1- mise en evidence du probleme

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1- MISE EN EVIDENCE DU PROBLEME
1-1
Situation d’appel
La situation se déroule en Août 2006 dans un service d’entrée de psychiatrie. Le service
comporte 16 chambres dont 2 chambres d’isolement et 3 chambres doubles.
L’équipe se compose d’un médecin, de 3 infirmières et d’une étudiante IDE de 1ére année.
A l’arrivée de l’étudiante dans le service, une patiente schizophrène Mme X âgée de 50 ans
était hospitalisée à la demande d’un tiers (sa fille). Elle se trouvait en chambre d’isolement parce
qu'elle s’était montrée agressive envers un autre patient et tenait des propos délirants (thème :
théâtralisme, hystérie, mysticisme, paranoïa). Quelques jours après le début de son stage, l’équipe
pluridisciplinaire décida de lever l’isolement lors des repas afin d’apprécier son comportement avec
les autres résidents. Elle se montrait calme lors de ses sorties et acceptait de prendre son traitement
(traitement: Tenormine® 100mg ¼ le matin, Seresta® 10mg 1 matin et soir, Risperdal® 1mg 1
matin et soir, Lepticur® 10mg 1 le matin, Depakote® 500mg 1 matin et soir et Imovane® 7,5mg 1
au coucher), c’est pourquoi elle a pu retourner en chambre normale au bout d’une semaine.
C’est à partir de ce moment que la stagiaire prit en charge la patiente, notamment en l’aidant
tous les jours pour sa toilette. Mme X se sentait à l’aise avec l’étudiante mais parlait peu de sa vie
privée. Au début de la troisième semaine, la patiente demanda à la jeune fille si elle avait le droit de
sortir du service pour aller se promener dans le parc. L’élève est donc allée se renseigner auprès de
l’équipe soignante qui lui a donné son accord, à condition que la patiente soit accompagnée.
Ce jour là, elle accompagna donc la patiente. Les jours qui suivirent, Mme X renouvela
quotidiennement sa demande auprès de celle-ci, et la promenade était donc devenue une habitude
pour les deux personnes. La patiente se livrait tous les jours un peu plus à l’étudiante. Elle lui confia
beaucoup de choses sur sa vie personnelle, notamment sur son ami, sa fille… Elle lui exprima
même son envie de sortir de l’hôpital et la questionnait sur le jour de sa sortie. L’équipe posait
beaucoup de question sur le comportement de la Dame lors des sorties et semblait plutôt satisfaite.
Une complicité s’était créée entre la patiente et l’étudiante. Une relation privilégiée s’était
1
installée. La patiente n’adressait ses demandes qu’à la jeune fille.
Lorsque l’étudiante annonça que c’était son dernier jour de stage, la résidente exprima un
sentiment de tristesse, elle lui dit qu’elle ne voulait pas qu’elle s’en aille car elle se demandait qui
l’accompagnerait pour ses promenades, l'aiderait pour sa toilette. La stagiaire lui expliqua qu’il ne
fallait pas qu’elle soit triste à cause de son départ, car une équipe était là pour s’occuper d’elle et
qu’elle ne serait donc pas seule.
1-2 Cadre de référence et analyse de la situation
1.2.1- Introduction
Le thème principal de notre situation est la relation soignant/soigné. De ce thème découle
des sous-thèmes. Dans un premier temps, il y a la distance professionnelle et relationnelle en
rapport avec la relation privilégiée qu’a la patiente avec l’étudiante. Ensuite, le second thème est la
confiance, se traduisant par le fait que l’élève était devenue la confidente de la résidante. Puis, nous
avons mis en avant la notion de transfert pouvant se justifier par le fait que Mme X retranscrive ses
émotions sur l’étudiante par rapport à l’absence de sa fille. Le quatrième thème est l’empathie, qui
se définit par les processus qui permettent à l’étudiante de comprendre réellement ce que vit la
patiente. Enfin, le dernier thème parle de l'encadrement de l’étudiant en soins infirmiers.
