
: paramètre d’échelle de la fonction ESTC;
ε sef
j
: paramètre de partage de la fonction ESTC;
ES fos, j
: « service environnemental » pour les autres énergies fossiles;
EMIPfos , j : émissions de GES liées à la combustion des autres énergies fossiles;
DI abaf , j
: consommations intermédiaires du secteur des technologies de
abac
dépollution pour les autres énergies fossiles;
: indice représentant le secteur des technologies de dépollution pour les
autres énergies fossiles;
106
Chapitre 6 : Les ajustements des agents aux politiques
La valeur des élasticités de substitution utilisées pour les équations 6.16 et 6.17 s’inspire
de Dellink et al., qui retiennent la valeur 1,26. Nous retenons la valeur 1,25.
Production Totale
(Leontief)
Valeur Ajoutée
Consommations Intermédiaires
(Cobb-Douglas)
Travail
(Leontief)
Capital
Agrégat Énergétique
Services
(ESTC)
Énergie Non électrique
(ESTC)
Industries
Agriculture
Énergie Électrique
Charbon
effectif
Autres énergies
fossiles
effectives
(Leontief)
(Leontief)
Charbon
Service environnemental
(ESTC)
Émissions liées à la
combustion du charbon
Autres énergies fossiles
Produit dépolluant pour
le charbon
Service environnemental
Émissions liées à la
combustion des autres
énergies fossiles
(ESTC)
Produit dépolluant pour
les autres énergies
fossiles
Figure 6.12 : Structure de production d’ENDOTECH
La demande pour le produit dépolluant pour le charbon est obtenue du programme de
minimisation des coûts du producteur, soit :
DIabac , j = ES cha, j
(6.18)
où PC abac
1− ε sec
j
ε sec
j
µ sec
j
PEScha , j
µ sec
j
PCabac
: Prix composite du produit dépolluant pour le charbon;
PES cha , j : Prix de l’agrégat « service environnemental » pour le charbon.
Chapitre 6 : Les ajustements des agents aux politiques
107
La demande pour le produit dépolluant pour les autres énergies fossiles est obtenue de la
même façon que pour le charbon, elle est donc donnée par :
DIabaf , j = ES fos, j
(6.19)
où PC abaf
1− ε sef
j
ε sef
j
µ sef
j
µ sef
PES fos, j
PCabaf
: Prix composite du produit dépolluant pour les autres énergies fossiles;
PES fos , j : Prix de l’agrégat « service environnemental » pour les autres énergies
fossiles.
En considérant les émissions comme des inputs, cela nous permet de faire l’hypothèse
que les énergies fossiles ne sont utilisables que si elles s’accompagnent d’une part fixe
d’émissions qui, rappelons-le, peuvent ici se substituer aux produits dépolluants. Les
consommations intermédiaires des énergies fossiles peuvent donc être définies par une
relation Leontief avec l’agrégat « service environnemental », pour former un agrégat qui
représente les consommations intermédiaires d’énergies fossiles dites utilisables. Nous
utilisons le terme « effectif » pour définir ce nouvel agrégat (voir figure 6.12). Dans le
cas du charbon, la relation Leontief entre son « service environnemental » et ses
consommations intermédiaires est donnée par les deux équations suivantes :
CHA j = γ j
(6.20)
où γ j
cha
cha
EScha , j
: volume de charbon effectif dans la production par unité de « service
environnemental »;
CHA j : consommation intermédiaire de charbon effectif.
CHA j = β j
(6.21)
où β j
cha
cha
DIcha , j
: volume de charbon effectif dans la production par unité de consommation
intermédiaire de charbon, avec
1
γ
cha
j
+
1
β cha
j
= 1.
Dans le cas des autres énergies fossiles, nous avons des relations semblables, soit :
FOS j = γ j ES fos, j
fos
(6.22)
où γ j
fos
: volume d’autres énergies fossiles effectives dans la production par unité
de « service environnemental »;
108
Chapitre 6 : Les ajustements des agents aux politiques
FOS j : consommation intermédiaire d’autres énergies fossiles effectives.
