proteger la biodiversite pourquoi ? comment

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PROTEGER
LA BIODIVERSITE
POURQUOI ? COMMENT ?
Marie Meureau, chercheuse-associée à etopia
Juin 2008
www.etopia.be
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Qu' est -ce que la biodiversit é ?
La biodiversité ou diversité biologique exprime la variabilité du monde vivant, dans toutes ses
composantes et pour tous les niveaux d'organisation du monde vivant. L'homme fait partie
intégrante de la biodiversité.
La biodiversité d'un site sera d'autant plus élevée qu'il y aura de chance d'y rencontrer, avec la
même probabilité, des éléments différents.
Au niveau mondial, les écosystèmes pauvres en espèces sont également importants car ils
apportent des particularités supplémentaires. Les écosystèmes fagnards sont un exemple de ce
type.
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Une v a leur int rin sèque
La biodiversité possède une valeur pour elle-même : toutes les espèces et les interactions entre
elles ont le droit d'exister, indépendamment de leur intérêt pour l'homme. Cette valeur
intrinsèque de la biodiversité est notamment reconnue par la Convention sur la diversité
biologique signée à Rio en 1992, à l'occasion du premier Sommet de la Terre. Elle constitue la
manifestation d'un grand respect de la Vie. Cette éthique n'est cependant pas sans poser
problème dans la mesure où elle entre en conflit avec certains usages des ressources biologiques
ou avec les mesures d'hygiène. Faut-il permettre à tous les virus de subsister ?
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Les se rv ic es éc o sy st émiq ue s so nt mena c és
Les écosystèmes, composantes de la biodiversité, rendent de nombreux services à l'humanité :
-
les services de prélèvement ;
-
les services de régulation ;
-
les services sociaux et culturels ;
-
les services d'auto-entretien.
Les services de prélèvement concernent la production par les écosystèmes de ressources
biologiques directement utilisables : nourriture, matériaux, médicaments…
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Les services de régulation découlent du rôle joué par les écosystèmes dans le maintien de
l’équilibre des cycles bio- et géochimiques : maintien des cycles de l’eau, purification de l’eau et
de l’air, régulation du climat…
Les services sociaux et culturels sont en relation avec la beauté des paysages, le maintien
d’espaces touristiques et de loisirs, les opportunités et ressources offertes par les écosystèmes
pour l'art et la recherche...
Les services d’auto-entretien concernent quant à eux le recyclage de la matière organique, la
formation des sols, la reconstitution des écosystèmes après une catastrophe naturelle...
La majeure partie des services rendus par les écosystèmes (15 sur les 24 étudiés dans le cadre de
l'Evaluation des Ecosystèmes pour le Millénaire1) sont en cours de dégradation ou de
surexploitation au niveau mondial. Seuls quelques-uns (4 sur les 24 étudiés) ont connu un
renforcement au cours des 50 dernières années.
Services en déclin
Services en progrès
La production de poissons
Les cultures agricoles
Le traitement des ordures et la désintoxication
L'élevage
L'épuration de l'eau
L'aquaculture
La régulation de la qualité de l'air
La régulation du climat au niveau mondial
(séquestration du carbone)
Le plaisir esthétique
Etc.
Les actions visant l'augmentation d'un service d'origine écosystémique provoquent souvent la
dégradation d'autres services. La tenue d'un débat de société semble donc indispensable pour
l'identification des priorités. Quels sont les services à privilégier ? Quelles sont donc les actions à
mettre en place pour les protéger, les développer ? La tenue d'un débat à ce sujet est d'autant
plus importante que les personnes victimes des dommages causés par les modifications des
écosystèmes ne sont généralement pas celles-là même qui bénéficient des avantages. Souvent,
les victimes des dommages sont parmi les populations les plus pauvres. Considérant qu'il n'y a
pas de progrès social sans capital environnemental, certaines études ont montré que l'avantage
de gérer les écosystèmes de manière durable excède celui de sa conversion2.
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La biodiver sit é : une as suranc e tous ri sque … en m a uvaise
post ure
Différentes recherches tendent à montrer que plus un écosystème est diversifié, plus il est
productif et plus il est résistant aux perturbations. La biodiversité peut donc être considérée
comme l'assurance tous risques de l'humanité. Ce dernier aspect montre à quel point sa
préservation est importante dans le cadre de changements climatiques.
Que ce soient les rapports du WWF au niveau mondial (Planète vivante, 2007), avec les indices
planète vivante ou les rapports officiel régionaux comme ceux de la DGRNE en Wallonie4 ou de
l'IBGE à Bruxelles5, tous montrent une tendance globalement défavorable pour la biodiversité,
en particulier pour ce qui concerne les milieux humides (dans les régions tempérées).
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Les beso in s fo nd a ment a ux d e s c o mposant es de la biodiversit é
On peut distinguer cinq besoins fondamentaux des espèces. Leur porter atteinte porte préjudice
au succès reproducteur et donc au bon développement, voire simplement au maintien des
populations. Il s'agit :
−
du gîte (abri)
−
du couvert (sources de nourriture)
−
des partenaires en bonne santé
−
des liens dans l'espace et dans le temps entre les ressources fondamentales
−
de la quiétude
Parmi les menaces sur le gîte, se trouvent l'altération et/ou la disparition des sites de repos
comme les prairies de haute valeur biologique, les haies et bosquets, les taillis, les arbres creux,
sénescents ou morts, les berges naturelles, les granges agricoles, les combles et greniers
accueillant la faune sauvage...
