PASCAL DÉNOS Diplômé d’expertise-comptable et Commissaire aux Comptes DESS en Banques et Finances GUIDE PRATIQUE DE L’ENTREPRISE INDIVIDUELLE de l’EURL, de la SASU, de la SELU Pour se mettre à son compte Préface de Jacques BARTHÉLÉMY Rapporteur de l’Avis du Conseil Économique et Social sur l’Entreprise individuelle Troisième édition © Éditions d’Organisation, 1995, 2000, 2004 ISBN : 2-7081-3059-5 La gestion quotidienne de l’entreprise individuelle Une avance forfaitaire de 5 % du marché est accordée lorsque le montant du marché est supérieur à 90 000 euros HT. Pour les PME, la périodicité des acomptes ne peut être supérieure à 1 mois. L’entreprise titulaire d’un marché public ou sous-traitante ayant droit au paiement direct peut bénéficier des possibilités de la cession de créances (loi Dailly) ou du nantissement de son marché. Le crédit d’équipement des PME peut leur accorder des avances ou des crédits de trésorerie. La sous-traitance est analysée comme une relation triangulaire : un maître d’ouvrage, une entreprise titulaire d’un marché public et un sous-traitant titulaire d’un contrat de sous-traitance avec cette entreprise. La personne publique peut demander des renseignements relatifs aux capacités professionnelles des sous-traitants qui seront amenés à participer à l’exécution du marché. L’acheteur public peut refuser l’intervention d’un sous-traitant qui n’aurait pas les qualifications requises. L’entrepreneur principal en marchés publics doit faire accepter son sous-traitant par le maître d’ouvrage et faire agréer ses conditions de paiement. 3. Ne vendez pas à n’importe qui et encaissez vos créances clients 3.1. Surveillez le risque de défaillance du client au moment de la commande Quand un client passe commande mesurez le degré de confiance que vous pouvez lui accorder : peut-on lui faire crédit, lui accorder un délai de paiement ? Si la clientèle est composée d’entreprises individuelles ou de particuliers il est difficile d’obtenir des renseignements pour apprécier la solvabilité du futur client. Lorsqu’il s’agit de sociétés, les sources d’informations sont plus nombreuses. © Éditions d’Organisation 121 Guide pratique de l’entreprise individuelle Les sociétés de renseignement commercial Les sociétés de renseignement commercial disposent d’informations privilégiées car elles ont connaissance des incidents de paiement des clients de par la fonction de recouvrement de créance qu’elle exercent fréquemment. Elles procèdent à l’analyse des bilans des clients, et aussi à des analyses plus informelles (interview téléphonique, visites, presse, syndicats professionnels…). Elles peuvent procurer : • le renseignement commercial classique avec les banques de données accessibles par Minitel : le renseignement est généralement succinct et peut ne pas être à jour (une information, pour être fiable, doit être récente : une information datant de trois mois n’a pas de valeur pour une décision en matière de crédit) ; • des rapports actualisés à chaque demande : lorsque la ligne de crédit est importante, il est fortement conseillé de faire appel à ce type de rapport dont le coût peut varier de 30 € à 150 € environ ; • une note d’évaluation du client (« credit-scoring ») ; • une veille permanente sur une liste de clients désignés, sur lesquels l’entreprise reçoit toute information nouvelle, dès leur émission. L’entreprise doit être aux aguets (« veille crédit ») de toute information sur ses clients lui permettant d’apprécier le risque : • visites des clients et des prospects, conversations téléphoniques avec le personnel de l’entreprise qui peut donner de précieuses informations sur l’ambiance, lecture de la presse spécialisée, renseignements auprès de syndicats professionnels pour obtenir des informations sur le secteur, sur la concurrence, conversation avec les confrères ; • analyse des retards de paiement : les retards peuvent provenir d’un litige commercial mais le plus souvent ils sont signe de difficultés financières (lorsqu’une entreprise a des difficultés, ses litiges avec les fournisseurs augmentent ; il s’agit en fait de manœuvres dilatoires pour retarder le paiement) ; • analyse des lenteurs dans le retour des effets de commerce, des demandes de prorogation d’échéance ou des retours d’effets de 122 © Éditions d’Organisation La gestion quotidienne de l’entreprise individuelle commerce avec une modification de la date d’échéance imposée au fournisseur (significatifs