FOS j = β j DI fos, j
fos
(6.23)
où β j
fos
: volume d’autres énergies fossiles effectives dans la production par unité de
consommation intermédiaire d’autres énergies fossiles, avec
1
γ
fos
j
+
1
β jfos
=1
Le prix de l’agrégat « service environnemental » pour le charbon est donné par la
fonction suivante:
(6.24)
PEScha, j =
PCabac DIabac , j + PPERMIS ⋅ EMIPcha , j
EScha , j
Dans le cas des autres énergies fossiles, ce prix est donné par :
(6.25)
PES fos, j =
PCabac DIabac , j + PPERMIS ⋅ EMIPfos, j
ES fos, j
Le prix des énergies fossiles effectives dans la production ( CU ) correspond à
(6.26)
CU cha , j =
PCcha DIcha , j + PEScha , j EScha , j
CHA j
pour le charbon et correspond à
(6.27)
CU fos, j =
PC fos DI fos, j + PES fos, j ES fos, j
FOS j
pour les autres énergies fossiles.
Ces prix correspondent au coût d’utilisation des énergies fossiles utilisées dans la
production. Ils incluent donc le coût débourser pour émettre ou pour dépolluer. Notre
approche est à ce niveau semblable à celle de Capros et al. (1997).
Chapitre 6 : Les ajustements des agents aux politiques
109
6.3.2.3 Les données
Pour les données des fonctions de coûts marginaux de dépollution, nous n’avons pas
entrepris le travail colossal de cueillette et construction de fonctions spécifiques au
Canada. Les données utilisées sont celles de Dellink et al. (2002) pour l’économie
néerlandaise. Ceux-ci présentent leurs données qu’une fois transposées dans leur MCS.
Nous avons donc calculé les coefficients d’intensité pour le secteur de la dépollution de
leur MCS et nous les avons transposés à notre MCS. Nous avons fait l’hypothèse
qu’avant sa désagrégation, le secteur de la dépollution était implicitement intégré dans le
secteur de l’industrie et des services. Cette première manipulation nous a permis de
désagréger un seul secteur pour les technologies de dépollution. Pour différencier entre
les deux secteurs des technologies de dépollution que nous considérons, nous avons
supposé que soixante pour cent des technologies de dépollution étaient pour le charbon et
le quarante pour cent restant pour les autres énergies fossiles.
Pour pouvoir calibrer les nouvelles fonctions ESTC sans utiliser l’approche complexe de
Dellink et al., nous avons produit une nouvelle matrice dans laquelle le prix du permis est
fixé à un. Nous avons donc pu utiliser la procédure de calibration usuelle s’appuyant sur
les valeurs de la MCS. Le tableau 6.2 en annexe de ce chapitre présente la MCS avec les
deux secteurs pour les technologies de dépollution et un prix du permis calibré à l’unité.
6.3.2.4 Simulation d’ENDOTECH
La simulation d’ENDOTECH est la même que pour les autres versions dynamiques de
notre MEGC.
Tout comme pour les AEEI, l’introduction des technologies de dépollution change le
niveau d’émissions de référence sans SPÉ. À la quinzième période, la réduction
demandée est de 32%, soit légèrement supérieure au scénario avec les AEEI. Pour une
cible de réduction plus sévère et sans possibilité de substitution inter-factorielle, le prix
d’équilibre est tout de même inférieur dans cette simulation (figure 6.13) après les
périodes initiales. Le prix du permis plus élevé pour ces périodes est simplement dû au
fait que le prix du permis est calibré à l’unité dans ENDOTECH.