1.2.2-La relation soignant soigné
D'après le Décret n°93-221 du 16 février 1993 relatif aux règles professionnelles et
infirmières Titre I chapitre I (devoirs généraux) article 8: «L’infirmier ou l’infirmière doit respecter
le
droit
du
patient
de
s’adresser
au
professionnel
de
santé
de
son
choix.»
Puis, le Décret n° 2002-194 du 11 février 2002 relatif aux actes professionnels et à l’exercice de la
profession d’infirmier article 2 nous dit que : «Les soins infirmiers, préventifs, curatifs ou palliatifs,
intègrent
qualité
technique
et
qualité
de
relation
avec
le
malade.»
Enfin, le Décret n°93-221 du 16 février 1993 relatif aux règles professionnelles et infirmières Titre I
chapitre II (devoirs envers les patients) stipule que: «Dès lors qu’il accepte d’effectuer des soins,
l’infirmier ou l’infirmière est tenue d’en assurer la continuité, sous réserve de l’article 41 ciaprès.»
2
La loi nous dit que tout patient a le droit de s’adresser au professionnel de santé de son
choix et que l’infirmier ne peut s’opposer à son opinion ou lui imposer la sienne. Dans la situation,
on constate que la patiente a choisi de faire appel uniquement à l’étudiante et on s’aperçoit qu’il n’y
a pas d’opposition à cette relation de soins de la part du personnel soignant qui encadrait celle-ci.
On peut donc constater que sur ce point, il n’y a pas d’écart entre la loi et la situation.
Ensuite, selon Alexandre Manoukian et Anne Masseboeuf «les facteurs de relation sont nombreux:
-La communication verbale avec les paroles et le ton
- La communication non verbale avec les gestes, les mimiques, les positions corporelles, les
attitudes, les accessoires (tel que les vêtements, les instruments ou les bijoux)»1
Dans la situation, on s’aperçoit que les moments de soins tels que la toilette, où les gestes
ont une importance primordiale, ont installé une communication non verbale entre les deux
personnes alors que les temps de promenade ont permis de mettre en place une relation verbale. On
peut voir à travers ça que les gestes ont donc un rôle important dans la communication car cela a
permis à la patiente de cerner l’étudiante, comme le dit Alexandre Manoukian
et Anne
Masseboeuf2 «c’est avec le corps, sa parole et son affectivité que l’on entre en relation» et Hélène
Dazure3 ajoute que «l’infirmière qui veut écouter ne perd jamais de vue que le langage non verbal
est souvent aussi riche sinon plus que le langage verbal».
Pour conclure, comme le dit Hélène Dazure «en relation d’aide, l’écoute est une habilité,
un outil essentiel que l’infirmière doit développer car c’est la seule voix d’accès à la
compréhension de ses clients»4 . Cette phrase nous explique donc pourquoi les patients instaurent
parfois des relations plus privilégiées avec certains soignants qu’avec d’autres et nous montre que
les communications ont un rôle essentiel dans la prise en soins.
Questionnement:
- En quoi la prise en soins de l’étudiante a entraîné une relation adaptée d’après le décret de
compétence du 16 février 1993 ?
- Quelles pourraient être les conséquences d'une attitude non adaptée de la part du soignant pour le
patient ?
- Quels sont les facteurs pouvant entraîner une relation soignant/soigné adaptée?
1
2
3
4
La relation soignant/soigné page 11 de Alexandre Manoukian et Anne Masseboeuf edition Lamarre 2001
La relation soignant/soigné page 9 de Alexandre Manoukian et Anne Masseboeuf édition Lamare 2001
Vivre la relation d’aide page 17 De Hélène Dazure
Vivre la relation d’aide page15 de Hélène Dazure
3
- En quoi le comportement de l’étudiante était–il justifié ?
1.2.3-La confiance
La confiance se définit « comme étant une attitude générale, rencontrée dans des
circonstances multiples, où une personne détermine son comportement sur la base d'un sentiment
plus que sur un raisonnement ou sur une recherche totale de preuves. Elle peut tout aussi bien
concerner la confiance en soi que celle envers les autres et celle envers la tournure que prendront
les évènements (optimisme). »5
Faire confiance, c'est d'une certaine façon, se déterminer spontanément, en faisant
l'économie d'une analyse fouillée et rationnelle.
