Biodiversité et modèles expérimentaux animaux Gilles BOEUF Laboratoire Arago, UPMC/CNRS, Banyuls-sur-mer Muséum national d’Histoire naturelle, Paris Les Cordeliers, janvier 2010 Paris, 12 janvier 2010 © Santo, 2006 2010, l’année de la biodiversité ? Gilles Boeuf, Laboratoire Arago, Université Pierre et Marie Curie/CNRS Banyuls-sur-mer Muséum national d’Histoire naturelle, Paris Paris, ENS, 12 février 2009 Qu’est-ce que la Biodiversité ? Interprétation différente selon les groupes sociaux en présence : systématiciens, agronomes, industriels, économistes, philosophes, politiques, grand public… Ce n’est surtout pas que la diversité spécifique, c’est aussi l’information génétique contenue dans chaque unité élémentaire de diversité, un individu, une espèce, une population, un écosystème et l’ensemble de toutes les relations entre eux… Terme créé au milieu des années 80 (WG Rosen, 1985), contraction de « diversité biologique », (1) mécanismes biologiques de genèse de la diversité naturelle, (2) écologie fonctionnelle, biocomplexité, biogéochimie, (3) nature « utile » pour les ressources génétiques, alimentaires, cosmétiques, pharmacologiques, sondes et modèles… (4) stratégies de conservation pour préserver le patrimoine naturel attendu par les générations futures. C Lévêque et J C Mounolou, 2001, J Blondel, 2005 ; G Boeuf, 2008 ; CSPNB, 2009 D’un point de vue opérationnel, la biodiversité c’est : Une priorité scientifique (comprendre sa genèse, ses fonctions et enrayer son érosion) Un enjeu économique (ressources biologiques et génétiques à valoriser et partager) Un enjeu éthique (droit à la vie des espèces) Un enjeu social (partage des valeurs et des avantages) (termes de la CDB) J Blondel, 2007 Ce concept associe étroitement les sciences de la nature et celles de l’homme et de la société La planète bleue • La terre est recouverte à plus de 70 % par les mers et océans : la planète bleue • La vie est apparue dans « l’océan primitif » • Les caractéristiques de l’eau (salée) sont bien spécifiques • 14 phyla (sur 35) marins, 13 % des sp connues, mais 10 % de la biomasse carbonée pour les seules bactéries de la mer ! 275 000 espèces décrites dont 93 000 pour les seuls récifs coralliens Puis s’y sont produits des événements déterminants pour le futur du vivant : l’apparition du noyau, la capture d’organismes qui deviendront des organites par symbiose et la « pluricellularité » (métazoaires). Ce sera aussi l’apparition de la sexualité. 850 MA 2,7 Md A 2 Md A Procaryotes-Eucaryotes vers 2 Md A, Organites, 1900 (M) et 1400 (Pl) Protozoaires-métazoaires vers 1 Md A, 65,5 215, 75 % EM + T 245, 95 % The largest mass extinction occurred at the end of Permian (ca. 250 million years ago) It was caused by asteroid impact, intense volcanic activity, atmospheric warming (6°C) and methane emission from oceanic gases hydrate deposits. Ca. 95% of species died off in less than 4 million years. One hundred million years were needed to bring back biodiversity to its previous level. Benton & Twitchett, 2003 Gaston & Spicer 1998. 365, 75 EM La 6ème grande extinction ? 440, 85 % Lévêque et Mounolou, 2001 Dubois, 2004 Evolution de la population humaine D’environ 5 millions d’humains au moment de la sédentarisation vers 8 000 av JC à 6,4 milliards aujourd’hui et 9 en 2040 ! Period Age (Myr) Event Pliocene 5.3-1.7 Earliest humans Paleocene 66-58 Radiation of mammals and birds, flowering plants, pollinatinginsects Cretaceous-Paleocene 66 Fifth great crisis: extinction of dinosaurs Triassic 245-208 First dinosaurs, first mammals Permian-Triassic 245 Third great crisisof extinction Carboniferous 360-300 Radiation of land life Devonian 408-360 First amphibians Silurian 438-408 First arthropodson lands Ordovician 489-438 First land plants Precambrian 550 Precambrian radiation in the sea 800 First cyanobacteria on lands 1 800 , 1 200 Cell organelles (mitochondria, plastids) 2 000 Cell nucleus, eukaryotic life 3 200-2 500 Release of O2 from the ancestral ocean 3900 Emergence of life, only prokaryotic life 4 600 Age of the Earth Boeuf, 2010 © J Lecomte, OOBanyuls Le mythe du « bon sauvage » L’homme moderne ne fait, en