Tendances actuelles du management participatif

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Jean-Claude BARBIER
Le texte qui suit se fixe une ambition limitée: faire une revue cursive des
questions que pose le développement du management participatif, tant
dans les pratiques et les expériences que dans les discours de
management. Il s'appuie, le cas échéant, sur quelques travaux de
recherche en sociologie du travail et des organisations sans prétendre à
une analyse complète des points de vue.
Au moment où, dans les administrations, et particulièrement dans
l'Institution des CAF, se répandent et prennent forme des démarches qui
ont d'abord existé dans les entreprises privées, il a paru utile de tenter une
synthèse pour fournir aux praticiens des éléments de réflexion généraux.
Le contexte socio-organisationnel, les contraintes et les marges de
manœuvre qui sont ceux des dirigeants et des personnels des CAF sont
certes bien différents de ceux de nombreuses entreprises privées. Pourtant,
il apparaît certain que la prise en considération des expériences et
pratiques dans d'autres secteurs ne peut qu'enrichir la réflexion.
Les années récentes -au moins
depuis 1981-82- ont vu se développer, d'abord timidement puis de
façon plus large, des réflexions,
des expérimentations puis des
pratiques qui ont pour point
commun de chercher à faire participer le personnel (plus particulièrement les agents d'exécution et
l'encadrement de base, plutôt
classés du côté de l'exécution,
selon le système taylorien
classique); cette participation
concerne la définition des objectifs
de travail quotidiens ou à plus
moyen terme, mais aussi la
formalisation et l'intégration de
valeurs, d'états d'esprit centrés
sur une volonté de cohésion
interne de l'organisme et sur
l'implication, souvent individuelle, au sein de groupes.
Cette tendance suppose une
réorganisation à divers niveaux
par rapport aux pratiques
antérieures, qui se traduit dans la
modification des structures de
circulation de l'information; dans
l'émergence de nouveaux systèmes organisationnels internes;
dans l'appel à des compétences et
savoir-faire différents chez les
salariés; dans la réflexion et,
éventuellement, l'essai d'instrumentalisation de valeurs et de
normes.
L'hypothèse
semble
être
désormais assez généralement
RECHERCHES ET PREVISIONS n°16
1
partagée, selon laquelle les
entreprises produiraient mieux,
plus efficacement, en impliquant
les hommes et les femmes de tous
niveaux hiérarchiques qui les
composent.
Celle-ci est d'ailleurs rarement
relayée par des études ou
évaluations ex-post des effets du
"management participatir' au
moins en termes quantitatifs ( 1).
Avec le recul de quelques années,
cel article se demande en quoi
consiste exactement ce phénomène du "participalir' dont il
passe en revue quelques
manifestations empiriques dans le
contexte français. Il s'interroge
sur les raisons qui font que les
pratiques et les discours changent
maintenant à propos de l'implication des salariés dans la gestion.
Dans la mesure où l'étiquette de
"participatir' se trouve associée à
de nombreuses pratiques différentes, il est nécessaire aussi de
préciser quels sont les enjeux de ce
mouvement et de produire une vue
un peu synthétique de ce qui se
fait concrètement dans les entreprises, à partir des études et
enquêtes aussi bien que de la
"littérature managériale". Enfin,
on peut également s'arrêter sur
une évaluation de la réussite de
ces pratiques et de leurs limites.
Vo1r toutefois les
travaux d'Henri Savaii; vo1r
aussi la gr1lle proposée par
le CRIDA (cf. b1bhograph1e
dans ce numéro)
(2) Cf. plus tom fiches de
synthèse dans ce numéro.
(3) Cf. par exemple W.
Ouchi, Théorie Z; T. Petera,
Le prix de l'excellence.
(1)
Pour celui qui analyse les
pratiques de gestion des entreprises avec le recul d'une période
assez longue, il est frappant de
voir naître et mourir, dans ce
champ, des modes éphémères.
L'engouement qu'elles suscitent
est à la mesure de l'oubli ultérieur
dans lequel elles tombent.
Même des réorganisations et des
méthodes authentiquement innovanles peuvent n'avoir qu'un
impact limité dans le temps ou
dans l'espace.
Il faut donc se poser d'abord la
question de la réalité du mouvement en faveur d'une gestion plus
participative el des circonstances
qui expliquent qu'il prend de
l'ampleur actuellement.
1) Une diffusion large
Sans préjuger de l'impact en
profondeur (el surtout, durable) de
la mise en œuvre des expériences
et des pratiques nouvelles dans ce
domaine, il faut reconnaître que
leur diffusion est large. On
n'examinera pas, en détail, les
pratiques elles-mêmes (2).
Contentons-nous de regrouper
sous l'étiquette du participatif une
série de pratiques de gestion qui
prennent des formes variées,
regroupant les démarches dites de
projet d'entreprise, de management participatif, les cercles de
qualité et la qualité totale, mais
aussi les pratiques qui impliquent
la formalisation d'une culture
d'entreprise et sa diffusion décidée
par la direction, voire des projets
de modification des cultures
existantes.
Il faut en outre signaler que ces
pratiques qui formalisent le
participatif à un degré plus ou
moins grand ne sont pas
exclusives d'un fonctionnement
participatif non explicité qui, lui,
n'offre pas de caractère de
nouveauté.
C'est à la suite des théories et
pratiques lancés aux Etats-Unis
(3) et au Japon que ces idées se
sont diffusées en France à partir
dudébutdesannées 1980.
a) Des données chiffrées précises
sur l'ampleur du phénomène
RECHERCHES ET PREVISIONS n"l6
2
d'ensemble sont difficiles à réunir.
Toutefois plusieurs enquêtes ont
montré une large diffusion dans
les entreprises (1) y compris une
extension des pratiques dans le
secteur public.
b) Dans les publications consacrées à la gestion des entreprises,
et tout particulièrement quand il
s'agit de gestion du changement,
les thèmes qui se rattachent à la
participation du personnel (à la
frontière entre gestion du
personnel et gestion de la
production, qui se trouvent se
recouper) sont très généralement
évoqués.
Si l'on ne peut écarter,là aussi, les
effets de mode, ces mouvements
méritent d'être pris au sérieux.
Les techniques managériales se
diffusent dans les entreprises par
des effets d'imitation. Une
transformation en profondeur des
pratiques de gestion peut résulter
aussi d'une diffusion qui emprunte
les canaux de la mode et mode ne
signifie pas unilatéralement un
impact superficiel. Les exemples
de l'implantation de l'organisation
dite scientifique du travail, selon
les principes tayloriens, puis de la
diffusion de la chaîne de montage,
montrent que ces méthodes ont
d'abord été perçues comme une
mode. A ce titre, d'ailleurs, elles
furent accueillies dans un premier
temps avec hostilité aux USA
aussi bien par les employeurs que
les syndicats (2).
Quelques éléments bibliographiques (3) peuvent en rendre
compte; il n'est pas possible de
faire le tour d'une littérature
foisonnante dans le cadre de cet
article.
c) Une
autre preuve de
l'importance de l'écho social
important tient également dans la
reprise du thème dans les rapports
officiels aux pouvoirs publics. Le
cas du rapport d'A. Riboud doit
tout particulièrement être signalé,
qui se place résolument en rupture
avec le taylorisme et exalte
l'autonomie, l'initiative, la participation et la motivation des
hommes par une organisation du
travail qualifiante (4).
