ÉLECTROTECHNIQUE

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p.IWebLasne Page I Vendredi, 23. novembre 2007 12:21 12
ÉLECTROTECHNIQUE
Luc Lasne
Professeur agrégé à l’université de Bordeaux 1
Préface de
Jean-Claude Gianduzzo
Enseignant-Chercheur en physique et électrotechnique
à l’université de Bordeaux 1
© DUNOD 2008 - Électrotechnique - Luc Lasne
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Les réseaux électriques
© Dunod – La photocopie non autorisée est un délit
Actuellement, la très grande majorité de l’énergie électrique consommée dans le monde est acheminée par l’ensemble des réseaux électriques existants. En un peu plus d’un siècle, ce que représente
le terme de « réseau électrique » est passé de la mutualisation de quelques unités de production à
une interconnexion généralisée au niveau des continents tout entiers. Si les étendues et les ramifications qui caractérisent ces réseaux en multiplient les performances et les potentiels, il faut savoir
qu’elles en font également des systèmes complexes, gérés par une multitude d’intervenants et
tiraillés par des contraintes technico-économiques de plus en plus pesantes.
Sur le plan purement technologique, ces contraintes sont principalement liées au fait que
l’électricité ne se stocke pratiquement pas, et que par conséquent, l’intégralité des transferts
d’énergies est gérée en « temps réel » de telle manière à conserver à la fois les valeurs normalisées
des tensions et de la fréquence, ainsi que des marges de puissance permettant d’assurer la sûreté
du système. Parallèlement à cela, les particularités géographiques, la répartition des populations
et des lieux de consommation, l’interconnexion internationale, l’aspect imprévisible des avaries,
etc., sont autant de contraintes supplémentaires qui façonnent la réalité technique et stratégique
des réseaux d’aujourd’hui.
Enfin, « le réseau » électrique est un acteur incontournable et extrêmement familier de notre
vie quotidienne. Ses rares défaillances font réaliser à chacun à quel point nos sociétés en sont
dépendantes. De par cette proximité, l’étudier, appréhender ses contraintes, connaître son mode de
fonctionnement constituent une approche très instructive et absolument centrale dans la « culture
électrotechnique ». Ce chapitre aborde les principes généraux de fonctionnement et de conception
des réseaux ainsi qu’un aperçu de la modélisation et des calculs qui s’y rapportent.
1. STRUCTURE GÉNÉRALE DES RÉSEAUX ÉLECTRIQUES
De façon très générique, un réseau électrique est toujours dissocié en quatre grandes parties :
• La production : Elle consiste en la génération de l’ensemble de la puissance active consom-
mée par le réseau tout entier. En grande majorité, les tensions associées à cette production
sont produites sous la forme de systèmes triphasés par l’intermédiaire d’alternateurs entraînés
à partir de divers types de sources d’énergie dites « primaires ».
• Le transport : Il consiste à acheminer les puissances produites par les unités de production
auprès des lieux de consommation. Les grandes centrales étant en général groupées autour
des fleuves, des cours d’eau et des océans, le « grand transport » consiste à parcourir de
longues distances en direction des extrémités des territoires nationaux. L’ordre de grandeur
de ces distances impose, entre autre, le fait de véhiculer l’énergie électrique sous très haute
tension (voir paragraphe 5).
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Les réseaux électriques
• La distribution : Elle consiste en un maillage fin du territoire permettant à chaque utilisateur
d’être à proximité d’une liaison au réseau. C’est l’ultime ramification des lignes et des
installations qui permet également un passage progressif des très hautes tensions du transport
aux basses tensions de la consommation.
• La consommation : Chaque récepteur électrique connecté au réseau consomme une puissance active et une puissance réactive. La consommation domestique, qui est généralement
majoritaire, est très ramifiée et se fait sous basse tension souvent monophasée (100 à 250 V).
Certains « clients » industriels (grosses usines, ferroviaire, etc.) sont directement reliés en
moyenne, haute ou très haute tension.
La figure 1 représente, de façon très synthétique et symbolique, la structure d’un réseau et de
ses grandes composantes.
Production
Centrales
Transport et Interconnexion
Autres
Réseaux
Distribution et Répartition Consommation
Particuliers
et entreprises
Grosses
industries
Postes
Postes de
d’interconnexion
transformation
Moyenne
Haute et Très Haute
Tension
Tension
Moyenne
Tension
Basse
Tension
Figure 1 Réseau électrique simplifié
2. PRODUCTION DE L’ÉNERGIE ÉLECTRIQUE
La production de l’énergie électrique consiste en la transformation de l’ensemble des énergies convertibles (on parle d’énergies « primaires ») en énergie électrique. De façon prépondérante, la production se fait à partir du pétrole, du charbon, du gaz naturel, de réactions nucléaires, du vent ou de la force hydraulique. En réalité, quelques sources d’énergie
supplémentaires et renouvelables, telles l’énergie solaire, la biomasse, la géothermie, etc.,
existent, et représentent aujourd’hui une
Sources d'énergie électrique en
Sources d'énergie électrique en
part très faible mais croissante de la proFrance (2006)
Allemagne (2006)
Fioul 1,8% Gaz 4,1%
Renouvelable
duction mondiale. Si les sources d’énergies
Nucléaire
4,5%
Renouvelable
Charbon
sont assez diversifiées, il est aujourd’hui
4,7%
12,5%
3,2%
Pétrole
très net que leur répartition est souvent très
36%
inégale et dépend principalement de critères
et de choix économiques et politiques. À Charbon
24%
titre d’information, la figure 2 présente la
85,8%
23%
Nucléaire
Gaz
répartition des sources d’énergie électrique
en France et en Allemagne utilisées lors
de l’année 2006 (source : observatoire de
Figure 2 Sources d’énergies converties
l’énergie).
en électricité en 2006
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2. Production de l’énergie électrique
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Par rapport aux réseaux, l’origine des énergies converties ne constitue pas le seul critère de
classement existant. En effet, les différents types de centrales de production présentent des capacités
et des temps de réaction très divers. D’ailleurs, la caractéristique principale de la production est
qu’elle correspond de façon instantanée à la consommation (étant donné que l’électricité ne se
stocke pratiquement pas). Cette adaptation en « temps réel » aux fluctuations de la consommation
impose ainsi deux contraintes :
• Des moyens de production de masse doivent fournir la partie « moyenne » de la consommation
journalière.
• Des moyens de production « de pointe » doivent permettre l’ajustement exact à la consommation effective.
La figure 3 représente l’évolution journalière (sur 24 heures) de la consommation électrique en
France (hiver 2007). Les proportions des divers moyens de production, c’est-à-dire des diverses
énergies primaires y sont également représentées en un empilement de puissances.
Puissance (TW )
75
Hydro (pom page)
65
60
Gaz
Consom m ation
Hydro
(turbine)
24 h
20 h
16 h
12 h
8h
4h
0h
Charbon
Energie Nucléaire
5
H ydroélectrique (au fil de l’eau)
Hydroélectrique
(Lacs)
Fioul
t
Figure 3 Consommation et proportion des énergies primaires (source : RTE)
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De façon plus pragmatique, il est ainsi d’usage de classer les unités de production électriques
à la fois en fonction du type d’énergie convertie et en fonction de leur dynamique propre. On
distingue alors :
• Les centrales de production de masse : Leur fonction est
de produire la plus grande partie de l’énergie électrique fournie à l’ensemble du réseau. Les puissances générées (jusqu’à
quelque 100 GW) correspondent à des processus dont les
temps de réponse sont grands (quelques heures). La mise en
œuvre de ces centrales est donc programmée à partir d’une
prévision journalière de la consommation moyenne. Les unités de production de masse utilisent principalement l’énergie
nucléaire et thermique.
• Les centrales de production intermédiaire : Leur capacité de pro-
duction moindre (inférieure à 1 GW) correspond en général à une
inertie de fonctionnement également moindre. Leur utilité réside
dans l’ajustement de la production, en fonction d’éventuelles maintenances ou modifications des moyens de production de masse. De
façon plus générale, elles permettent dans certains pays un meilleur
Production de masse
nucléaire
Production de pointe
hydroélectrique
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Les réseaux électriques
équilibrage des sources d’énergie primaires. Ces unités sont en général des centrales thermiques (pétrole, charbon et gaz), mais certains pays possèdent des parcs très importants de
centrales hydroélectriques au fil de l’eau et d’éoliennes de production intermédiaires.
• Les centrales des productions de pointe : Ces unités sont caractérisées
par des temps de mise en fonctionnement très brefs (quelques minutes
ou dizaines de minutes) permettant une réaction rapide par rapport aux
fluctuations de la consommation. Ces unités sont principalement des
éolienne
centrales hydroélectriques dont les puissances ne dépassent pas en général quelque 100 MW. Un avantage supplémentaire, même s’il est assez
discret dans beaucoup de pays, est de permettre un stockage d’énergie Figure 4 Groupes
potentielle dans des bassins ou les parties hautes de certains barrages
de production
(voir figure 3 où le « pompage » est un stockage d’énergie).
3. CARACTÉRISTIQUES GÉNÉRALES DU TRANSPORT
ET DE LA DISTRIBUTION
Les réseaux, en très grande majorité, transportent l’énergie électrique sous la forme de systèmes
triphasés. Les dispositions et grandeurs caractéristiques de ces systèmes sont ainsi :
• Leur fréquence.
• Leurs niveaux de tension.
• Leurs différents types de couplage.
Fréquence normalisée
Les grands réseaux électriques sont des systèmes interconnectés qui présentent une fréquence
uniforme afin de garantir le bon fonctionnement de leurs appareillages, ces derniers étant optimisés
pour une valeur précise de la fréquence.