fait, que prolonger (et amplifier !) un processus d’érosion de la biodiversité, engagé il y a fort longtemps par nos lointains ancêtres, 1 000 à 2 000 sp d’oiseaux disparus dans les îles du Pacifique depuis la colonisation par l’homme ; en Nouvelle Zélande, survie de tous les oiseaux au changement de climat du pléistocène puis 1/3 disparus après l’arrivée des Maoris vers 800 ap JC, Avec l’arrivée de l’homme, toutes les grandes espèces disparaissent : 100 % des mammifères > 1 t, 75 % des 100 kg/1 t (sauf en Afrique), tous les > 100 kg en Australie, 22 des 38 entre 10 et 100, 86 % à 46 000 ans ; en Amérique du N, 75 % de la mégafaune détruite (12 000 ans), 80 % des grands mammifères en Am. du S (11 000 ans), 50 genres en Afrique il y a 40 000 ans ! Probablement rôle conjoint des changements climatiques de la fin du quaternaire, glaciations/réchauffements tous les 10 000 ans ; chasse, défrichement par le feu, introduction d’animaux domestiqués, épidémies induites… Arrivée Disparitions des grands mammifères oiseaux de l’homme 15 000 ans 75 % des espèces initiales à partir de12 000 ans Amérique du Sud 14 000 ans 80 % des grands mammifères depuis 11 000 ans Australie 55 000 ans 86 % vers 46 000 ans Nouvelle Zélande 800 ans ap JC 33 % oiseaux en 1200 ans Europe Disparitions massives vers 10-12 000 ans Afrique origines 50 genres de grands mammifères à 40 000 ans Madagascar 2 000 ans Lémuriens, oiseaux… Grnde faune AM N Amérique du Nord Ottawa, 1999 Evolution de la pensée En moins d’un siècle, notre perception du monde vivant a bien changé : dans une société rurale en Europe et dans les « colonies », l’important était de survivre fin XIXème. Prédateurs et ravageurs de cultures étaient nombreux et les récoltes incertaines. Nature et animaux étaient hostiles : espèces « utiles » et « nuisibles » dans tous les manuels scolaires ! Manuel scolaire, 1930 : «…presque tous les insectes sont nuisibles, il faut leur faire une guerre acharnée… » ! Disparition en 1963 « Le chasseur français », 1924 : « … les rapaces, des brigands ! Tous ces oiseaux-là sont des brigands et brigands et demi. Il suffit qu’ils soient un peu nuisibles pour que je les supprime… » Les comportements se modifient après la seconde guerre mondiale, c’est l’invention de puissants insecticides (DDT), urbanisation, industrialisation, éloignement des campagnes, « révolution verte », agriculture intensive à hauts rendements, basée sur les semences avec engrais, pesticides et insecticides. Apparition de la science écologique et de l’écologisme politique, sur une situation loin d’être idyllique au début des années 60. Comment naissent les espèces ? Remplacement d’une espèce par une autre, l’anagenèse, accumulation de transformations génétiques adaptatives au cours du temps, continuité évolutive de la Vie, Spéciation par cladogenèse, apparition de une ou plusieurs espèces à partir d’une initiale par isolats, diversification du vivant. Spéciation allopatrique et sympatrique, Gradualisme et équilibres ponctués, Radiation adaptative, pinsons de Darwin, Cichlidés des lacs, Drépanididés de Hawaï… Mutations, sélections, dérive génétique : quel est le rôle de l’homme à ces niveaux ? Bradypus Tamandua Dasipus Euphractus Delsuc et al. 2004 Comment mesurer la diversité biologique ? Comptage des espèces, L’écologie moléculaire (petite sous-unité 16S de l’ARN ribosomique) révèle une incroyable diversité chez les procaryotes et les petits eucaryotes (18S), totalement insoupçonnée, « Séquençage » de milieux, Estimation de l’abondance relative d’espèces dans un milieu, Mesures « génétiques », nombre d’allèles sur un même locus, fréquence relative, degré d’hétérozygotie… Caractéristiques des habitats… (Purvis & Hector, 2000) Le nombre d’espèces actuelles représente environ entre 1 et 2 % des espèces depuis le début de la Vie Myers et al., 2000 Les « hot spots » Dubois, 2004 La moitié des sp sur 7 % des terres émergées, près de 90 % sur 10 % La diversité biologique est très inégalement répartie : de 14 biomes retenus, il existerait 14 M sp (Gaston & Spicer 1998, 2004. Biodiversity, an introduction) La Conférence de Rio en 1992 « Le sommet de la