Le Carnet du Public – L`Encrier a disparu– Daniil

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Le Carnet du Public – L’Encrier a disparu– Daniil Haarms
Dossier pédagogique réalisé par Laurence Lissoir
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Le Carnet du Public – L’Encrier a disparu– Daniil Haarms
L’Encrier a disparu
Cabaret pétulant de Daniil Harms
Mise en scène : Bernard Cogniaux
Avec : Maroine Amimi, Cédric Cerbara, Grigory Collomb, Flavia
Papadaniel, Réal Siellez et Aurélie Trivillin.
Salle des Voûtes
Du 09/11/12 au 31/12/12
Une création et production du théâtre le Public.
Synopsis :
Six comédiens survoltés se parent d'humour noir, s'emparent d'un
univers singulier et partent combattre avec absurdité une réalité
oppressante. Leur chef d'orchestre, c'est Bernard Cogniaux (« Tout
au bord », «L'éthique du lombric »,...). Ensemble, ils donnent vie à
de courts textes et font apparaître un spectacle inattendu empli
d'images surprenantes. La liberté totale de la création et l'humour
déjanté, chers à Harms, se retrouvent pleinement dans ce spectacledynamite.
Harms et d'autres écrivains ont fondé le mouvement OBÉRIOU
œuvrant, comme le dadaïsme ou le surréalisme, à la recherche de
formes artistiques entièrement nouvelles et libérées des anciennes
conventions. Ce mouvement aux aspirations progressistes et
anticonformistes fut violemment réprimé par la montée du
stalinisme. Harms laisse une œuvre encore et toujours audacieuse,
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Le Carnet du Public – L’Encrier a disparu– Daniil Haarms
non conformiste, légère et libre, absolument! Un spectacle de bruits
et de fureur pour tous les fous de la vie.
I. Le metteur en scène : Bernard Cogniaux
Biographie courte :
Bernard Cogniaux est un acteur, auteur et metteur en scène belge. Il est également
professeur d'art dramatique au Conservatoire royal de Mons.
Il est un ancien membre de La Ligue d'Improvisation Belge Professionnelle (LIB) qui a foulé
la « patinoire » aux côtés d'autres noms médiatiques qui ont marqué La Ligue d’Impro :
Virginie Hocq, Gudule, Jean-Marc Cuvelier, Marie-Paule Kumps, Éric De Staercke, Laurence
Bibot, Patrick Ridremont, Olivier Leborgne…
Il forme, dans la vie comme au théâtre, un couple avec la comédienne belge Marie-Paule
Kumps.
Interview :
A travers leur parcours d'acteurs, auteurs, metteurs en scène, créateurs et de parents, voici
quelques considérations sur le travail théâtral, les collaborations artistiques, la vie et le temps
qui passe.
Le Public : On imagine fort bien que des interviews du couple Kumps - Cogniaux, il y a dû en
avoir des tas ?
Bernard Cogniaux : Oui, quelques-unes, et pas toujours à propos de théâtre. Pour la saint
Valentin par exemple. Nous avons aussi été invités à une émission sur le couple et la famille.
Marie-Paule Kumps : A un moment donné, pour une certaine presse populaire, nous étions
« le couple » un peu sympa. Mais pour ma part, je n'ai jamais eu peur des médias parce que le
théâtre existe depuis toujours et qu'il ne faut pas le laisser se faire dépasser. Alors, je trouve
que c'est chouette quand des journaux, style « Femmes d'aujourd'hui » ou « Ciné télé revue »
ont envie de parler d'acteurs de théâtre. Parfois, les comédiens n'ont pas envie qu'on parle
d'eux ailleurs que dans les pages culturelles, mais nous on se disait que ce ne serait peut-être
pas un article fidèle, mais qu'on allait parler de nous, acteurs de théâtre. Et les lecteurs
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pouvaient se dire : « Tiens, le théâtre ça n'a pas l'air d'être un si vieux truc que ça. Ce sont des
acteurs vivants qui racontent des histoires. C'est chouette ! On pourrait y aller ?»
Bernard : C'est vrai qu'il y a parfois ce paradoxe chez certains comédiens qui ne veulent pas
« se compromettre » dans ce type d'interview, mais qui d'autre part disent que les acteurs de
chez nous ne sont pas assez reconnus.
Le Public : Faisons un peu d'histoire. C'est à la Ligue d'improvisation que vous vous êtes
rencontrés « théâtralement » ?
Marie-Paule: Professionnellement, oui. Nous avons tout de suite travaillé ensemble la
première année, nous étions dans la même équipe. Qu'est-ce qu'on s'est amusé ! Et on s'est
installé ensemble deux ans après.
Le Public : Est-ce que ça veut dire que le coup de foudre à correspondu au coup de théâtre ?
Bernard: Ca a mis un peu de temps, on a fait d'abord connaissance.
Le Public : L'envie de faire des choses ensemble est venue rapidement, ou bien avez-vous eu
d'abord des carrières individuelles ?
Bernard : Nous étions chacun engagé là où on voulait bien nous engager comme acteur. et la
première fois que nous avons joué ensemble c'était dans « Noces ».