110
Chapitre 6 : Les ajustements des agents aux politiques
$CAN 7
6
5
EXOTECH
4
ENDOTECH
3
2
1
0
1 99 6
1 99 8
2 00 4
2 00 2
2 00 0
2 00 6
2 00 8
2 01 0
Périodes
Figure 6.13 : Prix d’équilibre du permis dans ENDOTECH et EXOTECH
Le principal ajustement permettant la réduction des émissions n’est plus la substitution
énergétique. Les impacts structurels du SPÉ sont donc différents sous cette version de
notre MEGC. Par exemple, le charbon n’est plus massivement délaissé dans les processus
de production. Au contraire, ce secteur voit même sa demande intermédiaire augmentée
(figure 6.14).
%
40
30
20
10
0
-10
-20
-30
1996
1998
2000
2002
2004
2006
2008
2010
ENDYMO
ENDOTECH
Périodes
Figure 6.14 : Demande intermédiaire du charbon dans ENDOTECH et
ENDYMO
L’utilisation des technologies dépolluantes se traduit par une demande accrue des
produits de ces secteurs par les producteurs. Les produits dépolluants pour le charbon
deviennent cependant moins populaires que ceux pour les autres énergies fossiles à
travers le temps (figure 6.15).
111
Chapitre 6 : Les ajustements des agents aux politiques
%
7 ,4
7 ,2
7
6 ,8
6 ,6
6 ,4
6 ,2
Scénario
Scénar
io de rréférence
éfér ence ( ENDOTECH)
6
ENDOTECH
Scénario avec SPÉ
5 ,8
5 ,6
1 99 6
1 99 8
2 00 0
2 00 2
2 00 4
2 00 6
2008
2010
P ériodes
Figure 6.15 : Ratio de la demande intermédiaire, en volume, du charbon sur celle des autres
énergies fossiles dans ENDOTECH avec et sans SPÉ
La part de marché du secteur des technologies de dépollution pour les autres énergies
fossiles est donc en expansion par rapport au secteur de même nature pour le charbon
(figure 6.16).
%
1 55
1 50
1 45
1 40
1 35
Scénario
ence ( ENDOTECH)
Scénariodeder éfér
référence
1 30
ENDOTECH
Scénario avec SPÉ
1 25
1 99 6
1998
2 00 0
2 00 2
2 00 4
2 00 6
2008
2 01 0
Pé riodes
Figure 6.16 : Ratio de la production totale du secteur des technologies de dépollution du charbon
sur celle du secteur des technologies de dépollution des autres énergies fossiles
dans ENDOTECH avec et sans SPÉ
Nous pouvons donc conclure que, bien que le charbon soit le type d’énergie le plus
polluant, ce n’est pas lui qui bénéficie de l’effort d’innovation. Cela signifie qu’il reste
plus avantageux pour les producteurs canadiens de substituer le charbon aux autres
Chapitre 6 : Les ajustements des agents aux politiques
112
énergies fossiles que de le conserver dans le processus de production et de tenter de
développer des technologies pour le rendre moins polluant.
En résumé :
•
La prise en compte du changement technologique endogène réduit de plus de 86% le
prix du permis par rapport au cas où il est négligé (ENDYMO). Une analyse plus
poussée des impacts structurels montrerait que ce n’est pas seulement l’ampleur des
variations qui change, mais leur direction.
•
Il est possible de tirer certaines conclusions sur la direction des investissements en
R&D, malgré le fait que le processus de décision d’investissement en R&D ne soit
pas explicité.
•
Conceptuellement, la principale lacune de notre approche est que les investissements
dans les technologies de dépollution obéissent au même arbitrage pour les
investissements en capital. Or, les investissements en R&D ont des caractéristiques
qui leur sont propres. Ils sont intangibles, caractérisés par une forte incertitude et
qu’en partie appropriables (Weyant et Olavason, 1999), ce que nous avons négligé. Il
serait donc intéressant de mieux représenter le processus du changement
technologique endogène pour l’ensemble de l’économie. Dans la littérature des
changements climatiques, nous n’avons cependant relevé que le papier de Wing
(2002) qui utilisait un MEGC dynamique séquentiel pour s’attaquer à ce défi.