2) Impact des "réorganisations"
en profondeur
Ces éléments, pour autant, ne
permettent pas de juger dans
quelle mesure les pratiques sont
effectivement transformées en
profondeur.
Comme en d'autres domaines, la
modification des discours managériaux est souvent plus fracile que
leur traduction en actions de
changement dans l'entreprise.
Ce que disent les textes, ce que
préconisent les "stars" les pl us
connues (G. Serieyx en est un
exemple célèbre en France), c'est
la nécessité d'un changement
radical de pratiques de gestion
intégrant, sous une forme ou sous
une autre, une mobilisation des
salariés. La réalité de cette
rupture, sur le terrain, n'est pour
autant pas avérée.
Certains éléments laissent penser
qu'il y a, au moins, un retard dans
l'appropriation effective de ce
changement des pratiques par les
états-majors. Une récente enquête
(5) a montré que les dirigeants
sont en très grande majorité
convaincus de l'importance du
"facteur humain" dans la compétitivité. La contribution des salariés
est même jugée plus importante
que les moyens matériels. En
revanche, la dimension "ressources humaines" est rarement
incorporée aux décisions concrètes
de direction et aux plans
stratégiques (rareté relative d'un
plan général de formation, volet
ressources humaines du plan,
etc).
Si l'on compare le mouvement créé
autour du participatif avec celui
qui, dans les
années
70
RECHERCHES ET PREVISIONS n"l6
3
Cf. enquête CRIDA
"Démocratie et entreprise",
n• 6, décembre 1987; cf.
auss1 la revue "Personnel",
mal 198H; plus1eurs
dizaines de milliers de
cercles
de
qualité
(AFCERQJ etc ...
(2J V01r, par exemple, sur
ce sujet, S. Kakar, Frederic
Taylor, a study in
personnahty
and
mnovation.
(3l V01r b1bhograph1e dans
ce numéro.
(4) Cf. aussi le rapport
Arthu1s dans la fonctiOn
pubhque et les mitiat1ves
pnses par l'ancien ministre
de la fonction publique (De
Charette).
l5l Cf. Personnel, mai 1988
<réalisée
par
Peat
Marw1ck, auprès de 267
entreprises).
(lJ
(1) Qui
d'ailleurs n'étaient
pas si nouvelles que cela, Cf.
G. Friedmann, Problèmes
humains du machinisme
industriel.
(2) Cf. CFDT aujourd'hui,
mai·jum 1981.
(3) Recherches sur la
participation dans le groupe
Thomson · Grand Pubhc,
J. Gautrat et J .L. Laville,
C:RIDA 1988.
(4) Voir D. Linhart et
A. BorzeJX, Sociolog1e,du
travail "La partic1pat10n,
un clair obscur", n° 1/88.
(5) Confirmé par enquête
"Personnel", ma• 1988, c1tée
plus haut.
(6) A l'exception, notable, de
la CGT, Cf. aussi les
réserves de FO (voir
interviews in Laganier "Le
concept de modernisation,
l'entreprise et le progrès
technique, rapport CGP,
décembre 1986.
préconisait le développement des
"nouvelles formes d'organisation
du travail" (NFOT) et tout
particulièrement les groupes autonomes, on doit donc rester
circonspect.
Ces "nouvelles" formes (1) ne se
répandirent que dans une partie
marginale des entreprises au plus
fort de leur diffusion, une enquête
(2) a évalué le personnel concerné
à 8% de la main d'œuvre de
l'industrie et du commerce.
Une des raisons, parmi beaucoup
d'autres, de la diffusion limitée de
ces NFOT et du fait qu'elles sont
complètement passées de mode
aujourd'hui tient, entre autres, au
fait que les questions de
l'autonomie et de l'autoorganisation n'avaient sans doute
pas été pensées suffisamment.
Dans une situation donnée, en
entreprise, tous les collectifs
n'aspirent pas à l'autonomie.
Dans les années 75-80 surtout, des
débats avaient pris place à propos
de la question, centrale pour
certains chercheurs, de savoir si
ces NFOT représentaient une
rupture vis-à-vis de l'organisation
scientifique du travail classique
(et de la dichotomie, comme dit
G. Friedmann, entre conception et
exécution) ou si, au contraire, il ne
s'agissait que de "néo-taylorisme".
Une interrogation analogue peut
être posée aujourd'hui. Le mouvement en faveur de pratiques plus
participatives peut aussi être
évalué à l'aune des modifications
des pouvoirs, de leur répartition
dans l'entreprise, ou pour certains,
à l'aune de la diffusion de pratiques "démocratiques" de gestion.
Mais d'autres points de vue sont
possibles. Les remarques prudentes et très nuancées de J. Gautrat
sur le participatif peuvent être
rappelées ici: selon lui, "il est
impossible de porter un diagnostic
général en termes de gain et de
perte de pouvoir et d'avantage
pour l'un ou l'autre des partenaires (salariés/ employeurs)". Ce
qu'il constate, ce sont des
"résultats différenciés voire
diamétralement opposés" d'une
entreprise à une autre (3).
Soulignons en outre qu'il convient
de ne pas surestimer le caractère
"nouveau" des pratiques. Très
souvent dans les cas concrets
d'entreprises, des pratiques plus
ou moins formalisées de
participation, d'échange et de
circulation d'information existent
depuis longtemps. La démarche
actuelle doit donc être dans
certains cas comprise comme une
démarche de formalisation et de
systématisation plus que comme
une démarche d'introduction de
pratiques entièrement nouvelles.
3) L'hypothèse du caractère
souhaitable de la participation est
largement partagée
Ce qui est peut-être le plus
frappant dans l'évolution actuelle
des discours, dans les "préconisations" des consultants, et dans
la littérature du management,
c'est l'acceptation générale (4) de
l'hypothèse du caractère bénéfique, souhaitable, efficace, de la
participation des salariés au
regard de la productitivé et de la
compétitivité des entreprises,
aussi bien que de la qualité.
Ceci n'empêche pas que cette
hypothèse n'est en général pas
vérifiée par des évaluations. La
plupart des dirigeants ne veulent
pas (ou ne savent pas) mesurer les
effets de leur politique en matière
de gestion participative (5)
Un accord majoritaire sur
l'hypothèse est presque réalisé
entre les employeurs (et leurs
organismes représentatifs), et les
syndicats (6).
Ce constat va de pair avec celui
d'une modification (dont il n'est
RECHERCHES ET PREVISIONS n°16
4
pas prouvé qu'elle sera durable)
des positions syndicales concernant la légitimité de l'entreprise
et du patronat et une modification
des conditions de la remise en
cause, traditionnelle en France,
du système économique capitaliste.
Il semble également que ce
consensus ait des effets en matière
de recherche, ce qui ne veut pas
dire que l'unanimité règne, en
particulier dans les motivations
des différentes positions sur le
management participatif.
