La représentation du cancer par les médecins diffère-t

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La représentation du cancer par les médecins diffère-­t-­elle de celle des malades ? Pierre Mourlanette, Laurence Peres, Xavier Boidin
Clinique des Cèdres
Cornebarrieu
FIL DIRECTEUR
Pourquoi ?
Les représentations
Le cancer
Problématiques
Une étude
Une expérience personnelle
Des réflexions
Conclusions
Pourquoi ?
Les représentations
Les représentations sociales
« Elaborée et partagée par les membres d’un même groupe, une représentation sociale est une « forme de connaissance courante, dite de sens commun » qui a comme finalité l’organisation et l’orientation des communications et des conduites permettant d’acquérir une vision de la réalité commune à tous les membres d’un ensemble social déterminé » (Denise Jodelet, 1989).
Selon Jean-­Claude Abric (1984), la représentation sociale se structure en éléments organisateurs, stables et non négociables, formant le noyau de la représentation, autour duquel des éléments périphériques instables et négociables exercent le rôle de décryptage de la réalité (comprendre et mieux maîtriser les événements qui surviennent en leurs assignant une signification) et celui de tampon (apparaît dès lors que l'individu est confronté à des événements qui viennent contredire son système de représentation).
Le Cancer
• Le cancer reste synonyme de mort dans l’imaginaire collectif.
• De l’antiquité au 19e siècle : « bête qui ronge » ;; au début du 19e siècle : « la sanction d’une mauvaise hygiène de vie et d’abus divers ».
• Pérennité des représentations profanes de la maladie comme inscrites dans l'histoire de l'humanité. (P. Darmon 1993)
« Il y a d'une certaine façon deux ordres de représentations, les représentations du cancer en tant qu'objet de science, et les représentations sociales du cancer en tant qu'attribut stigmatisant celui qui en est affecté, ces deux ordres de représentations s'entremêlent dans le récit des patients.
Les progrès scientifiques ne peuvent prétendre effacer les représentations subjectives de la maladie tant qu'il n'y aura pas préalablement extinction de l'angoisse produite par le mot cancer, c'est-­à-­dire tant qu'il n'y aura pas de solution thérapeutique simple et efficace » (J. L. Pujol 2014)
Problématiques
•
•
Le médecin présente une maladie cancer, le patient se la représente : « nommer la maladie la fait exister pour le sujet ». B. Jacobin dans : le cancer : approche psycho dynamique chez l’adulte 2004 : « Le mot seul « cancer » porte en lui le réel d’une mort à venir. L’annonce du cancer est la carte d’un territoire empreint d’angoisse telles, que ce moment d’annonce fait effraction au sein du psychisme du sujet, d’autant qu’il a été confronté antérieurement à cette maladie ou qu’il ressent chez son médecin, des représentations négatives sur la maladie cancer »
Problématiques
ü Le médecin est il une personne comme une autre ? Le cancer, en terme de représentation, est-­il « normatif » ?
ü La considération de ces représentations peut elle servir favorablement et à plusieurs niveaux la relation soignant-­soigné et le projet thérapeutique ?
OBJECTIFS
• Représentations du cancer et chimiothérapie
• En fonction du statut des individus : malades vs médecins oncologues
• Etudier les représentations attribuées à l’autre acteur
• Dégager des pistes de réflexions qui en résultent
METHODES
• Service oncologie de la Timone Marseille
• Questionnaires : 62 patients (en chimio) et 26 médecins
• 2 jours d’enquête/semaine sur 5 mois
Marie D. et al : Bull Cancer 2010 ;; 97: 577-­-­87
METHODES
• Questionnaires : premier temps
• produire une série de 5 mots de façon spontanée à partir des mots inducteurs CANCER et CHIMIOTHERAPIE
• les classer par importance accordée à chaque mot
• répondre « pour soi » puis consigne de « substitution »
• analyse lexicographique : logiciel EVOC 2000
• fréquence et importance : SAILLANCE de chaque terme
• les termes les plus saillants sont considérés comme les plus structurants de la représentation
• Questionnaires : deuxième temps
• Recueil de croyances concernant la CT
• Degré d’accord de 1 à 6
• Analyse de similitude : logiciel SIMI 2000
• témoin d’une « structuration » de la représentation
Marie D. et al : Bull Cancer 2010 ;; 97: 577-­-­87
RESULTATS (1)
• Patients :
• 36 hommes et 26 femmes , âge moyen 58,5 ans
• plusieurs types de cancer (ORL, gyneco, sarcome, gastrique, uro, lymphome)
• situation familiale : en couple 61,7%, divorcés 25%, célibataire 6,7%, veufs 6,7%
• situation professionnelle : en activité 35%, retraité 51,7%, invalidité 6,7%, sans activité 6,7%
• Médecins :
• 16 femmes et 10 hommes, âge moyen 31,7 ans
• 12 PH et 14 internes en oncologie médicale
Marie D. et al : Bull Cancer 2010 ;; 97: 577-­-­87
RESULTATS (2)
Le cancer Marie D. et al : Bull Cancer 2010 ;; 97: 577-­-­87
RESULTATS (3)
La chimiothérapie
Marie D. et al : Bull Cancer 2010 ;; 97: 577-­-­87
Commentaires • contenu anxiogène des représentations du cancer, comme dans la population française : image du « fléau social ». • les malades sont en mesure d’évoquer ce statut.