terre » Confirmation du terme « biodiversité », préoccupation mondiale sur le «développement durable», le débat passe du scientifique au politique, Réactions en chaîne, conserver la diversité biologique pour des raisons économiques, biotechnologiques, éthiques… Développement des approches moléculaires, séquençages en masse, typage, OGM, progrès de l’écologie, de la connaissance des écosystèmes, des grands cycles biogéochimiques, de l’influence du vivant sur le climat…éviter une nouvelle extinction en masse… Délicat compromis à trouver entre protection des milieux et des espèces et le développement : satisfaire les besoins de l’humanité sans détruire la diversité du monde vivant. Création de la Convention Internationale sur la Diversité Biologique, aujourd’hui ratifiée par 188 pays, très difficile dialogue Nord-Sud. Impacts de l’homme Vitousek et al., 1997, Science 80 70 60 50 40 % change 30 20 10 0 Land transformation C02 Water use N fixation Plant invasion Bird extinctio Marine fisheries Les disparitions d’espèces « Normalement », une sp/1000/millénaire N Myers en 1979, 40 000 sp/an P Ehrlich et A Ehrlich en 1981, 25 000 sp/an Lubchenco et al., 1991, 23 000 sp/an E O Wilson en 1993, 27 à 100 000 R Leakey et R Lewin en 1997, 25 000 à 40 000 sp/an, S Pimm & J Lawton en 1998 dans Science, taux 100 fois plus que le naturel P H Raven en 2002, rythme 1 000 fois plus rapide Nature en 2004, Thomas et al, 1 M à l’horizon 2050 A Tesseydre en 2004, rythme 50 à 600 fois plus rapide, selon les groupes Une sp disparaît de la terre toutes les 20 minutes, Dubois, 2004 J Blondel en 2005, rythme de disparition 1000 fois plus rapide que le naturel Millenium Ecosystem Assessment, 2005, rythme 1000 fois plus rapide que le naturel. Le déclin des populations animales Birds in Britain, 1 in 1970 Amphibians worldwide, 1 in 1950 All species Forest species Farmland species Populations of vertebrates 1 in 1970 Forest habitats Balmford et al. 2003 Trends Ecol. Evol. Marine habitats Freshwater habitats Les taux d’extinction à travers l’histoire p ? Environ 1,8 millions d’espèces connues et déposées dans les Muséums, 1,5 terrestres, 0,3 marines, Très difficile estimation du nombre d’espèces qui, aujourd’hui encore, nous accompagnent : fourchette entre 10 et 30 millions, 100 ? Rythme de descriptions actuel autour de 16 000 par an (dont 10 % marines), 1 000 ans pour tout décrire ? Le rythme d’extinction naturel estimé pour les 100 millions d’années écoulées est autour de 1/1 000/ 1 000 ans, Le rythme actuel est 1 000 fois plus élevé (Millennium Ecosystem Assessment, 2005) : les 2/3 des espèces auront disparu en 2 100 ? Les questions • • • • Pourquoi des modèles différents ? Comment choisir un modèle ? Que demande t-on à un modèle ? Simplicité d’organisation, facilité d’accès, disponibilité grande, caractéristiques particulières, indicateur de milieu, indicateur de changement, indicateur de déséquilibre, obligation de s’y intéresser pour des raisons médicales, agronomiques ou économiques, fournisseur de molécules… Les modèles favoris • • • • • • • • • • • • • • • • • Saccharomyces cerevisiae, levure, genome en 1996, le 1er d’eucaryote, 6 300 gènes, Caenorhabditis elegans, nématode hermaphrodite protandre, genome (1998) et KO, différents vecteurs disponibles, C. briggsae, Drosophila melanogaster, diptère, génome en 2000, 14 000 gènes, KO disponible Arabidopsis thaliana en 2000, 27 000 gènes, Homme génome en 2001, 13 années de travail, 35 000 gènes Fugu, Takifugu rubripes, Tetraodon nigroviridis, terminé en 2002, le chien en 2003, Souris, génome terminé, 1er draft en 2002, idem le rat surmulot Ciona intestinalis en 2004 , Le riz en 2004, Anopheles gambiae, moustique vecteur du paludisme, L’abeille, la poule, le chimpanzé, en 2004 Nematostella vectensis, anémone de mer cnidaire, génome en 2005, Ostreococcus tauri en 2006, 12,6 Mb Danio rerio, le poisson zèbre, genome en avril 2006 Un oursin, Strongylocentrotus purpuratus en 2006 Amphioxus, Branchiostoma floridae en 2007 Et demain, l’huître creuse, Crassostrea gigas, une annélide, Platynereis dumerilii, un tardigrade… Génomes séquencés 2007 2009 Bactéries 543 718 