D Y S C A L C U L I E CLAIRE GOULET 2014 Quand on vous parle de dyscalculie A QUOI PENSEZ-VOUS ? DESCRIPTION DU TROUBLE Difficultés souvent observées ∞ Difficultés précoces de dénombrement ∞ Utilisation prolongée des processus immatures de comptage ∞ Difficulté de mémorisation des faits arithmétiques (ou pour leur compréhension). ∞ Difficulté de récupération des résultats mis en mémoire lors des calculs ∞ Répercussions ultérieures de ces troubles des activités élémentaires : en résolution de problèmes (plus complexe) lors d’opérations complexes (grande division …) dans la vie professionnelle et quotidienne Plan général de l’intervention ∞ Les troubles des apprentissages mathématiques : Définir et diagnostiquer la dyscalculie Causes : recherches en neurologie Repérage : L ’approche multifactorielle des difficultés d’apprentissage en mathématiques ∞ La scolarisation des élèves porteurs de ces troubles : Prévention Contournements Rééducations LES RESSOURCES Sources et ressources : Site ASH Conférence de Mme Françoise Duquesne : Formatrice à l’INS HEA Troubles du calcul et dyscalculies chez l’enfant : Mmes Van Hout et Meljac – Masson Le rapport INSERM 2007 : expertise collective et bilan des données scientifiques sur la dyscalculie … Dyscalculie : le sens perdu des nombres : article paru dans la revue « La recherche n° 379 » octobre 2004 Brève incursion sur le développement du nombre chez l’enfant : F. Lussier et J. Flessas – Cenop-fl - Montréal Une découverte concrète des TSA : DVD – Signes ed. Intervention de Mme Stroh – Orthophoniste Cogi-Act Les troubles du calcul - Les dyscalculies : Michel Fayol Livret d’accompagnement du test « Tedi-Maths » La dyscalculie : Claudine Gay – CRTA de Tarbes Site ASH ources ressources / outils pedag mathématiques diaporama Fayol DÉFINIR ET DIAGNOSTIQUER LA DYSCALCULIE Des définitions variables selon les équipes : ∞ Trouble spécifique de l’aptitude à calculer sur les nombres ∞ Trouble de la structuration logicomathématique ∞ Difficulté ne pouvant s’expliquer par aucun autre trouble ∞ Difficulté éventuellement associée à une dyslexie, une dyspraxie, une dysphasie, des troubles de la mémorisation, un TDHA, certains handicaps … Les critères de diagnostic : ∞ Les mêmes que pour tous les troubles des apprentissages (INSERM) : Critère de discordance (hétérogénéité des compétences) Critère d’exclusion Facteurs intrinsèques à l’enfant Résultats aux tests (- 1 ou 2 écarts/type) Résistance aux rééducations (mais la dyscalculie pure semble moins persistante que la dyslexie) ∞ Spécificités : La dyscalculie pure est plus rare que la dyslexie Autant de garçons que de filles Une définition large, récente et opérationnelle Selon Claudine Gay … • un dysfonctionnement dans les domaines de l'organisation spatiale • et/ou de la logique • et/ou de la construction des nombres • et/ou des opérations sur ces nombres • et/ou des difficultés de structuration du raisonnement • et/ou de l'utilisation des outils logiques mathématiques. (inclusion) Les troubles associés : • Association avec la dyslexie: 50% des cas environ • Avec les troubles de l’attention : 25% environ • Avec la dyspraxie visuo- spatiale ou manuelle • Pas d’association avec la déficience intellectuelle Opérations posées par un élève sévèrement dyspraxique Résumé : La dyscalculie est une difficulté inhabituelle, résistante et durable qui se manifeste dans le champ des apprentissages mathématiques. Elle ne peut être expliquée par un manque d’intelligence, une scolarité inappropriée ou un manque de motivation. Elle peut être combinée avec d’autres troubles des apprentissages. LES CAUSES DE LA DYSCALCULIE Les facteurs génétiques et environnementaux • Facteurs génétiques : 70% de prévalence chez les jumeaux homozygotes • Facteurs environnementaux: fréquence élevée chez les enfants prématurés ou très exposés durant leur vie fœtale L’imagerie cérébrale : les régions cérébrales du calcul Diapo Michel Fayol Résumé • La dyscalculie est une désorganisation primaire des réseaux neuronaux impliqués dans la perception des nombres. ∞ Atteinte limitée : dyscalculie touchant la perception des quantités ∞ Atteinte plus large : troubles associés. Dyslexies et dyscalculies « verbales » Dyslexies et dyscalculies visuo-spatiales Troubles praxiques Difficultés attentionnelles Difficultés de planification QUE FAIRE … QUAND ON OBSERVE DES DIFFICULTÉS INHABITUELLES EN MATHÉMATIQUES ? Repérage : Les 3 facteurs d’analyse ∞ Les caractéristiques cognitives des enfants ∞ Les facteurs d’ordre psychologique ∞ Les facteurs pédagogiques