Dossier pédagogique Soudain la nuit Saccomano/ Garaud Service éducatif de la Maison de la Culture d’Amiens Sommaire Avant la représentation Pistes pour une exploitation en classe… L’espace 1/ Analyse de documents 2/ Un espace signifiant Entrer dans le texte 1/ Les personnages 2/ Situation, Lieu, Action Après la représentation L’écriture de la pièce 1/ Le titre 2/ Ecriture de plateau ? La scène finale : le radeau La nudité Annexe Textes en écho Distribution Liens Avant la représentation Pistes pour une exploitation en classe. L’espace 1/ Analyse de documents Voici deux croquis dessinés par Nathalie Garraud pour la pièce Soudain la nuit. - Décrivez le décor, les accessoires et évoquez l’effet produit sur un éventuel spectateur… - Expliquez l’évolution de l’espace entre le document A et le document B. Document A Document B 2/ Un espace signifiant Vous trouverez ici les notes du metteur en scène évoquant l’espace dans Soudain la nuit. On pourra proposer aux élèves de confronter leurs éléments de réponse aux intentions du metteur en scène… Document C Eléments du dispositif scénographique : - Un mur de métal en 5 à 7 pans - 100 à 200 chaises - Oreillers PARTIE 1 - VENUS Vénus est le nom du désir, Vénus est une déesse (Aphrodite) née de l’émasculation d’Ouranos (le Ciel de l’aviation) par Cronos (le temps). Vénus est la séquence de l’arrêt, de l’enfermement, de l’observation, de l’auscultation. Violence de l’arrêt ordonné, obligatoire, qui réveille la peur, les désirs inconscients… L’espace est travaillé selon l’idée d’une machine dont la marche est arrêtée, et dont on verrait le mécanisme (…) L’espace concret, matériel doit accentuer l’architecture du système, ses traits, il révèle un certain « ordre » (habituellement camouflé ou adouci) : un mur qui clôt l’espace, des rangées de chaises ordonnées implacablement. Ordre, nombre et solitude. Les dizaines de chaises sont ordonnées face au mur, dos au public. La foule est présente dans la masse de chaises, restées vides, et dans la salle. Acteurs et spectateurs sont face au mur. Les acteurs sont perdus dans la multitude de chaises alignées. Ils errent dans cet espace, extirpés du flux, retirés de la circulation, isolés (les lapins pris dans les phares). Mais ils n’en bouleversent pas l’ordre, ils y restent soumis, terrifiés mais soumis. (…) Les écrans sont ici des écrans de contrôle. (…) On est à la fois dans la cellule de « contrôle » et dans la cellule « d’observation ». PARTIE 2 - SATURNE Saturne est identifié à Cronos, un des « pères » de Vénus. Lui aussi a donné son nom à une maladie (le saturnisme), qui est aussi un état d’âme pour quelques poètes (les poèmes saturniens de Verlaine), généralement assimilé à une tristesse ou à une mélancolie, à un écrasement délicat par l’air du temps. Le temps s’allonge, sans actes, la parole occupe toute la place. Retour sur le temps passé. Quelque chose se craquèle. Saturne est le temps de la « dépression » - presque au sens atmosphérique du terme ! Le temps s’allonge, se tord, se « désordonne ». Passé et présent se mélangent, les morts et les vivants. L’espace se délite, se défait, l’ordre imposé n’y tient plus. Les acteurs parlent, rêvent et modifient l’espace à la convenance de leurs récits, de leurs rêves et de leurs fantasmes. Ils se tiennent, parlent et agissent complètement hors du flux, ils ne sont plus soumis à « l’ordre des choses ». (…) PARTIE 3 - SOLEIL Ce temps est celui de l’éclaircie. (…) Soleil est le temps des hommes libérés de l’ordre implacable de la machine. (…) C’est le temps de la libération, du réveil, de la renaissance, du retour au monde avec une nouvelle peau… Une chose est sûre : les