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Des
NOTES de LECTURE
… « 23 novembre 2009 …
« Notes » réalisées par Henry Colombani – ancien délégué national à la FCSF, membre de « Mémoires Vives Centres
sociaux » - au simple titre d’un retraité, bénévole associatif qui, souhaitant approfondir ses lectures, propose de les partager
avec ceux qu’elles intéresseraient. Elles sont donc subjectives, selon les intérêts du moment et les choix de l’auteur, et
n’engagent aucune institution. En espérant qu’elles inciteront à lire, à nourrir le travail et les réflexions des acteurs
bénévoles et professionnels, dans l’accord comme dans le débat contradictoire ! Les ouvrages retenus sont répertoriés et
classés à la FCSF.
Site : http://blog.centres-sociaux.fr/ rubrique : « Paru récemment et à lire… »
. . ATTIAS-DONFUT Claudine, François-Charles WOLFF, Les destinées des enfants
d’immigrés, Stock, septembre 2009.
[324 p.]
Il est nécessaire de se débarrasser des préjugés et idées reçues concernant les
représentations globalisantes sur les enfants d’immigrés. Surtout quand elles
appartiennent à des a priori plus idéologiques qu’objectivement remis à plat.
Or voici que deux chercheurs réputés1 publient un ouvrage qui vient remettre les choses en
place, à partir d’une enquête d’une ampleur exceptionnelle, conduite auprès d'un
échantillon représentatif de 6 000 immigrés et 20 000 de leurs descendants, d'origine
italienne ou portugaise, maghrébine ou africaine. Pour conclure, ils prennent un certain
contre-pied du pessimisme dominant qui fait dire à ceux qui en rendent compte –
« l’intégration fonctionne ».
On remarquera que cette formule est davantage un intertitre rencontré dans la presse2
rendant compte de l’ouvrage. Les auteurs ont un énoncé plus modeste, mais combien plus
profond, auquel il faut se référer intégralement : « C’est un fait, et c’est là une des
conclusions majeures de notre travail, les enfants d’immigrés sont, dans leur très grande
majorité, sur le chemin de la réussite sociale et, par conséquent, de l’intégration. » Les
sillons n’en sont pas encore bien tracés pour les plus jeunes, et certaines routes peuvent
encore bifurquer, mais les potentialités existent et elles sont fortes. » [p. 280]
Entendons-nous bien, il ne s’agit pour les auteurs pas de nier les difficultés nombreuses et
criantes subsistant encore ni, notamment celles liées aux discriminations ; mais en ne se
focalisant pas sur les quartiers sensibles (où ne vivent finalement que 20% des immigrés) et
à certaines conditions inhérentes aux conditions de l’étude – soigneusement précisées :
1
Claudine ATTIAS-DONFUT est sociologue, directrice de recherche à la Caisse nationale d’assurance vieillesse
(CNAV), spécialiste internationalement reconnue des relations entre générations. Elle a publié notamment.
Sociologie des générations (PUF, 1988), Les Solidarités entre générations (Nathan, 1995), Le Nouvel Esprit de
famille (avec N. Lapierre et M. Segalen, Odile Jacob, 2002), L’Enracinement (Armand Colin, 2006) et Grandsparents (avec M. Segalen, Odile Jacob, 2007). François-Charles WOLFF est économiste, professeur à l’université
de Nantes et chercheur associé à l’INED. Il a acquis une réputation internationale par ses travaux sur les
transferts entre générations, sur lesquels il a publié de nombreux articles de référence.
2
Le Point, 20/11/2009, Alain Duhamel: Et si l'intégration réussissait ? Cf. Le Figaro, 15/10/2009 , interview des auteurs, par
Cécilia Gabizon. (voir en annexe)
1
l’objet de ce livre « est de décrire et d’analyser, sur la base des données d’une large
enquête, les trajectoires sociales des jeunes hommes et femmes dont les parents sont
venus d’ailleurs », et ce afin pour « d’établir une connaissance empiriquement fondée qui
rende compte des réalités multiples de cette génération, des nombreux défis qu’elle doit
affronter, de ses succès et de ses faillites » [p. 7]
La formule simplifiée « l’intégration fonctionne » ne fait pas apparaître l’essentiel de
l’approche des auteurs. L’étude en effet est particulièrement originale en ce qu’elle
privilégie l’analyse des liens entre générations de ces populations, considérées souvent
comme sans passé. Et, prenant en considération la situation de tous les enfants de chaque
famille étudiée, elle favorise l’approche comparative : par exemple, la réussite des filles
relativement aux garçons dans une même fratrie.
Pour les acteurs des Centres sociaux, particulièrement engagés dans la compréhension
inter générationnelle des relations sociales, telle qu’elle se travaille notamment avec les
actions d’accompagnement du vieillissement, il y a grand intérêt à insister sur la dimension
de recherche ici retenue :
« Nous espérons dès lors contribuer à combler un vide en explorant dans ce livre les
rapports des immigrés à leurs enfants et aussi à leurs parents, car c’est toujours dans un
jeu à trois générations que se nouent et se dénouent leurs destinées. [p. 12]
En effet : « L’épreuve commence dès l’origine de la migration, au moment de
quitte le pays natal... leur vie durant les migrants vont s’efforcer de compenser
cette cassure originelle... Ils font le grand écart entre l’ancienne et la nouvelle
génération... [p. 13-15]
L’enquête fait apparaître d’une part la force du projet parental et son rôle dans la
réussite scolaire des descendants ; elle note ensuite la mobilité sociale gagnée d’une
génération à l’autre. Mai, d el ‘autre côté, il est mis en évidence que les relations de
filiation sont soumises à rude épreuve dans l’émigration, car si liens affectifs et solidarités
demeurent, les transmissions se perdent : satisfaisant certaines attentes par la réussite
scolaire et sociale, les enfants sont également ceux qui « trahissent » en s’autonomisant
et génère ce que les auteurs appellent « un désenchainement des générations ». C’est le
risque, le prix de cette avancée.
