Psychopathie et troubles de la personnalité

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UNIVERSITÉ FRANÇOIS - RABELAIS
DE TOURS
ÉCOLE DOCTORALE Sciences, Santé et Technologies
EA 2114 Psychologie des âges de la vie
Axe C Vulnérabilité, processus psychopathologiques et de santé
THÈSE
présentée par :
Angélique NIOCHE
soutenue le : 30 juin 2009
pour obtenir le grade de : Docteur de l’université François Rabelais
Discipline/ Spécialité : Psychologie
Psychopathie et troubles de la personnalité associés :
recherche d’un effet particulier au trouble Borderline
– Impact sur le risque de récidive
THÈSE dirigée par :
M. REVEILLERE Christian
Professeur, Université François Rabelais, Tours
RAPPORTEURS :
Mme FERNANDEZ Lydia
M. PHAM Thierry
Professeur, Université de Picardie Jules Verne, Amiens
Professeur, Université de Mons-Hainaut (Belgique)
JURY :
Mme de BEAUREPAIRE Christiane
Mme FERNANDEZ Lydia
M. FONTAINE Roger
M. PHAM Thierry
M. REVEILLERE Christian
Psychiatre des hôpitaux, EPS Paul Guiraud, Villejuif
Professeur, Université de Picardie Jules Verne, Amiens
Professeur, Université François Rabelais, Tours
Professeur, Université de Mons-Hainaut (Belgique)
Professeur, Université François Rabelais, Tours
« Lorsque les forces cruelles ou destructrices menacent de dominer les forces d’amour,
l’individu est obligé de trouver une manière de se défendre : se retourner comme un gant,
mettre en scène son monde interne à l’extérieur, jouer lui-même le rôle destructeur et obtenir
qu’une autorité extérieure accepte de le contrôler ».
Winnicott (1939)
Remerciements
Je tiens en tout premier lieu à remercier sincèrement le Professeur Christian
Réveillère, mon directeur de thèse, pour m’avoir proposé ce sujet passionnant ainsi que
différentes formations (Thérapie Cognitivo Dialectique, PCL-R et HCR-20) nécessaires à ce
travail et très enrichissantes. Je vous remercie pour votre aide précieuse à tout point de vue,
vos conseils, votre disponibilité et vos encouragements durant ces années de thèse (plus une
année de DEA). Je vous remercie également beaucoup pour votre grande patience à mon
égard, patience qui, je pense, a été mise à rude épreuve quelques fois. Aussi, vous m’avez
permis de rencontrer et de collaborer avec certains autres professionnels que je souhaite
également vivement remercier.
Ainsi, je remercie également beaucoup le Professeur Thierry Pham pour son
importante collaboration et toute son aide notamment statistique et méthodologique mais
aussi théorique. Je vous remercie de m’avoir accueillie lors de mon DEA dans votre Centre de
Recherche en Défense Sociale, de m’avoir formée à la PCL-R et à la HCR-20, pour mon stage
d’observation d’une semaine en DEA et pour nos différentes rencontres au CRDS. Je
remercie aussi beaucoup Claire Ducro et Xavier Saloppé, psychologues au CRDS. Merci à
vous aussi pour votre grande disponibilité, pour avoir aussi contribué à ma formation et pour
tous vos conseils avisés.
Mes remerciements vont aussi au Docteur Christiane de Beaurepaire, psychiatre des
hôpitaux, qui a exercé de nombreuses années en milieu carcéral en introduisant une profonde
humanité dans un milieu trop souvent déshumanisant. Je souhaiterais lui exprimer toute ma
gratitude. Je vous remercie beaucoup pour nous avoir permis d’accéder à la Maison d’Arrêt de
Fresnes, pour avoir permis une grande partie du recueil de données et avoir « batailler » pour
que je puisse rencontrer le plus grand nombre de volontaires possible. Grâce à votre aide si
précieuse, cette recherche a été enrichie.
Je remercie également le Docteur Zinetti et Corinne, secrétaire au Grand Quartier, qui
m’ont accueillie une ou deux journées par semaine pendant plusieurs mois ainsi que
Laurence, assistante sociale pour les pauses déjeuner au mess et le Docteur Jung. Je remercie
aussi toutes les personnes détenues qui ont accepté de participer à cette recherche.
Je remercie Eric Guillon, psychologue à la Maison d’Arrêt de Blois, qui m’a aussi
ouvert ses portes au tout début de ma thèse et Isabelle Chevrier pour avoir partager certaines
de ses données.
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J’adresse également mes remerciements au Professeur Lydia Fernandez ainsi qu’au
Professeur Roger Fontaine pour avoir accepté de faire partie de mon jury de thèse.
Je souhaite remercier le laboratoire de psychologie (EA 2114 Psychologie des âges de
la vie) qui a financé mes formations ainsi que mes trajets (au CRDS de Tournai et à Fresnes)
pour les formations et le recueil des données.
Un grand merci à mes parents et ma sœur qui m’ont toujours soutenue dans toutes ces
années d’études. Je remercie aussi beaucoup mon mari, Sylvestre, pour son soutien, son
écoute, ses paroles rassurantes à vertu « déstressante ».
Merci à tous ceux et celles, famille, amis et anciennes collègues, qui m’ont soutenue
de quelque manière que ce soit tout au long de ce travail.
Enfin, j’ai une pensée toute particulière pour mon grand-père et ma grand-mère tant
aimés qui auraient été ravis et très fiers, je pense, de me voir « enfin » arriver au bout de son
long travail.
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Résumé
Introduction. Les travaux internationaux récents, cliniques et empiriques sur la psychopathie
se fondent sur les observations initiales de Cleckley (1941) qui définit la psychopathie comme
« un trouble sévère de la personnalité marqué par une constellation de caractéristiques
interpersonnelles, affectives et comportementales ». Le narcissisme pathologique et le
détachement émotionnel associés à des comportements antisociaux chroniques sont perçus
comme des caractéristiques dominantes de la psychopathie (Hare, 1991 ; Meloy, 2000 ; Pham,
1998 ; Pham & Côté, 2000). Hare a opérationnalisé ce concept et construit une échelle de
Psychopathie (Psychopathy Check List-Revised, PCL-R, 1991, 2003) qui a été validée en
langue française (Côté & Hodgins, 1996). Elle est composée de vingt items répartis en
majorité en deux facteurs : le Facteur 1 (narcissisme et détachement émotionnel) et le Facteur
2 (comportements antisociaux et impulsifs) proche du trouble de la personnalité Antisociale.
Des études catégorielles portant sur la comorbidité suggèrent de fortes comorbidités entre la
psychopathie et les troubles de l’Axe II (DSM-IV) notamment du cluster B (Hare, 1991 ;
Hildebrand & de Ruiter, 2004 ; Pham, 2000 ; Widiger, 2006). La comorbidité est forte
notamment avec la personnalité Antisociale (DSM-IV) pour le Facteur 2 mais aussi avec les
troubles Histrionique, Narcissique et Borderline. La prise en charge de la population
délinquante est difficile mais certaines caractéristiques borderline (sensibilité anxiodépressive, capacité d’attachement relatives au Facteur 1) seraient d’un meilleur pronostic.
Outre l’intérêt pour la prise en charge clinique, ces précisions sont importantes pour la
dangerosité et le risque de récidive (Salekin, Rogers & Sewell, 1996 ; Claix & Pham, 2004).
Objectifs. Cette étude évalue les relations entre la psychopathie (approche dimensionnelle) et
les troubles de l’Axe II (approche catégorielle) avec un intérêt particulier sur le trouble
Borderline (absence de lien voire lien inverse pour le Facteur 1). Les relations entre ces
troubles (psychopathie et Axe II) et le risque de récidive ont aussi été évaluées l’hypothèse
étant que ces troubles augmentent le risque de récidive. L’objectif est également de souligner
la complémentarité des approches dimensionnelle et catégorielle ainsi que l’utilité des outils
standardisés dans la pratique.
Méthode. La première hypothèse recherche l’existence de liens entre la psychopathie et la
présence de troubles de l’Axe II (principalement cluster B : Histrionique, Narcissique,
Borderline, Antisocial) et parmi ceux-ci un lien particulier avec la personnalité Borderline qui
pourrait atténuer le niveau de psychopathie (Murphy & Vess, 2003). La deuxième hypothèse
est que la psychopathie et les troubles de l’Axe II (cluster B) augmentent le risque de récidive.
5
La population est composée de quatre-vingt détenus de sexe masculin (age : M=31,48 ; SD =
11,06). Chaque participant a été évalué à partir de la PCL-R (Hare, 1991, 2003), du SCID-II
(Bouvard, Fontaine-Buffe, Cungi, Adeleine, Chapoutier, Durafour, Bouchard, & Cottraux,
1999) et de la HCR-20 (Webster, Douglas, Eaves, & Hart, 1997). Le M.I.N.I. (Lecrubier,
Weiller, Hergueta, Amorin, Bonora, & Lépine, 1998) et la WAIS-III (Gregoire, 2001) ont été
utilisés pour les critères d’exclusion (troubles psychotiques avérés au moment de la passation
et retard mental QI < 70). Des corrélations et des régressions linéaires (procédure Stepwise)
ont été utilisées pour analyser les données.
Résultats. Les résultats montrent une corrélation positive entre les troubles Narcissique,
Antisocial et les scores de psychopathie (de .36 à .63) et également avec la personnalité
Paranoïaque ce qui était moins attendu (de .32 à .47). Le trouble Borderline est associé au
score total de psychopathie (.24) et au Facteur 2 (.30). Contrairement à nos attentes, ce trouble
n’atténue pas le Facteur 1 mais révèle le fort poids de l’impulsivité. L’association des troubles
Antisocial et Paranoïaque a un impact sur le score total à la PCL-R (R²=38%) et le Facteur 2
(R²=45%). L’association des troubles Antisocial et Narcissique a un impact sur le Facteur 1
(R²=22%). Enfin, la psychopathie et les troubles de l’Axe II sont associés au nombre de délits
violents mais pas aux types de délits (violents vs. non violents). Concernant le risque de
récidive, le même type de résultats est apparu. Les scores à la PCL-R sont corrélés
positivement avec les scores à la HCR-20 (de .49 à .83) et ont un effet (de R²=24% à 68%).
Les troubles Paranoïaque, Narcissique et Antisocial sont corrélés aux scores à la HCR-20
(respectivement de .29 à .48, de .32 à .42, et de .42 à .63). Le trouble Borderline est associé au
score total à la HCR-20 (.33) et au facteur H (.41). Enfin, l’association des troubles Antisocial
et Paranoïaque prédit un fort score à la HCR-20 (R²=41%) ainsi que l’association des troubles
Antisocial, Paranoïaque et Borderline pour le score au facteur H (R² = 50%).
Conclusion. Nos résultats soulignent les liens entre les troubles Paranoïaque, Narcissique,
Borderline, Antisocial et la psychopathie et donc l’importance de l’impulsivité, caractéristique
transversale aux troubles du cluster B et à la psychopathie (Looper & Paris, 2000 ; Skeem
Poythress, Edens, Lilienfield & Cale, 2003). Ce point est également important dans le risque
de récidive, ces mêmes troubles en augmentent le niveau (Pham, Chevrier, Nioche, Ducro &
Réveillère, 2005). Ces études ont des conséquences importantes au niveau clinique
(évaluation du risque de violence, indications thérapeutiques et prise en charge). Celles-ci
montrent également l’importance d’utiliser ces outils standardisés dans la pratique.
Mots clé : Psychopathie (PCL-R), Troubles de la personnalité (Axe II, DSM-IV), Borderline,
Risque de récidive (HCR-20).
6
Résumé en anglais
Introduction. Recent international clinical and empirical works on psychopathy are based on
Cleckley’s clinical observations (1941). His definition of psychopathy is “a severe
personality
disorder
marked
by
various
affective,
interpersonal
and
behavioral
characteristics”. Pathological narcissism and emotional detachment associated with chronic
antisocial behaviors are dominant characteristics of psychopathy (Hare, 1991 ; Meloy, 2000 ;
Pham, 1998 ; Pham & Côté, 2000). Hare (1991, 2003) operationalized Cleckley’s concept of
psychopathy by developing the Psychopathy Checklist-Revised (PCL-R). This scale was
validated in french (Côté & Hodgins, 1996). The PCL-R is composed of twenty items divided
mainly into two factors: Factor 1 (narcissism and emotional detachment) and Factor 2
(antisocial and chronic behaviors) which is close to the antisocial personality disorder (DSMIV criteria). Categorical studies related to comorbidity suggest strong comorbidities with
psychopathy and other axis II personality disorders (DSM-IV) particularly with cluster B
(Hare, 1991 ; Hildebrand & de Ruiter, 2004 ; Widiger, 2006). Comorbidity is strong with
Antisocial personality disorder (DSM-IV) for Factor 2 but also with Histrionic, Narcissistic
and Borderline disorders. The treatment of the offenders is difficult but some borderline
characteristics (anxio-depressive sensitivity, attachment abilities relative to Factor 1) would
be a better forecast hence the interest in this area of research. Moreover, it is important to take
into account for the dangerousness and risk for recidivism (Salekin, Rogers & Sewell, 1996 ;
Claix & Pham, 2004).
Objectives. This study assesses the relations between psychopathy (dimensional approach)
and axis II personality disorders (categorical approach) and particularly Borderline
personality disorders (the absence of association or opposite association to Factor 1).
Relations between these personality disorders (psychopathy and axis II) and the risk for
recidivism were assessed as these disorders increase risk for violence. The aim is also to
underline the complementary nature of categorical and dimensional approaches, and the
utility of the standardized clinical examination.
Design of the study. First, we hypothesised positive associations between psychopathy and
others personality disorders mainly with the cluster B axis II (Narcissistic, Antisocial,
Histrionic, Borderline). Among those disorders, a particular link exists with the borderline
personality disorder, considering that their association may reduce the pathological level of
psychopathy (Murphy & Vess, 2003). Secondly, we hypothesised positive associations
between psychopathy, axis II disorders (cluster B) and risk for recidivism. The sample
7
includes 80 male inmates from French prisons (age : M=31,48 ; SD = 11,06). Each participant
was evaluated with the PCL-R (Hare, 1991, 2003), the SCID-II (Bouvard, Fontaine-Buffe,
Cungi, Adeleine, Chapoutier, Durafour, Bouchard, & Cottraux, 1999) and the HCR-20
(Webster et al., 1997). The M.I.N.I. (Lecrubier, Weiller, Hergueta, Amorin, Bonora, &
Lépine, 1998) and the WAIS-III (Gregoire, 2001) were used to assess the exclusion criteria
(psychotic disorders established at the moment of the testing and backwardness IQ < 70).
Correlations and multiple linear regressions analysis (with the Stepwise procedure) were used
to analyze the data.
Results. The results show positive correlations between Narcissistic, Antisocial personalities
and scores of psychopathy (from .36 to .63), and equally with Paranoid personality which was
less expected (from .32 to .47). Borderline personality was associated with both the total score
of psychopathy (.24) and the score of Factor 2 (.30). Contrary to what was expected, this
disorder doesn’t reduce Factor 1 but reveal the importance of impulsivity. The association of
Antisocial and Paranoid personalities has an effect on the total score (R²=38%) and Factor 2
(R²=45%). The association of Antisocial and Narcissistic personalities has an effect on Factor
1 (R²=22%). Finally, psychopathy and axis II disorders were associated with the number of
violent offences but not with the type of offence (violent vs. non violent). Similar associations
appeared with regards to the risk for recidivism. The scores of the PCL-R were associated
with the scores of the HCR-20 (from .49 to .83) and predicted its factors (from R²=24% to
68%). Paranoid, Narcissistic and Antisocial disorders were associated with the scores of
HCR-20 (respectively from .29 to .48, from .32 to .42, and from .42 to .63). Borderline
disorder was associated with the total score of the HCR-20 (.33) and with the factor H (.41).
Antisocial and Paranoid comorbidity predicted high scores of the HCR-20 (R²=41%) as well
as Antisocial, Paranoid and Borderline comorbidity for the score of the factor H (R²=50%).
Conclusion. These results underline the associations between Paranoid, Narcissistic,
Borderline, Antisocial disorders and psychopathy, and so the importance of impulsivity witch
is characteristic of cluster B disorders and psychopathy (Looper & Paris, 2000 ; Skeem
Poythress, Edens,
Lilienfield & Cale, 2003). As these disorders increase the risk for
recidivism (Pham, Chevrier, Nioche, Ducro & Réveillère, 2005), this point is important to
take into account. These studies may have important consequences at a clinical level (risk for
violence, therapeutic indications, treatment). They also underline the importance of using
standardized examination in practice.
Key words : Psychopathy (PCL-R), Personality disorders (axis II DSM-IV), Borderline, Risk
for recidivism (HCR-20).
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Table des matières
Remerciements ........................................................................................................................... 3
Résumé ....................................................................................................................................... 5
Résumé en anglais ...................................................................................................................... 7
Table des matières ...................................................................................................................... 9
Liste des tableaux ..................................................................................................................... 14
Liste des figures ....................................................................................................................... 16
Liste des annexes...................................................................................................................... 17
Introduction .............................................................................................................................. 18
Première partie I- Théorie ........................................................................................................ 22
I-A- La psychopathie................................................................................................................ 23
I-A-1) L’approche psychodynamique .................................................................................. 24
I-A-1-a) Théorie ............................................................................................................... 24
I-A-1-b) Les mécanismes de défense .............................................................................. 27
I-A-1-c) Les réactions contre-transférentielles ................................................................ 28
I-A-2) Approche clinique et empirique................................................................................ 30
I-A-2-a) L’échelle de Psychopathie-Révisée ou PCL-R (Hare, 1991, 2003)................... 31
I-A-2-b) Les comportements antisociaux et socialement déviants dans la psychopathie 33
I-A-2-c) PCL-R, formes d’agressions et types de délits ................................................. 36
I-A-3) Psychopathie et troubles mentaux majeurs ............................................................... 37
I-B- Une ou des psychopathie(s) ? ........................................................................................... 42
I-B-1) Catégorie versus continuum ? ................................................................................... 42
I-B-1-a) La psychopathie et les troubles Antisocial et Narcissique ................................. 43
I-B-1-b) La psychopathie et le trouble Borderline. .......................................................... 45
I-B-2) Variantes de la psychopathie..................................................................................... 47
I-B-2-a) Sous-types de psychopathie ............................................................................... 47
I-B-2-b) Variantes primaires et secondaires.................................................................... 48
I-B-2-c) Différence conceptuelle entre les auteurs européens et américains .................. 51
I-B-2-d) D’un point de vue culturel ................................................................................ 52
I-B-3) Les variables modératrices du niveau de psychopathie et les facteurs de risque. ..... 53
I-B-3-a) Le niveau intellectuel ........................................................................................ 53
I-B-3-b) L’anxiété et l’attachement................................................................................. 54
I-B-3-c) L’âge ................................................................................................................. 55
9
I-B-3-d) Les facteurs de risque concernant la délinquance.............................................. 56
I-C- Le trouble Borderline........................................................................................................ 57
I-C-1) L’Approche psychanalytique .................................................................................... 57
I-C-1-a) Théorie ............................................................................................................... 57
I-C-1-b) Les mécanismes de défenses du fonctionnement Borderline ........................... 60
I-C-2) L’approche descriptive clinique et empirique........................................................... 61
I-C-2-a) Tableau clinique ................................................................................................. 61
I-C-2-b) Les états-limites à expression psychopathique .................................................. 63
I-D- Dangerosité, risque de récidive et troubles de la personnalité (Psychopathie et Axe II) . 65
I-D-1) Définition de la dangerosité ainsi que du risque de récidive et évaluation............... 65
I-D-1-a) Définition de la dangerosité ............................................................................... 65
I-D-1-b) L’évaluation de la dangerosité et du risque de récidive .................................... 67
I-D-2) Le Risque de récidive (notamment à partir de la HCR-20) et les troubles de la
personnalité .......................................................................................................................... 69
I-D-2-a) Sujets psychopathes versus non psychopathes (à partir de la PCL-R) .............. 70
I-D-2-b) PCL-R et HCR-20 : récidive violente et non violente....................................... 70
I-D-2-c) Troubles de l’Axe II, actes de violence et risque de récidive (HCR-20) ........... 72
I-E- Objectifs............................................................................................................................ 74
I-E-1) Objectifs généraux..................................................................................................... 74
I-E-2) Objectifs appliqués dans un contexte politico-judiciaire particulier actuellement en
France ................................................................................................................................... 75
Deuxième partie II- Méthodologie........................................................................................... 76
II-A- Méthode .......................................................................................................................... 77
II-A-1) Hypothèses et analyses statistiques ......................................................................... 77
II-A-1-a) H1 : Comorbidité entre troubles psychopathologiques .................................... 77
II-A-1-b) H2 : La PCL-R (Psychopathie) et les troubles de l’Axe II en lien avec la HCR20 (Risque de récidive). ................................................................................................... 78
II-A-2) Population et critères d’exclusion............................................................................ 79
II-A-3) Procédure ................................................................................................................. 80
II-B- Variables et instruments .................................................................................................. 82
II-B-1) La PCL-R (Hare, 1991, 2003) : évaluation de la psychopathie ............................... 82
II-B-2) Le SCID-II Structured Clinical Interview for Disorders II, version 2.0 (Bouvard et
al., 1999) : évaluation des troubles de l’Axe II. ................................................................... 84
10
II-B-3) La HCR-20 Historical-Clinical-Risk Management (Webster, Douglas, Eaves &
Hart, 1997) : évaluation du risque de récidive ..................................................................... 85
II-B-4) Les instruments utilisés concernant les critères d’exclusion ................................... 86
II-B-4-a) Le Quotient Intellectuel évalué par la WAIS version courte selon la méthode
Silverstein (Grégoire, 2001). ............................................................................................ 86
II-B-4-b) Les troubles mentaux majeurs de l’Axe I évalués par le M.I.N.I. (Lecrubier et
al., 1998)........................................................................................................................... 87
II-B-5) Les types de délits violents et non violents.............................................................. 87
II-B-5-a) Les délits violents ............................................................................................. 87
II-B-5-b) Les délits non violents ...................................................................................... 88
II-B-6) Le choix des instruments ......................................................................................... 88
Troisième partie III- Analyse des résultats .............................................................................. 90
III-A- Description de la population carcérale totale (N=80).................................................... 91
III-A-1) Analyses descriptives concernant l’Age, le QI, les scores à la PCL-R et aux
Facteurs 1 et 2 et les scores à la HCR-20 et aux Facteurs H, C et R (N=80)....................... 91
III-A-2) Fréquence des troubles de la personnalité de l’Axe II et des troubles mentaux
majeurs de l’Axe I (N=80). .................................................................................................. 92
III-A-3) Fréquence des types de délits (N=80) .................................................................... 93
III-B- H1 : Liens et impacts entre troubles de l’Axe II et Psychopathie (PCL-R)................... 95
III-B-1) H1a : Comorbidité générale Psychopathie et troubles de l’Axe II ......................... 95
III-B-1-a) Corrélations entre troubles de l’Axe II et la PCL-R (score total, Facteur 1,
Facteur 2).......................................................................................................................... 95
III-B-1-b) Régressions linéaires simples et multiples entre les troubles de l’Axe II et la
PCL-R (score total, Facteurs 1 et 2)................................................................................. 96
III-B-2) H1b : Plus spécifiquement, le trouble Borderline................................................... 98
III-B-3) Synthèse des résultats ............................................................................................. 99
III-B-4) Liens entre les troubles de la personnalité (PCL-R et Axe II) et les délits violents et
non violents. ....................................................................................................................... 100
III-B-4-a) Troubles de la personnalité (PCL-R et Axe II) et types de délits violents .... 100
III-B-4-b) Troubles de la personnalité (PCL-R et Axe II) et délits non violents ........... 103
III-C- H2 : Liens et impacts entre troubles de la personnalité (Psychopathie et Axe II) et
évaluation du Risque de récidive (HCR-20) .......................................................................... 106
III-C-1) Psychopathie (PCL-R) et évaluation du Risque de récidive (HCR-20) ............... 106
III-C-1-a) Corrélations entre la PCL-R et la HCR-20.................................................... 106
11
III-C-1-b) Régressions linéaires ..................................................................................... 107
III-C-1-c) Synthèse des résultats .................................................................................... 109
III-C-2) Troubles de l’Axe II et évaluation du Risque de récidive (HCR-20)................... 110
III-C-2-a) Relations entre les troubles de l’Axe II et la HCR-20................................... 110
III-C-2-b) Effet particulier au trouble Borderline sur la HCR-20. ................................. 113
III-C-2-c) Synthèse des résultats .................................................................................... 114
Quatrième partie IV- Discussion............................................................................................ 115
IV-A) Hypothèse 1 : Impact des troubles de l’Axe II sur le niveau de psychopathie (PCL-R)
................................................................................................................................................ 117
IV-A-1) Comorbidité générale entre la Psychopathie (PCL-R) et les troubles de l’Axe II
notamment du cluster B (H1a) ........................................................................................... 117
IV-A-1-a) Relations entre les troubles Antisocial, Narcissique et Paranoïaque avec la
psychopathie (PCL-R).................................................................................................... 118
IV-A-1-b) Impact de la comorbidité des troubles Antisocial, Narcissique et Paranoïaque
sur la PCL-R................................................................................................................... 121
IV-A-2) Comorbidité particulière : le trouble de la personnalité Borderline, un effet
particulier sur la PCL-R ?................................................................................................... 123
IV-A-3) Le poids de l’impulsivité, une donnée importante de nos résultats ..................... 126
IV-A-4) Synthèse : Nos résultats vont dans le sens d’une hétérogénéité de la psychopathie
............................................................................................................................................ 128
IV-A-5) Affinement en fonction des liens entre troubles de la personnalité (PCL-R et Axe
II) et types de délits violents et non violents...................................................................... 132
IV-A-5-a) Selon les délits violents................................................................................. 132
IV-A-5-b) Selon les délits non violents.......................................................................... 134
IV-B) Hypothèse 2 : Impact du niveau de psychopathie (score PCL-R, F1, F2) et des troubles
de l’Axe II sur les scores à la HCR-20................................................................................... 136
IV-B-1) Psychopathie (PCL-R : score total, F1 et F2 ) et Risque de récidive (HCR-20 :
score total, Facteurs H, C et R) .......................................................................................... 136
IV-B-1-a) Impact du score total à la PCL-R sur la HCR-20.......................................... 137
IV-B-1-b) Impact des Facteurs 1 et 2 de la PCL-R sur la HCR-20 ............................... 139
IV-B-1-c) Synthèse ........................................................................................................ 140
IV-B-2) Troubles de l’Axe II et Risque de récidive (HCR-20 : score total, facteurs H, C, R).
............................................................................................................................................ 142
12
IV-B-2-a) Les troubles Antisocial, Paranoïaque et Narcissique et le Risque de récidive
(HCR-20)........................................................................................................................ 142
IV-B-2-b) Impact particulier du trouble Borderline sur la HCR-20 .............................. 145
IV-B-3) Synthèse concernant l’impact des scores à la PCL-R et des troubles de l’Axe II sur
la HCR-20 .......................................................................................................................... 146
IV-C) Les objectifs appliqués dans le contexte politico-judiciaire actuel ............................. 149
IV-C-1) Intérêt de la complémentarité : approche dimensionnelle et approche catégorielle
............................................................................................................................................ 150
IV-C-2) Intérêt de l’utilisation de ces outils d’évaluation standardisés pour la pratique
clinique en France .............................................................................................................. 151
IV-C-2-a) Examen psychologique ................................................................................. 152
IV-C-2-b) Aide à la définition de la prise en charge et à l’évaluation de son efficacité 153
Conclusion.............................................................................................................................. 158
Résumé ................................................................................................................................... 198
Résumé en anglais .................................................................................................................. 198
13
Liste des tableaux
Tableau 1- Typologie des personnalités anormales ou « psychopathiques » selon Schneider
(1923, 1958). .................................................................................................................... 30
Tableau 2- Critères de la psychopathie selon la PCL-R de Hare (1991) : items répartis en
Facteurs 1 et 2. ................................................................................................................. 32
Tableau 3- Modules du M.I.N.I. (Lecrubier et al., 1998), outil permettant d’évaluer les
troubles de l’Axe I............................................................................................................ 38
Tableau 4- Présentation des facteurs de la HCR-20 et des items qui les composent. .............. 68
Tableau 5- Description de la population totale (N=80) en fonction des moyennes d’âge, de QI
et des scores à la PCL-R (total, F1, F2) ainsi qu’à la HCR-20 (total, facteurs H, C, R).. 92
Tableau 6- Fréquence des troubles de l’Axe II en terme de pourcentage. ............................... 92
Tableau 7- Fréquence des troubles de l’Axe I en terme de pourcentage. ................................ 93
Tableau 8- Fréquence des types de délits en terme de pourcentage (N=80)............................ 94
Tableau 9- Corrélations entre les scores à la PCL-R (total, Facteur 1, Facteur 2) et les troubles
de l’Axe II. ....................................................................................................................... 96
Tableau 10- Régressions linéaires simples entre chaque trouble de l’Axe II et les scores à la
PCL-R et aux Facteurs 1 et 2. .......................................................................................... 97
Tableau 11- Régressions linéaires multiples concernant chaque trouble de l’Axe II et les
scores à la PCL-R et les Facteurs 1 et 2. .......................................................................... 98
Tableau 12- Corrélations entre le trouble Borderline et les scores à la PCL-R. ...................... 98
Tableau 13- Régressions linéaires simples entre le trouble Borderline et les scores à la PCL-R.
.......................................................................................................................................... 99
Tableau 14- Corrélations entre la PCL-R (score total, F1 et F2) et les délits violents puis le
nombre de délits violents commis par un sujet. ............................................................. 100
Tableau 15- Corrélations entre les types de délits violents et la PCL-R (score total, F1 et F2).
........................................................................................................................................ 101
Tableau 16- Corrélations entre les troubles de l’Axe II et les délits violents ainsi que le
nombre de délits violents................................................................................................ 101
Tableau 17 - Corrélations entre les types de délits violents et les troubles de l’Axe II. ........ 102
Tableau 18- Corrélations entre les scores à la PCL-R et les délits non violents puis le nombre
de délit non violents commis par un sujet. ..................................................................... 103
Tableau 19- Corrélations entre les types de délits non violents et la PCL-R (score total, F1 et
F2). ................................................................................................................................. 103
14
Tableau 20- Corrélations entre les troubles de l’Axe II et les délits non violents puis le
nombre de délits non violents commis par un sujet. ...................................................... 104
Tableau 21- Corrélations entre les types de délits non violents et les troubles de l’Axe II. .. 104
Tableau 22- Corrélations entre les scores à la PCL-R et à la HCR-20 (N=80)...................... 107
Tableau 23- Régressions linéaires simples concernant les scores à la PCL-R et à la HCR-20
(N=80) ............................................................................................................................ 107
Tableau 24- Régressions linéaires multiples concernant les scores à la PCL-R et à la HCR-20
(N=80) ............................................................................................................................ 109
Tableau 25- Corrélations entre les scores à la HCR-20 et les troubles de l’Axe II (N=80)... 110
Tableau 26- Régressions linéaires simples entre les troubles de l’Axe II et les scores à la
HCR-20. ......................................................................................................................... 111
Tableau 27- Régressions linéaires multiples entre les troubles de l’Axe II et les scores à la
HCR-20 (N=80).............................................................................................................. 112
Tableau 28- Corrélations entre le trouble Borderline et les scores à la HCR-20. .................. 113
Tableau 29- Régressions linéaires simples entre le trouble Borderline et les scores à la HCR20.................................................................................................................................... 113
Tableau 30- Rappel des régressions multiples entre les troubles de l’Axe II et les scores à la
HCR-20 faisant apparaître le trouble Borderline. .......................................................... 113
Tableau 31- Récapitulatif de l’impact du score total à la PCL-R sur les scores à la HCR-20.
........................................................................................................................................ 137
Tableau 32- Récapitulatif de l’impact des scores aux Facteurs 1 et 2 de la PCL-R sur les
scores à la HCR-20......................................................................................................... 139
15
Liste des figures
Graphique 1- Récapitulatif de l’impact de troubles de l’Axe II sur la PCL-R (scores total, F1,
F2). ................................................................................................................................. 129
Graphique 2- Récapitulatif de l’impact de la PCL-R (score total, F1 et F2) sur la HCR-20
(score total, Facteurs H, C et R). .................................................................................... 141
Graphique 3- Récapitulatif de l’impact des troubles de l’Axe II qui se sont avérés avoir un
impact sur les scores à la HCR-20. ................................................................................ 142
Graphique 4 - Récapitulatif de l’impact des troubles de la personnalité de l’Axe II (avec celui
du score total à la PCL-R pour comparaison) sur la HCR-20........................................ 147
16
Liste des annexes
Annexe 1 Description des troubles de l’Axe II ...................................................................... 189
Annexe 2 Corrélations entre les scores à la PCL-R et les troubles de l’Axe II ..................... 191
Annexe 3 Corrélations entre les scores à la PCL-R et les troubles de l’Axe II et les délits
violents et non violents................................................................................................... 192
Annexe 4 Corrélations ente les Troubles de la personnalité (PCL-R et Axe II) et HCR-20 . 196
17
Introduction
18
Comme l’actualité en témoigne, un grand intérêt est porté par les pouvoirs publics à la
sécurité et en ce qui concerne les délinquants d’autant plus lorsque ceux-ci sont considérés
comme dangereux. La prévention de la délinquance en générale (délinquance des mineurs,
délinquance sexuelle, délinquants ou criminels récidivistes) est une préoccupation essentielle.
Des réflexions sont engagées et des textes de loi sont proposés et/ou adoptés, qu’il s’agisse de
mesures plus répressives ou d’autres concernant davantage la prise en charge des ces
personnes.
La Haute Autorité de la Santé a mis en place une audition publique sur la psychopathie
les 15 et 16 décembre 2005, permettant d’exposer des rapports d’experts. Ils soulignent la
nécessité de rendre mieux compte de ces troubles de la personnalité en affinant le diagnostic
afin de pouvoir mettre en place une prise en charge thérapeutique. Selon Senon (2005), « la
psychopathie est l’un des diagnostics les plus posés par les équipes psychiatriques
intervenant dans des situations de crise à composante sociale, par exemple aux urgences
générales, mais aussi dans les milieux sociaux défavorisés ou dans les établissements
pénitentiaires (p. 9) ».
Début mai 2006, de Beaurepaire, médecin chef du SMPR de Fresnes (l’un des plus
gros de France), alerte sur les conditions de travail en prison dans les unités de consultations
médico-psychologiques ainsi que les effets sur le personnel et les détenus, notamment en
terme de sécurité. En 2009, dans son ouvrage intitulé Non-Lieu, Un psychiatre en prison, elle
dénonce également avec beaucoup de force les « paradoxes » du système carcéral, le manque
de moyens, l’exclusion et surtout la nécessité de pouvoir soigner, prévenir et d’accompagner
les personnes en détention mais aussi après leur libération.
Un rapport d’information (Sénat, 22 juin 2006) présente des pistes de réflexion ayant
pour thème : « Délinquants dangereux atteints de troubles psychiatriques : comment concilier
la protection de la société et une meilleure prise en charge médicale. » Trois points sont
soulignés : 1) le renforcement de l’expertise ; 2) la création d’Unités Hospitalières
Spécialement Aménagées (UHSA) structures qui pourraient accueillir pendant la durée de leur
peine et, au-delà, si leur état le nécessite, les personnes dangereuses atteintes de troubles
mentaux ; et 3) le renforcement du suivi des personnes après leur libération. Cette réflexion
s’inscrirait dans une perspective d’accompagnement et de thérapie.
En Belgique par exemple, selon la loi de Défense Sociale (1964), les délinquants
malades mentaux qui sont reconnus incapables de contrôler leurs actes peuvent être internés et
doivent par la suite être orientés vers un Etablissement de Défense Sociale (EDS). Ils sont
19
supposés recevoir un traitement et un accompagnement en vue d’une réinsertion sociale
(Pham, Saloppé, Bongaert, & Hoebanks, 2007).
En France, le 10 août 2007 est adopté le projet de loi Dati sur le « renforcement de la
lutte contre la récidive des majeurs et des mineurs » qui instaure des « peines plancher » pour
les récidivistes et écarte "l'excuse de minorité" pour les mineurs de plus de 16 ans, dans
certains cas. Cette loi a déclenché de vives réactions. C’est aussi le cas avec la loi du 25
février 2008 sur la rétention de sûreté qui créé des "centres socio-médico-judiciaires" dans
lesquels des criminels dangereux, susceptibles de récidive, pourront être enfermés à vie à leur
sortie de prison. La rétention de sûreté s'appliquera aux criminels les plus dangereux
condamnés à au moins quinze ans de réclusion pour "assassinat, meurtre, torture ou actes de
barbarie, viol, enlèvement ou séquestration". Décidée par une commission de trois magistrats,
elle pourra être prononcée pour une durée d'un an renouvelable, et s'appliquera "à titre
exceptionnel" après décision de la chambre de l'instruction. Elle devra constater "une
probabilité très élevée" de récidive, la personne condamnée "souffrant d'un trouble grave de la
personnalité". Ceci, inédit en droit français, déclenche de vives inquiétudes et n’est pas sans
poser des questions et des problèmes médico-légaux (Bénézech, Pham, & Le Bihan, 2009).
Au niveau des lois déjà existantes, il existe des dispositifs notamment le suivi en prison et le
suivi socio-judiciaire après la prison instaurés pour les condamnés il y a plus de dix ans et qui
permettraient de lutter contre la récidive mais ceux-ci sont peu utilisés. Les prisons françaises,
qui comptaient selon les chiffres officiels au 1er janvier 2009 (ministère de la justice) 62.252
détenus pour 51.997 places, sont pour la plupart dépourvues de personnels et d'équipements
médicaux et sociaux nécessaires pour appliquer les lois et surtout préparer les sorties des
détenus.
Nous voyons à quel point la dangerosité des sujets délinquants ou criminels ainsi que
le risque de récidive et sa prévention sont des sujets importants et sensibles. Au cœur de ces
réflexions se trouve la personnalité des individus commettant des actes délictueux ou
criminels, et notamment les troubles de la personnalité, comme par exemple la psychopathie.
Un point essentiel est soulevé, celui du traitement et de la prise en charge.
La recherche a déjà permis d’identifier les composantes affectives, interpersonnelles et
comportementales de la psychopathie ainsi que le risque que présentent les sujets
psychopathes (Hare, 1991, 2003). Les différences entre psychopathes et non psychopathes
sont connues. Il est maintenant nécessaire pour les professionnels intervenants auprès de ces
personnes de connaître les différences à l’intérieur même de ce groupe de délinquants
particulièrement dangereux mais donc à différents niveaux. Des outils d’évaluation ont vu le
20
jour comme la Psychopathy Checklist-Revised (PCL-R, Hare, 1991, 2003) pour l’évaluation
de la psychopathie ou la Historical-Clinical-Risk Management (HCR-20, Webster, Douglas,
Eaves & Hart, 1997), pour l’évaluation de la dangerosité et du risque de récidive. D’autres
instruments permettent l’évaluation d’autres troubles de la personnalité comme le Structured
Clinical Interview for Disorders II (SCID-II, First, Spitzer, Gibbon, & Janet, 1995) évaluant
les troubles de l’Axe II du DSM-IV (APA, 1994, 1996). Ces outils sont largement utilisés
dans la recherche, mais les cliniciens semblent réticents quant à l’utilisation de ceux-ci dans la
pratique. Ils pourraient pourtant s’avérer bien utiles.
Nous traiterons dans cette thèse de la psychopathie (scores à la PCL-R) et de la
comorbidité entre ce trouble et les autres troubles de la personnalité (Axe II du DSM-IV,
1994) ainsi que leur impact au sein d’une population de 80 détenus condamnés en Maison
d’arrêt. L’impact sur le risque de récidive (scores à la HCR-20) sera également évalué.
L’objectif de cette recherche est d’évaluer l’impact des troubles de l’Axe II sur la
psychopathie et notamment le trouble Borderline. Ainsi, un intérêt particulier est porté au
trouble Borderline du fait des caractéristiques anxieuses et dépressives ainsi que de la capacité
d’attachement qui facilitent l’alliance thérapeutique. En effet, la prise en charge de la
population délinquante est difficile mais ces caractéristiques relatives au Facteur 1 seraient
reconnues comme étant d’un meilleur pronostic, connaissance issue de l’expérience clinique
mais qui n’a jamais été véritablement testée dans une recherche de type empirique. Le faire
demande une démarche de précision diagnostique des comorbidités. Nous affinerons nos
résultats en évaluant les liens entre ces troubles de la personnalité et les types délits violents et
non violents. Il s’agit également d’évaluer l’impact de ces troubles (psychopathie et troubles
de l’Axe II cluster B) sur le risque de récidive (scores à la HCR-20). Une comorbidité de
l’Axe II notamment Antisocial, Narcissique et Borderline augmente le risque de récidive
(Pham, Chevrier, Nioche, Ducro & Réveillère, 2005).
Enfin, nous essaierons de souligner ce que pourrait apporter ces outils d’évaluations
standardisés dans la pratique clinique. Nous tenterons également de voir comment la prise en
charge peut être adaptée concernant certains de ces sujets présentant une comorbidité de
troubles, notamment les sujets psychopathes présentant le trouble Borderline associé.
A notre connaissance, il s’agit du premier travail de ce type sur une population
française.
21
Première partie
I- Théorie
22
I-A- La psychopathie
Selon Pichot (1965), la personnalité peut être considérée comme « l’intégration
dynamique des aspects cognitifs, pulsionnels, volutionnels et affectifs » (cité par PhamScottez & Guelfi, 2003). Cette définition met l’accent sur l’aspect intégratif de différentes
composantes. La personnalité revêt un caractère relativement stable. D’un point de vue
clinique, elle est constituée de « l’ensemble des comportements, pensées, affects, et modes
d’adaptation psychologique qui caractérise de façon distinctive et durable le fonctionnement
habituel d’un individu. Il s’agit donc d’une structure psychologique profondément ancrée (p.
654) » (Goulet, 1999). Le tempérament (inné) et le caractère (acquis) la composent. Chaque
personnalité se distingue par un grand nombre de traits qui, s’ils sont inflexibles et inadaptés
constituent un trouble de la personnalité pouvant être source de souffrance pour le sujet et/ou
les autres (DSM-IV, APA, 1994). La théorie comportementale met l’accent sur
« l’apprentissage et le conditionnement comme modalités de l’influence de l’environnement
sur le caractère (p. 658) » (Lalonde, Aubut, & Grunberg, 1999). La théorie cognitive, quant à
elle, souligne la notion de schèmes cognitifs (Beck & Freeman, 1990) qui seraient
déterminants dans les troubles de la personnalité. La psychanalyse distinguait les troubles de
la personnalité des névroses par le fait que les premiers étaient égo-syntones (en harmonie
avec le Moi) et alloplastiques (demandant aux autres de s’adapter), alors que les seconds
étaient au contraire ego-dystones (étrangers au Moi) et auto-plastiques (demandant à la
personne elle-même de s’adapter).
La psychopathie est traditionnellement définie comme « un trouble sévère de la
personnalité marqué par une constellation de caractéristiques interpersonnelles, affectives et
comportementales. Au centre de celles-ci se retrouvent un manque profond d’empathie, de
culpabilité ou de remords, une indifférence marquée face aux droits, sentiments et bien-être
des autres. Le psychopathe est typiquement loquace, égocentrique, égoïste, insensible,
menteur, manipulateur, impulsif, à la recherche de sensations, irresponsable et sans
conscience » (Cleckley, 1941 ; Hare, 1991). Avant cela, Frosch (1983) cité par Meloy (2001
p. 21) définissait la psychopathie comme « un trouble (…) qui trouve son origine dans une
déviation du développement et qui se caractérise par un excès d’agressivité pulsionnelle ainsi
23
que par une incapacité à nouer des relations d’objet (…). La psychopathie est aussi un
processus, un jeu interactif continu de facteurs et d’opérations qui progressent ou régressent
de façon implicite jusqu’à atteindre le stade final d’une désidentification radicale d’avec
l’humain ». Les sujets psychopathes apparaissent comme à haut risque concernant la violence
et les agressions (Hart & Hare, 1997). Pour Côté (2000), il s’agit d’une « entité clinique
distincte caractérisée par un fonctionnement antisocial et des traits de personnalité, entité
clinique qui définirait l’essence même du sujet antisocial (p. 21)». Hallé & Hodgins (1996) se
situent d’un côté neuropsychologique et neurobiologique en suggérant que « la psychopathie
pourrait être conçue comme étant la manifestation aggravée, par une ou plusieurs anomalies
ou singularité du cerveau, du trouble de la personnalité antisociale (p. 499) ».
