La perception managériale de l`impact du parrainage sportif sur les

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La perception managériale de l’impact du parrainage
sportif sur les employés en PME-PMI
Julien Jouny
Université d’Orléans – IAE/EUM – Laboratoire VALLOREM
Université de Nancy 2 – ISAM/IAE – Laboratoire CEREFIGE
Le concept de parrainage construit son action au sein même d’une relation représentée par la
dyade parrain – parrainé. Si l’on se penche sur le cas particulier du parrainage sportif, dans la
grande majorité des cas, les deux entités constitutives de cette relation dyadique se distinguent
par les buts et objectifs liés à leur activité d’organisation. Aussi, le parrain revêt souvent la
forme d’une entreprise ayant un but lucratif et le parrainé prend la forme d’une association,
d’un club, ou d’une entité sportive répondant au modèle d’organisation associant « liberté
d’entreprendre, responsabilité collective, solidarité et projet d’émancipation » (RichezBattesti, 2010). Par la même, la relation de parrainage constituée entre ces deux entités
s’inscrit dans l’établissement volontaire d’une véritable connexion entre le monde marchand
et le monde non-marchand. L’objectif de cet article réside dans l’observation de cette relation
bipolaire et des effets qu’elle peut engendrer sur les acteurs de ces deux mondes.
Subséquemment, cet article présente l’étude de l’impact du parrainage sportif sur le public
interne du parrain (les employés) dans le cadre spécifique des entreprises de type PME-PMI.
Le positionnement conceptuel de cet objet de recherche et sa récence sur le plan scientifique
nous conduit à privilégier une démarche empirique qualitative exploratoire. Celle-ci nous
permet de répondre à un premier questionnement matérialisé par la problématique suivante :
le parrainage sportif, tel qu’il est perçu par le dirigeant, engendre-t-il des effets sur les salariés
de l’entreprise parrain de type PME-PMI? L’analyse exploratoire réalisée repose ainsi sur 18
entretiens semi-directifs effectués auprès de dirigeants de PME-PMI dites parrain. Les
résultats obtenus via une étude de fréquence verbatim MAXQDA 10 démontrent l’existence
d’un impact en interne liés aux objectifs de l’entreprise dans ce domaine.
Le travail réalisé auprès de ces dirigeants d’entreprise permet de mobiliser une facette du
parrainage sportif peu explorée. Cette mobilisation consent à sortir quelque peu cet objet de
recherche de sa dimension transactionnelle économique admise et prédominante dans la
littérature actuelle. De cette perception de l’évolution de la dimension transactionnelle du
parrainage émerge une représentation innovante du concept et de ses fondements, générant
une vision évolutive de l’hybridation entre le secteur marchand (parrain) et le secteur nonmarchand (parrainé) dans le cadre de cette relation de parrainage sportif.
Mots-clés : parrainage sportif, perception de prestige externe, identité organisationnelle,
marketing interne, PME-PMI.
Faculté de DEG - 57 rue de Blois – 45000 – ORLEANS
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La perception managériale de l’impact du parrainage
sportif sur les salariés en PME-PMI
Résumé :
Le concept de parrainage construit son action au sein même d’une relation représentée par la
dyade parrain – parrainé. Si l’on se penche sur le cas particulier du parrainage sportif, dans la
grande majorité des cas, les deux entités constitutives de cette relation dyadique se distinguent
par les buts et objectifs liés à leur activité d’organisation. Aussi, le parrain revêt souvent la
forme d’une entreprise ayant un but lucratif et le parrainé prend la forme d’une association,
d’un club, ou d’une entité sportive répondant au modèle d’organisation associant « liberté
d’entreprendre, responsabilité collective, solidarité et projet d’émancipation » (RichezBattesti, 2010). Par la même, la relation de parrainage constituée entre ces deux entités
s’inscrit dans l’établissement volontaire d’une véritable connexion entre le monde marchand
et le monde non-marchand. L’objectif de cet article réside dans l’observation de cette relation
bipolaire et des effets qu’elle peut engendrer sur les acteurs de ces deux mondes.
Subséquemment, cet article présente l’étude de l’impact du parrainage sportif sur le public
interne du parrain (les employés) dans le cadre spécifique des entreprises de type PME-PMI.
Le positionnement conceptuel de cet objet de recherche et sa récence sur le plan scientifique
nous conduit à privilégier une démarche empirique qualitative exploratoire. Celle-ci nous
permet de répondre à un premier questionnement matérialisé par la problématique suivante :
le parrainage sportif, tel qu’il est perçu par le dirigeant, engendre-t-il des effets sur les salariés
de l’entreprise parrain de type PME-PMI? L’analyse exploratoire réalisée repose ainsi sur 18
entretiens semi-directifs effectués auprès de dirigeants de PME-PMI dites parrain. Les
résultats obtenus via une étude de fréquence verbatim MAXQDA 10 démontrent l’existence
d’un impact en interne liés aux objectifs de l’entreprise dans ce domaine.
Le travail réalisé auprès de ces dirigeants d’entreprise permet de mobiliser une facette du
parrainage sportif peu explorée. Cette mobilisation consent à sortir quelque peu cet objet de
recherche de sa dimension transactionnelle économique admise et prédominante dans la
littérature actuelle. De cette perception de l’évolution de la dimension transactionnelle du
parrainage émerge une représentation innovante du concept et de ses fondements, générant
une vision évolutive de l’hybridation entre le secteur marchand (parrain) et le secteur nonmarchand (parrainé) dans le cadre de cette relation de parrainage sportif.
Mots-clés : parrainage sportif, perception de prestige externe, identité organisationnelle,
marketing interne, PME-PMI.