Mais l’enjeu de cette étude est bien d’ordre social et politique. Il incite en effet à un
changement de regard sur les immigrés et leurs enfants, selon une conception d’un monde
en profondes mutations :
« Il est temps de reconnaître la valeur centrale de l’immigration dans la société moderne,
en France en particulier, et de percevoir ceux qui sont venus d’ailleurs dans la force et la
dignité de leurs histoires singulières. Nous avons pris la perspective des relations
intergénérationnelles et multi générationnelles pour observer, à travers elles, le destin
des descendants d’immigrés et tenter de le comprendre. » [p. 279]
Henry COLOMBANI
N.B. Faute de pouvoir rendre compte en détail des constats – nouas avons préféré souligner
l’originalité de la démarche et le changement de regard proposé – voici quelques points à
retenir :
•
Sur les parcours migratoires des enfants et les phénomènes de dispersion :
- cf. IIe Partie : La dispersion des enfants... [p. 91 et sq]
2
•
Sur les liens (et ruptures) inter générations :
cf. IIIe Partie – Ponts et fossés entre générations » ; notamment : La cohabitation avec les
parents âgés et ses pièges [p. 189 et sq.]
•
Sur l’investissement des filles dans le cursus scolaire :
cf. IVe Partie – « Franchir les barrières et monter les niveaux » ; I – La course aux études :
une indéniable supériorité des filles [p228 et sq.]
-
•
•
Sur les approches comparées entre Asiatiques, Africains, Algériens... : Cf.
interview au Figaro du 15/10/2009. [Cf. annexe, ci-après)]
Sur l’ascension sociale par les études.[Cf. Tableau joint]
Le Figaro - Propos recueillis par Cécilia Gabizon 15/10/2009
Les enfants d'Algériens et d'Africains plus en difficulté
INTERVIEW - Sociologue à la Caisse nationale d'assurance vieillesse et auteur d'une vaste étude sur
les enfants d'immigrés, Claudine Attias-Donfut relève un risque d'échec social plus important.
LE FIGARO.- L'intégration des Algériens et des Africains s'avère-t-elle plus complexe ?
Claudine ATTIAS-DONFUT. - La moitié des enfants d'Africains et un tiers des fils d'Algériens n'ont pas
encore 19 ans. C'est une population particulièrement jeune, qui progresse globalement. Mais 10 %
sont en échec, selon le témoignage des parents. Un résultat qui tranche avec les autres nationalités
et révèle un malaise particulier.
Comment expliquer cette spécificité algérienne ?
Nous n'avons que des pistes. Les travaux menés par des sociologues et des historiens montrent
comment le contentieux historique de la guerre d'Algérie encombre les mémoires. La deuxième
génération s'est partagée entre des jeunes ultrarépublicains, au sentiment d'appartenance nationale
exacerbé qui affichent souvent de belles réussites. Et une minorité plus torturée. Car certains
parents sont restés dans l'ambiguïté, éduquant leurs enfants dans le respect des lois mais refusant
dans le fond qu'ils deviennent des Français. Cette schizophrénie a touché principalement les
garçons. Certains ont concrétisé la rage rentrée de leurs parents contre l'ancienne puissance
coloniale. Plus que l'islam, c'est bien l'histoire qui a nourri cette rancœur. Car le risque de
marginalisation sociale est bien plus faible pour les descendants des autres pays du Maghreb.
L'intégration des populations venues de l'Afrique noire connaît-elle également des difficultés ?
C'est une immigration très particulière, avec une forte proportion de diplômés dans la première
génération. Souvent venus des villes et de milieux bourgeois, les étudiants africains restés dans
l'Hexagone ont connu des sorts divers. Mais 30 % ont dégringolé socialement. Ils ont peiné pour
négocier leurs diplômes en France et s'ils ont parfois mieux gagné leur vie que dans leurs pays, ils
n'ont pas toujours retrouvé leur statut. Cette épreuve a marqué leurs enfants. Beaucoup ont fait des
études, dopés par le niveau culturel et le puissant désir de leurs parents de les voir réussir, mais ils
ont souvent des difficultés à obtenir des postes correspondants à leurs qualifications.
On a plutôt l'image de migrants venus des zones rurales…
L'immigration africaine est bimodale, avec d'un côté des diplômés et de l'autre des paysans,
notamment les Maliens. Le décalage culturel est alors brutal, entre une société africaine très
hiérarchisée, où le groupe élève les enfants de façon autoritaire et le modèle français, centré sur
l'individu et la pédagogie. Certains migrants n'ont pas réussi, seuls, à imposer une éducation.
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D'autant que les châtiments physiques sont réprouvés en France. Leurs enfants évoluent dans un
monde où personne ne détient plus l'autorité. À cela, s'ajoute un fort risque de discrimination.
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Une vaste étude, réalisée pour la première fois sur les enfants
d'immigrés, montre leur ascension sociale par les études.
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