Des tentatives d’explication de la psychopathie sont apparues dans les années 20 sous
l’influence de la psychanalyse, mais avec le développement de théories behavioristes, elles
ont donné lieu à des modèles alternatifs.
I-A-1) L’approche psychodynamique
I-A-1-a) Théorie
La psychanalyse (Freud, Bergeret, Kernberg) explique l'apparition d'un trouble de la
personnalité et son développement par: 1) une fixation excessive à l'un des différents stades
de développement de la sexualité infantile, et 2) l'utilisation prédominante, rigide et non
adaptée de mécanismes de défense contre l'angoisse et la nature des relations objectales. Bien
que Freud ait dit peu de chose sur le crime, sa théorie de la socialisation avait pour but
d’expliquer l’internalisation des standards d’un groupe dans la petite enfance via la formation
du Surmoi. Même si ses théories ont été critiquées par leur non testabilité, l’idée d’un Surmoi
formé à partir des relations avec les parents a influencé la pensée concernant le comportement
antisocial et la psychopathie.
Une théorie psychodynamique récente souligne le rôle des expériences de la petite
enfance et l’évolution des relations d’objet, le modèle durable des relations interpersonnelles
ayant dérivé des représentations internes cognitives et affectives.
Winnicott (1963) a travaillé sur les tendances antisociales en lien avec la capacité de
sollicitude. Cette notion traduit « le fait que l’individu se sent concerné, impliqué et que, tout
à la fois, il éprouve et accepte une responsabilité (p. 121) ». Il accorde une certaine
24
importance au rôle de l’environnement humain, en particulier à la mère, quand il reconnaît et
favorise la tendance innée de l’enfant à la sollicitude. La déprivation ou la perte ont des
conséquences désastreuses au moment où s’élabore la capacité de sollicitude (entre dix mois
et deux ans). Le processus de socialisation qui a commencé à se mettre en place à partir des
tendances innées de l’enfant risque ainsi de disparaître ou d’être endigué. Il existe alors une
relation entre ce blocage de la capacité de sollicitude et les tendances antisociales (Winicott,
1966). Même si selon lui, la délinquance peut être un signe d’espoir, il insiste toutefois sur
son côté destructeur (dans le comportement délinquant, la destructivité a une part importante)
et sur la recherche d’un environnement sûr où impulsion et spontanéité seront en sécurité. La
théorie de l’attachement de Bowlby (1969) souligne également l’importance de la qualité des
relations entre l’enfant et la personne qui lui donne les soins pendant la première année de vie
comme étant déterminant pour le développement social et cognitif futur.
Flavigny (1977) apporte une compréhension psychodynamique de la psychopathie et
propose un repérage symptomatique en décrivant les symptômes essentiels (passage à l'acte,
la répétitivité des conduites, la passivité et l’oisiveté, la dépendance, à des exigences
mégalomaniaques et la recherche de satisfactions immédiates), les symptômes secondaires
(l'instabilité, le manque d’intérêt, le besoin d'évasion, l'instabilité relationnelle et les plaintes
somatiques) et la toile de fond (angoisse permanente et frustrations affectives). Il retrouve
dans l'histoire du psychopathe des expériences multiples d'abandon, une discontinuité des
relations affectives précoces étant enfant avec souvent des placements multiples. L'altération
des images identificatoires parentales est souvent retrouvée, avec un père absent ou inexistant
sur le plan symbolique, et une mère ayant toujours oscillé entre des relations de fusion et de
rupture vis-à-vis de son enfant. L'adolescent, puis l’adulte jeune, vont reproduire ce
fonctionnement de façon répétitive pour mieux se protéger du danger d'abandon. Chez le
psychopathe, l’importance des traumatismes précoces est caractéristique de son histoire
(deuils notamment parentaux, abandons, violences physiques et sexuelles, agressions,
accidents ou maladies…). Le psychopathe reproduit souvent cette cascade d’événements de
vie traumatiques par son comportement à travers un fonctionnement caractérisé par des
conduites de prise de risque.
Selon la théorie de Kernberg, les relations d’objet précoces perturbées sont centrales et
ce dans tous les troubles de la personnalité. Le trouble de la personnalité antisociale est
équivalent à la psychopathie telle que décrite par Cleckley et la PCL-R et tombe plus dans une
organisation limite de la personnalité. En effet, Kernberg (2001) envisage les troubles
25
psychopathiques ainsi que « la plupart des personnalités narcissiques typiques comme
présentant une organisation limite sous-jacente (p. 35) ». Il évoque alors la possibilité de
ranger la pathologie sur un continuum allant d’un échelon inférieur à un échelon supérieur.
Ainsi, les troubles borderline se manifestent par une distorsion dans les relations
interpersonnelles et le contrôle des affects étant le résultat de perturbations dans les relations
d’objet. Il évoque donc également les personnalités narcissiques qui ont un grand besoin
d’être aimées et admirées, ont une vie affective superficielle, peu de contacts avec les
sentiments d’autrui, une inquiétude quand ils ne sont pas le centre d’attention, qui envient
autrui, les idéalisent ou les déprécient, les exploitent et se donnent le droit de les contrôler
sans aucun sentiment de culpabilité. Ces personnalités ont un abord souvent charmant mais
qui fait ressentir une certaine froideur. La personnalité antisociale présente l’ensemble de ces
traits et est considérée par Kernberg comme un sous-groupe des personnalités narcissiques en
la considérant comme une forme agressive du trouble narcissique (Ibid.). Toutefois, dans la
structure antisociale, ces traits de personnalité sont associés à une pathologie sévère du
Surmoi. Il en va de même pour les sujets psychopathes qui se distinguent par le niveau le plus
sévère de désorganisation du Surmoi à l’intérieur d’un spectre de troubles narcissiques.
Kernberg voit également le psychopathe comme prédisposé biologiquement à des conduites
agressives excessives mais ceci devient dominant à une réponse à des expériences
traumatisantes ou à des distorsions dans l’attachement précoce découlant de l’abandon ou de
l’abus. La colère et l’envie deviennent alors des affects centraux (noyaux) et le sujet se défend
contre un monde dangereux à travers la grandiosité et la dépréciation.
Meloy et Gacono (1998) ont voulu tester les hypothèses psychodynamiques à partir du
Rorschach avec des enfants, des adolescents et des détenus antisociaux. La majorité des sujets
dans chaque groupe montrait des déficits d’attachement et les psychopathes faisaient
davantage preuve de relations d’objet à un niveau borderline que les non psychopathes et plus
de signes de narcissisme pathologique. Ceci va dans le sens de la théorie de Kernberg et des
résultats trouvés par Réveillère, Pham, Danneels, Delescluse, Largilière, et Willocq (2003) à
partir d’une population de délinquants belges. Desbiens, Bossé et Côté (2000) ont tenté
d’éclaircir la dynamique qui sous-tend les traits caractéristiques de la psychopathie (tels que
définis par Cleckley) à partir du Rorschach Exner (1995), notamment avec l’organisation de
la lutte anti-dépressive que les sujets psychopathes mènent.
26
I-A-1-b) Les mécanismes de défense
En terme de mécanismes de défense, la projection, la rationalisation, la dévalorisation,
le déni, l’identification projective, l’omnipotence et le clivage sont les mécanismes de défense
les plus souvent retrouvés chez les patients présentant une psychopathie sévère (Meloy,
2001). Réveillère et al. (2003) citent Exner (1995) : « le noyau défensif est typiquement fait de
rationalisation, externalisation et de dénégation » et « utilisées de manière excessive, ces
défenses prédisposent à la pathologie et/ou à la désadaptation » (p. 109).
Le psychopathe est généralement structuré à un niveau pré-oedipien et il est peu
susceptible de manifester des défenses de niveau plus élevé ou névrotique (ex : l’idéalisation,
l'intellectualisation, l'isolation et le refoulement) qui se révèlent absentes chez les patients à
personnalité antisociale souffrant d'une psychopathie grave. Si les défenses névrotiques sont
présentes chez un patient à personnalité antisociale, cela évoquerait un autre diagnostic que la
psychopathie et alors la possibilité d'être traduites par la pensée et non plus seulement par des
réactions impulsives et affectives.
Meloy (2000) suggère que le déni et le clivage sont primordiaux. Concernant le
clivage, « la dissociation est un processus de défense phénotypique dont le génotype serait le
clivage ; elle est omniprésente chez le psychopathe (p. 141)». Le déni, quant à lui, opérerait
« à travers les mots et les actes plutôt que par les fantasmes ». Dans ce sens, on parle d'hyperinvestissement de l'action qui court-circuite la représentation mentale.
L'externalisation, processus par lequel le psychopathe rejette la responsabilité de tous
les actes et imperfections sur le monde extérieur, est souvent vue comme ayant un rôle
prédominant. Ceci va dans le sens de Meloy qui voit d'abord la psychopathie comme un échec
d'internalisation. Rossel et Merceron (cités par Husain, 1995) soulignent l'importance de
l'échec narcissique en se centrant sur l'accusation du monde extérieur. Ils éprouvent un besoin
de constamment s'opposer aux règles et de se mesurer à elles de façon à ressentir un sentiment
d'omnipotence dont le but est de cacher la blessure narcissique sous-jacente. Selon les auteurs,
le processus d'externalisation remplace la capacité à ressentir les sentiments de déficience et
d'incomplétude dépressifs.
L'identification projective « processus dans lequel des composantes affectives et
idéationnelles de l’individus sont attribuées à l’autre, cependant que l’autre réel est contrôlé
ou vise à l’être (Meloy, 2000 p. 132)» tient également un rôle très important.
Au niveau de l'identification avec l'agresseur, Meloy remarque la manière dont le sujet
s'identifie avec l'agresseur plus qu'avec la victime. Le psychopathe « insiste sur la peur qu'il
27
peut créer chez les autres, déniant ainsi la possibilité de la vivre lui-même ». L’autre fonction
de ce mécanisme de défense est de contrôler autrui en cherchant à générer cette peur. Cet
hyper-investissement de l'agressivité serait entendu comme une défense active contre la
dépendance en perpétuant le conflit et la lutte pour le pouvoir.
Le rôle du mécanisme de dévalorisation est aussi très important dans les interactions
du psychopathe. Concernant les psychopathes narcissiques, Meloy (2001) souligne que,
associée à un trouble antisocial, plus la psychopathie est grave, plus on doit s’attendre à ce
que le patient choisisse préférentiellement la dépréciation agressive d’autrui pour étayer des
vécus de grandiosité et réparer les blessures émotionnelles. Cette attitude de dénigrement peut
aussi varier de manière très large sur le plan clinique.
I-A-1-c) Les réactions contre-transférentielles
Il s’agit des réponses du clinicien face au patient psychopathe. Meloy (2000) s’appuie
sur une définition de Reich (1951) et Greenson (1974) selon qui la réaction de contre-transfert
« correspond aux réactions, déformées et inappropriées, du psychothérapeute au patient, qui
dérivent de ses anciens conflits inconscients et non résolus (p. 278)». Il en retire alors deux
dimensions : la dimension endogène et la dimension réactionnelle. La dimension endogène se
réfère à cette précédente citation et souligne la nécessité de psychothérapie ou de
psychanalyse intensive de tout psychothérapeute pendant sa formation. La dimension
réactionnelle est « la réaction expérientielle du thérapeute au mode de communication préverbal du patient, qui souvent remet en acte les relations précoces à ses objets parentaux (p.
278)». Il décrit huit réactions contre-tansférentielles (Meloy, 2000 pp. 278-286, 2001 pp.
573-577) :
1- Le « nihilisme thérapeutique » se réfère a une pratique dénommée par Lion (1978)
qui consiste à polariser, cliver et dévaluer le patient à troubles psychopathiques en le
considérant comme intraitable.
2- Dans « l’alliance thérapeutique illusoire », le clinicien a l’illusion qu'une alliance
peut exister alors qu'il n'en est rien. Il s’agit davantage alors d’une projection des propres
voeux du clinicien.
3- Concernant « la peur d’être attaqué ou blessé », le clinicien ressent de la crainte et
une inquiétude suscitées par la perception que le patient est un prédateur, avec des réactions
28
viscérales associées, que le danger soit réel ou non. Le triomphe sadique et arrogant du
psychopathe sur le psychothérapeute y est rattaché.
4- Le « déni et la tromperie » constituent une réponse contra-phobique à un danger
réel représenté par les patients violents, réaction pouvant induire un clivage ou un contentieux
dans l'équipe de santé mentale. La tromperie exercée par un patient sera d'autant plus forte
qu'il suscite une grande peur chez le clinicien.
5- L’ « impuissance et la culpabilité » renvoient à la détresse exprimée par le clinicien
quand un patient ne change pas malgré ses efforts thérapeutiques.
6- La « dévalorisation et la perte d’identité professionnelle » surviennent quand le
patient est une source continue de déception professionnelle. Il est alors difficile de ne pas se
sentir méprisable et dévalué sous l'effet des manipulations répétitives du patient.
7- La « réaction de haine et d’envie de détruire » se ressent lorsque le patient
confronte le clinicien à ses propres impulsions agressives et destructrices. Il s'efforce de
détruire l'empathie chez le clinicien, qui peut réagir à son tour en s'identifiant au désir de
haine qu'exprime le patient.
8- Enfin, l’ « illusion de complexité psychologique » amène le clinicien à croire que le
patient a une psychologie complexe et développée de façon aussi mature que la sienne. Ce
type de réaction est fréquent quand le patient a un QI supérieur à la moyenne lui permettant
de camoufler une organisation limite derrière son charme superficiel et sa loquacité, et quand
on ne retrouve pas de diagnostic associé relevant de l’Axe I (Kernberg, 1984).
*****
Avec l’approche des théories psychodynamiques, les auteurs que nous venons de citer
s’accordent pour mettre en avant l’importance des relations précoces dans le bon
développement affectif et cognitif d’un enfant ainsi que les conséquences que peuvent avoir
les expériences développementales adverses et l’importance des abus et/ou des maltraitances
subies précocement. Ainsi, l’étiopathogénie des troubles est donc à mettre en lien avec des
frustrations précoces extrêmes (Kernberg) et un traumatisme psychique précoce (Bergeret).
Comme nous allons l’évoquer, l’approche clinique et empirique se base d’avantage sur
l’observation clinique et l’évaluation standardisée.
*****
29
I-A-2) Approche clinique et empirique
Avec un premier ouvrage sur le sujet en 1923, Schneider (1958) a proposé une
typologie des personnalités anormales ou « psychopathiques » fondée sur l’observation
clinique (cf. tableau 1) qui ne seraient que des variations des personnalités normales. Il
s’agirait de personnalités anormales dans le sens où la personnalité s’écarte de la moyenne et
a construit une nosologie « intuitivement » catégorielle basée principalement sur les déviances
de caractère en introduisant la notion de souffrance individuelle et/ou collective. Dans le
cadre de notre étude, le tableau représentant la typologie de ces personnalités selon Schneider
est à prendre avec précaution car il ne faut pas comprendre la personnalité « psychopathique »
telle que celle définie par la PCL-R. Le tableau permet de souligner que seulement trois de ces
types ont des traits communs avec la psychopathie de Hare : les psychopathes narcissiques,
apathiques et explosifs (Hare, 1991).
Tableau 1- Typologie des personnalités anormales ou « psychopathiques » selon Schneider
(1923, 1958).
Les hyperthymiques
Les dépressifs
Gais, hyper-optimistes, constamment dans de nouveaux
projets mais manque d’endurance
Pessimistes, humeur dépressive prédominante
Les inquiets
Anxieux avec des standards élevés, incertitude intérieure,
sentiment d’infériorité, d’insuffisance.
Les fanatiques
Idées de prédominance, survalorisation, agressivité ou repli
sur soi
Les narcissiques
Besoin de paraître, tout leur est dû, théâtral, manipulent et
trompent les autres pour apparaître meilleurs qu’ils ne le
sont (insuffisance perçue)
Les instables
Emotions labiles et réactives, comportements antisociaux
Les explosifs
Impulsivité, colères, manifestations affectives violentes
Les apathiques
Durs, sans remords (inaffectivité), duperie, propensions à
s’engager dans des activités criminelles, amoralisme
Les abouliques
Superficiels, caméléon (absence de volonté, influençables)
Les asthéniques
Très nerveux et anxieux, complications psychosomatiques
30
Concernant la psychopathie telle que nous l’étudions, l’approche empirique est celle
qui caractérise les sujets psychopathes par des « traits psychiques dont les origines se
cherchent dans les dysfonctionnements émotifs, affectifs et cognitifs pour donner lieu à des
troubles identifiables de comportements (p. 679) » (Villerbu, 2001). Il est important
d’améliorer et de préciser le diagnostic (Fillieux & Godfroid, 2001 ; Reid & Gacono, 2000) y
compris en prenant en considération les différences entre le trouble de la personnalité
Antisociale et la psychopathie avec d’autres troubles comportant un syndrome antisocial.
Celui-ci peut en effet être engendré par d’autres troubles tels que l’abus de substance, la
schizophrénie, les troubles de l’humeur (etc.) alors que le trouble Antisocial est bien défini
par les critères du DSM-IV et la psychopathie opérationnalisée par Hare (1991, 2003).
Les travaux modernes de type empirique sur la psychopathie prennent comme base les
observations cliniques de Cleckley (1941, 1976), Hare (1991, 2003) et Pham & Côté (2000).
La psychopathie est un trouble de la personnalité caractérisé selon Cleckley (cité par Desbiens
et al., 2000) par « la superficialité, le manque de sincérité et de véracité, rarement digne de
confiance, le manque de jugement, l’incapacité à tirer profit de l’expérience, l’égocentrisme
pathologique, l’absence de capacité d’introspection, l’absence d’anxiété ou de mécanismes
névrotiques, l’évitement, le caractère explosif, l’égocentricité, une intelligence normale, une
absence de délire et d’indices de pensée irrationnelle, l’absence de remords, le manque de
sensibilité sur le plan des relations interpersonnelles, le manque de réactions affectives, des
comportements antisociaux, une faible propension au suicide, des comportements
excentriques, une vie sexuelle impersonnelle et le manque de planification dans
l’organisation ». Le narcissisme pathologique et un détachement émotionnel associés à des
comportements antisociaux chroniques sont considérés par Hare (1991) et Meloy (2000)
comme des caractéristiques dominantes de la psychopathie. Meloy (2001) évoque un contenu
émotionnel qui semble en fait surtout fait de « rage, de sensibilité extrême à la honte ou à
l’humiliation, d’envie, d’ennui, de mépris, de jubilation et de plaisir dans la domination (p.
572)».
I-A-2-a) L’échelle de Psychopathie-Révisée ou PCL-R (Hare, 1991, 2003)
Hare (1985, 1991) s’est donc inspiré des caractéristiques décrites par Cleckley (1941)
pour développer la PCL-R et effectuer un travail de validation diagnostique de la
psychopathie avec cet instrument. La PCL-R tient compte des comportements antisociaux
mais aussi des traits de personnalité spécifiques par le biais de deux facteurs (cf. tableau 2) :
31
le Facteur 1 (F1) se réfère aux caractéristiques narcissiques (égocentration et grandiosité) et
au détachement émotionnel, et le Facteur 2 (F2) aux comportements antisociaux chroniques et
défaillance de contrôle (comportements antisociaux et impulsifs). Le Facteur 1, relatif à des
traits de personnalité caractéristiques de la psychopathie, a une certaine stabilité et représente
le noyau dur (Lilienfield, 1998 ; Côté & Pham, 2000) et essentiel (Pham, 1998a) de la
psychopathie. Le Facteur 2 a trait à la composante comportementale proche du trouble
Antisocial du DSM-IV (1994) qui représente les comportements criminels et antisociaux sans
prendre en considération ces caractéristiques classiques de la psychopathie (Hallé & Hodgins,
1996). A travers ces deux facteurs, la PCL-R reflète à la fois des informations cliniques et
historiques. Dans un milieu carcéral qui est celui de notre étude, les items les plus prédictifs
de la psychopathie sont un style arrogant, le manque d’empathie, l’irresponsabilité, la
tromperie et la loquacité et le charme superficiel (Widiger, Cadoret, Hare, Robins, Rutherford,
Zanarini, Alterman, Apple, Corbitt, Forth, Hart, Kultermann, Woody, & Frances, 1996). Ceci
correspond donc à la dimension interpersonnelle du Facteur 1 excepté pour l’irresponsabilité
relative à la dimension comportementale et impulsive du Facteur 2.
Tableau 2- Critères de la psychopathie selon la PCL-R de Hare (1991) : items répartis en
Facteurs 1 et 2.
Facteur 1
Facteur 2
Items n°
Items n°
1- Loquacité et charme superficiel
3- Besoin de stimulations et tendance à s’ennuyer
2- Surestimation de soi
9- Tendance au parasitisme
10- Faible maîtrise de soi
4- Tendance au mensonge pathologique
5- Duperie et manipulation
12- Apparition précoce de problèmes de comportement
6- Absence de remords et de culpabilité
13- Incapacité de planifier à long terme et de façon
7- Affect superficiel
réaliste
8- Insensibilité et manque d’empathie
14- Impulsivité
16- Incapacité d’assumer la responsabilité de ses faits 15- Irresponsabilité
et gestes
18- Délinquance juvénile
19- Violation des conditions de mise en liberté
conditionnelle
Items sans appartenance : 11- Promiscuité sexuelle, 17- Nombreuses cohabitations de courte durée, 20- Diversité
des types de délits commis par le sujet.
La PCL-R représente la principale avancée méthodologique de ces 10-15 dernières
années et a un rôle très important qui ne cesse de grandir dans les systèmes de justice et de
santé mentale (Hare, 1999). Cet entretien semi-structuré intensif est combiné à une recherche
à partir des dossiers. Le score obtenu varie de 0 à 40. Classiquement, le point de coupure est à
30. Un score inférieur à 20 rend compte d’une absence de psychopathie, un score entre 20 et
29 traduit une problématique mixte et au-delà, le diagnostic de psychopathie est posé. Ce
32
point de coupure permet de prendre en compte des groupes de sujets psychopathes et de non
psychopathes. Toutefois, le point de coupure peut varier en fonction des études avec par
exemple un point de coupure à 25 qui correspondrait mieux à des populations européennes
par rapport aux populations nord-américaines (Harris, Rice & Quinsey, 1994 ; Pham, 1998a ;
Pham, Vanderstukken, Philippot, & Vanderlinden, 2003 ; Cooke, Michie, Hart & Clark,
2005). La PCL-R a une très grande fiabilité inter-juge et une bonne consistance interne dans
les échantillons de détenus (Côté, Hodgins, & Toupin, 2000). La validité de la PCL-R est
appuyée par un corps de recherche important. Côté, Hodgins, Ross, & Toupin (1993) ont
travaillé sur la validation de cette échelle en version française. Les résultats sont comparables
avec ceux observés au Canada et aux Etats-Unis pour la version anglaise. La structure bifactorielle est dégagée et comparée aux autres échantillons nord-américains et européens
(Pham, 1998a à partir de détenus francophones incarcérés en Belgique) et il existe une étroite
similarité entre les différents échantillons. Elle peut donc être considérée comme l’un des
meilleurs instruments de prédiction des comportements antisociaux.
I-A-2-b) Les comportements antisociaux et socialement déviants dans la
psychopathie
Une question importante est posée quant aux comportements antisociaux car elle
divise la recherche selon que les comportements antisociaux et socialement déviants sont
perçus comme symptôme primaire ou secondaire.
L’association entre la psychopathie et le comportement antisocial ou déviant
socialement est reconnue dans la psychopathologie descriptive depuis au moins deux siècles
ainsi que dans les modèles de critères diagnostiques de différents systèmes nosologiques, y
compris le DSM-IV (1994). On peut distinguer deux approches de la psychopathie basées
sur la personnalité d’une part et le comportement d’autre part qui diffèrent dans leurs
implications au niveau de l’évaluation (Lilienfield, 1994). L’approche basée sur la
personnalité trouve son origine comme cité plus haut chez Cleckley (1941), celui-ci (ainsi que
d’autres auteurs se situant dans cette approche) percevant le comportement antisocial comme
étant d’importance subsidiaire dans le diagnostic de psychopathie. Une histoire faite
d’offenses légales ou sociales ne suffit pas à justifier ce diagnostic.
La question qui fait débat est alors de savoir si les comportements antisociaux et
socialement déviants sont à inclure dans les critères diagnostiques (symptômes primaires) ou
33
sont une conséquence (symptômes secondaires) de la psychopathie. Il est à noter que la même
conséquence peut résulter de différents troubles. Ceci est aussi important notamment pour
l’évaluation du risque. Dans ce sens, Hare (Hare & Neumann, 2006) cite une réflexion de Lee
Robins selon qui « le comportement antisocial est probablement plus discriminant dans la
population générale que dans les populations des prisons où il est très commun (p. 61) ».
Plusieurs études à partir de la PCL-R ont dégagé d’autres facteurs relatifs à ce
questionnement et ont entraîné quelques réactions. Cooke et Michie (2001) ont proposé un
modèle hiérarchique de la psychopathie à trois facteurs à partir de la PCL-R de Hare et ont
fait de nouvelles analyses factorielles. Ils en retirent au niveau des traits psychopathiques une
structure à trois facteurs hiérarchisée :
-
Facteur 1 : style interpersonnel (arrogant et trompeur) ; items 1, 2, 4, 5.
-
Facteur 2 : style affectif (expérience affective déficiente) ; items 6, 7, 8, 16.
-
Facteur 3 : style comportemental (comportemental impulsif et irresponsable) ; items 3,
9, 13, 14, 15.
Le modèle en trois facteurs a été validé auprès de populations nord-américaines et
écossaises et est métriquement équivalent en ce qui concerne les Etats-Unis et le Canada,
mais pas entre les continents nord-américain et européen (Cooke et al., 2005). Ce modèle rend
compte de trois styles qui caractérisent la psychopathie, le comportement antisocial et déviant
leur étant consécutifs. Ce point-ci est donc sujet à controverse.
Pour Hare (2003), un modèle hiérarchique en quatre facteurs serait meilleur. Il y
ajoute un autre facteur relatif au comportement criminel (items 10, 12, 18, 19, 20) qui, selon
Cooke et Michie, réduit l’ajustement du modèle. Ils ont alors évalué un modèle en cinq
facteurs (population au Canada et en Europe) avec deux facteurs ajoutés aux trois autres :
comportement criminel (items 18, 19, 20) et labilité des relations (11, 17). Toutefois, ce
modèle apparaît clairement inférieur au modèle en trois facteurs.
Selon Neumann, Vitacco, Hare, & Wupperman (2005), en se basant sur le modèle en
quatre facteurs, les tendances antisociales jouent un rôle fondamental dans le construit de
psychopathie et donc dans l’évaluation et la conceptualisation de la psychopathie. Ils ajoutent
que le modèle en trois facteurs est donc critiquable puisqu’il ne tient pas compte de cette
dimension. Il s’agit donc d’un concept à multi-facettes composé d’au moins quatre
dimensions reflétant des anomalies interpersonnelles, affectives, de style de vie et
antisociales.
34
Pour résumer, la principale différence concerne donc la manière dont ces auteurs
traitent des comportements antisociaux et criminels en lien avec la psychopathie. Ceci met en
exergue l’existence d’un débat continuel sur la conceptualisation la plus appropriée de la
psychopathie telle que mesurée par la PCL-R. Deux modèles structuraux alternatifs sont
proposés : 1) le traditionnel modèle en deux facteurs et son extension récente en quatre
facteurs, et 2) le modèle en trois facteurs de Cooke & Michie (2001). Le comportement
antisocial définit en partie le construit qu’est la psychopathie et les items liés à la déviance
comportementale sont explicitement représentés dans le modèle en quatre facteurs dans sa
quatrième facette antisociale (Hare, 2003). A contrario, Cooke & Michie ont exclu ces items
de leur modèle sur la base qu’ils n’apportent pas d’information unique sur les traits sousjacents de la psychopathie. Cooke, Michie, Hart & Clark (2004) conceptualisent les
comportements antisociaux comme des conséquences plutôt que faisant partie de la
constellation des traits de personnalité qui définissent ce trouble. En effet, la plupart des
descriptions cliniques classiques de la psychopathie ne considèrent pas le comportement
antisocial comme symptôme central ou comme caractéristique de la personnalité
psychopathique. La confusion vient souvent d’une erreur basique : celle de penser que le
comportement déviant équivaut à la personnalité psychopathique. Par exemple, selon
Cleckley (1941), beaucoup de psychopathes n’ont pas dans leur histoire ce type de
comportement déviant. De plus, les critères diagnostiques prenant trop en compte ces
comportements ont été largement critiqués (Hare, 1991 ; Millon, 1981). Certains symptômes
de la psychopathie jouent un rôle causal vis-à-vis du comportement antisocial comme par
exemple, l’impulsivité qui augmente la propension à s’engager dans des actes criminels
(Meloy, 2000). Toujours dans ce sens, une histoire de comportements antisociaux et déviants
socialement est différente des autres symptômes de la psychopathie qualitativement en ce
qu’elle reflète des actes spécifiques plutôt que des traits de personnalité généraux (Lilienfield,
1994). Enfin, les points de vue théoriques du crime et de la violence suggèrent que le
comportement antisocial résulte de l’influence d’un large panel de facteurs biologiques,
psychologiques, et sociaux (Gottfredson & Hirschi, 1990). D’autres troubles peuvent être liés
au comportement antisocial (ex : troubles psychotiques, retard mental, la consommation et la
dépendance à des substances, et d’autres troubles de la personnalité).
Ainsi, l’inclusion des conséquences dans les critères diagnostiques peut largement
compliquer l’évaluation du trouble mental ainsi que la recherche de l’étiologie et de l’avancée
de la pathologie car une seule conséquence peut être associée à différents troubles. Toutefois,
Neuman et al. (2005) ne pensent pas que le comportement antisocial soit une variable nuisible
35
ou que le diagnostic psychiatrique puisse être rendu difficile par l’inclusion de cette variable
dans le construit.
I-A-2-c) PCL-R, formes d’agressions et types de délits
La capacité à inhiber l’agression repose sur l’empathie (Meloy, 2001) qui manque aux
sujets psychopathes. Différentes formes d’agression sont liées à différentes facettes de la
psychopathie (Patrick & Zempolich, 1998). Il est connu que les sujets psychopathes criminels
s’engagent davantage dans des actes plus violents et plus fréquents que les non psychopathes
(Hare & McPherson, 1984). Contrairement à cela, Cleckley voit le psychopathe comme calme
et détaché émotionnellement. Il est alors important de considérer également des types de
comportements agressifs et le rôle de l’émotionnalité. Ils agissent plus de sang froid et de
manière plus instrumentale que passionnée (Hare, 1998).
La principale distinction se fait entre les agressions hostiles et instrumentales. La
première est plus en rapport avec des événements déplaisants (insultes, attaques) et la seconde
avec le blocage ou la privation de l'objet convoité (Buss, 1961). La psychopathie est marquée
par un déficit de la peur lié à la composante affective et interpersonnelle de la psychopathie :
le détachement émotionnel de la psychopathie est lié négativement à la peur et au stress alors
que le Facteur 2 y est positivement associé (Patrick, 1994). De plus, le Facteur 2 est la
première cause de corrélation entre la psychopathie et l’impulsivité ainsi que la colère.
Concernant les types de délits, les psychopathes présentent une criminalité plus
importante et plus variée que les autres, la différence étant plus marquée et nette pour la
criminalité violente (Côté, Hodgins, Toupin & Pham, 2000). Les scores à la PCL-R sont
positivement corrélés avec les délits qui présentent une violence interpersonnelle (par
exemple, vol avec violence, coups et blessures) ainsi qu’avec des délits plus instrumentaux
tels que vol, recel, port d’arme et délits sexuels (Pham, 1998a). Il existe une forte relation
entre la psychopathie et l’usage d’une arme qui reflèterait une propension spécifique aux
agressions instrumentales (Patrick & Zempolich, 1998). En revanche, Pham (1998a) rapporte
une corrélation négative avec les homicides ce qui vaut également pour les Facteurs 1 et 2.
Enfin, même si les psychopathes non criminels sont reconnus, peu d’études ont été
faites concernant cette population. La compréhension des psychopathes criminels et des non
criminels est incomplète et devrait permettre d’identifier des facteurs protecteurs (Mahmut,
Homewood, & Stevenson, 2007). La psychopathie contribue de manière causale à la violence,
36
mais certains psychopathes peuvent ne pas être violents ou criminels. Ceci est possiblement
dû à une augmentation de la capacité à inhiber ce type de réponses ou la présence de
motivation internes qui entrent en compétition avec l’activité criminelle (Hall & Benning,
2006). C’est entre autre pour cela que Cooke et al. (2004) argumentent que l’utilisation d’une
mesure plus « pure » selon eux de la psychopathie, c’est-à-dire excluant les indicateurs de
déviance comportementale, pourrait accroître la spécificité des évaluations du risque et
permettre une avancée dans la compréhension de ce qui mène à diverses formes de déviance
sociale comme la violence sexuelle, la violence domestique et les crimes des criminels en
« col blanc ». Selon Mahmut et al. (2007), les psychopathes criminels présentent un degré
plus extrême de caractéristiques interpersonnelles-affectives (F1) et antisociales (F2) de la
psychopathie. Les psychopathes non criminels ont les mêmes dispositifs neuropsychologiques
et affectifs (ex. manque d’empathie) que les psychopathes criminels mais sont une version
moins extrême que les criminels et ne s’engagent donc pas dans des comportements illégaux
ou les évitent. Il se peut également que les facteurs protecteurs (par exemple : surveillance
parentale, statut socio-économique) fassent défaut aux psychopathes criminels alors que les
non criminels les possèdent et les empêchent de devenir criminels (Ibid.).
*****
Notre recherche concerne la comorbidité entre la psychopathie et les troubles de l’Axe
II. Le terme de comorbidité se réfère à la co-occurrence de trouble indépendant, chacun ayant
sa propre étiologie, pathologie et implication en terme de traitement (Feinstein, 1970). Nos
critères d’exclusion (troubles psychotiques avérés au moment de la passation ainsi que retard
mental) ont été évalués à partir du M.I.N.I (Lecrubier, Weiller, Hergueta, Amorin, Bonora &
Lépine, 1998) et de la WAIS (Gregoire, 2001). Nous allons donc dans la partie suivante traiter
des liens entre la psychopathie et les troubles mentaux majeurs (Axe I du DSM-IV). Les liens
entre psychopathie et niveau intellectuel seront discutés après (pp. 53-55).
*****
I-A-3) Psychopathie et troubles mentaux majeurs
Les troubles de l’Axe I du DSM-IV font référence aux syndromes cliniques (troubles
de l'humeur, anxieux, consommation de substances, troubles psychotiques, etc.). Le M.I.N.I.
nous a permis d’évaluer les troubles de l’Axe I (cf. tableau 3).
37
Les troubles addictifs sont associés à la délinquance et la criminalité (Timmerman &
Emmelkamp, 2001) ainsi qu’à la gravité de la psychopathie en terme de score total (Pham,
Malingrey, Ducro & Saloppé, 2007). Associés aux troubles psychiatriques majeurs, ils posent
de plus en plus la question du double diagnostic (de Beaurepaire, 2007) en tout cas chez les
arrivants en prison.
Tableau 3- Modules du M.I.N.I. (Lecrubier et al., 1998), outil permettant d’évaluer les
troubles de l’Axe I.
MODULES
A. Episode Dépressif Majeur
A’. EDM avec caractéristiques mélancoliques
B. Dysthymie
C. Risque suicidaire
D. Episode (hypo-)maniaque
E. Trouble panique
F. Agoraphobie
G. Phobie sociale
H. Trouble Obsessionnel Compulsif
I. Etat de Stress Post-Traumatique
J. Alcool (dépendance / abus)
K. Drogue (dépendance / abus)
L. Troubles psychotiques
M. Anorexie mentale
N. Boulimie
O. Anxiété généralisée
P. Trouble de la personnalité antisociale
Hildebrand et de Ruiter (2004) s’attendaient à ce que les scores à la PCL-R soient
négativement corrélés avec les troubles de l’Axe I excepté pour la consommation d’alcool et
de drogues. Sur 98 patients, 88% présentaient au moins un diagnostic de l’Axe I incluant la
consommation de drogues ou d’alcool. Leurs résultats suggèrent qu’un haut score de
psychopathie tend à être associé positivement à la consommation de substance de l’Axe I, et
négativement avec la schizophrénie et ses variantes (paraphilies) ainsi qu’avec les autres
troubles de l’Axe I excepté la consommation de substances. La forte prévalence de la
consommation de substance est en accord avec la plupart des autres études avec des patients
délinquants (Hart & Hare, 1989 ; Stålenheim & Von Knorring, 1998 ; Timmerman &
Emmelkamp, 2001). Seulement 5% de ces patients ont été diagnostiqués comme ayant un
diagnostic sur la vie entière de trouble de l’humeur, ce qui est assez faible comparé aux autres
38
études similaires (Côté & Hodgins, 1992 ; Hart & Hare, 1989 ; Stålenheim & Von Knorring,
1996). Par exemple, Timmerman & Emmelkamp (2001) ont trouvé 55% de troubles affectifs
sur 37 patients allemands. Cependant, selon Eaves, Tien, & Wilson (2000) cités par
Hildebrand et de Ruiter (2004), le taux de prévalence des troubles affectifs se situe entre 3 et
25% dans différents échantillons.
L’ensemble des résultats d’une étude de Pham, Malingrey, et al. (2007) soutient la
spécificité du diagnostic de psychopathie par rapport aux troubles mentaux graves tels que les
troubles psychotiques, les troubles anxieux et les troubles de l’humeur. Les trois diagnostics
qui corrèlent avec la PCL-R sont l’abus/dépendance aux drogues, le trouble de conduite et le
jeu pathologique. Ces diagnostics sont davantage corrélés à la composante impulsive et
antisociale de la psychopathie. De plus, les résultats suggèrent une discontinuité
psychopathologique entre les quatre niveaux (1-9 ; 10-19 ; 20-29 ; 30-40) de psychopathie
préalablement définis. Les scores de psychopathie sont relativement indépendants des
troubles mentaux graves (Hildebrand & de Ruiter, 2004). Ces résultats confirment plutôt la
spécificité du diagnostic de psychopathie à partir d’un point de coupure de 30, alors que la
classe incluant les scores de 20 à 30, numériquement plus nombreuse, présente une
importante comorbidité psychiatrique qui complique le diagnostic différentiel des praticiens
de terrain. Le diagnostic de psychopathie, représenté par la dernière classe, constituerait plutôt
une entité, un mode d’organisation assez spécifique.
Il existe des relations controversées entre les troubles anxieux et la psychopathie
(Widiger, 2006). Cleckley incluait dans ses critères originaux de la psychopathie « une
absence de nervosité » ou de « manifestations psychonévrotiques ». Toutefois, il existe des
sujets psychopathes qui présentent de l’anxiété et parfois une pathologie dépressive associée.
De même, on retrouve chez les personnes souffrant d’un trouble de la personnalité antisociale
de grands taux de prévalence de troubles anxieux dans les études épidémiologiques (Swanson,
Bland & Newman, 1994), ce qui amène Dahl (1998) à suggérer que Cleckley (1941) avait tort
quand il affirmait que les psychopathes ne montrent pas d’anxiété manifeste. Les traits de
froideur émotionnelle de la psychopathie ont été un temps négativement corrélés avec les
mesures d’anxiété (Harpur, Hare, & Hakstian, 1989), mais les psychopathes rendent compte
cliniquement de hauts niveaux d’anxiété (Schmitt & Newman, 1999). Quelques chercheurs
ont par conséquent recommandé d’inclure comme critère une faible anxiété pour identifier les
individus psychopathes (Brinkley, Newman, Widiger, & Lynam, 2004 ; Schmitt & Newman,
1999). L’anxiété-trait et l’anxiété-état sont associées positivement à la dimension de
39
comportement antisocial de la psychopathie (Hale, Goldstein, Abramowitz, Calamari, &
Kosson, 2003). Selon Lovelace et Gannon (1999), il existe en revanche un lien inverse entre
les deux construits cliniques que sont la psychopathie et la dépression.
Blackburn, Logan, Donnelly & Renwick (2003) étudient la comorbidité entre les
troubles de l’Axe II, la psychopathie et les troubles de l’Axe I chez des patients en hôpital de
haute sécurité en Angleterre et en Ecosse. Une majorité des patients identifiés cliniquement
comme présentant des troubles de l’Axe I (en premier lieu) présentaient aussi des troubles de
la personnalité (Axe II et psychopathie PCL-R). Inversement, presque tous ceux identifiés
cliniquement comme présentant des troubles de la personnalité en premier lieu avaient
présenté un ou des troubles de l’Axe I dans le passé et la moitié d’entre eux continuent à les
présenter. Une minorité de patients présentant des troubles de l’Axe I n’a pas de troubles de la
personnalité associés. Certains modèles (Stein, Hollander, & Skodol, 1993) qui suggèrent des
relations causales entre troubles de la personnalité et troubles de l’Axe I ont été proposés pour
expliquer la comorbidité entre ces troubles (modèles de vulnérabilité, de la continuité, de la
complication, de « co-effet » et de l’atténuation).
Dans notre recherche, les sujets présentant des troubles de l’humeur et des troubles
psychotiques avérés (aigus) au moment de la passation ont été exclus, les manifestations de
ces troubles risquant d’invalider le protocole.
*****
Nous avons abordé la psychopathie sous différentes approches en précisant ses
caractéristiques et différents points de vue.
La psychopathie est un concept plutôt complexe. Le diagnostic de comorbidité est
important car l’étiologie, le développement, le traitement et l’issu d’un trouble sont influencés
lourdement par la présence d’une comorbidité. De plus, la nature et l’étendue de la cooccurrence est problématique concernant la conceptualisation d’un trouble mental comme
ayant des conditions cliniques distinctes (Lilienfield, Waldman, & Israel, 1994 ; Widiger &
Clark, 2000). L’objectif est alors d’examiner les liens entre la psychopathie et les troubles de
l’Axe II du DSM-IV en portant un intérêt particulier au trouble de la personnalité Borderline.
Notre objectif rejoint le questionnement sur l’hétérogénéité de la psychopathie et ses
implications notamment en terme de prise en charge. Les délinquants ne présentent pas un
pattern unique de trouble. La comorbidité s’accompagne de complications concernant la prise
40
en charge, la compliance et la coordination de service (Newman, Moffitt, Caspi, & Silva,
1998).
Cet objectif est donc surtout relatif au repérage de troubles de la personnalité associés
qui compliqueraient considérablement l’évolution des troubles (Pham-Scottez & Guelfi,
2003). Pourtant, si le trouble psychopathique est conçu comme présentant des degrés
variables de gravité et d’intensité, certains individus peuvent être abordés par différents types
de traitement (Meloy, 2000). Selon Kernberg (1984), la qualité des relations d’objet et celle
des fonctions du Surmoi sont des repères pronostiques pour le traitement psychanalytique et
psychothérapique des patients présentant un trouble de la personnalité Borderline ou
narcissique. La capacité de nouer une relation, d’avoir accès à un sentiment de culpabilité. La
présence et l’importance d’un comportement antisocial sont aussi un indicateur pronostic.
L’angoisse et la souffrance peuvent aider à conduire et maintenir les patients dans leur
traitement.
Dans ce sens, il existe différentes recherches soulignant des variantes de la
psychopathie et différents types relatifs à l’association de troubles de la personnalité
différents. La partie suivante traite de ce sujet.
*****
41
I-B- Une ou des psychopathie(s) ?
Même si la psychopathie fait l’objet de nombreuses recherches, elle est aussi l’un des
plus controversé des syndromes psychopathologiques. Le DSM-IV (1994) ne fait apparaître la
psychopathie comme diagnostic. Le trouble Antisocial représente une catégorie hétérogène au
regard de l’étiologie ainsi que des caractéristiques psychologiques qui donnent lieu à des
patterns variés de comportements déviants socialement, ceux-ci permettant de rencontrer les
critères du DSM-IV. Ces personnalités antisociales divergent donc dans leurs symptômes
mais aussi dans leur étiologie.