acteurs font face aux spectateurs, ils sont avec eux. Dans quel espace et dans quel ordre, ça reste à trouver ! Mais le trajet de la pièce nous fait passer d’un espace où les hommes voient leurs dos et un mur infranchissable, à un espace où les hommes se font face. Pour exploiter le document C ! Organisation de la pièce - Comment la pièce semble-t-elle divisée ? Nommez les différentes parties. - Quels points communs repérés et comment les expliquer ? - D’après les notes du metteur en scène, renommez le document A et le document B. - Comparez les effets trouvés dans le premier exercice, pour le document A, aux propos du metteur en scène. - Idem, pour le document B. ! A vous de jouer : Pour la dernière partie de la pièce, « SOLEIL », Nathalie Garraud évoque (à ce moment de la création) un espace qui est encore à définir. A vous d’imaginer, de construire cet espace d’après ses intentions. Vous pourrez réutiliser les éléments des parties précédentes… ou pas. Entrer dans le texte 1/ Les personnages Voici les didascalies initiales présentant les personnages : - étudiez la désignation sociale des personnages et répartir ces personnages en deux groupes. Expliquez l’intérêt de cette répartition en confrontant ces personnages à l’espace dans lequel ils se trouvent. -étudiez la répartition des rôles féminins et masculins : que remarquez-vous ? En quoi cette division est-elle pertinente ? Document D CHAHINE, un médecin. BEN, un infirmier. MARIE, une infirmière. NORA, une marchande. LUCIE, une diplomate. MICHEL, un steward. ANGE, un marcheur. JULIE, une guerrière. L’action se passe dans le Service Médical d’Urgence d’un grand aéroport européen. 2/ Situation, Lieu, Action « La situation de la pièce est une situation de suspension. Elle fait le vide, elle fait l’immobilité et l’attente quand tout autour d’elle se remplit d’agitations, de gesticulations et de circulations. Il y règne le calme qui caractérise, paraît-il, le cœur des cyclones. Le lieu, c’est une chambre d’observation dans le Service Médical d’un grand aéroport européen. Pendant deux jours et deux nuits, cinq personnes y sont maintenues en quarantaine. Le Service Médical est dirigé par un médecin musulman et bourgeois. Il y a aussi des infirmiers de garde, des visiteurs, proches des patients ou officiels, qui ne seront pas autorisés à pénétrer dans la chambre. Et puis il y a les figurants accidentels de la nuit, ceux des souvenirs, des rêves ou des visions. Un aéroport international est un espace frontalier, où s’organisent à la surface de la terre les entrées et sorties du territoire, un espace dont la structure a la puissance d’une métaphore pure : Arrivées, Départs. Au cœur de l’aéroport, la chambre d’observation est un sas, qui suspend la libre circulation. Soudain, vous êtes arrêtés, extirpés du mouvement, déconnectés du flux ambiant. Dans la journée, on entend encore, à intervalles réguliers, les avions qui décollent et atterrissent. La nuit, cela aussi s’arrête. Soudain, la nuit, le temps s’étire. Aux abords de la vérité, vous perdez toute vraisemblance. Vous entrez tout nu dans la légende. Vous parlez de vous, à personne ou à n’importe qui. Vous rêvez ou vous délirez. Vous errez mentalement dans l’aéroport. Vous rencontrez des fantômes, en chair et en os, des anges. Dans le noir, vos idées se précisent. Ni le matin ni le monde ne parviendront plus à les dissiper. Vous voilà en plein jour étonné par l’absence d’étoiles. Vous voilà étranger. » Extrait du dossier de presse, Compagnie du Zieu Après la représentation L’écriture de la pièce Les trois documents ci-dessous permettront d’éclaircir le projet de Soudain la nuit, son inscription dans une