1 INTRODUCTION
Le concept de parrainage existe depuis des siècles et son évolution suit celle de notre
société. Pourtant, les trois dernières décennies qui s’avèrent être les témoins principaux de
l’avènement de cette pratique et, sur le plan scientifique, de l’accentuation de la recherche sur
les effets du parrainage (Annexe A). C’est ainsi que l’accroissement des investissements
entrepreneuriaux dans ce domaine peuvent se poser comme l’une des raisons principales de
cette expansion. Cependant, de nombreuses autres raisons peuvent expliquer ce phénomène,
tel que la désillusion des entreprises à l’égard des médias traditionnels, la popularité
croissante du sport, des activités artistiques et culturelles et leur commercialisation
exponentielle (Grimes et Meenaghan, 1998). Dans le même ordre d’idée, la mondialisation et
la fragmentation des médias, toutes deux dues à l’obsession des sociétés en termes de
communication ou d’image, ont pu permettre cette avancée du parrainage.
A ce jour, nous sommes en mesure d’évaluer l’existence d’un corpus de près de 350
productions scientifiques portant sur le domaine de recherche du parrainage et ses diverses
formes (parrainage sportif, artistique, culturel,…). Cette littérature s’est ainsi renforcée de
manière croissante ces 25 dernières années (Figure 1) et les thématiques abordées ont
également évolué. La croissance scientifique de ce domaine de recherche corrobore ainsi
l’évolution mondiale du parrainage sportif. Il est à noter qu’en 10 ans les investissements
mondiaux en terme de sponsoring ont doublé, passant de 24,5 milliards de $ en 2002 à 51
milliards de dollars en 2012.
Figure 1: Evolution annuelle du nombre d’articles scientifiques dans le domaine du parrainage
entre 1996 et 2011 (Cornwell, 2012)
2 Notre réflexion repose ainsi sur l’existence ou non d’effets provoqués par l’action de
parrainage sportif d’une entreprise sur les employés de cette dernière. Pour ce faire, nous
avons fait le choix d’ancrer notre recherche dans le terrain distinctif des petites et moyennes
entreprises (PME) et industries (PMI)1. Ces choix nous amènent à investir un domaine de
recherche peu exploré (Grimes et Meenaghan, 1998 ; Mack, 1999), à l’inverse des travaux
portant sur l’impact du parrainage en termes de notoriété ou d’image au niveau des grandes
entreprises (Walliser, 2006).
Cette étude représente la première phase de notre travail de recherche sur cette relation
dyadique entre le monde marchand représenté par le parrain (entreprise) et le monde nonmarchand symbolisé au travers de l’entité parrainé (l’association sportive loi 1901). Notre
article se construit autour d’une approche exploratoire indirecte mobilisant un acteur
particulier : le dirigeant de PME-PMI. L’objectif de cet article réside dans la confirmation de
l’intérêt de mobiliser cet objet de recherche spécifique (les effets du parrainage sportif sur les
salariés) dans ce terrain particulier (PME-PMI), en essayant de discerner des attentes en
termes d’impact du parrainage sportif sur les salariés au niveau des objectifs propres de ces
dirigeants. Par cette étude, nous espérons pouvoir répondre à la problématique suivante : le
parrainage sportif engendre-t-il des effets sur les salariés de l’entreprise parrain de type PMEPMI? Cette problématique sera abordée progressivement afin de définir, dans un premier
temps, l’existence d’un réel impact sur les salariés d’après le dirigeant de PME-PMI. Puis,
dans un second temps nous chercherons à mettre en relief les effets engendrées par cette
relation de parrainage sportif en tentant de définir et de délimiter ces derniers.
1
Les TPE (Très Petites Entreprises) et TPI (Très Petites Industries) sont également inclus dans notre
terrain de recherche.
3 1. FONDEMENTS THEORIQUES
1.1. LE DIFFICILE CONSENSUS DE LA DEFINITION DU CONCEPT DE PARRAINAGE
Le concept du parrainage se démarque avant tout par sa relative récence dans le
paysage scientifique. En effet, les premières études réalisées dans ce domaine datent, pour les
plus anciennes, d’à peine plus d’une trentaine d’années (Bette, 1981). Depuis le début des
années 80, la définition du parrainage s’est inscrite dans un « flou conceptuel » (Walliser,
2006) dans lequel les chercheurs tentent, en vain pour le moment, de l’extirper. De la sorte,
chaque communauté scientifique établit les fondements de ses productions au sujet du
parrainage en se basant sur des soubassements définitionnels différents. Les anglophones, par
exemple, citent le plus souvent la définition de Meenaghan datant de 19912. Les français et les
allemands, quant à eux, préfèrent se référer respectivement aux travaux de Derbaix, Gérard et
Lardinoit (1994) et Bruhn (1987) (Annexe B). Le terme même de parrainage a indirectement
alimenté ce flou conceptuel lors de son intronisation par la communauté scientifique française
en 1982, cela dans le but d’apporter une alternative au terme « sponsoring ». Aujourd’hui
encore, il est fréquent de rencontrer des confusions avec les termes de « mécénat » ou de
« communication par l’événement » (Fuchs, 1994 ; Perlstein et Piquet, 1985). Ainsi, certains
chercheurs s’accordent sur le fait « qu’il n’existe pas de définition consensuelle pour chacun
de ces termes » (Fuchs 1994). Pourtant, des efforts sont réalisés pour essayer de mutualiser
les données sur cette définition (Laborde, 2000) mais « les définitions varient (toujours) d’un
pays à l’autre et d’un chercheur à un autre » (Walliser, 2003). Seulement, la conséquence des
divergences sur le sujet ne peut justifier un abandon de ce problème d’interprétation générale,
et pourrait même être un révélateur d’une ou plusieurs dimensions non observées du
parrainage.
La littérature scientifique s’accorde sur le fait qu’une « définition généralement
acceptée du parrainage n’existe pas » (Cornwell et Maignan, 1998 ; Fuchs, 1994 ; Walliser,
2003). Néanmoins, des accords sur les principes de base du parrainage et ses différences avec
des concepts proches tels que le mécénat et la publicité existent et permettent d’encadrer le
concept. L’étude verbatim des trois définitions du parrainage3 considérées comme fondatrices
2
Les premiers travaux de Meenaghan au sujet de la définition du parrainage datent de 1983.