6.4 Conclusion
Nous avons modélisé ces cinq ajustements pour saisir le fonctionnement de chacun d’eux
dans les MEGC et pour estimer leur incidence possible sur les résultats. Nous avons
montré que les MEGC portant sur les changements climatiques sont très sensibles à la
modélisation des ajustements des agents aux politiques environnementales. L’ampleur et
la répartition du fardeau d’un SPÉ sont dépendants de ces ajustements. D’après nos
simulations, les ajustements ayant l’impact le plus significatif sur les résultats sont les
effets de substitution inter-énergétiques et l’introduction de technologies de dépollution.
Négliger les ajustements dynamiques, les effets de substitution inter-factoriels et le
changement technologique exogène surestime aussi le coût du contrôle des émissions,
mais de façon moins importante.
Annexe 6.1
Tableau 6.2 : Matrice de comptabilité sociale du Canada avec technologies de dépollution
et prix du permis égal à un (données réelles)
113
Annexe 6.1
Tableau 6.2 (suite) : Matrice de comptabilité sociale du Canada avec technologies de dépollution
et prix du permis égal à un (données réelles)
114
Conclusion
115
Conclusion
Ce travail de recherche a eu pour but d’adapter un MEGC à l’étude des politiques pour la
lutte aux changements climatiques. Pour atteindre notre objectif, nous avons procédé à la
revue, à la modélisation et à la simulation des approches pour introduire chaque
caractéristique, identifiée comme fondamentale, dans les MEGC.
Pour chaque caractéristique fondamentale, nous avons relevé un grand nombre
d’approches possibles pour les introduire dans les MEGC. Cette revue de littérature avait
pour but de discerner quelles approches pour la modélisation étaient ou devraient être la
norme pour les MEGC portant sur les changements climatiques. Les approches que nous
avons modélisées et simulées ont donc été choisies sur la base de ce critère. Il faut noter
que comme tout travail de construction, la modélisation d’un MEGC est graduelle. Les
approches retenues pour modéliser les premières caractéristiques sont conséquentes des
approches envisageables pour modéliser les caractéristiques subséquentes. Par exemple,
le fait d’avoir initialement introduit la sphère énergétique dans notre MEGC selon
l’approche top-down a nécessité par la suite une caractérisation du changement
technologique. Cela n’aurait cependant pas été nécessaire avec l’approche bottom-up, car
elle détaille implicitement le changement technologique. Nous pouvons conclure que les
approches pour la modélisation des MEGC portant sur les changements climatiques, qui
semblent en voie de devenir la norme, se sont avérées fort peu restrictives. En effet, les
approches modélisées dans ce travail ont permit une grande flexibilité pour les
transformations subséquentes. Il est donc possible d’enrichir un MEGC portant sur les
changements climatiques sur de nombreux aspects.
Par nos simulations, nous avons voulu montrer le fonctionnement et l’incidence sur les
résultats de chacune des approches modélisées.
Pour les modélisateurs de MEGC portant sur les changements climatiques, nous
considérons que notre travail de recherche peut être un cadre pour un travail de
construction. Cependant, nous ne considérons pas les différentes versions de notre
MEGC comme étant achevées et adéquates pour un travail sérieux d’analyse des
politiques canadiennes pour la lutte aux changements climatiques et ce, pour deux
raisons.
Conclusion
116
Premièrement, le niveau d’agrégation du modèle est trop important. Entre autres, notre
MEGC de base ne considère que quatre branches d’activités, qu’un seul niveau de
gouvernement et qu’un seul agent représentatif pour l’ensemble des ménages. Or, nous
savons, entre autres, que ce ne sont pas toutes les entreprises industrielles qui seront
couvertes par un SPÉ, que la souveraineté des gouvernements provinciaux est importante
au Canada dans les questions environnementales et que les prix de l’énergie affectent
inégalement les différentes catégories de ménages, ce que notre modèle ne peut saisir.