Le statut catégoriel versus dimensionnel de la psychopathie demande à être clarifié
(Lilienfield, 1998). Ceci est très important concernant les implications pour la
conceptualisation et l’évaluation de ce syndrome. Certaines innovations méthodologiques ont
amélioré notre capacité à opérationnaliser de manière fiable et valide ce construit. C’est
notamment ce qui a déjà permis la différenciation psychopathie/personnalité Antisociale du
DSM-IV.
I-B-1) Catégorie versus continuum ?
La psychopathie est-elle une catégorie distincte de troubles de la personnalité (Harris
et al., 1994), ou s’inscrit-elle dans un continuum (dimension de caractéristiques de
personnalité) (Blackburn & Coid, 1998) ? Il existe un chevauchement entre les troubles du
cluster B et la psychopathie.
Même si nous nous focalisons sur les troubles du cluster B dans cette présente étude,
tous les troubles de l’Axe II ont été évalués dans notre recherche. Les caractéristiques en sont
donc présentées en annexe 1 (cf. pp. 189-190). Ces troubles sont stables et extrêmement
résistants à toute intervention (contrairement aux troubles de l'Axe I, qui peuvent avoir des
périodes de rémission). Cette stabilité est un des critères définissant le trouble de la
personnalité. Pour le diagnostic, un nombre de critère minimum est requis ainsi que les
critères généraux pour le trouble de la personnalité c'est-à-dire que : « un trouble de la
personnalité est un mode durable des conduites et de l’expérience vécu qui dévie notablement
42
de ce qui est attendu dans la culture des individus, qui est envahissant et rigide, qui apparaît
à l’adolescence ou au début de l’âge adulte, qui est stable dans le temps et qui est source
d’une souffrance ou d’une altération du fonctionnement (DSM-IV, 1996 p. 739).»
En 2004, soixante pour cent de la population carcérale présentaient des troubles de la
personnalité, particulièrement du cluster B de l’Axe II du DSM-IV (histrionique, narcissique,
borderline et antisocial) et parmi ceux-ci les troubles Antisocial et Borderline sont les plus
fréquents (Fallissard & Rouillon, 2004).
I-B-1-a) La psychopathie et les troubles Antisocial et Narcissique
Hart et Hare (1997) soulignent la présence d’un chevauchement entre psychopathie et
narcissisme. La plupart des sujets psychopathes sont narcissiques, même si tous les
narcissiques ne sont pas psychopathes. Selon MacKay (1986), le trouble Antisocial serait un
sous-groupe de la pathologie narcissique, ce qui appuie la connexion conceptuelle entre les
troubles. Il serait donc nécessaire de considérer la psychopathie d’une manière
dimensionnelle. Etant donné le chevauchement dans les critères diagnostiques des troubles du
cluster B (Holdwick, Hilsenroth, Castelbyry, & Blais, 1998 ; Rasmusen, Storsaeter, &
Levander, 1999), l’approche catégorielle est discutée et ces troubles pourraient être alors
conceptualisés comme des patterns (ou modèles) réguliers de traits co-variants plus que
comme des catégories distinctes (Blackburn & Coid, 1999).
Les troubles de la personnalité Antisociale et Narcissique sont les deux troubles les
plus rapportés à la psychopathie (Widiger, 2006). Le trouble Narcissique est souvent associé
au Facteur 1 avec le trouble Antisocial mais, contrairement à ce dernier, ne tend pas à être
fortement associé au Facteur 2. Des points de vue psychodynamiques du narcissisme
suggèrent quelques caractéristiques communes avec la psychopathie (Gacono, Meloy, &
Berg, 1992) et ils peuvent être vu selon un continuum. La PCL-R montre un pattern
d’association clair et attendu avec les troubles de l’Axe II : un haut score de psychopathie
(PCL-R>30) est fortement et significativement associé au trouble de la personnalité
antisociale. Le lien entre psychopathie et trouble antisocial est asymétrique (Hare, 1996) : la
plupart des psychopathes reçoivent le diagnostic de trouble de la personnalité antisociale mais
la plupart des sujets présentant un trouble de la personnalité Antisociale ne sont pas
psychopathes.
43
Concernant le trouble Antisocial, le DSM-IV (1994, 1996) fait plutôt référence aux
comportements qu’aux traits de personnalité considérés comme centraux dans la psychopathie
(Millon, 1981 ; Hare, Hart, & Harpur, 1991). Il classe davantage les personnes en fonction de
leurs actions plutôt que par leurs dispositions ou traits psychologiques. Les critères retenus
relatifs à un ensemble de comportements antisociaux (cf. encadré 1), non nécessairement
criminels et cela à partir de l’âge de 15 ans (dans un souci de stabilité des comportements
antisociaux), sont les suivants:
Encadré 1- Critères de la personnalité Antisociale du DSM-IV (APA, 1996, pp. 762-763)
Personnalité Antisociale
A. Mode général de mépris et de transgression des droits d’autrui qui survient depuis l’âge de 15 ans, comme en
témoignent au moins trois des manifestations suivantes :
1- Incapacité à se conformer aux normes sociales qui déterminent les comportements légaux comme l’indique
la répétition de comportements passibles d’arrestation ;
2- Tendance à tromper par profit ou par plaisir, indiquée par des mensonges répétés, l’utilisation de
pseudonymes ou des escroqueries ;
3- Impulsivité ou incapacité de planifier à l’avance ;
4- Irritabilité ou agressivité, indiquées par la répétition de bagarres ou d’agressions ;
5- Mépris inconsidéré pour sa sécurité ou celle d’autrui ;
6- Irresponsabilité persistante, indiquée par l’incapacité répétée d’assumer un emploi stable ou d’honorer des
obligations financières ;
7- Absence de remords indiquée par le fait d’être indifférent ou de se justifier après avoir blessé, maltraité ou
volé autrui.
B. Age au moins égal à 18 ans.
C. Manifestation d’un trouble des conduites débutant avant l’âge de 15 ans.
D. Les comportements antisociaux ne surviennent pas exclusivement pendant l’évolution d’une schizophrénie ou
d’un épisode maniaque.
Dans ce sens, même si le trouble Antisocial est corrélé avec le score total à la PCL-R,
il est davantage corrélé au Facteur 2 et donc à la dimension comportementale de la
psychopathie qu’au Facteur 1 (Hare, 1991 ; Hare et al. 1991). Il s’agit donc bien là de la
principale différence entre trouble Antisocial et psychopathie. Beaucoup de recherches ont
étudié les différences entre ces deux troubles mais il est aussi important d’en voir les
similarités, les zones de recouvrement et leurs correspondances. Ainsi, les items de la PCL-R
centraux pour le Facteur 1, à savoir la manipulation et le mensonge pathologique ainsi que le
manque de remords, de sentiment de culpabilité et l’échec à assumer sa responsabilité, sont
inclus dans les critères du DSM-IV.
44
Nous avons précisé les caractéristiques des personnalités Antisociale, il est également
nécessaire de préciser les caractéristiques de la personnalité Narcissique (Encadré 2) et de la
personnalité Borderline (Encadré 3).
Encadré 2- Critères de la personnalité Narcissique du DSM-IV (APA, 1996, p. 775)
Personnalité Narcissique
Mode général de fantaisies ou de comportements grandioses, de besoin d’être admiré et de manque
d’empathie qui apparaissent au début de l’âge adulte et sont présents dans des contextes divers comme en
témoignent au moins cinq des manifestations suivantes :
1- Le sujet a un sens grandiose de sa propre importance, par exemple surestime ses réalisations et ses
capacités, s’attend à être reconnu comme supérieur sans avoir accompli quelque chose en rapport ;
2- Est absorbé par des fantaisies de succès illimité, de pouvoir, de splendeur, de beauté ou d’amour
idéal ;
3- Pense être « spécial » et unique et ne pouvoir être admis ou compris que par des institutions ou des
gens spéciaux et de haut niveau ;
4- A un besoin excessif d’être admiré ;
5- Pense que tout lui est dû : s’attend sans raison à bénéficier d’un traitement favorable et à ce que ses
désirs soient automatiquement satisfaits ;
6- Exploite l’autre dans les relations interpersonnelles : utilise autrui pour parvenir à ses propres fins ;
7- Manque d’empathie, n’est pas disposé à reconnaître ou à partager les sentiments et les besoins
d’autrui ;
8- Envie souvent les autres et croient que les autres l’envient ;
9- Fait preuve d’attitudes et de comportements arrogants et hautains.
I-B-1-b) La psychopathie et le trouble Borderline.
Stånlenheim & von Knorring (1998) suggèrent que le trouble Borderline est plus
étroitement lié à la psychopathie que le trouble Antisocial. Une des raisons pourrait être que la
psychopathie est largement plus définie que le trouble Antisocial limité aux manifestations
comportementales. De plus, les critères diagnostiques du trouble Borderline comprennent des
symptômes de troubles affectifs et de difficultés interpersonnelles, ainsi que l’impulsivité, qui
peuvent ressembler aux déficits affectifs et interpersonnels chez les sujets psychopathes.
Selon une étude récente (Black, Gunter, Allen, Blum, Arndt, Wenman, & Sieleni, 2007), le
fait que, en prison, les hommes rencontrent les critères du trouble borderline est un indicateur
fort. Ce trouble pourrait être inclus dans le diagnostic différentiel particulièrement quand les
plaintes concernent l’instabilité, un mauvais contrôle de la colère, impulsivité ou des épisodes
d’auto–agression.
45
Les critères de la personnalité Borderline selon le DSM-IV sont présentés dans
l’encadré suivant.
Encadré 3- Critères de la personnalité Borderline du DSM-IV (APA, 1996, pp. 767-768)
Personnalité Borderline
Mode général d’instabilité des relations interpersonnelles, de l’image de soi et des affects avec une
impulsivité marquée, qui apparaît au début de l’âge adulte et est présent dans des contextes divers, comme
en témoignent au moins cinq des manifestations suivantes :
1- Efforts effrénés pour éviter les abandons réels ou imaginés (NB. Ne pas inclure les comportements
suicidaires ou les auto-mutilations énumérées dans le critère 5) ;
2- Mode de relations interpersonnelles instables et intenses caractérisé par l’alternance entre des positions
extrêmes d’idéalisation excessive et de dévalorisation ;
3- Perturbation de l’identité : instabilité marquée et persistante de l’image ou de la notion de soi ;
4- Impulsivité marquée dans au moins deux des domaines potentiellement dommageables pour le sujet (p.
ex. dépenses, sexualité, toxicomanie, conduite automobile dangereuse, crises de boulimie) (NB. Ne pas
inclure les comportements suicidaires ou les auto-mutilations énumérées dans le critère 5) ;
5- Répétition de comportements, de gestes ou de menaces suicidaires, ou d’automutilation ;
6- Instabilité affective due à une réactivité marquée de l’humeur (p. ex. dysphorie épisodique intense,
irritabilité ou anxiété durant habituellement quelques heures, rarement plus de quelques jours) ;
7- Sentiments chroniques de vide ;
8- Colères intenses et inappropriées ou difficultés à contrôler sa colère (p. ex. fréquentes manifestations de
mauvaise humeur, colère constante ou bagarres répétées) ;
9- Survenue transitoire dans des situations de stress d’une idéation persécutoire ou de symptômes
dissociatifs sévères. (ce neuvième critère a été ajouté au DSM-IV)
Hildebrand et de Ruiter (2004) ont travaillé sur la psychopathie telle qu’évaluée par la
PCL-R (avec un cut of de 30) en relation avec les troubles des Axes I et II du DSM-IV sur
une population en hôpital sécuritaire. Ils s’attendaient à ce que les scores à la PCL-R soient
positivement corrélés avec les troubles du cluster B et négativement avec les troubles du
cluster C. Selon eux, le pourcentage élevé de patients présentant un trouble de la personnalité
est comparable avec les taux de prévalence dans les autres échantillons européens de même
type, c’est-à-dire entre 60 et 80% (Blackburn, Crellin, Morgan, & Tulloch, 1990 ; Coid,
1992 ; Kullgren, Grann, & Holmberg, 1996).
46
Ainsi, la comorbidité est fréquente entre les différents troubles de la personnalité. Les
relations entre ces troubles sont alors complexes d’autant plus que la comorbidité entre les
troubles de la personnalité et d’autres troubles psychiatriques (troubles de l’humeur, troubles
anxieux, troubles liés à la consommation de substances) est élevée. Selon Pham-Scottez et
Guelfi (2003), « la comorbidité d’un trouble de la personnalité avec un autre trouble
psychiatrique pourrait compliquer l’évolution de ce trouble psychiatrique (p. 729) ».
La comorbidité entre psychopathie et troubles de l’Axe II se trouve à l’origine, nous
pensons, des variantes de la psychopathie comme nous allons l’évoquer dans la partie
suivante.
I-B-2) Variantes de la psychopathie
I-B-2-a) Sous-types de psychopathie
Blackburn et Coid (1999) suggèrent qu’il existe six sous types de délinquants
violents : antisocial-narcissique, paranoïde-antisocial, borderline-antisocial-passif-agressif,
borderline, compulsif-boderline et schizoïde. Les trois premiers n’étaient pas différents par
rapport à la PCL-R mais scoraient plus forts que les autres groupes (respectivement PCL-R =
32,08 ; 32.60 ; 31,62 ; 20,80 ; 17,62 ; 17,85) et plus d’un quart était psychopathe (76%, 80%,
77% respectivement).
Murphy & Vess (2003) ont observé dans une population d’un hôpital sécuritaire de
haute sécurité que les psychopathes manifestaient des différences de comportements
conséquentes. La psychopathie est vue comme englobant différents traits de personnalité qui
vont déterminer ses manifestations cliniques. En effet, ceci dépend de la proéminence de
certains de ses aspects. La PCL-R de Hare et son modèle en deux facteurs montre bien la
prévalence du Facteur 1 par rapport au Facteur 2 en terme d’utilité clinique et de spécificité de
diagnostic. Le score suggère aussi une hétérogénéité et différents degrés de psychopathie ou
donc différents sous-groupes. Cette étude met donc en évidence des sous-types de
psychopathie notamment le psychopathe borderline (dans ce sens, en 1993, Meloy & Gacono
font une étude de cas présentant un psychopathe borderline). Elle suggère l’existence de
quatre sous-types de psychopathes : les narcissiques (centré sur eux-mêmes et supérieurs), les
borderline (labiles, impulsifs), les sadiques (délibérément cruels) et les antisociaux (les
criminels sans remords). Ils sont en effet apparus comme un groupe hétérogène qui, tout en
partageant un noyau de caractéristiques de personnalité, manifestait des variabilités
47
comportementales substantielles. En fonction de ces sous-types, le traitement et la prise en
charge seront différents, aussi bien pour la sécurité du personnel qui travaille avec eux aussi
bien que pour la société dans laquelle ils sont susceptibles de retourner. En effet, une grande
importance est portée à l’identification des patients psychopathiques qui pourraient poser des
risques pour le milieu thérapeutique, la sécurité de l’institution et de la société.
I-B-2-b) Variantes primaires et secondaires
Skeem, Poythress, Edens, Lilienfield et Cale (2003) explorent le fait que la
psychopathie a toujours été vue comme un construit relativement uniforme mais que certaines
théories contemporaines montrent qu’il peut être en réalité hétérogène. Leurs analyses
suggèrent qu’il existe des variantes primaires et secondaires de la psychopathie. D’un point de
vue clinique, en 1941 déjà, Karpman faisait cette distinction entre les psychopathes primaires
et secondaires.
La méfiance, la manipulation, l’externalisation de la faute, l’incapacité à inhiber ses
impulsions sont communes à ces deux variantes de psychopathie. Toutefois, ces variantes
peuvent être distinguées selon l’importance des déficits affectifs, de l’impulsivité, de
l’anxiété-trait et caractéristiques des troubles de la personnalité borderline et narcissique. Ces
variantes diffèrent aussi au niveau du modèle de violence et de la réponse au traitement.
Skeem et al. (2003) soulignent le fait que, si des variantes de la psychopathie peuvent être
identifiées de manière fiable et basées sur des preuves empiriques, la psychopathie pourrait
passer d’une forme globale à un ensemble de construits plus spécifiques qui améliorerait notre
capacité à comprendre, gérer et traiter ces individus qui sont en général perçus comme
dangereux et « intraitable ». Selon ces auteurs, des individus présentant le trouble antisocial
peuvent différer considérablement les uns des autres au niveau de la personnalité et du
comportement. Ainsi, le fait que tous les psychopathes ne récidivent pas indique qu’il existe
une variabilité comportementale (en cela, notamment, se différencient les psychopathes
« successfull » et « non successful »). Ils ont cherché à identifier les dimensions qui
pourraient le mieux distinguer la variante primaire de la variante secondaire, la différence la
plus importante étant étiologique. La différenciation se fait également en terme d’impulsivité.
Ces différences correspondent aussi à celles que l’on peut observer en matière de réponse aux
formes traditionnelles de traitements. D’autres domaines peuvent les distinguer, ces
différences se situant aussi souvent dans leurs capacités affectives: par exemple, les Facteurs
1 et 2 de la PCL-R sont des dimensions qui peuvent les distinguer, ainsi que le névrotisme ou
48
l’anxiété-trait ou encore la constellation de traits qui caractérisent le trouble de la personnalité
Borderline. Ce chevauchement caractériserait l’impulsivité, l’anxiété, les réactions colériques
du psychopathe secondaire de Blackburn (selon Blackburn & Coid en 1999, le psychopathe
primaire correspond au sous-type narcissique-antisocial et le secondaire aux sous-types
borderline-antisocial-passif-agressif et paranoïde-antisocial).
Ainsi et pour résumer, les psychopathes primaires étaient perçus comme ayant un
déficit constitutionnel et se montrant cruels, insensibles, égocentriques, sans anxiété et avec
peu d’affectivité. Les particularités seraient d’origine génétique plus qu’environnementale. Le
psychopathe primaire a échoué à développer des sentiments de conscience et d’empathie non
pas à cause d’un manque d’expérience sociabilisante mais plutôt d’une particularité
psychologique intrinsèque qui fait de lui quelqu’un de très difficilement socialisable. De plus,
à partir de la PCL-R, des données montrent qu’il est davantage lié au narcissisme. Les
psychopathes primaires sont plus égocentrés, recherchent plus d’attention et sont plus
manipulateurs alors que les secondaires se caractérisent plus par l’hostilité, la dépressivité et
l’antisociabilité (Ross, Bye, Wrobel, & Horton, 2008).
La prévalence des agressions combinées serait trois fois plus élevées chez les sujets
psychopathes à tendance primaire que chez les psychopathes à tendance secondaire ce qui
renforce la validité du construit de sous-types de psychopathie (Falkenbach, Poythress, &
Creevy, 2008). Le psychopathe primaire a davantage recours à la violence instrumentalisée
(au niveau des types de comportement criminel et violent) et moins à la violence réactive,
colérique (Patrick & Zempolich, 1998 ; Skeem et al., 2003). Il existe aussi des personnes à
haut niveau de « symptômes primaires » qui ne sont pas violents physiquement car ils arrivent
à obtenir ce qu’ils veulent par la manipulation et n’ont pas besoin d’user de la force.
A contrario, le comportement des psychopathes secondaires résulterait plus de facteurs
environnementaux (ex. traumatisme, niveau social désavantagé, parents « défectueux »
rejetant ou au contraire parents trop indulgents…) et ils expérimenteraient plus de capacités
d’anxiété et d’émotions. Ainsi, les psychopathes secondaires sont moins récalcitrants au
niveau du traitement. Ils manifestent plus de caractéristiques borderline, d’un fonctionnement
interpersonnel plus pauvre comme l’irritabilité, le retrait, peu d’autoritarisme (…). Ils
manifestent également plus de troubles mentaux majeurs que les psychopathes primaires
(Skeem, Johansonn, Andershed, Kerr, & Louden, 2007) et tendraient plus vers les réactions
hostiles et réactives (Falkenbach et al., 2008).
49
Dans une autre perspective, Lykken (1995) rend compte de ces deux variantes
différemment à partir des concepts de Behavioral Inhibition System (BIS) et Behavioral
Activation System (BAS). Selon un déficit de l’un ou l’autre de ces systèmes, le BIS et le BAS
contribueraient au comportement antisocial. Plus spécifiquement, un BIS faible représenterait
le déficit constitutionnel du psychopathe primaire et un BAS « suractif » seraient à la base du
déficit du psychopathe secondaire.
Une autre approche de Hicks, Markon, Patrick, Krueger, & Newman (2004) permet de
distinguer les psychopathes en sous-types en terme de structure de personnalité qui devrait
refléter différentes étiologies. Leurs profils sont à mettre en parallèle avec les variantes
primaires et secondaires en terme de variables de personnalité (réactivité au stress, anxiété,
émotionnalité négative, contrôle) et de variables d’histoire de vie (conflits enfants parents,
alcool…). Ces profils ont été obtenus à partir de 96 détenus psychopathes (PCL-R ≥30) : les
psychopathes émotionnellement stables (psychopathe primaire bas niveau d’anxiété) et les
psychopathes agressifs (haut niveau d’anxiété, impulsivité et agressivité). Le Facteur 1 est
corrélé positivement avec le narcissisme et négativement avec le névrosisme et
l’émotionnalité négative. A contrario, le Facteur 2 est corrélé positivement avec le
névrosisme, l’émotionnalité négative, l’impulsivité et la recherche de sensation.
Concernant la psychopathie, la PCL-R (Hare, 1991) reflète déjà la possibilité d’avoir
des sous-groupes de délinquants criminels avec ses deux facteurs. Cooke et Mitchie (2001)
quant à eux suggèrent que la PCL-R est sous-tendue par trois facteurs. Comme vu
précédemment, les trois facteurs révèlent un style interpersonnel arrogant et trompeur ainsi
qu’un déficit affectif. Certains items ont été éliminés du domaine de la déviance sociale pour
créer un style comportemental impulsif et irresponsable.
En résumé, les variantes primaires et secondaires de la psychopathie décrites iraient
dans le sens de notre problématique en correspondant à différents profils en fonction de
l’association de troubles de l’Axe II et de la psychopathie. La variante secondaire nous
intéresse alors particulièrement étant données les manifestations du fonctionnement
borderline qui y sont rapprochées.
50
I-B-2-c) Différence conceptuelle entre les auteurs européens et américains
Les modèles de Bergeret (1974), Kernberg (1984) et Meloy (2000) font référence aux
relations objectales, à l’anxiété, aux mécanismes de défense et aux processus de pensée. Il
existe cependant des différences, ce qui a un impact sur la manière dont la psychopathie est
vue et placée dans le spectre de la psychopathologie (Husain, 1995).
La différence entre sujets psychopathes européens et américains a donné lieu plusieurs
fois à réflexion (Husain, 1995 ; Lamothe, 2001). Selon Husain (1995), la recherche des
modèles permettant la prévision du comportement favorise une approche quantitative du côté
américain alors qu’en Europe, le souhait de souligner les interrelations et dérivés vus à partir
des observations cliniques favorise une approche qualitative. Les Européens et les Américains
s’entendent sur la notion de fonctionnement psychopathique : relations d’objet marquées par
la recherche de pouvoir et de contrôle, la lutte contre la dépendance et l’anxiété anaclitique,
les mécanismes de défense tels que l’identification projective, l’identification à l’agresseur, le
déni et le clivage, et le non-investissement de la « vie mentale » et de la connaissance en
faveur de l’hyper-investissement de l’action (Ibid.).
Pour Lamothe (2001), les psychopathes français sont « plus volontiers borderline
avec une problématique abandonnique (p. 602)». Il existe tout de même des différences nettes
au niveau comportemental mais aussi au niveau des relations sociales ou des prises en charge
thérapeutiques.
Rossel et Merceron (cités par Husain, 1995) comprennent la psychopathie comme une
forme très archaïque de l’organisation de la personnalité parmi des conditions borderline.
Bergeret (1974), ainsi que Kernberg (1975), placent le caractère psychopathique parmi les
troubles narcissiques. Ces deux auteurs décrivent la dynamique narcissique essentielle des
psychopathes, point de vue que partage Meloy. Théoriquement, le modèle de Kernberg
suppose que chaque organisation de caractère, personnalité, peut trouver son expression dans
une structure névrotique, borderline ou psychotique (alors que Meloy rejette le caractère
psychopathique dans une structure névrotique à cause de l’évidente déficience du Surmoi
mais accepte cette existence à un niveau borderline et psychotique). Les auteurs européens
acceptent l’existence de traits psychopathiques dans des organisations psychotiques mais
n’incluent pas ces sujets dans leurs recherches, sachant que les processus psychiques soustendus sont de nature psychotiques d’où une différence structurale par rapport à ceux
rencontrés chez les sujets psychopathes état-limite.
51
Il existe donc des différences quant à la notion de psychopathie et de sélection des
échantillons de population : une sélection basée sur les actes psychopathiques pour Meloy
(composante comportementale), et pour Rossel et Merceron, une sélection basée sur le
fonctionnement psychique et l’organisation de la personnalité. Cette différence tendrait à
rejoindre le débat sur les deux approches de la psychopathie (cf. p. 33) : approche
comportementale versus approche basée sur la personnalité.
I-B-2-d) D’un point de vue culturel
Certaines recherches et théories cross-culturelles montrent que des éléments sociétaux
et contextuels peuvent modeler les manifestations de symptômes d’un trouble mental ou d’un
trouble de la personnalité à travers les cultures et les ethnies (Douglas, Vincent, & Eden,
2006).
Ainsi, il existerait une non équivalence entre des délinquants nord-américains et
écossais aboutissant à la recommandation de retirer cinq points à la PCL-R pour les écossais
(Cooke & Mitchie, 1999). Cooke et al. (2005) se sont alors attachés à évaluer la validité transculturelle de la psychopathie. Selon eux, il existe bien un biais culturel dans les estimations de
la PCL-R d’un point de vue métrique mais pas structural. La validité transculturelle est plus
forte sur certains symptômes liés au facteur de déficit émotionnel. Certains symptômes sont
plus utiles au niveau Nord-américain qu’en Europe (où les scores en général étaient plus bas).
Ceci est important pour la recherche et la clinique. Cependant, ces auteurs ne peuvent pas dire
comment la culture influence l’expression de la psychopathie. La psychopathie peut
s’exprimer différemment (par exemple entre psychopathes caucasiens et afro-américains) au
niveau cognitif et comportemental (Doninger & Kosson, 2001). Dans ce sens, la PCL-R est
équivalente métriquement en ce qui concerne des échantillons afro-américains et caucasiens
mis à part quelques différences concernant le facteur 2 au regard du niveau des traits sousjacents qui discriminent le plus (Sullivan & Kosson, 2006).
*****
En résumé, les sujets psychopathes diffèrent donc selon leur symptomatologie, les
modèles caractéristiques de violence et leur sensibilité au traitement. Ils peuvent aussi différer
selon le type d’agression qu’elle soit instrumentale ou plus impulsive, le sujet psychopathe
éprouvant de la colère. Cette distinction est importante en terme d’évaluation du risque et de
prise en charge. Il existe des variables modératrices qui peuvent aider à l’identification des
52
sous-types de psychopathie. Elles impliquent d’autres caractéristiques qui interagissent avec
les variables de la personnalité de façon à modeler leurs manifestations. De telles variables
pourraient être des indicateurs allant dans le sens d’une prise en charge et d’un traitement
réussis d’un patient. C’est notamment le cas de l’intelligence ou de l’anxiété.
I-B-3) Les variables modératrices du niveau de psychopathie et
les facteurs de risque.
I-B-3-a) Le niveau intellectuel
Heilbrun (1982) a examiné des modèles spécifiques de violence liés à l’état
psychopathique par des facteurs cognitifs considérés comme additionnels qui devraient être
reliés à l’intelligence et à l’expression d’agressivité physique. Parmi les 168 détenus, les
résultats suggèrent trois modèles cognitifs psychopathiques. Premièrement, un modèle
impliquant des psychopathes avec un faible Quotient Intellectuel et qui représenterait le
facteur de risque le plus fort pour la violence en combinant un faible contrôle des impulsions,
une faible empathie et un manque d’inhibition contre l’agression physique associé à une
faible sociabilité. Deuxièmement, un modèle relatif aux psychopathes sadiques hautement
intelligents ayant une plus forte empathie et un meilleur contrôle des impulsions. Il a été
suggéré que l'empathie favorise le renfort sadique en augmentant la conscience du
psychopathe de la douleur et de la détresse de la victime. Et troisièmement, les non
psychopathes à faible QI donc un renforcement du self ajouté à un faible contrôle des
impulsions et une faible capacité d’empathie les placent dans des situations hasardeuses qui
dépassent leurs compétences cognitives.
L’intelligence apparaissait donc comme modératrice entre la psychopathie et les
crimes violents, les psychopathes moins intelligents, faisant preuve uniquement de
dysfonctionnement dans le contrôle de l’impulsion par rapport aux détenus psychopathes
faisant preuve de plus d’intelligence. Heilburn distingue les psychopathes à faible intelligence
et les psychopathes sadiques hautement intelligents. Les sujets psychopathes plus intelligents
sont moins enclins à utiliser l'agression dans la mesure où ils peuvent utiliser leurs ressources
cognitives pour élaborer ou manigancer des moyens non-violents d'obtenir ce qu'ils veulent
(manipulation). Les moins intelligents ont recours à la violence pour compenser leurs
53
capacités inférieures à manipuler les autres à travers le langage (Heilbrun, 1982 ; Heilbrun &
Heilbrun, 1985). Les hypothèses sont que les psychopathes les plus intelligents ne sont pas
représentés dans les échantillons de chercheurs car ils réussissent dans la société alors que les
psychopathes moins intelligents sont sur-représentés. Ces psychopathes dits « successfull »
(termes aussi repris par Skeem et al., 2003) pourraient néanmoins avoir la même propension à
la violence que les non psychopathes mais seraient moins appréhendés pour de tels actes.
I-B-3-b) L’anxiété et l’attachement
Ces deux variables et le fait qu’elles soient potentiellement modératrices nous
intéresse particulièrement pour ce qui est de l’un de nos objectifs qui est d’évaluer l’impact du
trouble Borderline sur le niveau de psychopathie, ces variables étant caractéristiques du
fonctionnement borderline. Ainsi, selon Meloy (2001), l’anxiété « témoigne d’une capacité à
développer des relations avec l’objet internalisé et à se sentir directement concerné par ses
propres actions et celles d’autrui (p. 568) ». Elle est donc un moteur nécessaire pour tout
traitement efficace basée sur des méthodes relationnelles. Selon Cleckley (1976), une des
caractéristiques des psychopathes est qu’ils sont dans l’incapacité (basique) de ressentir de la
culpabilité, des remords ou de l’anxiété. Quand la sévérité de la psychopathie s’accentue
(chez des patients présentant une personnalité antisociale), l’anxiété s’atténue tout comme
l’impression personnelle de malaise qui peut motiver un patient à opérer un changement.
Dans ce sens, Alterman, McDermott, Cacciola, Rutherford, Boardman, McKay, & Cook
(1998) montrent que les sujets avec un score élevé de psychopathie mais aussi un degré
modéré d’antisocialité (comportements antisociaux et associabilité) avait de plus faibles
niveaux d’anxiété trait et état. Ceci n’est pas en accord avec certaines recherches qui vont
dans le sens de l’existence d’anxiété qui varie chez les sujets psychopathes. Par exemple,
Schmitt & Newman (1999), montrent que la psychopathie et l'anxiété covarient
indépendamment, au lieu de montrer une relation inverse. Ainsi, les psychopathes qui
ressentent de l'anxiété pourraient avoir d'autres caractéristiques d'antisocialité ou
présenteraient des aspects d'une autre personnalité ou des perturbations émotionnelles rendant
compte de l'expérience de cette émotion. Par exemple, un psychopathe qui aurait des éléments
borderline devrait ressentir de l'anxiété secondaire à la peur de l'abandon ou une incapacité à
tolérer l'ambiguïté. Selon d’autres études, les psychopathes criminels ne ressentent pas
l'anxiété ou l'inquiétude au même degré que les criminels non psychopathes (Hare &
Schalling, 1978). La distinction par rapport à l’anxiété est nécessaire puisqu’un sujet
54
ressentant de l’anxiété serait plus à même de répondre à des approches traditionnelles de
traitement et aux conséquences typiques d’un comportement inapproprié. Une façon de voir la
relation entre la psychopathie et les troubles du cluster B est de considérer la cooccurrence des
troubles du cluster B comme une variable modératrice.
L’attachement qui est relatif à la capacité à établir un lien émotionnel est aussi moins
fort chez les criminels psychopathes. Le manque d’attachement chez les sujets psychopathes
est manifeste et le rôle de l’anxiété est un important dans la différenciation des psychopathes
primaires et secondaires (Gacono & Meloy, 1991). De plus, les psychopathes sont beaucoup
plus détachés émotionnellement que les patients ayant une personnalité limite et narcissique
(Gacono et al., 1992). Ce détachement peut avoir une intensité variable chez les sujets ayant
une personnalité antisociale et représente un critère clinique stable et mesurable. La capacité à
former une alliance thérapeutique est aussi une mesure clinique de la capacité d’attachement
qui est un facteur de bon pronostic. Parmi une population de sujets psychopathes, différencier
les sujets ayant ce type de caractéristiques même a minima que l’on peut retrouver dans le
fonctionnement Borderline est important (Castro & Réveillère, 2004) car l’on sait à quel point
le traitement des sujets psychopathes est rendu difficile de par leur caractéristiques de
grandiosité et de manipulation (Pham, 2000).
I-B-3-c) L’âge
Le manque d’études longitudinales sur le long terme ne permet pas de tirer des
conclusions fermes concernant les changements dans les scores à la PCL-R pour un individu
sur sa vie entière. Les résultats suggèrent qu’entre 35 et 40 ans, se produirait une sorte de
« burnout », une réduction liée à l’âge au niveau du facteur 2 qui n’est pas évidente pour le
facteur 1 (Harpur & Hare, 1994). Quelques études suggèrent que le taux de crimes non
violents parmi les psychopathes descend entre 41 et 50 ans alors que le taux de crimes
violents est relativement constant (Hare, Forth, & Strachan, 1992). Il faut rester
précautionneux quant à ces données car ces recherches comprenaient peu de sujets
psychopathes âgés qui avaient réellement la possibilité de récidiver dans la communauté.
Toutefois, il a été suggéré que les scores à la PCL-R de trois groupes d’âge différents
variaient significativement avec un effet du facteur 2 (le facteur 1 n’avait pas d’effet) et la
fréquence du trouble Antisocial est moins élevée chez les détenus plus âgés (Huschzermeier,
Geiger, Köhler, Bruß, Godt, Hinrichs, & Aldenhoff, 2008).
55
I-B-3-d) Les facteurs de risque concernant la délinquance
Concernant les facteurs de risques, une étude de Harper et McLanahan (1998) a
montré que la structure familiale est le plus fort prédicteur de l’incarcération d’homme avant
l’âge de 30 ans. Concernant la délinquance sérieuse, le fait d’être élevé par une mère seule
peut présenter un risque même avec la présence d’un beau-père alors que les garçons élevés
seulement par leur père ne sont pas plus à risque que ceux élevés par leurs deux parents
biologiques. Une part du risque peut être attribuable à d’autres facteurs (mères adolescentes,
inégalités raciales, pauvreté, défaut d’éducation…) (Harper & McLanahan, 2004). Les
placements prolongés, l’abandon, les séparations parentales, les mauvais traitements, et les
punitions sévères et humiliantes sont souvent retrouvés et un parent antisocial et une mère à
personnalité histrionique est un facteur de risque (Beaune & Réveillère, 1996). Une cellule
familiale chaotique altère alors la constitution du Surmoi (Pham, 1998b). Des études montrent
que les jeunes et les adultes ayant un haut niveau de psychopathie, ont plus d’histoires
criminelles plus sérieuses et persistantes (Blackburn & Coid, 1998). Le retrait social est une
autre variable (Patrick & Zempolich, 1998). Ainsi, les psychopathes ayant un faible QI et
socialement retiré sont plus enclins à la violence.
*****
En résumé, la littérature souligne l’existence de liens complexes entre le trouble
Borderline et le niveau de la psychopathie : il y a été associé, certains auteurs ont proposé un
sous type de sujets psychopathes borderline ou encore une variante où le fonctionnement
Borderline a son importance. Les capacités d’anxiété et d’attachement citées dans les
variables modératrices se retrouvent également dans le trouble Borderline.
Le trouble Borderline est davantage décrit dans la partie suivante afin de cerner les
caractéristiques et les fonctionnements qui y sont inhérents. En effet, comme nous le verrons
dans les hypothèses, nous pensons que les troubles du cluster B ont un impact en augmentant
le niveau de psychopathie. Pour le trouble Borderline, du fait des caractéristiques anxieuses et
dépressives et ainsi que des capacités d’attachement présentes dans ce trouble, l’impact de ce
dernier serait particulier. Nous avons évoqué ci-dessus (première partie), le détachement
émotionnel qui est traditionnellement perçu comme caractéristique aux psychopathes mais
nous avons également évoqué la question de l’anxiété qui peut être présente chez certains de
ces sujets. L’association de ces troubles nous paraît donc intéressante à évaluer.
*****
56
I-C- Le trouble Borderline
Comme vu précédemment, des travaux de Kernberg aux Etats-Unis ou Bergeret en
France parlent déjà de rapprocher la psychopathie des états-limites. Senon (2005), quant à lui,
évoque la notion d’ « états limites à expression psychopathique ». Appréhender la
psychopathie de cette manière, c’est-à-dire, en tant qu’état limite à expression psychopathique
permet de disposer de repères cliniques indispensables à un travail médico-psychologique de
même qu'éducatif. Avant de continuer sur cette notion qui sera un peu plus développer ciaprès (p. 63), il nous paraît nécessaire d’aborder ce trouble plus en détail.
Nous aborderons dans un premier temps l’approche psychanalytique puis, dans un
deuxième temps l’approche clinique et empirique dans laquelle nous nous inscrivons
davantage.
I-C-1) L’Approche psychanalytique
I-C-1-a) Théorie
En psychanalyse, ce concept d’état-limite ou borderline prête à confusion. Ce qui n’est
ni de la névrose, ni de la psychose risque d’être « rangé » dans la catégorie « états-limites ».
Une multitude de termes ont été utilisés pour désigner ces états limites, perçus comme des
« formes pathologiques mal répertoriées et en marge autant des états névrotiques que des
états psychotiques (p. 218) » (Bergeret, 2000). De plus, comme tout symptôme psychiatrique
peut être présent chez un sujet Borderline (Darcourt, Chaine, & Guelfi, 2002), cela peut créer
une grande variabilité dans la présentation clinique et ceci est aussi à l’origine d’une partie
des difficultés diagnostiques concernant ce trouble (Gunderson, 2001).
La symptomatologie se présente de telle manière : instabilité constante, ambivalence
affective, émotions non contrôlées, changeantes, contradictoires, comportements capricieux,
peu fiables, impulsifs, imprévisibles, explosifs, opposants, manipulateurs, peuvent traverser
des périodes d’abattements et d’indifférences alternant avec des moments de colère et
d’agitation anxieuse (découragement, dépression, actes auto- ou hétéro-agressifs, ni
57
culpabilité ni sollicitude envers autrui, a contrario, rage froide, impressions de
dépersonnalisation, de déréalisation non hallucinatoires de brèves durées si elles surviennent).
Certains patients ont des difficultés à faire la différence entre penser et agir: penser ou dire,
c'est risquer de le faire. Du fait de l'immaturité développementale, la pensée ou l'impulsion
deviennent facilement de l'action. La qualité du maintien et de l’adaptation à la réalité les
différencie des patients psychotiques. Ce qui les différencie des patients névrotiques semble
être leur hyperesthésie relationnelle, l’intensité de leurs affects (surtout centrés sur une
problématique de dépendance avec crainte d’abandon, de rejet) ainsi que l’aspect sadomasochiste de certains de leurs comportements.
Au niveau de la confusion inhérente à ce concept, Kernberg (2001) explique que
l’état-limite a revêtu un grand nombre de termes et qu’ « il existe là un important groupe
d’organisation psychopathologique qui ont en commun une forme relativement stable et
plutôt spécifique de structure pathologique du Moi (p. 23-24) ». « Elle diffère d’une part de
ce qu’on trouve dans les névroses et les troubles de la personnalité moins sévères et, d’autres
part des psychoses ». Selon lui, le terme d’ « organisation limite » est meilleur puisqu’il rend
compte d’une organisation de la personnalité pathologique, stable et spécifique. Kernberg
s’attache donc à décrire l’organisation limite de la personnalité en terme d’analyse des aspects
descriptifs, structurels, génétiques et dynamiques en s’intéressant particulièrement à la
pathologie caractéristique des relations d’objet internalisées. Il distingue les troubles limites
des troubles narcissiques mais ne peut les décrire comme tout à fait indépendants l’un de
l’autre (la plupart des personnalité narcissiques présentent une organisation limite sousjacente).
La contribution de Kernberg (1975, 1976) a été fondamentale. Il propose une
classification hiérarchique allant de la normale vers les psychoses et les névroses dans lequel
le trouble Borderline se positionne en situation intermédiaire. Les caractéristiques sont la
carence d’organisation du Moi, la préservation de l’épreuve de réalité (ce qui les distingue des
patients psychotiques) et l’utilisation de mécanismes de défense peu structurés de type
psychotique.
Le trouble Borderline se situe comme un échec de la formation du Moi aux différentes
étapes de son évolution. Le sujet est la proie d’états contradictoires qui le dominent
alternativement en conséquence de leur relation d’objet qui sont sous l’égide du clivage. Les
patients Borderline sont instables et provocants dans la relation à autrui de par l’oscillation
rapide de leurs sentiments négatifs ou positifs. L’image du soi et de l’objet est suffisamment
58
différenciée pour que le Moi y trouve une certaine stabilité qui lui permet de garder le sens de
la réalité. Le clivage permet que les bons objets soient préservés de l’attaque des mauvais. Il
est alors à la fois la cause et la conséquence de la faiblesse du Moi. Leurs problèmes
d’identité les distinguent des sujets névrotiques. Outre la faiblesse du Moi, « le retour aux
processus primaires reste le témoin structurel le plus important de l’organisation limite de la
personnalité (p. 50)» (Kernberg, 2001). Selon Painchaud et Montgrain (1986) « la panoplie
des tableaux cliniques limites résulte de cette stabilité instable du Moi qui se tient à michemin de l’hyper-contrôle de la névrose et de la régression massive de la psychose. L’agir,
c’est dans ce contexte le recours à la réalité pour que celle-ci renvoie des indices qui
l’accrochent (p. 35) ».
Pour Bergeret (2000) également, les états-limites se trouvent « de plus en plus cernés
économiquement comme des organisations autonomes et distinctes à la fois des névroses et
des psychoses (p. 220) ». Il met l'accent sur la notion de personnalité afin de marquer la
différence d'avec la structure, ou alors souligne l'aspect caractériel de ces patients.
Selon lui, le danger immédiat contre lequel le sujet se défend est avant tout la
dépression. Il en va de même pour Painchaud et Montgrain (1986) qui parlent d’« une lutte
éperdue contre un vécu dépressif létal (p. 29) ».
Bergeret (2000) met l’accent sur un traumatisme psychique important, au sens affectif
du terme, qu’ont subi ces sujets au moment où s’engageait pour eux l’évolution oedipienne
normale, le Moi étant encore trop immature, inorganisé. Ce traumatisme constitue ce qu’il
appelle « un premier désorganisateur » de l’évolution psychique du sujet. L’état limite
apparaît alors comme une situation « aménagée » mais non fixée structurellement (p. 226).
Ainsi, certains sujets état-limite arrivent à se maintenir dans cette situation « aménagée ».
Certains au contraire décompenseront de manière brutale. Selon ses termes (Bergeret, 1974,
2000), c’est une « atteinte grave du narcissisme qui déclenche le processus, une hémorragie
narcissique : les perturbations du narcissisme sont au cœur de l’état-limite ». Il s’agit alors
une maladie du narcissisme avant tout.