Marie-Paule: On jouait des amoureux en plus, un couple qui se mariait.
Bernard : A l'époque, je travaillais assez régulièrement au Rideau de Bruxelles. Jules-Henri
Marchant m'a proposé de faire un midi du Rideau. J'ai d'abord remis un projet de pièce écrite,
mais il m'a dit que l'idée était de mettre un comédien sur un plateau pendant une heure et de se
dire : « Voilà, et maintenant qu'est-ce qu'il fait ? » On voulait que ce soit un peu atypique. Je
me suis dit qu'on pourrait faire un truc inspiré de la Ligue d'impro où on avait tout un éventail
de façons de travailler pour développer l'imaginaire. Et j'ai demandé à Marie-Paule de faire ça
avec moi.
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Marie-Paule : Et tu as proposé à Jules-Henri de travailler avec moi. Il était tout à fait partant.
C'était après la naissance de Lisa ? Parce qu'à la reprise, j'étais enceinte d'Antoine.
Bernard : Oui, je me souviens que Lisa était tout bébé quand on travaillait là-dessus.
Marie-Paule : Et ça s'est appelé « Orage sur un dictionnaire ». Et moi, j'étais trop heureuse.
D'autant plus qu'on a eu une belle carte blanche. Alors, on chipotait, on cherchait. C'était tous
des sketches. On rêvait, on faisait des trucs avec des bouts de papiers, avec un piano, avec des
ombres... On a fait une chanson à quatre francs cinquante. C'était très, très amusant ! C'était
toutes des petites choses complètement fantaisistes. Ca à été notre première collaboration de
spectacle et d'écriture.
Le Public : Les idées, elles viennent d'où et comment ? Est-ce que c'est une envie commune
qui part d'une discussion autour de la table du petit déjeuner ?
Bernard : Ca change, je trouve. Parce qu'à l'époque, les idées venaient plutôt de : « Bon, on a
à faire un spectacle d'une heure. Qu'est-ce qu'on fait ? » Il y avait une espèce d'urgence. On
s'inspirait d'univers qu'on connaissait ou d'exercices qu'on avait faits. Le but, c'était
simplement de monter un spectacle. Il n'y avait pas une ambition autre. On n'avait pas un
projet qui devait raconter forcément quelque chose. C'était plutôt : « Qu'est-ce qu'on va
faire ? » Il n'y avait pas d'objectif.
Marie-Paule : Nous arrivions en répétition et l'un de nous disait : « Moi, j'ai préparé un peu la
répèt d'aujourd'hui et je propose ceci ». Et on cherchait autour d'une peinture, ou d'autre
chose. Et puis la fois d'après, c'était l'autre qui amenait une idée et qui dirigeait. On
fourmillait d'idées !
Bernard : Maintenant nous avons des projets qui sont devenus - et c'est naturel - plus
élaborés. Avec des désirs : « On voudrait parler de ça, Que ça raconte ça. Et même que ça se
passe comme ça. Que le ton soit celui-ci plutôt que celui-là. » Donc l'exigence devient plus
précise et en même temps plus étroite. Alors qu'avant nous partions d'une base plus large,
avec en tête : « Amusons-nous ! »
Marie-Paule : Mais dans « l'Ethique du lombric » quand même, on a retrouvé ce plaisir de
chercher, de chipoter. Avec les textes de Benni, nous avions de nouveau envie de raconter des
histoires, de faire du bricolage, de l'artisanat. Moi j'ai retrouvé le plaisir de chercher. « Tiens,
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oui des poupées ! Mais comment ? » « Regarde, si on faisait un pont ! » Bernard est allé à la
cave et il a trouvé des tuyaux qui faisaient un chouette bruit. « Qu'est-ce que tu fais ? »
« Ben, je fais du bruit avec des tuyaux. » Et on a intégré tout ça.
Bernard : On avait envie de faire des sons, de la musique avec des objets.
Marie-Paule : Bien entendu, nous étions nourris de toutes les histoires de Benni qu'on avait
choisies, mais avec le plaisir de chercher et découvrir. Bernard a eu pas mal d'idées, je trouve.
C'était gai de chipoter à nouveau. on avait moins pu le faire sur « Tout au bord » parce que
c'était une pièce qui raconte quelque chose de façon plus chronologique, même si on a essayé
d'être fantaisistes à d'autres égards dans cette pièce.
Bernard : Moi, il me semble que chaque projet qu'on a fait ensemble a un peu une histoire
différente. Nous n'avons pas de « méthode ». Par exemple, la dernière fois que nous avons
collaboré... on était à trois ! c'est Bernard Halut qui est venu nous chercher pour faire un
scénario de long métrage.
Marie-Paule : L'écriture d'un film, c'est notre dernière collaboration d'écriture en date. Ecrire
à trois, ça fonctionne encore différemment.
