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Chronique du droit
Consentement aux soins : le droit et la raison
● G. Devers*
e droit a-t-il perdu la raison ? Telle est la question que
se posent les praticiens, un peu sonnés par la nouvelle règle : c’est au médecin d’apporter la preuve
qu’avant d’entreprendre les soins il a informé le patient de tous
les risques graves, même s’ils sont exceptionnels. Et le juriste, à
son tour, s’inquiète : comment tirer les fils de la compréhension
entre le droit et la santé ? Car le droit et la santé doivent vivre
ensemble et apprendre à se parler.
Le constat n’est plus à faire de la montée en puissance du droit
dans le monde de la santé.
Le mouvement est inéluctable, car ses causes sont durables.
• La première est l’amélioration constante de la qualité des
soins. Le médecin n’est pas tenu à une obligation de résultat, mais
il est désormais toujours en situation de rendre des comptes,
comme un citoyen responsable. Les bonnes intentions ne suffisent pas.
• La seconde témoigne de l’évolution de la société : l’accès au
droit par le recours au juge. Il ne suffit pas que les droits soient
proclamés, encore faut-il qu’ils soient effectifs. Et les droits du
patient ne sont qu’une variété des droits du citoyen.
L’acte médical se situe au cœur des préoccupations du droit, car
il met en cause la plus essentielle des valeurs sociales : l’être
humain, dans son intégrité physique et psychique. L’acte médical n’est légitime qu’à une double condition : l’une générale, qu’il
s’inscrive dans une perspective thérapeutique, l’autre particulière, qu’il soit précédé d’un consentement éclairé.
C’est au regard de ces principes constitutifs du droit que les règles
nouvelles ont été fixées. Mais aussitôt naît le malentendu. Au
nom de quoi un risque grave, fût-il exceptionnel, peut-il être masqué au patient ? interroge le juriste. Au nom de la science, de mon
savoir-faire et de l’efficacité thérapeutique, répond le médecin.
C’est le juge, confronté aux situations les plus inextricables, qui
a posé la règle. Cette règle a nécessairement paru abrupte : ni
concertation, ni débat parlementaire : le juge interprète les principes. Ou, de manière plus réaliste, le juge supplée le législateur,
qui s’est trop longtemps abstenu.
Alors, que reste-t-il à faire ?
Comprendre ce que dit et veut le juge, ce qui conduit à une analyse plus mesurée, particulièrement s’agissant de la place de
L
* Avocat au barreau de Lyon.
La Lettre de l’Hépato-Gastroentérologue - no 3 - vol. III - juin 2000
l’écrit : ce qui est demandé au praticien, c’est une démarche attentive au sein de laquelle trouve place un écrit. Rien de moins, rien
de plus.
Souhaiter que le législateur assume ses responsabilités et
inscrive dans la loi une règle d’équilibre.
Encourager praticiens et juristes à se parler, car si la santé ne peut
plus ignorer le droit, le droit doit intégrer l’humilité du soignant
devant la maladie et comprendre que son devoir est d’aller de
l’avant, quand il s’agit de l’intérêt du patient.
DIX QUESTIONS SUR LE CONSENTEMENT ÉCLAIRÉ
1. Quels sont les fondements de la notion de consentement
éclairé ?
Le consentement éclairé n’a pas été créé à propos de l’acte médical. C’est un concept juridique fondamental qui trouve son origine dans l’analyse contractuelle : il n’y a pas de contrat sans
consentement et ce consentement n’est valable que si une information préalable a été donnée, de telle sorte que c’est un consentement éclairé qui est reçu. L’obligation d’information existe
pour tous les contrats conclus par des professionnels, qu’il
s’agisse d’un notaire, d’un avocat, d’un banquier... ou d’un
médecin. On sait, en effet, que depuis l’arrêt Mercier de 1936,
la jurisprudence analyse l’acte de soin comme une relation
contractuelle. Cette notion contractuelle est ensuite devenue
une notion déontologique. Elle s’impose désormais en matière
hospitalière, alors que, juridiquement, il n’y a pas de contrat
entre le service public et les usagers.