*****
Nous verrons que ces aspects d’instabilité (relationnelle et affective), de dépressivité
ainsi que la présence d’éléments anxiogènes sont la base de l’approche empirique. Le poids
de la dimension impulsive y est également, comme nous allons le constater, un point
essentiel.
59
I-C-1-b) Les mécanismes de défenses du fonctionnement Borderline
Clivage, identification projective, idéalisation primitive, déni, omnipotence et
dévalorisation sont les mécanismes de défenses caractéristiques utilisés par les sujets
borderline, le clivage étant majeur. Ces mécanismes de défenses (excepté l’idéalisation
primitive) ont déjà été décrits pour la psychopathie (cf. pp. 27-28).
Kernberg (1975) entend le clivage de deux manières différentes. Il peut s’agir de
l’opposition entre des représentations contraires de l’objet, totalement bons ou totalement
mauvais ce qui entraîne donc une possible oscillation entre deux extrêmes. Un des ces objet
peu donc passer de manière complète et brutale d’un extrême à l’autre (ex. le renversement
soudain et complet de toutes les idées et sentiments à l'égard d'une personne particulière).
L’autre manière d’entendre le clivage est qu’il correspond à une séparation entre les rejetons
pulsionnels libidinaux et les rejetons pulsionnels agressifs (leur fusion permettant donc la
neutralisation de l’agressivité). Cela aboutit alors au manque de contrôle pulsionnel qui se
manifeste dans des jaillissements épisodiques de pulsions primitives. Le clivage n'apparaît pas
comme un mécanisme isolé mais s'associe à d'autres mécanismes tels que cités ci-dessous.
L'idéalisation primitive décrit la tendance à voir les objets externes comme totalement
bons, ceci afin qu'ils puissent protéger l'individu contre les « mauvais » objets et qu'ils ne
puissent être contaminés, abîmés ou détruits par sa propre agressivité ou par celle projetée sur
d'autres objets. Elle correspond à un besoin de protection contre le monde environnant.
L'identification projective a pour but principal ici d'externaliser les images de soi et
d'objet totalement mauvaises et agressives, sa principale conséquence étant le développement
d'objets dangereux, source de représailles, contre lesquels le patient doit se défendre.
Le déni, est plutôt utilisé ici dans ses manifestations primitives. Un exemple type
serait le « déni réciproque » de deux domaines indépendants de la conscience sur le plan
affectif. Ils ont parfois une connaissance intellectuelle du secteur dénié mais ne peuvent
l’intégrer au reste de leur expérience affective.
L'omnipotence et la dévalorisation, liées au clivage, représentent en même temps les
manifestations directes de l'utilisation défensive de l'introjection et de l'identification
primitive. Les patients qui utilisent ces deux mécanismes de défense vont tantôt du besoin
d'établir une relation de quête et de dépendance à un « objet magique » idéalisé, et tantôt à des
fantasmes ou à des conduites qui trahissent un sentiment profond d'omnipotence de leur part.
Ces deux aspects représentent leur identification à un objet « totalement bon », idéalisé et tout
60
puissant, qui est une protection contre les mauvais objets persécuteurs. A un niveau plus
profond, la personne idéalisée est traitée avec rudesse et de manière possessive comme une
extension du patient lui-même. Sous les sentiments d'insécurité, d'auto-critique et d'infériorité
que ces patients limites présentent, se trouve fréquemment des sentiments de grandeur et
d'omnipotence. La dévalorisation des objets externes est en partie le corollaire de
l'omnipotence; si un objet externe n'est plus source de satisfaction ou de protection, on le
rejette parce qu'il n'y avait au départ aucun amour réel pour l'objet. La dévalorisation des
objets significatifs du passé du patient a de sérieux effets préjudiciables sur les relations
d'objet internalisées et en particulier sur les structures impliquées dans la formation et
l'intégration du Surmoi.
I-C-2) L’approche descriptive clinique et empirique
I-C-2-a) Tableau clinique
Les caractéristiques borderline correspondent à un tableau clinique labile de
manifestations dépressives, de manifestations anxieuses, de manifestations d’allure
psychotique, de troubles du comportement et d’impulsivité (Chaine & Guelfi, 1999).
Premièrement, une des composantes essentielles est la fréquence et la tonalité particulière de
la dépression (Darcourt et al., 2002). Le patient est davantage en proie à un sentiment de
solitude, d’ennui, de vide, d’irritabilité, de désespoir avec une quasi absence de
ralentissement. Ainsi, cela rend compte plus d’une dysphorie que d’un manque d’élan vital,
de honte plus que de découragement et de rage plus que de tristesse. Les tentatives de suicides
sont très fréquentes, graves et en général imprévisibles (50% de tentatives de suicide (Ibid.)).
Deuxièmement, l’angoisse envahit le sujet de manière incontrôlable. Elle peut-être diffuse ou
« flottante » et être de nature « existentielle », de cohérence interne, de déréalisation,
d’abandon (etc). Troisièmement et sur le plan des manifestations d’allure psychotique, il peut
s’agir d’épisodes de déréalisation, de dépersonnalisation ou encore d’épisodes interprétatifs
avec éléments persécutifs. Enfin, on observe des comportements violents sans aucune
explication, capricieux, impulsifs, imprévisibles, explosifs, opposants, manipulateurs
(Darcourt, et al., 2002) et un aspect sado-masochiste de certains de leurs comportements.
Conduites à risque et auto-mutilations sont fréquentes. La qualité du maintien et de
l'adaptation à la réalité les différencie des patients psychotiques. Les dysfonctionnements
relationnels graves sont, malgré une certaine insertion professionnelle plus ou moins
61
satisfaisante, souvent à l'origine de multiples décompensations dépressives avec des passages
à l'acte suicidaire fréquents. La sévérité de l'impulsivité figure parmi les facteurs qui
différencient les troubles du cluster B, les troubles Borderline et Antisocial se différenciant
par leur plus grand niveau de sévérité (Kernberg, 1984, 1989). Selon Zanarini, Gunderson,
Frankenburg, & Chauncey (1989), une autre dimension est plus utile pour différencier le
trouble borderline des autres troubles de l'Axe II : la dimension cognitive ou «
micropsychotique » (pensée paranoïde, phénomène hallucinatoire, et dépersonnalisation).
Le trouble Borderline et le trouble Antisocial ont alors un certains nombre de points de
recouvrement (Paris, 1997) : en terme de symptômes, de dimensions de la personnalité sous
jacentes à leur phénoménologie, de prévalence, de facteurs de risque et de réponse au
traitement aussi bien que d’issue. L’impulsivité est marquée dans ces deux pathologies (et est
aussi caractéristiques des troubles du cluster B en général - Looper & Paris, 2000). Quand ils
ne sont pas dans l’auto-destruction, les patients Borderline peuvent apparaître parfois
« antisociaux » (petit vol, abus de substances, prise de risque). Le plus frappant concernant
l’impulsivité est l’impact opposé qu’elle peut avoir sur les relations interpersonnelles : les
antisociaux exploitent et utilisent autrui pour les dévaluer ensuite, sont détachés au contraire
des borderline plutôt exploités, se sentant un peu plus concernés par autrui mais qui idéalisent
et dévalorisent autrui. Dans plus de 50% des cas, on retrouve une association avec un autre
trouble de la personnalité chez ces patients, ce chevauchement concernant plus
particulièrement les troubles du cluster B (Zanarini, et al., 1989). L’association est également
très fréquente avec les troubles de l’Axe I (Zanarini, Frankenburg, Dubo, Sickel, Trikha,
Levin, & Reynolds, 1998) notamment les troubles de l’humeur (Gunderson & Phillips, 1991).
Comme nous l’avons fait pour la psychopathie, nous avons évoqué les mécanismes de
défense du fonctionnement Borderline précédemment (pp. 60-61), ceux-ci étant issus de
l’approche psychodynamique. L’approche empirique du DSM-IV (1996) fait également
référence aux mécanismes de défense mais aussi au style de coping dans un glossaire (DSMIV p. 879-882) à prendre en compte dans les évaluations. Ces styles de coping sont davantage
conscients (par exemple de l’agression passive, de la capacité de recourir à autrui, du passage
à l’acte, ainsi que la plainte associée à une demande d’aide et rejet de cette aide). Il s’agit de
« l’ensemble des processus qu’un individu interpose entre lui et l’événement perçu comme
menaçant pour maîtriser, diminuer ou tolérer son impact sur le bien-être physique et
62
psychologique » (Lazarus & Launier, 1978 cités par Paulhan & Bourgeois, 1998 p. 40). Puis
Lazarus et Folkman (1984) cités par Paulhan & Bourgeois (1998, p. 40) précisent la définition
en envisageant le coping comme « l’ensemble des efforts cognitifs et comportementaux,
destinés à maîtriser, réduire ou tolérer les exigences internes ou externes qui menacent ou
dépassent les ressources d’un individu ». Le manque de soutien social et un style de coping
basé sur l’évitement sont liés aux troubles de la personnalité en général évalués selon les
critères du DSM-IV (Bijttebier & Vertommen, 1999).
I-C-2-b) Les états-limites à expression psychopathique
Les « états-limites à expression psychopathique » sont « caractérisés par une clinique
des passages à l’acte, des décompensations psychiatriques brutales et réversibles, des
conduites de prise de risque et des addictions associés à des troubles anxieux suraigus face
au sentiment de vide » (Senon, 2005). Il peut s’agir de passages à l’acte hétéro-agressifs ou
auto-agressifs avec automutilation et tentatives de suicide en rafale. Les décompensations ne
sont pas rares. On constate des épisodes de dépression à l’ « emporte pièce, marquées par
l’intensité des affects dépressifs qui sous-tendent souvent les passages à l’acte auto-agressifs
mais caractérisées par une réversibilité rapide » (Ibid.).
La clinique des passages à l'acte, du fait de son caractère bruyant, est celle qui retient
le plus l'attention des intervenants dans ce milieu. Balier attache une importance particulière à
la « clinique du vide » qu'il relie à la défaillance du narcissisme primaire. Il décrit ainsi un
sentiment insoutenable de vide intérieur, insoutenable et non communicable, qui peut être à
l’origine d'automutilations graves, de passages à l’acte violents ou de gestes suicidaires.
L'agressivité n'est alors pas l’évacuation d'un trop plein mais un court-circuit qui a comme
fonction de protéger du risque de morcellement psychotique au décours des excès de tensions.
Le passage à l’acte instaure une ébauche d'emprise et assure alors une fonction « de sauvetage
du narcissisme défaillant ». Balier (2005) opte pour une possible approche psychanalytique de
ces pathologies. Selon lui, l'échec de l'accès à la position dépressive s'observe dans la
psychopathie et les états limites en relation avec le clivage ou l'explosion de l'agressivité libre.
Pour lui, « l'avenir du psychopathe n'est pas irrémédiablement fixé » et un travail
thérapeutique en équipe est parfois possible. Cette approche permet un travail
psychothérapeutique avec des patients présentant des états limites mais elle peut aussi
s’appliquer à la prise en charge de certains agresseurs sexuels.
63
*****
L’intérêt de rechercher ce type de caractéristiques serait de distinguer des
fonctionnements psychopathologiques différents chez des sujets psychopathes. Il s’agit ici de
repérer dans cette population de sujets ayant commis des actes de délinquance incarcérés des
« sous-goupes » ou « sous-types » en fonction du niveau de psychopathie, de l’association
éventuelle d’un fonctionnement borderline (sur lequel s’appuyer notamment pour adapter une
prise en charge), et du risque de récidive que présentent les détenus. Il s’agirait plus
précisément de cerner quelle est la part de fonctionnement borderline et comment elle
s’exprime chez certains sujets psychopathes, et cela afin de proposer des indications
psychothérapeutiques différenciées selon la présence ou non de ces caractéristiques
borderline. Selon Gabbard & Coyne (1987), « le pronostic est meilleur s’il existe une anxiété
ou une dépression accessible au traitement » (cités par Meloy, 2001 p. 567), d’où l’intérêt de
l’association de caractéristiques borderline dans la psychopathie (cf. Kernberg).
*****
L’hétérogénéité des psychopathes implique des différences dans le risque de récidive
et la prise en charge (Wong & Burt, 2007). La question de la psychopathie associée aux
troubles de l’Axe II, surtout aux troubles du cluster B et au trouble Borderline, soulève alors
deux point importants : celui du traitement ainsi que celui de la dangerosité et du risque de
récidive. En France, il existe une certaine méfiance, réticence, réserve vis-à-vis de la
prédiction du risque de récidive (HAS, 2005). Nous allons aborder la prochaine partie sous
l’angle de la dangerosité, du risque de violence et du risque de récidive (générale, violente,
non violente). Ces concepts seront mis en relation avec la PCL-R et les troubles de l’Axe II.
*****
64
I-D- Dangerosité, risque de récidive et troubles de la
personnalité (Psychopathie et Axe II)
Il existe une très grande pression en matière de justice criminelle et au niveau des
dispositifs psychiatriques sur « la bonne décision à prendre » concernant les personnes qui ne
représentent pas de risque si elles sont libérées dans la société ou pour celles qui nécessitent
une prise en charge particulière dans une institution (Douglas et al., 2006). Un grand intérêt
est porté sur ce sujet surtout depuis les vingt dernières années. Les psychiatres sont amenés à
répondre sur la question du pronostic mais aussi du traitement. L’évaluation de la dangerosité
relève d’abord de la démarche de l’expert mais « plus les thérapeutes seront amenés à
prendre en charge des patients qui fonctionnent sous le primat de la violence et du passage à
l’acte, plus ces questions deviendront lancinantes» (Gravier & Lustenberger, 2005).
I-D-1) Définition de la dangerosité ainsi que du risque de
récidive et évaluation
I-D-1-a) Définition de la dangerosité
La dangerosité est la « propension à commettre des actes dangereux, un acte étant dit
dangereux s’il est dommageable pour autrui ou pour soi ; le dommage causé résulte souvent
de l’usage de la violence et est d’une certaine gravité » (Cornet, Giovannangeli, & Mormont,
2003). La notion d’imprévisibilité et d’incontrôlabilité (Monahan, 1981 ; Scott, 1977), tout
comme les menaces et les tentatives (Monahan & Steadman, 1994 ; Shah, 1981 ; Walker,
1996) peuvent y être ajoutées. La notion de dangerosité dépend également des normes et des
valeurs de la société. Il peut également « s’opérer un glissement qui fait passer la dangerosité
d’attribut d’un comportement à celui d’attribut du sujet (p. 68) » (Cornet et al., 2003).
Selon Gravier et Lustenberger (2005), « dans le terme dangerosité se télescopent
donc : la notion de violation des normes sociales (appelant la réponse judiciaire), la question
de l’origine de cet acte mais aussi et celle de la conséquence de celui-ci en terme de
65
destructivité et de dommage (p. 670) ». L’appréciation est donc fortement subjective et
comporte forcément une part d’incertitude.
La dangerosité criminelle est souvent associée à une pathologie psychiatrique. Les
auteurs (Bourgeois & Bénézech, 2001) se limitent ici à la dangerosité criminologique avec
agression physique, tout en rappelant que les critères de définition du crime sont variables,
étant toujours formulés par rapport à la loi qui évolue dans le temps. La co-morbidité
psychiatrique, qu’elle soit catégorielle (diagnostic de trouble mental) ou dimensionnelle et
comportementale transnosographique (dyscontrôle comportemental et passage à l’acte
agressif), augmente considérablement les risques de violence, d’auto-agression et d’hétéroagression (suicide et homicide). Par ailleurs, il existe une corrélation démontrée entre
homicide, idéation suicidaire, tentative de suicide et suicide. Enfin, les études empiriques ont
confirmé l’existence de perturbations biologiques (au niveau des neurotransmetteurs) chez les
sujets violents, en particulier une dysrégulation du système sérotoninergique (Ibid.). Les
personnes à haut risque criminel sont celles qui souffrent de la sommation de handicaps
médico-psychologiques (trouble de la personnalité, pathologie de l’humeur, symptômes
psychotiques, addictions, etc.) et de handicaps sociaux (familles abusives, échec scolaire,
absence d’emploi, marginalité). On cite souvent comme facteurs liés à l’agressivité violente et
impulsive certains troubles de l’Axe I (notamment toxicomanies, épisode maniaco-dépressifs,
anxiété généralisée, PTSD) et les troubles de l’Axe II notamment le trouble borderline. Selon
Gravier et Lustenberger (2005), sont considérés comme déclencheurs les symptômes
psychiatriques qui se manifestent sous une forme plus aiguë, autant par leur intensité que par
l’activité psychique pathologique qu’ils sous-tendent.
Loza (2003) énumère plusieurs variables associées à la prédiction de la récidive
violente et non violente. Celles-ci sont relatives à : l’âge, les antécédents d’implication
criminelle, de fortes violences, le nombre de condamnations à un jeune âge et d’échec dans la
liberté, les problèmes comportementaux dans l’enfance, les problèmes de socialisation,
l’éducation et l’intelligence, l’abus de substances, les maladies mentales, les traits de
personnalité, les attitudes, les variables émotionnelles et le style de coping, le temps libre et la
disponibilité des victimes et des armes.
Il convient alors de rappeler que, comme le précise clairement l’introduction du DSMIV (1994), la définition des troubles mentaux est relativement conventionnelle, fondée sur un
consensus de cliniciens avec des catégories diagnostiques qui privilégient la fiabilité au
66
détriment de la validité. Les limites entre les diverses catégories nosologiques entre elles,
aussi bien que les limites entre le normal et le pathologique, sont incertaines. Il n’en demeure
pas moins que les recherches depuis vingt ans reposent sur des catégories diagnostiques
fondées sur des critères cliniques (symptômes) opérationnalisés, utilisant des instruments de
recherche récents. Ainsi, la clinique psychiatrique a été complètement renouvelée, et la
criminologie apporte maintenant de nouvelles données fondées sur cette nouvelle clinique.
I-D-1-b) L’évaluation de la dangerosité et du risque de récidive
L’évaluation de la dangerosité et du risque était imprécise sans outils, et la capacité
des professionnels sur l’évaluation du risque a été mise en doute. Un courant de recherches a
voulu standardiser cette évaluation du risque. Monahan (1981) montre qu’à l’époque,
lorsqu’un pronostic était donné pour le risque de récidive, les cliniciens se trompaient au
moins dans deux tiers des cas. L’évaluation du risque de dangerosité n’était donc exacte
qu’une fois sur trois, ce qui correspond à une prédiction aléatoire du risque. Monahan a
montré que les cliniciens avaient tendances à surévaluer le nombre de patients pouvant se
montrer dangereux. L’imprécision était notamment due au manque d’informations en terme
de résultats chiffrés ou de facteurs prédictifs (Monahan, 1981 ; Monahan & Steadman, 1994).
Partant de ce même constat, Côté (2001) propose une étude sur les instruments
d’évaluation de risque de comportement violent. Il est alors nécessaire d’évaluer non
seulement la dangerosité d’un sujet mais aussi « le risque de comportements violents à un
moment donné, dans un contexte donné et dans un temps donné (p. 33.)».
De nombreux instruments ont émergé afin d’aider les experts et les cliniciens à la fois
dans la pratique et dans la recherche. L’avantage principal est que ces instruments suscitent la
discussion et la confrontation des points de vue plutôt que de donner une vision univoque du
patient. Deux grandes tendances sont observées dans la création de ces nouveaux outils : l’une
sous un angle actuariel donc statistique, l’autre ajoute aux variables statistiques des indices
dynamiques liés à des aspects cliniques (élaboration de jugements cliniques) et au contexte
futur dans lequel la personne est appelée à vivre (Côté, 2001 ; Gravier & Lustenberger, 2005).
Les méthodes actuarielles se fondent sur trois variables (Hall, 1984) : celles
concernant la violence passée du sujet (histoire de vie, traumatismes précoces, précocité de la
délinquance violente), les éléments qui vont renforcer les comportements violents
(marginalisation, statut socio-économique, aspects de la personnalité et dynamiques
67
comportementales) et les stimuli susceptibles de déclencher la violence du sujet (intoxication,
alcoolisation aiguë, événements vitaux marquants).
Concernant les méthodes d’évaluation fondées sur un jugement clinique, la HCR-20
(Webster et al., 1997) est un exemple de jugement clinique semi-stucturé. Cet instrument a été
créé afin d’évaluer le risque de comportements violents et de récidive, mais aussi sa gestion
grâce à trois facteurs (cf. tableau 4) : Historique (H), Clinique (C), gestion du Risque (R)
répartis en vingt items. La HCR-20 a été très utilisée dans les recherches dans le cadre de
prison ou de santé mentale à un niveau médico-légal ou non. La HCR-20 est très fortement
prédictive de toutes les formes d’agression vers l’extérieur (verbale, physique) mais pas vers
soi (Gray, Hill, McGleish, Timmons, MacCulloch, & Snowden, 2003). Les facteurs Clinique
et Historique sont aussi de bons prédicteurs de toutes les formes de violence.
Tableau 4- Présentation des facteurs de la HCR-20 et des items qui les composent.
Facteurs Historiques
Facteurs Cliniques
Gestion du risque
H1 Violence antérieure
C1 Introspection difficile
R1 Plans irréalisables
H2 Premier acte de violence
commis à un jeune âge
C2 Attitudes négatives
R2 Exposition à des facteurs
déstabilisants
H3 Instabilité
intimes
des
relations
C3 Symptômes actifs
maladie mentale grave
de
R3
Manque
personnel
de
soutien
C4 Impulsivité
H4 Problèmes d’emploi
C5 Résistance au traitement
R4 Inobservation des mesures
curatives
H5 Problèmes de toxicomanie
R5 Stress
H6 Maladie mentale grave
H7 Psychopathie
H8
Inadaptation
durant
l’enfance et l’adolescence
H9 Troubles de la personnalité
H10 Echec antérieur de la
surveillance
Doyle & Dolan (2007) mettent toutefois en garde contre l’utilisation des méthodes
d’évaluation du risque appliquées à des individus plutôt qu’à un groupe tout en reconnaissant
l’importance d’une telle approche dans la clinique.
68
*****
En terme de prédiction du comportement notamment violent (assez problématique
dans notre domaine), Garb (1998) conseille de « prêter davantage attention aux résultats
empiriques, ou encore utiliser les tests psychologiques et les méthodes d’évaluation du
comportement (p. 133)». Concernant l’approche empirique, la HCR-20 et la PCL-R (Hare,
1991, 2003) apparaissent comme de bons outils complémentaires (Webster et al., 1997). En
effet, la psychopathie est un facteur très fiable pour évaluer le risque de récidive (Hare, 1999).
Elle apparaît comme un des plus importants facteurs de risque de récidive concernant les actes
violents en général, et surtout pour les actes sexuels violents. D’ailleurs, un score extrême de
psychopathie peut être suffisant pour indiquer un fort risque mais n’est pas forcément
nécessaire (Hart, 1998). De plus, les psychopathes rechutent plus fréquemment en terme de
criminalité que les non psychopathes après leur emprisonnement (Laurell & Dåderman, 2005)
appuyant ainsi le fait que la psychopathie soit un facteur de risque de la récidive.
Nous voulions dans notre recherche évaluer les liens entre les scores à la PCL-R ainsi
que les troubles de l’Axe II et les scores à la HCR-20. Voici donc une revue de la littérature
sur le risque de récidive évalué par la HCR-20 mais certaines recherches présentées n’ont pas
forcément évaluer le risque de récidive avec cet outil mais à partir de l‘histoire criminelle et
d’études longitudinales. Il nous a paru nécessaire d’en faire aussi part. A notre connaissance,
peu de recherches ont porté sur le lien entre le risque de récidive (notamment tel qu’évalué
par la HCR-20) et les troubles de l’Axe II. Beaucoup plus se sont focalisées sur la
psychopathie (PCL-R).
*****
I-D-2) Le Risque de récidive (notamment à partir de la HCR-20)
et les troubles de la personnalité
Il existe un mouvement conceptuel en ce qui concerne le champ de l’évaluation du
risque avec un accroissement de l’attention sur la réduction et la prise en charge des futures
violences comme but premier de l’évaluation du risque plutôt que sur la prédiction seule
(Hart, 1998).
Salekin, Rogers, & Sewell (1996) ont fait la première méta-analyse à partir de 18
études sur la psychopathie (PCL-R) et le crime. Ils ont rapporté des effets de la psychopathie
69
sur les comportements violents en institution et dans la communauté ainsi que sur la récidive
criminelle générale (violente ou non violente).
I-D-2-a) Sujets psychopathes versus non psychopathes (à partir de la PCL-R)
La plupart des études qui étudient le risque de récidive chez les sujets psychopathes
comparent les sujets psychopathes et les non psychopathes (Wong & Burt, 2007). Les sujets
psychopathes sont à haut risque concernant les comportements antisociaux et aussi plus
difficiles à prendre en charge et à traiter que les non psychopathes (Hemphill, Hare, & Wong,
1998 ; Salekin, 2002). Hemphill, Hare et Wong (1998) ont rapporté, en examinant le taux de
récidive un an après la libération de délinquants, une forte corrélation entre la psychopathie et
la récidive générale, pour la récidive violente et pour la récidive sexuelle. Les psychopathes
récidivaient trois fois plus de manière générale et quatre fois plus pour la récidive violente
que les non psychopathes. Cette étude suggère que la PCL-R est plus fortement prédictive ou
vient ajouter du poids à d’autres facteurs prédictifs tels que des facteurs démographiques, des
variables d’histoire criminelle et des troubles de la personnalité. Plus précisément, le Facteur
2 était plus prédictif de la récidive générale que le Facteur 1 mais aucun des deux facteurs
n’est plus fortement corrélé avec la récidive violente. Serin et Amos (1995) rapportait un taux
de récidive cinq fois plus élevé dans les cinq ans suivant la libération chez les psychopathes
que chez les non psychopathes.
Chez les sujets non psychopathes, on peut observer un déclin de la récidive violente dû
à l’âge, ce qui n’est pas le cas parmi ceux présentant une psychopathie. Au contraire, même si
le trouble Antisocial et le niveau de psychopathie (PCL-R) sont censés diminuer avec l’âge
(Harpur & Hare, 1994), les sujets psychopathes même après 40 ans continuent de récidiver à
des taux plus élevés que les non psychopathes (Harris, Rice & Cormier, 1991). Toutefois, il
convient de faire attention car peu de psychopathes âgés ont été libérés dans cette dernière
étude.
I-D-2-b) PCL-R et HCR-20 : récidive violente et non violente
La psychopathie est un prédicteur précis du risque de récidive de crime violent (Hare,
1999) et les sous échelles de la HCR-20 sont également un prédicteur de la violence (Douglas,
Ogloff, Nicholls, & Grant, 1999). Dans ce sens, la HCR-20 et la PCL-R sont de bons facteurs
prédictifs de la récidive notamment de la récidive violente dans une étude sur des participants
70
libérés de deux centres pénitenciers de haute sécurité et d’un hôpital psychiatrique sécuritaire
en Belgique (Pham, Ducro, Marghem & Réveillère, 2005). De plus, la psychopathie telle que
mesurée par la PCL-R et ses dérivés est un prédicteur de la récidive et de la violence en prison
et dans les populations en psychiatrie légale et civile mais elle n’est bien sûr pas le seul
facteur (Hare, 2006). Rappelons que la PCL-R en terme de score total est un item de la HCR20. Il est montré (Côté, 2001) qu’un individu ayant un score élevé de psychopathie (H7) à
partir de la PCL-R sera considéré comme plus à risque qu’un sujet ayant le même score à la
HCR-20 mais plus instable au niveau relationnel (H3), présentant un trouble de la
personnalité (H9)… Avant cela, Serin & Amos (1995) ont montré qu’il existait une relation
linéaire entre la psychopathie et la récidive violente (plus le score à la PCL-R est fort, plus la
récidive augmente) et le reste en fonction des trois groupes (non psychopathes PCL-R < 17,
mixtes, hauts psychopathes PCL-R > 29) mais avec des taux plus bas pour la récidive violente
que la récidive générale.
La PCL-R est apparu dans une étude comme un prédicteur modéré de toutes formes
d’agression par rapport à la HCR-20 (Gray et al., 2003) et en terme de facteur, le Facteur 2 est
un bon facteur prédictif contrairement au Facteur 1 qui n’a pas de validité prédictive. Le fait
que le score total à la PCL-R apparaisse dans cette étude comme moins bon prédicteur que la
HCR-20 est en partie lié à l’absence de validité prédictive du Facteur 1. Il est à noter que la
population de cette étude est composée de patients présentant des troubles mentaux internés
dans une unité de sécurité moyenne et ayant commis des crimes dans le contexte de leurs
troubles.
Claix et Pham (2004) ont trouvé une corrélation entre la PCL-R et la HCR-20
confirmant les résultats de Pham, Claix et Rémy (2000) sur la bonne qualité prédictive de la
HCR-20 en milieu pénitentiaire belge. Quatre vingt six hommes incarcérés en hôpital
psychiatrique sécuritaire belge et ayant commis au moins un acte de violence porté devant les
tribunaux ont participé à cette recherche. Les résultats montrent que le Facteur H de la HCR20 est hautement corrélé au Facteur 2 de la PCL-R (r=.67, p.<.01) et le Facteur C corrélé au
Facteur 1 (r=.56, p.<.01). Le Facteur R est corrélé positivement avec le score total de la PCLR (r=.25, p.<.01) signifiant que plus le score est élevé à la PCL-R, plus le score au Facteur R
augmente. Les sujets ayant un score élevé à la PCL-R récidivent plus et plus rapidement par
rapport à ceux qui ont des résultats moyens ou faibles.
Concernant la récidive sexuelle, la psychopathie apparaît comme un prédicteur général
de récidive violente et sexuelle (Quinsey, Rice & Harris, 1995). Il existe des éléments
71
suggérant que de forts scores de psychopathie combinés à une déviance au niveau sexuel
laisseraient présager un risque significativement élevé de récidive sexuelle chez les violeurs
condamnés. A contrario, Gretton, McBride, Hare, O’Shaughnessy, & Kumka (2001)
suggèrent que cette interaction est prédictive de la récidive violente et générale mais pas
sexuelle per se. Toutefois, cette étude a été menée chez des adolescents.
Si la PCL-R a de bons résultats en terme de récidive violente en prison, dans le cadre
psychiatrique médico-légal, la présence d’un trouble mental majeur comme possible facteur
de risque en concurrence introduit la possibilité que la psychopathie pourrait être moins
appropriée en terme de compréhension et de prédiction de comportement criminel. Toutefois,
la plupart des études conclut que la PCL-R est aussi un bon prédicteur de récidive criminelle
dans cette population (Douglas et al., 2006).
Wong et Burt (2007) pointent le fait que, si les différences entre psychopathes et non
psychopathes ont été largement étudiées, il n’en est pas de même à l’intérieur du groupe des
psychopathes. En effet, comme vu précédemment, les psychopathes ne forment pas un groupe
homogène en ce qui concerne leur probabilité de violer les règles sociales. Un intérêt
particulier devrait être porté à la comparaison entre les psychopathes libérés qui ont récidivé
et ceux qui n’ont pas récidivé, surtout pour les psychopathes à haut risque. Les psychopathes
récidivistes apparaissent comme plus jeune à l’admission, ont eu une éducation plus chaotique
et se sont engagés dans des actes délinquants et des comportements violents plus jeunes.
I-D-2-c) Troubles de l’Axe II, actes de violence et risque de récidive (HCR-20)
Une étude a montré que des patients présentant des troubles de la personnalité ou de
l’adaptation sont plus enclins à commettre des actes de violence (Steadman, Mulvey,
Monahan, Robins, Applebaum, Grisso, Roth, & Silver, 1998). La co-occurrence d’abus de
substance était un facteur clé dans la violence. Cette étude ne portait pas sur le même
échantillon (patients hommes et femmes avec troubles mentaux suivis sur dix semaines après
leur sortie d’hôpital) que notre étude mais le lien entre trouble de l’Axe II et violence est fait.
Enfin, Pham, Chevrier, et al. (2005) suggèrent que la présence de troubles comorbides
de l’Axe II et surtout de la personnalité Antisociale, Narcissique et Borderline corrèle
fortement avec la HCR-20, et les personnalités Antisociale et Narcissique sont corrélées avec
la PCL-R.
72
*****
En résumé, les implications pour les professionnels sont importantes car elles sont de
deux ordres. La première est la question de la prise en charge et du soin, étant donné qu’un
diagnostic le plus précis possible pourrait orienter le clinicien vers une prise en charge
individualisée et personnalisée du patient qu’il rencontre. La deuxième question se situe cette
fois lorsqu’il est demandé au clinicien, par exemple en expertise, de se prononcer sur la
possible dangerosité de sujets ayant commis des actes délinquants. L’évaluation du risque a
une grande importance sur la peine qui sera prononcée. Il s’agira non seulement de se
prononcer sur la probabilité de récidive sur le long terme mais aussi de dire si, avec une prise
en charge spécifique, le risque peut diminuer. De plus, la question sera également souvent de
déterminer si l’éventuelle présence d’un trouble mental a un impact sur le risque de récidive,
cette question-ci étant complexe. Beaucoup de cliniciens sont réticents au niveau de la
prédiction du risque notamment en matière d’éthique (Cornet et al., 2003). Pourtant, un
jugement clinique fait dans un contexte structuré avec notamment l’utilisation de la HCR-20
peut largement contribuer à l’évaluation du risque de violence au risque, sans cela, d’obtenir
des décisions non fiables et non valides (Douglas, Ogloff, & Hart, 2003) rejoignant le point de
vue de Monahan (1981). C’est alors seulement avec ce type de données et en prenant en
compte les facteurs de risque présents, leur prépondérance, et la gestion du risque propres au
sujet que des stratégies d’intervention pourront être mises en place pour réduire ces facteurs.
*****
73
I-E- Objectifs
L’objectif principal de cette étude est d’évaluer l’impact (i) général des troubles de la
personnalité définis par l’Axe II du DSM-IV (approche catégorielle) sur le niveau de
psychopathie telle que définit par la PCL-R (approche dimensionnelle) et (ii) particulier du
trouble Borderline. Nous évaluerons également l’impact de la psychopathie (PCL-R) puis des
troubles de la personnalité de l’Axe II sur l’évaluation risque de récidive (HCR-20). Ce travail
a aussi pour objectif appliqué de montrer l’intérêt de la complémentarité d’une approche
catégorielle et dimensionnelle et ce à partir d’une démarche d’évaluation clinique standardisée
utilisable à la fois dans une perspective de recherche et de pratique clinique auprès de la
population carcérale.
I-E-1) Objectifs généraux
Ces objectifs concernent l’évaluation :
- Des relations entre la psychopathie (PCL-R) et les troubles de la personnalité de
l’Axe II du DSM-IV et des relations entre la psychopathie et le trouble borderline en
particulier.
- De l’impact de la comorbidité générale (psychopathie (PCL-R) et troubles de la
personnalité de l’Axe II) sur le risque de récidive et avec notamment l’impact du trouble
borderline.
- Des relations entre la psychopathie (PCL-R) ainsi que les troubles de la personnalité
de l’Axe II et le type de délit.
74
I-E-2) Objectifs appliqués dans un contexte politico-judiciaire
particulier actuellement en France
Il s’agit de :
- Souligner l’intérêt de la complémentarité : approche dimensionnelle et approche
catégorielle
- Montrer l’intérêt de l’utilisation de ces outils d’évaluation standardisés pour la
pratique clinique en France :
–
Dans l’examen psychologique (Serin, 1992; Garb, 1998; Pedinielli &
Fernandez, 2005),
–
Pour l’aide à la définition de la prise en charge (Wong & Burt, 2007),
–
Et pour l’aide à l’évaluation de l’efficacité de la prise en charge.
75
Deuxième partie
II- Méthodologie
76
II-A- Méthode
II-A-1) Hypothèses et analyses statistiques
Si la psychopathie, telle qu’elle a été définie par Hare (1991) (validation langue
française Côté et Hodgins, 1996; Pham et al., 2000), présente une association forte avec la
personnalité Antisociale (Axe II du DSM IV), celle-ci s’étend toutefois à d’autres troubles,
notamment ceux de l’Axe II (Hare, 1996, 2003; Hart & Hare, 1997; Hildebrand & de Ruiter,
2004; Widiger, 2006). Parmi les troubles de l’Axe II, nous pouvons nous attendre à une
association particulière avec le trouble Borderline (Stånlenheim & von Knorring, 1998;
Kernberg, 2001; Lamothe, 2001; Murphy & Vess, 2003).
Nous devrions retrouver le même type de lien concernant l’évaluation du risque de
récidive à partir de la HCR-20 (Pham, Chevrier, et al., 2005).
II-A-1-a) H1 : Comorbidité entre troubles psychopathologiques
Nous avons posé comme première hypothèse le fait qu’il existerait un lien entre la
psychopathie (PCL-R) et la présence d’autres troubles de la personnalité, notamment de l’Axe
II cluster B (Histrionique, Narcissique, Borderline, Antisocial).
- H1.a. Comorbidité générale : Il existerait un lien entre la psychopathie évaluée sur
un mode dimensionnel (PCL-R) et la présence de troubles de l’Axe II, notamment parmi
ceux-ci le cluster B Histrionique, Narcissique, et Antisocial : plus le score de psychopathie
(PCL-R) augmente, plus le lien serait élevé.
- H1.b. Comorbidité particulière : Un lien particulier relierait le score de
psychopathie au trouble Borderline (cluster B) : il serait positif entre le score global et celui
du facteur 2 (poids des conduites antisociales et de l’impulsivité) et absent voire inverse avec
celui du facteur 1 (abaissement du score en raison du poids de la présence de caractéristiques
borderline de type réactivité émotionnelle et capacité furtive d’attachement).
77
Pour tester cette hypothèse, nous avons effectué :
- Des corrélations bivariées (r de Pearson) entre les scores de psychopathie
(PCL-R, F1, F2) et les troubles de l’Axe II (Evitante, Dépendante, Obsessionnellecompulsive,
Dépressive,
Négativiste,
Paranoïaque,
Schizoïde,
Schizotypique,
Histrionique, Narcissique, Borderline, Antisociale).
- Des régressions linéaires simples et multiples pour évaluer l’impact (effet)
des troubles de l’Axe II séparément puis en terme de comorbidité de l’Axe II sur la
psychopathie (PCL-R, F1, F2).
II-A-1-b) H2 : La PCL-R (Psychopathie) et les troubles de l’Axe II en lien avec
la HCR-20 (Risque de récidive).
Notre deuxième hypothèse concerne les liens entre la présence de psychopathie d’une
part, et la présence des troubles de la personnalité de l’Axe II (notamment du cluster B :
Histrionique, Narcissique, Borderline, Antisocial) d’autre part, avec les scores à la HCR-20.
La psychopathie, tout comme la présence de troubles de l’Axe II notamment du cluster B
(Antisocial, Narcissique, Borderline), augmenteraient les scores à la HCR-20 (global,
Facteurs H, C et R).
Pour tester cette hypothèse, nous avons également effectué :
- Des corrélations et régressions linéaires simples et multiples entre la PCL-R
(score global, F1, F2) et la HCR-20 (score global, Facteurs H, C et R) : association et
impact des scores à la PCL-R sur les scores à la HCR-20.
- Des corrélations et régressions linéaires simples et multiples entre les troubles
de l’Axe II et la HCR-20 (score global, Facteurs H, C et R): association et impact des
troubles de l’Axe II sur la HCR-20.
Lorsque nous avons analysé les relations entre la HCR-20 et la PCL-R ainsi que
l’impact des scores à la PCL-R sur ceux de la HCR-20, l’item H7 « Psychopathie » de la
HCR-20 a été omis car relatif à la PCL-R.
Pour finir et sur le même principe, nous avons affiné nos résultats en évaluant les liens
corrélationnels entre les troubles de la personnalité (psychopathie PCL-R et troubles de l’Axe
78
II) et les types de délits violents et non violents. L’item 20 « Diversité des types de délits » de
la PCL-R a été omis pour les analyses concernant la PCL-R et les types de délits.
Plus précisément, nous avons analysé les relations entre les différentes variables avec
le coefficient de corrélations r de Pearson bilatéral. Nous avons ensuite vérifié quels
pouvaient en être les effets. En effet, les liens seuls existants entre nos variables ne suffisent
pas et soulèvent une autre question, celle de la valeur explicative de certaines variables
indépendantes (VI) sur d’autres variables dépendantes (VD). Nous avons donc utilisé des
modèles de régressions linéaires simples et multiples afin de tester la valeur explicative de nos
variables et de nos modèles proposés en hypothèses. Les régressions linéaires simples nous
ont permis d’évaluer l’impact de chaque trouble de l’Axe II (VI) sur la PCL-R (VD) et sur la
HCR-20 (VD) et de la PCL-R (VI) sur la HCR-20 (VD). Afin d’affiner les résultats obtenus,
les régressions linéaires multiples pas à pas (Stepwise) nous ont permis de voir si la
combinaison de certains troubles de l’Axe II (VI) améliore l’exactitude des prédictions des
scores à la PCL-R et aux Facteurs 1 et 2 (VD) et de la prédiction des scores à la HCR-20 et
aux facteurs Historique, Clinique et Risque (VD). Enfin, pour affiner nos résultats, nous
avons évalué les relations qu’entretiennent la PCL-R et les troubles de l’Axe II avec les types
de délits (non violents et violents) par le coefficient de corrélations r de Pearson bilatéral.
Les analyses statistiques descriptives et inférentielles (corrélations et régressions
linéaires) ont été effectuées avec le logiciel SPSS.
II-A-2) Population et critères d’exclusion
Notre recherche comprend 80 sujets de sexe masculin (âge : M = 31,48; SD = 11,061)
incarcérés et condamnés en Maison d’Arrêt de la Région Centre et de la Région parisienne.
Afin d’exclure les sujets ayant un QI inférieur à 70, les participants ont passé la version courte
de la WAIS (Wechsler, 1981, 2000) selon la méthode Silverstein (Gregoire, 2001). Dans
notre population, le QI de six sujets n’a pu être rapporté pour deux raisons. La première raison
est due au facteur stress et/ou à la peur de ne pas y arriver. Certains participants, ont refusé la
passation de l’un ou des deux sub-tests par peur de montrer leurs lacunes. L’un d’eux a
littéralement été pris de panique à la troisième figure des cubes. D’autres ont voulu arrêter
lorsque les figures leur paraissaient trop complexes ou à partir du moment où ils
commençaient à peiner à les reproduire. Deuxièmement, la nationalité étrangère de certains et
le fait de ne pas bien maîtriser la langue française a pu être un obstacle à la passation du sub79
test du vocabulaire demandant une définition la plus précise possible (certains employaient
alors plus volontiers des synonymes). Ils ont été intégrés à la recherche car ils avaient tout de
même un bon niveau de compréhension lors de la passation des autres tests et entretiens.
Aucun des sujets n’avait de QI inférieur à 70 (M = 98,99 ; SD = 11,365 ; N=74). Le M.I.N.I
International Neuropsychiatric Interview (Lecrubier et al., 1998) fut utilisé afin d’exclure les
sujets présentant une comorbidité Axe I (troubles psychotiques avérés au moment de la
passation des tests). Ce fut aussi le cas pour les sujets présentant des épisodes dépressifs
majeurs avérés rendant impossible la passation (dans la réalité, un sujet). Trois sujets ont été
exclus de la population initiale (N=83). Le M.I.N.I et la WAIS sont davantage développés
dans la partie II-B- Variables et instruments (pp. 86-87).
II-A-3) Procédure
Sur la base du volontariat, les participants ont été évalués avec la PCL-R (Hare, 1991,
2003) pour la psychopathie, le SCID-II (Bouvard, Fontaine-Buffe, Cungi, Adeleine,
Chapoutier, Durafour, Bouchard, & Cottraux, 1999) pour les troubles de la personnalité tels
que définis par DSM-IV et la HCR-20 pour l’évaluation du risque de récidive (Webster et al.,
1997). Le M.I.N.I. (Lecrubier, et al, 1998) et la WAIS (version courte selon la méthode
Silverstein, 1985 ; Gregoire, 2001) ont été utilisés pour les critères d’exclusion cités ci-dessus.
L’ordre de passation du SCID-II et du MINI a été fait au hasard.