Bernard: Oui. par exemple, « Pour qui sont ces enfants qui hurlent sur nos têtes » qui, si on
veut, annonçait « Tout au bord », nous l'avions écrit d'une façon éclatée. Sur ce thème-là, on
a collé des séquences qu'on pouvait agencer de telle ou telle manière. Après, il a fallu réécrire
pour que ça tienne, que ça ait un sens. Par contre, dans « Tout au bord », on a trouvé un début
- après avoir beaucoup tâtonné - et puis, on a avancé sans savoir où on allait. On avait, c'est
vrai, les trois-quarts de la pièce, mais sans en connaître la fin. On avait des idées, mais on
n'avait pas la fin.
Marie-Paule : Un jour, Bernard à réécrit la première scène, et là tout à coup j'ai dit : « Ah !
j'adore ! Ca y est, c'est ça ! » On avait beaucoup écrit avant d'arriver à un début qui nous
satisfasse tous les deux. Et le fait d'avoir beaucoup écrit de choses - qui finalement filaient à
la poubelle - faisait malgré tout que nous étions nourris de plein de choses : des personnages,
d'une ambiance, d'un sens.
Bernard: Nous voulions écrire une narration qui soit linéaire - même s'il y a des ellipses - et
on ne savait pas où elle allait se terminer.
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Marie-Paule : Mais nous savions que nous avions envie de raconter la vie de gens qui sont en
perte de vitesse par rapport au monde. Ce n'était pas dit tel quel, mais on avait envie de parler
du monde d'aujourd'hui et de cette société qui parfois nous rend fous parce que ça va trop vite
et qu'on ne sait plus où est l'essentiel et où est l'accessoire. Pourquoi doit-on vivre et quelle
décision doit-on prendre ?
Le Public : Donc, au fil du temps, votre « non-méthode » a pourtant bien évolué ?
Marie-Paule: Il y a une chose que j'ai remarquée par rapport à notre évolution -comme tout le
monde je pense qui évolue dans son métier - c'est que ces dernières années, ce qui nous a pas
mal convenu c'est de travailler avec une tierce personne. Parce que, comme on l'a dit, avec le
temps on devient plus exigeant, qu'on cède moins sur ce qu'on veut, à quoi on tient. Alors un
regard autre peut beaucoup nous aider. « Tout au bord », nous l'avons montré assez vite à
Michel et Patricia et c'était très chouette parce que ça faisait un rebond de quelqu'un de
l'extérieur qui ne savait pas lequel de nous deux avait écrit quoi, qui avait corrigé l'autre. C'est
le regard extérieur en qui nous avions confiance. Ensuite Pietro Pizzuti est entré dans la danse
et avec lui nous avons revu toute la matière, corrigé, coupé, chipoté.
Bernard : Nous arrivions avec une pièce dont on savait qu'elle n'était pas faite, même si la
matière était là.
Marie-Paule : En tant qu'acteurs aussi on aime bien travailler avec un metteur en scène qui
écoute ce qu'à a dire l'un ou l'autre, qui apporte, qui tranche. Dans «l'Ethique », même si on
ne l'a pas écrit, c'était chouette d'avoir Sylvie De Braekeleer avec nous. Parce qu'on est quand
même un vieux couple d'acteurs qui se connaissent bien. Elle nous a écoutés et fait des
propositions qui partaient de nous deux.
Bernard : Et nous avons pu lui faire part des désirs qu'on avait au début, et elle a pu organiser
tout ça.
Marie-Paule: Ca rend les choses plus confortables pour nous, quand il y quelqu'un comme
Sylvie ou Pietro qui rebondissent sur ce que nous proposons..
Le Public : Vous avez malgré tout, l'un et l'autre, des projets personnels, des envies qui vous
sont propres ? Dans ces cas-là, comment ça se passe avec l'autre ? Est-ce qu'il est malgré tout
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impliqué, consulté ?
Bernard : J'ai des projets. Des choses que j'ai écrites, qui ne sont pas forcément montrables en
l'état. J'ai des envies. mais comme on ne peut pas mener dix projets de front, le temps
d'écriture, malheureusement, est la chose qui se met dans les trous. Et donc, il faut des
moments plus calmes - sans engagement en fait - pour pouvoir écrire. Ne pas travailler, pour
pouvoir travailler... Bref, pour répondre à la question, je crois que quand je pense avoir écrit
quelque chose de montrable, j'ai tendance à la montrer d'abord à Marie-Paule plutôt qu'à
d'autres personnes. Si c'est un projet personnel, j'attends d'y voir assez clair plutôt que de lui
proposer quelque chose qui soit tellement informe qu'elle n'ait rien à dire parce qu'elle ne s'y
retrouve plus.
Marie-Paule : Moi, je dirais qu'avec le temps, on a beaucoup évolué, dans notre relation
personnelle et dans notre relation au travail. Avant, j'avais plus tendance dès le départ à mettre
Bernard dans le bain de ce que je faisais. Maintenant, je le fais moins. J'ai fait des choses que
je ne lui ai pas montrées, des choses que j'ai écrites pour d'autres, Lorette Goose, Virginie
Hocq ou Laurence Bibot. Bernard n'est pas forcément impliqué, surtout dans les projets que je
mène avec d'autres personnes, d'autres équipes.
Bernard : Oui, ça rejoint ce que je disais au début. Avec le temps on est plus exigeant.