Dans la fin des années 70, les
thèmes qui sont sous-jacents au
participatif (1) étaient plutôt issus
des revendications syndicales et
des mouvements sociaux. Les
employeurs, à travers une
certaine remise en cause du
"taylorisme", prenaient en
compte, dans certains secteurs,
cette donnée. L'enjeu semblait
être principalement situé en
termes de pouvoir des opérateurs
sur leurs conditions de travail (et
éventuellement son contenu) à des
fins d'augmentation de la
satisfaction ou de réduction des
motifs de mécontentement.
Dans les programmes syndicaux
ou politiques, de l'autre côté, la
participation, au niveau de la
production quoLidienne, était
conçue, dans le modèle autogestionnaire, comme devant
s'articuler avec un projet
d'autogestion globale de la société
Toutefois, ce mouvement n'a pas
pris l'ampleur de celui d'aujourd'hui. Le consensus anli-OST
n'était semble-t-il que beaucoup
plus superficiel.
A cette époque, les organismes
patronaux et les directions ne
s'occupaient pas explicitement de
la question du "participa tir'.
A l'inverse, aujourd'hui on observe
une quasi-unanimité patronale
alors que certains syndicats sont
restés, au moins au niveau des
positions nationales, hostiles pour
des raisons idéologiques.
Mais le consensus du côté des
employeurs ne repose pas sur un
projet démocratique ou de partage
de pouvoir, et là est la grande
différence; il repose sur une
logique d'efficacité. C'est parce
que la combinaison productive
peut être améliorée en lui
"injectant" une dimension d'organisation participative que les
experts en management développent et amplifient ce mouvement.
C'est la raison pour laquelle il ne
faut pas surestimer la solidité d'un
accord majoritaire de partenaires
qui ont des analyses et objectifs
différents. C'est aussi la raison qui
explique que le développement de
pratiques participatives l'l'a
aucune chance de se substituer au
dialogue avec les syndicats et les
représentants du personnel.
Les points principaux de l'hypothèse qui recueille l'avis favorable
dominant concernent à la fois la
recherche de la qualité, la place
donnée à la mobilisation des
salariés et le rôle dévolu à une
meilleure formation et une
meilleure motivation pour que
l'entreprise soit en mesure de
dépasser ses concurrents et de
servir ses clients
4) Une spécificité française ?
Une telle extension ct transformation du contexte autour de la
question de participatif semble
comporter des dimensions spécifiquement françaises Même s'il ne
faut pas les surévaluer.
La synthèse réa 1isée pour le
rapport Sudreau, au milieu des
années 70, distinguo~ il le système
des "relations professionnelles"
françaises des modèles de l'Europe
du Nord pour la raison essentielle
que les principaux syndicats
français refusaient le consensus et
RECHERCHES ET PREVISIONS n•t6
5
(1) On ne parle pas ici de la
participation au sens
gaulhste.
Ol Cf. K. Sug1ta, La
part1cipat10n et l'orgamsation de l'entrepnse au
Japon (Laboratoire d'anthropologie urbaine, CNRS,
aolit
1988>
et
J.E. Neumann, The development of participative
deciswn-makmg in the US
entreprises, Tav1stock
lnstitute(septembre 1988).
(2) Employé ici comme
synonyme des différentes
formes de l'OST.
(3) Cf. Drucker, Gelimer,
Savaii, Dalle.
(4) A cet égard, il esl
intéressant de comparer le
discours des années 60 sur
la désaffectiOn V1s-à-v1s du
travail
au
discours
contemporain. D. Lmhart
(dans L'appel de la sirène l
avait
Insisté
sur
l'ImplicatiOn et le vécu au
travaiL
la forme de la société.
Au milieu des années 80 et
presque au seuil de 90, le paysage
a été profondément modifié : la
CFDT
a
introduit
la
reconnaissance de la légitimité de
plusieurs logiques au sein de
l'entreprise (dont celle de
l'entrepreneur); la CGT, quant à
elle, si elle n'a pas rompu avec le
discours confédéral qui refuse
l'implication dans la "gestion de la
crise", se trouve appliquer sur le
terrain des schémas souvent
contrastés.
Plus généralement, à la faveur de
la mise en place des lois Auroux,
des développements de la crise et
du contexte nouveau créé par le
changement de majorité en 1981,
il n'est pas interdit de penser que
dans les entreprises la pratique
du consensus local s'est
développée.
L'hypothèse est donc que le
développement des formules
participa ti v es
trouverait
actuellement un écho d'autant
plus favorable en France que le
paysage des relations industrielles
a subi une grande transformation.
Des travaux étrangers, portant
sur les USA et le Japon, montrent
toutefois des enseignements
communs (1).
5) Pourquoi aujourd'hui ?
Une fois établi que "le
participatir' connaît aujourd'hui
une extension large et qui s'appuie
sur une modification du contexte
des relations sociales dans les
entreprises, on peut recenser
rapidement les explications les
plus couramment admises qui
servent de justifications à ce
développement et à l'intérêt que
suscite le thème.
Ces explications sont à replacer
dans le cadre de la cri tig ue
récurrente du taylorisme (2).
Rappelons que,
d'une façon
générale, les réflexions et
recherches en sociologie de
l'entreprise et des organisations
ont établi progressivement depuis
les années 50 et surtout 60 la
pauvreté du modèle d'explication
et d'organisation taylorien.
Quelques auteurs en littérature
managériale ont également
articulé une première série
d'analyses visant à reconnaître
l'importance de la participation et
de l'autonomie des collectifs de
travail (3), dès les années
1960/1970.
Les bases de cette analyse critique
de l'organisation taylorienne
traditionnelle (on y reviendra, cf.
partie Il) étaient donc largement
posées
Dans le contexte de "l'antitaylorisme" contemporain, trois
grands groupes de justifications
sont invoqués pour fonder la
nécessité du management
participatif, qui renouvellent cette
approche:
. les effets d'une concurrence
exacerbée sont mis en avant, qu'il
s'agisse de la concurrence internationale ou nationale sur la
qualité et le contrôle des coûts,
mais aussi sur la flexibilité;
. la complexité des processus de
production et la diffusion des
technologies nouvelles constituent
la seconde grande fa mi Ile de
justifications du participatif. Seuls
des hommes capables d'initiative
et d'implication peuvent gérer
cette complexité. La souplesse
d'adaptation est également
invoquée dans le même sens;
. enfin , 1es as pi rations des
salariés, liées à leur niveau de
formation générale et aux
évolutions sociales dans leur
ensemble sont en général
analysées comme constituant une
nouvelle attitude dominante vis-àvis du travail : exigence d'un
travail intéressant, motivant(4).
IŒCHERCHES ET PREVISIONS n°16
6
Le nouveau (ou du moins supposé
tel) rôle que doivent jouer dans
cette conception les ressources
humaines est présenté souvent
comme la condition sine qua non
(parfois dans des conditions de
survie) face à l'ensemble de ces
défis.
C'est aussi, et tout particulièrement dans les entreprises qui ne
sont pas en situation de
concurrence, une des conditions de
l'édification (ou la consolidation)
d'une légitimité sociale En ce
sens, pour les organismes de
service public (qui ne sont pas tous
indifférents à des substituts
possibles de l'offre de services) la
modernisation du management
par intégration de dimension
participative est souvent présentée comme devant à la fois fournir
un service de meilleure qualité et
légitimer la gestion publique ou
parapublique du service en
question (1).