Chaque participant a signé une feuille de consentement mentionnant : les objectifs de
la recherche, la garantie de l’anonymat et l’absence de retour individuel de résultats (les trois
sujets issus de l’Unité Psychiatrique Hospitalière ont eu un retour en présence du médecin
chef de l’unité et de l’examinateur). Un médecin psychiatre a rencontré les sujets qui
pouvaient participer à la recherche, leur en a présenté le cadre et leur a demandé s’ils étaient
volontaires. Les sujets volontaires ont été vus individuellement dans un bureau ou un parloir.
Les participants ont été évalués en deux ou trois séances d’environ deux heures chacune pour
une passation d’environ quatre heures au total (ce temps de passation pouvant varier en
fonction des sujets).
Ces évaluations ont été menées par deux personnes (A. Nioche) et (I. Chevrier)
formées à la passation et à l’exploitation de la PCL-R par le Centre de Recherche en Défense
Sociale (T. Pham). Les résultats partiels de ces travaux ont déjà donné lieu à une publication
80
(Pham, Chevrier, et al., 2005) et à un second article (Nioche, Pham, Ducro, de Beaurepaire,
Chudzik, Courtois, & Réveillère) a été accepté sous réserve de modifications à la revue
L’Encéphale (un troisième article sur les liens entre HCR-20 et Axes I et II est en cours
d’écriture). Les évaluations ont donc été effectuées à Blois et Orléans de mai 2004 à juin
2005, et à Fresnes soit dans l’Unité Psychiatrique Hospitalière ou dans le Grand Quartier
(détention) de mai 2006 à avril 2007. Entre temps, nous nous sommes rendue au C.R.D.S.
afin de nous entraîner de nouveau sur la cotation de la PCL-R puis pour des réunions de
travail avec les Professeurs Ch. Réveillère et T. Pham, ainsi que C. Ducro (psychologue au
CRDS et doctorante, Universités de Mons et de Tours).
81
II-B- Variables et instruments
II-B-1) La PCL-R (Hare, 1991, 2003) : évaluation de la
psychopathie
La PCL-R, Echelle de Psychopathie de Hare-Révisée (Hare, 1991), composée d’une
échelle et d’un entretien semi-structuré (version française validée au Québec Côté & Hodgins,
1996 et évaluation psychométrique en Belgique francophone Pham, 1998a), permet une
évaluation clinique et comportementale de la psychopathie par l’obtention d’un score de
psychopathie global et en fonction de deux facteurs (Facteur 1 : caractéristiques narcissiques
et hystériques, détachement et absence de détresse émotionnelle, égocentricité, dureté,
absence de remords ; Facteur 2 : comportements antisociaux et faiblesse de contrôle,
irresponsabilité, impulsivité, recherche de sensations). Elle est utilisée dans un but
psychodiagnostique. Une formation à l’utilisation et à la cotation de la PCL-R est obligatoire
(formation au CRDS). Le guide de cotation recommande de limiter l’utilisation de la PCL-R
aux populations dans lesquelles cet instrument a été entièrement validé c’est-à-dire
notamment les populations de détenus adultes de sexe masculin (ex. établissements ou centres
correctionnels ou communautaires, hôpitaux de psychiatrie légale, centres de prévention ou de
détention). Les cotes attribuées à un sujet sont de nature confidentielle et ne sont pas mises à
disposition du personnel des établissements correctionnels ou institutionnels, des comités
responsables des libérations conditionnelles, etc.
La procédure d’évaluation comprend donc un entretien et la consultation de toutes
informations complémentaires disponibles. L’entretien permet tout d’abord d’obtenir des
renseignements chronologiques et permet ensuite à l’interviewer d’observer le style
d’interaction du sujet pendant la passation. La PCL-R permet de parcourir le passé du sujet et
recouvre les domaines au niveau familial, professionnel, conjugal et criminel. Un entretien
semi-structuré permet de s’assurer que tous les domaines ont été évalués mais il doit
également rester ouvert pour garder une certaine forme de naturel dans les interactions. La
durée moyenne se situe entre 90 et 120 minutes et peut se faire sur plusieurs rencontres.
82
La PCL-R est composée de 20 items et chacun des 20 items reçoit une cote sur une
échelle ordinale en fonction du degré de correspondance de la personnalité et/ou du
comportement du sujet avec la description de l’item : 0, si l’item « ne caractérise pas le
sujet » ; 1, si l’item « le définit bien à certains égards mais des réserves ou des doutes
demeurent sur le caractère spécifique des observations » ; 2, si l’item « le caractérise dans
l’ensemble assez bien ». Le résultat varie entre 0 et 40. On ne doit pas attribuer de cotations
s’il y a absence d’informations complémentaires appropriées. Les cotations se font selon le
fonctionnement du sujet pendant toute sa vie, la manière dont il agit en général, et les items ne
doivent donc pas être cotés seulement en fonction de la situation actuelle. Cela demande à
l’évaluateur une grande capacité d’inférence et de jugement même si certains items ont des
critères fixes et précis (ex. : items 17, 18, 19, 20). Il s’agit d’évaluer jusqu’à quel point le sujet
évalué correspond au prototype que l’on créé à partir de la description des items (intensité,
fréquence, durée des caractéristiques). Le guide de cotation met également en garde par
rapport à l’effet de halo et à la tendance « chic type » qui sont deux tendances courantes chez
les évaluateurs débutants. L’effet de halo se traduit par le fait de fondre chaque cote sur une
impression globale du sujet et la tendance « chic type » fait que l’évaluateur note tous les
items bas (sous cotation). Les items doivent donc être cotés individuellement et séparément de
manière indépendante et il peut être utile de noter sur une feuille les justifications des
cotations. Si l’on hésite entre deux cotations, il convient de coter à la hausse la moitié des
items sur lesquels il y a hésitation et l’autre moitié à la baisse. Concernant les omissions
d’items, l’évaluateur pourra y avoir recours si l’information n’est pas suffisante ou alors si les
informations complémentaires sont totalement divergentes. En cas d’absolue nécessité
seulement, l’évaluateur pourra donc omettre un item à hauteur de cinq items omis au
maximum sans invalider le protocole. Pour chacun des facteurs, on pourra omettre jusqu’à
deux items. En cas d’omission d’items, trois tableaux relatifs aux scores pondérés sont
disponibles afin de permettre à l’évaluateur de coter le protocole : scores totaux pondérés de
la PCL-R, scores pondérés au Facteur 1 et au Facteur 2. Si trop d’items sont omis, le sujet doit
être réévalué lorsque davantage d’informations seront disponibles.
Selon Hare (1991), un sujet est considéré psychopathe à partir d’un score de 30.
Cependant, comme nous l’avons déjà vu (cf. p. 33), d’autres points de coupure ont été utilisés
dépendant du type d’évaluation et du contexte de la recherche (Hare & Neumann, 2006).
Ainsi, du fait de variations transculturelles, Cooke et Michie (1999) ont rapporté qu’un point
de coupure de 30 en Amérique du Nord équivalait à un point de coupure de 25 en Ecosse.
C’est également pour cette raison que Pham a utilisé un point de coupure à 25 (Pham, 1998a ;
83
Delescluse & Pham, 2005). En effet, Pham (1998a) explique que la prévalence de haute
psychopathie est faible en Belgique et les scores (total, F1, F2) étaient plus faibles dans les
populations européennes que nord américaines. Pour éviter les faux positifs et le faux négatifs
et donc à un niveau purement statistique, Hervé, Ling et Hare (2000) ont utilisé un point de
coupure de 27 qui correspondait mieux à leur étude. Toutefois, Pham, Malingrey et al. (2007),
rapportent des résultats confirmant plutôt la spécificité du diagnostic de psychopathie à 30
étant donné l’importante comorbidité psychiatrique inhérente aux sujets présentant des scores
entre 20 et 30.
Si l’on veut utiliser la PCL-R sur la seule base d’informations complémentaires, il est
nécessaire que celles-ci soient en quantité suffisante et de très grande qualité. Dans notre
recherche, chaque sujet a été vu en entretien en plus des informations complémentaires
contenues dans des dossiers. Une révision complémentaire peut être nécessaire et prend en
général 60 minutes.
II-B-2) Le SCID-II Structured Clinical Interview for Disorders
II, version 2.0 (Bouvard et al., 1999) : évaluation des troubles de
l’Axe II.
Le SCID-II est un entretien semi-structuré de 119 items (en vrai / faux) qui permet
d’évaluer les troubles de la personnalité selon le DSM-IV. La version DSM-IV, créée en
1994, a été officialisée en 1997. Sa présentation se fait par diagnostic. Il permet également de
rendre compte d’une éventuelle (ou de plusieurs) comorbidité(s). Un questionnaire est utilisé
avant la passation de l’entretien clinique : il est essentiel pour la base de l’entretien car il
souligne les points importants et élimine les réponses négatives. Il permet donc d’orienter
l’entretien sur les diagnostics à approfondir (qui sont alors identifiés par le questionnaire).
L’évaluateur doit poser des questions précises mais il peut ajouter des questions s’il pense
qu’elles sont nécessaires. Le SCID-II ne suit pas l’ordre du DSM-IV. Il commence par le
cluster C, le B puis le A dans le but d’obtenir une meilleure coopération du sujet. Pour
l’entretien, l’évaluateur a deux possibilités : 1) ne reprendre que les troubles ayant atteint un
seuil pathologique en sélectionnant alors les réponses positives du sujet et en lui posant
ensuite les questions du guide de l’entretien (il confirme alors ou non la présence du trouble
de la personnalité) ou 2) reprendre toutes les réponses positives du sujet et poser les questions
84
correspondantes du guide et coter de 1 à 3 chaque réponse. La cotation se fait par 1 « le
symptôme décrit par l’item est absent », 2 « le critère est présent mais ne cause pas une gêne
suffisante » et 3 « le critère est présent et à un seuil pathologique ». Le trouble de la
personnalité est retenu en fonction du nombre de réponses cotées 3 qui est variable en
fonction des troubles et précisé dans le guide.
La durée de passation est variable en fonction des sujets. L’entretien d’un sujet
pathologique dure en moyenne une heure et demie (Bouvard et al., 1999).
II-B-3)
La
HCR-20
Historical-Clinical-Risk
Management
(Webster, Douglas, Eaves & Hart, 1997) : évaluation du risque de
récidive
La HCR-20 (Webster et al., 1997) est une échelle dynamique de vingt items répartis en
trois facteurs (historique, clinique et gestion du risque). Il s’agit davantage d’un « aidemémoire » que d’un instrument psychométrique (Côté, 2001 ; Webster et al., 1997) et d’un
instrument de recherche. Cet outil est organisé autour de dix items passés (Historique), cinq
items présents (Clinique) et cinq items futurs (Risque). Cette organisation a été faite suite à la
réévaluation de la première version de la HCR-20 (Webster et al., 1995). De la même manière
que pour la PCL-R (Hare, 1991), l’utilisation de cette échelle ainsi que de son manuel doit
être précautionneuse. Il s’agit à la fois d’une approche qualitative et quantitative. Les items ne
sont pas statistiquement corrélés et la cotation exige une part de jugement clinique.
Le score est attribué à partir d’une échelle ordinale en trois points : 0, 1 et 2. Cette
échelle est basée sur celle qu’a utilisé Hare (1991), l’expérience ayant montré qu’il n’est pas
nécessaire d’utiliser une échelle plus longue (Webster et al., 1997). Si une information n’est
pas disponible ou considérée comme non fiable, il est possible d’omettre un item. Toutefois,
l’omission d’item doit être évitée tant que possible. Le score total varie de 0 à 40.
L’évaluateur a recours à deux types de jugements : un jugement pour la cotation de chaque
item et il devra ensuite intégrer toutes ces informations pour faire un résumé ou prendre une
décision finale concernant le risque de violence. Les auteurs recommandent l’utilisation d’une
feuille de cotation. Le contexte dans lequel est utilisée la HCR-20 doit être pris en compte
ainsi que la nécessité éventuelle de réévaluer un sujet. La décision finale concernant le risque
de violence doit être prise en terme de risque faible, modéré ou élevé. Les qualités
85
psychométriques à partir d’une population francophone ont été évaluées (Claix & Pham,
2004). Les recherches actuelles mettent l’accent sur la nécessité de recourir à diverses sources
d’informations dans les évaluations du risque. Les dossiers (notamment les notes de
psychologues, psychiatres, travailleurs sociaux, police, procureurs et autres professionnels)
sont utiles. L’utilisation d’autres instruments appartenant au domaine de la maladie mentale,
la personnalité ou l’abus de substance peuvent être utiles. C’est par exemple le cas
d’inventaires de personnalité pour certains items comme H5 (abus de substance), H6 (maladie
mentale grave), H9 (troubles de la personnalité), C2 (attitudes négatives), C3 (Symptômes
actifs de maladie mentale grave), C4 (impulsivité) et C5 (résistance au traitement). Dans la
plupart des cas, les dossiers, un entretien et des tests peuvent être suffisants pour la cotation
de la HCR-20. Toutefois et particulièrement pour la section de gestion du risque, se consulter
entre collègues responsables du traitement par exemple peut être nécessaire. En outre,
l’évaluateur doit noter dans son rapport quelles sources il a pu consulter, lesquelles il n’a pas
consulté et celles qu’il n’a pu consulter. Une formation est nécessaire pour l’utilisation de cet
outil.
II-B-4) Les instruments utilisés concernant les critères
d’exclusion
II-B-4-a) Le Quotient Intellectuel évalué par la WAIS version courte selon la
méthode Silverstein (Grégoire, 2001).
Cette version est la version abrégée de la WAIS-III (Weschler, 1981 ; 2000 pour la
version française) selon la méthode Silverstein validée en 1985 dans le manuel de la WAIS-R
et par Grégoire pour l’édition française en 2001. Celle-ci a été choisie afin d’alléger le
protocole déjà très lourd. Cette version utilise le sub-test des cubes de Kohs et celui du
Vocabulaire. Nous obtenons le QI total grâce à cette formule : QI Total = 2,9 (notes standard
vocabulaire + cubes) + 41. Un QI inférieur à 70 est un critère d’exclusion.
86
II-B-4-b) Les troubles mentaux majeurs de l’Axe I évalués par le M.I.N.I.
(Lecrubier et al., 1998)
Le M.I.N.I. (Mini International Neuropsychiatric Interview) est un entretien
diagnostique structuré, d’une durée de passation brève (moyenne 18,7 min + /- 11,- min ;
médiane 15 min), explorant de façon standardisée les principaux troubles psychiatriques de
l’Axe I du DSM IV (American Psychiatric Association, 1994). Afin de réduire le plus
possible la durée de l’entretien, il faut préparer le patient à ce cadre inhabituel en lui indiquant
que nous allons lui poser des questions précises sur ses problèmes psychologiques et que nous
attendons des réponses en oui ou non. Tous les modules ont été passés (cf. tableau 3 p. 38) et
les résultats ont été retranscrits sous forme auto-rapportée (c'est-à-dire en fonction des
réponses du sujet) dans le tableau descriptif (cf. tableau 7 p. 93) rapportant la fréquence des
troubles de l’Axe I .
II-B-5) Les types de délits violents et non violents
Nous avons choisi de classer les divers délits en deux types de catégories : violents et
non-violents. La cotation des délits s’est faite de manière dichotomique en répondant « oui »
ou « non » à la question « le sujet a-t-il commis ce délit ». Ceci a été fait à partir de la fiche
d’écrou et du dossier des participants. Nous nous sommes basée sur les catégories de délits
utilisées à l’item 20 de la PCL-R (diversité des types de délits). La catégorie « crime contre
l’Etat » n’a pas été retenue car aucun des sujets n’avait commis ce type de délit.
II-B-5-a) Les délits violents
-
Vol qualifiés : vol à main armée ou le sujet a utilisé la violence lors d’un vol.
-
Voie de fait : le sujet a proféré des menaces, a causé des lésions corporelles à autrui.
-
Meurtre, tentative de meurtre, homicide involontaire : le sujet a commis un meurtre de
façon volontaire ou involontaire. Cette catégorie comprend également les sujets ayant
causé des blessures avec l’intention de tuer.
-
Possession et usage d’armes ou explosifs
-
Délits sexuels : attentat à la pudeur, viol, inceste…
-
Enlèvement
87
II-B-5-b) Les délits non violents
- Vol, recel : le sujet a commis un vol sans violence ou a tenté de revendre de la
marchandise volée.
- Délits liés à la drogue : détention ou trafic de stupéfiants.
- Infraction au code de la route : conduite en état d’ébriété, délit de fuite…
- Fraude : contrefaçon, fausses déclarations, utilisation de cartes de crédit volées.
- Incendie volontaire : le sujet a intentionnellement causé un incendie.
- Obstruction à la justice : entrave à la justice, parjure, outrage à la Cour.
- Délits mineurs : vandalisme, méfaits, dommages volontaires, vagabondage…
- Evasion
II-B-6) Le choix des instruments
Tous les instruments utilisés sont des instruments fiables et valides. Afin d’évaluer la
psychopathie, nous avons choisi la PCL-R car il s’agit d’un instrument largement utilisé dans
la recherche. Elle a été validée en langue française comme vu précédemment. Cet outil peut
être utilisé de manière catégorielle (en fonction du point de coupure, il est possible de faire
des groupes : psychopathie avérée, psychopathie mixte ou absence de psychopathie) ou
dimensionnelle (sur un continuum en terme d’intensité). C’est sous cet aspect dimensionnel
que nous avons choisi de l’utiliser. Cet outil alors dimensionnel est complémentaire avec le
SCID-II, catégoriel. Il a été choisi afin de « screener » les autres troubles de la personnalité
selon l’Axe II du DSM-IV. En effet, nous nous intéressons particulièrement aux troubles du
cluster B de l’Axe II et notamment au trouble Borderline, mais le SCID II nous permet
également d’évaluer tous les autres troubles de l’Axe II (cluster A, C, personnalités non
spécifiées). La HCR-20 permet l’évaluation du risque de récidive et est complémentaire de la
PCL-R. Tous deux sont des instruments récents. La HCR-20 laisse de plus une part au
jugement clinique. Enfin, une version courte de la WAIS, utilisée pour les critères
d’exclusion, a été choisi afin d’alléger le protocole déjà important. Le M.I.N.I. est également
un outil rapide pour évaluer les troubles mentaux majeurs.
*****
88
Dans la partie suivante, « Partie III Présentation des résultats », nous présenterons
dans un premier temps et dans une courte partie (I- Description de la population carcérale
N=80), les caractéristiques descriptives de notre échantillon (âge, QI, scores à la PCL-R, à la
HCR-20, troubles de l’Axe II et de l’Axe I, et types de délits).
Nous présenterons dans un second temps la partie corrélationnelle et les analyses
multivariées c'est-à-dire les régressions linéaires simples et multiples dans les autres parties :
II- Comorbidité entre troubles psychopathologiques et III- Troubles de la Personnalité (PCLR et Axe II) et Risque de récidive (HCR-20).
*****
89
Troisième partie
III- Analyse des résultats
90
III-A- Description de la population carcérale totale
(N=80)
Les statistiques descriptives que nous avons utilisées sont : les moyennes avec écarttypes et effectifs, ainsi que les minimum et maximum concernant l’âge, le QI, les scores à la
PCL-R (score total, F1, F2) et ceux à la HCR-20 (score total, Facteurs H, C, R). Concernant
les troubles de la personnalité (Axe II), les troubles mentaux majeurs (Axe I) et les types de
délits, nous avons utilisé un test de fréquence qui traduit en pourcentage la fréquence de
chaque trouble et des types de délits.
III-A-1) Analyses descriptives concernant l’Age, le QI, les
scores à la PCL-R et aux Facteurs 1 et 2 et les scores à la HCR-20 et
aux Facteurs H, C et R (N=80).
La moyenne du score total à la PCL-R (M=20,33) correspond à un niveau mixte de
Psychopathie (cf. tableau 5). Quinze sujets ont obtenu un score total à la PCL-R supérieur à
30 (haut niveau de psychopathie), vingt sujets un score entre 20 et 30 (psychopathie mixte) et
trente cinq sujets un score inférieur à 20 (faible psychopathie ou absence). Le score maximal
est de 36,7 représentant un niveau très haut de psychopathie et le score minimum est de 0. La
moyenne du score total à la HCR-20 se situe un peu en dessous du score médian de 20, le
score maximum étant de 40.
91
Tableau 5- Description de la population totale (N=80) en fonction des moyennes d’âge, de QI
et des scores à la PCL-R (total, F1, F2) ainsi qu’à la HCR-20 (total, facteurs H, C, R).
HCR1
2
3
4
5
6
7
âge
QI
PCL-R
F1
F2
20
H
C
R
moy
31,48
98,99
20,33
8,86
9,85
18,19
8,38
4,59
5,15
N
80
74
80
80
80
80
80
80
80
SD
11,061
11,365
9,697
4,878
4,886
9,63
5,13
2,68
2,95
Min
18
73
0
0
0
0
0
0
0
Max
59
125
36,7
16
18
34
18,75
9
10
1- score total à la PCL-R ; 2- score au Facteur 1 ; 3- score au Facteur 2 ; 4- score total à la HCR-20 ; 5- score au
facteur H ; 6- score au facteur C ; 7-score au facteur R
III-A-2) Fréquence des troubles de la personnalité de l’Axe II et
des troubles mentaux majeurs de l’Axe I (N=80).
Les tableaux 6 et 7 présentent en terme de pourcentage la fréquence des troubles des
Axes II et I dans notre population totale.
Concernant les troubles de la personnalité de l’Axe II (cf. tableau 6), nous pouvons
observer que les trois troubles les plus fréquents sont par ordre d’importance : le trouble
Antisocial (53,8%), le trouble Borderline (35%) et le trouble Paranoïaque (25%). Viennent
ensuite le trouble Narcissique (23,8%) et le trouble de la personnalité Dépressive (21,3).
Tableau 6- Fréquence des troubles de l’Axe II en terme de pourcentage.
Axe II Personnalité
N=80
Evitante
Dépendante
Obsessionnelle-compulsive
Négativiste
Dépressive
Paranoïaque
Schizotypique
Schizoïde
Histrionique
Narcissique
Borderline
Antisociale
n
%
7
7
8
2
17
20
1
2
2
19
28
43
8,8
8,8
10
2,5
21,3
25
1,3
2,5
2,5
23,8
35
53,8
92
Concernant les troubles mentaux majeurs (cf. tableau 7), les plus fréquents par ordre
d’importance sont les Episodes Dépressifs Majeurs, le Risque suicidaire, l’Anxiété
généralisée, le trouble (Hypo)maniaque et la Dépendance à la drogue. Le trouble Antisocial a
été omis, afin d’éviter toute confusion avec le trouble Antisocial de l’Axe II pris en
considération ici.
Tableau 7- Fréquence des troubles de l’Axe I en terme de pourcentage.
Axe I
N=80
Episode Dépressif Majeur
Dysthymie
Risque suicidaire
Trouble (Hypo)maniaque
Trouble panique
Agoraphobie
Phobie sociale
Trouble Obsessionnel Compulsif
Etat de Stress Post-Traumatique
Alcool
Drogues
Anorexie
Boulimie
Anxiété généralisée
n
%
31
4
24
20
6
10
2
2
3
17
19
0
2
21
38,8
5
30
25
7,5
12,5
2,5
2,5
3,8
21,3
23,8
0
2,5
26,3
III-A-3) Fréquence des types de délits (N=80)
La fréquence des délits violents (83,3%) est plus élevée que la fréquence des délits
non violents (66,3%) (cf. tableau 8).
93
Tableau 8- Fréquence des types de délits en terme de pourcentage (N=80).
Délits
Délits violents
Vols qualifiés, violents
Voies de fait
Meurtres
Possession armes
Délits sexuels
Enlèvement
Délits non violents
Vols
Drogue
Infractions majeures code de la route
Fraudes
Incendie volontaire
Obstruction
Délits mineurs
Evasion
n
67
36
14
13
17
23
2
53
39
18
14
5
3
4
8
2
%
83,3
45
17,5
16,3
21,3
28,8
2,5
66,3
48,8
22,5
17,5
6,3
3,8
5
10
2,5
94
III-B- H1 : Liens et impacts entre troubles de l’Axe II et
Psychopathie (PCL-R)
Comme vu précédemment dans les hypothèses (cf. pp. 77-78), il existerait un lien
entre la psychopathie (PCL-R) et la présence d’autres troubles de la personnalité, notamment
de l’Axe II cluster B (Histrionique, Narcissique, Antisocial) et notamment du trouble
Borderline.
III-B-1) H1a : Comorbidité générale Psychopathie et troubles de
l’Axe II
Il existerait un lien entre la psychopathie évaluée sur un mode dimensionnel (PCL-R)
et la présence d’autres troubles de la personnalité, notamment parmi les troubles de l’Axe II
cluster B Histrionique, Narcissique, et Antisocial : plus le score de psychopathie (PCL-R)
augmente, plus le lien serait élevé.
III-B-1-a) Corrélations entre troubles de l’Axe II et la PCL-R (score total,
Facteur 1, Facteur 2).
Le trouble de la personnalité Paranoïaque est corrélé positivement et au score total de
la PCL-R (r=.448, p=.000) et aux scores des Facteurs 1 (r=.320, p=.004) et 2 (r=.474,
p=.000). Il en est de même pour les troubles de la personnalité Narcissique (PCL-R total
r=.405, p=.000 ; F1 r=.361, p=.001 ; F2 r=.358, p=.001) et Antisociale (PCL-R total r=.587,
p=.000 ; F1 r=.419, p=.000 ; F2 r=.632, p=.000). Par conséquent, plus un individu présente un
trouble de la personnalité Paranoïaque, plus le score total à la PCL-R donc le niveau de
psychopathie augmente ainsi que les scores à F1 et F2. Il en est de même par rapport aux
troubles de la personnalité Narcissique et Antisociale. Les corrélations sont les plus fortes
entre le trouble Antisocial et les scores à la PCL-R. La matrice de corrélations est présentée en
annexe 2 (cf. p. 191).
95
Tableau 9- Corrélations entre les scores à la PCL-R (total, Facteur 1, Facteur 2) et les troubles
de l’Axe II.
Troubles Axe II (N=80)
Evitante (n=7)
Dépendante (n=7)
Obsessionnelle-compulsive (n=8)
Dépressive (n=17)
Paranoïaque (n=20)
Narcissique (n=19)
Antisociale (n=43)
** p. <.01 ; * p. <.05
Score Total PCL-R
-.067
-.131
.12
.019
.448**
.405**
.587**
Score F1
-.037
-.128
.130
-.067
.320**
.361**
.419**
Score F2
-.069
-.071
.105
.097
.474**
.358**
.632**
III-B-1-b) Régressions linéaires simples et multiples entre les troubles de l’Axe
II et la PCL-R (score total, Facteurs 1 et 2)
Dans un premier temps, nous avons analysé les liens prédictifs par régressions
linéaires simples entre chaque trouble de l’Axe II et la PCL-R et ses Facteurs 1 et 2.
Autrement dit, quels sont les troubles qui ont le plus d’impact sur le niveau de psychopathie et
les dimensions narcissique/détachement émotionnel et comportementale ? Puis nous avons
effectué des régressions linéaires multiples afin d’estimer si la combinaison de certains
troubles de l’Axe II améliore la prédiction du score total à la PCL-R et des scores aux
Facteurs 1 et 2.
► Régressions linéaires simples
Les troubles Paranoïaque, Narcissique et Antisocial ont chacun un impact sur la
Psychopathie et les Facteurs 1 et 2 (cf. tableau 10).
Le trouble Paranoïaque a un effet sur le score total à la PCL-R (Bêta=.446, p=.000,
R2=.199) sur F1 (Bêta=.320, p=.004, R2=.102) et sur le Facteur 2 (Bêta=.474, p=.000,
R2=.225). Il explique donc 20% de la variance du score total à la PCL-R 10% de la variance
du score au Facteur 1 et 22% de la variance du score au Facteur 2.
Le trouble Narcissique a un impact sur le score total à la PCL-R (Bêta=.404, p=.000,
R2=.163), sur le Facteur 1 (Bêta=.361, p=.001, R2=.131) et sur le Facteur 2 (Bêta=.358,
p=.001, R2=.128). Il explique donc 16% de la variance du score total à la PCL-R et environ
13% de la variance du score au Facteur 1 et au Facteur 2.
96
Le trouble Antisocial a un impact sur le score total à la PCL-R (Bêta=.588, p=.000,
R2=.346), sur le Facteur 1 (Bêta=.419, p=.000, R2=.175) et sur le Facteur 2 (Bêta=.632,
p=.000, R2=.400). Il explique donc 35% de la variance du score total à la PCL-R, 17% de la
variance du score au Facteur 1 et 40% de la variance du score au Facteur 2.
Autrement dit, sur le niveau de psychopathie, c’est d’abord le trouble Antisocial qui a
le plus d’impact en l’augmentant fortement. Viennent ensuite les troubles Paranoïaque et
Narcissique. Sur la dimension interpersonnelle, les personnalités Antisociale d’abord et
Narcissique puis Paranoïaque ont un impact. Pour la dimension comportementale, les
personnalités Antisociale, Paranoïaque, et Narcissique ont un impact, celui du trouble
Antisocial étant bien au dessus de celui des autres (Bêta=.632, p=.000, R2=.400).
Tableau 10- Régressions linéaires simples entre chaque trouble de l’Axe II et les scores à la
PCL-R et aux Facteurs 1 et 2.
Model
Axe II
PCL-R
Total
1
Paranoïaque Facteur 1
Facteur 2
Model
Axe II
PCL-R
Total
1
Narcissique
Facteur 1
Facteur 2
Model
Axe II
PCL-R
Total
1
Antisocial
Facteur 1
Facteur 2
1
Erreur Standard ; 2Significativité
Bêta
.446
.320
.474
Bêta
.404
.361
.358
Bêta
.588
.419
.632
1
Std. Error
2,260
1,201
1,118
Std. Error
2,351
1,203
1,206
Std. Error
1,774
1,000
0,854
t
4,405
2,984
4,760
t
3,895
3,422
3,384
t
6,422
4,070
7,209
2
Sig.
.000
.004
.000
Sig.
.000
.001
.001
Sig.
.000
.000
.000
R2
.199
.102
.225
R2
.163
.131
.128
R2
.346
.175
.400
► Régressions linéaires multiples
En prenant en compte tous les troubles de l’Axe II avec des régressions linéaires
multiples (cf. tableau 11), seuls les troubles de la personnalité Antisociale, Paranoïaque et
Narcissique ressortent et sont donc les plus utiles pour expliquer les score à la PCL-R.
Il apparaît que le trouble de la personnalité Antisociale est toujours celui qui a le plus
d’impact sur le score à la PCL-R. Le trouble Paranoïaque est le second à avoir un effet sur
les scores à la PCL-R et au Facteur 2 mais pas sur le Facteur 1. L’association du trouble
Antisocial et du trouble Paranoïaque (modèle 2) explique 39% de la variance du score total à
la PCL-R et 45% du score au Facteur 2.
97
Concernant le Facteur 1, le trouble Antisocial est celui qui a le plus d’impact sur ce
facteur. Le trouble Narcissique vient ensuite et, associé au trouble Antisocial, ils expliquent
22% de la variance du Facteur 1.
Tableau 11- Régressions linéaires multiples concernant chaque trouble de l’Axe II et les
scores à la PCL-R et les Facteurs 1 et 2.
Model
1
Axe II
Antisocial
Antisocial
2
Paranoïaque
Model
Axe II
1
Antisocial
Antisocial
2
Narcissique
Model
Axe II
1
Antisocial
Antisocial
2
Paranoïaque
PCL-R
Total
Facteur
1
Facteur
2
Bêta
.588
.486
.242
Bêta
.419
.326
.231
Bêta
.632
.526
.254
Std. Error
1,774
1,893
2,179
Std. Error
1,000
1,068
1,251
Std. Error
0,854
0,904
1,041
t
6,422
4,978
2,477
t
4,070
2,971
2,102
t
7,209
5,662
2,732
Sig.
.000
.000
.015
Sig.
.000
.004
.039
Sig.
.000
.000
.008
R2
.346
.394
R2
.175
.220
R2
.400
.453
-
III-B-2) H1b : Plus spécifiquement, le trouble Borderline.
Un lien particulier relierait le score de psychopathie au trouble borderline (cluster B) :
il serait positif entre le score global et celui du Facteur 2 (poids des conduites antisociales et
de l’impulsivité) et absent voire inverse avec celui du Facteur 1 (abaissement du score en
raison du poids de la présence de caractéristiques borderline de type : réactivité émotionnelle,
capacité furtive d’attachement).
Concernant le trouble de la personnalité Borderline, plus ce trouble est présent, plus le
niveau de psychopathie (r=.241, p=.031) et le score au Facteur 2 (r=.299, p=.007) sont élevés
(cf. tableau 12).
Tableau 12- Corrélations entre le trouble Borderline et les scores à la PCL-R.
Troubles Axe II
Borderline (n=28)
** p. <.01 ; * p. <.05
Score PCL-R
.241**
Score F1
.124
Score F2
.299**
98
Il apparaît également comme prédicteur du score total à la PCL-R (Bêta=.240, p=.032,
R2=.057) et notamment du Facteur 2 (Bêta=.299, p=.007, R2=.090) (cf. tableau 13).
En revanche, le trouble Borderline n’apparaît pas dans les régressions multiples avec
les autres troubles comme prédicteur de la psychopathie puisqu’il ne ressort pas des
régressions linéaires multiples (cf. tableau 11 p. 98). Il perd donc toute significativité par
rapport aux troubles Antisocial et Paranoïaque.
Tableau 13- Régressions linéaires simples entre le trouble Borderline et les scores à la PCL-R.
Model
Axe II
1
Borderline
PCL-R
Total
Facteur 2
Bêta
.240
.299
Std. Error
2,226
1,100
t
2,179
2,770
Sig.
.032
.007
R2
.057
.090
III-B-3) Synthèse des résultats
Conformément à la littérature, ce sont les troubles du cluster B (Narcissique,
Borderline, Antisocial) qui augmentent et qui ont un impact sur les scores à la PCL-R.
Toutefois, le trouble Borderline n’est pas associé et n’a donc pas d’impact sur le Facteur 1
(attente d’un abaissement de score). Plus particulièrement, concernant le trouble de la
personnalité Borderline, corrélé positivement au score total de la PCL-R et au Facteur 2 (mais
pas au Facteur 1), il apparaît également comme ayant un impact. Il apparaît donc bien en lien
avec la Psychopathie et notamment sa composante comportementale (F2). Il n’a en revanche
plus d’effet (sa significativité disparaît) lorsque nous ajoutons les autres troubles de l’Axe II
(cf. tableau 11 p. 98 régressions linéaires multiples). Le trouble Paranoïaque, qui fait partie du
cluster A, apparaît également comme ayant un fort impact.
99
III-B-4) Liens entre les troubles de la personnalité (PCL-R et
Axe II) et les délits violents et non violents.
Pour vérifier nos hypothèses, nous avons ci-dessus évalué les liens et impacts entre les
scores à la PCL-R et les troubles de l’Axe II. Au-delà de nos hypothèses, nous avons
également voulu évaluer les liens corrélationnels entre les troubles de la personnalité (PCL-R
et Axe II) et les types de délits. Pour les troubles de l’Axe II, seuls ceux qui sont corrélés et
qui ont un impact sur les scores à la PCL-R ont été pris en compte (troubles Paranoïaque,
Narcissique, Borderline et Antisocial). Les matrices de corrélations sont présentées en annexe
3 (cf. pp. 192-195).
III-B-4-a) Troubles de la personnalité (PCL-R et Axe II) et types de délits
violents
a) Psychopathie et délits violents
Il n’existe pas de corrélations significatives entre les scores à la PCL-R et les délits
violents (cf. tableau 14). En revanche, les scores à la PCL-R et aux Facteurs 1 et 2 sont
fortement corrélés avec le nombre de délits violents. Ainsi, plus le niveau de psychopathie
augmente chez un sujet, plus il commettra de délits violents.
Tableau 14- Corrélations entre la PCL-R (score total, F1 et F2) et les délits violents puis le
nombre de délits violents commis par un sujet.
1
DV (n=67)
PCL-R sans item 20
.153
Facteur 1
.134
Facteur 2
.144
** p. <.01 ; 1- délits violents ; 2- diversité des types de délits
2
1
nombre de DV
.369**
.291**
.342**
► Concernant les types de délits violents (cf. tableau 15) :
Le vol qualifié et la possession d’arme sont fortement corrélés au score total à la PCLR et corrélés au Facteur 2. Ainsi, plus un sujet a un haut niveau de psychopathie et un fort
score à la dimension comportementale plus il commettra de vols qualifiés et sera en
100
possession d’arme ou explosifs. La dimension narcissique et de détachement émotionnel (F1)
y est aussi associée mais de manière moins significative. Les délits sexuels sont associés très
significativement et négativement au Facteur 2 et tendent à être négativement associés au
score total à la PCL-R (p=.051). Enfin, nous observons une tendance entre l’enlèvement et le
score total et la dimension comportementale de la psychopathie (p=.06).
Tableau 15- Corrélations entre les types de délits violents et la PCL-R (score total, F1 et F2).
PCL-R
Total sans item
1
n
20
Délits violents (N=67)
Vols qualifiés, violents
36
.355**
Voies de fait
14
.120
Homicide
13
.120
Possession armes
17
.338**
Délits sexuels
23
-.219
** p. <.01 ; * p. <.05 ; 1- diversité des types de délits
Facteur 1
.285*
.095
.089
.254*
-.142
Facteur 2
.403**
.168
.138
.312**
-.359**
b) Troubles de l’Axe II et délits violents
Les troubles de l’Axe II n’apparaissent pas en lien avec les délits violents (cf. tableau
16). Toutefois, le trouble Borderline et le trouble Antisocial sont fortement associés au
nombre de délits violents commis par un sujet.
Tableau 16- Corrélations entre les troubles de l’Axe II et les délits violents ainsi que le
nombre de délits violents.
Personnalité
Paranoïaque (n=20)
Narcissique (n=19)
Borderline (n=28)
Antisociale (n=43)
** p. <.01 ; 1- délits violents
1
DV (n=67)
.020
-.073
.039
.067
1
Nombre de DV
.181
.194
.322**
.398**
► Concernant les types de délits violents (cf. tableau 17):
Concernant les troubles du cluster B, la personnalité Antisociale est corrélée fortement
aux vols qualifiés (r=.386, p=.000) et à la possession d’arme (r=.359, p=.001). Elle est
corrélée mais de manière moindre aux voies de fait (r=.229, p=.04) et négativement aux délits
sexuels (r=-.242, p=.03). La personnalité Borderline est corrélée aux vols qualifiés (r=.232,
p=.04) et aux voies de fait (r=.283, p=.01).
101
La personnalité Paranoïaque tend à être corrélée avec les voies de fait (r=.190, p=.09)
et la possession d’arme (r=.194, p=.09).
Tableau 17 - Corrélations entre les types de délits violents et les troubles de l’Axe II.
Personnalité
Paranoïaque (n=20)
Narcissique (n=19)
Borderline (n=28)
Antisocial (n=43)
** p. <.01 ; * p. <.05
Vols qualifiés
(n=36)
.116
.086
.232*
.386**
Voies de fait
(n=14)
.190
.129
.283*
.229*
Homicide
(n=13)
-.020
-.007
.174
.069
Possession
armes (n=17)
.194t
.141
.067
.359**
Délits sexuels
(n=23)
-.112
-.030
-.119
-.242*
c) Synthèse
Nos résultats suggèrent notamment que les scores à la PCL-R et les troubles de l’Axe
II ne sont pas en lien avec la présence de délits violents. En revanche, la significativité se
situe entre la PCL-R, le trouble Antisocial ainsi que le trouble Borderline et le nombre de
délits violents commis par un sujet. Concernant les délits non violents, seule la dimension
comportementale de la psychopathie (F2) est en lien avec la présence de délits non violents et
le trouble Borderline avec le nombre de délits non violents.
Concernant plus précisément les types de délits, aucun résultat n’était significatif entre
le niveau de psychopathie et les types de délits non violents. En revanche, nos résultats
montrent de fortes relations entre la PCL-R et les types de délits violents notamment en ce qui
concerne : 1) le score total à la PCL-R et les vols qualifiés ainsi que la possession d’arme,
mais surtout 2) le score au Facteur 2 et ces mêmes délits (le Facteur 1 aussi y est associé mais
moins fortement). Pour les troubles de l’Axe II, le trouble Antisocial est corrélé un peu plus
fortement aux mêmes délits (vols qualifiés et possession d’arme) que le score total à la PCL-R
(à l’exception de la corrélation pour le trouble antisocial avec les voies de fait). Les
corrélations sont en revanche un peu plus fortes avec le Facteur 2 de la PCL-R que le trouble
Antisocial confirmant ainsi l’impact de la dimension comportementale et impulsive. Le
trouble Borderline est lui aussi corrélé aux vols qualifiés et aux voies de fait.
Ainsi, les relations entre les troubles de la personnalité et les types de délits se
retrouvent davantage au niveau des délits violents. Ceci est surtout le cas en ce qui concerne
le niveau de psychopathie.
102
III-B-4-b) Troubles de la personnalité (PCL-R et Axe II) et délits non violents
Afin d’évaluer les liens entre les types de délits et les scores à la PCL-R, nous avons
omis du score total à la PCL-R l’item 20 faisant référence à la diversité des types de délits.
a) Psychopathie et délits non violents
Le Facteur 2 est corrélé aux délits non violents (cf. tableau 18). Il n’existe pas de
corrélations significatives entre les scores à la PCL-R et le nombre de délits non violents
commis par un sujet.
Tableau 18- Corrélations entre les scores à la PCL-R et les délits non violents puis le nombre
de délit non violents commis par un sujet.
1
DNV (n=53)
PCL-R sans item 20
.172
Facteur 1
.132
Facteur 2
.221*
** p. <.01 ; * p. <.05 ; 1- DNV= délits non violents.
Nombre de DNV
.017
-.036
.106
1
► Concernant les types de délits non violents (cf tableau 19) :
Aucun résultat n’est significatif entre la psychopathie et les types de délits non
violents. Nous observons seulement une tendance relative aux vols en lien avec le Facteur 2
(r=.216, p=.054).
Tableau 19- Corrélations entre les types de délits non violents et la PCL-R (score total, F1 et
F2).
PCL-R
Délits non violents (N=53)
vols
drogue
code route
fraude
délits mineurs
1
- diversité des délits.
n
39
18
14
5
8
Total sans item
1
20
.137
-.144
-.026
-.019
-.070
Facteur 1
.069
-.121
-.075
-.035
-.094
Facteur 2
.216
-.011
-.012
-.073
-.031
103
b) Troubles de l’Axe II et délits non violents
La personnalité Narcissique tend à être corrélée aux délits non violents (cf. tableau
20). La personnalité Borderline est corrélée avec le nombre de délits non violents. Ainsi, plus
un sujet présentera le trouble Borderline, plus le nombre de délits non violents commis
augmentera.
Tableau 20- Corrélations entre les troubles de l’Axe II et les délits non violents puis le
nombre de délits non violents commis par un sujet.
Personnalité
Paranoïaque (n=20)
Narcissique (n=19)
Borderline (n=28)
Antisociale (n=43)
* p. <.05 ; 1- DNV= délits non violents
1
DNV (n=53)
.168
.212
.136
.133
Nombre de DNV
.067
.172
.255*
.213
1
► Concernant les types de délits non violents (cf. tableau 21):
Pour les troubles du cluster B, la personnalité Borderline est fortement corrélée aux
délits relatifs à la drogue (r=.295, p=.008) et est corrélée aux délits mineurs (r=.280, p=.01).
La personnalité Narcissique tend à être corrélée aux délits majeurs au code de la route
(r=.207, p=.07). La personnalité Antisociale n’est corrélée à aucun délit non violent.
Tableau 21- Corrélations entre les types de délits non violents et les troubles de l’Axe II.