3
Définitions de Bruhn (1987), Meenaghan (1991) et Derbaix (1994).
4 des principes de base du concept permettent de mettre en relief trois grands axes décrivant le
parrainage :
-
Un échange entre une entité parrain et une entité parrainée.
-
Un soutien d’ordre financier ou non financier (matériel,…).
-
Des objectifs d’ordre marketing et/ou de communication pour l’entreprise.
Ainsi, nous pouvons entrevoir le squelette de la définition du parrainage : une dyade parrainparrainé (Laborde et Durrieu, 2008), une aide du parrain envers le parrainé, et des objectifs
commerciaux du parrain issus de cette relation. Cette approche permet de conforter l’idée
d’un consensus minimum reposant sur les trois principes exposés ci-dessus ; un consensus qui
semble partagé par une majorité de chercheurs au sein de la communauté scientifique
concernée (Cornwell et Coote, 2005 ; Fuchs, 1994/95 ; Meenaghan et Shipley, 1999 ;
Olkkonen et Tuominen, 2006 ; Quester et Farrely, 1998 ; Walliser, 2003(2)).
L’une des confusions la plus souvent observée dans le domaine du parrainage
concerne les similitudes existantes avec le concept de mécénat. En soi, « le mécénat et le
parrainage sont des formes particulières d’échanges qui éclairent la nature du lien social et de
la société » (Piquet, 1998). C’est pourquoi nombre d’auteurs s’accordent sur le fait que la
gestion des activités de mécénat et de sponsoring partage de très fortes similitudes (Cegarra,
1994 ; Fournier, 1993). Nonobstant, un point essentiel distingue les deux concepts :
« l’exploitation méthodique différenciée de l’événement » (Fuchs, 1994/95). En effet, le
parrainage indique une certaine notion de retour sur investissement pour le parrain, ce qui
n’est pas le cas dans le cadre d’un acte de mécénat. Seulement, beaucoup d’entreprises
préfèrent se faire passer pour des mécènes plutôt que pour des parrains. Cette attitude hors du
contexte scientifique contribue au flou entourant le concept de parrainage. Mais à l’inverse
du mécénat, le parrainage use de nombreuses techniques de communication ce qui lui vaut
d’autres confusions.
« Le sponsoring est une forme de communication fondée sur l’association d’une
marque (ou d’une entreprise) aux organisateurs (ou participants) d’une manifestation (ou
d’une production), dans le but de bénéficier d’un transfert de notoriété de l’image de celle-ci
vers la marque (ou l’entreprise) » (Cegarra, 1994). Cette définition nous permet de mettre en
avant la seconde des grandes confusions liées au concept de parrainage : le rapport avec la
publicité. En soi, le parrainage peut user de la publicité pour permettre « l’association
5 médiatique » (Derbaix et al, 1994) de l’entité parrain avec l’entité parrainé. Cette condition
entre souvent en ligne de compte dans les contrats de parrainage, notamment sportifs,
permettant ainsi au parrain de juxtaposer son image à celle de l’entité parrainée et en retirer
quelques gains en termes d’image ou de notoriété. Il n’en reste pas moins que la frontière
entre la publicité et le parrainage s’avère mince. L’étude de ces similitudes entre les deux
concepts peut nous permettre de comprendre les processus qui peuvent faire du parrainage un
véritable « outil de communication interne » (Hickman, Lawrence et Ward, 2005). C’est en
cette facette du parrainage que nous allons développer notre étude afin de comprendre quels
peuvent être les effets du parrainage, non pas sur l’entreprise dite parrain, mais sur les salariés
de cette dernière.
1.2. LES CONCEPTS CLES DE L’INFLUENCE DU PARRAINAGE SUR LES PUBLICS INTERNES
Très peu de travaux ont étudié l’influence du parrainage sportif sur les entreprises de
types PME-PMI (Mack, 1999). Dans le même ordre d’idée, très peu d’études ont cherché à
comprendre l’impact que pouvait avoir le parrainage sur les salariés du parrain (Grimes et
Meenaghan, 1998 ; Walliser, 2003(2)) et également au niveau des objectifs des dirigeants
associés. Le croisement de ces objets de recherche mène donc à une littérature récente et très
peu consistante (Hickman et Lawrence, 2005 ; Khan et Stanton, 2010). Pourtant, pour ces
chercheurs, le parrainage peut s’avérer être « une méthode hautement efficace pour
communiquer avec tous les publics de l’entreprise […] employée pour orner l’image de
l’entreprise commanditaire avec des valeurs souhaitables aux yeux du personnel» (Grimes et
Meenaghan, 1998). Quelques années auparavant, l’idée émergeait déjà en faisant du
parrainage « une identité d’ancrage » (Mael et Ashforth, 1992) pour les salariés du parrain. La
faible littérature existante nous permet cependant d’entrevoir les contours du cadre théorique
dans lequel s’inscrit notre objet de recherche.
L’étude de l’impact du parrainage sportif sur les salariés de l’entreprise parrain nous
amène à mobiliser plusieurs littératures mêlant la gestion des ressources humaines, le
marketing, le management ou encore la psychologie. Cependant, pour rester dans la ligne
droite du chemin tracé par Mael et Ashforth en 1992, nous avons fait le choix de partir de la
théorie de l’identité sociale de Tajfel (1982) pour analyser les effets du parrainage sur le
comportement, les attitudes et l’identité même du salarié. Ainsi, les travaux existants autour
6 de la théorie de l’identité sociale nous permettent de mobiliser deux concepts théoriques
capables de permettre la modélisation du processus d’influence du parrainage sur les salariés
du parrain : il s’agit des concepts de perception de prestige externe (perceived external
prestige : PEP) et d’identité organisationnelle (organizational identity : OI).
