CONCOURS D’ENTREE EN 4EME ANNEE 22 MAI 2008 Dissertation à partir d’un dossier documentaire 3 heures – Coefficient 1 Sujet : En vous aidant des documents joints et de vos propres connaissances, vous exposerez les arguments pouvant justifier la position que, selon vous, le gouvernement français devrait adopter à l’égard d’un éventuel boycott des Jeux Olympiques de Pékin. Documents : - n°1 Reporters Sans Frontières, Six mois avant les Jeux olympiques, la répression continue - n°2 Cyriel Martin et Manuel Silveira da Cunha, Boycott des JO de Pékin : les pour et les contre - n°3 Le Monde.fr, Nouvelles manifestations en Chine contre la France. - n°4 Alain Gresh, Tibet – Palestine - n°5 Heike Schmidt, Chine / UE. La délicate mission des émissaires européens en Chine - n°6 Benjamin Neumann, L'impossible boycott des produits chinois - n°7 Pascal Boniface, Le sport, c’est la guerre. Géopolitique des jeux olympiques. - n°8 Martine Bulard, Chine–Tibet, des identités communes - n°9 Jean-Louis Legalery, Brève histoire du boycott Concours d’entrée en 4ème année IEPG – 22 mai 2008 – Dissertation – page 1/15 Dossier documentaire Document n°1 Reporters Sans Frontières, Six mois avant les Jeux olympiques, la répression continue Le 13 juillet 2001, le Comité olympique international (CIO) attribuait l’organisation des Jeux olympiques d’été de 2008 à Pékin. Parallèlement, la police chinoise intensifiait la répression contre les éléments subversifs de la société, notamment les internautes et les journalistes. Six ans plus tard, rien n’a changé. Et malgré cette absence de progrès significatifs en matière de liberté d’expression et de droits de l’homme en Chine, les membres du CIO restent sourds aux appels répétés des organisations internationales qui dénoncent l’ampleur de la répression. Reporters sans frontières s’est prononcée, dès le début, contre l’attribution des JO à Pékin. Six mois avant la cérémonie d’ouverture, l’organisation rappelle que les médias et Internet sont toujours vus par le gouvernement chinois comme l’un des secteurs stratégiques à ne pas abandonner aux "forces hostiles" dénoncées par le président Hu Jintao. Le Département de la publicité, celui de la sécurité publique et la cyberpolice, bastions des conservateurs, sont chargés de faire scrupuleusement appliquer la censure. Une trentaine de journalistes et une cinquantaine d’internautes sont actuellement emprisonnés en Chine. Certains depuis les années 1980. Le gouvernement bloque des milliers de sites Internet d’informations. Les programmes en chinois, tibétain et ouïghour d’une dizaine de radios internationales sont brouillés. Après les sites Internet et les forums de discussion, les autorités se concentrent désormais sur les blogs et les sites permettant l’échange de vidéos. Les outils de blogs du pays incluent tous des filtres qui bloquent les mots clefs jugés "subversifs" par les censeurs. La loi sanctionne lourdement la "divulgation de secrets d’Etat", la "subversion" et la "diffamation", autant d’accusations régulièrement utilisées pour faire taire les voix les plus critiques. Bien que les mesures encadrant le travail des journalistes étrangers aient été assouplies, il est toujours impossible pour les médias internationaux d’employer des journalistes chinois, ou de se déplacer librement au Tibet et au Xinjiang. Des promesses jamais tenues Pour obtenir l’organisation des JO, les autorités chinoises ont promis au CIO et à la communauté internationale des améliorations concrètes dans le domaine des droits de l’homme. Mais une fois la victoire acquise, le ton a changé. Le vice-Premier ministre de l’époque Li Lanqing a, par exemple, affirmé, quatre jours après le vote du CIO, en 2001, que la "victoire olympique de la Chine" devait inciter le pays à préserver sa "vie saine" en luttant notamment contre le mouvement spirituel Falungong qui a "attisé l’insécurité". Au moins cent adeptes du Falungong sont morts en détention depuis l’interdiction du mouvement et plusieurs milliers d’autres sont emprisonnés. Un peu plus tard, c’était au tour de Hu Jintao, le vice-président chinois de l’époque et actuel président, d’affirmer qu’après le "triomphe" de Pékin, il était "primordial de lutter sans équivoque contre les activités séparatistes orchestrées par le dalaï-lama et les forces antichinoises dans le monde". Dans l’ouest du pays, où vit une forte minorité musulmane, les autorités de la province du Xinjiang ont exécuté des Ouighours accusés de "séparatisme". Enfin, la police et la justice ont reçu l’ordre de poursuivre la campagne "Frapper fort" contre la délinquance. Plusieurs milliers de Chinois sont exécutés, chaque année, d’une balle dans la nuque ou d’une injection létale, en public, parfois dans des stades. Le CIO ne peut plus rester muet Les gouvernements des Etats démocratiques qui espèrent encore que "les JO permettront