Personnalité
Paranoïaque (n=20)
Narcissique (n=19)
Borderline (n=28)
Antisociale (n=43)
** p. <.01 ; * p. <.05
Vols (n=39)
.072
.102
.071
.152
Drogue (n=18)
-.104
-.019
.295**
.020
Code route
(n=14)
.114
.207
.007
.163
Fraudes (n=5)
.089
-.023
.135
-.071
Délits mineurs
(n=8)
-.096
.108
.280*
.142
c) Synthèse
La dimension comportementale et impulsive de la psychopathie (F2) apparaît en lien
avec les délits non violents, mais aucun des scores de psychopathie (total, F1, F2) n’est en
lien avec un type de délits non violents en particulier. En revanche, nous observons davantage
de corrélations entre les troubles de l’Axe II (surtout avec le trouble Borderline) et certains
types de délits non violents. Concernant le nombre de délits non violents, les résultats
suggèrent qu’aucun des scores de psychopathie (total, F1, F2) n’y est associé. Ainsi, le niveau
104
de psychopathie n’est pas en lien avec le nombre de délits non violents commis par un sujet. Il
en est de même pour les troubles Paranoïaque, Narcissique et Antisocial. Le seul trouble de
l’Axe II cluster B à être associé au nombre de délits non violents commis est le trouble
Borderline.
105
III-C- H2 : Liens et impacts entre troubles de la
personnalité (Psychopathie et Axe II) et évaluation du
Risque de récidive (HCR-20)
Notre deuxième hypothèse concerne donc les liens entre la présence de Psychopathie
d’une part et la présence des troubles de l’Axe II (notamment du cluster B : Narcissique,
Borderline, Antisocial) d’autre part avec la HCR-20. La psychopathie, tout comme la
présence de troubles de l’Axe II notamment du cluster B augmenterait les scores à la HCR-20
(global, Facteurs H, C et R). Les matrices de corrélations sont présentées en annexe 4 (cf. pp.
196-197).
III-C-1) Psychopathie (PCL-R) et évaluation du Risque de
récidive (HCR-20)
III-C-1-a) Corrélations entre la PCL-R et la HCR-20
Rappelons que lorsque nous avons étudié les liens entre les scores à la PCL-R et ceux
obtenus à la HCR-20, nous avons omis au score total de la HCR-20 et au Facteur H l’item H7
« Psychopathie » relatif au score à la PCL-R afin d’éviter un effet de circularité.
Le score à la HCR-20 ainsi qu’aux Facteurs H, C et R sont fortement corrélés avec le
score à la PCL-R et aux Facteurs 1 et 2 (cf. tableau 22). Ainsi, plus le niveau de psychopathie
et les dimensions inrepersonnelles et comportementales augmentent, plus le risque de récidive
et ses dimensions historique, clinique et de gestion du risque augmentent. La plus forte
corrélation concerne le score total à la PCL-R et le score au Facteur C (r=.827, p=.000) mais
aussi le score total à la PCL-R et le score total à la HCR-20 (r=.825, p=.000).
106
Tableau 22- Corrélations entre les scores à la PCL-R et à la HCR-20 (N=80).
HCR sans H7
PCL-R
.825**
Facteur 1
.695**
Facteur 2
.816**
** p. <.01 ; * p. <.05
Facteur H sans
H7
.673**
.486**
.734**
Facteur C
.827**
.802**
.743**
Facteur R
.753**
.662**
.734**
III-C-1-b) Régressions linéaires
a) Régressions linéaires simples
Le score total à la PCL-R ainsi que les Facteurs 1 et 2 ont chacun un fort effet à la fois
sur le score total à la HCR-20 et les Facteurs H, C et R (cf. tableau 23).
L’effet le plus fort semble être celui du score total à la PCL-R sur le score total à la
HCR-20 (Bêta=.825, p=.000, R2=.681) et sur le Facteur C (Bêta=.827, p=.000, R2=.684). Le
score total à la PCL-R explique alors 68% de la variance de ces scores.
Tableau 23- Régressions linéaires simples concernant les scores à la PCL-R et à la HCR-20
(N=80)
Model
1
Model
1
Model
1
Model
1
PCL-R
total
F1
F2
PCL-R
total
F1
F2
PCL-R
total
F1
F2
PCL-R
total
F1
F2
HCR-20
Total sans H7
HCR-20
Facteur H sans
H7
HCR-20
Facteur C
HCR-20
Facteur R
Bêta
.825
.695
.816
Bêta
.673
.486
.734
Bêta
.827
.802
.743
Bêta
.753
.662
.734
Std. Error
0,065
0,165
0,133
Std. Error
0,046
0,109
0,085
Std. Error
0,018
0,037
0,042
Std. Error
0,023
0,051
0,047
t
12,910
8,538
12,472
t
8,032
4,916
9,543
t
12,982
11,846
9,807
t
10,114
7,794
9,548
Sig.
.000
.000
.000
Sig.
.000
.000
.000
Sig.
.000
.000
.000
Sig.
.000
.000
.000
R2
.681
.483
.666
R2
.453
.237
.539
R2
.684
.643
.552
R2
.567
.438
.539
Concernant le score total à la HCR-20
C’est donc le score total à la PCL-R qui a le plus d’impact sur le score total à la HCR20. Le Facteur 2 a également un fort impact (Bêta=.816, p=.000, R2=.666) et en explique
quasi 67% de la variance. L’impact du Facteur 1 est un peu moins élevé mais très significatif
(Bêta=.695, p=.000, R2=.483) et explique 48% de la variance.
107
Concernant le Facteur Historique
L’impact le plus fort est celui du Facteur 2 sur le Facteur H (Bêta=.734, p=.000,
R2=.539) qui en explique 54% de la variance. Le score total à la PCL-R a également un fort
impact et explique 45% de la variance. Le moins fort impact (mais qui est tout de même très
significatif) est celui du Facteur 1 sur le Facteur H (Bêta=.486, p=.000, R2=.237). Il en
explique 24% de la variance.
Concernant le Facteur Clinique
Le score total à la PCL-R a donc un fort impact (Bêta=.753, p=.000, R2=.567) et
explique 57% de la variance. Le Facteur 1 a un fort effet et en explique 64% de la variance
(Bêta=.802, p=.000, R2=.643). Le Facteur 2 a un impact et explique 55% de la variance
(Bêta=.743, p=.000, R2=.552).
Concernant le Facteur Risque
Le score total à la PCL-R a un fort impact (Bêta=.753, p=.000, R2=.567) et explique
57% de la variance. Le Facteur 1 a un effet (Bêta=.662, p=.000, R2=.438) dont il explique
44% de la variance. Le Facteur 2 a un impact et explique 54% de la variance (Bêta=.734,
p=.000, R2=.539).
b) Régressions linéaires multiples
Les régressions linéaires multiples nous permettaient d’évaluer l’impact des
comorbidités sur une autre variable (par exemple comorbidité Axe II sur la PCL-R). Ici, elles
nous ont permis de voir parmi les scores à la PCL-R (total, F1, F2) lesquels sont les plus
« utiles » en terme de « prédiction » ou d’impact. Nous parlerons donc ici en terme de
variables les plus utiles.
Concernant le score total à la HCR-20 (cf. tableau 24)
Le score total à la PCL-R est le plus utile prédicteur d’un haut score à la HCR-20. Le
deuxième prédicteur le plus utile est le score au Facteur 2. Ces scores représentent donc les
deux plus utiles variables en terme d’impact sur le score total la HCR-20. Ils expliquent
presque 71% du score total à la HCR-20 (R2=.707). Le Facteur 1 perd sa significativité.
108
Concernant les facteurs de la HCR-20 (cf. tableau 24)
Le Facteur 2 de la PCL-R est le plus utile prédicteur du Facteur H. Le score total à la
PCL-R et le Facteur 1 perdent leur significativité.
Le score total à la PCL-R est le plus utile prédicteur des Facteurs C et R de la HCR20. Le Facteur 1 de la PCL-R perd toute significativité concernant l’impact qu’il pouvait avoir
sur le score total à la HCR-20 et aux Facteurs H, C et R. Le Facteur 2 perd également sa
significativité sur les Facteurs C et R au profit du score total à la PCL-R.
Tableau 24- Régressions linéaires multiples concernant les scores à la PCL-R et à la HCR-20
(N=80)
Model
1
Model
PCL-R
Score total
Score total
Facteur 2
PCL-R
1
Model
1
Model
1
Facteur 2
PCL-R
Score total
PCL-R
Score total
2
HCR-20
Total sans H7
HCR-20
Facteur H sans
H7
HCR-20
Facteur C
HCR-20
Facteur R
Bêta
.825
.480
.381
Bêta
Std. Error
0,065
0,149
0,295
Std. Error
t
12,91
3,295
2,62
t
Sig.
.000
.001
.010
Sig.
R2
.681
.707
R2
.734
Bêta
.827
Bêta
.753
0,085
Std. Error
0,018
Std. Error
0,023
9,543
t
12,982
t
10,114
.000
Sig.
.000
Sig.
.000
.539
R2
.684
R2
.567
III-C-1-c) Synthèse des résultats
Les corrélations montrent un fort lien entre les scores à la PCL-R (total, F1, F2) et les
scores à la HCR-20 (total, Facteurs H, C et R). Les régressions simples indiquent également
un fort impact des scores à la PCL-R sur les scores à la HCR-20. Les plus forts impacts quasi
équivalents sont ceux du score total de la PCL-R sur le score total à la HCR-20 (R2=.681) et
du score total à la PCL-R sur le Facteur Clinique (R2=.684). Les régressions multiples nous
renseignent alors sur ce qui est le plus utile dans la PCL-R pour prédire les scores à la HCR20 et aux Facteurs H, C et R. Il apparaît alors que le score total à la PCL-R est le prédicteur le
plus utile pour le score total à la HCR-20 et les Facteurs, Clinique et Risque. Le Facteur 2 est
le plus utile pour expliquer un fort score au Facteur H. Le Facteur 1 (dimension narcissique et
de détachement émotionnel) perd toute significativité face au score total à la HCR-20 et au
Facteur 2 (dimension comportementale).
109
III-C-2) Troubles de l’Axe II et évaluation du Risque de récidive
(HCR-20)
III-C-2-a) Relations entre les troubles de l’Axe II et la HCR-20
a) Corrélations
Les troubles de la personnalité Paranoïaque, Narcissique et Antisociale sont fortement
corrélés avec la HCR-20 et ses facteurs (cf. tableau 25). Le trouble Borderline est corrélé
fortement avec la HCR-20 et le Facteur Historique, et tend à être corrélé avec le Facteur R.
Tableau 25- Corrélations entre les scores à la HCR-20 et les troubles de l’Axe II (N=80)
Axe II
Evitante
Dépendante
Obsessionnelle-compulsive
Dépressive
Paranoïaque
Narcissique
Antisociale
** p. <.01 ; * p. <.05
n=
7
7
8
17
20
19
43
HCR
-.103
-.130
-.078
.080
.482**
.403**
.589**
Facteur H
-.074
-.109
-.072
.176
.509**
.416**
.630**
Facteur C
-.102
-.135
-.012
-.115
.290**
.322**
.450**
Facteur R
-.106
-.136
-.145
.015
.413**
.292**
.423**
b) Régressions linéaires simples et multiples
► Régressions linéaires simples
Les troubles Paranoïaque, Narcissique et Antisocial ont chacun un effet sur le score à
la HCR-20 et les Facteurs H, C et R (cf. tableau 26).
Le trouble Antisocial a un fort impact sur le score total à la HCR-20 (Bêta=.589,
p=.000, R2=.347) dont il explique 35% de la variance. Il a un impact encore plus fort sur le
Facteur H (Bêta=.630, p=.000, R2=.397) dont il explique 40% de la variance. Il a également
un impact sur les Facteurs C (Bêta=.450, p=.000, R2=.202) et R (Bêta=.423, p=.000,
R2=.179) dont il explique respectivement 20% et 18% de la variance.
Le trouble Paranoïaque a un impact sur le score total à la HCR-20 (Bêta=.482,
p=.000, R2=.233) dont il explique 23% de la variance. Il a un impact un peu plus fort sur le
110
Facteur H (Bêta=.509, p=.000, R2=.259) dont il explique 26% de la variance. Il a également
un impact sur les Facteurs C (Bêta=.290, p=.009, R2=.084) et R (Bêta=.413, p=.000,
R2=.170) dont il explique respectivement 8% et 17% de la variance.
Le trouble Narcissique a un impact sur le score total à la HCR-20 (Bêta=.403, p=.000,
R2=.162) dont il explique 16% de la variance. Il a un impact à peine plus fort sur le Facteur H
(Bêta=.416, p=.000, R2=.173) dont il explique 17% de la variance. Il a également un impact
sur les Facteurs C (Bêta=.322, p=.004, R2=.103) et R (Bêta=.292, p=.009, R2=.085) dont il
explique respectivement 10% et 8% de la variance.
Tableau 26- Régressions linéaires simples entre les troubles de l’Axe II et les scores à la
HCR-20.
Model
Axe II
1
Paranoïaque
Model
Axe II
1
Narcissique
Model
Axe II
1
Antisocial
HCR-20
Total
Facteur H
Facteur C
Facteur R
HCR-20
Total
Facteur H
Facteur C
Facteur R
HCR-20
Total
Facteur H
Facteur C
Facteur R
Bêta
.482
.509
.290
.413
Bêta
.403
.416
.322
.292
Bêta
.589
.630
.450
.423
Std. Error
2,193
1,149
0,669
0,700
Std. Error
2,331
1,235
0,673
0,748
Std. Error
1,757
0,900
0,542
0,604
t
4,863
5,217
2,677
4,002
t
3,886
4,035
2,999
2,691
t
6,44
7,159
4,447
4,122
Sig.
.000
.000
.009
.000
Sig.
.000
.000
.004
.009
Sig.
.000
.000
.000
.000
R2
.233
.259
.084
.170
R2
.162
.173
.103
.085
R2
.347
.397
.202
.179
► Régressions linéaires multiples
Le trouble Antisocial apparaît comme le meilleur prédicteur et l’impact est inchangé
par rapport aux régressions simples sauf pour le score total à la HCR-20 qui prend un peu plus
de valeur (cf. tableau 27).
La comorbidité des personnalités Antisociale et Paranoïaque (cf. tableau 27) a un
impact sur le score total à la HCR-20 (41% de la variance expliquée), le Facteur H (47% de la
variance expliquée) et le Facteur R mais pas sur le Facteur C (23% de la variance expliquée).
111
Tableau 27- Régressions linéaires multiples entre les troubles de l’Axe II et les scores à la
HCR-20 (N=80).
Model
1
2
Model
1
2
3
4
Model
1
Model
1
2
Axe II
Antisocial
Antisocial
Paranoïaque
Axe II
Antisocial
Antisocial
Paranoïaque
Antisocial
Paranoïaque
Borderline
Antisocial
Paranoïaque
Borderline
Evitant
Axe II
Antisocial
Axe II
Antisocial
Antisocial
Paranoïaque
HCR-20
Score total
HCR-20
Facteur H
HCR-20
Facteur C
HCR-20
Facteur R
Bêta
.589
.469
.285
Bêta
.630
.505
.297
.464
.258
.185
.481
.214
.257
-.195
Bêta
.450
Bêta
.423
.303
.286
Std. Error
1,757
1,845
2,125
Std. Error
0,900
0,937
1,078
0,938
1,076
0,934
0,917
1,073
0,970
1,548
Std. Error
0,542
Std. Error
0,604
0,642
0,740
t
6,44
4,884
2,969
t
7,159
5,522
3,241
5,059
2,827
2,116
5,371
2,353
2,83
-2,273
t
4,447
t
4,122
2,78
2,619
Sig.
.000
.000
.004
Sig.
.000
.000
.002
.000
.006
.038
.000
.021
.006
.026
Sig.
.000
Sig.
.000
.007
.011
R2
.387
.414
R2
.397
.469
.499
.531
R2
.202
R2
.179
.226
-
C’est ensuite pour le Facteur H que nous observons le plus de comorbidité des troubles
de l’Axe II qui ont un impact. Ainsi, Le trouble Antisocial apparaît toujours comme le
meilleur prédicteur et, associé au trouble Paranoïaque (modèle 2) comme vu ci-dessus, il
explique 47% de la variance. Le troisième modèle fait apparaître le trouble Borderline. La
comorbidité des personnalités Antisociale, Paranoïaque et Borderline explique 50% de la
variance. Enfin, le quatrième modèle introduit le trouble de la personnalité Evitante mais de
manière négative alors que non corrélée significativement. Ceci voudrait dire que, bien que
non corrélée, elle jouerait un rôle quand en interaction avec les trois troubles cités
précédemment. Ainsi, la comorbidité des personnalités Antisociale, Paranoïaque,
Borderline et Evitante explique 53% de la variance du score au Facteur H. Le trouble
Narcissique perd toute significativité sur le score à la HCR-20 et aux Facteurs H, C et R.
112
III-C-2-b) Effet particulier au trouble Borderline sur la HCR-20.
Le trouble Borderline est corrélé au score total à la HCR-20 et plus particulièrement
avec le Facteur H. Il tend à être corrélé avec le Facteur R (cf. tableau 28).
Tableau 28- Corrélations entre le trouble Borderline et les scores à la HCR-20.
Axe II
Borderline
** p. <.01 ; * p. <.05
HCR
.325**
Facteur H
.408**
Facteur C
.151
Facteur R
.186
Le trouble Borderline a un impact sur le score total à la HCR-20 dont il explique 11%
de la variance et plus particulièrement sur le Facteur H dont il explique 17% de la variance
(cf. tableau 29).
Tableau 29- Régressions linéaires simples entre le trouble Borderline et les scores à la HCR20.
Model
Axe II
1
Borderline
HCR-20
Total
Facteur H
Bêta
.325
.408
Std. Error
2,149
1,106
t
3,04
3,944
Sig.
.003
.000
R2
.106
.166
Le trouble Borderline perd sa significativité et donc son impact sur le score total à la
HCR-20 au profit des troubles Antisocial et Paranoïaque mais apparaît donc dans le troisième
modèle (cf. tableau 30). Ainsi, l’association des troubles Antisocial, Paranoïaque et
Borderline, même si sa significativité est plus faible (p=.038), explique 50% de la variance du
score au Facteur H.
Tableau 30- Rappel des régressions multiples entre les troubles de l’Axe II et les scores à la
HCR-20 faisant apparaître le trouble Borderline.
Model
1
2
3
4
Axe II
Antisocial
Antisocial
Paranoïaque
Antisocial
Paranoïaque
Borderline
Antisocial
Paranoïaque
Borderline
Evitant
HCR-20
Facteur H
Bêta
.630
.505
.297
.464
.258
.185
.481
.214
.257
-.195
Std. Error
.900
.937
1,078
.938
1,076
.934
.917
1,073
.970
1,548
t
7,159
5,522
3,241
5,059
2,827
2,116
5,371
2,353
2,83
-2,273
Sig.
.000
.000
.002
.000
.006
.038
.000
.021
.006
.026
R2
.397
.469
.499
.531
-
113
III-C-2-c) Synthèse des résultats
Les troubles ayant un impact sur les scores à la PCL-R et sur les Facteurs H, C et R
sont les troubles Paranoïaque, Narcissique et Antisocial. Le trouble Borderline n’a d’impact
que sur le score total à la HCR-20 et le Facteur H. Plus précisément, le trouble Antisocial
apparaît ici aussi comme le meilleur prédicteur concernant la HCR-20 et ses facteurs.
L’association du trouble Antisocial et du trouble Paranoïaque a, comme précédemment, un
fort impact sur le score total et les Facteurs H et R. Le trouble Borderline bien qu’ayant à lui
seul un impact sur le score total à la HCR-20 et au Facteur H perd sa significativité sur le
score total. Il la garde pour le Facteur H même s’il perd un peu en significativité face aux
troubles Antisocial et Paranoïaque. Pour le Facteur Historique, quatre modèles apparaissent
(cf. tableau 30 p. 113).
En résumé, nous avons vu que le trouble Antisocial était le plus utile des prédicteurs.
Viennent ensuite les troubles Paranoïaque, Borderline et Evitant.
La personnalité Evitante n’apparaît pas associée avec le Facteur H (cf. tableau 25 p.
110) ni comme ayant à elle seule un impact (cf. tableau 26 p. 111). Il semble qu’avec d’autres
troubles, ici les troubles de la personnalité Antisociale, Paranoïaque et Borderline, elle puisse
avoir un effet mais négatif, c'est-à-dire dans le sens d’un amoindrissement du Facteur H.
114
Quatrième partie
IV- Discussion
115
La psychiatrie a porté son intérêt sur des formes nouvelles de psychopathie, souvent
repérées dès l’adolescence, parfois émaillées de décompensations d’allure psychotique mais
essentiellement
marquées
par
la
violence
des
troubles
du
comportement.
Ces
psychopathologies sont de plus en plus souvent constatées dans les établissements
pénitentiaires. De plus, selon Senon (2004) « la recrudescence des violences auto et hétéroagressives dans les établissements pénitentiaires est un constat dans tous les pays européens
(p. 650) ». C’est donc dans ce contexte, avec la recherche de types de psychopathie, de
variantes, que s’inscrit notre recherche.
A un niveau purement descriptif, cette étude porte sur une population carcérale
relativement jeune (M=31,48 ; SD=11,061 ; min=18 ; max=59 ; N=80). Toutes les personnes
ayant participé à cette recherche sont incarcérées et condamnées. La Maison d’Arrêt de Blois
reçoit davantage de courtes peines et des peines plus légères. La Maison d’Arrêt de Fresnes
nous a permis d’accéder à d’autres catégories de sujets ayant commis d’autres types de délits
et des peines bien plus longues, la peine maximum d’un sujet de notre recherche étant la
perpétuité assortie d’une période de trente ans de sûreté. Tous les types de délits étaient pris
en considération.
Les moyennes obtenues aux scores à la PCL-R (total=20,33 ; F1=8,86 ; F2=9,85) sont
légèrement supérieures à ce qui a été relevé dans d’autres études de population carcérale (total
=17,5 ; F1=7,3 ; F2=8,6 ; N=282 : Pham, Saloppé, et al., 2007). Elles sont quasi similaires
pour les Facteurs 1 et 2 et plus élevées pour le score total à la PCL-R (total=17,8 ; F1=9 ;
F2=10 ; N=60) dans une publication antérieure de nos premiers résultats (Pham, Chevrier, et
al., 2005). Les moyennes ont pu varier en fonction de la population et de l’effectif. La
moyenne du QI (N=80) est à peine en dessous de la moyenne (M=98,99 ; SD=11,365 ;
N=74).
116
IV-A) Hypothèse 1 : Impact des troubles de l’Axe II sur
le niveau de psychopathie (PCL-R)
Notre première hypothèse concernant les troubles de l’Axe II et la psychopathie est en
partie vérifiée. Nous observons en tout cas, sur l’ensemble des sujets détenus en Maison
d’Arrêt, des résultats allant dans le sens de la littérature. L’hypothèse H1a postulant que la
présence de troubles de l’Axe II notamment du cluster B augmente le niveau de psychopathie
est vérifiée. Toutefois, nous nous attendions dans la deuxième hypothèse H1b à ce que le
trouble Borderline, plus particulièrement, influence le niveau de psychopathie en
n’augmentant pas le Facteur 1, voire en ayant un effet inverse dessus.
IV-A-1) Comorbidité générale entre la Psychopathie (PCL-R) et
les troubles de l’Axe II notamment du cluster B (H1a)
La question était d’évaluer l’effet des troubles de la personnalité de l’Axe II du DSMIV sur la psychopathie (PCL-R). Rappelons que le trouble Histrionique fait partie du cluster B
mais le nombre de sujets présentant ce trouble était insuffisant (n=2) pour pouvoir le prendre
en considération.
En accord avec la littérature (McKay, 1986 ; Hare, 1991, 2003 ; Hart & Hare, 1997 ;
Widiger, 2006), nous observons que ce sont les troubles du cluster B de l’Axe II qui ont un
impact sur le niveau de psychopathie (par ordre d’importance, le trouble Antisocial, le trouble
Narcissique et le trouble Borderline). Le trouble Paranoïaque (cluster A) émerge également de
nos résultats, il était moins attendu. Il apparaît fortement associé au niveau de psychopathie.
Aucun trouble du cluster C (personnalités Evitante, Dépendante, Obsessionnelle-compulsive)
ni les troubles non spécifiés (personnalités Dépressives et Négativistes) n’apparaissent en lien
avec la psychopathie.
Les troubles du cluster B Antisocial et Narcissique ainsi que le trouble de la
personnalité Paranoïaque augmentent le niveau de psychopathie général (score total à la PCL-
117
R, de narcissisme et de détachement émotionnel (F1) et plus particulièrement les
comportements antisociaux chroniques et impulsifs (F2). Les résultats pour le trouble
Borderline sont plus nuancés : il augmente le niveau de psychopathie et la composante
comportementale (F2) mais n’a pas de lien avec les caractéristiques de narcissisme et de
détachement émotionnel (F1).
IV-A-1-a) Relations entre les troubles Antisocial, Narcissique et Paranoïaque
avec la psychopathie (PCL-R)
a) Le trouble de la personnalité Antisociale : le plus en lien avec la PCL-R et le plus
prédicteur d’un haut niveau de psychopathie.
Comme attendu et en accord avec la littérature (Widiger, 2006), le trouble le plus
associé et le plus prédictif d’un haut niveau de Psychopathie (score total à la PL-R) est le
trouble Antisocial. Ce trouble est donc très fortement associé à la psychopathie mais surtout à
de forts comportements antisociaux chroniques. Il est également associé à un niveau plus
élevé de narcissisme et détachement émotionnel (F1) mais un peu moins que pour le Facteur 2
et le score total à la PCL-R. Nous pouvions donc nous attendre à ce que ce trouble soit celui
qui ait aussi le plus fort impact sur le score total à la PCL-R, et sur les scores aux Facteurs 2 et
1 (respectivement R2=.346 ; R2=.400; R2=.175). Le trouble Antisocial explique à lui seul et
par ordre d’importance 40% de la variance du score au Facteur 2, 35% de la variance du score
total à la PCL-R, et 18% de celle du Facteur 1. Ce trouble a donc d’abord un plus fort impact
sur le Facteur 2. Ceci n’est pas étonnant car le trouble Antisocial tel qu’évalué par le SCID-II
se situe davantage à un niveau comportemental et en accord avec la littérature, le Facteur 2 est
un plus fort prédicteur des comportements antisociaux que le Facteur 1 (Hare, 2003 ; Douglas
et al., 2006 ; Edens, Campbell, & Weir, 2007).
Le trouble Antisocial est souvent « apparenté » à la psychopathie. Or, plusieurs études
ont montré les différences et similitudes entre ces deux troubles (Hare et al., 1991 ; Widiger,
et al., 1996) et leur co-occurrence (Widiger, 2006). Les points communs sont en premier lieu
l’instabilité, l’inadaptabilité et l’impulsivité. Ceci peut alors être source de confusion mais
explique aussi que le trouble de la personnalité Antisocial soit si fortement associé à un haut
niveau de psychopathie. La co-occurrence des personnalités Antisociale et psychopathique
engendre de nombreux comportements criminels sévères ainsi que moins d’émotions
118
(Kosson, Lorenz, & Newman, 2006). Le trouble Antisocial avec psychopathie et le trouble
Antisocial sans psychopathie sont donc deux syndromes distincts (Ibid.). La différence
essentielle se situe au niveau des caractéristiques interpersonnelles soulignées par Hare et qui
composent le Facteur 1.
b) Le trouble de la personnalité Narcissique et son effet sur le niveau de psychopathie
Nos résultats suggèrent que l’impact de la personnalité Narcissique sur le Facteur 1 est
modéré (le trouble Antisocial est davantage associé et a plus d’influence sur le Facteur 1 que
celui-ci). L’impact est sensiblement le même sur le Facteur 2. L’impact du trouble
Narcissique est plus élevé concernant le score total à la PCL-R.
Nous aurions donc pu nous attendre à un impact plus élevé sur le Facteur 1 puisque les
caractéristiques principales de la personnalité Narcissique sont relatives à un sentiment de
grandeur associé à des capacités réduites à aimer les autres et à une recherche constante de
gloire. Ce sentiment serait alors perçu comme un mécanisme de défense contre un sentiment
d’infériorité consécutif à de sévères frustrations, ces sujets se montrant alors arrogants,
immoraux et irrespectueux envers l’autorité.
Dans ce sens et selon Kernberg, les principales caractéristiques cliniques sont une
préoccupation excessive pour soi, un besoin excessif d’être aimé et admiré par les autres ainsi
qu’une grande dépendance pour les signes de reconnaissance et d’admiration, des ambitions
élevées, et des fantasmes grandioses.
Tous ces critères relatifs au Facteur 1 de la PCL-R expliquent le lien entre la
personnalité Narcissique et la psychopathie. Eissler (1949) suppose que le passage à l’acte
destructeur fonctionnerait comme une tentative de réparation pour renforcer l’estime de soi.
c) Impact du trouble Paranoïaque (cluster A) sur le niveau de psychopathie.
Concernant le score total à la PCL-R et après le trouble Antisocial, c’est le trouble de
la personnalité Paranoïaque qui est le plus associé et a le plus d’impact sur le score total à la
PCL-R (20%) et sur le score au Facteur 2 (23%). Il est également associé au Facteur 1 et a un
impact dessus mais de manière plus modérée (10% de la variance expliquée) que le trouble
Antisocial (18%) ou le trouble Narcissique (13%).
Ce lien entre le trouble Paranoïaque (Cluster A) et la PCL-R était moins attendu mais
émerge fortement de nos résultats. Ceci va alors dans le sens de Ross et al. (2008) qui ont
119
évoqué le fait que la personnalité Paranoïaque pourrait être en lien avec les deux variantes
primaire et secondaire de psychopathie et aurait un impact. Sur un plan clinique, ce point est
important compte tenu de la difficulté de prise en charge de ces personnalités.
Concernant nos résultats, c’est encore sur la dimension comportementale que l’impact
est le plus élevé. Une méfiance exagérée (« besoin de garder les yeux ouverts »), être toujours
sur la défensive (« se mettre souvent en colère quand on le critique », se sentir persécuté
(« détecter des insultes ou menaces cachées »), attaqué, même sans raison valable peut faire
que ces sujets « attaquent » avant d’être attaqués et pourrait expliquer cette influence sur la
dimension comportementale de la psychopathie.
De la même manière que nous l’avons fait pour les troubles du cluster B, il est
nécessaire de citer ici les critères de la personnalité Paranoïaque du DSM-IV (Encadré 4) :
Encadré 4- Critères de la personnalité Paranoïaque du DSM-IV (APA, 1996, p. 749)
A. Méfiance soupçonneuse envahissantes envers les autres dont les intentions sont interprétées comme
malveillantes, qui apparaît au début de l’âge adulte et est présentes dans divers contextes comme en témoignent
au moins quatre des manifestations suivantes :
1) Le sujet s’attend sans raison suffisante à ce que les autres l’exploitent, lui nuise ou le trompent.
2) Est préoccupé(e) par des doutes injustifiés concernant la loyauté ou la fidélité de ses amis ou
associés.
3) Est réticent à se confier à autrui en raison d’une crainte injustifiée que l’information soit utilisée de
manière perfide contre lui.
4) Discerne des significations cachées, humiliantes ou menaçantes dans des commentaires ou des
événements anodins.
5) Garde rancune, c’est-à-dire ne pardonne pas d’être blessé, insulté ou dédaigné
6) Perçoit des attaques contre sa personne ou sa réputation, alors que ce n’est pas apparent pour les
autres, et est prompt à la contre-attaque ou réagit avec colère.
7) met en doute de manière répétée et sans justification la fidélité de son conjoint ou de son partenaire
sexuel.
B. Ne survient pas exclusivement pendant l’évolution d’une Schizophrénie, d’un Trouble de l’humeur
avec caractéristiques psychotiques ou d’un autre Trouble psychotique et n’est pas dû aux effets
physiologiques directs d’une affection médicale générale.
120
Au vu du tableau clinique relatif à la personnalité Paranoïaque, nous pouvons
retrouver des points communs non seulement avec le trouble de la personnalité Antisociale
mais aussi avec certaines caractéristiques de la psychopathie (notamment dans sa composante
antisociale). Le caractère méfiant, agressif, combatif, affrontant l’autorité ne peut
qu’exacerber ou être exacerbé par la dimension antisociale et certaines caractéristiques de la
psychopathie (et donc influer sur le niveau de psychopathie général et notamment sur le
Facteur 2). L’hypervigilance et les réactions de colère, les relations sociales complexes et
difficiles qui explosent de façon excessive sont à souligner (Debray, 2007). La méfiance et
l’interprétation deviennent alors des symptômes de premier plan. Le mécanisme de projection
par rapport à autrui est dominant et engendre de la haine et des conflits, donc de l’agressivité.
Debray ajoute que cette agressivité peut aussi être justifiée par une économie pulsionnelle, ces
sujets étant réservés. Le sujet paranoïaque redoute les manifestations émotionnelles et
affectives (Ibid.). Il les cache, les ignore. Cela appuie nos résultats suggérant que le trouble de
la personnalité Paranoïaque est en lien avec le score au Facteur 1 qui correspond à la
dimension interpersonnelle.
Nous pouvons aussi nous demander ici si les résultats obtenus traduisent une
caractéristique de personnalité ou s’il s’agit davantage d’une valeur défensive liée au contexte
carcéral. En effet, même si le SCID-II évalue un trouble de la personnalité stable à partir de
18 ans, certains sujets ont passé ou passent de nombreuses années en prison, consécutivement
ou en peines séparées. L’incarcération provoquerait un véritable stress, un choc :
enfermement, perte des repères, promiscuité, violation de l’intimité, ruptures, peur des autres
(etc.) (de Beaurepaire, 2007). Ainsi, les plus vulnérables seraient en proie à une dépression
« d’adaptation » et les attitudes paranoïaques auraient une valeur défensive.
IV-A-1-b) Impact de la comorbidité des troubles Antisocial, Narcissique et
Paranoïaque sur la PCL-R.
Nous avons affiné nos résultats pour évaluer l’impact de la comorbidité éventuelle de
ces troubles sur le niveau de psychopathie. Nos résultats suggèrent que deux comorbidités ont
un impact sur la psychopathie : la comorbidité des personnalités Antisociale et Paranoïaque
d’une part, et la comorbidité des personnalités Antisociale et Narcissique d’autre part. L’effet
ne se fait pas au même niveau. En effet, la comorbidité des personnalités
121
Antisociale/Paranoïaque a un fort impact sur le score total à la PCL-R et surtout sur le Facteur
2 mais pas d’impact sur le Facteur 1 même si chacune séparément a un effet dessus (cf.
tableau 10 p. 97). Au contraire, la comorbidité des personnalités Antisociale/Narcissique n’a
d’impact que sur le Facteur 1.
a) Comorbidité des personnalités Antisociale et Paranoïaque
Nous observons donc que l’association du trouble Antisocial et du trouble
Paranoïaque, autrement dit la comorbidité entre ces deux troubles, a un fort impact sur le
score total à la PCL-R (39% de variance expliquée contre 35% et 20% séparément) et la
composante comportementale (45% de variance expliquée contre 40% et 23% respectivement
et séparément) surtout par rapport au trouble Paranoïaque. Cette association a donc beaucoup
plus d’impact sur la dimension comportementale (F2) d’abord, puis sur le niveau de
psychopathie en général. La force des manifestations notamment comportementales de chacun
de ces troubles se conjugue pour avoir encore plus d’impact sur le niveau de psychopathie.
Leur association apparaît alors « explosive ».
Cette association des troubles Antisocial/Paranoïaque fait perdre de sa significativité
au trouble Narcissique ainsi que comme nous le verrons plus tard au trouble Borderline qui
n’apparaissent plus dans les régressions multiples concernant le score total à la PCL-R et le
Facteur 2.
Nous pourrions expliquer ce résultat par le fait, comme vu plus haut, qu’un
narcissisme exacerbé ou au contraire un manque d’estime de soi font partie de la même
pathologie et sont sur un continuum concernant le narcissisme. Nous pouvons retrouver dans
nos protocoles des sujets psychopathes qui cotent plus ou moins fortement au Facteur 1
notamment à l’item « surestimation de soi et grandiosité ». C’est alors souvent le Facteur 2,
plus élevé, qui contrebalance et permet, entre autre, une forte cotation à la PCL-R. La
personnalité Narcissique n’a qu’un impact modéré sur le Facteur 1 alors que nous aurions pu
nous attendre à un impact beaucoup plus élevé.
b) Comorbidité des personnalités Antisociale et Narcissique
L’association de ces deux troubles, Antisocial et Narcissique, et donc leur comorbidité
expliquent 22% de la variance du score Facteur 1 ce qui améliore la prédiction en augmentant
122
le score au Facteur 1 (18% avec le trouble Antisocial seul et 13% avec le trouble Narcissique
seul). Ceci va également dans le sens de la littérature (Widiger, 2006) qui montre que les
troubles de la personnalité Antisociale et Narcissique sont les deux troubles les plus rapportés
à la psychopathie. Le trouble Narcissique est corrélé au Facteur 1 de la PCL-R et le trouble
Antisocial est davantage corrélé au Facteur 2 bien que toutefois corrélé au Facteur 1 (Hare,
1991 ; Hare et al., 1991). Le trouble Narcissique est également fortement associé au score
total à la PCL-R et au Facteur 2 et exerce un impact sur un haut niveau de psychopathie en
général ainsi que sur le Facteur 1 et le Facteur 2.
Enfin, de la même manière que la comorbidité Antisociale et Paranoïaque avait fait
perdre son effet au trouble Narcissique sur le Facteur 2, la comorbidité des troubles Antisocial
et Narcissique « efface » l’impact du trouble Paranoïaque en terme d’association sur le
Facteur 1, son impact n’ayant sans doute pas été assez fort.
c) Synthèse
Le trouble Antisocial est de loin le trouble qui a le plus d’impact sur la psychopathie
autrement dit, il est le meilleur prédicteur des scores à la PCL-R (score total et scores à F1 et
surtout F2). La comorbidité des personnalités Antisociales et Paranoïaques est intéressante car
particulièrement forte en terme d’impact sur le score total à la PCL-R et surtout sur le Facteur
2.
IV-A-2) Comorbidité particulière : le trouble de la personnalité
Borderline, un effet particulier sur la PCL-R ?
Nous allons maintenant revenir sur le cluster B avec le trouble Borderline qui, selon
notre hypothèse, pourrait avoir un impact particulier au milieu des troubles précédemment
cités qui augmentent considérablement le niveau de psychopathie mais aussi les scores aux
Facteurs 1 et 2. En effet, nous postulions que l’effet pourrait être particulier (neutre ou
inverse) sur le Facteur 1 en raison de certaines caractéristiques (sensibilité anxio-dépressive,
capacité d’attachement). Nous allons voir que cette partie de l’hypothèse (effet inverse) est
infirmée.
123
Ce qui nous intéresse ici particulièrement est le lien du trouble de la personnalité
Borderline avec la psychopathie (PCL-R) et son influence sur les scores à la PCL-R (total, F1,
F2). Le trouble Borderline a-t-il un effet particulier sur la psychopathie et a-t-il un effet si
associé à d’autres troubles de l’Axe II ?
Nous nous sommes au départ focalisés sur les manifestations dépressives, anxieuses et
pensions que la présence du trouble Borderline avec ces caractéristiques aurait une influence
les manifestations interpersonnelles (Facteur 1) de la psychopathie. Une corrélation du trouble
de la personnalité Dépressive (21,3% dans notre population totale) aurait pu être intéressante,
mais il n’y a aucun résultat significatif de ce côté-là. Des éléments plus précis dans ce
domaine seraient intéressants au regard de la question de l’incapacité à déprimer des sujets
psychopathes (Cleckley, 1941).
Nous avons vu, de par la théorie, qu’une sensibilité dépressive, anxieuse, une capacité
d’attachement (nécessaire pour l’établissement d’une alliance thérapeutique) ainsi que
l’angoisse et la souffrance permettent à une personne de s’inscrire dans une volonté de
changement, ceci permettant donc le début d’une prise en charge psychothérapeutique ou, du
moins, une possibilité de prise en charge. Il s’agit même d’une condition nécessaire pour
l’efficacité de cette prise en charge.
Si notre première partie d’hypothèse concernant les liens entre la PCL-R et les
troubles de l’Axe II a été confirmée, notre hypothèse concernant l’effet inverse du trouble
Borderline sur la psychopathie au niveau du Facteur 1 est infirmée par l’absence de lien
corrélationnel. En revanche, même si le lien et l’impact sont moins forts que pour les troubles
Antisocial, Narcissique et Paranoïaque, notre hypothèse est bien confirmée au niveau du lien
avec le score total à la PCL-R et le score au Facteur 2 ainsi que de l’impact de ce trouble sur
ces scores.
En effet, nous nous attendions à un amoindrissement des manifestations de
narcissisme pathologique et de détachement émotionnel (Facteur 1) en raison des
caractéristiques de dépressivité et de sensibilité à l’alliance relationnelle (relatives au Facteur
1, facteur interpersonnel). Or, nos résultats montrent une absence de lien entre le trouble
Borderline et le Facteur 1. Le lien entre ces deux troubles ne s’établit donc pas sur les
composantes de narcissisme et de détachement émotionnel sans pour autant que le contraste
soit suffisant entre les deux troubles pour obtenir une corrélation négative entre le trouble
Borderline et le Facteur 1. En revanche, le trouble Borderline est associé significativement au
score total à la PCL-R (r=.241, p=.031) même s’il l’est bien moins fortement que les
personnalité Antisociale, Paranoïaque et Narcissique évoquées plus haut. Le trouble
124
Borderline augmente donc le niveau de psychopathie de manière significative et
particulièrement le Facteur 2 relatif à la dimension de comportements antisociaux chroniques
et impulsifs (r=.299, p=.007) de manière encore plus significative. Ceci va dans le sens
d’observations et résultats de certains auteurs rapprochant la psychopathie du trouble
Borderline (Stånlenheim & von Knorring, 1998) et proposant même un sous-type de
psychopathe Borderline (Murphy & Vess, 2003). La CIM-10 (WHO, 1992) fait référence à la
personnalité « Dyssociale » (60.2) qui se rapproche de la personnalité Antisociale du DSM-IV
mais aussi à la personnalité « Emotionnellement labile » avec un type « impulsif » (60.30) et
« Borderline » (60.31) dont les critères sont les sentiments de vide, les relations intenses et
instables, les menaces de suicide, abandon… Ce sont alors les caractéristiques
comportementales (impulsives) qui permettent de rapprocher ce type de personnalité de la
psychopathie.
De plus, la personnalité Borderline apparaît dans les régressions linéaires simples (cf.
tableaux 12 et 13, pp. 98-99) comme ayant un effet sur le score total PCL-R, même si celui-ci
n’est pas très élevé puisqu’il n’explique que 6% de la variance du score à la PCL-R. Allant
dans le sens du lien corrélationnel, il a surtout un effet sur sa composante comportementale
(Facteur 2) dont l’impact, bien qu’un peu plus élevé, reste moindre (9% de variance
expliquée) par rapport à ceux des personnalités Antisociale, Paranoïaque et Narcissique. Ces
résultats nous montrent que c’est avant tout la composante impulsive du trouble Borderline
qui influe sur la PCL-R et non la composante interpersonnelle. La présence du trouble
Borderline augmente donc le score à la PCL-R et peut être prédictrice d’un plus haut niveau
de psychopathie mais surtout de comportements antisociaux chroniques (F2) plus importants
de par le poids de son impulsivité.
L’impulsivité, en tout cas, est aussi majeure chez les sujets présentant le trouble
Borderline, comme le montrent certains critères du DSM-IV faisant référence à
« l’impulsivité marquée dans au moins deux des domaines potentiellement dommageables
pour le sujet (par exemple : dépenses, sexualité, toxicomanie, conduite automobile
dangereuse, crises de boulimie) » ou encore les « colères intenses et inappropriées ou
difficultés à contrôler sa colère (par exemple fréquentes manifestations de mauvaise humeur,
colère constante ou bagarres répétées) ». En résumé, le trouble Borderline est en lien avec la
psychopathie (PCL-R) et notamment sa composante comportementale (F2).
Cela signifierait que la connaissance issue de l’expérience, d’observations et
d’intuitions cliniques, mettant en avant la présence une certaine complexité psychique
125
(sensibilité anxio-dépressive, culpabilité, sensibilité à l’attachement), serait plutôt source
d’illusion thérapeutique.