Le premier de ces deux concepts (PEP) est « développé dans le cadre d’études
reconceptualisant l’identification organisationnelle, qui sont elles-mêmes basées sur
l’adaptation de la théorie de l’identité sociale dans un cadre organisationnelle (Ashforth et
Mael, 1992) et ont émergé dans le contexte des études sur les antécédents de l’identification
organisationnelle (Dutton et al., 1994) » (Herrbach et al., 2004). La PEP peut ainsi être
utilisée pour comprendre et mesurer les effets internes de l’image de l’organisation et des
communications transverses telles que le parrainage. Cet ancrage théorique est une nouvelle
fois renforcé par les résultats des travaux d’Ashforth et Mael (1992) sur la relation entre PEP
et l’attachement identitaire des salariés à leur entreprise. Une définition simple permet de
comprendre l’attrait de ce concept dans la compréhension des effets du parrainage car « la
PEP montre comment un employé pense que son organisation est considérée par les
étrangers » (Khan et Stanton, 2010). Le parrainage s’inscrit justement comme l’un des
facteurs de jugement d’une entreprise par ses publics externes (clients, fournisseurs,
concurrents,…) ; des jugements alimentant la perception de prestige externe des salariés
entraînant des conséquences au niveau du second des concepts que nous mobiliserons dans
notre étude, l’identité organisationnelle.
A un certain niveau, « quand les employés s’identifient fortement à l’organisation, les
attributs qu’ils utilisent pour définir l’organisation les définissent également » (Dutton et al,
1994). Cet état de fait constaté à l’échelle de l’entreprise s’inscrit comme une vérité humaine
et sociale car la théorie de l’identité sociale soutient que les gens se définissent en termes
d’adhésion à des catégories sociales (Hickman et
Lawrence, 2005). L’identité
organisationnelle s’inscrit dans cette logique à travers laquelle les salariés s’identifient plus ou
moins fortement à leur entreprise, à ses succès, à ses actions telles que peut se représenter
l’acte de parrainage. Aussi, la nature bipolaire des fondements de l’identité organisationnelle
est à prendre en compte dans notre étude. La littérature se montre vague sur le processus de
construction de l’identité organisationnelle chez l’employé. Ainsi, l’identification
organisationnelle du salarié est alimentée par deux sources d’informations :
-
Les informations externes dans lesquels s’inscrit le concept de PEP et ses constituants.
7 -
Les informations internes nées du système de croyances de l’employé et de ses
relations avec son entreprise.
La mobilisation de ces deux concepts théoriques liés à la théorie de l’identité sociale
peut donc nous permettre de construire un premier cadre conceptuel modélisant l’impact du
parrainage sur les salariés de l’entreprise parrain. Cette première amorce nous amène à nous
poser diverses questions concernant l’impact généré par cette relation entre le pôle marchand
et le pôle non marchand. Pour ce faire, nous avons fait le choix de nous inspirer de ce que la
littérature nous enseigne sur l’impact d’un autre objet, à la fois proche et à distinguer du
parrainage, sur les salariés de l’entreprise incriminée : la publicité.
1.3. LE MODELE CONCEPTUEL DES EFFETS DE LA PUBLICITE COMME BASE DE REFLEXION
Une récente étude sur l’impact de la publicité sur les salariés de l’entreprise
communicante a démontré que l’utilisation en interne de la publicité faite sur l’entreprise peut
« engager l’implication émotionnelle des employés pour construire leur identification, leurs
valeurs, leur fierté et leur performance » (Wolfinbarger, Celsi et Gilly, 2010). La littérature
mobilisée dans ce domaine de recherche précis montre que les employés peuvent être
influencés par la publicité de leur entreprise de deux manières différentes, des processus
respectivement directs et indirects engendreraient des effets agissant sur la construction de
l’identité organisationnelle du salarié :
-
Processus direct : Le salarié s’interroge sur les éléments de la publicité de son
entreprise qu’il perçoit et met en confrontation avec son système de croyances
personnel et ses croyances sur l’entreprise4. De cette façon, l’identité organisationnelle
du salarié se voit plus ou moins modifiée par la publicité, ce qui engendre des
conséquences sur son comportement et ses attitudes envers l’entreprise et son activité.
-
Processus indirect : Le salarié collecte et analyse les effets de la publicité sur les
publics externes de l’entreprise (clients, proches, concurrents,…). De cette façon, la
perception de prestige externe du salarié se voit plus ou moins modifiée par la
4
Importance fondamentale pour l’étude de la congruence des valeurs entre celles des employés et
celles de l’entreprise (dirigeants, culture organisationnelle, hiérarchie,…) pour l’étude de la
satisfaction, l’engagement affectif, la confiance ou encore la performance d’entreprise (Avolio, 2000 ;
Jung et Avolio, 2000 ; Shamir et al., 1993). 8 publicité, ce qui engendre là aussi des conséquences sur le comportement et les
attitudes de l’employé à l’encontre de sa société et de son activité en son sein.
Les observations liées aux travaux sur l’impact de la publicité sur les salariés de
l’entreprise communicante, couplées à nos premières réflexions sur la réelle dimension
marketing du parrainage sportif5 et limitées par les dissemblances connues entre les concepts
de parrainage et de la publicité, nous permettent de proposer pour notre étude le modèle
conceptuel présenté par la suite (Figure 2). Le travail réalisé au sein de cette étude va ainsi
nous permettre de valider ou d’invalider ce modèle. Cette modélisation va nous aider à cadrer
notre réflexion afin de comprendre si les objectifs des dirigeants d’une entreprise, en lien avec
le parrainage sportif, s’orientent ou ne s’orientent pas seulement vers des attentes
commerciales et/ou marketing (Q1). Le fait que la littérature dans le domaine du parrainage
sportif, et plus précisément dans l’étude de ses effets, évoque une certaine influence du
parrainage sportif sur les publics autres que le parrain et le parrainé, nous permet de poser
comme seconde question : notre objet de recherche a-t-il un réel impact sur les salariés d’une
entreprise parrain (Q2) ? Enfin, nous étudierons une troisième question (Q3) plus centrée sur
le salarié lui-même afin de comprendre si le parrainage sportif réalisé par une entreprise peut
générer des effets sur la motivation des employés (Cegarra, 1994, Grimes et Meenaghan,
1998) en PME-PMI.