La règle, pendant très longtemps, n’a résulté que de l’analyse
des principes. Elle a reçu une consécration légale, avec l’article
16-3 du Code civil issu de la loi du 29 juillet 1994 relative au
respect du corps humain : “Il ne peut être porté atteinte à l’intégrité du corps humain qu’en cas de nécessité thérapeutique
pour la personne. Le consentement de l’intéressé doit être
recueilli préalablement hors le cas où son état rend nécessaire
une intervention thérapeutique à laquelle il n’est pas à même
de consentir”.
Il n’est pas indifférent de relever que cette loi est incluse dans
le Code civil et non dans le code de la santé publique. La notion
renvoie aux fondamentaux du droit, et son régime est marqué
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par les plus fortes exigences. La question clé est le respect de
l’intégrité de la personne.
2. Quelle était la notion classique du consentement éclairé ?
La notion classique est de construction ancienne. Cette notion
juridiquement dépassée correspond aux conceptions sociologiques dominantes, de telle sorte que les praticiens ont de la difficulté à considérer que cette règle ait pu changer.
Pendant très longtemps, la question du consentement éclairé
ne se posait pas réellement. C’était l’époque du paternalisme
médical. Le praticien était là pour décider, et il n’était pas raisonnable de trop informer le malade. Progressivement s’est
développée une autre notion : le patient devait être informé,
mais seulement des risques courants, la limite reposant sur des
critères statistiques. Cette conception pragmatique a les faveurs
du corps médical : bien sûr, il faut informer le patient, mais à
trop l’informer on risque de le détourner de soins nécessaires.
Dans cette conception, la conscience du médecin l’emporte sur
la transparence de la relation citoyenne entre le médecin et le
patient.
Les procédures étaient rares, et quand il engageait une procédure,
le patient se voyait très rapidement opposer une règle difficilement contournable : demandeur à la procédure, il lui revenait
d’apporter la preuve de ce qu’il n’avait pas été suffisamment
informé.
3. Quelle est la règle nouvelle ?
La règle nouvelle est en rupture : le patient doit être informé de
tous les risques graves, même s’ils sont exceptionnels, et la charge
de la preuve revient au médecin.
La règle n’est pas du fait de la loi, mais elle résulte d’une série
d’arrêts rendus par la Cour de cassation, puis par le Conseil d’État.
C’est la première constatation, mais elle est de taille : dans un
État de droit, la règle de droit est écrite et résulte des processus
démocratiques. La loi est l’acte du Parlement. Or, en l’occurrence, le Parlement ne s’est pas prononcé, et c’est le juge qui a
procédé à une relecture des principes pour édicter ce qui est bien
une règle nouvelle. Le juge, confronté aux situations les plus douloureuses, tire les leçons de l’inadéquation de la règle existante.
Avec une conséquence décisive : la règle jurisprudentielle est
d’effet rétroactif.
La Cour de cassation, compétente pour le droit privé, a ouvert la
voie par trois arrêts rendus les 14 octobre 1997, 27 mai 1998 et
7 octobre 1998, en retenant les règles suivantes :
• il incombe au médecin de prouver qu’il a fourni une information préalable et adaptée ;
• l’information doit porter sur tous les risques graves afférents
aux investigations et soins, même s’ils sont exceptionnels ;
• cette preuve peut être apportée par tous moyens, qu’il s’agisse
d’écrits, d’indices ou de témoignages.
Le Conseil d’État, compétent en droit public, s’est prononcé par
un arrêt rendu le 5 janvier 2000 avec une formulation très proche :
“Lorsque l’acte médical envisagé, même accompli conformément aux règles de l’art, comporte des risques connus de décès
ou d’invalidité, le patient doit en être informé dans des condi176
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tions qui permettent de recueillir son consentement éclairé. Si
cette information n’est pas requise en cas d’urgence, d’impossibilité, de refus du patient d’être informé, la seule circonstance
que les risques ne se réalisent qu’exceptionnellement ne dispense
pas les praticiens de leur obligation”.
L’information sur les risques graves, même s’ils sont exceptionnels, avec nécessité de conserver les éléments de preuve, est
désormais la règle en droit privé comme en droit public.
4. Cette règle est-elle sans limite ?
Le droit ne connaît pas d’exemple de règle qui ne soit assortie de
limites. Trois types de limites ont été retenus par la jurisprudence.