Dans le monde, on ne recense que deux valeurs distinctes de fréquence :
• « Le 50 Hz » caractérise les réseaux Européens, Asiatiques, Russes et Africains.
• « Le 60 Hz » caractérise les réseaux Américains, Canadiens et Japonais (en réalité, au Japon,
les deux fréquences sont utilisées).
Figure 5 Fréquences et tensions domestiques dans le monde
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3. Caractéristiques générales du transport et de la distribution
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La figure 5 représente la répartition mondiale de ces deux fréquences. Par curiosité, il est
intéressant de se demander pourquoi des fréquences si basses (50 Hz et 60 Hz) ont été choisies.
Ces valeurs sont justifiées, en partie, par le fait que les conducteurs qui constituent les réseaux
électriques représentent des « iso-potentielles », c’est-à-dire présentent en tout point le même
potentiel électrique. Ceci n’est possible en alternatif que si la « longueur d’onde » de la tension
est très supérieure à la longueur de la ligne. Dans le cas contraire, des courants de « déplacement »
circulent dans les conducteurs du fait même de la différence de potentiel existant entre leurs extrémités. À la fréquence f = 50 Hz , la longueur d’onde s’écrit : l = c/ f = 3.108 /50 = 6 000 km .
Cette valeur autorise ainsi l’utilisation de lignes en antenne pouvant parcourir des centaines à des
milliers de kilomètres.
Tensions normalisées
Chaque réseau électrique est organisé à partir de quelques niveaux de tension normalisés. Le
respect de ces valeurs précises (à quelques % près) est une nécessité pour exploiter les structures de
transport en assurant leur sûreté, le respect des plages contractuelles, et de façon générale afin de
réduire les coûts et les contraintes sur les appareillages. À titre d’exemple, les tensions normalisées
du réseau électrique Français (EDF et RTE) sont indiquées dans le tableau 1, accompagnées de
photographies qui illustrent l’allure les lignes correspondantes.
HTB
Usage
Tensions
Normalisées
Noms (standard
Européen)
Grand
transport
national et
interconnexion
225 kV / 400 kV
(THT)
90 kV / 63 kV
(HT)
HTB (50 kV à
400 kV)
HTB 3 : 400 kV
HTB 2 : 225 kV
HTB 1 : 90 et 63 kV
Aspect visuel des lignes
Ligne 225 kV
HTA
Lignes
interrégionales
et répartition
régionale
33 kV / 20 kV
/ 15 kV
(MT)
HTA (1 kV à 50 kV)
Poste de répartition
90 kV
BT
Répartition
locale,
distribution et
consommation
400 V
230 V Mono
(BT)
BT < 1 kV
Pylône 230/400 V 4 fils
Tableau 1 Tensions normalisées du réseau national français, lignes BT, HTA et HTB
Les plus hautes valeurs de tension correspondent au domaine du « grand transport » et les
plus petites au domaine de la consommation. Parallèlement, la figure 5 précise également les
différentes valeurs des tensions domestiques (BT) monophasées dans le monde. Si ces tensions ne
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Les réseaux électriques
sont pas toujours les mêmes en fonction des pays, il faut savoir que les ordres de grandeurs qui les
caractérisent sont identiques.
NB : Les tensions précisées dans le tableau 1 correspondent aux tensions composées (ou « entre
phase »). Il y a une justification à cela : c’est le seul type de tension mesurable quel que soit le
type de système triphasé considéré (triangle, étoile, avec ou sans neutre).
Maillage territorial et interconnexion
L’objectif des réseaux électriques est de « mailler » les territoires de la façon la plus fine possible.
Ils sont donc organisés à partir de grandes lignes qui se ramifient en des arborescences permettant
de couvrir l’intégralité des zones de consommation. Par ailleurs, les réseaux étant gérés de façon
nationale, il existe entre les pays des liaisons qui leur permettent d’échanger directement de
l’énergie sous forme électrique, cela s’appelle « l’interconnexion internationale ». On montre par
ailleurs que cette dernière permet à chaque pays de ne pas surdimensionner son parc de production
pour faire face aux pointes de consommation. Cette interconnexion justifie surtout le fait que les
réseaux électriques sont le support d’un marché de l’énergie étendu aux continents. De façon assez
descriptive, il est suffisant, à propos du maillage territorial, de retenir les points suivants :
• Les lignes « HTB » servent à couvrir les distances les plus longues. Ces lignes parcourent
plusieurs centaines voire plusieurs milliers de kilomètres et il est possible de les considérer comme les « artères principales » des réseaux. Ce sont aussi elles qui aboutissent aux
interconnexions transfrontalières.
• Les lignes « HTA » servent à mailler plus finement les gros apports en puissance aux niveaux
des diverses régions des territoires. Elles aboutissent à des postes de répartition et d’interconnexion d’où partent une multitude de tronçons de plus faible tension et plus faible puissance,
en cela elles constituent les « artères secondaires » des réseaux.
• Les lignes « BT » enfin représentent les « vaisseaux sanguins » des réseaux, c’est-à-dire
le maillage le plus fin permettant à chaque consommateur d’être à proximité d’une source
d’énergie électrique.
Angleterre
Belgique
Allemagne
Luxembourg
Suisse
Italie
Italie
Espagne
Espagne
Figure 6 Maillage HTB France
À titre d’exemple, la figure 6 représente le réseau HTB 400 kV français en 2000 (source : RTE)
ainsi que son interconnexion européenne.
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4. Principes fondateurs des réseaux électriques
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Couplages des systèmes triphasés
Les réseaux électriques sont organisés à partir de systèmes triphasés. Ces derniers peuvent présenter
des couplages triangle ou étoile et, plus précisément, présenter un neutre relié ou non. Cette dernière
remarque constitue une caractéristique majeure des différents types de tronçons et on retiendra les
notions suivantes :
• Les domaines du transport et de la répartition (HTB et HTA) sont organisés sur le respect
prioritaire des contraintes liées à la minimisation des pertes et des coûts des installations.
En conséquence, ces tronçons de réseau sont conçus de telle manière à présenter un nombre
minimal de conducteurs électriques. Autrement dit, le transport et la répartition représentent
quasi exclusivement des systèmes triphasés « trois fils » (c’est-à-dire sans neutre). Une conséquence majeure de cette remarque est que, pour garantir l’équilibre des tensions produites,
ces parties du réseau doivent être équilibrées (en courant), ce qui constitue une contrainte de
répartition des puissances et des impédances sur les trois phases de l’ensemble de la structure.
• À l’opposé, les installations BT (c’est-à-dire la distribution locale) sont organisées dans le
respect prioritaire de l’équilibre des tensions fournies, le plus souvent à des clients monophasés
indépendants. En conséquence ces parties du réseau sont constituées de systèmes triphasés dits
« quatre fils », dont le neutre est créé localement, au secondaire des postes de transformation
de quartiers. Le neutre ainsi fourni aux clients entre d’ailleurs dans l’aspect contractuel de
l’apport d’énergie et dans la constitution des régimes de protection des installations (ou
« régimes de neutre »).
4. PRINCIPES FONDATEURS DES RÉSEAUX ÉLECTRIQUES
En règle générale, les grands réseaux électriques du monde se ressemblent. Cette similitude
s’explique par l’existence de grands principes, de grandes contraintes, qui justifient les structures
et la nature des installations propres au transport et à la distribution de l’énergie électrique. Il est
important, pour un électrotechnicien, de bien saisir ces différentes notions fondatrices.
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Transport en haute tension, facteur de puissance quasi unitaire
De façon absolument générale, il n’est concevable de transporter l’énergie électrique sur de grandes
distances qu’à partir d’une tension relativement élevée. Il suffit, pour s’en convaincre, de considérer
le schéma simplifié d’un transport d’énergie électrique représenté sur la figure 7, et de noter les
points suivants :
• Tout conducteur électrique possède une certaine impédance. Transporter l’énergie électrique
sur de longues distances revient à utiliser des conducteurs très longs dont l’impédance équivalente n’est absolument pas négligeable. Sur la figure 7, La partie réelle de cette impédance
correspond à une résistance notée R.
• Le transport de l’énergie électrique revient, de façon générale, à la liaison par une ligne (ou
un câble) d’une source vers un récepteur. L’objectif principal de cette liaison est la fourniture
de la puissance P = k.V .I où V est la tension efficace appliquée à la charge, I le courant
efficace et k le facteur de puissance du récepteur.
• La puissance perdue par effet Joule dans la ligne s’écrit ainsi :
PR = R.I 2 = R.
P2
.
k 2 .V 2
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Les réseaux électriques
Longue distance
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V
P, Q
PR
I
V0
P, Q
P=k.V.I
V
Figure 7 Transport simplifié de l’énergie électrique
À puissance fournie constante, la minimisation des pertes dans la ligne passe donc par deux
points essentiels :
– La tension V (et donc V0 ) doit être la plus grande possible.
– Le facteur de puissance doit être le plus proche possible de l’unité.
Autrement dit, le transport lointain de l’énergie électrique ne peut se faire à bon rendement que
sous haute, voire très haute, tension. On montre parallèlement que l’usage de hautes tensions permet
à la fois de réduire la sensibilité des tensions à la circulation d’énergie réactive et d’augmenter
les puissances maximales transmissibles.
En pratique, les plus hautes tensions utilisées dans le monde correspondent à des territoires
très étendus où les distances entre production et consommation sont très grandes. Si la valeur
de 400 kV constitue la tension d’exploitation la plus haute d’une majorité de grands réseaux, il
existe au Canada des lignes à 750 kV entre phases, et on recense même en Russie la valeur de
1 MV. Concrètement, il devient très difficile d’aller au-delà de ces tensions en raison des difficultés
d’isolement des câbles par rapport aux pylônes. Parallèlement, les réseaux fonctionnent de telle
manière à ce que le facteur de puissance associé à l’ensemble des récepteurs soit très proche de
l’unité. C’est, sous un certain angle, cette règle qui justifie l’énorme travail de régulation et de
compensation des énergies réactives abordé au paragraphe 7.
