Le risque allemand est plus élevé que les marchés ne le pensent

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Le risque allemand est plus élevé que les
marchés ne le pensent
La crise de l’Europe a franchi une nouvelle étape cette semaine avec le sauvetage des banques
espagnoles rendu nécessaire par le fait que le marché interbancaire ne fonctionnait plus et
qu’elles n’avaient plus accès aux marchés financiers. Les mesures qui ont été prises semblent
comme d’habitude mal expliquées, compliquées (d’où viennent les fonds ESF, EFSF, MES … ?),
mal adaptées, (le stock de dette existant sera-t-il transformé en dette subordonnée … ?) si bien
qu’une fois passé l’effet d’annonce, les marchés pourraient se rendre compte que les mesures
prises vont inciter le Portugal, l’Irlande et peut être l’Italie à demander les mêmes faveurs…Pour
Charles Gave de GaveKal, ce qui est encore plus grave, c’est que la quasi-totalité de la classe
politique et médiatique pense que le fédéralisme (= l’Allemagne accepte d’être solidaire de la
dette des pays membres) est la solution aux problèmes de l’Europe, alors que le vrai sujet a
toujours été et reste celui de la compétitivité des entreprises, sujet sur lequel aucun progtès n’est
enregistré.
En Allemagne, une longue étude de Jonathan Carmel de Carmel Asset Management démontre
que finalement le risque sur les actifs allemands est plus élevé que les marchés ne le pensent. Ce
sont les établissements allemands qui sont les plus exposés à la dette espagnole (146,1Md€
contre 115 ,2 Md€ pour la France). La perte potentielle de l’Allemagne en cas d’éclatement de
l’Euro s’élèverait à 1310Md€ se décomposant de la façon suivante : prêt effectué par la
Bundesbank à la BCE 637Md€ ; quote part allemande dans le financement ESM/EFSF/EFSM
94Md€ ; perte des banques allemandes sur leur exposition aux dettes des pays de l’Europe du
Sud 200Md€ ; baisse des exportations allemandes en Europe sur cinq ans 375Md€. L’étude
conclut sur la recommandation d’achat de CDS, ce qui est difficile à réaliser pour un investisseur
privé.
Aux Etats Unis, la qualité du débat politique ne semble pas supérieure à celle du débat
européen. Tel est l’avis d’Ethan Harris le co-responsable de la recherche économique chez Bank
of America Merrill Lynch. Pour lui, le débat actuel devrait porter sur le compromis qui devra être
passé entre démocrates et républicains sur le plan fiscal à la fin de l’année. Or, ce sujet n’est
pratiquement pas du tout abordé, puisque tout le monde politico- médiatique, « drogué à la
dette » s’exprime de façon opaque. Cela donne le résultat suivant :tout le problème est de
savoir si on est dans un « softpatch » (=mesure conjoncturelle) qui nécessiterait une nouvelle
opération « Twist » (= rallonger la duration de la dette de la Fed) où si nous sommes dans un
« downturn » (=fort ralentissement de l’économie) qui justifierait une opération « QE3 »
(=injection de liquidités par la Banque Centrale qui était désignée plus simplement dans les livres
d’économie par impression de monnaie sans contrepartie par la Banque Centrale). A force de
s’exprimer de cette façon, il ne faudra pas s’étonner du développement de mouvements hostiles
aux hommes politiques et aux banquiers. Ben Bernanke, président de la Federal Reserve, n’a pas
été explicite cette semaine sur ce qu’il ferait…
Marchés actions : la croissance n’est pas encore au rendez vous
En France, l’économie française a lâché prise au deuxième trimestre. Le gouvernement ne
semble pas mesurer la gravité de la situation et semble être dans le déni de réalité. Pour le
moment les espoirs de « croissance » de François Hollande ne trouvent pas beaucoup d’échos
chez Angela Merkel. D’ailleurs, pour Eric Le Boucher des Echos, la relance seule de la croissance
ne relancera pas L’Europe, car dans le meilleur des cas la croissance n’ajoutera pas plus de 0,2
point de PIB nous dit Patrick Artus de Natixis. En attendant, en rétablissant partiellement la
retraite à 60 ans, la France entame son crédit, car elle ne peut faire la leçon à ses voisins, tout en
étalant son laxisme. Il devient difficile de demander aux allemands la mutualisation des dettes
européennes sans s’astreindre à la rigueur la plus élémentaire. Pour le moment, la dégradation
du moral des industriels a conduit la Banque de France à revoir en baisse ses prévisions pour la
France. L’économie reculera de 0,1% en 2012.
Aux Etats Unis, le débat pour les élections présidentielles de novembre va être important pour
le marché. Meryl Witner General Partner de Eagle Capital à New York pense que l’élection de Mitt
Romney serait saluée par une hausse du marché. Mario Gabelli chairman de Gamco Investors à
New York anticipe que la réélection de Barak Obama provoquerait une baisse du marché.
Finalement, Oscar Schaffer Managing Partner de OSS Capital à New York prétend que quelque soit
celui qui sera élu, les deux camps finiront par s’entendre sur la diminution du déficit et
provoqueront ainsi une hausse du marché. En attendant, chaque fois que l’on assiste à l’injection
de liquidités (QE 1, QE 2 et probablement QE 3 bientôt…) les marchés actions montent, même
pour de mauvaises raisons. C’est pourquoi Barry Knapp stratégiste de Barclays estime que
l’indice S&P 500 terminera l’année à 1330 soit un P/E de 12,9x sur un résultat des entreprises de
l’indice de 103$.
En Grèce, Peter Oppenheimer stratégiste Europe de Goldman Sachs envisage trois hypothèses :
1/poursuite de la situation actuelle avec une Troika (Union Européenne, BCE et FMI) qui prend des
mesures pour éviter la catastrophe tout en demandant un peu plus d’intégration. On gagne du
temps ce qui entraine une diminution progressive de la prime dont bénéficient les Bons du Trésor
US et les Bund allemands. 2/ Sortie rapide de la Grèce de l’Euro qui entraine une dislocation de
l’Europe. C’est le scénario le plus négatif pour les actions. 3/ La Grèce est exclue progressivement
de l’Euro. Elle est accompagnée par la Troika, ce qui est le scénario le plus favorable aux actions.
Sur les marchés émergents la guerre des acronymes continue. Jim O’Neill patron de Goldman
Sachs Asset Management avait inventé les BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud).
Robert Ward de The Economist préfère celui de CIVETS (Colombie, Indonésie, Vietnam, Afrique du
Sud). Actuellement le thème qui rencontre le plus grand succès est celui du SWAG (= Silver,
Wine, Art, Gold)…Mark Mobius le légendaire gérant de Franklin Templeton en charge de tous les
marchés émergents était à Paris cette semaine pour faire le point. Il a expliqué notamment qu’il
avait renforcé ses positions sur le Nigéria, le Kazakhstan et le Vietnam.
Secteurs :bonne semaine pour les banques françaises
Banques : Les banques ont fortement progressé la semaine dernère (BNP Paribas + 9,8% ;
Société Générale + 9,7% ; Crédit Agricole + 9,3%) Christophe Nijdam analyste financier chez
Alphavalue vient de consacrer une étude aux Banques françaises pour décrire les conséquences
de la séparation des activités spéculatives et des banques commerciales sur le modèle du Glass
Steagall Act américain). Si elle était mise en place cette mesure permettrait selon le bureau
d’étude, de doper la valeur boursière des banques françaises de 36%. La France compte 5 des 29
établissements susceptibles de présenter un risque systémique.
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