d’améliorer la situation des droits de l’homme en Chine" se trompent. Le "dialogue constructif" prôné par certains ne mène à rien. Au cours de ces sept dernières années, la répression envers les journalistes et les cyberdissidents n’a pas diminué. Et tout laisse penser que cela va continuer. Le CIO a investi le régime chinois d’une tâche qu’il va exécuter avec zèle : "organiser des JO sécurisés". Pour Pékin, cela signifie davantage d’arrestations de dissidents, plus de censure et aucun mouvement de contestation sociale. Il n’est pas question de gâcher la fête, ni de prendre en otages les JO. C’est la Chine, au contraire, qui a pris en otages les Jeux et l’esprit olympique, avec la complicité du CIO. Le mouvement sportif mondial doit maintenant donner de la voix pour que les Chinois bénéficient enfin des libertés qu’ils réclament depuis des années. La Charte olympique stipule que le sport doit être mis "au service du développement harmonieux de l’homme, en vue d’encourager l’établissement d’une société pacifique, soucieuse de préserver la dignité humaine". Les athlètes et les amateurs de sport ont le droit et le devoir de défendre cette Charte. Le CIO doit faire preuve de courage et tout faire pour que les valeurs de l’olympisme ne soient pas allègrement bafouées par les organisateurs chinois. Concours d’entrée en 4ème année IEPG – 22 mai 2008 – Dissertation – page 2/15 Le CIO est aujourd’hui le mieux placé pour exiger du gouvernement chinois des gages de bonne volonté. L’instance olympique doit exiger de Pékin que la situation des droits de l’homme s’améliore de manière notable avant la cérémonie d’ouverture du 8 août 2008. Et le CIO ne doit pas céder devant les intérêts économiques de tous ceux qui considèrent que la Chine est un marché essentiel et que rien ne doit empêcher d’y faire des affaires. Pas de Jeux olympiques sans démocratie ! Reporters sans frontières demande aux Comités nationaux olympiques, au CIO, aux athlètes, à tous les amoureux du sport et aux défenseurs des droits de l’homme d’exprimer publiquement leur inquiétude face aux innombrables violations de toutes les libertés fondamentales en Chine populaire. Après la désignation de Pékin en 2001, Harry Wu, dissident chinois qui a passé dix-neuf ans dans les prisons de son pays, a déclaré qu’il regrettait profondément que la Chine n’ait "pas l’honneur et la récompense d’accueillir les Jeux olympiques en pays démocratique". "Politiquement, une grave erreur ; humainement, une bassesse ; juridiquement, un crime." Le cri d’indignation lancé par le dissident russe Vladimir Boukovski contre la tenue des JO à Moscou en 1980, reste d’actualité en 2008. Source : http://www.rsf.org/rubrique.php3?id_rubrique=171 Concours d’entrée en 4ème année IEPG – 22 mai 2008 – Dissertation – page 3/15 Document n°2 Boycott des JO de Pékin : les pour et les contre, Par Cyriel Martin et Manuel Silveira da Cunha Pour le boycott : Les politiques internationaux Le Premier ministre polonais, Donald Tusk et le président tchèque Vaclav Klaus sont les premiers dirigeants à avoir officiellement annoncé leur intention de boycotter la cérémonie (Tusk) ou l'ensemble des Jeux (Klaus). Le vice-Premier ministre et ministre des Finances belge, Didier Reynders, n'a pas franchi le pas, mais n'a "pas exclu le pire" si la situation continuait de se dégrader au Tibet. Enfin, le président du Parlement européen, l'Allemand Hans Gert Pöttering, a estimé "justifié" de prendre des "mesures de boycottage". Ma Yong-Jeou, candidat du parti d'opposition Kuomintang et favori à l'élection présidentielle à Taïwan, "n'écarte pas la possibilité de ne pas envoyer d'athlètes aux JO" si "la situation se dégrade". Le candidat a appelé à faire pression sur la Chine pour que s'ouvrent des discussions avec le dalaï-lama. Les politiques français : Yade, Royal, Lang... Rama Yade, la secrétaire d'État chargée des Droits de l'homme, a réaffirmé dans une interview accordée au Figaro que si la situation devait empirer au Tibet, elle se verrait mal assister "sans réagir" à l'inauguration des JO de Pékin. Ségolène Royal s'est prononcée en faveur d'une "menace de boycott" des JO, "pour que la Chine cesse immédiatement la répression". Sur la même ligne, Jack Lang, ancien ministre socialiste de la Culture et de l'Éducation. Comme lui, François Hollande, le premier secrétaire du PS, a indiqué qu'il fallait "évoquer l'hypothèse" d'un boycott de la France aux JO, ajoutant qu'il fallait "utiliser toutes les armes et toutes les pressions internationales". Corinne Lepage, présidente du mouvement écologiste Cap 21 et membre fondateur du MoDem, s'est déclarée favorable à un "boycott politique" de la cérémonie d'ouverture des JO et a réclamé que des d'enquêtes indépendantes fassent la lumière sur les événements en cours au Tibet. ONG : Reporters sans frontières et Human Rights Watch