Archébactéries 47 54 Eucaryotes 70 95 en cours 2206 et 854 3135 et 1007 total 660 867 « Plantes vertes » : 18 548 séquences, 16 348 taxons, 59 144 gènes janvier 2009 Molécules d’intérêt pharmacologique Environ 50 % des molécules actives aujourd’hui utilisées en pharmacie sont extraites ou synthétisées à partir de produits naturels, A partir des plantes terrestres, plusieurs Mds de US$/an, aspirine, quinine, morphine, pénicilline, taxol, réserpine, vinblastine (100 M $/an uniquement à partir de la pervenche rose de Madagascar), Plus de 15 000 produits ont été isolés d ’organismes marins et certains sont passés en utilisation courante : les gélifiants (, anticancer Ara-C (leucémie myélocytique aigüe et lymphome non-Hodgkin), anti-viral Ara-A (herpès), nucléosides isolés d ’éponges, bryostatine (de bryozoaire), antiviraux bactériens (anti-HIV)... 30 % des substances ont été trouvées chez les spongiaires GFP de méduses, polymérases hyperthermostables… Anti-cancer, antibiotics, antiviral, anti-fungi, immunostimulators, - immunosuppressives, growth factors, bone regenerators… molecular tools On estime la probabilité de trouver des substances intéressantes à partir du milieu marin 500 fois plus grande qu’à partir d’organismes terrestres, Ribose et arabinose d’éponge, Ecteinascidine 743, alcaloïde anticancéreux, ascidie, Analgésique non opioïde, le ziconotide (de cône), Roscovitine, antitumoral, étoile de mer, Squalamine, antitumoral et antibiotique, inhibition de l’angiogenèse, requin, alkyrol de foie, Discodermolide, immunosuppresseur, éponge… Un choix politique et économique, question de la ressource. Exceptionnelle chimiodiversité. Boeuf & Kornpbrost, 2009 Production de sondes moléculaires • Diverses neurotoxines, tétrodotoxine, saxitoxine, conotoxine, lophotoxine, acide okadaïque (inhibition de phosphatases), jaspamide, swinholide A (liants de l ’actine intracellulaire), adociasulfate 2 (inhibiteur de kinésine), phycoérythrine (liée à un Ac en cytométrie en flux), aequorine (émet de la lumière en présence de Ca2+), GFP (fluoresce dans les tissus vivants), vent ADN polymérase (hydrothermalisme) Intérêt de la biologie comparative • Dès 1865, C. Bernard «…il y a des expériences qui seraient impossibles chez certaines espèces animales et le choix intelligent d ’un animal qui présente une disposition heureuse est souvent la condition essentielle du succès et de la solution d ’un problème physiologique très important… » • « Principe » d ’A. Krogh : « pour chaque problème de physiologie, il y a un modèle vivant idéal » • En 1997, F. Jacob «…pour s ’attaquer à un problème important, pour avoir une chance raisonnable de lui trouver une solution, le biologiste doit s ’adresser à un matériel convenable...» Eau et air L’eau est un assez bon conducteur de la chaleur et possède une capacité spécifique de chaleur beaucoup plus grande que celle de l’air : le milieu est hautement « tamponné » et les fluctuations nécessitent de grands apports ou fuites de chaleur. Au contraire, l’air est un isolant efficace et a une faible capacité spécifique de chaleur, aussi de relativement faibles radiations solaires peuvent considérablement modifier la température. Les fluides eau et air L ’eau est 50 fois plus visqueuse que l ’air L ’eau est 850 fois plus dense que l ’air L ’énergie nécessaire au « travail ventilatoire » est nettement supérieure chez les animaux aquatiques : contre 1 à 2 % du budget énergétique total chez l ’humain, 5 à 30 % chez les poissons, selon les espèces et les situations. Les extrêmes Les records naturels enregistrés vont de -89,2 (en Antarctique) à +80 °C (grands déserts) dans l’air et de -1,86 à +350 °C en mer Le Vivant procaryotique peut couvrir une très large gamme (-80,+120 ?) tandis que la « vie animale active » est limitée à une gamme beaucoup plus étroite : maxi >+50 pour certains insectes et reptiles en déserts, + 49 pour des ostracodes dans l’eau, 51 pour les poissons, 80 pour Alvinella ; vers le bas, température limite de congélation de l’eau de mer, grands mammifères et oiseaux jusqu’à -60°C. Milieux très variables, Δ de plus de 100 °C en Sibérie entre hiver et été à 0,2 en