trilogie, son titre et le travail de l’écriture… 1/ Le titre Document E Un spectre hante l’Europe. Au théâtre, quand les fantasmes des hommes se transforment en fantômes, on les appelle des spectres. Ils viennent aux heures critiques, aux heures sombres. Ils sont et ne sont pas de ce monde. Et sur eux, pour un temps, se fixe l’angoisse. Mais on sait depuis Hamlet (1) que les spectres doivent leur apparition à une certaine pourriture du royaume. Soudain la nuit sera la troisième et dernière pièce du cycle Spectres de l’Europe. Ce cycle, commencé en 2013, est une enquête théâtrale sur la façon dont l’Europe se construit, dans la matérialité de ses frontières, dans la texture de son idéologie, dans l’obscurité de ses fantasmes, vis-à-vis de ceux qu’on appelle les étrangers. Pourtant notre entrée première n’est pas le « racisme », ni le « rapport à l’Autre ». Ni humanisme ni psychologie générale. La question est pour nous plus concrète et plus abstraite, plus politique. On ne fait pas des lois sur le statut de l’Autre. Et le racisme n’est qu’une traduction, dans la crainte et la jalousie, des rapports de rivalité et de concurrence qui guident les hommes du marché. Cette question, nous l’avons déjà travaillée à travers deux pièces dites « d’étude », radicalement différentes par leur forme, par leur dispositif comme par le rapport au public qu’elles proposent : L’avantage du printemps (pièce documentaire pour 2 acteurs - création 2013), Othello, (2) variation pour 3 acteurs (réécriture - forme itinérante pour 3 acteurs - création 2014). Soudain la nuit est la création qui marquera la fin du cycle : une fiction, travaillée pour les plateaux de théâtre, par l’ensemble de la troupe. Nous avons choisi ce titre parce qu’il peut s’entendre en deux sens : comme le constat d’un état des lieux obscur (l’arrivée soudaine d’une nuit redoutée), et comme indiquant une nouvelle possibilité (soudain, dans la nuit, quelque chose d’inattendu arrive). Peut-être un charnier et peut-être une charnière. Peut-être la fin d’une histoire (une tombée de rideau) et peut-être le début d’une autre (les premiers mots d’un conte). Et sans doute les deux à la fois, car les fictions, contrairement aux mensonges, ont besoin d’incertitude. Au moment d’écrire ces lignes, nous ne disposons que de motifs provisoires, issus de réflexions sur notre situation historique et sur la manière dont une forme poétique, théâtrale, peut aujourd’hui y tracer des voies de passage. Note d’intention, Nathalie Garraud Notes (1) Citation extraite de Hamlet, I,4, Shakespeare,1601 : « Il y a quelque chose de pourri au royaume du Danemark » (2) Othello, pièce de Shakespeare, 1604. 2/ L’écriture de plateau ? Document F Soudain la nuit, comme les précédentes pièces de notre compagnie, est le fruit d’un travail que nous pensons à deux, Nathalie Garraud et moi. Sa structure, ses motifs, bref, sa physionomie tout entière a muri dans les accords et les désaccords, les tâtonnements et les éclaircies qui ont scandé de longues semaines de lutte – entre l’idée et la matière, toujours – au plateau et à la table, lutte qui poursuit sa course dans la tête de chacun quand vient le temps, indépassable, de la solitude. Autant dire que le texte que j’ai écrit vient en quelque sorte d’un lieu mental partagé : celui d’une pièce qui n’appartient à personne et dont nous avons été – avec les acteurs et les techniciens de la troupe – tout ensemble les architectes et les arpenteurs. Note d’intention, Olivier Saccomano. Document G Quand vous parlez de la première pièce de votre cycle vous employez la formule « théâtre documentaire » et pourtant c'était aussi une écriture originale