Chaque création étant une étape, on a envie à la suivante de ne pas se répéter et d'aller plus
loin.
Le Public : Il y a des domaines théâtraux ou artistiques que vous n'avez pas encore abordés et
que vous aimeriez explorer ?
Marie-Paule: Moi, j'aimerais travailler plus pour le cinéma. Quand nous avons écrit ce long
métrage avec Bernard Halut, c'était chouette de se retrouver à trois, et pas qu'à deux.
Bernard : Moi, j'aimerais bien faire la bande-son d'un spectacle. Mais les décors, par
exemple... j'aurais peut-être des idées, mais pour finaliser ça je ne crois pas que j'ai les
compétences nécessaires. Et pour les costumes...sûrement pas ! Une bande-son, oui, pourquoi
pas, ça m'amuserait ?
Le Public : En conclusion, il semble que vous ayez exploré toutes les pistes du travail en
tandem ?
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Le Carnet du Public – L’Encrier a disparu– Daniil Haarms
Bernard : La seule combinaison qui n'est pas encore arrivée, c'est que Marie-Paule écrive
seule un texte que je jouerai.
Marie-Paule: Pourtant j'ai déjà eu des idées...
Le Public : A vous entendre, on a l'impression que vous n'arrêtez jamais !?
Bernard : C'est-à-dire que, ou bien nous avons du travail qui nous est proposé, ou bien nous
n'en avons pas et on en profite pour écrire ou mettre en route et faire avancer des projets.
Marie-Paule : Oui, on est quand même des motivés, des enthousiastes. Et on fonce comme
des fous ! Comme quand on a fait « Saison one» pour Nathalie Uffner. J'avais envie de faire
un truc « feuilletonnant » et Bernard s'est mis dans le projet. On étant tout de suite partants.
Mais on était fous ! On a écrit une série !
Bernard : Quatre heures et demies de spectacle.
Marie-Paule : Trois spectacles de deux épisodes chacun. On était fous !
Activité de réécriture :
Demandez à vos étudiants de travailler en groupe de deux. Dans ce groupe, demandez-leur de
modifier cette interview en un texte informatif d’une cinquantaine de lignes.
II.
Avant la représentation : préparation des étudiants
II.1. Le théâtre
Origine :
Emprunté au mot latin theatrum, lui-même venu du grec theatron, le mot français désigne
aussi bine le bâtiment artistique que le genre artistique pratiqué à l’intérieur de ce dernier.
Evolution :
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Le XXe siècle a vu l’éclatement de ces deux instances : l’art classique du théâtre est influencé
par d’autres pratiques artistiques telles que le cirque, la magie, les marionnettes, les vidéos, le
cinéma, la photographie ou encore la peinture. Le théâtre est également sorti du lieu clos pour
se donner « hors des murs ».
Deux formes :
Le théâtre en dur. Cette expression s’emploie aujourd’hui, par opposition au chapiteau de
cirque, qui est en toile et qui est amovible, pour désigner un théâtre en pierres, un bâtiment.
Pour la mémoire, il est utile de préciser que le premier théâtre en pierres a été édifié au VI e
siècle ANC, à Athènes et qu’il fut nommé Théâtre de Dionysos Il servira de modèle aux
théâtres construits à sa suite.
Le théâtre en rond. Ce dernier n’est pas un terme d’architecture, mais évoque un concept du
théâtre en opposition au théâtre classique. Pour rompre avec la disposition frontale de la scène
dans le théâtre à l’italienne, certains scénographes ont prôné un théâtre où les spectateurs sont
installés autour de l’aire de jeu, comme dans un cirque. A cette seule différence que les
acteurs montent sur scène alors que les circassiens descendent dans la piste. Le théâtre en
rond n’est pas une invention du XX e siècle. Le Moyen Age le connaissait et selon les
ethnologues, spontanément lors de théâtre de rues, les spectateurs se plaçaient autour du
spectacle.
Au XVII e siècle et jusqu’au milieu du XVIII e, « théâtre » était synonyme de scène.
Le théâtre tel que nous le connaissons aujourd’hui, ne s’est mis en place qu’à partir du XVI e
siècle et semble être une particularité de la culture occidentale. Les mondes juif et arabe ne
connaissent pas d’équivalent du théâtre à l’italienne ni à la tragédie classique.
Il faut
cependant reconnaître au monde arabe, un théâtre d’ombres avec une vraie textualité.
Le théâtre : un art en lien
Les origines du théâtre restent pour une large part conjecturales à la philosophie et à l’histoire.
Il faut voir un rapprochement entre le rituel religieux et la pompe théâtrale.
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Au XVe siècle, en France, les mises en scène les plus spectaculaires étaient réservées aux
entrées royales et princières ainsi qu’aux banquets. Les chroniqueurs ont retenu l’entrée du roi
Louis XI, à Tours, en 1461, qui eut pour décorateur Jean Fouquet et le « Banquet du vœu du
faisan » qui témoignait du goût pour les machines.
En effet, des pâtés géants sortaient des musiciens ; des tourterelles roulantes donnaient asile à
toute une bande de ballerines et de bouffons ; des plats machinés jaillissaient un troubadour.