NB : À tension donnée, il est également possible de minimiser les pertes en minimisant la résistance
des lignes. Ceci n’est possible qu’en augmentant la section équivalente des conducteurs, c’est-àdire également leur poids et le gabarit de l’ensemble des infrastructures. Concrètement, ce n’est
pas envisageable sur de longues distances.
Utilisation du régime alternatif sinusoïdal
Si la nécessité d’utiliser des hautes tensions paraît très claire, il faut reconnaître que le choix du
régime alternatif sinusoïdal n’est pas tout à fait aussi évident.
Pour la « petite histoire », ce choix a d’ailleurs fait, à la fin du XIXe siècle, l’objet d’une terrible
opposition des deux inventeurs à l’origine de l’électrification : Tomas Edison et Nicolas Tesla.
Si c’est finalement le régime alternatif qui s’est imposé (grâce à Nicolas Tesla et l’électrification
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4. Principes fondateurs des réseaux électriques
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convaincante de plusieurs dizaines de kilomètres), il est intéressant de comprendre pourquoi,
sachant que la question de l’électrification générale en courant continu s’est posée jusque dans les
années 1950.
De façon tout à fait naturelle, il est possible de comparer les avantages et inconvénients des
régimes alternatif et continu, ceux-ci sont énoncés dans le tableau 2 (source de cette comparaison :
Article « liaisons France/Angleterre à courant continu IFA 2 000 » Alain Cunière 1999).
Avantages
Inconvénients
Régime alternatif
Régime continu
• Permet l’utilisation de transfor-
• Pas d’effets réactifs, le facteur de
mateurs pour élever et abaisser la
tension.
• Facilite la coupure des courants
par le passage naturel par zéro 2
fois par période c’est-à-dire 100 fois
par seconde.
• Production directe par alternateurs.
puissance est unitaire (en dehors de
déformations).
• Facilite l’interconnexion de des
réseaux, il suffit d’avoir partout la
même tension.
• Pas d’effet de peau, les câbles et
les lignes sont plus simples et moins
chers.
• Implique des effets inductifs
• Difficulté de couper les courants
et capacitifs pénalisants pour un
certain nombre de raisons (facteur
de puissance < 1 principalement).
• Difficulté d’interconnexion de
plusieurs réseaux (il faut garantir
l’identité de la tension, de la
fréquence et de la phase).
• Implique un effet « de peau »
(voir partie sur les lignes et câbles),
d’où la nécessité de câbles et lignes
adaptés et donc plus chers.
continus, d’où des dispositifs de coupure plus performants et plus chers.
• Terminaisons très coûteuses.
• Impossibilité de produire ou d’élever la tension dans le domaine des
très hautes tensions d’où des pertes
importantes sur les lignes.
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Tableau 2 Comparaison des régimes alternatifs et continus dans le transport de l’énergie électrique
Il apparaît donc qu’à chaque avantage de l’un corresponde un inconvénient de l’autre et vice
versa.
De façon prépondérante cependant, il est possible de dégager deux éléments principaux qui sont
à l’avantage du régime alternatif :
• L’utilisation (massive) du transformateur n’est possible qu’en régime alternatif. C’est le seul
moyen, encore actuellement, permettant d’élever la tension à hauteur de 400 kV (750 kV ou
même 1 MV).
• Le coût au kilomètre d’un réseau en régime alternatif a tendance à augmenter avec la distance
à parcourir, à cause essentiellement du coût des conducteurs qui sont plus complexes qu’en
continu. À l’inverse, le coût au kilomètre d’un réseau continu a tendance à chuter avec la
distance étant donné que ce sont uniquement les terminaisons de ce réseau qui sont complexes.
En définitive, la distance critique en dessus de laquelle un réseau continu revient moins cher
correspond à environ 800 km (voir figure 8). Il est donc en moyenne économiquement plus
avantageux de concevoir un réseau en alternatif qu’en continu, surtout pour les petits pays.
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Continu
Alternatif
~ 800 km
Longueur de
l’installation
Les réseaux électriques
Coût au km
de
l’installation
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Figure 8 Allure des courbes de coût au km
La justification de la nature sinusoïdale des tensions et courants utilisés est également intéressante. Il est en effet légitime de se demander pourquoi le régime sinusoïdal pur est le seul utilisé
et non pas des régimes de tension carrées, triangulaires, etc. Pour répondre à cette question il
suffit d’avoir conscience que les grandeurs électriques alternatives mais non sinusoïdales sont
décomposables en un « fondamental » auquel s’ajoute une série d’harmoniques dont les fréquences
sont multiples de la fréquence fondamentale (voir chapitre 15). À partir de là, la réponse tient en
deux points :
• La puissance active consommée par un récepteur consommant un courant non sinusoïdal
n’est liée, dans la plupart des cas, qu’à la composante fondamentale de ce courant. L’ensemble des harmoniques impose alors un courant efficace plus important qu’il l’aurait été
en régime sinusoïdal, ce qui revient à la considération d’un facteur de puissance de moindre
valeur (autrement dit, la présence de puissance déformante nuit au facteur de puissance).
• En régime alternatif, l’effet de peau (voir partie sur les lignes et câbles) est d’autant plus sensible que la fréquence des grandeurs est élevée. Les composantes harmoniques, de fréquence
multiple de la fréquence fondamentale, circulent ainsi dans des sections réduites par rapport à
la section principale des conducteurs. La résistance apparente des lignes et câbles est alors
beaucoup plus importante pour les harmoniques, les pertes en lignes correspondantes le sont
également.
En conséquence, il est impératif, dès lors que le transport et la distribution de l’énergie électrique
sont effectués en régime alternatif, que ce régime soit plus particulièrement « alternatif sinusoïdal ».
Utilisation de systèmes triphasés
Les systèmes triphasés, dans le cas de la production, du transport ou de la distribution de fortes
puissances électriques, sont toujours utilisés au dépend des systèmes monophasés. Pourtant, il est
légitime de se demander pourquoi alors que leur apparence plus lourde et plus complexe laisserait
penser le contraire. La justification de cet état de fait, déjà évoquée au chapitre 3.1, s’articule
autour des remarques suivantes :
• À puissance active constante, un système triphasé « trois fils » requiert deux fois moins de
volume de conducteurs électriques qu’un système monophasé. En conséquence, un système
triphasé permet de gagner un « facteur 2 » sur l’ensemble du poids, du coût, du gabarit de
pylônes, etc., relatifs aux lignes et câbles qui le constituent.
• La puissance massique des machines triphasées (notamment des alternateurs) est supérieure
à la puissance massique de leurs équivalents monophasés.
• Les alternateurs, pour des raisons d’optimisation ont intérêt à être triphasés et équilibrés.
L’utilisation d’un réseau et de charges triphasées est directement adaptée à cet objectif.
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5. Phénomènes liés au fonctionnement des réseaux électriques
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• La puissance fluctuante, dans un système triphasé équilibré, est nulle. En conséquence,
l’apport d’énergie électrique opéré par un tel système est parfaitement continu. Cette particularité, dans le fonctionnement de tous les actionneurs électriques triphasés, permet d’éviter
les vibrations et le phénomène de « balourd » qui sont causés par la présence de couples
« vibratoires » liés à la puissance fluctuante.
5. PHÉNOMÈNES LIÉS AU FONCTIONNEMENT DES RÉSEAUX
ÉLECTRIQUES
Pour bien comprendre les principes de fonctionnement des réseaux électriques, il est nécessaire de
prendre conscience d’un certain nombre de phénomènes qui limitent leurs possibilités, ou même
mettent en péril leur sûreté. C’est de la gestion optimisée de ces phénomènes et de leurs conséquences que découlent les grandes stratégies de conduite évoquées dans les chapitres ultérieurs.
Puissance maximale transmissible
© Dunod – La photocopie non autorisée est un délit
Toute association « générateur / récepteur » présente une limite de puissance transmissible de l’un
vers l’autre. Tout réseau électrique, dès lors qu’il est globalement équilibré, peut être ramené à une
telle association et est alors tributaire d’une grandeur importante appelée « puissance maximale
transmissible ». La figure 9 représente le schéma équivalent monophasé de tout réseau, ou toute
partie de réseau, en régime permanent équilibré (voir les éléments de modélisation introduits
au paragraphe 7). Sur ce schéma, la source de tension V r est la tension à vide des alternateurs,
l’impédance Z l est équivalente à l’ensemble des lignes et des transformateurs, la charge est
représentée par l’impédance Z c .
La règle, souvent utilisée en électronique, de « l’adaptation d’impédances » décrit le fait que
la puissance P transmise au récepteur est maximale si Z c = Z l∗ (ce qui implique que Z c = Z l ).
En d’autres termes, la modification de la charge ne permet pas de dépasser une certaine puissance
V2
Pmax = r . La figure 9 représente également l’évolution de P/Pmax et du rendement h du
4.Z l
système en fonction de la résistance de la charge.
Vr
Zl
I
P
Vc
Zc
P/Pmax
η
1
η
0,5
0
Rl (Zc = Zl*)
Rc
Figure 9 Puissance maximale transmissible
Le point de puissance maximale est facile à repérer sur ce graphique et correspond à un rendement de valeur 0,5.
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Les réseaux électriques
Ne pas confondre l’état de puissance maximale à celui de rendement maximal. Les réseaux
électriques nécessitant des valeurs élevées de leur rendement global, on comprendra que la
puissance maximale transmissible constitue une limite haute qu’il est maladroit de penser
atteindre. En d’autres termes, chaque partie des réseaux électriques « travaille » bien en
deçà de cette puissance.