Tout d’abord l’obligation tombe devant l’urgence, ou l’impossibilité de donner cette information. Le principe est constant :
lorsque la maison brûle, les pompiers ne frappent pas à la porte
avant d’entrer.
Ensuite, le patient peut refuser d’être informé. Le droit à l’information est établi dans l’intérêt du patient et celui-ci peut renoncer à ce droit. L’hypothèse est très fréquente en pratique. Elle
suppose toutefois que la démarche du praticien et la réponse du
patient soient effectives. Le patient, sachant que tout acte médical comporte une part d’incertitude, souhaite être informé des
risques courants. Mais il préfère ne pas connaître les risques
exceptionnels et s’en remet à la compétence du praticien.
Enfin, si le médecin doit tout mettre en œuvre pour informer, il
ne peut lui être reproché de ne pas avoir convaincu de la gravité
du risque.
À ces trois limites, il conviendra peut-être d’en ajouter une quatrième : à côté du risque exceptionnel, on peut évoquer le risque
rarissime et improbable. La classification entre risques courants
et risques exceptionnels ne résume pas la question. La littérature
comme l’expérience établissent l’existence de complications
graves et inexpliquées. C’est le “cas d’école”. L’information doit
être exhaustive, mais doit-elle inclure des hypothèses qui renvoient aux interrogations de la recherche ? Le droit ne légitime
pas des interrogations déraisonnables.
5. Quelles sont les règles de preuve ?
Le médecin doit donner l’information, et il est cohérent qu’il soit
en mesure de prouver qu’il a bien donné cette information. La
règle ancienne, soit la preuve à la charge du patient, était injuste
et peu praticable. Le praticien doit désormais maîtriser une bonne
gestion de l’écrit.
La règle nouvelle renvoie à une double préoccupation. La première est d’ordre médico-légal : le praticien doit être en mesure
de prouver. La seconde est d’ordre humaniste : c’est une forme
de respect du patient que d’assurer à celui-ci la possibilité de
retrouver dans son dossier les conditions de décision et de réalisation des actes de soins.
L’écrit est une nécessité. Pour autant, ni le droit ni les juges ne
se satisferont d’écrits qui ne seraient que des alibis formalistes,
visant moins à permettre une démarche positive d’information
du patient qu’à se garantir d’un recours en responsabilité. Ce
qui est demandé, c’est qu’apparaisse au cas par cas une
démarche attentive, adaptée à la personnalité du patient, témoiLa Lettre de l’Hépato-Gastroentérologue - no 3 - vol. III - juin 2000
gnant du souci de convaincre de l’utilité des soins et de leurs
risques éventuels.
Dans la dernière période, on a vu fleurir un ensemble d’écrits
détaillés, circonstanciés et exhaustifs, accompagnés d’une formule de connaissance des risques, si ce n’est d’acceptation des
risques ou de décharge de responsabilités. Ces écrits sont d’une
valeur extrêmement relative. Ils ne témoignent pas de la démarche
positive qu’attend le juge. Ces écrits peuvent au contraire être
appréciés de manière fort négative, dès lors que le souci de protection du praticien l’emporte sur le devoir d’information du
patient. Que signifie la signature d’un tel document alors que le
patient ne dispose peut-être que d’une faible connaissance de
l’écrit, ou se situe dans un contexte psychologique le rendant
incapable d’analyser ce qu’il signe ? Que signifie la signature
d’un formulaire alors que ce que demande le droit, c’est une
démarche humaine et attentive ?
Le juge prendra en compte les protocoles établis, les documents
remis au patient, les notes dans le dossier médical, et l’écrit que
l’on aura demandé au patient de rédiger. La rédaction par le
patient, sur papier libre, d’un texte peut-être maladroit mais sincère aura plus de signification que la signature apposée au bas
d’un document rédigé par une société savante. Et à côté de l’écrit,
reste la conviction du juge, qui se forge à partir de tous les indices,
loin du formalisme…
6. Cette responsabilité nouvelle n’est-elle pas excessive ?
Sauf à ne rien comprendre, il faut soigneusement distinguer les
divers régimes de responsabilité. Si la règle fixée par les tribunaux peut paraître excessive, elle n’est pas démesurée. Ce sont
des analyses un peu fantasmatiques qui ont pu faire croire à un
risque judiciaire insupportable pour le praticien.