comme pour votre troisième pièce. Peut-on parler d'écriture collective ? N.G. : C’était davantage du théâtre documentaire parce que des éléments biographiques concrets des acteurs apparaissaient dans un texte qui proposait une situation fictionnelle. Dans toutes nos pièces, nous faisons appel à l'expérience singulière de chacun des acteurs et l'écriture tient compte de cette expérience qui apparaît sur le plateau, mais avec Soudain la nuit nous sommes dans la fiction, même si on ne peut jamais parler de « pure » fiction. O.S. L’écriture n’est pas collective, mais elle est travaillée par la mise en commun des enjeux que recèle notre motif central. La figure de l'étranger est comme un nœud qui convoque ceux qui sont à l’œuvre sur et hors du plateau à une sorte d’examen. C’est vrai aussi pour l’auteur. Je commence à écrire « pour » la pièce, et au fil des répétitions, des visions ou des propositions qui arrivent, une œuvre commune apparaît, dont j’écris le texte. N.G. : Il n'y a pas de texte préexistant au début des répétitions, il y a seulement une idée qui s'adresse à la pensée et aux pratiques de tous les participants. Cette idée est mise à l'épreuve du plateau, et le texte finalement publié sera né de la rencontre entre une écriture et un travail de plateau. L'écriture est concomitante aux répétitions, elle s'inscrit dans les répétitions mais elle n’est pas une retranscription. Mais ce n'est pas une écriture de plateau ? N.G. : Pas vraiment, même si l’écriture emporte avec elle ce qui se passe sur le plateau, et qui est déjà une forme d’écriture, initiée par mes visions ou celles des acteurs. On pourrait presque dire que notre mode de travail ressemble à celui des dialogues socratiques : une idée est mise en commun, et est discutée, travaillée, tordue, contredite, dépliée par les différents interlocuteurs Nous travaillons parfois en improvisation, parfois à partir de propositions très construites, en donnant aux acteurs des idées de rôles, des morceaux de textes, des situations, mais sans a priori. On ne fixe que très tardivement les rôles pour chaque acteur. Mais nous travaillons depuis très longtemps avec les mêmes acteurs et nous travaillons depuis trois ans sur ce projet, étape par étape. Tous suivent l'évolution du travail – que nous finalisons souvent la veille de la première… O.S. : Au final, l’œuvre que nous construisons n'appartient à personne en particulier. Elle est le fruit d’une sorte d’association, qui est aussi une sorte de lutte Entretien avec Nathalie Garraud et Olivier Saccomano, Avignon, 2015 3/ Chahine Personnage central et pourtant mystérieux, Nathalie Garraud et Olivier Saccomano évoque la figure de Chahine. Figure que l’on pourra mieux analyser dans un document ultérieur (document H)… « Votre héros, autour duquel se construit Soudain la nuit, est médecin dans un service médical d'urgence d'un aéroport français. C’est un étranger intégré dans la société française. Pourquoi ce choix ? O.S. : Othello aussi est « intégré » à la société vénitienne : on le reçoit, on l’admire même, jusqu’à ce qu’il épouse Desdémone… Mais surtout, théâtralement, nous voulions échapper aux représentations convenues et misérabilistes sur les exclus de l’Europe : les migrants, etc. La pièce place plutôt des gens supposés « libres », « intégrés », dans une situation de rétention ou d’impasse qui est celle des migrants. Le tout dans un aéroport, c’est-à-dire un lieu-frontière assez abstrait… À partir de là, voyons ce qui se passe… N.G. : Nous avons imaginé ce rôle de médecin en pensant à la notion médicale de « corps étranger », à ses possibilités métaphoriques, et à son instrumentalisation politique. Les