L'organisation Reporters sans frontières (RSF) a demandé aux chefs d'État de boycotter l'ouverture des JO pour protester "contre la répression au Tibet et les violations des droits de l'homme en Chine". Une position également adoptée par l'organisation américaine Human Rights Watch, qui a appelé les dirigeants de la planète à réfléchir "à deux fois" avant d'aller à Pékin pour les JO, écartant toutefois tout boycott sportif de l'événement. Les personnalités : BHL, Spielberg, Gere... Le philosophe français Bernard-Henri Lévy, les acteurs américains Mia Farrow, Richard Gere ainsi le réalisateur Steven Spielberg, qui devait participer à la mise en scène de la cérémonie d'ouverture, ont appelé à boycotter les JO. Contre le boycott : Contre toute attente, l'ONG Amnesty International est "contre tous les boycottages, y compris celui des cérémonies d'ouverture par les politiques", a déclaré mardi la coordinatrice pour la Chine au sein d'Amnesty France, Claude Scolan. "Amnesty réclame aussi une enquête de l'Onu sur ce qui se passe au Tibet", a-t-elle ajouté. Les politiques français : Kouchner, Buffet, Badinter... Si le président français Nicolas Sarkozy a déclaré que "toutes les options rest[-ai]ent ouvertes" , Bernard Kouchner a précisé que la France ne soutenait pas l'idée du boycott de la cérémonie d'ouverture. Une idée que le chef de la Diplomatie française juge malgré tout appréciable, car "moins négative qu'un boycott général des Jeux", auquel la France est opposée. La ministre de la Culture, Christine Albanel, s'est déclarée opposée à un éventuel boycottage des Jeux olympiques de Pékin préférant "mettre la Chine face à ses responsabilités". Le président du groupe UMP à l'Assemblée, Jean-François Copé , a déclaré pour sa part qu'il n'était "pas favorable à ce que l'on s'engage dans une logique de boycott des Jeux olympiques". "Je suis extrêmement choqué par les images que nous avons vues et ce qui s'est passé au Tibet. Mais, personnellement, et je prends mes responsabilités en le disant, je ne suis pas favorable à ce que l'on s'engage dans une logique de boycott des Jeux olympiques", a-t-il dit dans les couloirs du Palais Bourbon. François Sauvadet, président du groupe Nouveau Centre à l'Assemblée nationale, a indiqué de son côté que "si le boycott des JO n'est pas une solution envisagée", il souhaite néanmoins "que les autorités européennes fassent preuve d'autorité et obtiennent de la Chine des garanties fermes sur la fin des exactions et le respect des droits des Tibétains". Le président de la commission des Affaires étrangères de l'Assemblée nationale, Axel Poniatowski (UMP), a souhaité que Paris "limite au strict minimum" sa présence à la cérémonie Concours d’entrée en 4ème année IEPG – 22 mai 2008 – Dissertation – page 4/15 d'ouverture et a demandé "l'ouverture d'une enquête internationale sur les récents événements au Tibet". Le député a insisté sur le fait que "les athlètes français doivent participer aux épreuves sportives". L'ancien garde des Sceaux Robert Badinter (PS) a jugé ''irréaliste'' d'envisager de boycotter les JO, mais a proposé que les athlètes arborent, durant la manifestation, des badges en faveur du peuple tibétain. Tout en appelant la Chine à modifier son positionnement sur les "libertés et les droits humains", Marie-George Buffet, secrétaire nationale du PCF et ancienne ministre des Sports, a insisté sur le fait qu'il ne fallait "pas utiliser les JO qui sont une grande rencontre sportive universelle". Les personnalités du monde sportif Jacques Rogge, président du CIO, a déclaré ne pas redouter de boycott des JO, précisant qu'il présidait une "association sportive et non politique". Ulrike Nasse-Meyfarth, double championne olympique allemande de saut en hauteur (1972 et 1984), a peur de retrouver la situation du boycott olympique de 1980. "Car à l'époque, on a vu déjà que cela ne servait à rien. Le sport devrait se tenir éloigné de la politique." La triathlète suisse Magali Di Marco-Messmer, médaillée de bronze à Sydney, a fait remarquer : "Si Roger Federer boycotte, cela aura peut-être un impact. Mais si je le fais moi, cela passera inaperçu." L'Allemande Imke Duplitzer, vice-championne olympique en 2004 en épée par équipes, indique qu'il est difficile pour les athlètes de boycotter cette manifestation : "On ne peut qu'y aller et serrer les poings, car celui qui boycotte aura travaillé pendant quatre ans pour rien", tout en regrettant la décision du CIO d'avoir confié l'organisation des Jeux à la Chine. Les pays : les États-Unis, l'Australie, le Japon... Le président américain George W. Bush a affirmé qu'il se rendrait à Pékin pour assister à des épreuves, et a promis d'évoquer à cette occasion la question des droits de l'homme. Tout en se refusant à appeler au boycott, le Japon a demandé à la Chine de faire preuve de transparence dans sa gestion de