L’implication personnelle du médecin n’est effective que dans le
cadre pénal. Il ne s’agit pas alors de responsabilité, mais de culpabilité. Le code pénal n’établit de culpabilité que si la faute a
causé un dommage. Or, des circonstances dans lesquelles le
défaut d’information serait directement la cause du dommage
renvoient aux hypothèses d’école. Le défaut d’information a pu
modifier le consentement. Le patient n’a pas été pleinement
informé. Le praticien ne lui a pas donné toutes les chances d’une
décision éclairée. La perte de chance s’analyse comme un aléa,
une absence de certitude, et le droit pénal ne peut entrer en œuvre.
C’est l’application du principe constant selon lequel le doute
bénéficie à l’accusé.
L’hypothèse selon laquelle un défaut d’information pourrait
conduire à la culpabilité du médecin n’est pas impossible. Mais
il faudrait un défaut d’information sur des risques graves et courants, qui s’apprécierait comme une faute grave dans la pratique
médicale. La jurisprudence nouvelle n’a pas d’effet significatif
en droit pénal.
7. Qu’en est-il donc en matière indemnitaire ?
Si la règle nouvelle est préoccupante, elle l’est essentiellement
sur le registre de l’indemnisation. Les effets de la règle nouvelle
sont “amortis” par le jeu des assurances. La faute d’un praticien
hospitalier engage la responsabilité de l’hôpital, qui est assuré
La Lettre de l’Hépato-Gastroentérologue - no 3 - vol. III - juin 2000
pour ce risque. La faute du praticien exerçant en libéral engage
sa responsabilité personnelle, mais le praticien est assuré, de telle
sorte qu’hormis la charge morale que représente la procédure, la
condamnation effective est supportée par l’assureur.
On retrouve la logique de la règle nouvelle. Dans le cadre d’un
contentieux indemnitaire, le juge songe à l’intérêt du patient,
devenu victime, et il est d’autant plus tenté de faire évoluer la
règle que la sanction pèsera moins sur l’auteur des faits que sur
son assureur. En un mot, bienveillante pour la victime, la règle
est relativement indolore pour le praticien.
8. Comment évaluer le dommage ?
Là encore, le droit est moins sévère qu’il n’y paraît à première
lecture. Il faut ici revenir aux fondamentaux de l’analyse. Ce qui
est en cause, c’est la sanction d’un consentement vicié par le
silence sur un risque exceptionnel. Ainsi, la responsabilité indemnitaire du praticien n’est engagée que dans la mesure où le défaut
d’information a effectivement modifié le consentement. Le
patient doit prouver que s’il avait été informé du risque exceptionnel, il aurait refusé l’acte médical. Pour le patient il ne s’agit
pas d’affirmer ; à son tour, il doit prouver. Et cette preuve est particulièrement délicate.
Le paradoxe de la règle nouvelle est que le praticien qui
n’informe pas sur les risques courants mais bénins n’engage
pas sa responsabilité indemnitaire, car un tel défaut d’information n’est pas susceptible de modifier le consentement du
patient. Le patient a droit à l’indemnisation de la perte de
chance qu’il a subie d’avoir pu refuser les soins au regard d’un
risque exceptionnel, pas d’un risque bénin. La perte de chance,
qui n’est pas sanctionnable sur le plan pénal, l’est sur le plan
indemnitaire par le versement de dommages et intérêts, et les
tribunaux apprécient au cas par cas la réalité de cette “perte de
chance”. Si un acte médical non fautif a causé un dommage,
le recours fondé sur le défaut d’information ne conduira pas à
l’indemnisation de la totalité du dommage corporel. L’indemnisation sera appréciée en fonction de ce que le défaut d’information a vicié le consentement. En un mot, l’indemnisation
sera souvent fort limitée.
9. La règle nouvelle ne pèsera-t-elle pas sur les pratiques
professionnelles ?
Les instances professionnelles doivent se préoccuper de la question. Elles ne peuvent en rester à l’état actuel du droit tel qu’il
résulte de la charte du patient hospitalisé, texte qui n’est qu’une
circulaire, ou du code de déontologie issu du décret du 6 septembre 1995. Les principes du droit bousculent les textes
réglementaires.