Les caractéristiques cognitives des enfants ∞Les troubles sensoriels : Surdité, déficit visuel … ∞Les troubles généraux des fonctions cognitives : Déficience intellectuelle, TED ∞Les troubles spécifiques des apprentissages Dyspraxie, Dysphasie, Dyslexie, Dysgraphie, TDAH… Les facteurs psychologiques ∞ Le simple rejet ∞ Les phobies ∞ Les obtusions (Boimare) ∞ Le rejet est du ressort de l’enseignant s’il est dû à des échecs répétés : Remise en confiance Réajustement de la zone proximale de développement Mise en situation de réussite Pour la relation entre mathématiques et psychanalyse : voir le site de Jacques Nimier Mathématiques et subjectivité ∞ Le langage logico-mathématique vise à être rationnel et strictement formalisé ∞ De ce fait, il élimine la place de la subjectivité: celui qui parle n’est pas « je » mais un « on » anonyme. ∞ Pour entrer en mathématiques, le sujet doit se défaire de sa subjectivité : Elément favorisant pour certains : on voit des enfants apparemment déficients y trouver refuge (déficience à cause probablement psychopathologique) Pour d’autres, la menace de mort symbolique attenante aux mathématiques, les empêchent d’y accéder Pour la plupart, l’existence d’une réalité externe objective n’a rien de menaçant. Un réel que l’on peut comprendre est sécurisant. Source : Philipe Cormier (IUFM Pays de Loire) Les facteurs pédagogiques • • • Les difficultés d’apprentissages sont très dépendantes de l’enseignement et du contenu enseigné. Facteurs négatifs : carences de scolarisation, pédagogie inadaptée… Facteurs positifs : certaines démarches sont de nature à prévenir les difficultés. – Utilité de connaître les domaines à risque (transcodage, sens du calcul ≠ lecture …) – Nécessité d’approfondir la didactique dans ces domaines Résumé : ∞ Ne pas privilégier une entrée ∞ Analyser les observations sans a priori ∞ Ne pas négliger l’histoire scolaire et personnelle de l’élève : rencontrer les parents ∞ S’adresser à différents professionnels pour affiner le diagnostic : Orthophoniste Psychologue scolaire Médecin scolaire ou médecin en libéral CRTA si besoin, dans un second temps DES OUTILS POUR ÉVALUER ET COMPRENDRE LES DIFFICULTÉS EN MATHÉMATIQUES Compétence et performance • La compétence, c’est ce que l’élève a compris. • La performance, c’est ce qu’on lui demande de faire pour le montrer. • Pour bien évaluer, il faut : – Bien choisir la performance (les tâches) – Bien interpréter les résultats Des modèles qui aident à choisir des tâches et à les analyser • Les trois représentations du nombre • Le transcodage • Les étapes du dénombrement Le triple code • Il y aurait trois types de représentations du nombre • A chacun de ces trois types seraient associées des activités numériques (Dehaene) et des difficultés spécifiques (Fayol). Le modèle de traitement des nombres et du calcul de Dehaene : Triple code et transcodage Code verbal Code arabe - écrit : trois 3 - oral : troi Code analogique Le modèle de traitement des nombres et du calcul de Dehaene : Les difficultés de transcodage • Le transcodage suppose la maîtrise du code source et du code de sortie (verbal arabe) • La structure de la langue a une influence sur le transcodage (Belgique et Asie) Code : le système verbal ∞ Des primitives lexicales : Les unités : un à neuf Les dizaines : dix à soixante Les particuliers : onze à seize Les multiplicateurs : cent, mille, million, milliard ∞ Des règles syntaxiques très opaques Combinaisons additives : quarante-quatre - cent six - soixante-dix Combinaisons multiplicatives : deux mille, trois cents, quatre-vingts Des interdictions : dix-deux n’existe pas Des irrégularités : entre onze et seize – soixante-dix et quatre-vingtdix -neuf Code : la numération écrite ∞ 10 chiffres, de 0 à 9, qui se combinent pour former la multitude des nombres ∞ La quantité représentée par le chiffre dépend de sa position dans le nombre : 2 peut ainsi signifier deux (32) , vingt (25), deux cents ( 256), … ∞ La position est évaluée en partant de la droite, chaque décalage vers la gauche équivaut à X 10 Erreurs de transcodage ∞ Nombres en mots écriture en chiffres Erreurs lexicales : quatorze/quarante Erreurs syntaxiques : vingt-sept 207 ou mille douze 10012 (généralisation à partir de 1002) ∞ Ecriture en chiffres Nombres en mots Fragmentation du nombre à lire : 834 lu quatre-vingttrente-quatre Omission de parties : 727 lu soixante-dix-sept Mauvais multiplicateur : 4004 lu quatre cent quatre Les principes du dénombrement (Gelman) • Correspondance terme à terme – Mise en correspondance