Le Petit Robert nous définit la confiance « comme une espérance ferme, une assurance de
celui qui se fie à quelqu'un ou à quelque chose. »6
Le Décret n°93-221 du 16 février 1993 relatif aux règles professionnelles des infirmiers et
infirmières article 4 nous dit que « le secret professionnel s'impose à tout infirmier ou infirmière et
à tout étudiant infirmier dans les conditions établies par la loi. Le secret couvre non seulement ce
qui lui a été confié, mais aussi ce qu'il a vu, lu, entendu, constaté ou compris. »
Mary Durand Thomas nous dit que « La confiance qui peut rapprocher le malade et
l'infirmière est fondamentale pour atteindre pleinement les buts des soins infirmiers. L'infirmière,
en aidant une personne à avancer vers la santé, observe, diagnostique, intervient et évalue les
résultats », elle nous explique que « La confiance a été nommée la pierre angulaire d'une
personnalité saine parce qu'elle permet à la personne d'être ouverte à elle-même et à s'accepter elle
même, facilitant ainsi un développement constructif. »7
Dans la situation, l'étudiante a réussi à instaurer une relation de confiance avec la patiente
car celle-ci a su l'écouter, la rassurer, sans la juger. Mme X pouvait se confier en toute liberté sans
craindre que l'élève ne divulgue ses souvenirs. Comme nous dit la loi précédemment écrite,
l'étudiante a su faire preuve de secret professionnel. Elle a su faire preuve de professionnalisme en
différenciant les choses essentielles qu'elle devait partager avec l'équipe, des choses plus
personnelles qu'elle pouvait garder pour elle, par respect pour la patiente. Comme nous l'explique
5
6
7
Site Internet: http://fr.wikipedia.org/wiki/Confiance
Dictionnaire de la langue Française Le petit Robert
Les comportements humains concepts et applications aux soins infirmiers de Carolyn e. Carlson et Betty Blackwell
p. 270-273
4
Mary Durand Thomas ci-dessus, la confiance est un facteur essentiel dans la relation
soignant/soigné car cela a pour objectif de personnaliser les soins en fonction de chaque patient.
En conclusion, nous pouvons dire que, avant de pouvoir aider les malades à avoir
confiance, les infirmières doivent être elles-mêmes dignes de confiance.
Questionnement:
- Quels sont les facteurs pouvant induire chez un patient une relation de confiance envers le
soignant ?
1.2.4-La distance professionnelle et relationnelle
La distance relationnelle est un degré de proximité avec l’autre dans lequel l’individu se
sent plus à l’aise.
En référence au roman de Pascal Prayez « Julie ou l’Aventure de la Juste Distance, Une
Soignante en Formation », on comprend l’importance fondamentale de la distance professionnelle
autant pour le patient que pour le soignant lui-même.
La complexité de cette distance professionnelle est de ne pas paraître trop froid ou
indifférent envers le patient, mais de ne pas non plus se perdre dans la relation et de trop
s’impliquer personnellement. Les émotions font partie intégrante de la relation soignant/soigné et
font que nous sommes humains avant d’être soignants.
Aussi faut-il se demander si l’attachement que nous manifeste le patient ne vient pas
rencontrer nos propres besoins de reconnaissance, de tendresse, de soutien surtout en tant
qu’étudiant.
La stagiaire avait en effet la sensation d’être perçue comme les autres soignants par la
patiente bien qu’elle ne soit qu’étudiante. Elle avait besoin d’avoir une relation plus particulière
avec un patient.
Dans notre situation, Mme X s’est attachée à la jeune fille et vice-versa donc sur ce point,
la distance professionnelle était respectée.
Il y a une interaction entre distance physique et distance psychique. L’étudiante avec la
patiente, lors de leurs promenades, entretenait une distance que E.T. Hall qualifie de sociale, c’està-dire que nos deux interlocutrices se parlaient à voix haute en accrochant le regard de l’autre. Elles
étaient en interaction avec les mots et non directement avec leur corps.
5
Dans ce cas, la distance professionnelle était respectée.