La règle fixée par la Cour de cassation et le Conseil d’État déborde
le seul cadre indemnitaire. On a vu que le domaine pénal reste
hors d’atteinte, du fait de l’incertitude du lien de causalité. Mais
le débat rebondit sur le plan disciplinaire. La Cour de cassation
et le Conseil d’État n’ont pas eu à se prononcer dans le cadre disciplinaire. De nombreux indices laissent penser que la jurisprudence indemnitaire serait confirmée sur le plan disciplinaire, mais
la question n’est pas acquise. Indemniser une victime ou définir
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une règle professionnelle répond à deux logiques distinctes.
On peut envisager un défaut de cohérence entre la règle déontologique et la règle civile. La déontologie n’écarte pas la préoccupation des victimes, mais à l’inverse du droit indemnitaire, elle
n’a pas à intégrer la nécessité d’indemniser. Elle doit proclamer
un devoir professionnel, et le droit l’oblige à cette indépendance
d’appréciation.
L’indemnisation des victimes, qui renvoie aux logiques de responsabilité et d’assurance, peut se concilier avec des régimes plus
restrictifs s’agissant du devoir professionnel. Il s’agit en effet de
répondre à deux questions bien distinctes. La première est : peuton trouver un mode d’indemnisation pour un patient atteint d’un
dommage corporel à la suite de soins, qui ont été acceptés du fait
d’un défaut d’information ? Le praticien engage-t-il sa responsabilité disciplinaire en limitant cette information à ce qui lui
semblait juste compte tenu des données de la science, des relations personnelles qu’il avait créées avec le patient et de l’intérêt réel du patient ?
Les instances professionnelles, les sociétés savantes et tous les
professionnels ont leur mot à dire. La sanction disciplinaire n’a
de sens qu’en l’absence de cette démarche attentive qui est constitutive du devoir médical. Là encore, il faut distinguer indemnisation et répression.
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10. Quelques perspectives d’évolution
Le monde de la santé et celui du droit ne peuvent s’ignorer. C’est
de la part des acteurs de santé un véritable devoir d’aller
convaincre le juge et le législateur qu’il n’existe pas de soins sans
risque. Le droit doit sanctionner le risque injustifié, mais permettre la prise de risque. Car le véritable risque est moins un
dommage non indemnisé qu’une médecine qui refuserait
d’entreprendre ce qui est nécessaire par crainte de recours en
responsabilité.
À l’heure où l’on évoque une loi sur les droits des patients, on
peut souhaiter une intervention du législateur sur cette question
du consentement. Mais la perspective est incertaine. Cette législation plusieurs fois annoncée a bien des difficultés à s’affirmer.
En outre, le législateur pourrait-il revenir sur la règle protectrice
qu’a instituée la jurisprudence ?
L’initiative relève davantage des sociétés savantes et des lieux
où cohabitent droit et santé. Il ne s’agit pas de s’atteler à la rédaction d’écrits aux allures d’alibis formalistes, mais d’engager une
réflexion pluridisciplinaire préoccupée de défendre une médecine, qui à force de prudence, risque l’écueil de l’immobilisme.
Dans ce cadre qui est désormais bien défini par la jurisprudence,
il reste à préciser les modalités pratiques qui donneront un sens
■
à la règle, et cette tâche interpelle chaque praticien.
L’Agence Nationale d’Accréditation et d’Évaluation en Santé
(ANAES)
analyse la démarche d’information du patient
à travers neuf références :
❶ L’établissement inscrit les droits et l’information du patient dans ses priorités.
❷ L’établissement assure à tous l’accès aux soins.
❸ Le patient reçoit une information claire, compréhensible et adaptée sur les conditions du séjour.
❹ Le patient reçoit une information claire, compréhensible et adaptée sur ses soins et son état de santé.
❺ Le consentement du patient et/ou de son entourage est requis pour toute pratique le concernant.
❻ Le respect de l’intimité et de la dignité du patient ainsi que sa liberté sont préservés tout au long
de son séjour ou de sa consultation.
❼ Le respect de la confidentialité des informations personnelles, médicales et sociales et de la vie privée
est garanti au patient.
❽ Les réclamations et/ou plaintes des patients font l’objet d’une gestion particulière.
❾ L’établissement évalue le respect des droits du patient.
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