Couplage « fréquence / puissance »
Tout alternateur, lorsqu’il débite de la puissance vers une charge, est tributaire du principe fondamental de la dynamique en rotation (voir chapitre 12.2 et figure 10) :
dV
.
couples = Cmeca − Cm − Celec = J
dt
En négligeant les pertes associées à l’alternateur, il est possible de relier alors l’évolution de sa
vitesse aux puissances amenées et reçues :
Cmeca − Celec =
V1
Z=Z.ejϕ
I1
Pmeca
Pelec
dV
−
=J
.
V
V
dt
M.S.
Cmeca (Nm)
Ω (rad/s)
Ie
Pelec=3VIcosϕ
Pmeca=Cmeca.Ω
Figure 10 Alternateur débitant sur une charge
La fréquence des tensions produites par l’alternateur étant proportionnelle à la vitesse de rotation,
cette équation permet de comprendre l’origine de ses fluctuations, à savoir :
• En régime permanent, c’est-à-dire à vitesse et fréquence constantes, il y a égalité entre la
puissance produite et la puissance consommée.
• Lors d’une évolution à la hausse de la puissance consommée (Pelec ), il y a « freinage » de
dV
< 0) et diminution de la fréquence.
dt
• Lors d’une évolution à la baisse de la puissance consommée, il y a « accélération » de
dV
> 0) et augmentation de la fréquence.
l’alternateur (
dt
Autrement dit, de par la proportionnalité entre vitesse et fréquence, il existe un couplage fort
entre la fréquence d’un réseau (qui n’est autre qu’un « regroupement » d’alternateurs) et le bilan
des puissances. Le fait de garantir la constance de la fréquence consiste ainsi à adapter en permanence le « niveau de production » à celui de la demande en permettant aux divers appareillages
de fonctionner à leur pulsation optimale (c’est-à-dire de ne pas « subir » l’égalité « production
= consommation »).
l’alternateur (
NB : Les fluctuations admissibles de la fréquence des réseaux sont de l’ordre de ± 1 % de la valeur
nominale.
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5. Phénomènes liés au fonctionnement des réseaux électriques
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Couplage « tension / puissance active »
Lorsqu’une charge consomme une puissance, le courant qu’elle appelle sur le réseau contribue à
faire varier la tension produite par ce dernier. Si la notion de « chute de tension » provoquée par
la charge n’est pas surprenante, il est important de comprendre comment elle s’exprime dans une
optique de « transit de puissance ».
Pour cela, il est possible de repartir du schéma équivalent représenté sur la figure 9 et de calculer
l’évolution de la tension efficace Vc aux bornes de la charge en fonction de la puissance P qu’elle
consomme.
De façon absolument générale (mais non démontré ici en raison de la lourdeur inutile des
calculs), les allures des courbes Vc (P) sont conformes à celles représentés sur la figure 11, l’impédance de la ligne étant alors considérée comme globalement inductive et la charge successivement
inductive, résistive et capacitive.
Les conclusions relatives à ces courbes sont les suivantes :
• Les charges globalement inductives et résistives contribuent à faire chuter la tension.
• Les charges globalement capacitives contribuent à élever la tension dans la zone de travail.
• Quels que soient la nature de la charge et l’ordre de grandeur de l’impédance de ligne, une
limitation en puissance active apparaît : c’est la puissance maximale transmissible.
• Au-delà de cette limitation, la tension produite s’écroule de façon irréversible.
Zone de « travail » (P<<Pmax)
Vc
Charge « capacitive »
Vr
Charge « résistive »
Pmax
Charge « inductive »
Ecroulement
Pmax
Pmax
P
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Figure 11 Écroulement de la tension d’un réseau simplifié
Il est alors important de comprendre que le phénomène de « chute de tension » est très local,
qu’il est lié à la fois à la puissance consommée par la charge et à la nature de cette charge. Par
ailleurs, un phénomène supplémentaire, portant le nom « d’écroulement de la tension », apparaît.
Cet écroulement est une réalité physique associée aux réseaux contre lequel un certain nombre de
sécurités sont mises en œuvre.
NB : Les fluctuations admissibles des tensions sur les réseaux sont de l’ordre de ±5 % des valeurs
nominales.
Couplage « tension / puissance réactive »
La puissance réactive qui transite sur les réseaux joue également un rôle déterminant à cause
de l’aspect globalement inductif des charges et des lignes. À cet effet, il est très important de
comprendre et retenir les notions suivantes :
• Par nature, la majorité des charges de puissance supérieure à quelques kilowatts qui sont
connectées aux réseaux sont globalement inductives (moteurs, machines, transformateurs,
etc.).
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Les réseaux électriques
• Les éléments mêmes qui constituent de façon prépondérante les réseaux, à savoir les trans-
formateurs et les lignes, sont globalement inductifs. Le fait de négliger, dans leurs schémas
équivalents, les résistances devant les réactances revient au fait de considérer que les défauts
constitutifs de ces éléments se ramènent à une consommation d’énergie réactive.
• La présence généralisée de puissance réactive justifie, à puissance active constante (c’est-àdire à consommation constante), la détérioration du facteur de puissance et l’élévation des
courants de ligne.
• L’élévation des courants justifie des pertes plus importantes sur les lignes (donc également
des pertes économiques) ainsi qu’une aggravation des chutes de tension dues aux réactances
de lignes et aux transformateurs.
La figure 12 représente le schéma équivalent monophasé d’un réseau ou d’une partie de réseau
en régime permanent équilibré (voir les éléments de modélisation introduits au paragraphe 7). Il
est possible de calculer et de représenter les évolutions de la tension Vc fournie à la charge en
fonction du courant I , et ensuite de la puissance réactive Q. Pour cela, et lorsque la chute de
tension DV = Vr − Vc est « faible », il est possible d’utiliser l’approximation faite au chapitre 9.5
en écrivant : Vr − Vc ≈ X.I . sin w. Pour simplifier l’écriture, on fait apparaître dans les formules
une tension unique : V = Vr ≈ Vc . Ainsi, en utilisant le fait que Q = 3.V c.I . sin w, il vient :
X.Q
.
Vr − Vc ≈
3.V
En considérant alors une variation de puissance réactive −DQ (c.-à-d. une « injection ») dans le
X .(Q − DQ)
réseau, il est possible d’écrire : Vr − (Vc + DVc ) ≈
ou encore, en ne « considérant »
3V
X.DQ
DVc
≈
que les variations :
.
V
3V 2
X
Vr
Vc
P
I
Vc
Charge capacitive
(Q<0)
Vr
P, Q
cosϕ
0,6
0,9
1
0,9
Charge
inductive (Q>0)
0,6
I
Figure 12 Couplage « tension / réactif »
3V 2
Le terme
correspond à la puissance dite « de court-circuit », Scc , qui est une constante
X
associée au réseau. Elle représente la puissance apparente fournie par le générateur lorsque Vc = 0.
(en réalité, dans le cas du court-circuit, il faut considérer la réactance idoine appelée X cc qui dépend
des réactances transitoires des machines).
√
DVc
DUc
DQ
=
≈
(avec U = 3.V ).
Ainsi, il est possible d’écrire :
V
U
Scc
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5. Phénomènes liés au fonctionnement des réseaux électriques
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Cette formule est très intéressante car :
• Elle formalise le fait qu’une variation de puissance réactive induit une variation de tension.
• Une « injection de puissance réactive » (c’est-à-dire le fait de consommer une puissance
réactive négative) revient à élever la tension Vc .
• Une « consommation de puissance réactive » (c’est-à-dire le fait de consommer une puissance
réactive positive) revient à faire chuter la tension Vc .
Influence de la structure des réseaux
Les réseaux électriques, et leurs ramifications, s’ils sont construits à partir de principes et de
contraintes communs, présentent des différences constitutionnelles liées aux sources d’énergie
primaires utilisées, à la géographie, à l’histoire et à l’économie des différentes régions. De façon
très simple, il est possible de distinguer quelques éléments de classement qui décrivent assez bien
les différents « types » à retenir.
Sur l’aspect « structurel », il est possible de dissocier les réseaux dits « en antenne » des réseaux
dits « maillés » :
• Réseaux « en antenne » : Ils sont constitués princi-
palement de grandes lignes qui relient des groupes
de production géographiquement concentrés à des
lieux de fortes consommation éloignés et épars.
En conséquence, les impédances de lignes sont
importantes et s’ajoutent les unes aux autres (équivalent série). Les chutes de tension ont tendance à
être fortes et il est nécessaire de prévoir de nombreux points de compensation du « réactif ». La
figure 13a représente la structure de principe d’une
partie d’un tel réseau.
© Dunod – La photocopie non autorisée est un délit
• Réseaux « maillés » : Ils sont constitués principa-
lement de lignes multiples et bouclées qui relient
des groupes assez bien répartis à des lieux de
forte consommation proche et également répartis. En conséquence, les impédances des lignes se
divisent (équivalent parallèle). Les chutes de tension ont tendance à rester faibles et les groupes
peuvent se charger eux-mêmes de la plupart de
la fourniture de réactif. La figure 13b représente
la structure de principe d’une partie d’un tel
réseau.
Réseau
en « antenne »
Conso
groupe
groupe
Conso
groupe
Figure 13a
Réseau « maillé »
groupe
Conso
groupe
Conso
groupe
Figure 13b
Transits et « reports de transits »
Les différentes lignes et postes de transformations qui constituent les réseaux permettent d’acheminer la puissance active produite vers les lieux de consommation. De par le « maillage » des
territoires et le dédoublement des lignes, le « transit » de puissance dans une ligne dépend des
impédances de l’ensemble des lignes qui font partie de son entourage proche.