Toujours selon E.T. Hall, elles avaient une distance qualifiée de personnelle où l’étudiante
avait la possibilité de toucher ou d’être touchée par la patiente et cette dernière pouvait échanger des
sujets personnels à voix peu élevée ce qui implique un minimum de confiance.
Questionnement:
- Les malades en psychiatrie vivent les mouvements de rapprochement ou d’éloignement de façon
très intense, comment aurait-il fallu agir par rapport au départ de l’étudiante ?
- Y a-t-il des émotions qu’il faudrait s’interdire ou ne faudrait-il pas seulement en parler en commun
avec l’équipe ?
-Quelles sont les limites de la relation (législative, personnelle, environnementale) avec le patient ?
- Quand doit-on établir une distance professionnelle ?
1.2.5-L'empathie
Le dictionnaire de la langue française définit l'empathie « comme étant la faculté de se
mettre à la place d'autrui, de communier affectivement avec lui, de ressentir ce qui le touche »8.
L'empathie se définit également « comme étant quelque chose qui consiste à saisir avec autant
d'exactitude que possible les références internes et les composantes émotionnelles d'une autre
personne comme si l'on était cette personne. »9 Ce même site nous dit que «se mettre à la place de
l'autre est un jeu compliqué et dangereux, plutôt que de nous mettre à sa place, nous pouvons
mettre du soin à l'entendre exprimer ce qu'il ressent, pense ou vit à la place où il est», il nous dit
également «qu'il serait maladroit d'être passif et de simplement laisser parler. Il est plus efficace
d'aider notre interlocuteur à exprimer ce qu'il a à dire grâce à des questions pertinentes sans
conditions de réponses et non indiscrètes»
Dans la situation, la patiente s'est ouverte à l'étudiante car elle avait le sentiment que cette
dernière ne portait aucun jugement sur son vécu, sur les choses qu'elle a faites dans le passé.
L'étudiante a su, comme nous le dit l'article ci-dessus « entendre exprimer ce qu'elle ressent » tout
en sachant garder une distance émotionnelle, cela signifie qu'elle a su l'écouter attentivement et
répondre à ses besoins sans se mettre en danger elle-même. Il peut être parfois difficile de faire face
à certaines situations et de savoir contenir ses sentiments car la limite entre la compassion, la
8
9
Encyclopédie Bordas dictionnaire de la langue française
Site Internet: http://maieusthésie,com/nouveautés/articles/empathie,htm
6
compréhension ou l'empathie est très proche de celle de l'identification. Il faut savoir se mettre à la
place de la patiente pour comprendre ce qu'elle ressent sans s'identifier à elle.
L'étudiante a su instaurer une relation de confiance en utilisant l'empathie afin de mieux
comprendre la patiente et de ce fait, l'aider à exprimer son ressenti vis-à-vis de son hospitalisation et
de son devenir.
Questionnement:
- Quelles sont les limites de l'empathie et en quoi a-t-elle une influence sur la prise en charge d'un
patient ?
- Quelle est la limite entre empathie et identification ?
- Comment peut-on établir une relation de confiance grâce à l'empathie sans entraver la distance
relationnelle ?
1.2.6-Le transfert des émotions
Le transfert se définit « comme étant un report sur l'analyste de sentiments amoureux ou
tendres (transfert positif) ou de sentiments hostiles (transfert négatif) qui sont la répétition de
situations et d'émotions vécues dans son enfance par l'analysant. »10 Freud définit le transfert
« comme étant une cure psychanalytique de la projection, par l'analysé, du contenu de l'inconscient
sur la personne du psychanalyste qui lui apparaît alors dotée de qualités bien différentes de sa
réalité. C'est par l'analyse de ces projections que le processus analytique va aboutir, au fil du
temps, à une prise de conscience progressive des problématiques auxquelles l'analysant est
confronté.»11
Le transfert c'est donc projeter un amour ancien sur une personne dont nous voulons
dépendre. C'est un besoin de dépendance doublé d'un retour dans le passé.