la crise. L'Australie juge pour sa part que le boycott d'un tel événement ne porterait préjudice qu'aux athlètes, tout en promettant que ces derniers seraient "libres d'exprimer leur point de vue". Le Canada soutient pour sa part que "le fait d'utiliser les athlètes comme des pions est totalement déplacé. Les boycotts précédents l'ont démontré". La présidence slovène de l'Union européenne a averti que le boycott des JO serait "très dommageable au sport". Quant au Comité olympique espagnol, il soutient que "grâce aux Jeux, le thème des droits de l'homme en Chine va connaître une avancée gigantesque". Source : Le Point.fr, vendredi 2 mai 2008 Concours d’entrée en 4ème année IEPG – 22 mai 2008 – Dissertation – page 5/15 Document n°3 Nouvelles manifestations en Chine contre la France LE MONDE.FR avec Reuters et AFP | 01.05.08 | 07h57 • Mis à jour le 01.05.08 | 07h57 De nouvelles manifestations contre la France ont eu lieu, jeudi 1er mai, devant des magasins Carrefour dans plusieurs villes de Chine pour protester contre la position de la France sur le Tibet, a rapporté l'agence de presse Chine Nouvelle. Des centaines de personnes ont agité des drapeaux chinois et scandé des slogans hostiles à Carrefour et à l'indépendance du Tibet mais favorables aux jeux Olympiques de Pékin, a précisé l'agence. Les magasins visés sont, selon Chine Nouvelle, situés à Changsha, capitale de la province de Hunan (centre), Fuzhou (sud-est) et Shenyang (nord-est). Tous les magasins Carrefour de Chine ont ouvert leurs portes jeudi 1er mai, jour férié, malgré les appels au boycott sur Internet de l'enseigne française ce jour-là. Après le relais très perturbé de la flamme olympique à Paris, les magasins Carrefour ont servi de cible à la colère des Chinois qui dénonçaient de la part de l'enseigne un soutien supposé à l'indépendance du Tibet. Le président du directoire de Carrefour, José-Luis Duran, a démenti ces allégations, ainsi que celles selon lesquelles le groupe soutenait le daïla-lama, chef spirituel exilé des bouddhistes tibétains. Carrefour, numéro 2 mondial du secteur, est présent en Chine depuis plus de dix ans et y ouvre à peu près un hypermarché tous les 15 jours. Il compte actuellement 122 hypermarchés et 280 magasins de hard-discount en Chine, revendiquant 2 millions de clients par jour. Concours d’entrée en 4ème année IEPG – 22 mai 2008 – Dissertation – page 6/15 Document n°4 Tibet-Palestine, par Alain Gresh, lundi 24 mars 2008 « Les émeutes se sont étendues sur la rue principale de Jérusalem, au début de l’après-midi du 14 mars. Elles avaient commencé un peu avant dans une rue proche, quand deux religieux musulmans avaient été battus par les forces de sécurité (c’est en tous les cas ce que croient les Palestiniens, la version officielle étant que ces religieux avaient attaqué la police israélienne). Une foule de dizaines de personnes se livre à des saccages le long de cette rue, certains hurlant alors qu’ils jetaient des pierres contre des magasins appartenant à des juifs et aussi aux taxis dont la plupart des chauffeurs sont juifs. » « Les émeutes se sont rapidement propagées à travers les ruelles sinueuses de la vieille ville. Dans ces rues, on trouve de petites échoppes appartenant à des juifs ou à des non-arabes. Des foules se sont assemblées, apparemment spontanément, dans de nombreuses parties du quartier. Elles ont attaqué les boutiques appartenant à des juifs. Tout, de la viande à du linge, a été jeté dans des bûchers. Les émeutiers ont pris plaisir à jeter dans le feu des bombonnes de gaz et à courir se mettre à l’abri quand elles explosaient. Quelques-uns criaient “vive la Palestine indépendante”. » « Durant des heures, les forces de sécurité n’ont rien fait. Mais de nombreux juifs qui vivaient au-dessus de leur boutique ont dû fuir. S’ils ne l’avaient pas fait, il y aurait eu plus de victimes. Le gouvernement affirme, de manière plausible, qu’il y a eu 13 personnes tuées par les émeutiers, la plupart dans des incendies. Ceux qui sont restés dans leur logement ont gardé les lumières éteintes pour éviter d’être repérés. » (...) « La destruction a été systématique. Des boutiques qui appartenaient à des Palestiniens étaient marquées par des signes particuliers, elles ont échappé à la destruction. Presque toutes les autres ont été détruites. Il est vite devenu difficile de circuler dans les ruelles à cause des marchandises éparpillées. » (...) « Quand les résidents ont commencé à se risquer dehors, le 17 mars, l’extension des émeutes est apparue. De nombreuses propriétés appartenant à des juifs, bien au-delà du quartier palestinien, avaient été attaquées. De nombreux immeubles avaient été livrés aux flammes. La porte de la principale synagogue avait été carbonisée... » Tout cela, vous ne l’avez évidemment pas lu dans la presse. Et pourtant... C’est le compte-rendu des émeutes