Fiche technique : le cas de la « Panel blanca » (camionnette blanche) Ana Elizabeth Paniagua Morales et autres au Guatemala Les faits Le cas se réfère à la détention arbitraire, la séquestration, la torture, de 11 victimes, voire même à l’assassinat de certains d’entre eux, entre les années 1987 et 1988. Les cas de ces 11 victimes ont en commun le modus operandi des crimes, incluant le type de véhicule utilisé et la description des auteurs. En effet, il s'agissait d'hommes armés se déplaçant dans la fameuse camionnette blanche (« panel blanca ») aux vitres teintées et dans laquelle les victimes étaient introduites de force. Ce véhicule a été utilisé par les agents de l'État et a été reconnu par de nombreux témoins dans des cas de disparitions forcées pendant le conflit armé au Guatemala. Dans le cas présent en particulier, la "Guardia de Hacienda"1 a été identifiée comme l'institution ayant réalisé en grande majorité2 ces opérations d'enlèvement et les crimes qui s'en sont suivis. Les survivants racontent les tortures endurées dans les centres de détention clandestins, notamment dans les installations de la "Guardia de Hacienda". Les cadavres des victimes assassinées retrouvés dans les rues de la Capitale parlent d'eux-mêmes sur les souffrances endurées. La décision de la Cour interaméricaine des droits de l'Homme (la Cour) Dans un jugement sur le fond rendu le 8 mars 19983, la Cour a conclu que l’État guatémaltèque avait violé 6 articles de la Convention américaine relative aux droits de l'Homme, notamment le droit à la vie (art. 4), le droit à l’intégrité personnelle (art. 5), le droit à la liberté personnelle (art. 7) et la protection et garanties judiciaires (art. 25 et 8), ainsi que la Convention interaméricaine pour la prévention et la répression de la torture, et ce, en lien avec la détention arbitraire, la mort, les traitements inhumains, les tortures et les mutilations subis par les victimes. Dans un jugement sur les réparations rendu le 25 mai 2001 4 , la Cour a imposé à l’État guatémaltèque plusieurs obligations, notamment : Enquêter de manière sérieuse et efficace afin d'identifier, de juger et de sanctionner les responsables; Fournir les ressources nécessaires pour le transfert des restes et l'inhumation de l'une des victimes Pablo Corado Barrientos à sa famille; Adopter, conformément à l'article 2 de la Convention américaine relative aux droits de l'Homme, les mesures législatives, administratives, ou autres, nécessaires afin de garantir la certitude et la publicité du registre des détenus; Indemniser les familles des victimes pour les dommages matériels et moraux. 1 Corps de Police civile de l'État guatémaltèque ayant existé de 1954 à 1997. La CourIDH dans sa décision mentionne toutefois qu'il s'agit de la Guardia de Hacienda ou d'une autre institution militaire ou policière qui aurait commis les crimes de ce dossier. 3 http://www.corteidh.or.cr/docs/casos/articulos/seriec_37_esp.pdf 4 http://www.corteidh.or.cr/docs/casos/articulos/Seriec_76_esp.pdf 2 Fiche actualisée au 17/03/2017 ©Avocats sans frontières Canada, tous droits réservés. Et aujourd'hui? En 2007, l'État guatémaltèque a informé la Cour lors des audiences de supervision que le processus pénal à l'encontre de 27 suspects avait mené à un non-lieu des poursuites. Toutefois, en 2009, la décision a été renversée par un tribunal qui a ordonné l'ouverture de nouvelles poursuites pénales. Malgré cela, l'information remise par l'État en 2015 sur les avancées de l'enquête était peu concluante. En effet, seulement cinq témoignages ont été recueillis entre 2008 et 2013. De plus, l'État a informé que l'organisation du dossier, ainsi que le profilage des 27 suspects étaient toujours en cours. La Cour a constaté que l’impunité la plus totale règne encore 14 ans après l'émission de son jugement sur les réparations, et a sommé l’État guatémaltèque de démontrer sa diligence dans l’identification, le jugement et la sanction des responsables, ainsi que de détailler les mesures concrètes prises pour que le processus pénal continue son cheminement. Fiche actualisée au 17/03/2017 ©Avocats sans frontières Canada, tous droits réservés.