Avec leurs architectures et leurs accessoires éphémères, entrées royales et banquets n’étaient
pas du théâtre, mais des divertissements théâtralisés.
L’importance de la religion :
L’ébauche du théâtre se situe dans les rituels religieux. Dans la Grèce antique, les premières
formes théâtrales sont processionnelles et liées au culte de Dionysos. Le théâtre en dur est
d’ailleurs placé à portée de vue du temple, le lieu du culte.
Au Moyen Age, les miracles, les mystères et les passions sont joués dans les églises puis sur
les parvis pour finir dans les rues. Cette évolution de lieu montre que l’aspect profane prend le
pas sur le religieux et le théâtre peut dès lors réellement commencer. En effet, le premier
théâtre fixe est ouvert à Paris en 1403 par les Confrères de la Passion mais il faut attendre
1548 pour que le théâtre se professionnalise.
Avec l’arrivée des Italiens en 1570 à Paris sous l’impulsion de Henri III et de Catherine de
Médicis, contribue à l’expansion du théâtre.
En 1577, une femme est autorisée à jouer un rôle dans une pièce. Il s’agit de l’italienne
Isabella Andreini comme la première actrice et son rôle est celui de la première amoureuse.
Jusque là les rôles féminins étaient confiés à des comédiens masqués ou par des travestis.
Le décor :
Le décor, jusque-là unique, s’élabore en permettant des changements. C’est en 1596 à Nantes
que le décorateur va utiliser des périactes, principe de décor tournant, déjà connus des Grecs.
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Dès le début du XVIII e siècle, se produit une évolution vers un jeu naturaliste qui
s’épanouira à la fin du XIX e siècle. Les comédiennes vont oser se mettre à courir sur scène,
elles porteront des vêtements d’esclave, échevelées au lieu du costume traditionnel
L’éclairage électrique arrive en 1849 à l’Opéra et c’est encore à l’Opéra que le rideau tombera
la première fois entre les actes pour changer un praticable. En 1887, l’éclairage de la salle est
supprimé et laisse la place à un nouveau métier : le créateur Lumières.
Apothéose du théâtre au XIX e siècle qui va venir se ternir avec le XX e siècle et sa crise.
Travaillez les notions suivantes avec vos étudiants :
Pompe théâtrale :
Machines :
Bouffons :
Miracles :
Mystères :
Passions :
Périactes :
Praticable :
Elaborez ensuite une ligne du temps synthétique des grands éléments fondateurs du théâtre
contemporain.
Ecole du spectateur :
Généralités
Monstre de l’art, le théâtre concilie à la fois la littérature et le spectacle. Malgré cette richesse,
le théâtre reste un art que beaucoup d’élèves estiment poussiéreux par rapport aux nouveaux
médias qui les entourent : la télévision ou encore le cinéma.
Cependant, cet art de la
représentation montre les conventions du monde dans lesquelles évoluent avec des acteurs se
travestissant, se modifiant pour donner vie à des personnages grâce à un travail de voix et de
mise en place gestuelle. Cette illusion théâtrale est le fruit d’un long labeur qui demande la
participation d’une équipe visible : les acteurs, le dramaturge mais également des travailleurs
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Le Carnet du Public – L’Encrier a disparu– Daniil Haarms
de l’ombre : le metteur en scène, le costumier, le régisseur lumières, le scénographe, le
créateur lumière…
L’école du spectateur doit mettre en lumières tous ces métiers afin que étudiants soient
conscients du travail fourni et puissent le respecter lors de la représentation.
Conventions
Art de la représentation à part, le théâtre se dénote par rapport au cinéma et ou de la télévision
qui sont le quotidien de nos futurs amoureux du théâtre. Ainsi, à la différence du cinéma ou
de la télévision, la représentation est immédiate, il n’y a aucune barrière entre le public et les
spectateurs. C’est pourquoi, le spectateur en devenir doit être familiarisé avec ces
conventions : éteindre les téléphones portables, ne pas manger durant la représentation, ne pas
boire et surtout de garder ses judicieuses remarques pour la fin du spectacle. La pièce de
théâtre débute dès que les lumières sont interrompues ou encore lorsque qu’un ou plusieurs
comédiens arrivent sur la scène. Précédemment, c’étaient les trois coups frappés avec un
brigadier sur le plancher de la scène qui annonçaient le début de la représentation. Cette
dernière se termine lors de la sortie de tous les acteurs de la scène. En fonction des
applaudissements, les acteurs reviennent saluer le public et le travail de l’équipe technique
puis s’en vont en coulisses.
III. L’Encrier a disparu de Daniil Harms.
III.1. L’auteur : Daniil Harms( 1905-1942)
Daniil Harms ( 30 décembre 1905 - 2 février 1942) est un poète satiriste du début de l'ère
soviétique considéré comme un précurseur de l'absurde. De son vrai nom Daniil Ivanovitch
Iouvatchev, il choisit le pseudonyme de Harms pendant ses études secondaires. Il utilisa
également les pseudonymes de Horms, Charms, Chardam, etc.