Dans la situation, la patiente se trouve face à une jeune fille d'environ 18 ans, qui non
seulement l'écoute, est attentive à ce qu'elle lui dit , mais en plus l'accompagne lors de ses
promenades, l'aide lors de ses soins... Comme nous le dit Freud, cette patiente transfère «le contenu
de son inconscient sur la personne du psychanalyste qui lui apparaît alors dotée de qualités bien
différentes de sa réalité». Ici nous pourrions comparer le psychanalyste à la stagiaire qui, a priori,
ressemble beaucoup à sa fille, qui aurait le même âge mais que celle-ci ne connaît que très peu. La
10
11
Encyclopédie Bordas dictionnaire de la langue française
Cinq psychanalyses de Sigmund Freud
7
patiente transfère les sentiments qu'elle éprouve pour sa fille (sentiments conscients ou
inconscients) sur l'étudiante en déformant la réalité et en idéalisant la jeune fille. Le transfert peut
cependant entraîner des blessures lors des séparations, ce qui a été le cas pour Mme X lors de
l'annonce du départ.
Questionnement:
- Quels sont les facteurs pouvant entraîner un transfert ?
- Quelles attitudes peuvent éviter ce transfert ?
- Comment réagir face à un transfert ? Quelle attitude doit adopter le soignant face au patient ?
1.2.7-L'encadrement des étudiants en soins infirmiers
Selon le Décret n°2002-194 du 11 février 2002 relatif aux actes professionnels et à
l'exercice de la profession d'infirmier article 14: « Selon le secteur d'activité où il exerce, y compris
dans le cadre des réseaux de soins, et en fonction des besoins de santé identifiés, l'infirmier propose
des actions, les organise ou y participe dans les domaines suivants:
- formation initiale et formation continue du personnel infirmier, des personnels qui
l'assistent et éventuellement d'autres personnels de santé ;
–
encadrement des stagiaires en formation ».
Dans notre situation, nous ne pouvons pas remettre en question l'encadrement de
l'étudiante car malgré le fait qu'elle se retrouve régulièrement seule face à la patiente et parfois face
à des situations difficiles, l'équipe questionne beaucoup l'étudiante sur le relationnel qu'elle a avec
la patiente, sur comment se passent les promenades, sur le comportement de Mme X...
Le décret nous dit donc que les infirmiers(ères) ont pour devoir de participer à
l'encadrement des étudiants et nous pouvons constater que l'équipe soignante (équipe
pluridisciplinaire) participe à l'encadrement de celle-ci en restant toujours vigilante sur l'évolution
de la situation, en prenant connaissance des difficultés de l'étudiante,
Questionnement:
- L'étudiant infirmier n'influence-t-il pas son encadrement par son comportement?
8
1.3-Le problème retenu
Cette situation touche différents axes qui nous ont intéressés. Suite à l'analyse de la
situation et au questionnement qu'elle nous a suscités, nous n'avons pas retenu les thèmes de
transfert, de l'encadrement des élèves et de l'empathie car
un problème nous a semblé plus
important, il s'agit de la distance professionnelle et relationnelle. C'est un sujet auquel sont
confrontés en permanence les soignants puisque c'est un élément clé du professionnalisme. De plus,
ce sujet relève de notre champ de compétence, ce n'est pas un problème d'éthique, c'est pourquoi
nous avons décidé de l'étudier plus profondément.
Ensuite, dans le cadre de ce dossier, nous n'avons pas choisi de traiter la relation
soignant/soigné, ce thème étant trop vaste et trop complexe.
Enfin, nous n'avons pas retenu le thème de la confiance, c'est un sujet trop général qui
concerne tous les milieux professionnels mais également la vie quotidienne c'est pourquoi nous ne
développerons pas ce sujet.
1.4-La question de départ
Notre objectif de recherche est de comprendre l'incidence de la proximité relationnelle sur
la distance professionnelle. Ceci nous a donc amené à nous poser différentes questions dont une se
détache plus particulièrement :
« En quoi la proximité relationnelle influence-t-elle la distance professionnelle entre un
étudiant infirmier et un patient schizophrène en hôpital psychiatrique ?»
2- LA PHASE EXPLORATOIRE BIBLIOGRAPHIQUE
Nous allons tenter d'éclairer la question de départ en détaillant certains mots clés tel que
l'hôpital psychiatrique, la schizophrénie, la distance professionnelle et enfin la proximité
relationnelle.