L'altération ou la disparition des sites de nourrissage, le contrôle des adventices et des
ravageurs (disparitions directes), l'empoisonnement des ressources alimentaires (altération de la
qualité), la perturbation des chaînes alimentaires (disparitions indirectes) sont autant de facteurs
de menace pour le couvert.
La réduction de la taille des populations mène à leur séparation. La présence de barrières
écologiques (routes, cours d'eau artificialisés, bordures en béton...) fait obstacles aux échanges
génétiques. Or, sans échange, des problèmes de dégénération peuvent survenir et fragiliser
davantage encore les noyaux isolés de population restants.
D'autres perturbations peuvent nuire à la bonne santé des populations comme une présence
accrue de prédateurs ou de concurrents, la chasse et la pêche, les sports moteurs, les
promenades hors des sentiers...
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Ag ir sur les be so ins fo nd a m ent a ux d e s c o mp o sa nt es d e la
biodiversit é
Pour agir en faveur des composantes de la biodiversité, il faut agir sur leurs besoins
fondamentaux.
Pour ce qui concerne le gîte, il s'agira de :
✔
Veiller à la présence des petits éléments du paysage
✔
Entretenir et recréer des mares
✔
Eviter les sols nus en hiver et maintenir des zones d'herbes folles
✔
Laisser une place pour la faune dans les bâtiments (caves, greniers, granges...)
✔
Construire de multiples abris dans les jardins.
Les trois premières actions sont également favorables au couvert. En complément, limiter au
strict nécessaire l'emploi de pesticides aura d'un impact important.
Les actions suivantes seront également bénéfiques :
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−
Veiller à assurer le gîte et le couvert pour un maximum d'espèces
−
Eliminer les pièges (nichoirs accessibles aux chats, mares avec tortues de Floride...)
−
Eviter l'introduction d'espèces exotiques
−
Contrôler l'application des lois sur la chasse et la pêche
−
Eviter au maximum l'imperméabilisation des sols
−
Faire la chasse aux obstacles
−
Créer un réseau écologique sur sa commune
−
Veiller à diversifier les modes de gestion des espaces naturels
−
Eviter les modes de transport bruyants
−
Entretenir autant que possible les espaces naturels au moyen d'outils mécaniques
−
Apprendre aux enfants à écouter les bruits de la nature lors de balades
−
Ne pas quitter les sentiers lors de balades nature.
E t l' act ion polit iq ue ?
L'action politique peut bien sûr concerner le respect des besoins fondamentaux des composantes
de la biodiversité. Elle s'y attache d'ailleurs déjà, du moins en partie6 (maillage vert et bleu,
opérations combles et clochers, bords de route, gestion durable des forêts, PCDN, mise en place
du réseau Natura 2000 et de réserves naturelles...). Mais elle peut également concerner des
mécanismes plus globaux, des mécanismes touchant aux forces sous-jacentes, responsables des
changements observés.
Les travaux menés dans le cadre de l'Evaluation des Ecosystèmes pour le Millénaire7 ont permis
d'identifier cinq forces sous-jacentes responsables des changements de la biodiversité et de la
capacité des écosystèmes à fournir les services indispensables au bien-être de l'humanité :
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−
la démographie et les mouvements de populations humaines
−
le niveau de l'activité économique
−
les facteurs socio-politiques
−
les facteurs culturels
−
les changements technologiques.
La capacité de la Terre à produire ce dont l'humanité a besoin est limitée. Depuis quelques
années, nous ne nous contentons plus de prélever les bénéfices du fonctionnement des
écosystèmes, nous avons commencé à porter atteinte au capital. Les calculs de l'empreinte
écologique des Belges montrent qu'en moyenne, chacun d'entre nous devrait disposer de 5,6 ha
afin de satisfaire ses besoins de manière durable, c'est à dire, sans puiser dans le capital de la
planète. Or, un partage équitable des ressources de la planète entre les Hommes ne nous
laisserait que 2,2 ha par personne.
L'importance et la distribution de la population mondiale, les niveaux et les modes de
production et de consommation, y compris la croissance économique, les disparités dans le
domaine de la santé et les modes d'échanges commerciaux sont donc bien des facteurs cruciaux
à maîtriser dans la perspective d'une utilisation durable et d'un partage équitable et juste des
ressources de la Terre.
Les facteurs sociopolitiques, y compris les facteurs allant de la présence de conflits à la
participation publique aux prises de décision, ainsi que les facteurs historiques et culturels
jouent bien évidemment un rôle majeur dans les possibilités et modalités d'élaboration et
d'application de réformes sur le terrain, soit dans la manière dont l'utilisation et le partage des
ressources seront organisés.
Notes
1Evaluation des Ecosystèmes pour le Millénaire : www.millenniumassessment.org
Brodagh C. L’Evaluation des Ecosystèmes pour le Millénaire (EM), Note de lecture du rapport des Nations-Unies,
avril 2005. www.brodhag.org/impression.php3?id_article=58
2Evaluation des Ecosystèmes pour le Millénaire : www.millenniumassessment.org
4Cellule Etat de l'Environnement Wallon. 2007. Rapport analytique sur l'état de l'environnement wallon 2006-2007. MRW
– DGRNE, Namur, 736 pp.
5Bruxelles Environment – IBGE. 2006. Rapport sur l'état de l'environnement bruxellois 2006. Environment semi-naturel et
espaces verts publics. 57pp.
6Voir aussi Godin et Lambert 2006. Un besoin vital de biodiversité en Wallonie. Inventaire des outils locaux. etopia_ 56pp.
7Evaluation des Ecosystèmes pour le Millénaire : www.millenniumassessment.org
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