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Les réseaux électriques
Réseau
La figure 14 représente deux charges consommant les puisÉtat « N »
Pl1
sances P1 et P2 , les trois lignes associées conduisant les tranP
l2
sits : Pl1 , Pl2 et Pl3 . L’analyse de la première situation, appelée
« état N » permet d’écrire : P1 = Pl1 − Pl3 et P2 = Pl2 + Pl3 .
Pl3
P2
P1
Une partie de la puissance transitant par les lignes 1 et 3 contriCharge 2
Charge 1
buant à l’alimentation de la charge 2.
En supposant que la ligne 2 (c’est un exemple) soit ouverte
Réseau
État « N-1 »
suite à une avarie ou à une manipulation diverse, on constate
Pl1
alors que la répartition des transits devient : P1 = Pl1 − Pl3 et
Pl2=0
P2 = Pl3 , soit donc Pl1 = P1 + P2 et Pl3 = P2 .
Pl3
P2
P1
En d’autres termes, les lignes 1 et 3 doivent supporter un
Charge 2
Charge 1
transit supplémentaire dû à l’ouverture de la ligne 2, on parle
alors de « report de transit ». L’état, appelé de façon générique Figure 14 Transits et état « N-1 »
« N-1 », correspondant à la perte d’une ligne, est très important
à considérer puisque le calcul des nouveaux transits permet de conclure sur la capacité du réseau à
supporter la coupure (pas de dépassement des valeurs maximales associées aux lignes).
6. STRATÉGIE DE FONCTIONNEMENT DES RÉSEAUX
Les grands réseaux électriques interconnectés fonctionnent à partir d’une stratégie particulière
qui, en quelques mots, consiste à assurer à la fois l’équilibre « production / consommation » et la
sûreté des systèmes (c’est-à-dire leur immunité par rapport aux avaries communes et aux variations
globales de la consommation).
Cette stratégie est basée sur un ensemble de réactions précises, en réponse aux fluctuations de
la fréquence et des tensions qui sont les conséquences des évolutions de la consommation et de
l’apparition de défauts.
De façon assez simplifiée, il est possible de classer les différents principes de fonctionnement
des réseaux en plusieurs points particuliers :
• La prévision journalière.
• Le réglage des tensions.
• Le réglage de la fréquence.
• Les protections.
• La maîtrise des transits et la règle du « N-K ».
Figure 15 Dispatching national (source RTE)
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6. Stratégie de fonctionnement des réseaux
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C’est l’ensemble de ces actions, qui sont assurées par les centres de dispatching régionaux et
nationaux, qui constituent la « conduite des réseaux », opérée en temps réel et en permanence (voir
figure 15 : Centre de dispatching national français – CNES, source : © Médiathèque RTE / photo
Michel Monteaux).
La prévision journalière
De façon à mobiliser, chaque jour, un ensemble suffisant de moyens de production, les exploitants
des réseaux électriques s’appuient sur des prévisions de consommation. Ces prévisions journalières
sont réalisées par des services spécialisés, en concordance avec les données météorologiques, les
statistiques et enregistrements de consommation, les rythmes de vie des populations et certains
« évènements » particuliers.
Puissance (MW)
Consommation
Prévision
heure
Figure 16 Consommation globale en France du 17 avril 2007
La figure 16 représente le relevé de la consommation réelle en France lors d’une journée d’avril
2007, ainsi que la courbe de prévision associée (source : © Médiathèque RTE).
Cette prévision constitue un « programme de charge » global portant sur une journée. Sa bonne
concordance avec la consommation réelle permet de limiter l’utilisation de moyens de régulation
en temps réel qui sollicitent de façon plus contraignante les dispatcheurs.
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La maîtrise des transits et la règle du « N-K »
Les réseaux électriques permettent d’acheminer l’ensemble des puissances active et réactive,
depuis les groupes de production vers les lieux de consommation. Le terme de « transit »
représente la répartition de ces puissances sur les lignes (ou encore la répartition des courants
associés). À l’image de l’exemple associé à la figure 14, la répartition des transits dépend de façon
prépondérante :
• De la configuration du réseau à un instant t.
• Des impédances des lignes et câbles en service à l’instant t.
Mais aussi :
• Des emplacements des moyens de compensation de puissance réactive (voir plus loin) à
l’instant t.
• Des échanges internationaux liés à l’interconnexion (essentiellement commerciale) à l’ins-
tant t.
Si ces éléments sont connus à chaque instant de par la cohésion des actions sur les réseaux
nationaux, il reste un aléa lié à l’apparition de défauts qu’il est impossible de prévoir. En effet,
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Les réseaux électriques
les ouvrages de transport subissent un grand nombre de courts-circuits liés en grande partie aux
conditions climatiques (foudre, neige, etc.) et de façon plus rare aux défaillances matérielles.
À titre d’exemple, le réseau de transport national Français (RTE) subit chaque année environ
10 000 courts-circuits, soit une trentaine par jour. Il est donc impératif que le système soit géré en
concordance avec la grande probabilité de ces aléas.
De façon concrète, les courts-circuits déclenchent des protections qui permettent la coupure
des lignes impliquées. L’ouverture de ces lignes impose ainsi le « report » de leur transit sur les
lignes voisines, ce qui constitue une contrainte en courant supplémentaire sur ces dernières. Si
les courants associés dépassent les valeurs maximales autorisées (IMAP, voir paragraphe 7), des
protections supplémentaires conduisent à des coupures temporisées et donc à des nouveaux reports
indésirables pouvant entraîner une réaction en chaîne.
La stratégie permettant de gérer les transits en assurant une sûreté maximale consiste ainsi, en
permanence et de façon périodique, à utiliser des simulateurs informatiques de manière à calculer,
à l’instant t, l’ampleur des reports causés à l’instant t + Dt par l’ouverture d’une ou plusieurs lignes
sur un réseau. Dans le cas de reports calculés importants, les dispacheurs connaissent à l’avance
des contraintes à venir et disposent de temps prédéfinis pour réguler les transits. Ce travail de
simulation absolument généralisé porte le nom de « N-K » et représente le calcul de contraintes
liées à la perte de « K » lignes.
Une fois les contraintes prévisionnelles connues, les dispacheurs disposent d’un certain nombre
de moyens d’action en contre-réaction aux contraintes :
• La modification de la structure même du réseau, on parle alors de « topologie », permet de
modifier directement les impédances de lignes présentées aux transits et donc de modifier la
répartition de ces derniers.
• L’adaptation des programmes de production permet de répartir différemment les sources de
puissance par rapport aux charges qui les consomment, et donc d’adapter les transits.
Le réglage de la fréquence
Sur les grands réseaux interconnectés la fréquence est gérée de telle manière à être quasiment
constante malgré les fluctuations de consommation. La volonté de maintien d’une valeur unique
et uniforme, 50 Hz en Europe, est liée au bon fonctionnement d’un grand nombre d’appareillages
qui ne tolèrent pas d’écarts supérieurs à quelques Hertz. De façon plus globale, la constance de
la fréquence signifie une adaptation constante du niveau de production à la demande des charges.
Pour ce faire, il existe trois moyens d’action :
• Le réglage primaire de la fréquence consiste en des régulations rapides des vitesses des alter-
nateurs permettant de rattraper « en temps réel » les excursions de fréquence. L’accélération
simultanée de tous les alternateurs correspond en réalité à une augmentation générale de
la puissance fournie, la décélération en représentant une diminution. Lorsque le réseau est
composé d’un grand nombre de groupes (et interconnecté) chaque alternateur le constituant
n’a ainsi qu’à fournir une fraction de la variation de puissance globale appelée.
• Le réglage secondaire consiste, après la contre réaction rapide produite par le réglage primaire,
en une action plus fine sur l’écart résiduel de fréquence, associée au rétablissement des
échanges liés à l’interconnexion. En effet, l’interconnexion généralisée permet de façon
prépondérante d’opérer un commerce de l’énergie dont les opérations sont contractuelles. La
fluctuation de la demande d’un pays ne devant ainsi pas avoir de conséquence sur les échanges
transfrontaliers.
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6. Stratégie de fonctionnement des réseaux
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• Il est possible que les réglages précédents ne permettent pas d’atteindre la fréquence de
référence, ou bien que les moyens y contribuant soient en butée de puissance. Pour éviter que
cela se produise, il est nécessaire de disposer de réserves en puissance, c’est-à-dire de prévoir
la mobilisation de moyens de production (ou de consommation) de pointe pouvant opérer très
rapidement. Étant donné que les évolutions moyennes de la consommation sont prévisibles,
ces réserves de puissances s’adaptent dans le temps aux contraintes prévues et aux marges à
prévoir (c’est ce qui constitue le « réglage tertiaire »).
Le réglage des tensions
Si la fréquence est uniforme sur les réseaux électriques, les tensions associées aux différents niveaux
normalisés constituent en réalité des grandeurs tout à fait « locales ». La présence des impédances
des lignes, des câbles, des transformateurs qui forment les ouvrages de transport imposent des
chutes de tension qui dépendent principalement des puissances réactives qui transitent sur les
lignes. Pourtant, il est nécessaire de garantir le fait que les différentes tensions évoluent dans des
plages assez restreintes (environ ±5 % autour des valeurs nominales) afin d’assurer :
• La sûreté du fonctionnement du réseau, en particulier par rapport au phénomène d’écroulement
de tension.
• Le respect des plages de tension contractuelles.
• Le respect des plages de tension propres aux différents appareillages.
• La minimisation des pertes, une moindre sensibilité à la puissance réactive ainsi que l’optimi-
sation des puissances maximales transmissibles.