9
2.1-L'hôpital psychiatrique
Le dictionnaire encyclopédique Le Petit Larousse définit l'hôpital psychiatrique comme
« un établissement hospitalier spécialisé dans le traitement des troubles mentaux, nommé asile
avant 1938 et actuellement centre psychothérapique ou centre hospitalier spécialisé ».12 Selon
l'auteur Pierre André, psychiatre, « la psychiatrie est une spécialité médicale au même titre que les
autres spécialités (cardiologie, dermatologie, pneumologie...) mais elle s'en distingue dans la
mesure où ces dernières touchent des organes ou leurs fonctions et sont donc en relation avec des
lésions anatomiques ou des désordres physiologiques. »13 C'est une médecine qui traite des
maladies mentales. Il existe différents secteurs tels que les services d'admission, chronique, aigu ou
pour adolescent, comme nous le dit Helmut Barz, 14 docteur en psychiatrie.
2.2- La schizophrénie
D'après le dictionnaire infirmier de psychiatrie de Masson, la schizophrénie se définit
comme « l'ensemble d'affections hétérogènes caractérisées par la dissociation de la vie mentale,
des idées délirantes, un syndrome déficitaire et une évolution chronique »15. Il existe différents
symptômes, le premier étant le syndrome dissociatif qui se définit par « l'expression clinique de la
rupture des processus unissant le psychisme de l'individu : l'affect, la pensée et le comportement ne
sont plus reliés harmonieusement »16. Il existe une désorganisation de la pensée, du discours, des
sentiments et du comportement (altération des associations, altération du débit idéique, troubles du
langage, troubles du système logique, ambivalence affective, perte de l'élan vital, bizarreries,
syndrome catatonique). Le second symptôme est le délire paranoïde qui se définit par « un
syndrome délirant inconstant et qui reflète la dissociation »17 Il se caractérise par la chronicité
(supérieure à 6 mois), une thématique polymorphe, des mécanismes polymorphes, l'absence de
structure, une participation affective faible. Enfin, le dernier symptôme est le syndrome déficitaire,
il « rend compte du retentissement socio affectif. Il s'agit d'un retrait et d'un repli sur soi. »17 Les
deux grandes formes cliniques sont l'hébéphrénie et la schizophrénie paranoïde. C'est une maladie
qui survient le plus souvent après l'adolescence ou chez l'adulte jeune. Selon le dictionnaire,
« l'évolution au long cours des schizophrénies dépend de nombreux facteurs : la forme clinique, la
12
13
14
15
16
17
Le Petit Larousse dictionnaire encyclopédique 1993
Psychiatrie de l'Adulte de Pierre André page 6 Edition Heures de France 1994
Psychiatrie Pratique Edition Hans Huber Berne Stuttgart Vienne 1977
Dictionnaire infirmier de psychiatrie page 169 Masson 2005
Dictionnaire infirmier de psychiatrie page 169 Masson 2005
Dictionnaire infirmier de psychiatrie page 170 Masson 2005
10
réponse au traitement médicamenteux et la qualité des prises en charge psychothérapique,
institutionnelle et sociothérapique »18. « La schizophrénie est une pathologie chronique et
invalidante avec des conséquences possiblement graves sur le fonctionnement social, affectif et
professionnel du patient. »19
2.3-La distance professionnelle
La distance professionnelle doit être juste pour que la qualité du soin soit efficace comme
nous le dit Dominique LEPAGNOT, Cadre de Santé dans La distance professionnelle et qualité
de soins « l'excès de distance correspond à une dépersonnalisation du soin, qui prend alors une
tournure industrielle... »20. A l'inverse, dans ce même livre, une aide soignante témoigne que pour
éviter les relations trop intenses, il faut en parler à l'équipe pluridisciplinaire, elle nous dit que
« c'est donc nécessaire pour instaurer de la distance »21 « pour ne pas rester engagé dans un lien
privilégié »21
Selon Pascal Prayez, consultant formateur indépendant en milieu sanitaire et social et
docteur en psychologie clinique et sociale, il existe une juste distance qu'il définit comme étant « la
capacité à être au contact d'autrui en pleine conscience de la différence des places »22. Ce même
auteur nous explique que la distance est vécue différemment par le soignant et par le soigné, car
« les besoins ne sont pas les mêmes, car les places inégales... »23 le soigné est dans l'attente d'être
accompagné dans sa souffrance et le soignant est rémunéré afin d'accomplir des actes techniques et
relationnels.