Deuxièmement, les données utilisées et leur traitement peuvent être améliorés. Nous
pensons que la disponibilité des données est la principale limite des options envisageables
pour un modélisateur de MEGC portant sur les changements climatiques. Nous avons vu
que, pour chaque nouvelle version de notre modèle, un certain nombre de paramètres
exogènes et parfois une désagrégation de la MCS étaient nécessaires. Le travail de
construction d’un MEGC portant sur les changements climatiques doit donc
parallèlement s’accompagner d’un travail de recherche de données spécifiques aux
économies modélisées. Pour notre part, nous avons construit une MCS de l’économie
canadienne à partir des données du Ministère des Finances du Québec et du CREAP. Il
est certainement possible d’apporter certaines améliorations à cette MCS, car la
cohérence avec les comptes nationaux n’est pas parfaite. Pour ce qui est des paramètres
introduits de façon exogène, nous avons utilisé ceux de la littérature, qui n’étaient, dans
la plupart des cas, pas spécifiques à l’économie canadienne. À ce niveau, il est donc aussi
possible et souhaitable d’apporter des améliorations. Par exemple, concernant la
substitution énergétique, la forte présence de l’hydroélectricité dans le bilan énergétique
canadien devrait induire des élasticités de substitution particulières, ce qui motiverait
l’estimation de ces paramètres.
Bien que les résultats des simulations de ce mémoire ne doivent pas être interprétés pour
l’analyse de politiques réelles, notre travail de recherche vise aussi les utilisateurs de
MEGC portant sur les changements climatiques. Les simulations du chapitre 5 et 6 ont
montré que les MEGC étaient fortement sensibles quant aux modalités du SPÉ et aux
hypothèses comportementales. Chaque version de notre MEGC a permis d’identifier des
sources de variabilités dans la répartition et l’ampleur du fardeau du SPÉ. Les variations
de l’ampleur du fardeau ont cependant été les plus marquantes. En effet, le prix du permis
varie de moins de 2$ (figure 6.13) à plus de 184$ (figure 6.5). Les utilisateurs de MEGC
devraient porter une attention particulière à ce point et considérer les MEGC pour leur
capacité à montrer les interactions de nature économique découlant des politiques sur les
émissions de GES, plutôt que leur coût total. De façon plus générale, nous concluons que
Conclusion
117
les caractéristiques traitées dans ce travail de recherche ne peuvent être négligées pour
utiliser les MEGC pour formuler et évaluer les politiques pour les changements
climatiques.
Une autre caractéristique fondamentale, sans être mentionnée explicitement, a elle aussi
été traitée tout au long de ce mémoire. Nous référons ici à l’incertitude. L’incertitude est
omniprésente dans le domaine des changements climatiques et les modèles portant sur
ceux–ci ne peuvent la négliger. Les modèles économiques peuvent considérer deux
dimensions de l’incertitude. Il y a d’abord l’incertitude paramétrique, qui réfère à la
valeur des paramètres. Il y a ensuite l’incertitude structurelle, qui réfère à la façon dont
l’économie est modélisée.
Pour notre part, nous avons considéré dans le sixième
chapitre ces deux dimensions de l’incertitude, tout particulièrement l’incertitude
structurelle. Nous avons en effet considéré diverses façons de modéliser les ajustements
structurels, sans porter une attention particulière aux variations des paramètres, excepté à
la section portant sur les effets de substitution inter-énergétique. L’approche que nous
avons retenue pour représenter l’incertitude a été de présenter les versions une à la fois.
Si nous avions porté une plus grande attention à l’incertitude paramétrique, les tests de
sensibilité auraient été l’approche la plus simple à adopter. Dans la littérature, certaines
approches ont cependant été développées pour introduire explicitement l’incertitude.
Nous croyons que cela serait une extension souhaitable à notre travail de recherche.
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