Son œuvre est essentiellement constituée de courtes vignettes, ne faisant souvent que
quelques paragraphes, où alternent des scènes de pauvreté ou de privations, des scènes
fantastiques ressemblant parfois à des descriptions de rêves, et des scènes comiques. Dans ces
vignettes, des écrivains connus font parfois des apparitions incongrues.
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Le Carnet du Public – L’Encrier a disparu– Daniil Haarms
Le monde de Harms est imprévisible et désordonné, ses personnages répétant sans fin les
mêmes actions ou se comportant de façon irrationnelle, des histoires linéaires commençant à
se développer étant brutalement interrompues par des incidents qui les font rebondir dans des
directions totalement inattendues.
Le travail de Harms est plus profond qu'il n'y paraît et doit être replacé dans le contexte de
l'Oberiou (Association pour l'Art réel), un courant littéraire et philosophique du modernisme
russe dont il a été l'un des fondateurs.
Il fut accusé d'activités anti-soviétiques et exilé à Koursk en 1931. Il fut arrêté à nouveau
pendant le siège de Leningrad le 23 août 1941 et interné en asile psychatrique où il mourut, à
36 ans.
Considéré comme un ennemi du régime stalinien, Harms ne put publier de son vivant que
deux textes3: l'essentiel de son œuvre fut diffusée clandestinement. Il fut réhabilité en 1956,
mais longtemps, seules ses poésies pour enfants furent republiées en URSS, à partir de 19624.
Son œuvre est aujourd'hui appréciée en Russie. Elle a été traduite en français, allemand,
anglais, italien, polonais, tchèque, suédois.
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Le Carnet du Public – L’Encrier a disparu– Daniil Haarms
Activité de réécriture :
Travaillez avec vos étudiants l’activité résumante. Demandez-leur de ressortir les éléments
clés de la vie de Daniil Harms ainsi que les dates de ses grandes œuvres.
Activité de recherche :
Travaillez avec vos étudiants sur les grands moments de l’histoire de Russie. Développez les
grandes dates clefs et ce à quoi correspondent les dates où le mouvement Oberiou fut créé
ainsi que les dates de répression.
III.2. Le mouvement Oberiou
Définition générale :
L’Oberiou, OBeRIou ou OBERIOU (c'est-à-dire Association pour l'Art réel) est un
mouvement d'avant-garde de futuristes russes – écrivains, musiciens et artistes – qui a eu une
existence éphémère au cours des années 1920 et 1930.
Le groupe s'était formé dans le contexte de « l'intense centralisation de la culture soviétique »
et du déclin de la culture avant-gardiste de Leningrad, alors que les groupes « de gauche » se
trouvaient de plus en plus marginalisés.
Fondé en 1928 par Daniil Harms et Alexandre Vvedenski, l'Oberiou acquiert la notoriété par
ses manifestations artistiques provocantes, parmi lesquelles des acrobaties de cirque, des
lectures publiques de poèmes perçus comme absurdes, et des représentations théâtrales telles
que Elizabeth Bam, de Harms, qui préfigurait le Théâtre de l'absurde européen. Les
représentations avaient lieu aussi bien dans des auditoriums d'université, des foyers ou des
prisons, que dans des salles de spectacle.
Les actions du groupe sont tournées en dérision et qualifiées de « hooliganisme littéraire »
dans la presse de plus en plus conservatrice des années 1920. Elles font l'objet de
condamnations dans les années 1930, et beaucoup de ses membres sont arrêtés.
L'Oberiou, souvent qualifié de « dernière avant-garde soviétique », sera parfois contraint de se
réfugier dans le créneau de la littérature pour enfants (Vvedenski, Harms, Vladimirov etc).
Origines :
Le mouvement Oberiou, influencé à ses débuts par les futuristes (en particulier Khlebnikov)
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et par le postsymboliste Khodassevitch, rejette toutefois la tendance zaoum1 (hermétique,
absconse) dans le langage et l'art. Il commence à prendre forme dès 1925 sous le nom
officieux de Tchinari. La future association se concrétise en 1926 (Daniil Harms, Alexandre
Vvedenski, Nikolaï Zabolotski, Igor Bakhterev) lors de la naissance de l'« Aile gauche » qui
prend en 1927 le nom d’Académie des Classiques de gauche et enfin d'Oberiou. Elle
comprend, outre des poètes, des acteurs, des musiciens et des réalisateurs de films.
La première manifestation publique du mouvement, organisée par Vvedenski et intitulée Trois
heures de gauche a lieu le 24 janvier 1928 à la Maison de la Presse de Leningrad. Elle sera
ensuite évoquée de manière ironique dans le roman de Konstantin Vaguinov, Le Chant du
Bouc.
Élaboré collectivement, le manifeste de l'Oberiou aurait été finalisé par le poète Nikolaï
Zabolotski, aidé de Kharms.
Le peintre Kasimir Malevitch 2 abrita l'Oberiou dans son nouvel institut artistique, leur
permettant de répéter dans l'un des auditoriums. Il aurait déclaré aux jeunes oberioutes:
« Vous êtes de jeunes perturbateurs, et moi un vieux. Voyons ce que nous pouvons faire. » Il
fit don d'un de ses livres (Dieu ne se décourage pas) à Daniil Harms, membre fondateur du
mouvement, en y portant l'inscription “ Avance et arrête le progrès !”