Dans ce secteur, la question est
posée dans le contexte général de
la rigueur budgétaire et certaines
des spécificités de gestion du
public par rapport au privé ont
tendance à s'estomper
Ces justificatifs aboutissent à une
sene de nouvelles vertus
cardinales de management (2) qui
sont:
-la souplesse et la vitesse de
réaction;
-la flexibilité;
-la fluidité;
- la qualité;
-l'intégration;
- l'ouverture.
Et, comme le dit le même auteur,
toute cette "révolution managériale" pourrait se résumer à une
(re)découverte du facteur humain
dans l'entreprise.
* *
*
Les éléments partiels ci-dessus
rassemblés militent donc pour
l'hypothèse .
-d'une généralisation de la
reconnaissance (plus ou moins
nouvelle, plus ou moins
formalisée) du rôle du facteur
humain dans l'entreprise et qui
semble dépasser largement les
précédents mouvements managériaux (école des relations
humaines, critiques des années
70),
-de son articulation avec des
nécessités cl justifications directement reliées au processus de
production et de concurrence
(alors qu'il s'agissait plus d'une
exigence de "démocratie" dans les
années 70),
-de sa mise en œuvre extensive
dans des démarches pratiques
variées dans les entreprises
Pourtant, au regard des enseignements tirés dans l'histoire
récente des pratiques de management, il convient d'être
circonspect sur le caractère
durable et sur l'impact en
profondeur de telles évolutions.
On rappellera en effet quelques
points importants:
-Comme il a été souligné au début
de ce texte, les pratiques de
management sont influencées
dans leur conception, dans les
modalités de leur diffusion, par les
phénomènes de mode. Il n'est donc
pas exclu que la remise en cause
des anciens modèles, même si on
l'observe plus générale et plus
conséquente que dans les années
70, soit éphémère (3).
-Ce phénomène s'illustre dans le
cas de bilans de certaines
expériences qui connaissent, après
des démarrages très prometteurs,
un essoufflement après une
confiance presque magique dans
les résultats.
Plus globalement, on peut méditer
la relativité des techniques qui
RECHERCHES ET PREVISIONS n"l6
7
( 1) Cf. pour exemple
R. Luufer et A. Burland,
Management public.
<2l Selon l'expreSblun de
P. Lorano "Les systèmes
socw-économ 1q ues : une
nouvelle m1cro-économie
<Revue d'économie industnelle, 4ètrlmestre 1987).
(3) La c1tat10n swvante, de
P. Drucker, est mtéressante
pour relativiser les choses.
"Dans chaque entrepnse,
chaque emploi dn1t être
orienté en fonct1on des
objectifs de l'entreprise
comme totalité( ... ). Le
manager doit connaltre et
comprendre ce que les
objectifs de l'entrepnse
ex1gent de lm en termes de
performances, et son
supéneur d01t sav01r quelle
contribution lui demander
et attendre de lm;
1! d01t l'évaluer de ce pomt
de vue ( ... ) chaque
travailleur, du haut en bas
de la h1érarch1e, a besoin
d'objectifs claarement
défims" in The practice of
management, London,
Hememann 1955, p. 23.
concourent à la régulation des
grandes organisations el en
particulier des entreprises· en
toul étal de cause, il ne faut pas
attendre des pratiques plus que ce
qu'elles peuvent produire. La
reconnaissance du facteur
humain, de ses aspects socioorganisationnels et de la dimension participative doit de toute
façon être remplacée dans la
nécessité toujours renouvelée
d'outils de régulation qui peuvent,
à des époques différentes, prendre
des formes changeantes.
* *
*
Certa1ns vont JUsqu'à
parler de "mutatiOn du
management", Cf. J .C.
Fauvet "Mutation du
management" (Entrepnse
moderne d'éd1t1on).
(1)
Si l'on replace le phénomène
contemporain de changement du
management (1) dans l'évolution
des techniques de gestion des
entreprises on peut remarquer
trois points communs .
1) au moins dans les discours,
mais aussi dans les produits qui
sont proposés par les consultants,
on observe une utilisation
nouvelle de connaissances venues
de la sphère des sciences sociales
et qui sont déjà anciennes;
2) les objectifs productifs, commerciaux et financiers sont censés
pouvoir être atteints de façon plus
efficace grâce à une intégration de
connaissances qui n'étaient pas,
jusqu'alors, considérées comme
pertinentes (ou du moins, essentielles). Il s'agit de connaissances
générales et théoriques (issues de
la recherche en sociologie du
travail, des organisations, éventuellement en ergonomie) mais
aussi de connaissances locales el
empiriques sur les acteurs directs
du changement dans l'entreprise
qui cherche à modifier sa gestion
des ressources humaines (étude
des caractéristiques, des comportements, des attentes des différentes catégories de personnel) et
ses systèmes productifs.
3) le levier qui est considéré en
général comme pertinent pour
aboutir au changement vers une
meilleure efficacité productive, est
celui de la mobilisation des
personnels (individuelle, colleelive) avec, parfois, le recours à une
dimension "idéologique" instrumentalisée (valeurs, culture
d'entreprise)
La démarche de mise en œuvre
pratique est bien résumée dans les
trois phases classiques de l'intervention
des
sociétés
de
consultants
a) analyse de l'existant: quelle est
la culture? Quelles sont les
cultures, les groupes d'acteurs
pertinents, les contraintes, les
dysfonctionnements, les exigences
de qualité? etc (analyse menée de
façon plus ou moins participative
selon les écoles),
b) utilisation de la connaissance
de cette réalité locale pour définir
des
plans, des objectifs
hiérarchisés et discutés, déclinés
par services ct unités de base;
c) mise en œuvre des objectifs par
des actions appropriées et éventuellement, suivi-évaluation des
résultats obtenus.
Nous allons revenir sur ces
différents points pour comprendre
ce qui est en jeu dans l'extension
des méthodes participatives de
gestion
1) Utilisation nouvelle de
connaissances déjà anciennes
Que
les
spécialistes
de
RECHERCHES ET PREVISIONS n"l6
8
management et les praticiens en
tirent ou non tou tes les
conséquences, il est possible
d'inférer des débats et pratiques
actuelles qu'ils sont en train de
"découvrir" et d'utiliser des
apports des sciences sociales
(économie, sociologie du travail,
des organisations). Ce constat est
cohérent avec la complexification
de la gestion et le développement
des "investissements immatériels"
en matière d'organisation. Cela
dénote aussi un projet managérial
d'intégrer le fonctionnement réel
(donc informe) dans les données de
la gestion de la production.
a) La prise en compte des facteurs
socio-organisationnels pour orienter la pratique (et parmi eux, au
tout premier plan le "facteur
humain") peut s'analyser comme
un élément parmi d'autres du
développement des "activités de
laboratoire" et de modification du
contenu de la gestion ( 1).
Les praticiens prendraient le
temps de la réflexion et du recul
critique; la gestion et la réflexion
sur la gestion seraient alors
reconnues comme un facteur
déterminant dans le succès
empirique de telle ou telle
entreprise (2).
b) Il existe donc désormais une
volonté managériale de connaître
et d'infléchir, au mieux des
objectifs productifs, le fonctionnement réel des collectifs de
travail, en dépassant le modèle
taylorien classique, universellement considéré comme pauvre
dans
la
circulation
de
l'information, créateur de
dysfonctionnements, etc.