migrants, les djihadistes, les porteurs du virus Ebola sont différents visages d’un « corps étranger » à l’extérieur ou à l’intérieur de l’organisme. Les politiques nationalistes se bâtissent sur ces fantasmes du « corps étranger » à détruire. On avait fait des recherches sur les mouvements djihadistes, sur l'arrivée catastrophique des migrants en Europe, sur la question de l'épidémie d'Ebola et nous avons compris que la question, métaphoriquement entendue, était vraiment celle du « corps » étranger et que le personnage du médecin était parfait dans ce contexte. » Entretien avec Nathalie Garraud et Olivier Saccomano, Avignon, 2015 La scène finale : le radeau Voici la scène finale qui évoque le célèbre tableau du radeau de la Méduse Document H Tous transforment la salle en un radeau. Chahine est assis sur une unique chaise, et regarde l’équipage prendre place. Tous se costument en naufragés, et prennent position. ANGE, à Chahine.- Au revoir. CHAHINE.-... JULIE, à Chahine.- Au revoir. CHAHINE.-... MARIE, à Chahine.- Au revoir, docteur Chahine. CHAHINE.-... MICHEL, à Chahine.- Au revoir. CHAHINE.-... BEN, à Chahine.- Au revoir, chef. CHAHINE.-... LUCIE, à Chahine.- Au revoir. CHAHINE.-... NORA, à Chahine.- Au revoir, Chahine. CHAHINE.-... Le radeau dérive. CHAHINE.- Marie ! MARIE.- Oui, docteur Chahine. CHAHINE.- Où meurent les hommes, Marie ? MARIE.- Dans le monde, docteur Chahine. CHAHINE.- Et les mondes ? Où meurent les mondes ? MARIE.- Dans les hommes, docteur Chahine. Le radeau dérive. Le vent se lève. NORA.- CHAHINE ! CHAHINE.- OUI ! NORA.- VOUS NE VENEZ PAS ? CHAHINE. NON ! ET VOUS, VOUS NE PARTEZ PAS ? NORA.- NON ! CHAHINE.- JE NE CONNAIS PAS VOTRE NOM ! NORA.- NORA ! CHAHINE.- LAURA ? NORA.- NORA ! BEN.- C’EST ECRIT DANS LE LIVRE ! Le radeau dérive. Soleil et tempête. BEN.- CHEF ! CHAHINE.- OUI ! BEN.- POUR L’INSTITUT ! CHAHINE.- OUI ! BEN.- S’ILS APPELLENT ! CHAHINE.- OUI ! BEN.- DITES QU’ON S’EST ECHAPPES ! CHAHINE.- OUI ! BEN.- QUE NOUS NE SOMMES PAS MORTS ! CHAHINE.- OUI ! BEN.- ET QUE NOUS ALLONS CONTAMINER LE MONDE ! CHAHINE.- OUI ! BEN.- CHEF ! CHAHINE.- OUI ! BEN.- JE NAVIGUE, CHEF ! JE NAVIGUE ! CHAHINE.- OUI ! Le radeau dérive. Le vent faiblit. Chahine se lève. ANGE.- CHAHINE ! CHAHINE.- IL NEIGE ! JULIE.- CHAHINE ! CHAHINE.- IL GRÊLE ! NORA.- CHAHINE ! CHAHINE.- TENEZ LE CAP ! NORA.- CHAHINE ! CHAHINE.- LES LOUPS HURLENT ! JULIE.- CHAHINE ! CHAHINE.- LES AGNEAUX PLEURENT ! ANGE.- CHAHINE ! CHAHINE.- TENEZ LE CAP ! Le radeau dérive. CHAHINE.- Tenez le cap. Tombez. Aimez. Recommencez. Chahine se déshabille. Le voici, rendu à l’expérience crue et commune du dénuement, comme au jour de la naissance ou de la mort. Soudain la nuit, Olivier Saccomano, 2015 On pourra par exemple : -demander aux élèves de se remémorer le dispositif scénographique établissant le parallèle entre cette scène et le célèbre tableau de Géricault. -au besoin, projeter cette représentation pour - repérer et analyser les principes de composition de l’œuvre évoquer les principes de vie et de mort établir des liens entre la scène finale et le travail de Géricault rappeler le contexte de création de cette œuvre, sa réception ainsi que son inscription dans le mouvement romantique… La nudité Présente à différents moments de la représentation, la nudité prend dans ce spectacle différentes valeurs. L’occasion d’interroger nos élèves quant à ses fonctions. Evoquez les différents moments où la nudité est exposée : -celle des comédiens -celle des personnages Essayez d’expliquer l’effet produit sur le spectateur (et sur vous) et en dégager ses fonctions dans la pièce. Pour soutenir le travail de remémoration, on pourra