• place importante de la « guérison » chez les patients.
• les médecins saisissent bien la représentation que les patients ont du cancer et de la CT : résultats d’expériences individuelles multiples ?
• les patients sont moins clairvoyants ? action de « subjonctivation » : expriment un vœu, une exhortation (guérison, recherche). Accès à l’affectivité et l’émotionnel, contrebalance la vision anxiogène produite sur la maladie.
• les représentations de la CT sont différentes dans l’analyse catégorielle : efficience et résultats pour les malades et modifications biopsychosociales
pour les médecins.
Marie D. et al : Bull Cancer 2010 ;; 97: 577-­-­87
Expérience personnelle
METHODES
• Interview médecins : produire une série de 5 mots de façon spontanée à partir du mot inducteur CANCER.
• Valeurs : • 1 pour les 2 premiers mots
• 0,5 pour les 3e et 4e mots
• 0,25 pour le 5e mot
• Pour une même valeur numérique le mot sera classé plus « haut » si plus fréquemment cité.
• Population séparée en médecins soignant le cancer (oncologue) et/ou ayant fait l’expérience du cancer chez un de ses proches (non personnellement et non professionnellement).
Expérience personnelle
RESULTATS
Médecins
Oncologue (oui/non) / Expérience (oui/non) Expérience personnelle
RESULTATS
• 2 ou 3 premiers mots cités spontanément, puis temps de latence avant les 2 ou 3 autres : •
•
Éléments du système central, du noyau.
Suite à ce consensus, élaboration de représentations différentes en fonction de son appartenance groupale
• Cohérent avec le concept d’Abric : noyau central et éléments périphériques, ces derniers étant basés sur les expériences singulières et informelles de la maladie (vécu personnel de la maladie et les aspects émotionnels qui l’accompagnent).
• Cohérent avec les travaux de C Jeoffrion (2009) sur les représentations sociales de la maladie chez les professionnels de santé et les non professionnels de santé.
Réflexions
• Pour le médecin : représentation d’une maladie, pour le patient : représentation de sa maladie.
• Mais il existe un réseau de représentations communes : noyau de la représentation sociale.
• Autour de ce consensus commun, nous trouvons des éléments périphériques (expériences professionnelles et individuelles) propres à chaque protagoniste de la relation thérapeutique.
• Notion de «déséquilibre» liée aux expériences professionnelles et aux représentations collectives du médecin (et au savoir « expert »). Ces représentations du médecin (homme-­sain) fixent les objectifs de ce dernier : le prendre soin. A la différence du patient (homme-­malade) dont l’objectif est la guérison.
Réflexions
• Tout au long de cette relation thérapeutique, les éléments périphériques des représentations entrent en inter relation du côté soignant et soigné. Il nous paraît important que le médecin ait pris conscience de l’existence des représentations qui lui sont propres mais également de la représentation sociale qu’il partage avec son patient. Ainsi, la relation thérapeutique pourra avoir lieu, empreinte d’altérité. • Les éléments périphériques s’alimentant et étant inter reliés, médecins, malades et les proches peuvent ainsi cheminer ensemble et apprendre les uns des autres. Réflexions
Modélisation des interactions soignant-­patient-­proche. J.-­L. Pujol : Encore un mot sur l’annonce…Une approche métapsychologique Rev Mal Respi 2014 ;; vol 31 , n° 4 : 347-­356
CONCLUSIONS
Les représentations : une source d’informations, un outil d’orientation
• Les représentations s’invitent dans chacun des objectifs principaux de la communication en oncologie :
• créer une relation interpersonnelle
• échanger des informations
• prendre des décisions thérapeutiques
• Elles ne sont pas l’apanage des seuls malades mais touchent aussi les proches et les professionnels en cancérologie.
• Les représentations sont en mesure de guider la perception et le sens donné à la relation, de définir la nature et le sens des informations échangées, d’agir sur les décisions prises et leur réalisation.
• Ces significations ne sont pas systématiquement ou potentiellement verbalisées, mais sont à même de constituer le cadre de l’interaction thérapeutique.
Marie D. et al : Bull Cancer 2010 ;; 97: 577—87
Charles C et al : Bull Cancer 2013 ;; 100: 999-­1005
Marx E et al : Croyances, idées reçues et représentations de la maladie cancéreuse : Psycho-­Oncol 2009 ;; 3 : 129-­130
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