A la différence des critiques
managériales du milieu des
années 1970, le taylorisme semble
être remis en cause dans toutes ses
applications, pour tous les types
d'entreprise.
Notons toutefois que la volonté de
connaître le fonctionnement réel
des collectifs de travail se heurte
pourtant à une difficulté centrale :
si tous s'accordent à considérer
que le fonctionnement informel
(donc non formalisé par des
procédures, des règles explicites)
doit être pris en compte et
distingué du fonctionnement
prescrit, les modèles explicatifs de
l'entreprise sont divers et parfois
contradictoires. En d'autres
termes, l'affichage du projet
managérial n'entraîne pas pour
autant qu'il s'accompagne de la
réunion des moyens de connaissance appropriés (persistance de
modèles de causalité simple).
La prévision, la connaissance et
l'évaluation des effets des démarches de management participatif
en sont d'autant plus complexes à
cerner. Ceci est vrai autant si on
se place du point de vue des cadres
dirigeants que du point de vue des
autres acteurs de l'entreprise
(syndicats, représentants du
personnel, groupes pertinents au
sein du personnel, etc.). Il paraît
en effet assez simple de mesurer le
fait d'avoir atteint un objectif si
cet objectif peut être quantifié;
mais c'est loin d'être toujours le
cas (par exemple : comment mesurer l'amélioration des relations
internes dans les collectifs du
travail?). En outre, quand bien
même on se trouve dans le cas d'un
objectif qui a pu être quantifié,
autre chose est d'objectiver et de
mesurer le coût du participatif et
d'en évaluer les gains.
c) L'accent est, enfin, mis de façon
inédite et généralisée sur la
nécessité de l'implication expresse
des personnels dans la production,
cette implication devant être mise
au service de la plus grande
efficacité productive.
Là encore, il est possible de
remarquer que la question de
l'implication n'est pas nouvelle.
RECHERCHES ET PREVISIONS n•Is
9
( 1 l Cf. Barcet; La montée
des services. CEDES Lyon.
(2) Cf. Laganier, op Cite.
Cf. par exemple le:,;
travaux de D. Linhart,
G. Mendel, C. Dejours.
(2) Cf. par exemple J
Gautrat.
(3) Le praticien du management peut, pour sa part,
dénier l'utilité de cette
réflexiOn, pour autant que le
succès de sa prattque est
constant.
(4) VOir, dans la bibliographie, les références des
travaux de D. Ltnhart,
J. D. Raynaud, J. Gautrat,
R. Sainsauheu, D. Martin,
Ph. Bernoux, M. Crozter; les
numéros de la Revue
françaiSe de gestiOn et les
nombreuses références de
manuels de management.
(1)
Des travaux, tant du point de vue
de la sociologie que de la
psychologie et de l'ergonomie ont
mis depuis plusieurs années en
lumière le fait que, quels que
soient la tâche et son contenu,
l'opérateur investit une part de ses
affects et intègre dans sa démarche productive un jugement sur
les résultats effectifs de son
travail (1). Des sociologues et des
auteurs divers ont depuis
longtemps montré que sans implication prsonnelle des exécutants,
la plupart des activités productives seraient impossibles. Certains soutiennent même que,
contrairement à l'idée la plus
répandue, un consensus de fait sur
les finalités productives est généralisé, à l'exception des périodes
de conflits sociaux (2).
Ce qui semble nouveau cependant,
c'est le souci de faire en sorte que
l'implication - la "mobilisation" non seulement aille dans le sens
de la réalisation d'objectifs plus
élevés mais qu'elle soit active,
consciente et explicite.
Là encore, les managers se
heurtent à une difficulté·
comment mettre en œuvre des
techniques d'implication des
personnels, comment surtout faire
en sorte de déclencher des comportements ou de les infléchir, de
façon durable et efficace?
2)Enjeux
11 est assez aisé de cerner le projet
du management contemporain et
de constater son souci naissant
d'investir dans des connaissances
et des démarches auxquelles il
était en partie étranger parce que
principalement axé sur des
recettes empiriques immédiates
Il est beaucoup plus complexe de
comprendre à la fois :
- le sens de ce changement au sein
de l'entreprise;
- et les chances de performances
des nouvelles pratiques sur la
durée
Cela suppose de confronter entre
eux les différents modèles
explicatifs du fonctionnement de
l'entreprise et d'en tester la
validité ... (3). Il n'est pas dans les
limites de cet article de réaliser
cette tâche -En revanche il n'est
pas interdit de schématiser le
paysage-. En première approximation, on peut aujourd'hui
repérer trois familles d'explications (4):
a) La première famille rassemble
les auteurs, le plus souvent gestionnaires, parfois très célèbres,
qui utilisent un modèle de
causalité des comportements
simple. Partan' du principe qu'il
existe chez les acteurs au travail
des trésors de motivation, de
dynamisme et d'initiative qui sont
mal employés ou détournés à des
fins non utiles à l'entreprise, ce
modèle propose d'introduire des
méthodologies et des pratiques qui
sont censées bouleverser de fond
en comble le fonctionnement et les
résultats productifs et financiers.
La question est donc, pour eux,
d'appliquer la bonne méthode,
pour libérer la performance et la
satisfaction au travail dans un
même élan. Ces auteurs ne
s'attardent pas sur les déterminants divers des comportements et
l'environnement de l'entreprise.
Ils postulent que la dynamique de
participation motivante lancée
selon les méthodes appropriées
doit mécaniquement produire plus
d'efficacité. Les méthodes font
l'objet de produits "package"
facilement implantables.
b) La seconde famille regroupe
des auteurs de sociologie qui sont
très critiques à propos des évolutions récentes.
La thèse la plus commune consiste
à comprendre les initiatives
managériales actuelles comme
HECIIEKCHES ET PREVISIONS 11°16
10
autant de stratégies pour
impliquer, à leur insu ou malgré
eux, les acteurs de l'entreprise (et
en particulier le personnel
traditionnellement rangé dans la
catégorie des "exécutants"); selon
cette thèse, l'enjeu serait de
provoquer des comportements
unilatéralement favorables à la
hiérarchie (ceux d'en haut) et
orientés uniquement vers plus
d'efficacité productive. Il s'agirait
de récupérer, au service exclusif
des directions, les logiques de
régulation informelles qui
n'étaient pas accessibles dans
l'organisation traditionnelle d'inspiration taylorienne.
Cette analyse fait aussi écho à
certaines analyses syndicales qui
voient l'implication des salariés
dans la gestion quotidienne
comme contradictoire avec la
défense de leurs intérêts. Cette
analyse pose clairement la
question des relations entre la
gestion participative et le rôle des
syndicats et des organes de
représentation du personnel. Elle
a souvent mis en lumière le
constat de certaines pratiques
d'entreprise où les initiatives de la
direction en matière de participation se fixaient ouvertement
une visée antisyndicale. Ces
auteurs, en définitive, privilégient
donc le côté "machine de guerre
antisyndicale" du management
participatif.
