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Philippe Sergeant
Nietzsche
De l’humour à l’éternel retour
Les Essais
Éditions de la Différence
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En hommage à Joaquim.
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Qui sait combien de générations devront passer
avant de produire quelques hommes qui sympathiseront
dans toute sa profondeur avec ce que j’ai fait ! Et même
alors je frémis à la pensée de tout l’injuste et l’inadéquat
qui un jour ou l’autre se réclamera de mon autorité.
Lettre de Nietzsche à Malwida von
Meysenburg, juin 1884.
Que c’est curieux ! Voici quatre semaines que je
comprends enfin mes propres ouvrages.
Lettre de Nietzsche à Gast, décembre 1888.
Le nom honorable de la médiocrité, c’est, on le
sait, ce mot : libéralisme.
La Volonté de puissance (1888).
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Vois ce portique, Ô nain, repris-je. Il a deux faces. Deux
voies ici se joignent, que ne suivit personne jusqu’au bout.
Cette longue voie derrière dure une éternité. Et cette longue
voie devant est une seconde éternité. Elles se contredisent,
ces voies, se heurtent de plein front : – et c’est ici, sous ce
portique, qu’elles se joignent. Le nom de ce portique est làhaut inscrit : « Instant ! » –
Mais suivra-t-on plus loin l’une des deux – et toujours
davantage et plus loin toujours, crois-tu, Ô nain, qu’éternellement ces voies se contredisent ? – « Toujours menteuse
est ligne droite, chuchota dédaigneusement le nain. Courbe
est toute vérité ; le temps même est un cercle. »
« Esprit de pesanteur, dis-je irrité, ne te fais trop légère
la tâche ! Sinon je te laisse croupir, pied-bot, là où tu t’es
accroupi, – et haut je t’ai porté ! Vois, dis-je, cet instant !
De ce portique Instant court en arrière une longue, une éternelle voie ; derrière nous s’étend une éternité. De toutes
choses ne faut-il point que ce qui peut courir ait une fois
déjà sur cette voie couru ? De toutes choses ne faut-il point
que tout ce qui peut advenir une fois déjà soit advenu, ait
1. « Tu récoltas le dégoût comme ton unique vérité. Aucune
parole en toi n’est authentique, sinon ta bouche même, je veux dire
ce dégoût qui te colle à la bouche » (L’illusionniste, in Ainsi parlait
Zarathoustra, textes et variantes établis par Giorgio Colli et Mazzino
Montinari, traduit de l’allemand par Maurice de Gandillac, « Folio
essais », 1971, p. 330.
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été fait, se soit passé ? Et si toute chose déjà eut existence,
que penses-tu, Ô nain, de cet Instant ? Ne faut-il donc que
ce portail aussi, une fois déjà, ait existé ? Et ne sont toutes
choses si fermement nouées que vers lui cet instant entraîne
toute chose à venir ? Par conséquent – lui-même encore ?
Car ce qui peut de toutes choses courir, aussi sur cette longue voie devant nous – il faut qu’une fois encore tout cela
coure ! – Et cette lente araignée, au clair de lune rampant, et
ce clair de lune même, et toi et moi sous ce portique ensemble de choses éternelles chuchotant – ne faut-il que déjà nous
ayons tous existé ? – et revenions, et sur cette autre voie
cheminions, là-bas devant nous, sur cette longue triste voie
– ne faut-il qu’éternellement nous revenions ? »
Ainsi je parlai, et de plus en plus bas, car de mes propres pensées j’avais effroi, et de mes arrière-pensées (Ainsi
parlait Zarathoustra).
Ce n’est pas l’horloge biologique qui nous fait
mûrir, ni l’histoire, ni l’expérience psychologique,
selon Nietzsche, mais l’étude2. Ici, l’étude d’un conte
extraordinaire qu’on a appelé depuis Platon le Bien,
c’est-à-dire l’étude de ce qui rend apte à quelque
chose, et qui règle peu ou prou, à des âges différents, dans l’histoire de la civilisation, nos comportements. On ne doit pas entendre le Bien dans un
sens moral. Quoique par vagues et épisodes successifs, l’idée du Bien ait pris la tournure de ce que
Nietzsche a dénoncé comme penchant normopathe
à la moraline. Chercher ce qui est tenu pour vrai,
c’est vouloir donner une valeur à la vie. C’est cela
mûrir. « Une seule conception peut être vraie ; vraie,
2. « Ainsi je suis au milieu de mon ouvrage, allant vers mes
enfants et revenant de chez eux ; pour ses enfants, il faut que Zarathoustra lui-même se veuille d’abord parfaire » (De la béatitude
malgré soi, in Ainsi parlait Zarathoustra, p. 216).