Dans un deuxième temps, cette étude va nous permettre d’entrevoir quelques réponses
à d’autres questionnements concernant l’impact du parrainage sur les salariés du parrain ; des
questions respectivement d’ordre managériale et d’ordre théorique :
-
Le parrainage sportif peut-il devenir un outil de marketing interne utilisable par les
managers et autres dirigeants d’entreprises ? La proximité interne inhérente au PMEPMI peut-elle favoriser une utilisation du parrainage sportif d’ordre motivationnel,
unificateur ou intégrateur ?
-
Par quels processus le parrainage sportif engendre-t-il des effets sur les salariés des
entreprises parrain ? Ces processus sont-ils contrôlables ? modulables ? Le parrainage
peut-il être considéré scientifiquement comme un outil marketing à part entière ?
Bien entendu, cette seule étude ne peut raisonnablement pas répondre à toutes ces
interrogations. Cependant, l’émission de ces dernières permet de tracer la voie à suivre dans le
5
Voir 1.1
9 processus de recherche qui est le notre, ainsi que dans le choix des acteurs mobilisés. Il s’agit
donc, pour l’heure, de faire émerger une première base de questionnements délimitant les
frontières de notre étude.
Figure 2. Cadre conceptuel de l'étude
10 2. ETUDE EXPLORATOIRE
2.1. METHODOLOGIE
Dans le but de répondre aux différentes questions soulevées grâce à l’exploration
théorique de la littérature portant sur le parrainage sportif, nous avons choisi de réaliser une
étude qualitative par entretiens semi-directifs auprès de dix-huit dirigeants de PME-PMI. Ces
entreprises parrainent toutes une entité sportive répondant à des critères fixés6, cela afin de
réduire le nombre de variables et de biais. Le choix de s’orienter sur le terrain des PME-PMI
s’est construit et confirmé autour de deux principaux critères :
-
75% du parrainage sportif en France est réalisé par des PME-PMI7.
-
Les PME-PMI génère une proximité relationnelle propice aux échanges internes
(Hickman et Lawrence, 2005 ; Mack, 1999).
Les différentes données discursives collectées ont ainsi pour but de refléter le processus de
réflexion du dirigeant de la PME-PMI, sa perception des effets du parrainage sportif au sein
de sa société et donc les motivations qui l’ont amené à devenir parrain d’une entité sportive.
Nous avons volontairement minoré l’étude de la motivation du dirigeant pour nous intéresser
prioritairement à son regard sur les effets engendrés auprès de ses employés. Cette approche
par le dirigeant représente une première phase dans l’étude exploratoire des effets du
parrainage sportif sur les employés du parrain et à pour but de confirmer ou d’infirmer les
premières questions et la problématique émises. Ce premier travail a également pour objectif
de légitimer cette recherche et de démontrer l’intérêt d’aborder cette question de l’impact du
parrainage sur ce terrain précis (PME-PMI). Par la suite, nous nous rapprocherons de l’acteur
premier de notre objet de recherche : le salarié. Ce point sera discuté dans les limites de la
recherche. Enfin, l’analyse des données verbatim collectées s’est vue renforcée par la mise en
place d’un traitement analytique des fréquences verbatim via le logiciel MAXQDA10, nous
permettant ainsi de catégoriser les données et de répondre à nos questions. Le choix a été fait,
dans un premier temps, de ne pas opter pour l’usage carte cognitive auprès des dirigeants.
6
Chaque entité sportive parrainée possédait les caractéristiques suivantes : Association loi 1901, Club
de Handball, Niveau régional, Club possédant des équipes féminines et masculines.
7
Par exemple un club de Ligue 1 de football tel que Strasbourg en 2006 comptait 130 PME parrains
parmi ses 140 partenaires (Gary Tribou, 2006). (Chiffres issus d’un entretien accordé à
l’entreprise.com).
11 Cette option méthodologique sera revue dans l’éventualité d’une étude qualitative auprès de
l’acteur principal de notre objet de recherche : l’employé de l’entreprise dite parrain sportif.
2.2. PRESENTATION DES DONNEES COLLECTEES
L’introduction de notre guide d’entretien réalisé auprès des 18 dirigeants (Annexe C),
s’est faite de manière semi-directive, conférant à ces entretiens un double caractère :
-
Créatif, où le dirigeant donne sa perception et conception du parrainage sportif.
-
Actif, permettant d’introduire une certaine rationalité (Holstein et Gubrium, 1995 cité
par Thietart, 2003) dans l’intervention du dirigeant au cours de l’entretien, cela par le
biais de questions respectant un séquençage thématique pré-établit.
Les données sont présentées dans les tableaux suivants. Aussi, les données relatives aux
questions Q1 et Q2 sont présentées dans le même tableau (Tableau 1) de par la contigüité des
réponses apportées par les dirigeants au sujet de leurs objectifs en lien avec le parrainage
sportif (Q1) et l’impact de ce dernier sur leurs salariés (Q2). Les deux questions de recherche
n’ont pas été fusionnées afin de démarquer les attentes inhérentes aux dirigeants (objectifs) et
les conséquences observées et interprétées par ce même dirigeant (impact interne). Les
résultats apportant des éléments de réponse pour Q3 sont décrits dans le tableau 2.
Catégories d’unités d’analyse relatives aux
objectifs du dirigeant8
Communication Satisfaction Marketing
Externe
Client
Interne
Ancrage
territorial
Fréquence d’apparition verbatim (nombre)8
20
34
50
32
Fréquence d’apparition verbatim (pourcentage)8
8
L’étude fréquentielle a permis de mettre à jour une catégorie nommée « autres objectifs » que nous
jugeons non significative dans cette recherche (8,11% de fréquence verbatim), les objectifs
mentionnés n’apparaissant que de manière unique.