s’appuyer sur le document suivant (I) mais également sur l’extrait de la scène finale (document H) et notamment l’ultime didascalie : Document I Pour comprendre les choix et la mise en place de ces choix, on analysera les propos du metteur en scène, tenus dans le magazine Théâtre(s) consacré à la nudité. Document J « La nudité est directement liée aux questionnements que nous portons dans la pièce sur les peurs de l’Occident. Ici, ce sont des Européens, passagers en quarantaine, que nous amenons sur le plateau dans une forme de renversement. Cette nudité est apparue comme une évidence. Ce n’était pas une injonction de la metteure en scène que je suis, mais une option née du travail d’improvisation mené par la troupe, au plateau, pendant la phase de recherche. C’est un ressort dramaturgique du spectacle, un moment d’une grande violence. Pour quelques-uns des comédiens, c’était une première mais comme elle naissait de ce désir collectif, ce fut assez simple. Nous avons fait des essais progressivement, lors des répétitions. Sans forcer. Paraître nu sur scène, c’est d’abord faire un travail sur soi, mais notre choix collectif nous a beaucoup aidé. Je dirais que cette recherche sur la nudité nous a plutôt resserrés. Inconsciemment, les comédiens ont pris soin les uns des autres. J’ai vu beaucoup de douceur et de délicatesse entre eux. » Nathalie Garraud in Théâtre(s), Corps et nudité, n°3, automne 2015 Des pistes pour ensuite réfléchir à son exploitation au théâtre comme dans la danse : le nu est-il un costume comme un autre ? Est-il une transgression ? Voici deux documents pouvant nourrir cette réflexion… Photographies de François Stemm, extraites du spectacle Tragédie d’Olivier Dubois, créé au Festival d’Avignon en 2012. Annexe Textes en écho Trois textes de Kafka disponibles sur le site http://www.tierslivre.net/spip/spip.php?article1526 et qui évoquent des situations proches de celles de Soudain la nuit. Franz Kafka | Abandonne ! C’était de très bonne heure le matin, les rues étaient propres et vides, je m’en allais à la gare. En comparant une pendule avec ma montre, je vis qu’il était déjà beaucoup plus tard que je n’avais cru ; il fallait me dépêcher ; l’effroi que me causa cette découverte me fit hésiter sur mon chemin, je ne m’y connaissais pas encore bien dans cette ville ; il y avait heureusement un agent de police à proximité, je courus vers lui et lui demandai hors d’haleine mon chemin. Il se mit à me sourire et me dit : « C’est de moi que tu veux apprendre ton chemin ? – Oui, lui dis-je, puisque je ne peux pas le trouver tout seul. – Abandonne, abandonne ! » dit-il en se détournant de moi d’un geste large, comme font les gens qui ont envie de rire en toute liberté. Franz Kafka | Le carrefour Je suis assis depuis des années au grand carrefour, mais je devrai quitter ma place demain, parce que le nouvel empereur arrive. Je ne me mêle à rien de ce qui se passe autour de moi, tant par principe que par répugnance. Il y a bien longtemps que j’ai cessé de mendier ; les vieux passants me donnent quelque chose par habitude, par fidélité, parce qu’ils me connaissent, les nouveaux venus suivent leur exemple. J’ai une petite corbeille, posée à côté de moi, dans laquelle chacun jette ce qu’il juge bon de donner. Mais c’est justement parce que je m’occupe de personne, parce que je garde une âme et un regard sereins au milieu du tapage et de l’absurdité de la rue, que je comprends mieux que quiconque tout ce qui concerne ma position, mes exigences justifiées. C’est pourquoi ce matin, quand un agent de police, qui me connaît naturellement, mais que, tout aussi naturellement, je n’avais pas encore