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Le zaoum est un type de poésie des futuristes russes (notamment Vélimir Khlebnikov et Alexeï Kroutchenykh)
qui vise principalement l’organisation des sons pour eux-mêmes : tout le poème est tourné vers le côté phonique
du discours. Inventé par Kroutchenykh en 1913, le mot « zaoum » est composé du préfixe russe za- (au-delà) et
du nom oum (l'esprit) et peut se comprendre comme « trans-mental ». Le zaoum n'a ni règles grammaticales, ni
conventions sémantiques, ni normes de style. Il a été créé pour exprimer les émotions et les sensations
primordiales. Son universalité est basée sur l'idée que les sons précèdent les significations, et représentent un
élément naturel, donc universel, de la communication humaine1.
Plus récemment, le poète d'avant-garde Sergueï Birioukov a fondé une association de poètes appelée
l'« Académie de Zaoum » à Tambov. Parmi les pratiquants de Zaoum on trouve aussi Serge Segay et Rea
Nikonova. On peut signaler également que le cinéaste soviétique Dziga Vertov a été influencé notamment dans
son cinéma par ce mouvement poétique.
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Kazimir Severinovitch Malevitch né à Kiev ( 1879-1935) est un des premiers artistes abstraits du xxe siècle.
Peintre, dessinateur, sculpteur et théoricien, Malevitch fut le créateur d'un courant artistique qu'il dénomma
« suprématisme ».
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Carré blanc sur fond blanc de Malevitch.
Déclin et héritage
L'existence de l'Oberiou se termine en 1931, lorsque Vvedenski, Harms et Bakhterev sont
arrêtés et exilés pour raisons politiques. Par la suite, les anciens membres du groupe
continueront à maintenir des amitiés personnelles.
D'entre les participants au mouvement, seuls Zabolotski et Vaguinov auront la possibilité de
publier leurs œuvres dans les années 1920-30, si l'on excepte les nombreuses publications
destinées aux enfants. Le recueil oberioute collectif Le Bain d'Archimède ne sera pas publié
du vivant de ses auteurs.
Oleïnikov est fusillé en 1937, Harms et Vvedenski meurent en prison (1941-42), Lipavski et
Levine tombent au front pendant la Seconde Guerre mondiale. Pendant la guerre et en
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particulier le siège de Léningrad, de nombreuses œuvres et archives disparaissent. Ainsi ne
subsiste de l'œuvre de Iouri Vladimirov qu'un seul récit, Fizkoultournik ; des œuvres de
Levine ne nous sont parvenues que celles destinées aux enfants, son roman L'Origine de
Théocrite notamment ayant disparu, tout comme de nombreuses pièces de théâtre et des
ouvrages en prose de Vvedenski (dont le roman Assassins imbéciles, Убийцы вы дураки).
Une importante collection de manuscrits de Harms, conservés par sa femme, Marina Malitch,
a toutefois été sauvée de la destruction par Iakov Drouskine.
Jusqu'en 1956 et l'ère de « dégel » initiée par Khrouchtchev, il ne sera pas question d'évoquer
les œuvres des oberioutes. Font exception les poèmes de Zabolotski, qui après cinq ans de
camp renonce à ses premières orientations poétiques, et les pièces semi-officielles de
Bakhterev, lequel continue toutefois à écrire clandestinement des nouvelles et des poèmes
avant-gardistes. À partir de 1956, les poèmes pour enfants de Harms et Vvedenski comment à
être réédités en URSS, et leurs autres œuvres commencent à être diffusées à l'ouest, en grande
partie grâce à Mikhaïl Meïlakh et Vladimir Erlia.
En 1960, Lydia Tchoukovskaïa rappelle dans son ouvrage célèbre Dans le laboratoire du
rédacteur l'existence de l'Oberiou.
Depuis la perestroïka dans la seconde moitié des années 1980, les œuvres des oberioutes ont
commencé à être largement diffusées en URSS, et continuent à l'être en Russie.
Influence
Bien qu'éphémère, le mouvement Oberiou semble avoir influencé durablement la culture
russe. Ses idées et ses tendances artistiques se retrouvent, explicitement ou non, dès les
années 1960-70 dans les milieux artistiques non officiels. Depuis la fin des années 1980, une
sorte de ferveur s'est développée en Russie autour de ses écrivains longtemps oubliés.
L'Oberiou a été considéré comme une sorte de chaînon manquant entre l'avant-garde russe
historique et la nouvelle. Des poètes tels que Guenrikh Sapguir, Alexeï Khvostenko, Anri
Volokhonski, Lev Rubinstein, Dmitri Prigov, Timur Kibirov, Edouard Limonov étaient
certainement familiarisés avec les œuvres de l'Oberiou par le biais des samizdats qui
circulaient sous le manteau, et leurs écrits reflètent cette connaissance, quoique de différentes
façons. Le poète Oleg Grigoriev (1943-1992) est également considéré comme se situant dans
la lignée de l'Oberiou.