NB : Ces derniers points se justifient très simplement au regard des formules évoquées au paraX.DQ
V2
DVc
≈
graphe 5 : Pmax = r et
.
4.Z l
V
3V 2
Le réglage des tensions est en réalité réparti sur tous les niveaux de tension qui constituent les
réseaux. De façon assez pratique il est possible de recenser, les moyens de réglage suivants :
© Dunod – La photocopie non autorisée est un délit
• Les alternateurs des groupes de production possèdent à la fois un réglage direct de tension
et la possibilité de produire de la puissance réactive à la demande (voir chapitre 12.4) par
modification de leurs courants d’excitation. Cette puissance permet la compensation d’une
partie du réactif imposé par la présence des réactances de ligne et des transformateurs. Si cette
puissance est très facilement mobilisable, elle est souvent insuffisante du fait de l’éloignement
aux lieux de consommation.
• Les transformateurs HTB/HTA sont pourvus d’enroulements supplémentaires à prises mobiles
appelés « régleurs en charge ». Ces organes permettent, par une légère modification du rapport de transformation, d’élever ou d’abaisser le niveau de tension obtenu au secondaire du
transformateur.
• Certains alternateurs, accrochés « à vide » au réseau, ne sont utilisés que pour leurs possibilités
de fourniture ou de consommation de puissance réactive. On les appelle alors « compensateurs
synchrones ». Comme ils ne sont pas assujettis à des critères géographiques liés à la production, ils sont placés à des emplacements particuliers, assez proches des lieux de consommation
de réactif, et permettent ainsi un réglage de la tension par injection de puissance réactive
en HTA.
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Les réseaux électriques
• De façon plus proche des lieux de consommation, des gradins de condensateurs sont installés
sur les réseaux HTA de manière à compenser les résidus de puissance réactive dus essentiellement aux consommateurs. Ces éléments sont commutés de façon automatique mais présentent
l’inconvénient d’être commandés en « tout ou rien » et de fournir des puissances réactives
dépendant des tensions en présence (Q = Cv.U 2 ).
• Des circuits convertisseurs statiques de puissance réactive (CSPR) permettent également de
fournir ou générer de la puissance réactive par commutation de courants dans des inductances
et condensateurs. Sur les réseaux, ces circuits sont généralement connectés en MT.
• Enfin, la taxation et la compensation locale, en basse tension de la puissance réactive est
un des meilleurs moyens de minimisation des chutes de tension sur les infrastructures de
distribution.
La figure 17 illustre, de façon tout à fait générique, le principe de compensation de la puissance
réactive à partir du schéma monophasé équivalent qu’il est possible de mettre en ouvre à tous les
DVc
X .DQ
≈
niveaux de tension. L’utilisation de la formule
permet d’estimer de façon approchée
V
3V 2
l’élévation de tension associée à l’injection de puissance réactive ainsi opérée.
X
Vr
I
Vc
P
P, Q
cosϕ
Q
Batteries de
Condensateurs
M.S.
C.S.P.R.
Compensateurs
synchrones
Figure 17 Compensation
de puissance réactive
De façon très générale, il faut saisir que la multiplicité des moyens de compensation, et donc de
réglage des tensions, est liée au fait qu’il est maladroit de concevoir une compensation de puissance
réactive en un lieu éloigné de la consommation (à partir des seuls groupes par exemple). En effet,
la puissance réactive fournie ne servirait en grande partie qu’à compenser celle consommée par les
lignes et les transformateurs rencontrés sur le trajet. Autrement dit, un condensateur placé en amont
de la ligne ne sert que peu à relever la tension en « bout de ligne ». En revanche, un condensateur (ou
autre) placé au plus proche de la charge a une influence directe sur la tension appliquée à la charge.
Il est ainsi important de retenir que, de façon associée au réglage des tensions, « le réactif se
transporte mal ».
Les protections
Sans rentrer dans les détails, les protections sont constituées de l’ensemble des disjoncteurs et des
organes de coupure permettant d’interrompre l’alimentation d’un organe lors de défauts d’isolement
ou de surcharges. Associées aux prévisions de transits en « N-K », elles permettent d’assurer la
sûreté du système et la continuité du service. Les protections sont prévues sur les divers ouvrages
en fonction des courants nominaux et du calcul des courants de courts-circuits (Icc). Étant donné
l’obligation de résultats de ces dispositifs, leur fonction et la connaissance des courants de courtscircuits sont absolument critiques.
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7. Outils de modélisation et d’étude des réseaux électriques
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7. OUTILS DE MODÉLISATION ET D’ÉTUDE DES RÉSEAUX
ÉLECTRIQUES
Les réseaux électriques sont constitués d’un nombre assez restreint d’éléments différents, tels les
alternateurs, les lignes, les transformateurs, etc. Il est alors pertinent de s’atteler à leur modélisation
de manière à pouvoir ensuite constituer facilement des schémas équivalents par composition des
différents modèles.
Comme chaque modèle se caractérise par un ensemble d’impédances dont les ordres de grandeur
peuvent être très variables (en fonction du niveau de tension ou de la puissance apparente nominale),
il est généralement d’usage d’utiliser la notion d’impédance « réduite ». Les différents modèles
font ainsi apparaître des ordres de grandeurs liés à la nature des éléments qui les constituent mais
pas à leurs valeurs nominales. L’usage de ces impédances permet même une approche simplifiée
adaptée aux calculs de courants de court-circuit : la méthode de la « base de puissance ».
Lignes et câbles
Les « lignes et câbles » représentent l’ensemble des conducteurs électriques utilisés pour relier
les unités de production aux lieux de consommation. Il est important de bien distinguer dans ce
regroupement deux grands types de réalisations :
• Les lignes aériennes sont constituées de conducteurs nus, éloignées entre eux d’une distance
assez importante, et suspendus à des pylônes.
• Les câbles sont constitués de conducteurs gainés et isolés, à proximité les uns des autres et
principalement destinés à l’enfouissement.
Plusieurs points leur sont communs :
• Ils sont regroupés par ensemble de trois conducteurs étant donné la nature triphasée des
réseaux.
• Ils sont dimensionnés en fonction de la tension nominale entre phase et de la puissance
© Dunod – La photocopie non autorisée est un délit
apparente de la ligne.
• Ils parcourent des distances très variables et, à ce titre, sont donc modélisés par des grandeurs
linéiques (résistances et réactances en V/km , capacités en nF /km ).
• Ils véhiculent des courants le plus souvent équili-
brés puisque c’est une condition du bon fonctionnement des réseaux. En conséquence, il
est d’usage de les modéliser sous la forme
d’un schéma monophasé équivalent. Ce schéma
fait apparaître uniquement trois types d’éléments : une résistance linéique r , une inductance
cyclique linéique l, deux capacités cycliques
linéiques c/2 ramenées aux extrémités. Le
modèle linéique (correspondant à un kilomètre de ligne ou de câble) général ainsi
obtenu porte le nom de « quadripôle en p »,
il fait apparaître de par son caractère monophasé un neutre souvent fictif représenté sur la
figure 18.
1 km
l
V1
c/2
N
r
c/2
V2
N
Figure 18 Schéma monophasé
équivalent « en p »
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Les réseaux électriques
NB : Pour construire ce schéma équivalent, il a été nécessaire de regrouper l’ensemble des
impédances couplant les trois phases (inductances mutuelles et capacités entre phase) sous la
forme d’impédances cycliques. Cette opération, déjà menée au cours des chapitres 4.2 et 12.2 dans
des cas particuliers analogues n’est pas développée ici. Évidemment, ce modèle n’est plus valide
en régime déséquilibré.
À partir de ce modèle, il est impératif de bien saisir quelles sont les différences fondamentales
entre les lignes et les câbles :
• Les lignes aériennes sont caractérisées par la faible valeur de leur résistance linéique et
le faible impact de leur capacité linéique. En conséquence, l’élément prépondérant est
l’inductance qu’elles présentent. Cette remarque est très importante puisqu’elle justifie le fait
que les lignes électriques consomment généralement de la puissance réactive (sauf en cas de
très faible charge).
• Les câbles électriques sont caractérisés par la forte valeur de leur capacité linéique. Ceci
s’explique essentiellement par la grande proximité des conducteurs. En conséquence, un câble
est généralement capacitif, d’autant plus qu’il est placé sous haute tension. Cette remarque
est importante puisqu’elle justifie le fait que les câbles sont généralement modélisés par leur
seule capacité.
On retiendra donc les modélisations classiques des lignes et câbles (en HT) représentées sur la
figure 19.
Lignes aériennes
Câbles
Distance d (km)
Distance d (km)
I
Lω=l.dω R=r.d
I+IC
( lω <r< lω )
10
V1
5
V2
N
N
IC
I
V2
1/Cω
=1/cω.d
N
N
N
Figure 19 Modélisations classiques simplifiées des lignes et des câbles
Enfin, l’utilisation de niveaux de tension bien définis, et donc de matériels adaptés et optimisés
pour ces niveaux, justifie le fait que les grandeurs linéiques r, l et c qui apparaissent sur la figure 19
correspondent à des valeurs assez classiques et habituelles. Un ensemble d’ordres de grandeur est
ainsi présenté dans le tableau 3.