remarqué, quand cet agent de police s’est arrêté devant moi et m’a dit : « C’est demain l’arrivée de l’empereur, ne t’avise pas d’oser venir ici », je lui ai répondu par cette question : « Quel âge as-tu ? » Franz Kafka | Une charrette Une charrette de paysans chargée de trois hommes montait lentement une côte dans l’obscurité. Un inconnu se dirigea vers eux et les appela. Après un bref échange de paroles, il apparut que l’inconnu demandait si on pouvait le prendre. On lui prépara une place et on l’aida à monter. C’est seulement quand la voiture se fut remise en route qu’on lui demanda : « Vous venez de la direction opposée et vous y retournez ? – Oui, dit l’inconnu. J’allais d’abord dans votre direction, mais ensuite j’ai fait demi-tour parce qu’il a fait nuit plus tôt que je ne m’y attendais. » Distribution Conception Nathalie Garraud & Olivier Saccomano Mise en scène Nathalie Garraud Ecriture Olivier Saccomano Scénographie Jean François Garraud Costumes Sarah Leterrier assistée de Sabrina Noiraux Lumières et régie générale Guillaume Tesson Vidéo Camille Lorin Son Hughes Laniesse Assistanat Steven Cayrasso Avec Julien Bonnet, Laurence Claoué, Mitsou Doudeau, Laure Giappiconi, Cédric Michel, Florian Onnein, Conchita Paz, Charly Totterwitz Production : Compagnie du Zieu. Coproduction : Festival d’Avignon, Maison de la Culture d’Amiens - Centre européen de création et de production, Théâtre du Beauvaisis - Scène nationale de l’Oise en préfiguration, le Fracas - Centre Dramatique National de Montluçon, Pôle Arts de la Scène - Friche la Belle de Mai, Scène Nationale d’Evreux-Louviers, Théâtre Massalia. Avec le soutien du Préau - Centre Dramatique Régional de Vire, des Scènes du Jura - Scène Nationale, du CENTQUATRE - Paris, de la Villa La Brugère, de l’Institut français du Maroc dans le cadre de son programme de résidence. Le spectacle a été crée le 5 juillet 2015 au Festival d’Avignon. La pièce est publiée aux éditions Les Solitaires Intempestifs. La compagnie du Zieu est conventionnée par le Ministère de la Culture - DRAC Picardie, le Conseil Régional de Picardie, le Conseil Départemental de l’Aisne et soutenue par la communauté d’agglomération Amiens Métropole. Liens Vers le Louvres : image et analyse du Radeau de la méduse http://www.louvre.fr/oeuvre-notices/le-radeau-de-la-meduse http://www.histoire-image.org/site/oeuvre/analyse.php?i=136 Avec une animation qui présente l’analyse de l’œuvre en 2 minutes. http://ww2.ac-poitiers.fr/ia17-pedagogie/IMG/pdf/0_Gericault_Le_Radeau_de_la_Meduse.pdf Pour satisfaire sa curiosité, la véritable histoire d’un naufrage http://www.arte.tv/guide/fr/049878-000/la-veritable-histoire-du-radeau-de-la-meduse La question de la nudité : « Se mettre tout nu au théâtre ou au cinéma, voilà qui va à l'encontre de la norme et crée une sensation. On ne déshabille jamais quelqu'un pour rien, comme ça, par désintérêt : notre société est ainsi faite. Pourquoi alors déshabille-t-on les acteurs ? » La suite sur l’article que l’on trouvera sur le lien : http://www.erudit.org/culture/jeu1060667/jeu1075718/16434ac.pdf Nudité et Arts plastiques http://mediation.centrepompidou.fr/education/ressources/ENS-corps-oeuvre/ENS-corpsoeuvre.htm#corps1 Dossier réalisé par Delphine Petit Service éducatif de la Maison de la Culture d’Amiens Permanence Le vendredi après-midi :Jean Courtin (musique et danse) [email protected] Le vendredi matin : Delphine Petit (théâtre et cinéma) [email protected] Tél. 03 22 97 79 79 En dehors de ces horaires, vous pouvez contacter Claire-Emmanuelle Bouvier Attachée aux relations publiques / enseignement & éducation artistique Tél.: 03 22 97 79 55 [email protected]