de difficultés financières). Sources d’informations à consulter pour des besoins ponctuels Internet Contenu EURIDILE.INPI.FR Base de données de l’Institut National de la Propriété Industrielle (INPI). Accès aux informations légales des entreprises. BIL.FR Base d’Information Légale. INFOGREFFE.FR Base de données des greffes des tribunaux de commerce. BOTTIN.FR Entreprises françaises. SCRL.FR Base de données de la société de recouvrement. INSEE.FR Accès à l’identification d’entreprises de l’INSEE (adresses, code APE, N° SIRET, code APE…) Informations des greffes des tribunaux de commerce sur les sociétés commerciales K bis Extrait d’inscription au registre du commerce et des sociétés, le K bis constitue une véritable carte d’identité de l’entreprise : • la forme juridique de l’entreprise, • son capital social, • l’adresse du siège social et des établissements secondaires, • les noms et adresses des administrateurs et PDG (SA) ou des gérants (SARL), • les noms et adresses des commissaires aux comptes. Les statuts Les bilans Toutes les sociétés de capitaux sont tenues de remettre au greffe du tribunal, pour être annexées au registre du commerce et des sociétés, dans le mois qui suit l’approbation des comptes, deux exemplaires des comptes annuels, du rapport de gestion, de la proposition d’affectation du résultat et la résolution votée en assemblée générale ordinaire et, éventuellement, le rapport du commissaire aux comptes sur les comptes annuels. Le non-respect de cette obligation de publicité des comptes est punissable actuellement d’une amende de 762 € à 915 € qui peut être doublée en cas de récidive. …/… © Éditions d’Organisation 123 Guide pratique de l’entreprise individuelle …/… Les inscriptions de privilèges • Sécurité sociale et régimes complémentaires • Trésor en matière fiscale • Vendeur • Nantissement • Nantissement de l’outillage et du matériel d’équipement Les inscriptions de crédit-bail Engagements financiers de l’entreprise. L’état des protêts Actes authentiques, dressés par un huissier de justice pour constater : • un refus de paiement de lettres de change acceptées, billets à ordre ou chèques ; • ou un refus d’acceptation de lettres de change. Les warrants Ce sont des billets à ordre souscrits par une entreprise qui donne, en garantie de sa signature, des marchandises qui sont déposées dans les magasins généraux ou conservées par l’entreprise mais isolées des autres produits. 3.2. Gérez vos créances clients ! Pour éviter les retards dans les règlements, l’entreprise doit faire pression sur le client : • relances envoyées dès que le délai de paiement n’est pas respecté ; • relance téléphonique préventive car souvent les lettres de • • • • relance ne sont pas prises en compte : trois ou quatre jours avant l’échéance, téléphoner au client pour l’inciter à ne pas oublier le règlement ; visite sur place pour une créance qui tarde à être réglée : le chef d’entreprise se rend chez le client pour faire pression et analyser la gravité de la situation ; facturation d’agios pour le délai supplémentaire que s’octroie le client ; proposer un règlement par acompte ; proposer un paiement comptant sous escompte. Les conditions générales de vente doivent, conformément à la loi du 31 décembre 1992 applicable depuis le 1er juillet 1993, comprendre : • un terme de paiement et une date de paiement qui doit figurer en clair sur la facture ; 124 © Éditions d’Organisation La gestion quotidienne de l’entreprise individuelle • éventuellement, des conditions d’escompte pour paiement anticipé ; les modalités d’escompte comprenant le taux d’escompte applicable doivent figurer sur la facture sauf si les conditions générales de vente prévoient un paiement comptant ; • les pénalités pour paiement tardif (la loi prévoit un taux plancher de 1,5 fois le taux de l’intérêt légal mais elle ne prévoit pas de taux plafond). Attention à la clause de réserve de propriété : la seule mention de la clause de réserve de propriété sur la facture est le plus souvent inopérante puisqu’elle est reçue par l’acheteur après la livraison ; les tribunaux, en cas de dépôt de bilan contestent et rejettent systématiquement ce type de clause. Il faut une lettre d’acceptation de la clause de réserve de propriété : • une lettre du fournisseur sur laquelle le client confirme son accord en apposant sa signature, la date et son cachet commercial ; • ou une lettre d’acceptation émise directement par le client. 