Lignes aériennes
Câbles
63 kV et 90 kV
r = 0,06 à 0,15 V/km
lv = 0,37 à 0,4 V/km c ≈ 10 nF/km
c ≈ 50 nF/km soit cv ≈ 15 mS/km
225 kV
r = 0,03 à 0,09 V/km
lv = 0,28 à 0,42 V/km c ≈ 10 nF/km
c ≈ 180 nF/km soit cv ≈ 55 mS/km
400 kV
r = 0,01 à 0,03 V/km
lv = 0,3 à 0,4 V/km c ≈ 10 nF/km
c ≈ 200 nF/km soit cv ≈ 60 mS/km
Tableau 3 Ordres de grandeur des impédances classiques des lignes et câbles
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7. Outils de modélisation et d’étude des réseaux électriques
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NB : Les câbles électriques présentent une limitation importante en haute tension. La forte valeur
de leur capacité linéique justifie qu’ils consomment un courant capacitif I C = j .c.d.v.V 1 (voir
figure 19) même en l’absence de charge. Le problème est que la longueur d telle que ce courant
atteint le courant nominal du câble est relativement faible en haute tension (de l’ordre de la
centaine de kilomètres). En conséquence, il est aujourd’hui impossible d’envisager un transport
longue distance à base de câbles électriques, leur usage étant généralement limité aux moyennes
et basses tensions.
f=50 Hz
f=5 kHz
Par ailleurs, les conducteurs électriques qui forment
les lignes et les câbles sont parcourus par des courants
I
I
alternatifs et, à ce titre, subissent un phénomène appelé
« effet de peau ». Ce phénomène physique revient au
e~1 cm
e~1 mm
fait que les courants véhiculés dans ces conducteurs
ont tendance à se répartir sur leur périphérie (on parle
couronne de conduction
de « peau ») plutôt qu’en leur centre. La « couronne de
conduction » équivalente, en dehors de laquelle les couSolution à f=50 Hz
φ ~5 mm
rants ne circulent pratiquement pas, présente une épaisseur inversement proportionnelle à la racine carrée de la
fréquence des courants.
À titre d’exemple, le cuivre pur présente une épais- Figure 20 Effet de peau et section des
conducteurs
seur de peau de l’ordre du centimètre à 50 Hz et de
l’ordre du millimètre à 5 kHz.
En conséquence, tous les conducteurs électriques de diamètres supérieurs à l’épaisseur de peau
du métal utilisé sont réalisés à partir de conducteurs plus fins tressés de manière à représenter
globalement la section nécessaire. L’ensemble des lignes et des câbles qui constituent les réseaux
électriques est ainsi réalisé à partir du tressage de brins dont le diamètre avoisine le centimètre
(voir figure 20).
I<IMAP
Enfin, les lignes électriques présentent une particularité
I≈IMAP
I
liée au fait qu’elles sont « suspendues » entre des pylônes.
La figure 21 représente une ligne électrique dont la « flèche »
fait apparaître une distance particulière, notée h, séparant
h~4 à 6m
le conducteur du sol et des infrastructures. La flèche du
I>IMAP
conducteur ayant tendance à augmenter avec sa température
Figure 21 IMAP
(à cause de la dilatation), il est important de limiter le courant qui traverse la ligne (et son effet Joule) à une valeur
permettant que la distance h ne franchisse pas une limite liée à l’isolement et à la sécurité des
infrastructures et des personnes (en général 4 à 8 m).
Comme la température atmosphérique intervient aussi dans la dilatation du conducteur, ce
courant maximal dit « admissible en permanence » (IMAP) évolue en fonction des saisons et de la
géographie. Contrairement aux autres appareillages dont seules les grandeurs nominales entrent en
jeu, les lignes sont caractérisées et protégées par rapport aux valeurs changeantes de leur IMAP.
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Les réseaux électriques
Alternateurs et « groupes de production »
La production d’énergie électrique des « groupes de production » est généralement basée sur
l’utilisation d’alternateurs dont la modélisation repose sur l’ensemble de l’étude menée au chapitre 12. Sans trop rentrer dans les détails, il est néanmoins possible de simplifier leur approche
conformément aux considérations suivantes et aux représentations de la figure 22 :
I
Xd
ou X’d
ou λ
R<<Xd
Ev
V
N
P
-Qmax
charge
Schéma équivalent monophasé
Pn
Qn
O
Domaine de fonctionnement
Q
Figure 22 Modèles simples d’alternateurs
• Les alternateurs classiques à pôles saillants sont modélisés en régime permanent équilibré par
un schéma monophasé simplifié à réactance directe X d .
• En conditions de court-circuit équilibré ou en régime transitoire, le schéma utilisé est le même
à la différence que la réactance transitoire X d est considérée.
• Les turbo-alternateurs à pôles lisses sont modélisés par un schéma à réactance synchrone. En
saturation, un schéma à réactance de fuite (Potier) peut être envisagé.
• De façon plus pragmatique, les groupes sont définis par leur diagramme de fonctionnement
P, Q. Ce diagramme fait apparaître un domaine de fonctionnement précis dans lequel peut
évoluer le couple P, Q produit par le groupe.
En régime transitoire complexe, ou en régime déséquilibré, il est nécessaire d’envisager les
modélisations avancées présentées dans les chapitres 4 (composantes symétriques) et 14 (transformation de Park).
Transformateurs
Les transformateurs sont très présents sur les réseaux puisqu’ils permettent le passage d’un niveau
de tension à un autre. Les transformateurs utilisés sont triphasés et, à ce titre, introduisent des
déphasages entre les systèmes de tension primaires et secondaires. S’il est également habituel
de les représenter en schéma monophasé équivalent, il ne faut pas oublier l’influence des divers
couplages et de façon plus générale la considération du rapport de transformation complexe m.
Si le chapitre 9 propose l’étude détaillée des transformateurs, il est possible dans une approche
simplifiée, essentiellement pour l’étude des chutes de tension et des courants de court-circuit,
de les modéliser sous la forme présentée sur la figure 23. Les réactances cycliques X s1 et X s2
étant généralement très supérieure aux résistances équivalentes des bobinages, il est d’usage de
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7. Outils de modélisation et d’étude des réseaux électriques
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n’utiliser que les schémas à réactance pure. Le « passage » de cette réactance de part et d’autre du
transformateur idéal utilisé dans le modèle permet ensuite d’envisager le regroupement généralisé
de plusieurs transformateurs mis en cascade.
m
R2 <<Xs2
m.V1
Xs2
V2
charge
I1
V2
=m.V’1
I2
charge
V1
Schéma ramené au secondaire
I2
Schéma ramené au primaire
V1
R1 <<Xs1
Xs1
V’1
m
I1
Figure 23 Modèles primaire et secondaire simplifiés des transformateurs
Tableau résumé des modélisations classiques
De façon très synthétique, le tableau 4 présente les différents acteurs habituels des réseaux électriques ainsi que leurs modèles simplifiés. Les ordres de grandeur des différents éléments des
modèles sont indiqués à titre d’information, le cas du transformateur est exposé à partir du schéma
ramené au secondaire.
Ligne aérienne
Câble
distance d
distance d
X=d.lω
V2
V1
V1
N
N
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I
lv ≈ 0,3 V/km
lv ≈ quelques %
1/Cω
=d.cω
V2
c ≈ 50 à 200 nF/km
cv ≈ 15 à 60 mV-1/km
Xd
I R<<Xd
ou Xí d
Ev
N
V
X d ≈ 80 à 300%
X d ≈ 20 à 40 %
I2 R2<<Xs2 Xs2
V2
m.V1
N
charge
R<< X
Transformateur
charge
I
Alternateur
X s2 ≈ 4 à 15 %
Tableau 4 Modèles équilibrés classiques et ordres de grandeur
NB : Ces modèles sont uniquement adaptés à l’étude en régime permanent équilibré.
Impédances en valeurs réduites
Dans le tableau 4, les ordres de grandeur des réactances des alternateurs et transformateurs sont
donnés en pourcentage, c’est-à-dire en « valeurs réduites ». Leur utilisation permet la considération
de valeurs qui s’affranchissent totalement des gammes de puissance et de tension.
À titre de rappel (ces notions ont été développées dans les chapitres 10 et 13), et en régime
Z .Sn
triphasé, la valeur dite « réduite » d’une impédance Z s’écrit : Z %T ri = 100. 2 . Cette impéU2n
dance correspond également à la « tension de court-circuit » relative mise en évidence dans le
chapitre 10 dédié aux transformateurs : Ucc %.
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Les réseaux électriques
NB : La résistance série et la réactance série équivalentes à cette impédance peuvent également
R.Sn
X .Sn
être écrites en valeurs relatives : R % = 100. 2 et X % = Lv % = 100. 2 . Dans ce cas :
U2n
U2n
Z % = Z p.u. = (R %)2 + (X %)2
8. EXEMPLES DE CALCULS LIÉS AUX MODÉLISATIONS
De façon assez générale, l’étude théorique portant sur une partie d’un réseau électrique est motivée
par les points suivants :
• La détermination des transits en fonction des topologies du réseau en « N-K ».
• Le calcul des chutes de tension causées par la connexion de charges diverses. La connais-
sance des valeurs extrêmes de variation de la tension conduisant au dimensionnement des
compensations d’énergie réactive.
• La détermination des « courants de court-circuit » qui permettent le dimensionnement des
protections à ménager en certains points précis du réseau.
400 kV
Ligne 1
Vers
Consommation
P=500 MW
tanϕ = 0,1
250 MVA
P
100 km
500 MVA
1000 MVA
Ligne 4
25 km
Ligne 2
Groupe alternateur 2
250 MVA, Xd=90%
20 kV, X’d=25%
Groupe alternateur 3
500 MVA, Xd=80% 20
kV, X’d=20%
Transformateur 1
500 MVA, 15%
400 kV
Groupe alternateur 1
500 MVA, Xd=80%
20 kV, X’d=20%
Transformateur 3
500 MVA, 15%
Dans tous les cas, il est nécessaire de représenter, en un point P du réseau, le reste des appareillages comme un circuit équivalent simple rendant possible les calculs. Cette nécessité revient
ainsi, en partie, à la construction du modèle de Thévenin de l’ensemble du réseau au point P.