Océan Antarctique Lopez- Garcia et al., 2002 Extreme resistance Some animals survive in inactive states at unfavourable temperatures. Over these limits, in a more spectacular way, the nematodes, tardigrades and insect eggs can withstand freezing in liquid helium at -269 °C! Factor Salinity: aquatic organisms response Body osmolarity osmoconformers 1000 600 Hyperosmoregulators 200 osmoregulators Hypoosmoregulators 0 200 600 Medium osmolarity 1000 mOsm.l-1 Les milieux • Milieu intérieur humain • • • • • osmolarité, 302 mOsm.l-1 100-105 mM de Cl138-142 mM de Na+ 3-5 mM de K+ cellule rénale et fluide 3000 mOsm.l-1 • L’eau de mer au large • • • • • osmolarité, 1050 mOsm.l-1 560 mM de Cl450 mM de Na+ 11 mM de K+ «extrême» : 2500 mOsm.l-1 1/3 EM = sérum physiologique Composition selon les groupes Méduse Aurelia Annélide Arénicole Mollusque Anodonte Mollusque Aplysie Crustacé Ecrevisse Crustacé Homard Insecte Blatte Habitat Osmolarité Na+ Mg2+ Ca2+ ClK+ mOsm.l-1 mMol-1 mMol-1 mMol-1 mMol-1 mMol-1 EM 1000 460 10 51 10 554 EM 1000 459 10 52 10 537 ED 40 16 0,5 0,2 8,5 12 EM 1000 492 10 49 13 543 ED 310 146 4 4 8 139 EM 1000 472 4 7 16 470 162 8 6 4 144 terrestre 325 Composition selon les groupes Habitat Osmolarité mosM.l-1 Na+ mMol.l-1 K+ mMol.l-1 Mg2+ mM Ca2+ ClmMol.l1 Cyclostome Myxine Cyclostome Lamproie Chondrichthyen Roussette Téléostéen Poisson rouge Téléostéen Flét japonais Amphibien Grenouille Reptile Alligator Oiseau Canard Mammifère Humain EM 1002 554 7 23 9 532 ED 248 120 3 2 2 96 EM 1075 269 4 1 3 ED 293 142 2 3 6 258 376 urée 107 EM 337 180 4 1 3 160 ED 210 92 3 2 2 70 ED 278 140 4 3 5 111 terrestre 294 138 3 2 2 103 terrestre 302 142 4 2 5 104 Le canal chlore, CFTR • Cystic Fibrosis Transmembrane conductance Regulator • Protéine glycosylée de 1280 aa, • Mutation fréquente en F 508 (16-20 % de porteurs) pour la mucoviscidose Système immunitaire combinatoire • Découverte chez des élasmobranches de 4 à 500 M d’années, d ’un système immun (Litman, 1996) proche de celui du fœtus humain (IgM, Ac anti-microbiens innés, R cellulaire T et MHCs) : très intéressant dans les cas de pathologies autoimmunes, lupus, arthrite rhumatoïde … Production de squalamine, antimicrobien et immunomodulateur. La reconnaissance du soi et du non-soi • Chez les tuniciers, reconnaissance du « partenaire » : bases de la compatibilité tissulaire et cellulaire, application en matière de greffes, cellules spécialisées et molécules d’auto-reconnaissance. Hermaphrodites : pas d ’autofécondation, molécule de reconnaissance du soi sur les cellules (hémocytes/spermatozoïdes), application dans la transmission du HIV (Scofield, 1997). Mucoviscidose/CFTR • Mutation F-508 sur le gène CFTR responsable de 80% des cas de mucoviscidose, héréditaire autosomale, désordres dans les flux d’eau et d ’ions dans les cellules pulmonaires/analogie avec la branchie des téléostéens • Clonage et séquençage de 2 CFTR chez le saumon atlantique • Utilisation de l’évolution des séquences en phylogénie et relations génotype/phénotype de la pathologie Chen et al., Molec. Biol. Evolution, 2001 Perle et régénération osseuse • Expérimentation in vivo (fémur de mouton, Lopez et al. 2002) Image en lumière polarisée : interface nacre/os IDENTIFICATION OF THE NICOTINIC RECEPTOR From electric organ to human brain ACETYLCHOLINE IN THE BRAIN ACh ACh channel electric organ + snake toxin lead to succesful isolation of nicotinic acetylcholine receptor fish electric organ Nachmansohn 1936 26 tubes, 50 an allosteric membrane protein with distinct domains for Ach site & ion channel JP Changeux, 2007 NICOTINE increases arousal & attention causes EEG desynchronisation higher amounts of REM sleep NICOTINIC RECEPTORS congenital myasthenia nocturnal frontal lobe epilepsy sudden infant death syndrome La défense immunitaire primitive • En 1882, Elie Metchnikoff, en utilisant des larves d’étoiles de mer, avait fait une observation très intéressante sur l’universalité d’un mécanisme qu’il dénommera phagocytose. Il jetait les bases de la défense immune non-spécifique et soulignait l’importance de ce mécanisme comme la plus ancienne stratégie de l’immunité. Il