Les indissociables : Projet de recherche sur les fonctions exécutives, le développement psychoaffectif et les comportements d’agression : définitions des concepts et des variables à l’étude Le projet de recherche sur les comportements d’agression a été amorcé en février dernier. Depuis, huit unités de réadaptation se sont jointes au projet et une vingtaine de jeunes ont été rencontrés. Tel qu’il a été présenté lors de la parution du journal Le BonJour en avril dernier, l’objet de l’étude est d’évaluer les fonctions exécutives des jeunes, leur développement psychoaffectif et la présence de difficultés psychologiques (TDAH, TOP, TC). Nous voulons mesurer ces éléments afin de mieux comprendre la manifestation des comportements antisociaux chez les adolescents. Étant donné que le projet progresse bien et correspond aux attentes établies au début de la collecte de données, nous pensons pouvoir présenter des résultats préliminaires dès l’automne prochain. Afin d’offrir un aperçu des différentes problématiques, nous vous présentons des définitions des concepts à l’étude. Définitions des concepts Le trouble oppositionnel avec provocation (TOP) : Le TOP consiste en un ensemble de comportements hostiles et provocateurs (et parfois antisociaux) manifestés par l’enfant ou l’adolescent, s’exprimant de façon persistante (crises de colère fréquentes, contestation, opposition aux demandes des adultes, etc.). Le trouble des conduites (TC): Le TC implique quant à lui la présence de comportements antisociaux de nature plus grave et cristallisée où les droits fondamentaux des autres sont bafoués. L’enfant ou l’adolescent doit alors présenter un nombre important de comportements délinquants et de comportements violents durant une période stable. Le trouble du déficit de l’attention avec hyperactivité et impulsivité (TDAH) : Le TDAH fait également partie des diagnostics dans le DSM-5 où l’on observe, sur le plan des symptômes, plusieurs problèmes de comportement. Dans le cas du TDAH, les problèmes de comportement sont cependant dus à des difficultés importantes d’impulsivité (Barkley, 1997; Barkley et al., 2002). Le TDAH implique bien souvent d’autres difficultés comme de l’hyperactivité et des difficultés d’attention. Cependant, le déficit d’inhibition (qui est à la base de l’impulsivité) est la principale caractéristique du problème, et se présente autant chez les filles que chez les garçons. Des connaissances à la pratique Geneviève Barlow Conseillère cadre en planification et programmation Répondante à la recherche Conduites antisociales : Dans l’ensemble, les auteurs s’entendent pour dire que les conduites antisociales font référence à une classe générale de diagnostics de troubles de comportement perturbateurs qu’on retrouve dans le DSM-IV et le DSM-5, et qui regroupe les diagnostics de TOP, TC et TDAH (American Psychiatric Association, 2000, 2013). À l’intérieur de cette classe, s’inscrivent également les comportements d’agression sporadiques, la délinquance et la criminalité juvénile (Morgan & Lilienfeld, 2000; Ogilvie, Stewart, Chan, & Shum, 2011). À l’égard de la Loi sur la protection de la jeunesse, lorsqu’il est question de conduites antisociales, nous faisons généralement référence aux troubles de comportement sérieux, tel que définis par l’article 38f (Chapitre IV, section 1), et qui impliquent une situation où l’enfant se comporte de manière à porter atteinte à son intégrité physique ou psychologique ou à celle d’autrui de façon grave ou continue. Comportements antisociaux : comportements problématiques présents chez les jeunes qui ont un TOP, un TC et parfois un TDAH. Dans bien des cas, les comportements peuvent être agressifs, dérangeants et violents. Fonction des comportements antisociaux : les comportements problématiques ne se manifestent pas toujours de la même manière. Il y a deux catégories de comportements antisociaux qui peuvent être identifiées (comportements réactifs et comportements proactifs). Cette distinction entre les deux catégories joue un rôle important dans la façon de comprendre les difficultés du jeune et de mieux intervenir. Elle permet d’établir des stratégies de prévention et d’intervention