À titre d’exemple, mais la démarche serait la même dans n’importe quel autre cas à l’équilibre,
on s’intéresse au tronçon de réseau représenté schématiquement sur la figure 24.
Ligne 3
75 km
50 km
250 MVA
400 kV
Transformateur 2
250 MVA, 14%
Lignes :
X=0,3 Ω/km
Figure 24 Tronçon de réseau
Il est possible de façon assez simple de « réduire » ce schéma en vue de la considération de cas
simples.
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8. Exemples de calculs liés aux modélisations
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Chute de tension au point P en tension 400 kV « tenue »
En fonctionnement normal, certains points des réseaux sont dits à « tension tenue ». C’est-à-dire
que les alternateurs en amont sont pilotés de telle manière à conserver une tension constante au
point, et ce quelle que soit la consommation. En supposant que les trois tensions de 400 kV soient
ici « tenues », le schéma équivalent du tronçon de réseau au point P se réduit à celui représenté sur
la figure 25. Il est ainsi possible de calculer assez simplement la tension au point P, connaissant la
charge globale de consommation, c’est-à-dire Pc et Q c .
Xeq=14,4 Ω
Pc=500 MW
Qc=50 MVAR
P
VP
I
j.25×0,3
j.100×0,3
j.75×0,3
400/ 3 =
230 kV
j.50×0,3
Vg
Figure 25 Schéma équivalent en tension 400 kV tenue
La réactance « de Thévenin » (voir chapitre 2.6), notée en pointillés (14,4 V), est calculée à
partir des règles d’association classiques des impédances. Parallèlement,
la puissance apparente
fournie par l’ensemble des groupes s’écrit : Sg = 3.Vg .I = Pc2 + (Q c + 3.X eq .I 2 )2 . Il est ainsi
possible de retrouver la valeur efficace du courant en résolvant l’équation au second degré :
9.Vg2 .I 2 = Pc2 + (Q c + 3X eq .I 2 )2
2
soit : 9.X eq
.I 4 + (6Q c .X eq − 9.Vg2 ).I 2 + Pc2 + Q 2c = 0.
Le calcul donne : I = 732 A et l écriture de la puissance apparente au niveau de la charge,
√
Sc = Pc2 + Q 2c = 3.V P .I , donne : V P = 228,8 kV , soit donc : U P = V P . 3 = 396,3 kV . On
constate naturellement une « chute de tension » due à la présence de la charge.
© Dunod – La photocopie non autorisée est un délit
Courant appelé par un court-circuit au point P
Dans le cas d’un court-circuit brutal, il est généralement impossible de compter sur la tenue en
tension de certains points. Il est alors nécessaire de tenir compte de l’ensemble des réactances du
réseau, en partant des tensions internes des alternateurs. Sans trop entrer dans le détail des calculs,
ce travail a été effectué sur le schéma de la figure 26, et réalisé à partir des remarques suivantes :
• Les diverses réactances ont été calculées à partir des valeurs réduites fournies
Z % = 100.
Z .Sn
2
U2n
.
• Les réactances « transitoires » X d des alternateurs sont à utiliser dans ce cas puisque la
réaction à un court-circuit brutal correspond à une réponse transitoire du système.
• Ces réactances ont été « ramenées » au secondaire des transformateurs grâce aux relations de
passage qui les caractérisent.
• Les tensions à vide des alternateurs sont ainsi à considérer également au secondaire de ces
derniers, c’est-à-dire à la valeur composée de 400 kV.
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Les réseaux électriques
Xeq=62,27 Ω
P
Icc
j.25×0,3
j.100×0,3
j.48
j.64
j.75×0,3
j.48
j.64
j.50×0,3
j.89,6
j.160
400/ 3 =
230 kV
Vg
Figure 26 Schéma équivalent en court-circuit au point P
Après calcul de la réactance équivalente à l’ensemble du réseau, la détermination du courant de
Vg
230.103
court-circuit est simple : Icc =
=
= 3,7 kA (courant de ligne du système triphasé
X eq
62,27
au point de court-circuit).
Concrètement cette méthode, même si elle est rigoureuse (à condition de connaître les caractéristiques précises des alternateurs), n’est pas très pratique. En particulier, les relations de passage
utilisées au niveau des transformateurs peuvent s’avérer lourdes, répétitives, et nécessitent la
connaissance des rapports de transformation. Enfin, le calcul à partir des valeurs en Ohm des
impédances rend inutile la précision des valeurs réduites. À l’opposé, l’utilisation généralisée du
raisonnement sur les valeurs réduites permet une approche plus directe, plus technique, et qui de
plus ne nécessite pas de connaissance des tensions à vide des alternateurs (seules les grandeurs
nominales sont utiles).
Calcul de courant de court-circuit en « base de puissance »
En réalité, la connaissance des réactances réduites des divers éléments constituant les réseaux
permet également d’effectuer une réduction facilitée par rapport à la technique précédente. En effet,
chaque impédance étant proportionnelle à la puissance apparente nominale de l’appareillage associé, il est possible de « ramener » l’ensemble des impédances à une base de puissance commune. Il
suffit alors de multiplier chacune d’entre elles par le facteur permettant de les aligner sur cette base.
À titre d’exemple, le réseau
représenté sur la figure 24 peut
être réduit de façon très rapide,
sur une base de puissance de 500
MVA (il est possible de choisir
n’importe quelle valeur mais celleci induit le minimum de calcul).
Il suffit juste alors de représenter
les associations séries et parallèles
des diverses impédances, pondérées par les bons coefficients (ceux
qui permettent de les ramener à
500 MVA).
P
Icc
BASE
500 MVA
2,3 %
P
Icc
4,6 %
15 %
20 %
4,6 %
28 %
50 %
7%
15 %
20 %
18,6 %
Xeq %
400/ 3 =
230 kV
Vg
400/ 3 =
230 kV
Vg
Figure 27 Schéma équivalent en court-circuit au point P,
base 500 MVA
La figure 27 représente alors le schéma équivalent à cette réduction, pour le constituer
il a été nécessaire de traduire les impédances des lignes en valeurs réduites, à savoir :
30 × 250.106
X ligne1 % = 100.
= 4,6 %, et sur le même modèle : X ligne2 % = 2,3 %,
(400.103 )2
X ligne3 % = 7 % et X ligne4 % = 4,6 %.
Le calcul de l’impédance réduite équivalente à tout le réseau se fait par l’association classique,
parallèle et série, des impédances. Le résultat du calcul est : X eq % = 18,6 %. Cette impédance
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8. Exemples de calculs liés aux modélisations
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29
réduite correspond également à la valeur de la tension de court-circuit du schéma équivalent (voir
chapitre 9.8) et il est ainsi possible d’écrire : Ucc % = X eq % = 18,6 %. Le réseau est alors
équivalent à un transformateur en court-circuit dont l’ensemble des impédances amont et aval sont
ramenées au secondaire. La puissance apparente de court-circuit du réseau au point P s’écrit ainsi :
Scc = 100.
Sn
500.106
= 2 688 MVA
=
Ucc
18,6 %
et donc :
Scc
Scc
2 688.106
=√
=√
= 3,8 kA
3.Vn
3.Un
3 × 400.103
Le résultat, conforme à celui obtenu par la méthode précédente, est ainsi obtenu sans aucune
considération des rapports de transformation des transformateurs ni même des tensions à vide des
alternateurs. Cette technique de « réduction » des réseaux, dont seules les grandeurs nominales
sont exploitées, constitue un avantage supplémentaire à l’utilisation généralisée des impédances
réduites.
Icc =
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Réduction de réseaux déséquilibrés, composantes symétriques
P
La réduction des réseaux déséquilibrés, et par là le calcul
Vg
j.Xeq
I1
1
des chutes de tension ou des courants de courts-circuits dus
I2
2
a². Vg
à la connexion de charges déséquilibrées, fait appel à l’utiI3
a. Vg
3
lisation des composantes symétriques. Cet outil, présenté et
détaillée dans le chapitre 4, est basé sur une transformation
matricielle qui permet la constitution non pas d’un, mais
Vg
de trois schémas équivalents monophasés (relatifs aux comZd
Id
posantes directes, inverse et homopolaire). La résolution
Vd=Vi
individuelle de chaque schéma permet ensuite la reconstituZi
Ii
tion des grandeurs triphasées recherchées par l’application
de la transformation matricielle inverse.
V0
Z0
I0
À titre d’exemple, la détermination du courant de courtcircuit précédent n’aurait pas été possible avec les techniques précédentes dans le cas d’un court-circuit non équi- Figure 28 Court-circuit phase terre
libré. Il faut pourtant avoir conscience que ce cas de figure
est plutôt majoritaire sur les réseaux (contact de deux phases, incident monophasé, etc.) et que ces
méthodes sont alors inadaptées.
La figure 28 représente le schéma équivalent triphasé du réseau précédent sur lequel un courtcircuit entre les phases 2, 3 et la terre est envisagé.
Le passage aux composantes symétriques permet la construction du schéma monophasé équivalent, portant sur ces composantes, également représenté sur la figure 28. Ce schéma est ici
suffisant car il profite de certaines égalités entre les composantes symétriques.
La résolution de ce schéma permet de trouver les expressions et les valeurs des composantes
I 0 , I d et I i . Ensuite, la transformation matricielle inverse, ou l’écriture des courants de ligne en
fonction des composantes, permet de retrouver les valeurs précises du courant de court-circuit, du
courant de fuite à la terre, etc.
NB : Le détail des calculs correspondant à cet exemple est mené au chapitre 4.9 exercice 3. Le cas
exposé ici correspond au cas particulier d’un court-circuit franc (Z = 0).
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