à Lhassa, rapportées par le seul correspondant étranger sur place, celui de l’hebdomadaire The Economist, le 19 mars, « Trashing the Beijing Road ». J’ai simplement remplacé « Tibétain » par « Palestinien », « Chinois » par « Israélien » ou « juif ». Imaginons le traitement médiatique qui aurait été accordé à cet événement s’il s’était déroulé en Terre sainte. Il apparaît clairement de ce texte que les émeutes ont été largement suscitées par des Tibétains, qui ont commis de nombreuses exactions. Pourtant, les médias en France en ont peu parlé, car leur grille d’analyse était, à juste titre, que les Tibétains sont opprimés par le pouvoir central qui leur dénie leurs droits fondamentaux, et que l’on ne peut donc simplement « condamner » les exactions commises, aussi injustifiables soient-elles. La question est de savoir pourquoi ce traitement médiatique est rarement accordé aux Palestiniens, alors que les Nations unies considèrent que, en Cisjordanie, à Gaza et à Jérusalem, ils vivent sous occupation depuis 1967 ? Les deux situations ne sont pas équivalentes (le Tibet n’est pas reconnu par les Nations unies comme territoire occupé) et il ne faut pas pousser le parallèle trop loin. Pourtant, la comparaison est instructive... Source : http://blog.mondediplo.net/2008-03-24-Tibet-Palestine Concours d’entrée en 4ème année IEPG – 22 mai 2008 – Dissertation – page 7/15 Document n°5 Chine / UE La délicate mission des émissaires européens en Chine par Heike Schmidt Article publié le 23/04/2008 Environnement et économie – ce sont les deux sujets phares au menu de la visite d’une importante délégation européenne ces 24 et 25 avril en Chine. Mais après la répression des manifestations au Tibet, le président de la Commission européenne, José Manuel Barroso, et ses neuf commissaires n’échapperont pas à un troisième sujet, bien plus délicat – celui des droits de l’homme. La visite, sous les regards attentifs des entrepreneurs européens implantés en Chine, s’annonce inconfortable pour José Manuel Barroso et ses collègues. Comment naviguer entre la défense des intérêts économiques d’une part et la défense des droits de l’homme de l’autre sans pour autant heurter les sensibilités des autorités chinoises ? Un brin embarrassé, un porte-parole de la Commission a souligné en début de semaine que M. Barroso soulèvera les questions des droits de l’Homme et de la liberté d’expression. Selon lui, « il est clair que les événements récents au Tibet offrent une raison supplémentaire d’en parler ». Reste à savoir si Pékin se montre disposé à entendre les bons conseils venant de Bruxelles. Rien ne semble moins sûr, vu la polémique qui oppose la Chine à la France après le fiasco du passage de la flamme olympique à Paris et les menaces de plusieurs dirigeants européens de bouder la cérémonie d’ouverture des Jeux Olympiques. Si l’on rajoute à cela le fait que l’Union européenne est loin de parler d’une seule voix dans ce dossier très sensible, les Chinois n’auront pas trop de mal à ignorer les appels à plus de souplesse et à un dialogue avec le Dalaï-Lama. Pékin pourrait très bien jouer sur ce manque de cohésion des Européens, sachant pertinemment que beaucoup de pays refusent de critiquer la Chine compte tenu des intérêts économiques en jeu. La Chine : partenaire stratégique de l’Union européenne Avant même l’arrivée de la délégation européenne, la porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères, Jiang Yu, a mis en garde ses hôtes: « En tant que partenaire stratégique de la Chine, l’Union européenne devrait nous comprendre totalement et nous soutenir sur des questions liées à notre intégrité territoriale, tout en faisant la part du vrai et du faux ». « Eviter toute confrontation directe », c’est d’ailleurs l’objectif annoncé par le commissaire européen au Commerce, Peter Mandelson, lui-même du voyage : « Nous ne devons pas perdre de vue que nous sommes voués à travailler avec la Chine, à aider la Chine à réussir », a-t-il prévenu. En visite à Pékin, les dix émissaires européens comptent plaider pour une plus grande ouverture du marché chinois aux entreprises et investissements, souhait cher au patronat européen. L’autre grand sujet de ce voyage en Chine est presque aussi délicat que l’économie et les droits de l’homme : l’environnement. La délégation bruxelloise veut exhorter son partenaire chinois à participer davantage aux efforts de la communauté internationale dans la lutte contre le réchauffement climatique. L’enjeu est de concilier la protection de l’environnement avec l’essor économique de la Chine ces dernières années. Avec une croissance moyenne de 10% depuis 1990, le géant chinois est devenu la quatrième puissance économique dans le monde. Différentes études ont démontré que la Chine a déjà remplacé les Etats-Unis à la première place des émetteurs de dioxyde de carbone (CO2). Climat : L’Union européenne a besoin du soutien chinois Pour l’heure, la Chine n’a pas fait preuve de sa volonté de contribuer – ensemble avec la communauté internationale – à la protection de l’environnement. Tout comme l’Inde, la Chine considère que ce sont d’abord et avant tout les pays développés qui doivent fournir le gros des efforts pour laisser les puissances émergentes rattraper leur retard économique. L’enjeu pour les commissaires européens est donc de taille, car si l’Union européenne n’obtient pas le soutien de la Chine, ses objectifs ambitieux pour réduire les gaz à effet de serre risquent d’être réduits à néant. Il ne reste que peu de temps aux 27 pays membres de l’Union européenne pour convaincre les autorités chinoises. En 2009, la conférence des Nations unies sur le climat à Copenhague doit se mettre d’accord sur le traité qui succèdera au protocole de Kyoto. Source : http://www.rfi.fr/actufr/articles/100/article_65383.asp Concours d’entrée en 4ème année IEPG – 22 mai 2008 – Dissertation – page 8/15 Document n°6 L'impossible boycott des produits chinois, Benjamin Neumann, L'Expansion, 01/05/2008 L'interdépendance des économies européenne et chinoise rend une bouderie réciproque impraticable et contre-productive. L'appel au boycott des produits français par les consommateurs chinois donne des suées froides aux groupes de l'Hexagone. Le boycott, en réponse, du made in China par les consommateurs français, au nom de la défense des droits de l'homme, au Tibet notamment, risque en revanche de peu inquiéter « l'usine du monde». Il s'avérerait en effet quasi impossible, sachant que la Chine est le premier fabricant d'ordinateurs portables et de téléviseurs au monde, que le pays produit sept montres sur dix, un appareil photo sur deux et plus des deux tiers des jouets déposés sous les sapins de Noël... Certes, le consommateur engagé n'aura pas à piocher dans la garde-robe de grand-papa pour trouver de quoi s'habiller « China-free ». Une production euroméditerranéenne, notamment en Tunisie et au Maroc, perdure grâce à l'ère du fast fashion, qui impose un renouvellement fréquent des collections. Il pourrait aussi se rabattre sur le made in India. Fini, en revanche, les balades à bicyclette. Au contraire du secteur automobile, l'industrie du vélo importe en masse des pièces détachées de Chine. Décathlon, leader sur le marché français, reconnaît que 80 % des composants de ses cycles y sont produits. La liste des objets qui serait à proscrire est longue. Pèse-personnes, lisseurs et sèche-cheveux sont à 100 % chinois. La Chine, c'est aussi 65 % des friteuses et 40 % des fers à repasser. On oscille entre 70 et 80 % en ce qui concerne les toasteurs et les cafetières. Perte de pouvoir d'achat Pour le bricoleur du dimanche, « désiniser » son approvisionnement tournerait au cauchemar. Au rayon petit outillage de Bricorama - seule enseigne du genre à jouer la transparence -, les tournevis, pinces, clefs à molette sont tous made in China. Côté jardin, la Chine règne sur les taille-haies et les débroussailleuses. Dans presque tous ces secteurs, Pékin occupe 100 % du segment « premier prix ». Faire l'impasse sur les biens chinois se révélerait impitoyable pour le porte-monnaie du consommateur. « Un tel boycott, ce serait près de 4 % de pouvoir d'achat en moins », estime Jean Estin, PDG du cabinet de consultants en stratégie Estin & Co. Les puristes ne sont pas au bout de leurs peines : lorsqu'on achète un produit dont l'essentiel des composants vient de Chine, mais qui, étant assemblé dans l'Hexagone, est étiqueté made in France, comment deviner que l'on fait tourner « l'usine du monde » ? L'assemblage, correspondant à au moins 50 % de la valeur ajoutée, donne droit à la mention tricolore. « Avec la Chine, on est de plain-pied dans la globalisation et l'interdépendance totale, souligne Jean-François Huchet, directeur du Centre d'études français sur la Chine contemporaine. Les plus touchées par un boycott seraient les marques européennes, qui prennent la marge la plus importante. » Plus de la moitié des exportations chinoises sont ainsi contrôlées par des entreprises étrangères installées en Chine. Blessés par l'accueil parisien de la flamme olympique, les internautes chinois ne se privent pas d'appeler à bouder les produits français. Mais le consommateur chinois est face au même casse-tête quasi insoluble, hormis pour quelques produits très identifiables, comme le vin et le fromage. Les magasins Carrefour implantés en Chine vendent en majorité des produits locaux. Boycotter PSA Peugeot Citroën, par exemple, pénaliserait autant son partenaire chinois, Dongfeng Motor, qui détient 50 % du joint-venture avec le constructeur français. Concours d’entrée en 4ème année IEPG – 22 mai 2008 – Dissertation – page 9/15 Document n°7 http://www.monde-diplomatique.fr/2004/08/BONIFACE/11492 AOUT 