3.3. Les garanties de paiement en cas de risque d’insolvabilité Zoom N° 44 ❍ Des informations complémentaires Le Centre de documentation et d’information sur les Assurances (CDIA) fournit des fiches techniques sur l’assurance des crédits commerciaux sur le site Internet de la Fédération française des sociétés d’assurance (FFSA) www.ffsa.fr dans la rubrique « L’assurance et l’entreprise ». ❍ 3.3.1. L’assurance crédit L’assurance crédit permet à l’entreprise de se couvrir contre le risque d’insolvabilité de sa clientèle au moyen du paiement d’une prime d’assurance. © Éditions d’Organisation 125 Guide pratique de l’entreprise individuelle L’assurance crédit porte généralement sur la totalité du portefeuille client pour les opérations réalisées en France. Sélection et suivi de la clientèle Le fournisseur souscrit un contrat par lequel il s’engage à fournir à l’assureur son fichier clients avec d’autres informations, dont la ligne de crédit nécessaire. L’assureur segmente la clientèle en trois groupes : • les clients exclus car considérés comme non solvables ; • les clients dénommés : clients dont l’encours dépasse un montant de 4 500 € à 7 600 € ; l’assureur les étudie de manière approfondie et délivre des agréments partiels ou totaux ; • les clients non dénommés : clients dont l’encours est inférieur au montant de 4 500 € à 7 600 € ; ces petits clients ne font pas l’objet d’un agrément qui est réputé automatique. L’assureur exerce un suivi continu de la clientèle de l’entreprise assurée : à tout moment, en fonction des informations dont il dispose, il peut réduire ou résilier sa garantie sur certains clients de l’assuré. L’entreprise assurée peut demander, si cela est nécessaire, des extensions de ligne de crédit sur ses clients. L’assurance est « concertée » si elle laisse un pouvoir d’auto-arbitrage à l’assuré : l’entreprise ne doit demander un agrément qu’au-delà d’un certain seuil de crédit. Indemnisation en cas de défaillance du client L’indemnité : • est déterminée en fonction des clauses du contrat ; • ne couvre jamais la totalité du sinistre ; • est plus forte sur les clients dénommés que sur les clients non dénommés : • 70 à 85 % de la perte* relative à des créances sur clients dénommés ; • 50 à 60 % de la perte* relative à des créances sur clients non dénommés. * 126 Créance client irrécouvrable + frais de contentieux exposés en vue du recouvrement. © Éditions d’Organisation La gestion quotidienne de l’entreprise individuelle 3.3.2. L’affacturage L’entreprise transfert ses créances commerciales à une société d’affacturage, le factor, qui garantit le recouvrement et le paiement de la créance. Le factor : • paye comptant à l’entreprise les créances clients cédées ; • prend à son compte un éventuel risque d’impayé ; • gère les comptes clients de l’entreprise : relances, etc. Le coût de l’affacturage est relativement élevé : 0,5 à 1,5 % du chiffre d’affaires cédé. Les relances de paiement envoyées par la société d’affacturage peuvent être mal comprises par les clients sur le plan commercial. 3.3.3. La caution et l’aval La caution s’engage vis-à-vis du fournisseur à le payer si le client pour lequel il se porte caution est défaillant. Pour que la caution soit efficace comme garantie, l’entreprise doit s’assurer de la solvabilité de la caution. La personne qui donne son aval prend l’engagement de payer à l’échéance l’effet de commerce dans les mêmes conditions que le client. L’aval peut être donné par le dirigeant à titre personnel ; la maison mère du client ; un banquier ou une société d’affacturage ; ou un tiers. L’aval peut figurer sur l’effet ou constituer un acte séparé. © Éditions d’Organisation 127 Guide pratique de l’entreprise individuelle Zoom N° 45 ❍ Aval et caution donnés par une société par actions L’aval et la caution donnés par une société par actions (SA, SAS, SARL) nécessitent obligatoirement une autorisation préalable du conseil d’administration. • à défaut d’autorisation par le conseil d’administration, la garantie donnée par le dirigeant au nom de la société par son dirigeant et qui excède ses pouvoirs légaux ne peut engager la société ; • avant d’accepter une caution ou un aval, il est prudent de demander une copie du procès-verbal d’autorisation. ❍ 3.3.4. La facture protestable La facture protestable permet d’accroître les garanties de paiement. Elle doit indiquer impérativement une date de règlement fixe et précise, comporter la