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c’est-à-dire propre à élever le type de l’homme3… »
A contrario, l’absence de valeurs condamne à l’extinction du sens, au renoncement du plaisir à penser.
Tantôt Nietzsche parle ; son Grand Œuvre se signe :
Ainsi parlait Zarathoustra. L’élément de la parole
est l’air, le bien suprême. Tantôt Nietzsche se tait,
se terre, retourne à la terre. Cette terre, dit-il, qui est
atteinte par une maladie de peau ; l’homme qu’il faut
dépasser. Tantôt le feu passe entre la parole et le silence. L’élément feu, sous forme d’aphorismes, purifie la pensée de l’éternel retour. Mais alors, le chant
de Zarathoustra ne s’élève pas sans revenir de
l’épreuve de l’abîme. Tout s’érige paradoxalement
sur un effondrement4 : la mer expose le voyageur aux
plus grands périls, comme aux plus grands exploits5.
Réfléchir dans le flux et le reflux, dans le sac et le
ressac du divers, du démembré, sans chercher un
3. Nietzsche, La Volonté de puissance, vol. II, Gallimard, 1995,
p. 154.
4. « Mais moi, je vous dis : il faut encore porter le Chaos dans
son sein pour engendrer un astre dansant. Et je vous le dis : vous
portez encore le Chaos dans votre sein » (Ainsi parlait Zarathoustra,
prologue). Et aussi, dans La sangsue, p. 323, la rencontre ironique
de Zarathoustra avec le scrupuleux de l’esprit qui s’exclame : « Plutôt ne rien savoir que beaucoup savoir à demi ! Plutôt bouffon à sa
propre manière que sage au gré des autres ! – Moi, je vais au fondement. » Toute l’entreprise nietzschéenne est une critique et un drame
satirique de l’idée de fondement.
5. « Une mer pleine de multicolores poissons et crustacés, de
laquelle même des dieux voudraient avoir envie pour s’y faire pêcheurs et y jeter filet : si riche est le monde en merveilleux, grand
et petit ! Singulièrement le monde humain, l’humaine mer – en
laquelle à présent je jette ma ligne d’or, et dis : Ouvre-toi abîme
humain ! Ouvre-toi et me lance tes poissons et tes scintillants crustacés ! De mon meilleur appât je m’appâte aujourd’hui les plus
merveilleux poissons-hommes ! » (Le sacrifice du miel, in Ainsi
parlait Zarathoustra, p. 309).
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point d’appui sur les repères ordinaux et cardinaux
de la conscience, tel est le mouvement augural de la
philosophie nietzschéenne :
D’où viennent les plus hautes montagnes ? Un jour, je l’ai
demandé. Et lors, j’appris que de la mer elles tirent origine. Ce
témoignage est sur leur roche écrit et sur les parois de leurs
cimes. Du plus profond il faut que le plus haut à sa propre
hauteur s’élève6.
Eau, Air, terre, feu sont les éléments du Bien
nietzschéen, de ce qui rend apte à quelque chose, de ce
qui cultive, élève. La phusis est la véritable culture.
Elle prépare au Gai Savoir, à un devenir-enfant. Ce
devenir-enfant force à grandir par un processus de
sélection et de dressage que la phusis met en place
comme autant de puissances à cultiver : l’homme doit
se surpasser, tel est le diagnostic du médecin de la
civilisation et le Bien suprême. Il doit devenir enfant
et en finir avec le vieil homme bariolé de toutes les
croyances. Il y a un naturalisme dans la pensée nietzschéenne qui rend la culture apte à quelque chose.
Dresser ? Le mot fait peur. Mais on dresse une table
pour inviter un hôte. Acte d’hospitalité comme philosophie première afin d’éviter la dévoration, le chaos.
Sélectionner ? Cela choque. On pense à l’élitisme
alors qu’il s’agit d’une question de tact. On ne vit pas
avec n’importe qui. Acte de philosophie réfléchie,
spéculaire, qui repose sur la rencontre. C’est cela
mûrir. Mais pour parvenir à cette maturité, la philosophie a eu ce curieux privilège de renvoyer la pensée indéfiniment à elle-même. Solitude du penseur à
la manière de l’astrophysicien. Si la pensée s’éteint
6. Le voyageur, in Ainsi parlait Zarathoustra, p. 207.
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comme une étoile dès lors qu’elle lui parvient, c’est
encore elle qui doit en témoigner dans les yeux de
son observateur, dans une sorte de soliloque qui délire sur le monde. La philosophie, c’est l’effort éprouvant de la pensée réfléchissant sur elle-même.