D'après lui, deux distances peuvent se distinguer : la distance physique et la distance
psychique. Chez les patients atteints de maladies mentales, la distance physique est vécue
différemment. Il nous dit qu'ils « vivent les mouvements de rapprochement ou d'éloignement de
façon très intense. Ils les perçoivent avec leur hypersensibilité même s'ils n'ont pas l'air de prêter
attention à leur entourage »24
18
19
20
21
22
23
24
Dictionnaire infirmier de psychiatrie page 172 Masson 2005
Dictionnaire infirmier de psychiatrie page 173 Masson 2005
Distance professionnelle et qualité de soins page 141 de Pascal Prayez Edition Lamarre 2003
Distance professionnelle et qualité de soins page 74 de Pascal Prayez Edition Lamarre 2003
Julie ou l'aventure de la juste distance page 213 Pascal Prayez Edition Lamarre 2005
Julie ou l'aventure de la juste distance page 106 Pascal Prayez Edition Lamarre 2005
Julie ou l'aventure de la juste distance page 14 Pascal Prayez Edition Lamarre 2005
11
2.4- La proximité relationnelle
La proximité peut être physique ou psychique, cela peut conduire à un sentiment de
sécurité et de bien-être partagé. Selon Pascal Prayez, « c'est une expérience d'intimité confiante et
respectueuse, qui se vit à travers des contacts agréables et apaisants. Elle accueille et accepte
l'autre tel qu'il est. Elle s'exprime aussi à distance par le regard. »25 La proximité est une forme de
tendresse. D'après lui, « il s'agit d'une attention à l'autre, faite de pudeur, de respect des besoins et
des limites de chacun, sans infantilisation aucune. Cette attention est à la base des échanges
humains et cette disponibilité au monde de l'autre est faite d'ouverture au présent, de gestes
simples, profondément vécus et riches de significations. »25 L'auteur nous parle « d'effet miroir »26
ce qui signifie que le soignant se trouvant fortement impliqué émotionnellement, perçoit une image
du patient à laquelle il peut s'identifier.
Chez les patients en psychiatrie, la proximité relationnelle est plus intense car « ils
cherchent ouvertement à nouer des relations privées avec nous ...»27plus particulièrement avec les
novices en psychiatrie, jeunes diplômés et étudiants infirmiers, car « ...ils consentiront assez
facilement à cette approche, ils s'occuperont davantage de certains patients aussi sur le plan
privé »27. Helmut Barz nous dit que « les relations privées peuvent, dans les premiers moments
d'enthousiasme, avoir un effet très positif et mobiliser les forces saines du patient, mais elles
éveilleront simultanément une attente en lui, à laquelle nous ne serons à la longue pas de taille à
répondre »27. Cela signifie que le patient est de plus en plus demandeur et que le soignant, ou
l'étudiant, au début, saura y répondre mais sera vite submergé par la situation. D'après ce même
auteur, les relations avec les schizophrènes impliquent plus souvent les émotions du soignant. Le
soignant créera une atmosphère d'attention et de compréhension afin d'obtenir l'apaisement du
patient. Deux qualités peuvent favoriser la relation avec un patient schizophrène : « sensibilité : elle
comprend vibration, sympathie et compréhension des soucis et des besoins du patient. Stabilité :
bien que notre devoir consiste à assister le malade dans chaque situation, il est nécessaire que nous
restions toujours nous-mêmes. »28
25
26
27
28
Julie ou l'aventure de la juste distance page 50 Pascal Prayez Edition Lamarre 2005
Julie ou l'aventure de la juste distance page 11 Pascal Prayez Edition Lamarre 2005
Psychiatrie Pratique page 34 Helmut Barz Edition Hans Huber Berne 1977
Psychiatrie Pratique page 137 Helmut Barz Edition Hans Huber Berne 1977
12
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