mention « facture transmissible à une banque ou à un établissement financier en application du titre ler de l’ordonnance n° 67-838 du 28/09/1967 portant réforme du crédit aux entreprises. Le refus ou les réserves doivent être formulés dans les quinze jours », et être établies en deux exemplaires numérotés. Si le client n’a pas formulé de refus ou de réserves, et s’il n’effectue pas le règlement dans le délai imparti, vous pourrez demander à un huissier de dresser un protêt qui sera publié au greffe du tribunal de commerce, et qui vous permettra, avec l’accord du juge, de prendre des mesures conservatoires (saisir, par exemple, les biens mobiliers de votre créancier). 3.4. Comment récupérer la créance en cas de non paiement Afin de recouvrer une créance, le chef d’entreprise peut engager les procédures suivantes : • l’action en paiement introduite devant le tribunal de grande instance ou d’instance (si le débiteur n’est pas commerçant) ou devant le tribunal de commerce (s’il est commerçant). Cepen128 © Éditions d’Organisation La gestion quotidienne de l’entreprise individuelle dant, cette procédure est beaucoup trop longue pour une entreprise qui doit récupérer le plus rapidement possible sa créance ; • la requête en injonction de payer ; • et le référé provision. Les deux dernières procédures peuvent être complétées par des mesures conservatoires qui interdiront au débiteur de se rendre insolvable avant que la décision du tribunal ne soit rendue exécutoire, et qui exerceront une pression suffisamment forte pour l’inciter à payer sa créance. Pour un règlement par chèque sans provision, le créancier peut faire protester le chèque. 3.4.1. La requête en injonction de payer Pour engager cette procédure, le chef d’entreprise doit présenter une « requête en injonction de payer » au président du tribunal de commerce ou du tribunal d’instance dans le ressort duquel se trouve le domicile du débiteur. Cette requête peut être présentée par le chef d’entreprise lui-même au moyen d’imprimés mis à sa disposition par le greffier du tribunal. Si cette requête est considérée comme justifiée par le président du tribunal, il délivre une ordonnance portant injonction de payer et, si le client ne forme pas opposition dans le mois qui suit, le chef d’entreprise peut demander au greffier du tribunal que soit opposée sur l’ordonnance une formule exécutoire qui permettra de pratiquer toutes les voies d’exécution prévues par la loi pour recouvrer la créance. Si le client forme opposition, il faut introduire une action en paiement avec toute la lenteur que comporte cette procédure. 3.4.2. Le référé provision Conscient des lenteurs des procédures, le législateur a créé une procédure accélérée qui ne s’applique qu’aux affaires dans lesquelles l’obligation du créancier n’est pas sérieusement contestable. © Éditions d’Organisation 129 Guide pratique de l’entreprise individuelle Le créancier peut alors, par l’intermédiaire d’un avocat, obtenir dans un délai de 15 jours, une audience du président du tribunal compétent qui lui permettra de bénéficier d’une ordonnance ayant un caractère exécutoire, même si le débiteur fait appel de cette décision. 3.4.3. Les mesures conservatoires Un créancier peut demander à son avocat de prendre des mesures conservatoires avant l’introduction, ou durant le déroulement, d’une action en justice : • faire inscrire une hypothèque provisoire sur les immeubles du débiteur ; • faire inscrire un nantissement provisoire sur son fonds de commerce ; • pratiquer, sous certaines conditions, une saisie arrêt sur les comptes bancaires ou postaux du débiteur et sur ses salaires ; • pratiquer une saisie conservatoire. Ces mesures exercent une pression suffisamment forte sur le client pour l’inciter à payer avant même qu’une action en justice ne soit introduite. Le débiteur est en droit de réclamer des dommages-intérêts si une mesure conservatoire n’était pas justifiée. 3.4.4. Le protêt des chèques Si le chèque de votre client ne peut être honoré par le banquier par manque de provision, vous pouvez demander à votre banque de faire protester le chèque, par acte d’huissier, dans un délai de huit jours. Le chèque protesté vous permet alors, avec l’accord du juge, de saisir à titre conservatoire les biens mobiliers du tireur, ou de prendre toute autre mesure conservatoire. Demandez à votre banquier quelle est la démarche à suivre et quel est son coût. 130 © Éditions d’Organisation