Nietzsche s’est intéressé à cette lumière qui ne cesse
de s’éteindre en nous, qui ne peut que déclencher le
rire des dieux et soliloquer sur l’air, la terre, le feu
et la mer. C’est en riant, donc, que les dieux, nous
dressant et nous sélectionnant pour cet effort éprouvant, nous ont fait mûrir. La Vérité eût-elle à en pâtir.
À ce rire divin, répond un écho : l’humour. Tant que
l’humour est humain, trop humain, nous ne sommes
pas à la hauteur des événements qui nous arrivent.
L’alcyon était un oiseau fabuleux qui passait pour
ne faire son nid que sur une mer calme, présage des
jours heureux. Nietzsche demande de nidifier à hauteur alcyonienne de la vie. À cette hauteur, et seulement à cette hauteur, nidifier signifie le sens de
l’éternité. C’est une philosophie alcyonienne qui se
retourne contre le conte redoutablement éperdu de
la Vérité.
Heidegger et Deleuze n’ont pas seulement donné
deux interprétations magistralement différentes de
l’éternel retour nietzschéen. Le premier faisant de
Nietzsche le plus grand et le dernier penseur de la métaphysique. Le second, voyant dans le nietzschéisme
une philosophie qui remplace la métaphysique par un
autre mode de pensée et de sensibilité. Ils ont surtout
donné de la conception de l’éternel retour une valeur
projective qui interroge nos modalités d’existence depuis l’effondrement de Nietzsche. Ils ont fait de l’éternel retour le problème majeur à réfléchir dans une
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perspective philosophique selon laquelle, de nos actes cognitifs actuels, il se pourrait bien qu’une sélection s’opère et que les plus assurés ou les mieux établis
d’entre eux ne reviennent pas dans nos devenirs, tout
au moins sous la même forme. Et c’est encore une
question de dressage : nos devenirs ne se disent pas
de nous-mêmes, mais de rapports de forces qui nous
changent. Ce faisant, Heidegger et Deleuze nous ont
confrontés au doute nietzschéen, dans son ampleur,
dans sa résonance : le dégoût. De nos actes cognitifs,
il se pourrait bien aussi que les plus abâtardis par la
morale, la religion, la libre pensée, l’idéologie démocratique et socialiste, triomphent de nos actes
alcyoniens. L’alcyon ouvre large ses ailes : à chaque
coup d’ailes, il est midi, il est minuit pour le retour
éternel de toute une vie, qui ne se confond jamais avec
son salut. Seulement Heidegger a interprété l’éternel
retour à partir d’un concept central et très curieux qui
déforme a priori la relation nietzschéenne de l’être au
devenir : le Dasein. Le Dasein est ce par quoi tout
acte de nidification est voué à l’être-jeté-au-monde.
Le grand oiseau tombe du nid. Tandis que Deleuze,
déploie les ailes d’un concept mouvant : le concept
de Déterritorialisation qui chasse celui du Dasein
comme un nuage assombrissant la pensée nietzschéenne. Nous exposerons ce différend, à titre probatoire, en parcourant les lignes du temps sur lesquelles
Nietzsche danse, rit et joue. Notamment, en cernant
une première fois le problème nietzschéen que pose
l’agencement de ces temps, problème qui est celui du
passage à la limite réfracté dans toute son œuvre. Nous
essaierons de montrer que les limites, c’est-à-dire, les
nouvelles catégories de l’esprit, selon Nietzsche, sont
celles de la danse, du rire et du jeu et que l’humour en
constitue le tremblé, le tracé du devenir.
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Mais, des deux interrogations, des deux enjeux que
nous ne pourrons explorer plus profondément qu’à la
fin de cet essai, des deux constats tragiques, l’un de
Heidegger, l’autre de Deleuze, nous ne proposerons
pour écho, que de suivre Nietzsche dans son effort d’humoriste, pour capturer précisément ce tremblé du devenir. L’éternel retour repose sur un principe aussi
rigoureux que l’impératif kantien à ceci près que l’humour s’est substitué à la morale et devient le moteur
par lequel la pensée affirme sa différence au lieu de
rechercher son identité. L’humour n’est pas une disposition psychologique, mais, une puissance, une force,
un potentiel orientés et affectés, dès l’essor de la pensée,
par tout ce qui la déstabilise, la rend étrange à elle-même.