ouvrait la voie à des recherches en immunologie cellulaire et comparée qui seront déterminantes pour la compréhension de la réaction à l’infection chez l’homme. PN, 1908 • La même année, Otto von Warburg démontrait l’augmentation de la consommation d’oxygène consécutive à la fécondation d’un ovocyte d’oursin : les échinodermes, groupe marin exclusif très ancien (ils sont présents déjà bien différenciés lors de l’explosion de vie cambrienne, datée à 550 MA), émettent des quantités gigantesques (millions à milliards) de gamètes conduisant après fécondation in vitro à des embryons tous synchronisés, transparents et aptes à la micro-injection. Le zygote d’oursin servira également à l’élucidation des vagues calciques post-fécondation, dépendantes de messagers chimiques intracellulaires interdisant la polyspermie (Lee, 1997) et des variations du Ca2+ intracellulaire post-fécondation nécessaires au déclenchement du développement du zygote. PN, 1931 La post-fécondation Découverte du choc anaphylactique • Paul Portier et Charles Richet, embarqués sur le navire océanographique du Prince Albert 1er de Monaco en 1901 expérimentaient sur la toxicité des venins secrétés par les filaments pêcheurs de grandes méduses physalies océaniques. Ils mirent en évidence la survenue de la mort rapide de chiens après une seconde injection (au moins 15 jours d’intervalle) de doses non létales. Ils découvraient ainsi la réaction immunitaire exacerbée, le choc anaphylactique. PN, 1913 La transmission de l’influx nerveux • Ils eurent l’idée géniale d’utiliser un axone de calmar, environ 1 000 fois plus large en section que celui des mammifères, ce qui leur permit, à une époque où la microscopie électronique et les moyens informatiques n’existaient pas, l’utilisation de leurs électrodes de verre. Ils mirent en évidence les mouvements d’ions de part et d’autre de la membrane plasmique du neurone et ont proposé un modèle mathématique toujours d’actualité permettant la compréhension du fonctionnement de la cellule nerveuse. Ils parvinrent à analyser les propriétés de conductance de plusieurs canaux fonctionnant en même temps et démontraient comment un influx d’ions Na+ dépolarise la membrane de manière transitoire et comment un efflux de K+ la repolarise. A L Hodgkin and A F Huxley PN, 1963 Bases moléculaires de la mémoire • Le centre nerveux de l’aplysie le plus développé ne regroupe pas plus de 20 000 neurones. Ceux-ci sont de grande taille et reconnaissables individuellement et les animaux avaient été entraînés à mémoriser certains comportements. Il démontrera que le passage d’une mémorisation de quelques minutes à une autre de quelques jours à quelques semaines est conditionné par l’établissement de nouvelles connexions synaptiques, ellesmêmes liées à des activations ou des répressions de protéines spécifiques (CREB 1 et 2) sous le contrôle de protéines-kinases AMPcdépendantes. Ces travaux sont fondamentaux pour des applications ciblées vers les troubles de la neurodégénérescence. PN, 2000 Tout correspond en fait à une succession de synthèses et de destructions de cyclines chez toutes les cellules eucaryotes, de la levure à l ’humain : dans les cancers, des mutations modifient la fonction des cyclines ou de protéines qui régulent ou sont régulées par les cyclines. Régulation de la cycline B La molécule-clé du cancer PN, 2001 • Tim Hunt et ses collaborateurs identifieront chez l’étoile de mer une protéine essentielle dans le contrôle de la régulation du cycle cellulaire, la cycline B, synthétisée et détruite régulièrement lors de chaque cycle de division de la cellule. Associée à la kinase Cdc2, découverte chez la levure par Nurse et al. (1976), elle forme un dimère (Lee & Nurse, 1987) qui constitue le fameux MPF (Meiosis promoting factor devenu ensuite M-phase promoting factor). Ce fut la purification à partir d’ovocytes d’étoile de mer de ce facteur universel qui apporta la preuve de la composition de l’hétérodimère. MPF est actif dans toute cellule en phase M, son inactivation en anaphase nécessite des protéolyses et sa réactivation des synthèses protéiques. Avec L Hartwell et P Nurse La GFP PN 2008 Avec