Concernant l’implication du trouble Borderline en terme de comorbidité avec les
autres troubles de l’Axe II, il n’apparaît plus comme ayant une influence si les personnalités
Antisociale et Paranoïaque sont aussi prises en considération pour le score total à la PCL-R et
au Facteur 2. Comparativement à ces troubles, il n’apparaît plus comme « utile » dans la
prédiction et donc l’explication de ces variables (scores total PCL-R et F2). Ceci s’explique
par le fait que le lien et l’impact du trouble Borderline sont comparativement moins forts que
ceux des troubles cités précédemment.
IV-A-3) Le poids de l’impulsivité, une donnée importante de nos
résultats
La caractéristique essentielle de la psychopathie est la dimension interpersonnelle.
Toutefois, la dimension impulsive est soulignée par nos résultats en ce qui concerne l’effet
des troubles de l’Axe II sur les scores à la PCL-R. Le rôle de l’impulsivité, dimension
commune aux troubles du cluster B et celle qui les caractérise le plus (Looper & Paris, 2000),
est donc majeur. Celle-ci peut constituer un point de convergence entre les systèmes
catégoriel et dimensionnel à nuancer en fonction du niveau de la sévérité de l’impulsivité. En
effet, la sévérité de l’impulsivité figure parmi les facteurs qui différencient les troubles du
cluster B, les troubles Borderline et Antisocial se différenciant par leur plus grand niveau de
sévérité (notamment par rapport aux troubles Narcissique et Histrionique) (Kernberg, 1984).
De plus, la littérature a déjà souligné le recouvrement des troubles du Cluster B et de
la psychopathie avec en point commun principal encore une fois l’impulsivité. Nos résultats
appuient le fait que les impulsions, les caractéristiques antisociales, narcissiques et
paranoïaques sont essentielles à repérer car principalement associées à la gravité
psychopathique.
En outre, comme le montrent de nombreux travaux, les troubles addictifs sont aussi
associés à la délinquance et la criminalité (Timmerman & Emmelkamp, 2001) ainsi qu’à la
gravité de la psychopathie en terme de score total (Pham, Malingrey et al., 2007). Associés
126
aux troubles psychiatriques majeurs, ils posent de plus en plus la question du double
diagnostic (de Beaurepaire, 2007) en tout cas chez les arrivants en prison puisque la prison
empêcherait ce genre de consommation. Cela souligne l’intérêt de l’examen standardisé et de
la complémentarité du catégoriel et du dimensionnel pour la psychopathie évaluée avec la
PCL-R et cela en ne se limitant pas au score global de la PCL-R mais également à ceux du
Facteur 1 et surtout du Facteur 2 (impulsivité). Dans ce sens, la distinction en catégories
diagnostiques pourrait être remise en question par une approche dimensionnelle. La prise en
charge pourrait être différenciée selon les scores de F1 et F2 et en fonction de la personnalité
Borderline dont la comorbidité a finalement un certain poids par rapport à ce qui était attendu
même si l’effet était attendu ailleurs à savoir sur le Facteur 1.
Ceci va dans le sens de liens complexes entre ces différentes personnalités
(Antisociale, Narcissique et Borderline).
Au niveau phénoménologique, l’impulsivité est la tendance à agir à partir d’une
pensée ou d’un sentiment sans prendre en considération les alternatives et les conséquences.
La conception de Zanarini (1993) de « spectre impulsif » recouvre les Axes I et II. C’est une
notion centrale pour les diagnostics du cluster B puisqu’elle est dominante dans les troubles
Borderline et Antisocial. Le trouble Borderline est polymorphe et nous insistons sur le fait
que c’est le versant impulsif, antisocial qui prédomine ici dans nos résultats.
Les comportements impulsifs sont dirigés contre les autres chez les patients présentant
un trouble de la personnalité Antisociale et en général dirigés contre eux-mêmes chez les
patients présentant le trouble de la personnalité Borderline (chez les patients narcissiques,
l’impulsivité s’exprime dans le contexte interpersonnel). Pourtant, si dans notre population les
sujets présentant le trouble Borderline peuvent avoir cette impulsivité dirigée contre euxmêmes, elle est aussi dirigée vers les autres de par la nature de leurs relations et leur
propension aux actes délictueux.
Les traits d’impulsivité et d’agressivité peuvent aussi expliquer pourquoi les troubles
du cluster B covarient et pourquoi ils peuvent différer dans les manifestations cliniques et leur
évolution, les personnalités Narcissique, Borderline, Antisociale ayant des dimensions de
personnalité latentes orientées vers l’action caractérisée par l’impulsivité, l’agressivité et la
recherche de nouveauté (Fossati, Barrat, Borroni, Villa, Grazioli, & Maffei, 2007). Pour le
trouble Borderline, l’impulsivité serait distincte de celle observée dans les autres troubles
dans le sens de l’impulsivité motrice et non planning. Les actes agressifs des sujets borderline
127
seraient alors davantage une conséquence dangereuse de la déficience de leur système de
contrôle comportemental (Ibid.) que par exemple une agressivité plus instrumentale.
Nous avons pu observer que les items qui sont ressortis le plus souvent lors des
passations du SCID-II concernant le trouble de la personnalité Borderline sont surtout et
quasiment à chaque fois « l’impulsivité marquée dans au moins deux des domaines
potentiellement dommageables pour le sujet » et « Colères intenses et inappropriées ou
difficultés à contrôler sa colère (p. ex. fréquentes manifestations de mauvaise humeur, colère
constante ou bagarres répétées) ». Nous pouvons aussi penser que pour les syndromes
composant le trouble Borderline, l’impulsivité a un poids différent et plus important que les
autres, d’où la tendance à la récidive.
IV-A-4) Synthèse : Nos résultats vont dans le sens d’une
hétérogénéité de la psychopathie
Nos résultats vont donc dans le sens d’une hétérogénéité de la psychopathie. En effet,
le niveau de psychopathie et les dimensions interpersonnelle (F1) et comportementale (F2)
vont varier en fonction de l’influence et/ou de l’impact des troubles de l’Axe II ici les troubles
Antisocial, Narcissique et Borderline du cluster B ainsi que le trouble Paranoïaque du cluster
A. Concernant ces troubles, Coid (2003) avait déjà remarqué la comorbidité du trouble
Antisocial avec les troubles Narcissique, Borderline et Paranoïaque (avec aussi le trouble
Passif-agressif que nous n’avons pas retrouvé). Les manifestations de ces troubles,
notamment comportementales, varieront dans le même sens.
Widlöcher, dans la préface du livre de Kernberg (1997) rend compte des différentes
caractéristiques de différents troubles engendrant des variabilités au niveau du comportement
et plus généralement de leurs manifestations : « Le terme de syndrome ne définit pas un
ensemble de symptômes révélateurs d’un quelconque trouble fondamental de la personnalité.
Il caractérise seulement un ensemble d’opérations mentales qui, au sein d’une variance
d’attitude, apparaît comme une configuration relativement stable et repérable chez des
patients qui diffèrent par ailleurs par d’autres traits (p. 7) ». Si la psychopathie est composée
de types ou classes distinctes, il n’est pas étonnant de constater des effets différents au niveau
128
du traitement (Harris & Rice, 2007), point sur lequel nous reviendrons dans la partie « prise
en charge » de la discussion (pp. 152-156).
Le graphique suivant (graphique 1) récapitule l’impact des troubles Antisocial,
Paranoïaque, Narcissique et Borderline afin d’illustrer nos propos.
Graphique 1- Récapitulatif de l’impact de troubles de l’Axe II sur la PCL-R (scores total, F1,
F2).
45%
40%
35%
30%
25%
20%
15%
10%
5%
0%
Antisocial
Paranoïaque
PCL-R total
Narcissique
Facteur 1
Borderline
Facteur 2
Les troubles Antisocial, Narcissique et Borderline ont un impact sur un haut niveau de
psychopathie (PCL-R) et peuvent donc en compliquer l’évolution, les manifestations. Le fait
que le cluster B ressorte davantage peut venir du fait que les liens entre ces troubles sont
complexes puisqu’une zone de recouvrement les rassemble.
L’enchevêtrement relatif au cluster B vient du fait que les tendances antisociales et
psychopathiques sont conceptualisées comme étant situées sur un continuum avec le
narcissisme qui implique une motivation à dominer, humilier et manipuler les autres
(Widiger, 2006). D’ailleurs, selon Kernberg (1975), la personnalité Antisociale peut être
considérée comme un sous-groupe des personnalités Narcissiques. En effet, quelques
caractéristiques de la personnalité Narcissique du DSM-IV rappellent certaines de la
psychopathie : sentiment de grandiosité du soi, arrogance, manière d’être et comportements
hautains, le manque d’empathie et l’exploitation interpersonnelle. Le trouble Narcissique est
même plus proche de la psychopathie vue par Cleckley que ne le serait le trouble Antisocial
129
(Hare et al, 1991). Au vu de leurs caractéristiques, il n’est pas étonnant que les personnalités
Narcissique et Antisociale soient les plus fortement associées à la Psychopathie dans la
littérature.
Pourtant, nos résultats font davantage ressortir l’impact du trouble Antisocial, le plus
associé et le plus prédicteur d’un haut niveau de Psychopathie (PCL-R), de narcissisme et
détachement émotionnel (F1) mais surtout de forts comportements antisociaux chroniques
(F2). Nous avons vu qu’il a plus d’effet sur le narcissisme et le détachement émotionnel (F1)
que la personnalité Narcissique. De plus, avant le trouble Narcissique, c’est ensuite le trouble
Paranoïaque qui est le plus associé à la Psychopathie si nous prenons en considération le score
total à la PCL-R (pour le Facteur 1 c’est le trouble Narcissique qui ressort avant le trouble
Paranoïaque).
Nous savons aussi que les troubles Narcissique, Borderline et Antisocial sont
étroitement liés entre eux que ce soit par une organisation limite sous-jacente (cf. Kernberg)
ou par l’impulsivité qui les caractérise. Ce recouvrement a souvent été observé dans la
littérature. Les troubles Narcissique et Borderline feraient donc partie des pathologies du
narcissisme mais de manières différentes : autant un patient présentant une personnalité
Narcissique montrera un narcissisme exacerbé, se surestimera et voudra être le centre de
l’attention, autant un patient au fonctionnement Borderline aura plutôt une faible estime de
soi. Les blessures narcissiques et les défaillances à ce niveau s’expriment alors différemment
mais constituent un point commun aux deux fonctionnements. A la même cause (défaillances
narcissiques), il en résulte deux manières de réagir. Si le narcissique se surestime autant, c’est
sans doute aussi pour se défendre d’une mauvaise estime de soi.
De plus comme vu précédemment (pp .124-126), nos résultats, que ce soit concernant
le trouble Borderline mais aussi en ce qui concerne les liens entre les troubles Antisocial et
Paranoïaque avec notamment le Facteur 2, soulignent toute l’importance de l’impulsivité,
surtout pour les troubles du cluster B (Fossati et al., 2007).
Ceci nous ramène à la notion de variantes primaire et secondaire de la psychopathie.
Au vu de la description de ces variantes (Douglas et al., 2006), nous pensons que celles-ci
sont en lien avec les comorbidités entre la psychopathie et les troubles de l’Axe II Antisocial,
Narcissique, Borderline et Paranoïaque dont nos résultats soulignent l’impact sur le niveau de
psychopathie.
D’un point de vue étiologique, nous avons vu que les sujets psychopathes primaires
seraient prédisposés biologiquement aux déficits affectifs alors que chez ceux présentant une
130
psychopathie secondaire, ces déficits sont plutôt acquis, la différence se situant donc au
niveau génétique pour l’un, environnemental pour l’autre (Skeem et al., 2003 ; Hicks et al.,
2004 ; Jackobwitz & Egan, 2006 ; Skeem et al., 2007). Les psychopathes primaires sont alors
plus à même de montrer de véritables déficits affectifs (insensibilité émotionnelle, déficit de
réactivité aux messages émotionnels, manque de conscience et de culpabilité), un manque
d’anxiété-trait et un narcissisme manifeste. Les psychopathes secondaires, même avec des
déficits affectifs acquis, ont davantage de capacités pour les émotions, des niveaux d’anxiété
plus élevés et peuvent faire preuve d’une émotionnalité négative comparable à certaines
caractéristiques du fonctionnement borderline (colère, impulsivité, mécanismes de défense
primitifs et clivage). Cela rejoint alors la question du tempérament. Par rapport à l’anxiété et
même si le psychopathe peut être vu traditionnellement comme sans aucune émotion, ni les
critères du DSM-IV, ni ceux de la PCL-R ne prennent en compte une faible anxiété chez les
psychopathes (Cleckley, 1941). Il n’est donc pas étonnant de retrouver parfois des éléments
d’anxiété. Toujours est-il que ces psychopathes secondaires ont moins de traits
psychopathiques mais des niveaux comparables de comportements antisociaux. Nos résultats
vont dans ce sens concernant le trouble Borderline et la dimension comportementale
impulsive (F2).
Ceci rejoint la question aussi de la stabilité des comportements violents chez les
psychopathes ayant un score supérieur à la PCL-R et donc du problème de l’hétérogénéité de
ces comportements violents (Pham & Côté, 2000) sans oublier que les délinquants violents
constitueraient un groupe hétérogène lorsque des perturbations mentales sont prises en
compte (Huchzermeier, Bruß, Godt, & Aldenhoff, 2006). Trente à soixante pourcent des
personnes recevant un diagnostic de trouble de la personnalité présentent également les
critères de la personnalité Borderline (De Fruyt, De Clercq, Miller, Rolland, & Lynam, 2008).
Ceci met en évidence la forte comorbidité souvent retrouvée des troubles de l’Axe II,
notamment avec le trouble Borderline.
131
IV-A-5) Affinement en fonction des liens entre troubles de la
personnalité (PCL-R et Axe II) et types de délits violents et non
violents.
Cette partie nous permet d’éclairer l’impact des troubles de la personnalité (PCL-R et
Axe II) sur les types de délits violents et non violents.
IV-A-5-a) Selon les délits violents
a) Psychopathie (PCL-R) et délits violents
Dans la littérature, la psychopathie est liée aux comportements violents (Pham, 1998a ;
Côté, Hodgins et al., 2000 ; Porter & Woodworth, 2006). La PCL-R est significativement
corrélée aux délits violents et les sujets ont une carrière criminelle plus variée et étendue
(Hare, 1991, 2003). Nos résultats ne font pas ressortir de lien direct entre la psychopathie et la
présence de délits violents. Toutefois, ce lien s’inscrit au niveau du nombre de délits violents
dans nos résultats surtout en ce qui concerne le score total à la PCL-R et le score au Facteur 2.
Donc, plus le niveau de psychopathie et la dimension comportementale (F2) sont élevés, plus
le nombre de délits violents commis par un sujet augmentera. En ce qui concerne les types de
délits, les vols qualifiés et la possession d’arme sont liés à la psychopathie.
- Vols qualifiés et possession d’arme
S’agissant des types de délits violents et allant dans le sens de la littérature (Pham,
1998a ; Pham, Chevrier, et al., 2005), la psychopathie ainsi que la personnalité Antisociale
sont liées de manière significative à ce type de délits. Ainsi, plus un sujet a un score élevé de
psychopathie, plus les vols qualifiés (vols qualifiés, vols à main armée, vols avec violence,
extorsion) et les délits en lien avec la possession d’arme (possession d’arme ou port
dissimulé, explosifs, braquer ou utiliser une arme à feu) y seront associés. Il s’agit donc ici de
délits plutôt instrumentaux qui peuvent être en rapport avec une violence interpersonnelle ou
non.
132
- Homicide et délits sexuels
Nos résultats suggèrent que la PCL-R n’est pas associée aux homicides (ni
positivement ni négativement et ni de par F1 ou F2). Cela confirme que le score total à la
PCL-R n’est pas associé aux délits d’homicide ni aux délits sexuels (Pham, Chevrier, et al.,
2005). L’homicide est une catégorie de crime hétérogène qui dépendrait à la fois du sujet
ayant commis ce crime et du contexte (Porter & Woodworth, 2006) et qui renverrait au
caractère instrumental ou émotionnel du crime. Les délits sexuels regroupent différents types
délits allant de l’attouchement au viol. Dans notre population, ce sont surtout les viols qui
composent cette catégorie. Selon Hare (1999), la psychopathie peut être diagnostiquée chez
40 à 50 % des violeurs. Dans ce sens, Vess, Murphy & Arkovitz (2004) montrent que la
prévalence de la psychopathie fait la différence chez les violeurs comparée à d’autres types de
délits sexuels.
Les corrélations concernant les délits sexuels nous interpellent alors : le Facteur 2 y est
fortement et négativement associé et le score total à la PCL-R tend à y être négativement
associé. Cela voudrait dire que plus le score au Facteur 2 est fort et donc plus les
comportements antisociaux et impulsifs sont importants, moins un sujet commettrait de délits
sexuels. Une absence d’association entre la PCL-R et les délits sexuels (Pham, 1998a ; Pham,
Chevrier, et al., 2005) a été rapportée. Nos résultats sont donc étonnants et contradictoires
avec la littérature. Des outils spécifiques dont nous ne disposons pas seraient utiles afin
d’éclairer ce résultat qui est donc à prendre avec précaution.
b) Troubles de l’Axe II et délits violents
Tout comme la psychopathie, les troubles de l’Axe II ne sont pas associés à la
présence de délits violents. Toutefois, les personnalités Antisociale et Borderline sont aussi
fortement corrélées au nombre de délits violents.
Le trouble Antisocial est en lien avec les vols qualifiés, les voies de fait, possession
d’arme et comme nous l’avons vu, les délits sexuels (mais négativement). Ainsi, excepté pour
les délits sexuels, plus un sujet présente le trouble Antisocial, plus les délits de vols violents,
voies de fait et possession d’arme seraient commis (surtout pour les vols qualifiés et la
possession d’arme).
Le trouble Borderline est en lien avec les vols qualifiés et voies de fait, d’ailleurs un
peu plus que le trouble Antisocial pour les voies de fait. Le caractère violent peut là aussi
133
s’inscrire dans l’impulsivité caractéristique de ces deux troubles, d’autant plus que les vols
qualifiés sont corrélés avec le Facteur de 2 de la PCL-R.
Nous aurions également pu nous attendre à ce que le trouble Narcissique soit en lien
avec les délits violents puisqu’il est associé à la PCL-R mais ce n’est pas le cas. Pourtant les
vols qualifiés et possession d’arme sont associés au Facteur 1 de la PCL-R. Ceci signifierait
que dans notre population, les délits violents sont davantage associés au caractère impulsif des
sujets.
IV-A-5-b) Selon les délits non violents
a) Psychopathie (PCL-R) et délits non violents
Nos résultats rendent compte d’un lien entre la dimension comportementale (F2) et la
présence de délits non violents. Aucune association n’est observée entre les scores à la PCL-R
et le nombre de délits non violents ainsi qu’avec les différents types de délits non violents. Il
apparaît donc que le niveau de psychopathie n’a pas de lien particulier avec les délits non
violents, en tout cas pas plus que d’autres troubles. Seule la dimension comportementale et
impulsive (F2) tend à être corrélée avec les vols simples.
b) Troubles de l’Axe II et délits non violents
Le trouble Borderline est corrélé au nombre de délits non violents, notamment aux
délits mineurs et aux délits relatifs à la drogue qui a la plus forte association. Comme nous
l’avons déjà vu, les troubles addictifs sont en lien avec le trouble Borderline, comme peut en
témoigner l’item 4 du DSM-IV « impulsivité marquée dans au moins deux domaines »
notamment la toxicomanie qui concernerait plus de la moitié des patients Borderline (PhamScottez, 2007). Le lien avec les délits mineurs est moins significatif.
Il est intéressant de noter que les troubles vus précédemment en lien avec la PCL-R et
la HCR-20 ne sont pas en lien avec les délits non violents. Ainsi, les personnalités
Paranoïaque et Antisociale qui sont également les plus associées à la psychopathie (PCL-R) et
au risque de récidive (HCR-20) ne sont pas associées aux délits non violents.
134
c) Synthèse
Les catégories de délits (violents et non violents) ne sont pas significativement liées à
la psychopathie ou aux troubles de l’Axe II. Ce n’est donc pas ce qui peut les différencier.
D’après nos résultats, on ne peut donc pas dire que parce qu’un sujet commet un acte violent,
il aura plus de risque de présenter un niveau de psychopathie élevé. En revanche, nous
pouvons penser qu’un sujet qui commet beaucoup d’actes violents aura plus de risque de
présenter un haut niveau de psychopathie, le nombre de délits violents étant très associé aux
scores à la PCL-R (total, F1, F2), tout comme les personnalités Borderline et Antisociale
soulignant une fois de plus le poids de l’impulsivité. Il en est de même pour les sujets
présentant ces troubles de l’Axe II.
*****
Ce premier chapitre a établi des liens entre les troubles de la personnalité Antisociale,
Narcissique, Borderline et Paranoïaque de l’Axe II et le niveau de psychopathie en terme de
score total à la PCL-R et aux Facteurs 1 et 2. Qu’en est-il alors concernant les scores à la
HCR-20 (score total, Facteurs H, C et R)? Nous verrons tout d’abord quels peuvent être les
liens entre la PCL-R et la HCR-20 dans notre population puis les liens entre les troubles de
l’Axe II et la HCR-20.
*****
135
IV-B) Hypothèse 2 : Impact du niveau de psychopathie
(score PCL-R, F1, F2) et des troubles de l’Axe II sur les
scores à la HCR-20
Comme le soulignent Pham, Ducro, et al. (2005), certaines dispositions légales de
libération sous conditions stipulent que le risque de récidive représente une « contreindication majeure » à la libération et « les praticiens doivent faire face à un manque de
données relatives au taux de base de récidive (générale, violente, sexuelle, non sexuelle et non
violente) et à la validation des instruments de risque (p. 883). » Dans notre étude, c’est la
récidive officielle et qui a donné lieu à des poursuites judiciaires qui a été prise en compte, ce
qui peut minimiser le risque réel. Rappelons la bonne qualité prédictive de la HCR-20
concernant la récidive et notamment de la récidive violente. Selon Wood & Newton (2003), il
serait judicieux de cibler les sujets délinquants récidivistes et de prendre en compte les
facteurs de personnalité qui peuvent influencer la colère (en terme de programme de gestion
de la colère par exemple). Les liens avec les troubles de l’Axe II que nous avons cherchés à
établir sont donc importants.
IV-B-1) Psychopathie (PCL-R : score total, F1 et F2 ) et Risque
de récidive (HCR-20 : score total, Facteurs H, C et R)
Comme attendu et dans le sens de la littérature (Wong & Burt, 2007 ; Hemphill et al.,
1998), nos résultats mentionnent qu’un haut niveau de psychopathie augmente fortement les
scores à la HCR-20. Ainsi, le niveau de psychopathie et ses dimensions interpersonnelle (F1)
et comportementale (F2) augmentent le score total à la HCR-20 ainsi que les scores aux
Facteurs Historique, Clinique et Risque. Rappelons que le Facteur H correspond aux dix items
relatifs au passé « statique » (événements passés dans la vie du sujet), le Facteur C aux dix
items dynamiques relatifs au présent (événements actuels) et le Facteur R aux cinq items
dynamiques relatifs au futur (conséquences futures dues aux actes du sujet). Toutefois,
l’impact diffère en fonction des variables.
136
IV-B-1-a) Impact du score total à la PCL-R sur la HCR-20
Plus précisément (cf. tableau 31), nos résultats suggèrent que le niveau de
psychopathie (score total à la PCL-R) a surtout un fort impact sur le score total à la HCR-20
et sur le score au Facteur C, impact qui est quasi identique. Il a ensuite un impact sur le
Facteur R et son impact est moindre mais tout de même assez fort sur le Facteur Historique
(45%).
Tableau 31- Récapitulatif de l’impact du score total à la PCL-R sur les scores à la HCR-20.
PCL-R total
→
HCR total (68% de la variance expliquée)
Facteur H (45% de la variance expliquée)
Facteur C (68% de la variance expliquée)
Facteur R (57% de la variance expliquée)
a) Facteur Clinique
Ainsi, l’impact le plus fort serait sur le score au Facteur C représentant le présent et
donc le manque d’introspection (C1), les attitudes négatives (C2), les symptômes actifs de
troubles mentaux majeurs (C3), l’impulsivité (C4) et la non réponse au traitement (C5). En
effet, la psychopathie par définition empêche l’introspection puisque l’individu ne se sent pas
atteint d’un quelconque trouble, ne se pose pas de questions sur son comportement, rejette la
faute sur les autres et ne se sent donc pas fautif ni coupable. Il ne peut évaluer le manque de
contrôle en général ou la colère dont il peut faire preuve. Les attitudes antisociales font partie
des attitudes négatives (C2) et l’impulsivité (C4) bien sûr fait partie de la psychopathie qui est
bien connue pour résister au traitement.
b) Facteur Risque
C’est donc ensuite sur le Facteur R qu’il agit le plus, facteur relatant la capacité à
s’adapter, s’ajuster aux futures situations que le sujet va rencontrer. Cet item est lié au
manque de soutien à un niveau professionnel. Comment le sujet va-t-il réussir à s’adapter et
comment va-t-il réagir ? Nous nous plaçons ici dans l’hypothèse que le sujet va être libéré. En
effet, un haut niveau de psychopathie fait craindre l’impossibilité de planifier des projets à
long terme de manière réaliste (item 13 ; R1). Ceci est en lien avec une prise en charge
137
appropriée. Parfois la famille ou les proches (amis…) ne peuvent pas ou ne veulent pas
apporter leur aide (Webster et al., 1997) ce qui complique les choses (R3). Ou encore, la
famille ou les proches le peuvent mais l’individu ne l’accepte pas. Le fait de s’exposer à des
facteurs déstabilisants fait également partie du Facteur R. Il s’agit là pour le sujet de se
retrouver par hasard dans des situations dans lesquelles il se trouve vulnérable et qui
pourraient avoir pour conséquence des épisodes violents, c'est-à-dire agir en véritable
déclencheurs. Ces conditions sont inhérentes à chaque individu et peuvent différer. Les sujets
psychopathes, sans prise en charge, ne peuvent d’eux-mêmes reconnaître ces situations et les
éviter. L’inobservation des mesures curatives (R5) est également à craindre étant donnée la
difficulté de traitement de la psychopathie, traitement relatif à la motivation et à la volonté de
changement qui n’est guerre caractéristique à la psychopathie.
c) Facteur Historique
Enfin, le Facteur H est celui sur lequel le niveau de psychopathie (score total à la PCLR) a le moins d’impact. Peut-être est-ce celui qui revêt le moins un caractère comportemental.
Ainsi, nous parlons de l’impact de la psychopathie sur le Facteur H mais c’est peut-être dans
l’autre sens qu’il faudrait traiter la question, c’est-à-dire que ce sont les items du Facteur H
(événements passés) qui auront pu faire qu’un individu peut présenter un certain niveau de
psychopathie. En effet, le Facteur H, outre le fait qu’il fasse référence à la psychopathie (H7),
aborde les questions de violence antérieure (H1), premier acte de violence commis à un jeune
âge (H2), instabilité des relations (H3), problème d’emploi (H4), abus de substances (H5),
troubles mentaux majeurs (H6), inadaptation durant l’enfance et l’adolescence (H8), troubles
de la personnalité (H9) et enfin, échec antérieur de la surveillance (H10). Mis à part les items
H6, H9 (relatifs aux troubles de l’Axe II du DSM-IV par exemple ? et justement puisque c’est
aussi ce qui nous intéresse) et H10, tous les autres font partie d’une certaine manière de
l’évaluation de la psychopathie telle que mesurée par le score total à la PCL-R (avec donc des
items relatifs au Facteurs 1 ou au Facteur 2 et trois autres items sans appartenance). Il peut
donc être étonnant que l’impact ne soit pas plus fort, bien que déjà conséquent (nous
comparerons plus tard avec les troubles de l’Axe II) et la raison pourrait être à chercher du
côté de l’impact des Facteurs 1 et 2.
138
IV-B-1-b) Impact des Facteurs 1 et 2 de la PCL-R sur la HCR-20
Le tableau ci-dessous (cf. tableau 32) rappelle la portée de l’impact des composantes
interpersonnelle (F1) et comportementale (F2) sur les scores à la HCR-20 (score total,
Facteurs H, C et R).
Tableau 32- Récapitulatif de l’impact des scores aux Facteurs 1 et 2 de la PCL-R sur les
scores à la HCR-20.
Facteur 1
→
Facteur 2
→
HCR total (48% de la variance expliquée)
Facteur H (24% de la variance expliquée)
Facteur C (64% de la variance expliquée)
Facteur R (44% de la variance expliquée)
HCR total (67% de la variance expliquée)
Facteur H (54% de la variance expliquée)
Facteur C (55% de la variance expliquée)
Facteur R (54% de la variance expliquée)
a) Impact du Facteur 1 sur les scores à la HCR-20
La dimension narcissique et de détachement émotionnel (F1) a un impact sur le score
total à la HCR-20 (48%) mais d’abord et surtout sur le facteur C (64%) (Pham, Chevrier, et
al., 2005). Elle a ensuite un impact sur le Facteur R (44%) puis sur le Facteur H sur lequel
l’impact est bien plus faible (24%).
C’est donc sur le Facteur C que l’impact du Facteur 1 est le plus élevé par rapport au
score total à la HCR-20 et aux autres Facteurs H et R. C’est sans doute par exemple le
narcissisme pathologique et le détachement émotionnel qui jouent davantage sur le manque
d’introspection (C1), les attitudes négatives (C2) et la non réponse au traitement (C5). De la
même manière que pour le score total à la PCL-R, c’est ensuite sur le Facteur R puis sur le
Facteur H que le Facteur 1 de la PCL-R a une influence (cet ordre n’est plus tout à fait le
même concernant l’impact du Facteur 2 de la PCL-R).
L’impact du Facteur 1 a en général moins d’effet sur la HCR-20 (l’écart est réduit
pour le Facteur C) que celui du score total à la PCL-R. Nous pouvons en conclure que c’est
très certainement l’aspect comportemental qui prime alors, remontant ainsi l’effet du score
total à la PCL-R sur la HCR-20.
139
b) Impact du Facteur 2 sur les scores à la HCR-20
La composante comportementale et impulsive (F2) a également un fort effet sur le
score à total la HCR-20 (67%) et sur les Facteurs H (Pham, Chevrier, et al., 2005), C et R
(respectivement 54%, 55% et 54%) . Le Facteur 2 de la PCL-R a donc le plus fort impact sur
le score total à la HCR-20 et un impact quasi-identique sur les Facteurs H, C et R,
contrairement aux autres résultats entre le score total à la PCL-R, le Facteur 1 et les scores à la
HCR-20 davantage nuancés, c’est-à-dire avec une variabilité plus marquée.
Ainsi, le Facteur 2 a une importance quasi égale en terme d’impact sur les Facteurs H,
C et R. Cette importance est un peu moins forte sur le Facteur C comparativement au score
total à la PCL-R et au Facteur 1. Ceci pourrait souligner le poids de ce facteur dans le sens
qu’il pourrait s’agir d’une constante en terme d’impact.
IV-B-1-c) Synthèse
Le graphique 2 résume l’impact des scores à la PCL-R sur ceux de la HCR-20.
Tout d’abord, la dimension comportementale et impulsive (F2) est la plus associée et a
le plus d’impact sur la HCR-20 (score total et facteurs H et R) par rapport à la composante
interpersonnelle (F1) appuyant encore une fois l’importance de l’impulsivité. A l’inverse, le
Facteur 1 a davantage d’impact sur le Facteur C. Ainsi, bien qu’ayant aussi un impact sur les
Facteurs H et R, un niveau élevé de narcissisme pathologique et de détachement émotionnel
prédirait davantage les items cliniques et donc aux éléments dynamiques, actuels et serait
meilleur prédicteur par rapport à l’impulsivité. Enfin comme vu précédemment, ces résultats
soulignent encore une fois le poids de l’impulsivité, ici sur l’évaluation du risque de récidive
(HCR-20).
140
Graphique 2- Récapitulatif de l’impact de la PCL-R (score total, F1 et F2) sur la HCR-20
(score total, Facteurs H, C et R).
80%
70%
60%
50%
40%
30%
20%
10%
0%
PCL-R total
F1
HCR-20 total
Facteur H
F2
Facteur C
Facteur R
Le fait que la psychopathie mesurée par la PCL-R soit le meilleur prédicteur de la
récidive violente et notamment la récidive violente chez les délinquants fait consensus
(Decoene & Bijttebier, 2008). Ici, nos résultats confirment l’impact des scores à la PCL-R sur
ceux obtenus à la HCR-20 (sans faire la distinction pour l’instant entre récidive violente et
non violente). Les individus à personnalité psychopathiques ont donc davantage de risque de
récidiver de manière générale (et violente) et le niveau de psychopathie aide ainsi à identifier
un sous-groupe de délinquants à haut risque en matière de criminalité et de violence (Hare,
1991, 2003 ; Douglas et al., 2006). Toutefois, la PCL-R ne prédirait pas de manière
significative la récidive non-violente (Pham, Ducro, et al., 2005). En tous les cas, l’évaluation
de la psychopathie est importante au regard de divers instruments mesurant le risque de
récidive, notamment la HCR-20 (Webster et al., 1997).
Notre première hypothèse concernant l’impact de la psychopathie sur la HCR-20 est
donc vérifiée. Voyons maintenant ce qu’il en est de l’impact des troubles de l’Axe II,
notamment du cluster B, sur la HCR-20 ?
141
IV-B-2) Troubles de l’Axe II et Risque de récidive (HCR-20 : score
total, facteurs H, C, R).
Le graphique 3 rappelle les résultats concernant l’impact des troubles de l’Axe II sur la
HCR-20. La première constatation est que les troubles de l’Axe II qui ont impact sur la HCR20 sont les mêmes que ceux qui ont un impact sur la PCL-R.
Graphique 3- Récapitulatif de l’impact des troubles de l’Axe II qui se sont avérés avoir un
impact sur les scores à la HCR-20.
45%
40%
35%
30%
25%
20%
15%
10%
5%
0%
Antisocial
Paranoïaque
HCR-20 total
Facteur H
Narcissique
Facteur C
Borderline
Facteur R
IV-B-2-a) Les troubles Antisocial, Paranoïaque et Narcissique et le Risque de
récidive (HCR-20)
Nos résultats indiquent que les troubles Antisocial, Paranoïaque et Narcissique
augmentent fortement le score à la HCR-20 ainsi que les scores aux facteurs Historique,
Clinique et Risque et ont un impact dessus. De manière attendue, la présence des troubles du
cluster B Narcissique et Antisocial (Pham, Chevrier, et al., 2005) augmente fortement les
scores à la HCR-20.
142
a) La personnalité Antisociale
Le trouble de la personnalité Antisociale est encore une fois le trouble de l’Axe II le
plus associé (et très fortement) au score total à la HCR-20 (r=.589, p=.000) et à ses facteurs H
(r=.630, p=.000), C (r=.450, p=.000) et R (r=.423, p=.000). Ce trouble a un impact et explique
à lui seul un score élevé à la HCR-20 (39% de variance expliquée) et aux Facteurs H, C et R
(respectivement 40%, 20% et 18% de variance expliquée).
Le trouble Antisocial apparaît donc comme le plus fort prédicteur de ces scores
concernant les troubles de l’Axe II. Ceci pourrait aller dans le sens de certaines études
suggérant le lien entre la récidive générale et la composante de comportements antisociaux
(F2) de la PCL-R (Hemphill et al., 1998). Claix & Pham (2004) observent une corrélation
entre la PCL-R et la HCR-20 confirmant les résultats de Pham et al. (2000) : les résultats
montrent, entre autre, que le Facteur H serait hautement corrélé avec le Facteur 2 de la PCL-R
c'est-à-dire la composante comportementale fortement lié au trouble Antisocial.
Parmi les trois facteurs, l’impact est d’abord plus élevé sur le Facteur H, ensuite C
puis R avec un impact bien moins élevé sur ces deux derniers facteurs qui peuvent donc
baisser l’impact de ce trouble sur le score total à la HCR-20. C’est donc sur la gestion du
risque que l’impact est le moins fort. Cet ordre d’importance est le même que celui pour
l’impact du score total à la PCL-R et le Facteur 2 sur les facteurs à la HCR-20. Cela souligne
l’importance du Facteur H et des évènements du passé, donc de l’histoire des sujets, dans la
genèse des troubles de la personnalité en tout cas ici du trouble Antisocial.
b) La personnalité Paranoïaque
C’est ensuite le trouble de la personnalité Paranoïaque qui est le plus fortement associé
aux scores à la HCR-20 (total, Facteurs H, C et R). La présence de ce trouble augmenterait
fortement le risque de récidive en général. Plus particulièrement, le Facteur H y est fortement
associé ainsi que le Facteur R. Ceci signifierait que le poids des événements du passé est
particulièrement important et que ce trouble influerait sur les évènements futurs (gestion du
risque). Dans ce sens, après le trouble Antisocial, il est celui qui a le plus d’impact sur le
score total à la HCR-20 (23%) et sur les Facteurs H (26%) et R (17%). Il a toutefois un effet
bien plus faible sur le Facteur C (8%) renforçant l’importance encore une fois du Facteur H
mais aussi du Facteur R pour ce trouble qui a à peu près le même impact que le trouble
Antisocial sur ce dernier facteur. Ainsi la gestion du risque pourrait être rendue plus difficile
143
par l’aspect comportemental (notamment par les réactions de colère caractéristiques de la
personnalité Paranoïaque) et donc impulsif.
Si le trouble Paranoïaque était encore une fois moins attendu, les régressions linéaires
multiples (cf. tableau 30 p. 113) ont fait apparaître également (c'est-à-dire dans le même sens
que pour la PCL-R - 39%) que la comorbidité des personnalités Antisociale et Paranoïaque est
prédictrice d’un fort score à la HCR-20 (41%) et notamment des Facteurs Historique (47%) et
Risque (23%).
Cette comorbidité tendrait donc à augmenter la dangerosité chez un sujet qui présente
ces deux troubles. Cette association a un fort impact sur la psychopathie (PCL-R), elle-même
prédictrice de la récidive comme le souligne la littérature. Elle n’a en revanche pas d’impact
au niveau du Facteur C même si ces deux troubles séparément en ont un. D’ailleurs, aucune
comorbidité n’a d’impact sur ce facteur suggérant qu’une comorbidité des troubles de l’Axe II
ne peut être considérée comme prédictrice ou qu’en tout cas, une comorbidité n’est pas plus
signe de gravité qu’un seul trouble sur ce Facteur C (événements présents).
Dans l’hypothèse où le trouble Paranoïaque serait ici plutôt contextuel (c'est-à-dire dû
à l’incarcération), il est possible qu’avec un changement de contexte (par exemple une
libération), ce fonctionnement (alors plutôt défensif) puisse diminuer. En effet, l’incarcération
peut favoriser ou renforcer la méfiance, le caractère soupçonneux et le vécu persécutif. Ainsi,
nous pouvons espérer un changement plus favorable. Toutefois, nous pouvons aussi penser
que dans le cadre de peines longues de plusieurs années, ce fonctionnement puisse persister.
Alors ce trouble aurait une influence sur le risque de récidive.
c) La personnalité Narcissique
Si le trouble Narcissique est aussi très fortement associé au score total à la HCR-20 et
aux scores aux Facteurs H, C puis R, il a également un impact sur ceux-ci qui est toutefois
plus faible que les autres troubles excepté pour le Facteur C sur lequel il a davantage d’impact
que le trouble Paranoïaque (10% contre 8%). L’impact un peu plus faible sur le Facteur H et
surtout sur le Facteur R s’explique peut-être par le fait que les critères de la personnalité
Narcissique ont moins de caractéristiques comportementales que les troubles Antisocial et
Paranoïaque (bien que l’impulsivité soit commune à ces troubles). De plus, concernant le
Facteur C, c’est sans doute, comme nous l’avons vu pour le lien PCL-R et HCR-20, le
caractère grandiose qui entrave l’introspection et engendre les attitudes négatives et
impulsives (critère du Facteur C).
144
d) En résumé
Ces résultats soulignent encore l’importance de l’impact des troubles Antisocial et
Paranoïaque (le vécu persécutif risquant d’intensifier la propension à l’impulsivité). Le
facteur H (événements passés) est ici aussi celui qui réagit le plus à cet impact.
IV-B-2-b) Impact particulier du trouble Borderline sur la HCR-20
a) Impact du trouble Borderline seul sur les scores la HCR-20
Les liens et impacts du trouble Borderline sont plus restreints par rapport aux troubles
cités précédemment dans la mesure où il n’est pas corrélé significativement aux Facteurs C et
R. En revanche, le trouble Borderline est fortement associé et a un impact à la HCR-20 et
particulièrement au facteur H. Il existe une tendance au niveau des corrélations avec le facteur
R mais elle est presque insignifiante (p=.099).
Le trouble Borderline a un impact plus élevé sur le Facteur H que celui du trouble
Paranoïaque. Ceci pourrait rejoindre encore une fois nos précédentes remarques sur
l’impulsivité.
C’est sans doute l’aspect d’impulsivité comportementale qui prédomine alors ici chez
les sujets présentant des caractéristiques borderline et qui pourrait expliquer l’augmentation
des scores. Pourtant bien que l’impulsivité fasse partie du Facteur C (C4), le trouble
Borderline n’y est pas associé de manière significative. Ceci peut être un point positif (relatif
puisque le lien est absent et non inverse) par rapport aux troubles Antisocial, Narcissique et
Paranoïaque qui sont chacun fortement corrélés au Facteur C. Cette absence de lien peut être
favorable à une éventuelle prise en charge puisque ce facteur fait référence au manque
d’introspection, aux attitudes négatives et à la réponse au traitement.
b) Effet du trouble Borderline associé à d’autres troubles de l’Axe II sur les scores à la HCR20.
De la même manière que le trouble Borderline a perdu sa significativité en prenant en
compte les comorbidité de l’Axe II sur la PCL-R, il n’apparaît pas non plus dans les
comorbidité ayant un impact sur le score total à la HCR-20.
145
Concernant le Facteur H, outre la comorbidité des troubles Antisocial et Paranoïaque
(cf. tableau 27 p. 112), deux autres modèles ressortent des régressions linéaires et soulignent
deux autres types de comorbidité agissant sur le score au Facteur H :
► La comorbidité des personnalités Antisociale, Paranoïaque et Borderline a un très
fort impact sur ce facteur (50%), ce qui n’est pas étonnant au vu des résultats pour chacun de
ces troubles séparément. L’aspect impulsif retrouvé dans ces personnalités est important.
► La seconde comorbidité est plus étonnante en introduisant la personnalité Evitante,
avec un impact inverse (négatif), alors que celle-ci n’est pas corrélée à la HCR-20 d’après nos
analyses. La comorbidité des troubles Antisocial, Paranoïaque, Borderline et Evitant a donc
un fort impact sur le Facteur H. Ceci signifierait que des caractéristiques de la personnalité
Evitante (caractéristiques anxieuses, inhibition…) pourraient influer sur ce score lorsque
associées aux trois autres troubles cités ci-dessus.
Nous pouvons observer que la personnalité Narcissique perd sa significativité à côté
de ces troubles et n’est plus prédictrice en terme de comorbidité. L’impact qu’elle peut avoir
sur la HCR-20 est alors un impact « individuel » mais elle n’apparaît pas comme utile au
niveau des comorbidités.
IV-B-3) Synthèse concernant l’impact des scores à la PCL-R et
des troubles de l’Axe II sur la HCR-20
Le graphique ci-dessous (graphique 4) présente l’impact des ces troubles sur la HCR20 et les Facteurs H, C et R en terme de pourcentage de variance expliquée. Ils sont présentés
par ordre d’importance.
Entre la psychopathie (PCL-R) et les troubles de l’Axe II, c’est la psychopathie telle
que définie par Hare qui est la plus fortement associée à la HCR-20 et à ses facteurs.
146
Graphique 4 - Récapitulatif de l’impact des troubles de la personnalité de l’Axe II (avec celui
du score total à la PCL-R pour comparaison) sur la HCR-20.