12 13,51%
22,97%
33,78%
21,62%
Tableau 1. Traitement verbatim des discours dirigeants en lien avec Q1 et Q2
Catégories d’unités d’analyse relatives aux
effets du parrainage sur les salariés9
Engagement
Motivation
Moral
Performance
Fréquence d’apparition verbatim (nombre)
25
33
11
8
Fréquence d’apparition verbatim (pourcentage)
31,25%
41,25%
13,75%
10%
Tableau 2. Traitement verbatim des discours dirigeants en lien avec Q3
2.3. INTERPRETATION DES DONNEES
L’analyse des données collectées nous a permis de mettre en relief différentes unités
d’analyses afin d’aborder les questions que nous avions posées.
Dans le cadre de la première question (Q1), nous pouvons constater que l’action de
parrainage sportif ne repose pas seulement sur des objectifs (pour l’entreprise) marketing ou
commerciaux. Ainsi, quatre catégories d’objectifs sont ressortent de l’étude réalisée :
Communication Externe, Satisfaction Client, Marketing Interne, Ancrage Territorial. Cette
première observation nous indique clairement que les objectifs des dirigeants de PME-PMI,
en matière de parrainage sportif, ne reposent pas seulement sur des critères marketing et
commerciaux.
Globalement, une certaine hiérarchisation des objectifs liés au parrainage sportif en
PME-PMI transparaît. Les objectifs marketings (externe) semblent en retrait vis-à-vis de ce
9
Selon les réponses apportées par les dirigeants des entreprises de type PME-PMI rencontrés.
13 que nous pouvons observer dans la littérature existante sur le terrain des entreprises de
grandes tailles dites parrains (Grimes et Meenaghan, 1998 ; Hickman et Lawrence, 2005 ;
Khan et Stanton, 2010). En effet, les dirigeants de PME-PMI priorisent l’impact direct auprès
des personnes (clients, salariés) via leur action de parrainage sportif (au sein de l’entreprise,
du lieu de vente ou durant le service). Cette observation est confirmée par les éléments de
réponses apportées à Q2 qui démontrent qu’il existe un réel but de gestion interne par les
dirigeants de PME-PMI via le parrainage sportif. De plus, les résultats indiquent que les
espoirs placés dans l’impact du parrainage sportif par les dirigeants ne s’arrêtent pas au salarié
(communication interne), mais s’étendent également au niveau des conséquences que cela
engendre sur son travail (satisfaction client). Les dirigeants de PME-PMI entreverraient donc
le parrainage sportif comme un catalyseur de l’activité de leurs salariés pouvant générer des
répercussions sur leur orientation client ; un phénomène qui a pu être étudié dans le cadre des
effets de la publicité sur les employés (Wolfinbarger Celsi et Gilly, 2010). Enfin, nous avons
découvert par sérendipité que des objectifs d’intégration au territoire (Ancrage territorial)
émergeaient des discours des dirigeants souhaitant « intégrer leur PME dans le tissu social de
la ville » (Dirigeant E – Annexe C). Ce dernier aspect développe davantage notre réflexion
par rapport aux effets réels et aux effets attendus du parrainage sportif dans ce terrain
spécifique des PME-PMI.
Les résultats du tableau 2 apportent des éléments de réponses à Q3 et permettent
d’enrichir les attentes concernant nos interrogations sur les effets intrinsèques mais également
extrinsèques engendrés par le parrainage sportif sur le salarié. Les effets sur la motivation des
salariés sont conséquents mais semblent pouvoir évoluer dans le cas où « les résultats et le
classement de l’équipe » (Dirigeant F – Annexe C) et/ou « l’image de l’équipe et le
comportement des joueurs » (Dirigeant R – Annexe C) sont en deçà des espérances. Plus d’un
tiers des personnes interrogées s’accordent sur le fait que le parrainage sportif peut avoir des
conséquences sur l’engagement des salariés dans l’entreprise, en touchant notamment leur
fierté. Ce constat renforce l’idée que le parrainage sportif peut influer sur la motivation des
salariés car « la fierté est un élément de motivation » (White et Locke, 1981). Enfin, il
apparaît qu’un impact se révèle au niveau du moral et de la performance des salariés.
Cependant, les résultats sont trop peu significatifs pour être clairement pris en compte dans
cette première phase de recherche. Mais, elle nous donne suffisamment d’éléments pour
légitimer la réalisation d’une seconde phase de recherche. Cette démarche scientifique, dans
la continuité des premiers résultats escomptés, nous mènera ainsi à diriger une seconde étude
14 exploratoire directement auprès de l’acteur du monde marchand qui nous intéresse en
priorité : le salarié du parrain.
15 3. CONCLUSION
3.1. IMPLICATIONS THEORIQUES ET MANAGERIALES
Le parrainage sportif est aujourd’hui devenu « l’un des secteurs les plus dynamiques
de l’activité de communication marketing d’entreprise » (Meenaghan et Shipley, 1999,
page.328). Une pratique qui « a acquis au fil des ans, en France et dans le monde une place à
part entière dans la stratégie marketing des entreprises » (Chauveau, 1992). Ce nouveau statut
est à l’origine des modifications structurelles et conceptuelles du parrainage sportif.
Historiquement, les objectifs du parrainage tournaient autour de l’assistance communautaire
et de l’appui aux organisations (Mack, 1999). Ces objectifs ont progressivement muté vers
une autre forme orientée vers les besoins de l’acteur marchand de cette relation (l’entreprise),
cela en matière de communication et d’image notamment. Cependant, la recherche sur le
parrainage et le parrainage sportif n’a pas ou peu commenté ce changement de paradigme et
de nature du concept. La première partie de cet article nous a donc permis de mettre en relief
l’évolution du parrainage et du parrainage sportif ; cela en nous amenant à reconsidérer et à
replacer dans le contexte actuel la ou les définitions posées de ce concept. Il s’agit là, d’une
première ébauche essentielle à la suite de ce travail de recherche sur cet objet précis.