spécifiques en s’ajustant à leurs besoins. D’ailleurs, les conduites antisociales réactives et proactives ne sont pas associées aux mêmes difficultés d’adaptation. Lorsque l’on compare les deux formes, on constate que la première est davantage associée à de nombreuses difficultés d’adaptation, au rejet par les pairs et à la victimisation, et la seconde à des problèmes de délinquance, de consommation de drogues et de crimes contre la personne. (Suite page 20) Journal Le Bon our - Juin 2014 - 23 Les indissociables : Projet de recherche sur les fonctions exécutives, le développement psychoaffectif et les comportements d’agression : définitions des concepts et des variables à l’étude... suite Conduite antisociale réactive : ensemble de comportements antisociaux impulsifs, qui sont manifestés en réaction à une situation spécifique et qui prend une forme plutôt défensive. Ces comportements ont pour but de retirer de l’environnement une menace réelle ou perçue par le jeune. Ils renvoient à des réactions de colère et d’hostilité à l’égard des autres. Ils peuvent également avoir pour fonction de retirer de l’environnement de manière subite, une contrainte ou une situation frustrante (par exemple, une consigne parentale) et s’expliquent souvent par une mauvaise compréhension qu’a l’enfant des indices de son environnement social. Conduite antisociale proactive : ensemble de comportements problématiques qui ont une fonction instrumentale. Ces comportements visent à atteindre un objectif ou un but spécifique. Ils sont considérés par l’adolescent comme des moyens viables et efficaces pour obtenir un gain ou une récompense. Les études montrent qu’un facteur de maintien important des comportements antisociaux proactifs correspond à l’obtention importante de stimuli de renforcements (administrés bien souvent de façon involontaire par l’environnement). Comportements d’agression : actions physiques qui peuvent prendre une forme directe (frapper, pousser, insulter) ou indirecte (intimidation sur les réseaux sociaux, alimenter des rumeurs, etc.) et qui entraînent des dommages (physique, psychologique et financiers) aux victimes et à la société. Fonctions exécutives : les fonctions exécutives font référence à un ensemble de processus neurocognitifs qui permettent à l’individu d’analyser et d’organiser l’information de l’environnement (Welsh & Pennington, 1988) en la maintenant disponible en mémoire à court terme, afin de pouvoir l’intégrer aux informations concernant le contexte et d’identifier l’option la plus appropriée pour atteindre son but (Willcutt, Doyle, Nigg, Faraone, & Pennington, 2005). Selon l’équipe de Willcutt (2005), il y a quatre facteurs qui englobent les fonctions exécutives, soit 1) l’inhibition de la réponse, 2) la mémoire de travail, 3) le changement de stratégie de réponse et la flexibilité et 4) le contrôle de l’interférence. 24 - Journal Le Bon our - Juin 2014 Des connaissances à la pratique Geneviève Barlow Conseillère cadre en planification et programmation Répondante à la recherche Développement psychoaffectif : le développement psychoaffectif réfère aux changements dans le fonctionnement psychologique issus des relations affectives vécues par l’individu. Le développement psychoaffectif peut faire référence à différentes variables, comme le développement des traits de personnalité, la capacité à ressentir des émotions par rapport aux autres, l’attachement, la présence de forces (empathie, perspective de l’autre, jugement moral) ou de faiblesses (anxiété, émotions dépressives) sur le plan intériorisé et sur le plan extériorisé (Giroux, en préparation). Samuel Giroux Étudiant au doctorat en psychologie Coordonnateur du projet de recherche Université du Québec à Montréal Éducateur au Centre jeunesse de Laval, à l’Unité Le Mirabel depuis 2005 Stéphanie Michaud Étudiante au doctorat en psychologie Assistante de recherche Université du Québec à Montréal Éducatrice au Centre jeunesse de Laval depuis 2012 Marie-Claude Guay, Ph.D Professeure à l’Université du Québec à Montréal Directrice de recherche Chercheure affiliée au Centre jeunesse de Montréal-IU Chercheure associée à l’Hôpital Rivière-des-Prairies