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Le groupe musical d'avant-garde N.O.M. emprunte largement à l'Oberiou, mentionnant
Kharms et Oleïnikov parmi ses influences poétiques ; les morceaux de son album intitulé Un
album d'art réel y font référence. Le musicien punk rock Egor Letov a également mentionné
Vvedenski comme source d'inspiration pour ses textes.
Citations
« La poésie n'est pas de la semoule, qu'on avale sans mâcher et qu'on oublie aussitôt ».
Histoire littéraire :
Le movement Obériou a de nombreuses similitudes avec le movement de l’absurde instigué
par Beckett, Ionesco, etc. Travaillez avec vos étudiants le contexte ayant amené ces artistes à
porter un tel choix. Quelles sont les ressemblances et les differences ?
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Analyse du texte L’Encrier a disparu
Nouvelle Un morceau
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Questions :
Après la lecture de cette nouvelle, quels sont les éléments qui viennent perturber le lecteur ?
En quoi cette nouvelle se distingue t-elle des nouvelles traditionnelles de Balzac ou de
Maupassant ?
Retour théorique sur la construction de la nouvelle :
Selon le Littré, une nouvelle est une « sorte de roman très court », un « récit d’aventures
intéressantes ou amusantes ». Malgré cette définition, il apparaît qu’il ne faut pas tenir compte
forcément de la longueur du texte pour décider si celui-ci est un roman ou une nouvelle. Cela
dit, la nouvelle est généralement un récit court et cette brièveté permet d’intensifier l’effet
produit par le texte.
À la différence de la fable, il n’y a ordinairement pas de morale dans la
nouvelle ; il n’y a donc pas de conclusion, d’enseignement à tirer du texte.
En général, le
récit est centré autour d’un seul événement (fait ponctuel, parfois futile). Les personnages
sont peu nombreux et sont pourvus d’une réalité psychologique, bien que celle-si soit moins
développée que dans un roman.
Quelques questions à se poser pour étudier une nouvelle (ou un extrait) :
• Les mouvements du texte : comment l’écriture et les personnages évoluent-ils ? Y a-t-il un
événement perturbateur ? Quel est-il ?
• Les problématiques de l’écriture : en sait-on autant que le narrateur ? L’auteur paraît-il du
côté des personnages ? Le cas échéant : peut-on déceler une intention d’auteur ?
S’il s’agit d’un extrait :
• Au début d’une nouvelle : à quoi certains éléments placés au début de la nouvelle serventils pour la suite du texte ?
• À la fin d’une nouvelle : y a-t-il résolution des tensions ?
Peut-on observer un élément qui paraît extérieur à la nouvelle (par exemple : un passage
descriptif) ? À quoi cette « pause » sert-elle ? S’agit-il de préparer le lecteur à une nouvelle
tension ?
Faites appliquer ces règles à la nouvelle de Daniil Harms et voyez en quoi la nouvelle
correspond (ou ne correspond pas) au canevas littéraire classique.
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Activité de réécriture :
Demandez à vos étudiants de réécrire cette nouvelle afin de la rendre totalement classique.
Confrontez les textes. Passez ensuite à la lecture d’une nouvelle classique comme Boule de
Suif de Maupassant.
Terminer votre survol de l’œuvre de Daniil Harms par ces petits paragraphes relevant bien le
genre de l’Obériou.
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IV. Après le spectacle
Brainstorming : Quels sont les mots qui viennent à l’esprit de vos élèves après la
représentation ?
Reclassez par thèmes et interrogez vos élèves par rapport à ces derniers.
Interrogez-les sur leur ressenti vis-à-vis du jeu des acteurs. Ont-ils trouvé cela juste, exagéré?
Activité 1 : Faites-les dès lors travailler une courte scène par un groupe de 2 ou 3 personnes.
Filmez-les et analysez ensuite leurs gestes, leurs problèmes d’énonciation, les mots parasites
mais également les bons jeux de regards, les bonnes intonations, etc. Quelles sont les
différences par rapport aux acteurs professionnels? Amenez par cette expérience, le travail du
corps (gestuel, langage non-verbal), le placement de la voix. Une fois que vous avez balisé
ces notions, reprenez la même scène avec un autre groupe que vous filmez à nouveau.
Comparez.
Activité 2 : Production écrite : réécriture.
Vous devez établir une critique par rapport à cette pièce. Demandez à vos élèves de fournir
une critique d’une page et demi dans un style journalistique.
N’hésitez pas à leur montrer les pages critiques de différents journaux pour qu’ils
s’imprègnent du style.
Activité 3 : Production écrite : Faites disserter vos élèves sur la nécessité de l’art en période
de répression.
Activité 4 : Travail sur le décor et la mise en scène.
Décrivez le décor.
Déterminez en quoi le décor était un support pour le texte et argumentez.
Pour continuer le débat :
En Russie et bien ailleurs, des milliers d’artistes et intellectuels sont morts pour leur opinion,
quelle est aujourd’hui la place de la liberté d’expression, de l’art revendicateur ? Afin
d’enrichir le débat, faites travailler vos élèves sur une figure artistique ou intellectuelle
brimée.
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