C’est l’art d’affirmer le différencié et de jouir de son
éternel retour. Pour ceux qui se réclament du principe
d’identité, au contraire, chaque événement, au lieu de
participer de la plasticité du divers, ne renvoie qu’à
une unité ou à une loi que l’on croit découvrir sous lui.
L’humour est l’antidote de l’absurde, comme le rayonnement du hasard qui met le plus grand désordre dans
nos prédictions. Même la mort de Dieu est à prendre
avec beaucoup de légèreté. Mais il faut dépasser un
cap et ce cap a été observé au moins de deux manières.
Il n’est pas dit pour autant qu’il ait été franchi :
Par Heidegger :
Si tout revient au même, toute décision et tout effort, et
toute volonté d’essor se révèlent indifférents ; si tout tourne
dans un cercle, rien ne vaut la peine d’être seulement tenté ; il
ne résulte de cette doctrine que lassitude, que dégoût, et finalement la négation même de la vie7.
7. Martin Heidegger, Nietzsche, vol. 1, traduit par Pierre Klossowski, Gallimard, 1971, p. 243.
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Par Deleuze :
Plus tard, Zarathoustra lui-même explique la vision : « Le
grand dégoût de l’homme, c’est là ce qui m’a étouffé et qui
m’était entré dans le gosier… Il reviendra éternellement,
l’homme dont tu es fatigué, l’homme petit… Hélas ! l’homme
reviendra éternellement… Et l’éternel retour, même du plus
petit – c’était la cause de ma lassitude de toute l’existence !
Hélas ! dégoût, dégoût, dégoût ! » L’éternel retour de l’homme
petit, mesquin, réactif ne fait pas seulement de la pensée de
l’éternel retour quelque chose d’insupportable ; il fait de l’éternel retour lui-même quelque chose d’impossible8…
Pour franchir le cap, Nietzsche nous a appris que
l’humour est le seul mystère de la pensée.
8. Gilles Deleuze, Nietzsche et la philosophie, PUF, 1994
(9e éd.), p. 73, 74.
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DU MÊME AUTEUR
AUX ÉDITIONS DE LA DIFFÉRENCE
Alain Jouffroy, l’instant et les mots, essai, 1987.
La Victoire de Tancrède, théâtre, 1989.
Donald Sultan, appoggiatures, essai, 1989 (traduit et publié
aux États-Unis en 1991, Ed. Jancovici).
Gérard de Nerval, la mort d’Andros, coll. « Les Essais », 2006.
Kim, essai, 2008.
Deleuze, Derrida – Du danger de penser, coll. « Les Essais »,
2009.
CHEZ D’AUTRES ÉDITEURS
L’Ombre dans la fontaine, récit, illustration Hervé Télémaque,
Christian Bourgois, 1979.
Cent pages imaginaires d’un conte réel, Christian Bourgois, 1980.
Erró ou le langage infini, essai, Christian Bourgois, 1980.
Le Présent, récit, illustration Marcel Dhoye, Pierre Bordas &
fils, 1981.
Promenade ou une enfance de Sophocle, récit, illustration Joël
Capella, J.-M. Ponty, Limoges, 1986.
Chemins de la lenteur, récit, illustration Pierre Gaste, ACAPA,
Angoulême, 1986.
Dostoïevski, la vie vivante, essai, L’Harmattan, 1994.
Passagers clandestins, essai, illustration Nathalie Anton,
L’Harmattan, 2004.
Désabri, suivi de Pulchinella, poèmes, dessins de Jeanne Gatard,
Éditions Voix Richard Meier, 1995.
Maurice Matieu, de l’insoumission, essai, Actes Sud, 1995.
Pensées perdues, poèmes, dessins de Nathalie Anton, Provare,
1998.
Idées clandestines, essai, illustration Nathalie Anton, Provare,
2000.
Maurice Matieu, Sous X, avec Barbara Cassin, Actes Sud, 2003.
Du principe espérance à l’éternel retour, essai, L’Harmattan,
2006.
Sérieux s’abstenir, poèmes, collages de Philippe Amrouche,
Émérance (à paraître).
© SNELA La Différence, 30 rue Ramponeau, 75020 Paris, 2010.
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