L’explosion technologique du début des années 90 a, quant à lui, marqué un tournant
dans le contrat psychologique entre les entreprises et les employés (Rousseau et Tijoriwala,
1998). Les entreprises ne sont plus de simples possibilités temporaires d’emploi en échange
des compétences et expériences des salariés (Hall et Moss, 1998). De nos jours, d’aucuns ne
comparent le parrainage sportif en entreprise à un « outil de marketing interne ciblé pour
stimuler l’engagement des employés » (Hickman, Lawrence et Ward, 2005), dans le cas où les
salariés le perçoivent comme un support de soutien organisationnel. En effet, ce travail nous
démontre que le parrainage possède des prédispositions dans l’adaptation et la construction de
la communication de l’entreprise avec ses propres employés. Les sociétés contemporaines se
doivent de gagner l’engagement des salariés plutôt que de l’attendre, et ce pour la satisfaction
client et le bon fonctionnement de l’entreprise. Sur ce point, le parrainage sportif s’avère être
une solution de gestion interne crédible et novatrice ; cela à une époque où les concepts tels
que le marketing interne (Earnes, 1989 ; George, 1990 ; Piercy et Morgan, 1991 ; Greene et
al, 1994) ou la culture d’entreprise (Frost et al, 1991 ; Hampden-Turner, 1994) sont devenus
des éléments clés de la réussite des entreprises, auxquels le parrainage sportif contribue
efficacement à travers son évolution constante.
16 3.2. L’EVOLUTION ENTREPRENEURIALE DU PARRAINAGE SPORTIF
Aussi, les différentes études théoriques réalisées, couplées à l’étude exploratoire
opérée auprès de dix-huit dirigeants de PME-PMI, nous ont permis de répondre aux diverses
questions de recherche émises en introduction de cet article. Il s’avère que le parrainage
sportif exerce une influence notable sur les salariés d’entreprises parrains. La relation de
parrainage sportif entre l’acteur marchand et l’acteur non-marchand, ainsi que les attentes qui
en découlent, ont changé. Des effets réels sont démontrés, touchant au comportement, à la
motivation ou encore au moral des employés. Nonobstant, l’impact du parrainage sportif
entrevu sur ces acteurs, véritables clients internes de l’entreprise (Papasolomou et Vrontis,
2006) reste à définir précisément. Des interrogations subsistent, notamment au niveau des
effets du parrainage sportif sur le rendement des employés de l’entreprise parrain. Aussi, il
serait intéressant d’étudier les résultats d’entreprises investies et non investies en termes de
parrainage sportif. La question des objectifs des entreprises, en lien avec les actions de
parrainage sportif de ces dernières, s’est éclaircie au cours de notre recherche. Des objectifs
de gestion interne se sont révélés, portant sur l’engagement des salariés ou encore l’identité
partagée entre ces derniers et l’entreprise. Cependant, nous devons relativiser ces résultats visà-vis du terrain que représentent les PME-PMI car il n’est pas entièrement représentatif de la
globalité du tissu entrepreneuriale existant.
Néanmoins, les propositions et conclusions apportées par les différents points abordés
dans cette étude nous permettent de répondre positivement à la problématique posée et
confirme notre modèle conceptuel. Le parrainage sportif engendre bien des effets sur les
salariés du parrain, cela dans le cadre d’entreprises de type PME-PMI. Cet impact répond à
plusieurs critères liés au profil du salarié mais aussi à la nature du parrainage sportif mis en
place et à la structure de l’entreprise. Une réelle congruence entre le parrainage sportif et la
gestion du personnel d’entreprise ressort de ce travail, légitimant les intérêts scientifiques et
managériaux de ce sujet et de son étude sur ce terrain distinct. Malgré tout, une recherche
plus approfondie de ces effets est à envisager, en prenant en compte les employés du parrain
de manière directe. Cet article représente donc une prémisse à l’étude approfondie de cet objet
de recherche, posant les bases nécessaires à la construction et à la réalisation d’une future
étude exploratoire accomplie auprès du public interne cible des entreprises de types PMEPMI.
17 3.3 PISTES DE RECHERCHE ET LIMITES
L’étude théorique de la littérature scientifique sur le parrainage sportif dévoile un réel
manque d’ancrage théorique de cet objet de recherche. Certes, le parrainage s’inscrit
aujourd’hui dans la littérature marketing. Mais les conclusions de ce premier travail nous
invitent à penser qu’une approche relationnelle de ce concept pourrait être étudiée et s’avérée
intéressante et constructive. La vision du parrainage et plus précisément du parrainage sportif
a progressivement changé, la logique philanthropique du concept a laissé peu à peu la place à
une logique commerciale à l’avantage des entreprises. Un véritable virage conceptuel s’est
donc opéré. Cependant, l’étude réalisée auprès des PME-PMI nous montre que cette logique
philanthropique du parrainage sportif n’a pas disparu, elle s’est seulement adaptée à
l’évolution de notre société et du monde des entreprises.
Le parrainage sportif semble donc s’inscrire dans un paradigme transactionnel à deux
dimensions. D’un coté, nous pouvons faire émerger de la littérature un modèle transactionnel
économique (ou matériel) construit autour de la dyade parrain – parrainé. D’un autre coté,
cette étude nous permet d’aller plus loin et d’ouvrir une nouvelle voie de recherche en lien
avec le paradigme transactionnel précédemment cité. En effet, nous pouvons entrevoir au sein
du concept de parrainage sportif en PME-PMI, l’existence d’une transaction relationnelle
construite autour de la triade parrain – employés du parrain – entité sportive parrainée (Figure
3). Cette évolution n’effacerait pas le dimension économique de la transaction opérée. Mais
cette dernière se verrait couplée à une dimension relationnelle plus ou moins intégrée selon
les entreprises et les parrainages sportifs formés. Le concept de parrainage sportif pourrait
alors s’inscrire en partie dans le domaine de recherche du marketing relationnel ; une
dimension relationnelle qui pourrait s’insérer dans la définition même du parrainage sportif.