M Chalfie et R Tsien La protéine verte fluorescente de méduse est découverte par un chercheur japonais dans les années 60, ensuite utilisée chez C.elegans puis finement étudiée chimiquement : elle fluoresce dans le vert sous l’action des UV. Ostreococcus story • Ostreococcus tauri, the smallest free eukaryotic cell known (0,8-1,1 µ), planktonic Prasinophycea discovered in Thau lagoon in 1994, in using fluxes cytometry (Courties et al. 1994) • Very small genome (12.6 megabases), end of the total sequencing and annotation in Montpellier, 20 chromosomes (PNAS, July 2006) • Ultra-simple organisation: 1 nucleus, 1 plastid, 1 mitochondria, 1 Golgi, 1 nuclear pore, • Bacteria and viruses, symbiosis or parasitism (Moreau et al., 2001) Pourquoi protéger la diversité biologique ? Valeur économique de la diversité biologique, biotechnologies, ressources agrosylvopastorales, cosmétiques et pharmacie, modèles… Rôle fondamental dans les grands équilibres de la biosphère, biogéochimie, La biodiversité augmente la productivité : comment tournera le système avec moins d’espèces ? Frein aux proliférations… Plus un écosystème a trouvé un équilibre avec une grande biodiversité et mieux il interdit les invasions : la seule lutte contre les plantes invasives, >400 Md de $ pour le monde Gestion raisonnée des ressources pour un « développement durable », pêches et aquaculture ; écotourisme bien géré, Perception éthique de la nature (« Pourquoi sauver l’éléphant d’Afrique ? ») Conserver in situ ou ex situ ? Conservation des espèces ou des écosystèmes ? Diversité biologique et santé • Relations hôtes-parasites, onchocercose humaine (typage moléculaire très précis pour reconnaître les souches et les espèces des simulies. Paludisme (5 anophèles, 6 sp jumelles pour gambiae, 9 sp « secondaires »), • Pathologies émergentes, SIDA, SRAS, Ebola, fièvre de Lassa, chikungunya, grippe aviaire, Hanta, dengue, fièvre jaune, Lyme (tique et daim), Lassa, vallée du Rift, hépatite C, Creutzfeldt Jacob « nouveau »… pathogènes antérieurs mais avec des hôtes ou une morbidité différents, • Echanges intercontinentaux, en 1520 la variole a tué 3,5 M d’indiens en 2 ans, dengue, encéphalites et fièvre jaune à partir de moustiques africains, A. gambiae au Brésil entre 30 et 40, A. albopictus du Japon aux USA en 1985… • Dissémination de Listeria, Legionella, Salmonella, E.coli O157, • Épisodes d’allergie… le cas de l’espèce introduite d’Argentine, l’ambroisie, Ambrosia artemisiifolia produisant un allergisant redoutable (jusqu’à 100 grains au m3 d’air !) en France (vallée du Rhône). • Infections nocosomiales, de la péniciline en 1946 au zyvox en 1999 pour le staphyloccoque doré (30 Md US$/an) Quelques exemples… Pour l’homme, peste noire, paludisme, grippe aviaire maladie de West Nile… pour les animaux, varroa de l’abeille… pour les plantes cultivées, mildiou et oïdium de la vigne, rouille du soja, doryphore de la pomme de terre… Interactions modifications environnementales / émergence ou ré-emergence de pathologies infectieuses… ex. fragmentation des populations de rat et peste noire, infections nosocomiales, Question de l’exposition du système immunitaire : une exposition trop réduite peut-elle avoir plus de conséquences négatives que positives ? Question des allergies. Les changements d’hôtes Grandes différences entre milieux tempérés et tropicaux (animaux domestiques et singes), 5 grandes phases : 1) pathogène présent chez l’animal mais jamais trouvé « naturellement » chez l’homme ( beaucoup de Plasmodium…très spécifiques), 2) pathogène présent chez l’animal, transmis à l’homme, mais pas entre hommes, anthrax, Nipah, rabies, West Nile virus… 3) pathogènes d’animaux qui ne font que un ou quelques cycles chez l’homme, Ebola, monkeypox et Marburg virus, 4) pathogène animal transmis à l’homme et infectieux entre hommes, fièvre jaune, dengue, grippe, typhus, Chagas, choléra… 5) pathogène uniquement aujourd’hui se transmettant d’homme à homme, mais venu du singe ancestralement, divergence vers 5 MA ou plus récemment (HIV, syphilis, varicelle, rubéole, paludisme à P. falciparum…). Wolfe et al., Nature 2007 L'évaluation met l'accent