A QUOI SERT L’EDUCATION DE LA FILLE EN AFRIQUE ? Rien n'est plus négligé que l'éducation des filles. Les Bambara disent que « l’être humain ne naît pas tout fait », contrairement aux animaux qui sont à peu près entièrement équipés dès le départ. C’est pourquoi, l’espace de l’éducation, c’est l’espace spécifique de l’homme : un espace aux étapes sans fin. Le fait de penser que l’être humain naît tout fait, n’est-il pas dû à la coutume et au caprice des mères qui décident souvent de tout ? On suppose parfois qu'on doit donner à ce sexe peu d'instruction. Pour les filles, dit-on, il ne faut pas qu'elles soient savantes, la curiosité les rend vaines et précieuses; il suffit qu'elles sachent gouverner un jour leurs ménages, et obéir à leurs maris sans raisonner. On ne manque pas de se servir de l'expérience qu'on a de beaucoup de femmes que la science a rendues ridicules: après quoi on se croit en droit d'abandonner aveuglément les filles à la conduite des ‘’mères ignorantes et indiscrètes.’’ Il est vrai qu'il faut craindre de faire des savantes ridicules, il faut considérer, outre le bien que font les femmes quand elles sont bien élevées, le mal qu'elles causent dans le monde quand elles manquent d'une éducation qui leur inspire la vertu. Il est constant que la mauvaise éducation des femmes fait plus de mal que celle des hommes, puisque les désordres des hommes viennent souvent et de la mauvaise éducation qu'ils ont reçue de leurs mères, et des passions que d'autres femmes leur ont inspirées dans un âge plus avancé. L’éducation des filles est l’un des problèmes qui préoccupent actuellement l’humanité toute entière. La conception traditionnelle, non absente en milieu urbain, qui ne perçoit pas l’importance de la scolarisation des filles est l’un des facteurs à la base de la non scolarisation des filles. Pour certains parents, scolariser une fille constitue un énorme gaspillage de temps et de ressources financières, d’autant plus qu’à cause du mariage de celle-ci, la famille ne pourra jouir totalement de sa production. Un pareil préjugé défavorable à l’égard des filles ne fait qu’accroître la disparité entre les deux sexes en matière de scolarisation. L’éducation des filles est alors un problème relativement moderne dans le sens où pendant longtemps, on n’en voyait pas l’intérêt. De toutes manières, tant que l’éducation des hommes ne paraissait pas être une priorité, il n’était pas très important de s’interroger au sujet de celle des femmes. Rousseau, dans Emile prend position : « Ainsi, toute l’éducation des femmes doit être relative aux hommes. Leur plaire, leur être utile, se faire aimer et honorer d’eux, les élever jeunes, les soigner grands, les conseiller, les consoler, leur rendre la vie agréable et douce : voilà les devoirs des femmes en tout temps, et ce qu’on doit leur apprendre dès l’enfance. » Il ressort de cette citation que l’éducation des femmes n’est pas une fin en soi, elle ne peut se concevoir que par rapport à quelque chose, et en l’occurrence, pour Rousseau, par rapport à l’homme. A notre époque cette thèse est-elle toujours d'actualité ou doit-elle être réfutée ? A quoi sert l’éducation de la fille en Afrique? 1 A Athènes, la femme est réduite à un demi-esclavage. Quand Platon propose d’admettre un conseil de matrones à l’administration de la République et de donner aux filles une éducation libre, il fait exception. Aristote exprime l’opinion commune quand il déclare que la femme est femme en vertu d’une déficience, qu’elle doit vivre enfermée dans le gynécée et subordonnée à l’homme. Néanmoins, une idée apparaît et fait son chemin : puisque l’homme est bien obligé de vivre avec la femme, il peut sembler intéressant de l’instruire, ne serait-ce que pour lui apprendre son rôle de femme. L’éducation corrigera sa nature et lui permettra de se consacrer davantage aux tâches qu’elle doit assumer. Nous faisons allusion ici à son rôle de femme au foyer, d’épouse soumise et de mère. Il reste des irréductibles. Auguste Comte, au XIXe siècle considère que la femme vit dans un état « d’enfance continue » et donc, « ni la direction, ni l’éducation ne lui conviennent ». En général, l’homme n’est pas fait pour rester toujours dans l’enfance. Néanmoins, les réflexions masculines autour de l’éducation amènent généralement beaucoup d’auteurs à s’interroger sur l’éducation des femmes. Des programmes spécifiques et des moyens sont mis en place pour accroître l’accès des filles à l’éducation ; les études se multiplient afin d’identifier les «obstacles » à la scolarisation des filles. La scolarisation des filles fait l’objet de nombreux avantages tant dans les domaines féminins que dans les différents secteurs du développement d’un pays. Il s’agit d’une part, de savoir, si les problèmes rencontrés par les filles renvoient à l’institution scolaire, aux familles ou aux filles elles-mêmes et d’autre part, dans quelle mesure, les économies duales déterminent le rapport des filles à l’école. La scolarisation des filles est-elle une question de richesse? BIBLIOGRAPHIE 1- ARBOUSSE-BASTIDE P., L’éducation universelle dans la philosophie d’Auguste Comte, 2 vol, Paris, PUF, 1957. 2- DURKHEIM E., éducation et sociologie, 2ème édition, Paris, PUF, 1973. 3- GOUHIER, H., La philosophie d’Auguste Comte : esquisses. Paris, Vrin, 1987. 4- KI ZERBO J., ÉDUQUER OU PÉRIR, Paris, Harmattan, 1990. KPABA Théophile, sdb 2