Toutes ces positions ont aussi en
commun, en dernière instance, de
privilégier, dans leur modèle
d'explication de l'entreprise, la
dimension conflictuelle qu'elles
mettent au centre de leur
préoccupation, laissant de côté le
constat empirique de la
coopération qui aboutit à la
production. Elles ont également
en commun de séparer, comme
antagonistes, les fonctionnements
informels, qui seraient le fait des
exécutants, des fonctionnements
formels recherchés par la logique
de contrôle des hiérarchies et des
directions.
Dans cette optique, le management participatif verrait, du
point de vue des salariés de la
production, les limites de leur zone
d'autonomie reculer dangereusement.
c) Un troisième groupe de
réflexions se tient à distance des
deux précédents qui, chacun à leur
manière, privilégient un modèle
univoque d'explication des
comportements (la première : la
motivation participative produit
la performance; la seconde : le
projet du management produit le
recul des défenses des salariés
contre l'organisation à leurs
dépens).
Cette troisième famille d'explications met l'accent, à la suite de
Crozier, sur les contingences
organisationnelles: en opposition
avec le postulat taylorien du "one
best way", elle met en évidence
que les logiques d'organisation de
la production, des technologies et
des rapports sociaux produisent
des situations dont la résultante
est à chaque fois particulière à une
configuration donnée d'entreprise
ou de collectif du travail.
Logiques informelles et logiques
formelles sont alors prises en
compte, qui font l'objet de
négociations au niveau des
collectifs de travail. Ces collectifs,
au plus près de la production
quotidienne se saisissent des
marges de pouvoir induites par la
remise en cause de la logique
taylorienne classique. Une
démarche de gestion qui se
contente de démarquer idéologiquement le projet paternaliste
ancien (1) (y compris dans la
diffusion d'une culture et de
valeurs décidées unilatéralement
par la direction et l'encadrement)
RECHERCHES ET PREVISIONS n"l6
11
Cf., à ce propos, la
remarque de M. Croz1er in
"Etat modeste,
état
moderne" : "Les hommes
d'affaires qui découvrent
actuellement l'importance
de la culture d'entreprise
réclament qu'on les aide à la
transformer pour pouvoir
s'appuyer sur une "bonne
culture". Les plus naifs
d'entre eux souhaitent
créer, par des déc1sions et un
programme
d'actiOn
ra•sonné, une culture de
consensus et d'harmome.
Comment ne vo1ent-ils pas
qu'ils sont en passe de
susciter les mêmes réact1ons
de résistance que les
politiques? De quel droit
entendent-ils mtervemr
amsi dans la v1e de leurs
employés ?"!p. 311 ).
( 1)
sans remettre en cause la réalité
quotidienne des tâches est alors
vue comme sans lendemain : la
mobilisation, au mieux, de
certains secteurs d'élite de l'entreprise prélude à l'essoufflement
d'une démarche qui ne parvient
pas à s'intégrer techniquement
dans le système de gestion. Et les
espoirs naïfs de fondre dans un
seul élan les initiatives de tous se
heurtent au caractère superficiel
de la refonte de l'organisation,
participative seulement en surface, ou uniquement "idéologique"
par la diffusion de discours et de
valeurs qui ne sont pas profondément articulés avec le vécu des
salariés ( 1).
En revanche, la démarche
participative qui admet de
reconnaître effectivement, dans
les procédures explicites et
reconnues de travail, l'apport des
collectifs, peut, dans le cas où les
facteurs favorables sont réunis,
produire un nouvel équilibre de la
participation et du pouvoir des
collectifs sur leur activité.
* *
*
Cf. Midler, Amado
(références
dans
la
bibliographie).
(2) Cf. "Le Châtelier,
introducteur de l'OST en
France (cf. par exemple "Le
rôle du bons sens dans
l'organisation du travail.
Revue économique internatiOnale, 1928).
(1)
En définitive, l'évolution actuelle
vers un management pl us
participatif ne semble ni porteuse
d'effets mirifiques et magiques en
termes de productivité et d'efficacité au travail, ni productrice
d'effets négatifs unilatéraux pour
les salariés
Encore une fois, la réflexion sur le
modèle t.aylorien d'organisation
devrait. inciter, à cet. égard, à
beaucoup de circonspection. Il
suffit de relire aujourd'hui les
prédictions opposées auxquelles sa
mise en place a donné lieu dans les
années 1930. Enthousiasme d'un
côté de la part de ceux (2) qui y
voyaient l'achèvement de la
régulation mécanique du travail,
le travailleur étant désormais à la
fois déterminé par une division
scientifique des tâches et libéré
d'avoir à penser; prédictions
sombres de l'autre côté, de la part
de ceux qui y décelaient l'asservissement. de l'homme au travail
transformé en appendice de la
machine.
Dans les faits, l'OST n'est jamais
parvenue, même au prix d'une
parcellisation et. d'une spécialisation systématique, à exclure
l'apport décisif du travail humain:
toutes les études de sociologie du
travail et d'ergonomie ont prouvé
que les systèmes de travail
apparemment les plus automatisés et parcellisés ne fonctionnaient. que grâce à l'intervention
intelligente des salariés apparemment totalement déqualifiés; aussi
faible fût-elle, elle a toujours été
décisive.
C'est pourquoi il est possible de
mettre en doute le modèle
simpliste du contrôle idéologique
des opérateurs de base, qu'il
vienne du côté des partisans
managériaux, des méthodes toutes
faites, ou, à l'inverse, du côté des
critiques pessimistes qui prédisent.
la manipulation ou l'embrigadement des mêmes opérateurs.
La mise en place de démarches
participatives reste, au fond, une
opération délicate qui doit tenir
compte d'un bilan des ressources
et. des attentes des différentes
parties prenantes, des cul tu res
d'entreprises existantes, des
marges de manœuvre et des
contraintes existantes. Elle ne
peut. déboucher sur des innovations durables que si les
systèmes cie gestion intègrent. en
profondeur une nouvelle logique.
Paradoxalement, le succès passe
peut-être par l'essouffiement ou la
banalisation de procédures participatives qui, un temps, ont. été
vues comme étonnantes, mais qui,
RECHERCHES ET PREVISIONS n•l6
12
quand elles réussissent, passent
alors dans la culture quotidienne
devenue "naturelle". Enfin, la
modification des modes de gestion
et de régulation est bien sûr
déterminée par le contexte social
el économique dans lequel elle
opère.
Au terme de celle brève
évaluation de l'étendue des
pratiques de gestion participative,
de leur diffusion idéologique el
après en avoir situé schématiquement les enjeux, il est possible de réfléchir aux conditions
empiriques de leur efficacité el à
leurs limites.
Avec le recul de plusieurs années
de mise en œuvre de pratiques
participa li v es, le temps des
illusions naïves est passé, ce qui
n'exclut pas la persistance de
discours très unilatéraux dans la
littérature managériale el chez
certains consultants Le discours
dominant semble cependant
prendre en compte désormais le
caractère éphémère et superficiel
de nombreuses expériences (le
passage des cercles de qualité à la
démarche qualité totale intégrée
en est un signe (1)).
Cette réflexion doit toutefois être
tempérée par une interrogation :
le caractère superficiel ou éphémère de certaines pratiques n'est
considéré comme un échec qu'au
regard des objectifs explicites
d'amélioration de la qualité, des
conditions de travail, de la
productivité.