Cet ancrage théorique nous permettrait de mobiliser des théories peu voire inexploitées dans
la littérature actuelle portant sur le parrainage sportif, telles que la théorie des parties
prenantes, la théorie de la proximité ou encore la théorie de la légitimité des entreprises
(Pfeffer et Salancik, 1978, p.194).
Les différentes pistes de recherche évoquées nous montrent donc que le concept de
parrainage sportif dissimule de nouveaux intérêts théoriques et managériaux. L’étude de cette
pratique en pleine expansion pourrait permettre aux entreprises de développer leur action de
parrainage avec précision. Ces dernières seraient alors dans la capacité de mobiliser les
informations internes (types de salariés, structure de l’entreprise,…) et externes (types de
18 clients, notoriété de l’entité sportive parrainée,…) nécessaires à l’accomplissement d’un
parrainage sportif efficace mais également efficient (le bon parrainage sportif pour la bonne
entreprise). C’est le rôle de la recherche scientifique de découvrir et de définir ces
informations et leur portée. Or, nombre de questions restent sans réponse. Il serait, par
exemple, intéressant de savoir si la réussite ou non de l’entité sportive parrainée influe sur
celle du parrain via ses employés. Reste à savoir si la dimension relationnelle qui émane de ce
travail peut permettre de faire évoluer la recherche sur le parrainage sportif sur ce terrain
spécifique des PME-PMI tout en améliorant l’usage de ce concept au sein de ces entreprises.
Il nous faudra, à l’avenir, démontrer clairement la corrélation existante entre les
résultats empiriques présentés, le cadre conceptuel établit et les théories et concepts mobilisés.
Ce travail ne représente donc qu’une première étape dans l’étude de cet objet de recherche
singulier qu’est l’impact du parrainage sportif sur les employés de l’entreprise PME-PMI dite
parrain. Une ébauche scientifique dont l’intérêt réside dans l’évolution du regard porté sur
cette hybridation des pôles marchand et non marchand matérialisée par la relation de
parrainage sportif.
Figure 3. Evolution de la dimension transactionnelle du parrainage sportif
19 BIBLIOGRAPHIE
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Anne-Hélène Pommier en date 04-12-2006.
LIEN INTERNET :
http://lentreprise.lexpress.fr/negociation-commerciale/foot-le-sponsoring-a-portee-debourse_5344.html
22 ANNEXE A : ETUDE VERBATIM DES DEFINITIONS ORIGINELLES DU PARRAINAGE
PRINCIPES CLES
AUTEURS
Bruhn10
(1987)
La relation de la Dyade
Le Financement
Les Objectifs
“La planification,
l’organisation, la
conduite et le contrôle
de diverses
activités,[…] pour les
personnes et les
organisations dans les
domaines sportifs,
culturels ou sociaux“
“[…] la conduite […]
de diverses
activités,[…] liées au
regroupement
d’argent ou d’autres
moyen.“
“ […] dans le but
d’atteindre des
objectifs de
communication
et de marketing.
“
Meenaghan
(1991)
“Investissement en
espèce ou en nature,
dans une activité[…]“
“Investissement en
espèce ou en nature
[…]“
“ […] en échange
de l’accès à un
potentiel
commercial
exploitable
associé à cette
activité. “
Derbaix et
al
(1994)
“[…] pour toute
organisation,[…] créer
ou […] soutenir
directement un
événement socioculturellement
indépendant d’ellemême […]“
“[…]créer ou à
soutenir directement
un événement socioculturellement
indépendant d’ellemême[…]“
“ […] s’y associer
médiatiquement,
en vue
d’atteindre des
objectifs de
communication
marketing. “
10
Définition originale : « Sponsoring bedeutet die : -Planung, Organisation, Durchführung und
Kontrolle sämtlicher Aktivitäten, - die mit der Bereitstellung von Geld- oder Sachmitteln durch
Unternehmen - für Personen und Organisationen im sportlichen, kulturellen oder sozialen Bereich
- zur Erreichung von unternehmerischen Marketing- und Kommunikationszielen verbunden sind. »
23 ANNEXE B : SECTEURS D’ACTIVITES DES ENTREPRISES INTERROGEES
Indicatif
Type
Nombre
attribué
d’entreprise
de salariés
Entreprise A
PME
Entreprise B
Secteur d’activité
35
Sainte-Pazanne
Informatique
Economique
PME
22
Nantes
Restauration
Economique
Entreprise C
PMI
82
Sainte-Luce
Matériaux pour bâtiment
Economique
Entreprise D
PME
22
Pont-château
Vente de matériel sportif
Matériel
Entreprise E
TPE
13
Carquefou
Horticulture
Economique
Entreprise F
PMI
71
Saint-Sébastien
Matériaux composites
Economique
Entreprise G
PME
59
Rezé
Entreprise H
PME
33
Guérande
Entreprise I
TPE
8
Châteaubriant
Imprimerie
Economique et
Matériel
Entreprise J
PME
40
Missillac
Restauration
Economique
Entreprise K
PME
11
Savenay
Vente et flocage sportif
Matériel
Entreprise L
PME
17
Blain
Etanchéité
Economique
Entreprise M
TPI
4
Pont-château
Jardinage décoratif
Economique
Entreprise N
PME
12
Nantes
Prêt de véhicules
industriels
Matériel
Entreprise O
TPI
3
Nantes
Boulangerie – Artisanat
Economique
Entreprise P
PME
22
Saint-Nicolas de
Redon
Sécurité à la personne
Economique
Entreprise Q
PME
17
Saint-Nazaire
Discothèque
Economique
Entreprise R
PME
54
Châteaubriant
Bâtiment Travaux
Publics
Economique
24 Type de
Ville
Service de garde en tous
genres
Confection et vente de
clôture de sécurité
parrainage
Economique
Economique
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