d’une collection et d’étiquettes – Processus indépendant des compétences langagières • Ordre stable de la suite numérique – Habituellement verbale mais pourquoi pas avec le langage des signes ou la suite des nombres en chiffres ? • Cardinalité : le dernier élément désigne la quantité • Abstraction : pas d’influence de ce qui est compté • Non pertinence de l’ordre du pointage La mise en œuvre du dénombrement • La composante motrice : pointage, mouvement des yeux • La composante symbolique : chaîne numérique verbale ou représentation chiffrée ou LSF … • La coordination des deux : elle peut être difficile, spécialement pour des enfants dyspraxiques ou dysphasiques qui maîtrisent mal l’une des deux. ∞Les erreurs de dénombrement : distinguer comprendre et faire Résumé : Se former en mathématiques : C’est intéressant C’est utile COMMENT AIDER LES ELEVES ? INTRODUIRE LES NOTIONS REMÉDIER ET ADAPTER Avant les apprentissages scolaires : ∞ L’enfant utilise le nombre. Il peut : Réciter une petite suite de nombres Dénombrer de petites quantités Réaliser des correspondances terme à terme sur de petites quantités ∞ Il sait intuitivement différencier ce domaine lexical des autres ∞ Il commence à élaborer le concept de nombre grâce À la comptine numérique (séquence verbale) Au comptage (quantification) ∞ Ces deux processus sont à la base du développement des habiletés arithmétiques futures. En maternelle : prévenir ! ∞ Importance des manipulations Pour favoriser le développement sensori-moteur Pour développer les compétences visuo spatiales Pour développer la perception des quantités : ajout, retrait, changement de contenant … ∞ Importance des situations vécues Pour ne pas être figé dans la représentation des quantités (les fiches) Pour abstraire les concepts mathématiques à partir de situations variées : chercher le commun des situations singulières (même processus que pour le langage : mot/concept) La représentation écrite ou orale doit suivre la formation du concept et non la précéder ∞ Importance du travail sur la comptine orale Futur outil du dénombrement Base des opérations arithmétiques ultérieures L’abstraction : citations Abstrait ne signifie pas compliqué : le bébé abstrait quand il apprend à parler. « Le concret c’est de l’abstrait familier. » Pour entrer dans le concept : repérer le commun de situations singulières. Il faut voir plusieurs maisons pour abstraire le sens du mot « maison ». Le nombre exige de négliger toutes les caractéristiques des objets. Françoise Duquesne Les étapes de l’addition 1. 2. 3. 4. Réunir les collections physiquement Les deux collections étant présentes mais non réunies, continuer le comptage: 1 – 2 …… 3 – 4 – 5 (exemple diapo suivante) Une des deux collections est absente, mais on connaît son cardinal : 2 ……… 3 – 4 - 5 Les deux quantités sont absentes et on connaît leur cardinal : on entre dans les mathématiques. 2 + 3 = 5 Un enfant est dans le calcul quand il n’a plus besoin de quantités, ni de doigts. Une idée pour favoriser la transition : 3+5= L’addition posée : compétences requises ∞ Concept de somme : Lien avec des situations additives concrètes Sens de l’algorithme de l’addition posée (signe +, présentation, trait …) ∞ Connaissance de la numération de position : U, D, C (code arabe) attention aux élèves ayant des atteintes visuospatiales ∞ Connaissance mémorisée et évocation des faits numériques (code verbal oral) attention aux élèves ayant des difficultés de mémorisation ou des atteintes verbales Meljac : exemple d’acquisition des compétences sur des bases interdépendantes Objets différents et concept de nombre : chez Accès A quoi sert le nombre ? Le nombre sert à pallier l’absence des objets : il permet d’évaluer, comparer, transformer des quantités absentes. Objets pas dans le même lieu Ou pas dans le même temps Le concept de nombre : Les situations que le concept permet de résoudre Les obstacles que le concept permet de surmonter (espace/temps) Les procédures que le concept permet de mettre en œuvre : calculer, anticiper … CONCEPT OUTIL Des systèmes : numération verbale, écrite, signes, vocabulaire … Le concept de nombre est caractérisé par : Des savoir-faire : techniques, tables, Des définitions et propriétés CONCEPT OBJET Exemple de production : Le transcodage verbal arabe Trois mille six cent treize 3613 Levée des implicites : pas un mot un chiffre Il y a des mots « qui s’écrivent » et des mots « qui indiquent la position ». Pour apprendre à écrire les nombres quand on fait : Deux mille trois cent quatre : 20003004 Expliciter le rôle