Il ne faut pas exclure pourtant la
prise en compte d'objectifs non
formalisés et implicites qui
peuvent exister dans la mise en
œuvre des stratégies du participatif (rapports de pouvoir au sein
de l'entreprise entre dirigeants,
positions slra légiques re la ti v es
des différents départements, logiques de développement du marché
du conseil)
C'est pourquoi, avant de dessiner
ce que peuvent être les facteurs
favorables à la réussite du
management participatif, il faut
d'abord s'interroger sur la notion
même de réussite.
1) Evaluer les effets positifs ?
Trois questions se posent pour
l'évaluation des politiques d'innovation participative, qui ont trait
à la quantification de la mesure, à
la prise en compte de points de vue
divers, au champ temporel
concerné Dans l'optique adoptée
ici, il ne s'agil pas de se poser la
question d'une évaluation sociale
globale et l'on se limitera à une
optique microsociale. On peut
d'ailleurs se demander si une telle
évaluation synthétique est possible: cette question, à certains
égards, est analogue à celle de
l'évaluation des conditions de
travail
* La mesure des effets suppose la
construction d'indicateurs pertinents. Certains indicateurs traditionnels sont facilement quantifiables (productivité immédiate du
travail, résultats financiers); en
revanche des effets comme
l'amélioration des relations au
sein de l'entreprise, des effets de
reconnaissance (2) semblent
beaucoup plus difficiles à
quantifier.
La question qui se pose en outre
est celle de la possibilité éventuelle d'objectiver un lien de causalité
simple entre des gains et des coûts
ou de dégager des corrélations
entre certains types de systèmes
RECHERCHES ET PREVISIONS n•l6
13
ll) Cf. La pratique de la
qualité totale en milieu
admimstratif. H. Mesure et
G. Trepo (cahiers de
recherche HEC- 19881
(2) Cf. les travaux de J.
Gautrat.
( 1) C'est l'un des objectifs de
la recherche dirtgée par
R. Sainsauheu <Développement économique et social
de l'entrepnse) au LSCI.
(2) L'évaluation
des
conditions de travail, qui a
tendance à reculer dans les
préoccupations
des
gestionnaires, à la faveur
des démarches "qualité",
n'en reste pas indispensable
(cf. l'exemple des cercles de
qualité
en
milieu
hospira her ).
de gestion el des performances
productives (1 ).
Se pose en outre la question des
effets globaux au sein de
l'entreprise où des effets positifs
ponctuels peuvent être acquis au
prix d'effets négatifs dans d'autres
secteurs.
La mesure des effets pose donc de
grandes difficultés méthodologiques
*Une prise en compte cohérente
des effets doit ensuite intégrer
plusieurs points de vue· celui
d'abord de la "logique productive"
qui se pose en termes de
productivité, des coûts analytiques, d'évolution des écarts
objectifs/réalisations; celui ensuite
de la gestion des ressources
humaines, qu'il soit abordé du
point de vue subjectif des salariés
eux-mêmes (2), ou du point de vue
des conditions de cette gestion par
les services concernés (conflits,
turnover, style de travail, etc.); en
outre, on ne peut écarter les
éléments qui ressortissent au
système d'interactions entre
l'entreprise et ses clients
(appréciation comparative de la
qualité; cc dernier point semble
très important dès qu'il s'agit
d'une démarche participative dans
le secteur des services)
Enfin se pose, de façon
déterminante, la question du
champ temporel dans lequel la
mesure est envisagée, la définition
précise des conditions de l'avant
et de l'après, l'observation sur
une période plus ou moins longue.
Ces remarques préliminaires
servent à relativiser les
nombreuses relations journalistiques d'expériences qui se résument souvent à un seul argument:
une augmentation spectaculaire
de la productivité immédiate du
travail d'un microsecteur de
l'entreprise mesuré sur une très
courte période. Une telle approche
ne peul qu'être décevante el sans
grand intérêt. Des objectifs
multiples, situés dans le temps
sont d'abord à repérer et définir.
Ces difficultés méthodologiques
rappelées, peul-on dessiner
quelques-unes des conditions
générales d'efficience des systèmes participatifs el repérer
quelques points importants?
2) Conditions générales
Indépendamment des conditions
particulières à chaque entreprise
(spécificité locales, caractéristiques de l'organisation antérieure, engagement plus ou moins
important de la direction, rôle
particulier de l'encadrement, etc.)
on peut anticiper a priori les
conditions générales d'efficience
d'une démarche de changement
participatif:
a) Plus encore que dans la
démarche traditionnelle de
management, la pertinence/
validité des connaissances de
l'entreprise sur elle-même conditionne l'efficacité potentielle de la
démarche de changement. Les
managers, on l'a dit, sont alors
affrontés à une question, qui
jusque récemment, ne préoccupait
guère que les chercheurs :
comment fonctionne réellement
l'entreprise ? Le détour par une
réflexion sur les modèles
théoriques de la sociologie des
entreprises est donc indispensable. Le manager qui désire
mettre en place par exemple un
projet d'entreprise ne peut faire
l'économie d'une anticipation a
priori (qu'elle soit formulée ou
implicite) des effets de la
démarche qu'il va mettre en
œuvre. Remarquons à ce propos
que les fournisseurs de prestations
de conseil se gardent très souvent
d'expliciter le modèle théorique
qui sous-tend leur intervention.
b) La définition des objectifs précis
RECHERCHES ET PREVISIONS n°16
14
que l'on veut atteindre par une
démarche d'innovation de changement participatif sera inéluctablement vaine si les conraintes,
les marges de manœuvre et les
anticipations des jeux internes à
l'organisation, des ressources des
acteurs ne sont pas correctement
appréciés (1).
c) Le succès d'un processus
suppose encore que soient pris en
compte les facteurs externes qui
influencent les situations de
travail que l'on cherche à
modifier.
3) Des facteurs favorables
La pertinence des connaissances
de l'entreprise sur elle-même et
l'appréciation (par les dirigeants
ou les autres acteurs) des marges
du changement possible supposent
à la fois de rejeter les modèles clés
en main et de procéder à une
formalisation initiale de l'existant. Les principaux problèmes
rencontrés dans la démarche de
changement se transforment en
facteurs favorables s'ils sont.
évalués et surmontés.
*Le premier facteur favorable
semble être l'intégration des
systèmes participatifs dans le
fonctionnement ordinaire et
quotidien Les enseignements des
évaluations des démarches dans
les entreprises (2) sont tous
convergents pour estimer que,
dans les premiers temps une
démarche exceptionnelle ou
marginale par rapport aux
fonctions centrales de production
peut réussir et parfois de façon
spectaculaire. Le plus difficile
vient à la phase d'extension aussi
bien en profondeur (intégration
dans la "routine" des procédures)
et dans l'espace (généralisation à
toute l'entreprise). Pour être
cohérente, la démarche doit
imprégner progressivement l'ensemble du fonctionnement. et de
l'organisation. Sinon, elle reste
plaquée, extérieure et connaîtra
essouffiement et disparition.