80%
70%
60%
50%
40%
30%
20%
10%
0%
PCL-R total
Antisocial
HCR-20 total
Paranoïaque
Facteur H
Narcissique
Facteur C
Borderline
Facteur R
Ceci confirme la gravité de la psychopathie et l’importance de son impact en ce qui
concerne les scores à la HCR-20. Toutefois, même si l’impact des troubles de l’Axe II est
moins fort, il est significatif et nous pouvons penser que la psychopathie associée aux troubles
Antisocial, Paranoïaque ou Narcissique augmenterait les scores à la HCR-20 et peut avoir un
impact encore plus conséquent.
Il est intéressant de voir que nous retrouvons à peu près le même type de lien entre les
troubles de l’Axe II - à savoir les troubles Antisocial, Paranoïaque, Narcissique et Borderline et la HCR-20 qu’entre ces mêmes troubles et les scores à la PCL-R. Cela rejoint l’importance
de l’impulsivité qui a déjà été soulignée (Fossati et al., 2007) et reste certainement un élément
important dans la dangerosité et dans le risque de récidive que peut présenter un individu
comme le suggèrent Bénézech, Forzan-Jorissen, & Groussin (1997) qui ont établi une liste
dans laquelle figurent entre autre l’impulsivité pathologique comme prédictive d’un état
dangereux.
Concernant l’implication du trouble Borderline en terme de comorbidité avec les
autres troubles de l’Axe II, nous avons vu qu’il n’apparaissait plus comme ayant une
influence sur les scores à la PCL-R et au Facteur 2 si les personnalités Antisociale et
Paranoïaque sont aussi prises en considération. Ceci constituerait alors un point important à
147
prendre en compte pour le risque de récidive, le trouble Borderline ne diminuant alors pas le
risque mais au moins en n’étant plus un facteur d’augmentation du risque (encore une fois par
rapport aux troubles Antisocial et Paranoïaque).
Enfin, concernant les facteurs de la HCR-20, les troubles de l’Axe II vus
précédemment sont en général plus associés au Facteur H et ont un plus fort impact sur celuici par rapport aux Facteurs C et R. Cela souligne le poids des événements passés. A contrario,
le score total à la PCL-R et aux Facteurs 1 et 2 ont au contraire un impact plus important sur
le Facteur C par rapport au Facteur H.
Ce Facteur C nous interpelle car aucune comorbidité de l’Axe II n’a d’effet sur celuici pas même la comorbidité des troubles Antisocial et Paranoïaque qui agit fortement sur le
score total à la PCL-R. Pourtant, comme le montre le graphique 4, le score total à la PCL-R a
un très fort impact sur le Facteur C surtout comparé aux troubles Antisocial, Paranoïaque et
Narcissique. Ce facteur concerne une évaluation dans le présent et donc peut fluctuer en
fonction de divers facteurs ce qui en fait un facteur moins stable (et peut-être alors moins
fiable ?).
*****
Nous venons de traiter les résultats concernant de premier objectif de cette thèse à
savoir évaluer l’impact des troubles de l’Axe II notamment le cluster B (et plus précisément le
trouble Borderline) sur la psychopathie (PCL-R) d’abord et le risque de récidive (HCR-20).
Nous avons également affiné nos résultats aux types de délits violents et non violents en lien
avec les troubles de la personnalité (PCL-R et Axe II).
En plus de ces objectifs de recherche, nous avons des objectifs appliqués qui y
correspondent,
notamment
dans
le
contexte
politico-judiciaire
actuel
particulier.
Premièrement, il s’agissait de rendre compte de l’intérêt d’utiliser une approche
dimensionnelle en plus de l’approche catégorielle. Deuxièmement, de montrer l’intérêt
d’utiliser des instruments standardisés dans la pratique, instruments qui ne doivent pas être
exclusivement réservés à la recherche. Ces deux points sont aussi essentiels en terme de prise
en charge.
*****
148
IV-C) Les objectifs appliqués dans le contexte politicojudiciaire actuel
Comme vu dans l’introduction, la loi du 25 février 2008 relative à la « rétention de
sûreté et à la déclaration d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental » fait débat.
Cette loi concerne les personnes condamnées pour certains crimes et qui présentent à l'issue
de leur peine, une « probabilité très élevée de récidive et une particulière dangerosité résultant
d'un trouble grave de leur personnalité ». De plus, la procédure s'applique lorsque l'auteur
d'une infraction est atteint de troubles mentaux qui peuvent le rendre pénalement
irresponsable. Enfin, la loi modifie la prise en charge des détenus nécessitant des soins. Pour
inciter les détenus qui ont besoin d'un traitement, le texte prévoit que le refus de soins soit
assimilé à une mauvaise conduite. Autrement dit, le détenu ne pourra plus bénéficier de
réduction de peine s’il refuse les soins.
C’est donc dans ce contexte particulier qui s’ajoute à un système français déjà assez
répressif (Bénézech et al, 2009) que s’inscrit notre recherche. La prise en charge en milieu
carcéral peut déjà être rendue difficile notamment par le manque de moyens (humain,
financier…). Nos résultats soulignent le lien entre certains troubles de la personnalité de
l’Axe II (Antisocial, Narcissique, Borderline et Paranoïaque) et le niveau de psychopathie
ainsi que le lien entre ces différents troubles de la personnalité (psychopathie et Axe II) et le
niveau de dangerosité et de risque de récidive. Notre but, en terme de soins et à partir de ces
résultats, est d’amener à un affinement des diagnostics dans le but d’adapter et de
personnaliser les prises en charge de ces personnes ayant commis des actes délictueux ou
criminels et incarcérées afin de répondre au mieux à leurs besoins.
Les objectifs appliqués sont alors multiples. Il s’agit de montrer l’intérêt : 1) de la
complémentarité entre l’approche dimensionnelle et l’approche catégorielle ; 2) de
l’utilisation de ces outils d’évaluation standardisés pour la pratique clinique en France que ce
soit à des fins d’examen psychologique (Serin, 1992; Garb, 1998; Pedinielli & Fernandez,
2005), d’aide à la définition de la prise en charge (Wong & Burt, 2007) ou d’aide à
l’évaluation de l’efficacité de la prise en charge.
149
IV-C-1) Intérêt de la complémentarité : approche dimensionnelle
et approche catégorielle
Le fait que certaines personnes reçoivent plusieurs diagnostics de troubles de la
personnalité suggère que les catégories diagnostiques ne renvoient pas à des entités distinctes.
En ce qui nous concerne, nous avons choisi d’utiliser des instruments basés sur
l’approche dimensionnelle et d’autres sur l’approche catégorielle. Certains tests et entretiens
sont issus du DSM-IV qui est une classification « athéorique ». Les manifestations ou les
symptômes n’ont pas à être tous présents pour poser le diagnostic et différentes combinaisons
sont possibles. Ceci permet une certaine hétérogénéité à l’intérieur de la catégorie puisque
diverses combinaisons de critères peuvent conduire au même diagnostic. Malgré les avantages
(aspects pratiques et imagés des catégories, facilité pour s’entendre sur un même trouble), les
limites importantes d’une approche catégorielle ont conduit plusieurs auteurs à proposer une
classification dimensionnelle. Le DSM-IV reconnaît qu’« une perspective alternative à cette
approche catégorielle est représentée par la perspective dimensionnelle selon laquelle les
troubles de la personnalité sont des formes inadaptées de traits de personnalité reliés entre
eux et à l’état normal sur un continuum sans transition nette » (APA, 1996, p. 744). La
prochaine version du DSM prend en compte l’aspect dimensionnel. Récemment, des auteurs
ont proposé d’introduire des critères dimensionnels dans les catégories diagnostiques du DSM
et dans les critères (Brown & Barlow, 2005). De Fruyt et al. (2008) ont établi une revue de la
littérature réunissant des arguments empiriques et théoriques justifiant l’approche
dimensionnelle et ce changement de perspective. Ces éléments sont en faveur d’une approche
dimensionnelle permettant d’améliorer ainsi la validité du diagnostic de trouble de la
personnalité qui pourrait se faire notamment à partir du modèle à cinq facteurs (Ibid.).
Dans ce sens, nos résultats ont montré que les troubles de l’Axe II cluster B
(Antisocial, Narcissique, Borderline) ainsi que le trouble Paranoïaque (cluster A) agissent
différemment sur le niveau de psychopathie en l’augmentant plus ou moins (impact plus fort
du trouble Antisocial et du trouble Paranoïaque). De plus, les fortes comorbidités (notamment
comorbidité des troubles Antisocial et Paranoïaque), appuient la nécessité d’envisager ces
troubles de manière dimensionnelle. Il en est de même pour l’impact sur le risque de récidive.
Nos résultats en terme d’association et d’impact nous renvoient aussi à l’intérêt
d’évaluer les comorbidités entre la psychopathie selon l’approche dimensionnelle (score total
allant de 0 à 40) et les troubles de l’Axe II selon l’approche catégorielle (cotation
150
dichotomique en terme de présence/absence). Il serait alors judicieux d’utiliser ces deux
méthodes de manière complémentaire.
IV-C-2) Intérêt de l’utilisation de ces outils d’évaluation standardisés
pour la pratique clinique en France
Ces outils peuvent être utilisés dans l’optique :
–
D’un examen psychologique (Serin, 1992; Garb, 1998; Pedinielli & Fernandez,
2005),
–
De l’aide à la définition de la prise en charge (Wong & Burt, 2007),
–
Et de l’aide à l’évaluation de l’efficacité de la prise en charge.
Comme vu précédemment, notre recherche va dans le sens d’autres études soulignant
l’hétérogénéité de la psychopathie. Ainsi, nous pensons que :
-
Il est nécessaire d’avoir des informations fidèles et valides sur la personnalité
psychopathique ainsi que les similarités et les différences entre ceux qui présentent
cette personnalité afin de mieux ajuster les interventions et la prise en charge.
-
L’utilisation de ces outils permettrait alors dans la pratique d’affiner le diagnostic en
faisant ressortir certaines caractéristiques afin d’adapter ensuite au mieux la prise en
charge de ces patients dans un but notamment de prévention de la récidive.
-
Le trouble Borderline doit être pris en considération notamment au niveau de la
dimension
impulsive.
La présence de caractéristiques
Borderline (anxiété,
dépressivité, etc.) nous semblaient au départ particulièrement importantes dans ce
contexte car elles auraient pu servir d’appui et favoriser un bon pronostic. A contrario,
nos résultats nous ont suggéré que les caractéristiques borderline ressortant le plus
sont d’ordre comportemental avec notamment l’impulsivité qui ne fait qu’aggraver le
niveau de psychopathie. Cela signifie que la catégorie n’est pas à prendre en global et
montre l’intérêt de préciser des fonctionnements différents ou de sous-types.
-
Au niveau de la prise en charge, la thérapie cognitivo-dialectique de Linehan (1993,
2000) qui met l’accent sur le contrôle de l’impulsivité serait intéressante et pourrait
être à adapter au niveau du milieu carcéral.
151
IV-C-2-a) Examen psychologique
Si, globalement, beaucoup de cliniciens sont encore très réticents, l’évaluation
standardisée est néanmoins utilisée dans les troubles majeurs tels que les troubles de
l’humeur, les troubles anxieux, les troubles de l’Axe II, mais la réticence (Pham, Ducro, et al.,
2005) semble augmenter dans le champ de la délinquance. Des outils d’évaluation comme la
PCL-R de Hare (1991, 2003) ou le SCID-II (1997) sont largement utilisés dans la recherche et
moins, voire peu, en pratique clinique. Ce type d’examen psychologique visant à rechercher
les éventuelles comorbidités pourrait pourtant s’avérer bien utile dans la pratique. Ceci va
dans le sens des idées de différents auteurs (Serin, 1992 ; Garb, 1998 ; Pedinielli &
Fernandez, 2005). Les instruments d’évaluation de la psychopathie, de la dangerosité et de la
récidive sont peu connus et peu utilisés mais ont été validés en langue française (pour la PCLR au Québec : Côté & Hodgins, 1996 ; en Belgique : Pham, 1998a ; pour la HCR-20 en
Belgique : Claix & Pham, 2004). L’échelle de psychopathie a été utilisée dans de nombreux
pays européens (Côté, 2000) comme en Allemagne, Angleterre, Ecosse, Espagne, Belgique
etc. Elle a donc fait ses preuves dans la recherche mais pourrait également être utilisée dans la
pratique clinique (Serin, 1992). La PCL-R peut être aussi utilisée comme outil d’évaluation
du risque (Hart, 1998 ; Côté et al., 2000 ; Hare, Clark, Grann, & Thornton, 2000) mais
l’accent est aussi mis sur l’impossibilité de déterminer avec certitude le risque de récidive
(Senon, 2005).
L’objectif de cette recherche est aussi de tenter de démontrer l’intérêt d’une démarche
d’exploration et de mettre au point un examen clinique fiable et valide en France à partir
d’instruments utilisés largement aux Etats-Unis et au Canada. Ceux-ci ont fait leurs preuves
pour une population de délinquants incarcérés. Il s’agit alors avec ce type d’examen
psychologique de « situer ce qui est produit par le test dans une compréhension plus globale
de l’individu, de son fonctionnement, de ses possibilités » (Pedinielli & Bénony, 2001 cités
par Pedinielli & Fernandez, 2005 p. 16). Dans ce sens selon Sultan (2004), « établir un
diagnostic psychologique revient à décrire une dynamique individuelle, le jeu des forces et
des faiblesses, des déficits, des fonctions adaptatives, des réactions individuelles, qui
déterminent une conduite et son évolution. Il ne s’agit pas de se limiter à une classification en
fonction d’un système de pathologie (p. 15-16)». Nous voyons bien là ce que pourrait apporter
en terme d’avantages une approche qui utiliserait à la fois le catégoriel et le dimensionnel.
Sultan (2004) insiste également sur la différence fondamentale entre le diagnostic
152
psychiatrique, pour lequel le clinicien doit situer un cas concret par rapport à un système de
classification, et le diagnostic psychologique qui se préoccupe de ce qui singularise le sujet
dans la catégorie. Il doit alors décrire la dynamique du fonctionnement individuel qui
détermine le comportement et son évolution. La HCR-20, par exemple, prend en
considération pour l’évaluation du risque et la prédiction de la dangerosité des facteurs
environnementaux, sociaux et situationnels (Pham, Ducro, et al., 2005).
IV-C-2-b) Aide à la définition de la prise en charge et à l’évaluation de son
efficacité
a) Une prise en charge difficile de la psychopathie
Les caractéristiques de la psychopathie constituent nombres de défis pour toute
approche thérapeutique (Pham, 2000 ; Hare, 2006). Par exemple, le mensonge pathologique et
la manipulation empêchent une relation de confiance entre le patient et le thérapeute (la
relation transférentielle authentique en est d’autant plus difficile et la grandiosité du Moi est
peu compatible avec un véritable désir de changement). Les sujets psychopathes sont souvent
décrits comme incurables et aucune méthode ne semble encore avoir prouvé son efficacité
pour réduire considérablement la récidive. Les sujets souffrant de trouble de la personnalité ne
se rendent pas compte, pour la plupart, de leur trouble (Millon & Davis, 1996), ce qui rend
aussi la prise en charge plus difficile. Elaborer des interventions spécifiques pourrait
permettre de rendre plus efficaces les changements comportementaux visés.
b) Propositions de points importants soulevés par nos résultats
Aussi, l’adaptation d’une prise en charge devrait être personnalisée en fonction :
- De la dimension d’impulsivité de manière générale qui est un élément essentiel que
nous avons extrait de nos résultats et sur lequel il faudrait se centrer (avec notamment
l’identification des variantes primaire et secondaire de la psychopathie) et,
- Soit en fonction d’un des troubles de l’Axe II qui serait associé à des hauts scores à
la PCL-R à savoir, en fonction de nos résultats, les troubles Antisocial, Paranoïaque,
Narcissique ou Borderline ;
153
- Ou, comme la comorbidité est forte entre troubles de l’Axe II, en fonction des
comorbidités des troubles de l’Axe II qui seraient associés à de haut scores à la PCL-R, à
savoir comme les résultats l’ont suggéré dans notre recherche, la comorbidité des
personnalités Antisociale/Paranoïaque d’une part, et Antisociale/Narcissique d’autre part.
Ainsi, la personnalité Antisociale et les impulsions sont à prendre en considération,
le côté impulsif étant davantage contrôlé en milieu carcéral qu’à l’extérieur, ce qui pourrait
laisser présager du risque de récidive quand ce cadre n’y est plus (sensibilité au contexte,
addiction, éventuellement traitements médicamenteux visant la réduction des impulsions …).
De plus, s’engager dans un traitement suppose le respect de certaines règles qui est plus que
relatif chez les sujets antisociaux.
Concernant la comorbidité des personnalités psychopathiques et Borderline, c’est
donc surtout la composante comportementale impulsive et antisociale qui serait à cibler.
Certains travaux mettent en avant la surconsommation de tous les types de soins chez les
patients borderline (médicamenteux et psychiatriques). Plusieurs types de prise en charge
s’offrent aux patients borderline (psychothérapie de soutien, de groupe, analytique ou
cognitivo-comportementale) mais une prise en charge bifocale ou multifocale pourrait être
recommandée en expliquant bien les rôles et la fonction de chacun. Ensuite, quand la
dimension antisociale et impulsive du sujet sera moindre, des manifestations cliniques
d’anxiété et de dépression pourraient apparaître et seraient, toutes deux, des indicateurs de
pronostic favorable (Gabbard & Coyne, 1987). En effet, nos résultats indiquent une absence
de lien entre le trouble Borderline et le Facteur 1. Ainsi, comme le lien n’est pas inverse, peutêtre qu’après avoir observer une diminution de l’impulsivité, le clinicien pourrait s’appuyer
sur cette donnée, en fonction de son patient.
Concernant la personnalité Narcissique, les caractéristiques de celle-ci rappellent
celles du Facteur 1 de la PCL-R qui justement rendent le traitement plus difficile. En effet,
plus le narcissisme et le détachement émotionnel (F1) sont élevés, plus les réponses au
traitement seront mauvaises (Meloy, 2000). Le narcissisme élevé ferait que ces sujets seraient
peu enclins au changement et auraient des difficultés à éprouver des émotions, ce qui rendrait
difficile l’alliance relationnelle. Celle-ci serait alors un point à travailler avec les sujets
présentant un trouble de la personnalité Narcissique. La prise en charge pourrait s’appuyer sur
le contrôle des impulsions et le développement de l’empathie (Kraus & Reynolds, 2001). Nos
résultats ont souligné toute l’importance de l’impulsivité. Kraus et Reynolds (2001) se sont
focalisés sur les troubles du cluster B avec l’approche cognitivo-comportementale, en
s’appuyant sur l’identification des croyances irrationnelles, la clarification et la facilitation de
154
l’expression de ces croyances, et en renforçant les comportements et choix « sains » faits par
le patient.
Enfin, une attention particulière pourrait être portée au niveau de la personnalité
Paranoïaque de par les difficultés d’établir une alliance thérapeutique dans ce type de
fonctionnement et le fait que ces personnalités s’engagent davantage dans une psychothérapie
de par les situations difficiles dans lesquelles elles se trouvent et non par rapport à leur
personnalité. Sur un plan clinique, ce point est important compte tenu de la difficulté de prise
en charge de ces personnalités qui doit être polyvalente et pouvant être abordée par une
approche
cognitivo-comportementale
(examen
objectif
des
événements,
pensées
automatiques, comportements, schémas cognitifs de base) (Debray, 2007). Toutefois, si les
caractéristiques paranoïaques sont davantage contextuelles (donc défensives), le pronostic
serait de meilleur augure.
Dans l’idéal, la prise en charge viserait d’une part la diminution des manifestations
psychopathiques et d’autre part la diminution du risque de récidive. Développer de nouvelles
attitudes, de nouveaux comportements, s’appuyer sur des stratégies de coping plus efficaces
demandera alors beaucoup d’efforts et de rigueur. La propension à l’ennui et à l’impulsivité
pourrait être un frein. Archer (2001) préconise quelques pistes à travailler avec les sujets
psychopathes incarcérés dont : le soulagement de la souffrance psychique, la diminution des
passages à l’acte et de la violence, la prévention des décompensations psychiatriques, l’aide à
la reconstruction du narcissisme, le renforcement du sentiment de culpabilité et de la
conscience morale avec un cadre cohérent et solide tout en s’assurant que la demande vient
bien du sujet.
Une prise en charge cognitivo-comportementale serait plus judicieuse (Pham, 2000)
avec notamment un taux d’amélioration chez les sujets psychopathes de 62% avec cette
approche, 59% avec une approche psychanalytique, et 25% avec les communautés
thérapeutiques contre 20% d’amélioration sans traitement (Salekin, 2002).
Au départ élaborée pour les patients Borderline, la Thérapie Cognitivo-Dialectique
(TCD) est issue des thérapies cognitivio-comportementales (TCC) et est associée à d’autres
modèles (par exemple psychodynamiques, etc.). Linehan (1993, 2000), s’inscrivant dans
l’approche bio-psycho-sociale, a donc conceptualisé tout un ensemble de stratégies issues de
ces approches. Selon la théorie bio-sociale, le trouble Antisocial résulterait de l’interaction
entre une insensibilité sur le plan émotionnel associée à l’invalidation constante (McCan,
Comtois, & Ball, 2006) c'est-à-dire les réponses invalidantes telles que la négligence, les
155
critiques directes, les punitions (Linehan, 1993). Cette approche pourrait donc être judicieuse
chez certains sujets antisociaux ou psychopathes. Elle pourrait aussi être adaptée au trouble de
la personnalité Paranoïaque, Debray (2007) préconisant un examen objectif des événements,
pensées automatiques, comportements, schémas cognitifs de base.
Les impacts thérapeutiques de la TCD peuvent être de diverses natures dont, ce qui
nous intéresse ici, ne pas reproduire l’environnement invalidant (par exemple pour la
réactivité paranoïaque impulsive), jouer avec les stratégies de validation et d’amélioration des
capacités, valider les expériences émotionnelles et introduire des stratégies de changement.
Un contrat de base est établi au départ, pour le patient mais aussi pour le thérapeute. La
thérapie comprend au départ une psychothérapie individuelle en ambulatoire (qui serait donc
à adapter au niveau de l’incarcération) et des groupes d’entraînement aux compétences. La
première étape s’appuie sur le modèle de l’analyse fonctionnelle qui analyse tous les microcomportements, l’objectif étant de ne pas renforcer ces types de comportements en évaluant
les priorités comme par exemple la dangerosité de certains actes.
Toutefois, certaines études suggèrent que le traitement de certains sujets psychopathes
peut augmenter le taux de récidive (Seto & Barbaree, 1999 ; Hare et al., 2000). Meloy (2000)
propose d’ailleurs des contre-indications pour le traitement avec notamment l’absence totale
de remords ou d’aptitude ou d’inclinaison à former un lien ou un attachement émotionnel à
une autre personne comme constante dans l’histoire du sujet.
Les scores obtenus au départ à la PCL-R associés aux informations fournies par le
SCID-II seraient alors utiles pour établir un profil du sujet et déterminer l’approche ou les
stratégies qui conviendraient le mieux. En effet, en fonction du niveau de psychopathie plus
ou moins sévère, la manière de procéder ne sera pas la même. Il en va de même en fonction de
la prédominance du Facteur 1 ou du Facteur 2 de la psychopathie. Ainsi, Meloy (2000)
préconise un cadre hospitalier très structuré pour les sujets à haut niveau de psychopathie. Il
souligne également l’importance de voir ce trouble sur un continuum comme c’est le cas avec
la PCL-R.
Ensuite, l’utilisation des outils que nous avons choisis permettrait de tester de nouveau
les sujets et de comparer les scores obtenus, ce qui aiderait à l’évaluation de l’efficacité de la
prise en charge.
Etant donné nos résultats (lien de cause à effet), une diminution de la PCL-R devrait
entraîner une diminution du risque de récidive. Mais il resterait toujours les troubles de l’Axe
156
II (Antisocial, Paranoïaque, Narcissique ou Borderline) à cibler également puisqu’ils ont aussi
un effet sur la HCR-20.
157
Conclusion
158
A notre connaissance, cette étude constitue la première évaluation convergente entre la
psychopathie selon la PCL-R et les troubles de la personnalité du DSM-IV auprès d’une
population carcérale française.
L’objectif était donc d’évaluer l’impact des troubles de l’Axe II sur la psychopathie
(PCL-R : Hare, 1991) et notamment le trouble Borderline. Nous avons également étudié
l’impact de ces troubles sur les scores à la HCR-20 (Webster et al., 1997) et nous avons affiné
nos résultats au niveau de l’impact de la personnalité sur les types délits non violents et
violents. Nos hypothèses ont été confirmées par nos analyses. Nos résultats valent pour une
population de sujets masculins incarcérés et condamnés en Maison d’Arrêt. Ils ont confirmé
que plus les troubles de l’Axe II sont présents, plus le niveau de psychopathie augmente. Cela
est surtout le cas pour trois des quatre troubles du cluster B, les troubles Antisocial,
Narcissique et Borderline. Le trouble Paranoïaque a également un fort impact. L’impact de
certaines comorbidité entre troubles de l’Axe II a été souligné avec notamment l’importance
de la comorbidité des personnalités Antisociale et Paranoïaque. Les liens et impacts sont de
même ordre sur les scores à la HCR-20 donc en ce qui concerne la dangerosité et le risque de
récidive. Plus particulièrement, nous n’avons pas en revanche observé l’impact particulier que
nous attendions par rapport au facteur de narcissisme et de détachent émotionnel de la PCL-R
(Facteur 1). Si nous avions observé un effet d’amoindrissement, nous aurions pu nous
attendre à ce que les scores de la HCR-20 diminuent avec la présence de ce trouble, ce qui n’a
pas été le cas. L’impact de ce trouble n’est donc pas particulier dans le sens où nous
l’attendions, mais il a bel et bien un impact de par le poids de l’impulsivité qui le caractérise.
Nos données appuient le fait qu’un jugement clinique structuré, c'est-à-dire avec l’utilisation
de ce type d’outils, pourraient éviter les écueils dus aux jugements cliniques non structurés
comme la subjectivité, le manque d’attention aux facteurs de risque importants et la variabilité
des cliniciens (Douglas et al., 2003).
L’avantage de notre recherche est qu’elle porte sur un échantillon assez important
puisque 80 sujets y ont participé. Notre protocole comprend des outils solides, fiables et
valides mais qui demandent beaucoup de temps lors de la passation et pour la cotation. En
outre, notre recherche a permis de souligner la complémentarité des approches
dimensionnelles et catégorielles.
Certaines limites sont à noter. Les analyses ont porté à chaque fois sur l’ensemble de
notre population de 80 sujets. Rappelons l’optique de notre recherche qui était d’introduire
une approche dimensionnelle en complément d’une approche catégorielle. Concernant plus
spécifiquement l’hypothèse relative au trouble Borderline, diviser notre population en deux
159
groupes de sujets Borderline et non Borderline aurait également pu être intéressant afin
d’évaluer ensuite les niveaux de psychopathie et les scores à la HCR-20. Mais le plus
important était pour nous de nous focaliser d’abord sur le niveau de psychopathie (aspect
dimensionnel) et donc évaluer l’impact des troubles de la personnalité puis particulièrement
celui du trouble Borderline. Enfin, nous aurions pu effectuer également trois groupes en
fonction du niveau de psychopathie bas ou absence, mixte et élevé sur la base du point de
coupure élaboré par Hare (1991), Cooke & Mitchie (2003) ou Pham et collaborateurs (Pham,
1998a ; Pham et al., 2003). Nous aurions ensuite procédé de la même manière au niveau de
nos analyses et comparé ensuite les différents groupes. Bien sûr, en procédant ainsi,
l’approche reste purement catégorielle excepté lors de la prise en compte des scores à la HCR20. Nous devons aussi tenir compte dans nos résultats, du fait même du contexte spécifique de
l’incarcération. Même s’il a toujours été spécifié avant la passation des tests que les réponses
notamment au SCID-II devait se faire dans la vision de la globalité du comportement, c'est-àdire comment la personne s’est comportée ou a agi ou pensé ces dernières années, il était
parfois difficile à certains sujets de répondre à certaines questions. Pour certains, leur vie se
résume à toute une série d’incarcérations ou alors un nombre moins important mais de très
longue durée. Certains passent donc la majeure partie de leur vie en prison et ont parfois du
mal à répondre aux questions notamment concernant la vie familiale et les relations avec les
membres de leur famille. Si nous observons les résultats descriptifs, le pourcentage
concernant l’abus de substance ou d’alcool est certainement plus faible que dans d’autres
échantillons étant donné l’incarcération et donc l’impossibilité notamment de boire de
l’alcool.
Nous avons évoqué différentes approches thérapeutiques et les aspects qu’il nous
semble importants de cibler.
D’autres aspects seraient aussi à explorer dans des recherches futures comme les bases
biologiques et neuro-biologiques de la psychopathie (Hallé & Hodgins, 1996) entrant en jeu
dans le trouble Antisocial et l’aspect neurocognitif de la violence ainsi que certaines
anormalités au niveau du cerveau (Glenn & Raine, 2008).
Dans ce sens, certaines anomalies rencontrées dans la psychopathie pourraient en fait
être des stratégies cognitives compensatoires ou d’adaptation afin de fonctionner le plus
efficacement possible en limitant ainsi l’impact d’une anomalie (de type régulation
émotionnelle) apparaissant tôt dans la vie (Hallé, Hodgins, & Roussy, 2000). Nous avons déjà
traiter des différences entre psychopathie primaire et secondaire résidant entre autre dans le
caractère génétique (ou constitutionnel) pour la première ou environnemental pour la
160
deuxième. Cette différence étiologique peut alors avoir des implications concernant le
traitement puisque ce qui serait lié au contexte peut être modifié plus facilement qu'un déficit
émotionnel constitutionnel. Pour le trouble Antisocial et à travers une revue de la littérature,
certaines données iraient dans le sens d’une héritabilité partielle (vulnérabilité biologique) en
insistant sur les interactions entre environnement et génotype dans la genèse de la
personnalité antisociale (Moran, 1999). L’aspect neurocognitif de la violence s’appuie sur le
modèle d’inhibition de la violence (VIM), pré-requis pour le développement de trois aspects
clés dans la socialisation et l’émergence de la moralité (Blair, 1995). Il s’agit : des émotions
morales (culpabilité, remords…), de l’inhibition de l’action violente et de la distinction entre
les règles conventionnelles et sociales. Ce modèle fait intervenir la notion d’apprentissage. En
effet, il se définirait comme un mécanisme cognitif activé à la fois par la présentation de
signaux de détresse (expression faciale de tristesse, peur, la vue et le son des pleurs) et par les
représentations mentales des actes causant la souffrance chez les autres.
161
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187
Annexes
188
Annexe 1 Description des troubles de l’Axe II
Tableau 33. Classification des Troubles de la personnalité selon le DSM-IV (1996).
Cluster
Personnalité
Caractéristiques
- Paranoïaque
- Méfiance exagérée envers autrui ;
Leurs intentions sont interprétées
comme
étant
malveillantes.
Projection
- Schizoïde
- Détachement des relations
sociales ; Restriction de la variété
des expressions émotionnelles.
A
« Personnalités
Bizarres ou Excentriques »
- Schizotypique
B
« Personnalités Dramatiques et
Emotives »
- Bizarreries et étrangeté au niveau
de la pensée, des perceptions et du
comportement. Gêne aiguë dans les
relations
proches.
Conduites
excentriques. Distorsion et déni
psychotique.
- Histrionique
- Réponses émotionnelles et Quête
d’attention
excessives
et
envahissantes.
- Narcissique
- Grandiosité ; Besoin d’être
admiré ; Manque d’empathie.
Tendance au clivage.
- Borderline
Instabilité
des
relations
interpersonnelles, de l’image de soi
et des affects avec une impulsivité
marquée, clivage, identification
projective.
- Antisociale (ou dyssociale)
- Mépris et violation des droits
d’autrui ; tromperie, manipulation.
- Evitante
- Inhibition sociale, sentiment de
ne pas être à la hauteur,
hypersensibilité
au
jugement
négatif d’autrui.
- Dépendante
- Comportement soumis et
« collant » lié à un besoin excessif
d’être pris en charge.
C
« Personnalités
Evitantes (ou Anxieuses) »
- Obsessionnelle-compulsive (ou
anankastique)
Pensées
obsédantes,
comportements
compulsifs.
Préoccupation par l’ordre, la
perfection et le contrôle mental et
interpersonnel. Isolation, formation
réactionnelle.
189
- Dépressive
Personnalités non spécifiés,
à l‘étude dans le DSM-IV
- Négativiste (ou passive agressive)
- Mode envahissant de cognition et
comportements
dépressifs
(abattement,
morosité,
ennui,
amertume). Sentiment chronique
de malheur et de tristesse. Grand
pessimisme.
- Mode envahissant d’attitudes
négativistes et de résistance
passive.
190
Annexe 2 Corrélations entre les scores à la PCL-R et les
troubles de l’Axe II
Tableau 34. Corrélations entre la PCL-R, Facteurs 1 et 2 et les troubles de l’Axe II (N=80).
Axe II
Evitante
Dépendante
Obsessionnelle-compulsive
Négativiste
Dépressive
Paranoïaque
Schizotypique
Schizoïde
Histrionique
Narcissique
Borderline
Antisociale
PCL-R
-0,067
0,554
80
-0,131
0,249
80
0,120
0,291
80
0,047
0,680
80
0,019
0,868
80
0,448**
0,000
80
-0,213
0,058
80
-0,006
0,955
80
0,206
0,066
80
0,405**
0,000
80
0,241*
0,031
80
0,587**
0,000
80
Facteur 1
-0,037
0,746
80
-0,128
0,257
80
0,130
0,251
80
-0,012
0,916
80
-0,067
0,554
80
0,320**
0,004
80
-0,183
0,105
80
-0,012
0,916
80
0,170
0,132
80
0,361**
0,001
80
0,124
0,275
80
0,419**
0,000
80
Facteur 2
-0,069
0,541
80
-0,071
0,53
80
0,105
0,354
80
0,084
0,457
80
0,097
0,394
80
0,474**
0,000
80
-0,203
0,071
80
0,043
0,705
80
0,236*
0,035
80
0,358**
0,001
80
0,299**
0,007
80
0,632**
0,000
80
**p <.01 ; *p <.05
191
Annexe 3 Corrélations entre les scores à la PCL-R et les
troubles de l’Axe II et les délits violents et non violents
1- Troubles de la personnalité (PCL-R et Axe II) et délits violents
► PCL-R et délits violents
Tableau 35- Corrélations entre la PCL-R et les délits violents.
PCL-R sans item 20
Facteur 1
Facteur 2
Délits Violents
0,153
0,176
80
0,134
0,235
80
0,144
0,204
80
nombre de DV
0,369**
0,001
80
0,291**
0,009
80
0,342**
0,002
80
**p <.01
Tableau 36- Corrélations entre les scores à la PCL-R et les types de délits violents.
PCL-R
Total sans item
20
Délits violents
Vols qualifiés, violents
Voies de fait
Meurtres
Possession armes
Délits sexuels
Enlèvement
0,355**
0,001
80
0,12
0,289
80
0,120
0,288
80
0,338**
0,002
80
-0,219
0,051
80
0,208
0,064
80
Facteur 1
0,285*
0,010
80
0,095
0,404
80
0,089
0,430
80
0,254*
0,023
80
-0,142
0,210
80
0,104
0,360
80
Facteur 2
0,403**
0,000
80
0,168
0,137
80
0,138
0,224
80
0,312**
0,005
80
-0,359**
0,001
80
0,213
0,058
80
**p <.01 ; *p <.05
192
► Troubles de l’Axe II et délits violents
Tableau 37- Corrélations entre les troubles de l’Axe II et les délits violents (DV).
DV
Paranoïaque
0,020
0,863
80
-0,073
0,522
80
0,039
0,731
80
0,067
0,554
80
Narcissique
Borderline
Antisociale
nombre de DV
0,181
0,108
80
0,194
0,084
80
0,322**
0,004
80
0,398**
0,000
80
**p <.01
Tableau 38- Corrélations entre les troubles de l’Axe II et les types de délits violents.
Paranoïaque
Délits violents
Vols qualifiés, violents
Voies de fait
Meurtres
Possession armes
Délits sexuels
Enlèvement
0,116
0,305
80
0,190
0,092
80
-0,02
0,863
80
0,194t
0,085
80
-0,112
0,324
80
0,092
0,415
80
Narcissique
0,086
0,450
80
0,129
0,252
80
-0,007
0,951
80
0,141
0,212
80
-0,03
0,792
80
0,287*
0,010
80
Borderline
0,232*
0,039
80
0,283*
0,011
80
0,174
0,123
80
0,067
0,553
80
-0,119
0,294
80
0,218*
0,052
80
Antisociale
0,386**
0,000
80
0,229*
0,041
80
0,069
0,544
80
0,359**
0,001
80
-.241*
0,031
80
0,149
0,189
80
**p <.01 ; *p <.05
193
2- Troubles de la personnalité (PCL-R et Axe II) et délits non violents
►PCL-R et délits non violents (DNV)
Tableau 39- Corrélations entre les scores à la PCL-R et les délits non violents (DNV).
PCL-R sans item 20
Facteur 1
Facteur 2
Délits non Violents
0,172
0,128
80
0,132
0,241
80
0,221*
0,049
80
nombre de DNV
0,017
0,879
80
-0,036
0,754
80
0,106
0,350
80
*p <.05
Tableau 40- Corrélations entre les scores à la PCL-R et les types de délits non violents
(DNV).
PCL-R
Total sans item
20
Délits non violents
Vols
Drogue
Code de la route
Fraudes
Incendie volontaire
Obstruction
Délits mineurs
Evasion
0,137
0,226
80
-0,144
0,203
80
-0,026
0,821
80
-0,019
0,870
80
-0,045
0,690
80
0,103
0,365
80
-0,070
0,536
80
0,215
0,055
80
Facteur 1
0,069
0,543
80
-0,121
0,287
80
-0,075
0,508
80
-0,035
0,756
80
0,006
0,961
80
0,042
0,711
80
-0,094
0,408
80
0,186
0,098
80
Facteur 2
0,216
0,054
80
-0,011
0,926
80
-0,012
0,918
80
-0,073
0,522
80
0,018
0,871
80
0,090
0,427
80
-0,031
0,788
80
0,186
0,098
80
194
2- Troubles de l’Axe II et délits non violents (DNV)
Tableau 41- Corrélations entre les troubles de l’Axe II et les délits non violents (DNV).
Axe II
Paranoïaque
DNV
0,168
0,137
80
0,212
0,059
80
0,136
0,230
80
0,133
0,239
80
Narcissique
Borderline
Antisociale
nombre de DNV
0,067
0,552
80
0,172
0,126
80
0,255*
0,023
80
0,213
0,058
80
*p <.05
Tableau 42- Corrélations entre les troubles de l’Axe II et les types de délits non violents
(DNV).
Paranoïaque
Délits non violents
Vols
Drogue
Code de la route
Fraudes
Incendie volontaire
Obstruction
Délits mineurs
Evasion
0,072
0,525
80
-0,104
0,36
80
0,114
0,314
80
0,089
0,43
80
-0,114
0,314
80
0,132
0,242
80
-0,096
0,396
80
0,277*
0,013
80
Narcissique
0,102
0,367
80
-0,019
0,865
80
0,207
0,066
80
-0,023
0,841
80
-0,11
0,331
80
0,142
0,211
80
0,108
0,342
80
0,287*
0,010
80
Borderline
0,071
0,533
80
0,295**
0,008
80
0,007
0,952
80
0,135
0,231
80
-0,145
0,2
80
0,192
0,087
80
0,280*
0,012
80
0,050
0,657
80
Antisociale
0,152
0,177
80
0,020
0,864
80
0,163
0,148
80
-0,071
0,53
80
0,051
0,652
80
0,213
0,058
80
0,142
0,209
80
0,149
0,189
80
**p <.01 ; *p <.05
195
Annexe 4 Corrélations ente les Troubles de la personnalité
(PCL-R et Axe II) et HCR-20
1- Corrélations entre les scores à la PCL-R et à la HCR-20
Tableau 43- Corrélations entre les scores à la PCL-R et ceux à la HCR-20.
PCL-R total
Facteur 1
Facteur 2
HCR sans H7
0,825**
0,000
80
0,695**
0,000
80
0,816**
0,000
80
Facteur H sans H7
0,673**
0,000
80
0,486**
0,000
80
0,734**
0,000
80
Facteur C
0,827**
0,000
80
0,802**
0,000
80
0,743**
0,000
80
Facteur R
0,753**
0,000
80
0,662**
0,000
80
0,734**
0,000
80
**p <.01
196
2- Corrélations entre les troubles de l’Axe II et les scores à la HCR-20
Tableau 44- Corrélations entre les troubles de l’Axe II et les scores à la HCR-20.
Axe II
Evitante
Dépendante
Obsessionnellecompulsive
Négativiste
Dépressive
Paranoïaque
Schizotypique
Schizoïde
Histrionique
Narcissique
Borderline
Antisociale
HCR total
-0,103
0,364
80
-0,130
0,249
80
Facteur H
-0,074
0,514
80
-0,109
0,337
80
Facteur C
-0,102
0,369
80
-0,135
0,233
80
Facteur R
-0,106
0,349
80
-0,136
0,228
80
-0,078
0,494
80
-0,053
0,643
80
0,080
0,482
80
0,482**
0,000
80
-0,089
0,431
80
-0,039
0,732
80
0,110
0,333
80
0,403**
0,000
80
0,325**
0,003
80
0,589**
0,000
80
-0,072
0,528
80
0,005
0,963
80
0,176
0,119
80
0,509**
0,000
80
-0,017
0,879
80
-0,047
0,677
80
0,074
0,513
80
0,416**
0,000
80
0,408**
0,000
80
0,630**
0,000
80
-0,012
0,919
80
-0,095
0,4
80
-0,115
0,309
80
0,290**
0,009
80
-0,151
0,180
80
-0,036
0,754
80
0,144
0,202
80
0,322**
0,004
80
0,151
0,181
80
0,450**
0,000
80
-0,145
0,200
80
-0,090
0,427
80
0,015
0,894
80
0,413**
0,000
80
-0,121
0,286
80
-0,008
0,943
80
0,046
0,683
80
0,292**
0,009
80
0,186
0,099
80
0,423**
0,000
80
**p <.01 ; *p <.05
197
Angélique NIOCHE
Psychopathie et troubles de la
personnalité associés : recherche d’un
effet particulier au trouble Borderline
– Impact sur le risque de récidive.
Résumé
Cette étude évalue d’une part, les relations entre la psychopathie (PCL-R) et les troubles de la personnalité
(Axe II du DSM) et d’autre part avec le risque de récidive. Un regard particulier est porté sur le trouble
Borderline vu son implication en terme de prise en charge (certaines caractéristiques borderline seraient d’un
meilleur pronostic). Les résultats montrent qu’il existe un lien entre la psychopathie et la présence des troubles
Narcissique, Antisocial, Borderline et Paranoïaque. Contrairement à nos attentes, le trouble Borderline
n’atténue pas le niveau de psychopathie (poids des comportements impulsifs). Ces troubles sont aussi associés
au risque de récidive et au nombre de délits violents (mais pas au type de délits violents versus non violents).
Ces résultats suggèrent qu’impulsions, caractéristiques antisociales, narcissiques et paranoïaques sont
essentielles à repérer. Ils soulignent également l’importance de l’évaluation de type clinique et empirique dans
la recherche mais aussi dans la pratique clinique à des fins de précision diagnostique et pronostique.
Mots clé : Psychopathie, Troubles de l’Axe II, Borderline, Risque de récidive.
Résumé en anglais
This study assesses firstly, the relations between psychopathy and personality disorders (DSM Axis II) and
secondly with the risk for recidivism. A particular interest is related to the Bordeline disorder considering his
implication in the treatment (some borderline characteristics would be of a better forecast). The results show a
link exists between psychopathy and the presence of Narcissistic, Antisocial, Borderline and Paranoid
disorders. Contrary to expected, the Borderline disorder does not reduce the level of psychopathy (importance
of the impulsive behaviours). These disorders are also associated with the risk for recidivism and the number
of violent offences (but not with the type of offences violent versus non violent). The results suggest that
impulses, antisocial, narcissistic and paranoid characteristics are essential to find. The importance of clinical
and empirical assessment in research but also in clinical practice for diagnostic and prognostic precision is
underlined.
Key words: Psychopathy, Axis II disorders, Borderline, Risk for recidivism.
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