des mots mille et cent: ils servent seulement à donner la position et à « dire la taille des paquets ». Quand j’entends mille, je ne l’écris pas et je sais qu’il reste trois places derrière le 2: 2 . . . Faire écrire les points le temps nécessaire. IDÉES D’ACTIVITÉS OU D’AIDES : L’importance de la modélisation • Concevoir ou choisir une représentation de l’objet de savoir qui modélise sa structure ou son fonctionnement. • Articuler cette modélisation à la représentation écrite. Numération de position : La machine à décomposer Objectifs possibles : Valeur du chiffre en fonction de sa position Décomposition et recomposition Rôle du zéro Peut servir d’aide individuelle pour un exercice Relation quantité / écriture A faire en encodage et en décodage Plusieurs représentations : Erreur très fréquente : L’élève sait passer de la quantité à l’écriture mais produit ceci pour l’opération inverse L’articulation entre situation et écriture mathématique Pour chaque situation : • Présenter une modélisation : exemple lancer les dés pour travailler les additions • Compter l’ensemble des points pour calculer le total • Dire le calcul avec des mots • L’écrire immédiatement sur l’ardoise ou avec des chiffres en plastique • Éventuellement, distribuer ces rôles dans le groupe et tourner • Proposer d’autres modélisations (jeu de marchande …) CONTOURNER LE TROUBLE Visualiser la démarche Représentations préverbales *** Représentations visuelles : Représentations verbales : trois 3 Des exemples pour contourner les difficultés verbales Représentations préverbales *** Représentations visuelles : Représentations verbales : trois 3 Le lien entre quantité et numération écrite - 1 Le lien entre quantité et numération écrite - 2 Addition posée avec retenue Les spirales : D’après : le document du CNEFEI de Suresnes : les spirales de Dominique Barataud et Philippe Lestievent Permet de travailler la suite des nombres écrits et la numération de position, sans faire référence à la numération orale Pour un élève qui ne mémorise pas les faits mathématiques : ∞Donner les tables d’addition et de multiplication comme aide pour effectuer les opérations ∞N’évaluer que la technique opératoire ∞Il est inutile de s’acharner : L’élève ne peut apprendre ses tables Il faut valoriser la compétence existante Des exemples pour contourner une dyspraxie Représentations préverbales *** Représentations visuelles : Représentations verbales : trois 3 Quelques principes : ∞ Mener les apprentissages à l’oral quand c’est possible : mémoriser faits arithmétiques ∞ Simplifier les supports ∞ Agir pour l’enfant pour que le lien nombre/quantité ne soit pas parasité par les erreurs de pointage ou repérage. ∞ Éviter les opérations posées : préférer les calculs en ligne avec des étapes successives. ∞ Utiliser les couleurs en appui de la position pour favoriser le repérage des CDU (même si c’est conceptuellement contestable) Pour lire les nombres ou calculer en ligne : 642 + 234 : La couleur permet d’identifier qu’il s’agit d’une unité, d’une dizaine ou d’une centaine. Elle décharge l’élève d’une partie de la tâche. Pour repérer la position du chiffre quand on est dyspraxique : Un tableau et l’aide des couleurs : 1 642 +8 3 9 14 8 1 Organisation et attention ∞ Planifier la tâche avec l’élève, fabriquer un guide avec des étapes distinctes ∞ L’aider à se repérer dans la tâche en cours en matérialisant ce qui est fait et ce qui reste à faire ∞ Utiliser les couleurs, l’écrit, des supports simples, des caches, des aides (tables) … ∞ Éviter les distracteurs sonores et visuels : coin calme, rituels d’entrée dans la tâche ∞ Ne pas pénaliser les fautes d’inattention si le sens est compris ∞ Permettre des déplacements – prévoir un dispositif de retour au calme Conclusion : ∞ La dyscalculie sous sa forme isolée est rare et certains doutent encore de son existence (Rapport Inserm) ∞ Les troubles des apprentissages mathématiques sont plus fréquents, souvent associés à un autre trouble. ∞ En présence d’un trouble avéré, la démarche à privilégier est le contournement. La rééducation est l’affaire d’autres professionnels. ∞ Les principaux éléments à prendre en compte sont l’enfant avec ses points d’appui et ses difficultés, les contenus d’apprentissages, les démarches de l’élève observées en situation scolaire. ∞ Plus que tout autre, l’enfant en difficulté a besoin que les situations d’apprentissage aient du sens. L’enfant doit être mis en situation d’intentionnalité (être concerné) et de réussite (croire que son action va être utile) pour progresser.