L'essouffiement. toutefois ne peut.
pas être interprété unilatéralement : il peut être le symptôme
de la mort d'une expérience, greffe
qui ne prend pas. Il peut. être aussi
à l'inverse le signe que le
fonctionnement participatif est
entré dans les mœurs et que ses
effets visibles au début à cause de
la grande rupture face aux
procédures antérieures, sont
devenues désormais beaucoup
plus difficiles à percevoir, presque
"naturalisés".
La "routinisat.ion" et. l'extension à
l'ensemble de l'entreprise du
fonctionnement. participatif n'est
pas contradictoire avec le maintien d'une formalisation des procédures participatives (existence des
groupes, objectifs, reconnaissance
et traitement. de leurs travaux,
etc.) Les effets culturels modifient.
la façon de penser l'organisation
qui devient évolutive et intègre les
points de vue des participants {3).
*La seconde dimension à prendre
en compte est la durée. Là aussi
les enseignements des expériences
sont concordants. Le management.
qui monte "des coups", la gestion
"à l'impulsir', au-delà des effets de
choc, apparaissent. décevants
quand il faut gérer le quotidien et
ses contraintes de tous ordres.
La sociologie du travail et des
organisations enseigne depuis des
années qu'on ne change pas
l'entreprise en deux temps trois
mouvements. Les collectifs de
travail sont des systèmes
d'acteurs, avec leurs cultures,
leurs ressources, leurs stratégies.
Les enjeux sont sur le moyen
terme et non pas sur les six mois à
venir. Les manuels de management. sont pleins d'exemples à
ne pas suivre à cet égard.
Si une direction d'entreprise
RECHERCHES ET PREVISIONS n"l6
15
( 1) A cet égard, le problème
reste entier du cas
particulier
des
udmm1strat10ns et de leurs
contraintes de gestion
propres.
(2) Cf.
par
exemple
1''. Chevalier, C. Midler.
(3) Dans de nombreux
secteurs ce souc1 d'intégrer
les pomts de vue des acteurs
est devenu mdispensable;
on ne peut par exemple
concevoir une ergonomie
des log1c1els sans recours
ldu po1nt de vue de
l'opérateur de base).
Entreprtse et Progrès.
EnJeux d'une pollt1que
socuile, souplesse et
cohérence, ma1 1988.
(2) Cf. Rapport R1boud.
(1)
s'engage dans une démarche
participative, elle devra tenir sur
la durée pour prouver la crédibilité de son projet d'ensemble. Ce
qui suppose l'acceptation d'un coût
humain d'engagement et une
opération vérité (comme dit
"Entreprise et Progrès", il y a
besoin de "mettre en accord les
discours et les actes" (1), de
rompre avec le secret et la
rétention de l'information).
*Le troisième facteur favorable
tient à l'impulsion et l'engagement mis par la direction et
l'encadrement dans son ensemble
Le projet d'entreprise n'existerait
pas sans chef charismatique,
prétendent certains, mais les
entreprises ne sont pas toutes
dirigées par des stars médiatiques;
plus sérieusement, la littérature
managériale a pointé l'écueil
important que peut être l'absence
d'engagement de l'encadrement
intermédiaire, ainsi que les
fréquentes différences de culture
entre les groupes de niveau
hiérarchique différents. Tel étatmajor est convaincu de l'utilité de
la démarche participative, mais
son encadrement n'en voit pas
l'intérêt. au contraire, il voit ce
qu'il a à perdre. D'où, là encore,
une double exigence : s'est-on
réellement donné les moyens de la
connaissance des attentes, des
cultures el des stratégies des
cadres el agents de maîtrise? A-ton pensé l'évolution du contenu
des fonctions et prévu les
formations adéquates? Le cas des
agents de maîtrise revient souvent
dans la catégorie des problèmes
quand il s'agit de rompre avec une
organisation classique taylorienne
* Le quatrième élément favorable
à la réussite des démarches
participatives semble être la capacité de l'entreprise à "rémunérer"
l'implication plus grande el la
responsabilisation qu'elle demande. La "rémunération" peut avoir
lieu sous plusieurs formes: intéressement individuel, intéressement collectif, amélioration des
conditions de travail, reconnaissance et formalisation explicites
des compétences, formation, intérêt des tâches en contenu, déplacements des équilibres de pouvoir,
etc.
La croyance naïve de certains
auteurs en management mise sur
l'utilisation unilatérale d'une
implication explicitement demandée, el éventuellement partagée
par le groupe : mais les expériences prouvent que l'absence de
résultats ressentis par le groupe
ou les individus, en termes de
rétribution, est corrélée avec la
désaffection. Dans ce cas, la mise
en place d'un système participatif
sera vite classée comme gadget
sans lendemain.
*Enfin, l'erreur souvent relevée
(2) est la confusion des fonctions
des systèmes participatifs pour la
gestion quotidienne avec celle des
institutions représentatives du
personnel. Certains dirigeants ont
cru voir dans les cercles de qualité
et la démarche de projet d'entreprise une façon d'écarter la
question syndicale, et les grandes
centrales ne se sont pas privées
d'épingler certaines pratiques. Les
dirigeants ont plutôt tendance à
voir dans la neutralité syndicale
(ou au mieux la participation à
l'expérience) une condition sine
qua non de la réussite. Bien que
les frontières ne sont pas toujours
tracées sans chevauchements, ce
qui relève du comité d'entreprise.
* *
*
En définitive, une démarche qui
n'est pas conçue comme devant
s'intégrer dans l'organisation
RECHERCHES ET PREVISIONS n•t6
16
quotidienne el concernent
l'entreprise dans son ensemble,
impliquant el rétribuant les
salariés qui auront été partie
prenante dès le début de la mise
en œuvre, a toutes les chances soit
d'échouer (el d'entraîner un retour
aux procédures antérieures), soit
de servir principalement de sujet
de discours pour l'extérieur et de
servir aussi, pour un lemps, à
calmer le stress de certains cadres
dirigeants.
Il s'avère effectivement impossible
de dire que la période actuelle
comporte véritablement une
mutation du management et que
le phénomène observé durera plus
longtemps qu'une mode, il y a peu
d'études el de recherches qui
fassent le point sur la diffusion et
les effets du management
participatif, peu d'évaluations
quantitatives, peu de mise en
rapport des innovations avec la
mesure de la qualité des produits,
la performance, mais aussi avec le
vécu des travailleurs.
Compte tenu du caractère récent
des pratiques el de la persistance
bien réelle de logiques layloriennes, mais aussi des obstacles à
la diffusion de ces nouvelles
formes de management, il est
beaucoup trop tôt pour dire si ce
mouvement porte en germe de
nouvelles formes d'exercice des
pouvoirs et de gestion des conflits,
un accroissement significatif dans
la coopération rationnelle en vue
de la production dans les entreprises. Ce qui est simplement
aujourd'hui flagrant c'est le
caractère non prouvé, dans les dix
dernières années de deux
prophéties qui ont la vie dure.
Celle d'abord selon laquelle
l'i mplanlation de nou ve Iles
méthodes de management des
hommes serait en mesure de
bouleverser radicalement les
conditions de la production. Celle,
ensuite, qui voit dans chaque
innovation managériale l'avatar
d'un projet sans cesse renaissant
de manipulation des salariés par
leurs dirigeants
RECHERCHES ET PREVISIONS n"l6
17
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