sur les services d'origine écosystémiques qui bénéficient à l'homme. Ceux-ci comprennent : • des services de prélèvement tel la nourriture, l'eau, le bois de construction ou de feu, les fibres; • des services de régulation qui contrôlent le climat, les inondations, les déchets, la qualité de l'eau, certaines maladies....; • des services culturels qui procurent des bénéfices récréatifs, esthétiques, spirituels ...; • des services d'auto-entretien tel que la formation des sols, la photosynthèse, les grands cycles biogéochimiques .... Bombus hortorum Bombus terrestris Le développement durable l’estil encore pour longtemps ? « Un développement qui satisfait les besoins de la génération présente en préservant pour les générations futures la possibilité de satisfaire les leurs », Mme G. Harlem Bruntland, World Commission for Environment and Development, 1987, « Bien que 30 ans se soient écoulés depuis la signature de la Charte des Nations Unies, point de départ tendant à établir un nouvel ordre international, l’humanité se trouve aujourd’hui face à un choix critique. L’espoir de donner une vie meilleure à la famille humaine tout entière a été largement déçu. Au contraire il y a plus d’affamés, de malades, de sans-abri et d’analphabètes que lors de la créations des NU » Déclaration de Cocoyoc, 1974 9 milliards d’humains en 2040 ? Abandonner la conception de la conservation de la nature à l’écart des hommes…L’homme n’est pas extérieur à la Nature, il en fait partie ! Analyse de « l’empreinte écologique », L’écologie visitée à travers les modèles de l’économie (Costanza et al., Nature, 1997) 33 trillions de $, contre 18 pour la somme des PIB de la planète : les rapports consentis coût/bénéfice passent de 1 à 100 entre la « stratégie écologique » et celle d’« exploitation intensive ». 40% de l’économie mondiale reposent sur les produits biologiques et les processus écologiques : comment négliger cela ? Conférence de Johannesburg en 2002, « freiner l’érosion de la biodiversité pour 2010 » ! Protocole de Kyoto, ramener les émissions de CO2 en 2010 à celles de 1990. Economie et écologie : la réconciliation ? Et surtout, mieux partager les ressources ! continuer dans un monde où 20 % contrôlent 80 % des ressources ? Appel du 20 juillet 2006 dans Nature Appel de Paris le 3 février 2007, ONUE Grenelle de l’environnement, octobre 2007 Grenelle de la mer, juin 2009 Enjeux économiques Capital physique Roches, eau Calculer le coût de l’inaction : -l’effondrement des pêches, 100 Md €, 57 M d’emplois -de la pollinisation, 150 Md € café, cacao, fruits, légumes… -risques sanitaires…Chagas, paludisme, Lyme, leishmaniose… Services écologiques Capital biologique Capital humain -travail - investissements « Il conviendrait de rémunérer ces différents capitaux au prorata de leur contribution à la production de services écosystémiques », Chevassus et al., 2009 En guise de conclusion… • • • • • Des cadeaux de la biodiversité à l’humanité ! Diverses molécules indispensables en pharmacologie Des modèles pertinents et originaux, souvent déterminants, Et le rythme de la disparition des espèces s’accélère si vite ! Décrire des espèces pour les voir irrémédiablement disparaître ? • « …je ne sais pas trop quel conseil je pourrais donner aux chercheurs qui tenteront en 2050 de créer de nouveaux produits médicamenteux à partir d’espèces disparues… » J Langford, Ottawa, 2003. Conférence de Paris pour une gouvernance écologique mondiale 1. Lutter contre le dérèglement climatique 2. Agir ensemble pour sauvegarder la biodiversité 3. Combattre les pollutions et préserver la santé 2–3 février 2007 4. Faire de l’eau un enjeu partagé Appel de Paris pour une ONUE 5. Inventer la croissance écologique: le changement des mentalités, des modes de production et de consommation 6. Renforcer la gouvernance internationale de l’environnement Quelques références… Barbault, R. 2006. Un éléphant dans un jeu de quilles. L’homme dans la biodiversité. Seuil, Science ouverte, 266 pages. Benton, M.J. and Twitchett, R.J. 2003. How to kill (almost) all life: the end-Permian extinction event. 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