2004 - Page 3 Le sport, c’est la guerre. Géopolitique des Jeux olympiques Par PASCAL BONIFACE Directeur de l’Institut de relations internationales et stratégiques (IRIS), Paris ; auteur de La Terre est ronde comme un ballon, Seuil, Paris, 2002, et de La France contre l’Empire, Laffont, Paris, 2003. Du 13 au 29 août, les Jeux olympiques d’Athènes vont bénéficier d’une couverture médiatique comparable à celle d’événements bien plus décisifs, comme la guerre d’Irak. Certains voient dans les Jeux le symbole de l’amitié entre les nations et de l’effort. Pour d’autres, le sport n’est que le « nouvel opium du peuple ». Mais, au-delà de la compétition, du spectacle et de l’impact économique, il y a aussi d’autres enjeux, géopolitiques et stratégiques ceux-là. En 1896, lors des premiers Jeux olympiques de l’ère moderne qui se déroulèrent aussi à Athènes, des athlètes de seulement treize nations participaient à la compétition, parmi lesquels une équipe de gymnastes allemands et une équipe d’athlètes américains. Les onze autres pays n’alignaient qu’un ou deux concurrents (1). En tout, il n’y avait que 285 participants pour 9 sports représentés. Et le nombre de spectateurs ne dépassait pas quelques milliers. A Athènes 2004, les épreuves seront suivies, en cumulé, par plus de 4 milliards de téléspectateurs, unis par l’événement au-delà des fuseaux horaires (2). Elles réuniront 10 500 athlètes, représentant 201 comités olympiques nationaux (3). On mesure ainsi combien les JO sont désormais mondialisés. Tout au long de la compétition, l’angoisse sera grande de voir Al-Qaida s’inviter par surprise. Cela explique d’ailleurs la présence d’un participant inhabituel, ne concourant dans aucune épreuve mais qui sera chargé d’en organiser la sécurité : l’Organisation du traité de l’Atlantique nord (OTAN). Plusieurs athlètes américains ont déjà renoncé à leur participation de peur d’un attentat, et 50 % de leurs compatriotes sont persuadés que les Jeux seront la cible d’une opération terroriste (4). Chacun a en mémoire l’action du commando Septembre noir qui avait pris en otage et exécuté 9 sportifs israéliens aux Jeux de Munich en 1972. Pour une organisation terroriste, les JO, parce qu’ils concentrent les médias du monde entier, sont une cible privilégiée susceptible d’assurer un écho maximal à toute action. Mais peut-être le seul fait de peser sur les Jeux en étant présents dans les esprits suffira-t-il pour satisfaire les affidés de M. Oussama Ben Laden ? Les préoccupations stratégiques n’étaient pas absentes chez Pierre de Coubertin, lorsqu’il prit l’initiative de recréer les Jeux olympiques. Il avait en tête d’insuffler chez les jeunes Français un esprit de compétition, afin de rattraper l’Allemagne, pour laquelle la préparation physique avait été un facteur déterminant de la victoire de 1870. Dès 1913, on pouvait lire dans la presse sportive allemande : « L’idée olympique de l’ère moderne symbolise une guerre mondiale qui ne montre pas son caractère militaire ouvertement, mais qui donne à ceux qui savent lire les statistiques sportives un aperçu suffisant de la hiérarchie des nations (5). » Les Jeux de Stockholm en 1912 furent également une tribune d’expression et de revendications politiques. Ainsi des peuples non indépendants, comme les Finlandais, les Tchèques, les Slovaques ou les Hongrois, revendiquèrent le droit d’y participer de manière autonome, et non sous la bannière des empires auxquels ils appartenaient. Mais c’est après la première guerre mondiale que le sport va acquérir une véritable audience internationale et que les gouvernements vont être tentés de l’utiliser à des fins politiques. Les JO deviennent alors un rendezvous prestigieux, assurant une visibilité internationale, permettant au pays organisateur de montrer au monde entier ses progrès technologiques et ses capacités d’organisation. Défiler derrière le drapeau La participation revêt elle aussi une importance symbolique évidente. L’exclusion vient stigmatiser un statut d’Etat indigne d’être invité à la grande table du sport et de l’amitié. Ainsi, en 1920, l’Autriche, la Bulgarie, l’Allemagne, la Hongrie et la Turquie ont payé leur participation à la Grande Guerre par leur éviction. A l’inverse, le choix de Berlin pour les Jeux de 1936 sera considéré comme la preuve que l’Allemagne est de retour sur la scène mondiale, après sa défaite en 1918. Cette décision avait été prise avant l’arrivée au pouvoir de Hitler. Ce dernier tentera d’utiliser l’événement pour montrer au monde la supériorité du nazisme et de la « race aryenne » tant au plan de la capacité d’organisation que de la performance sportive. Sur ce second point, on se souvient de sa déception devant le succès des athlètes noirs américains et notamment de Jesse Owens, qui récolta 4 médailles d’or (6). Concours d’entrée en 4ème année IEPG – 22 mai 2008 – Dissertation – page 10/15 Après la seconde guerre mondiale, l’Allemagne et le Japon n’ont pas été conviés aux Jeux de 1948 à Londres, tandis que ceux de 1952, à Helsinki, verront la réintégration de l’Allemagne, l’admission d’Israël et la première participation soviétique (7), dont la délégation ne résidera pas au village olympique pour éviter les contacts avec l’« ennemi » et les défections. Un second village sera d’ailleurs construit pour l’ensemble des athlètes des pays de l’Est. Par ailleurs, le Comité international olympique (CIO) étant en avance sur l’ONU pour la reconnaissance de la Chine populaire, Taïwan se retira afin de protester contre la présence à Helsinki d’une délégation de Pékin. Cela n’empêchera pas la Chine, en 1958, de quitter elle aussi le CIO. Le sport sous Mao Zedong n’ayant qu’une fonction pédagogique et hygiénique, il n’était alors pas question de faire vibrer la fibre nationaliste par le biais de compétitions sportives, et il faudra attendre la mort du Grand Timonier, en 1976, pour que le sport redevienne un argument d’affirmation nationale. La Chine sera alors tellement en quête de médailles que de lourds soupçons de dopage pèseront sur le succès de ses sportifs. Taïwan a repris sa place au sein du CIO en 1981 et côtoie désormais la Chine populaire. Les deux Corées parlent régulièrement, depuis l’attribution des Jeux à Séoul en 1988, de créer une délégation commune sans que cela ait pu aboutir jusqu’ici. Le sport peut être en avance sur la géopolitique, mais pas trop. La Palestine, qui n’a toujours pas d’Etat, est membre du CIO depuis 1994. Pour les Palestiniens, participer aux Jeux constitue un début de reconnaissance internationale et, à Athènes, ils pourront défiler derrière leur drapeau. Le choix de Sydney pour l’organisation des Jeux de 2000, au lieu de Pékin, fut vécu par les Chinois comme une non-reconnaissance de leur nouveau statut mondial. Affront réparé par l’attribution des Jeux de 2008, qui fut interprétée comme la consécration de la place retrouvée de la Chine comme grande puissance. Les événements olympiques sont très liés aux soubresauts géopolitiques. Ainsi en 1956, l’Egypte, l’Irak et le Liban ont boycotté les Jeux de Melbourne pour protester contre l’occupation franco-anglo-israélienne du canal de Suez, tandis que l’Espagne de Franco et la Suisse faisaient de même pour dénoncer l’intervention soviétique en Hongrie. L’édition de 1976 se fit sans la participation des nations africaines, mécontentes de n’avoir pu obtenir l’exclusion de la Nouvelle-Zélande, qui s’était rendue coupable d’avoir envoyé une équipe de rugby dans l’Afrique du Sud de l’apartheid. On se souvient aussi de la mobilisation orchestrée par les Etats-Unis (non suivie par la France) contre les Jeux de Moscou en 1980, pour protester contre l’invasion de l’Afghanistan, et qui a privé l’Union soviétique de la reconnaissance internationale à laquelle elle aspirait. Moscou se consolera en faisant le plein de médailles. En revanche, le régime soviétique, qui tenta de prendre sa revanche en organisant le boycottage des Jeux de Los Angeles en 1984, ne sera suivi que par douze pays communistes, ce qui constitua un échec. L’arme du boycottage semble aujourd’hui inenvisageable. Nul ne voudrait renoncer à l’exceptionnelle exposition médiatique procurée par les Jeux. A l’inverse, l’exclusion reste une menace de châtiment suprême. Tout cela confère donc au CIO – organisation non gouvernementale d’un genre particulier – une puissance redoutable. Composé de 115 membres, il fut longtemps dirigé par M. Juan Antonio Samaranch, un exdignitaire franquiste qui fut néanmoins très actif pour éviter l’annulation des Jeux de Moscou en 1980. Au-delà des représentants des fédérations internationales de sport et des représentants des comités nationaux olympiques, le CIO est également composé de 70 membres cooptés à titre individuel et qui sont plus proches de la jet-set que du mouvement sportif. Le Comité détient tous les droits d’organisation, d’exploitation et de diffusion des Jeux. Il est financé par les sommes payées par les télévisions pour la retransmission des épreuves et par un partenariat fructueux avec les sociétés « marraines » multinationales, le tout pour un budget de 2,8 milliards de dollars (soit le produit national brut d’un Etat comme le Mali, par exemple). Le CIO n’étant pas à l’abri du scandale, plusieurs de ses membres ont été accusés de corruption en 2002 à l’occasion des Jeux d’hiver de Salt Lake City aux EtatsUnis, sept d’entre eux ont dû être exclus, tandis que quatre autres démissionnaient. Le CIO proclame haut et fort qu’il est apolitique. Nul ne le croit un seul instant. Ses décisions, qu’il s’agisse de la reconnaissance d’un comité national ou du choix de la ville organisatrice des Jeux, sont essentiellement politiques. Il ne fait aucun doute que les arguments géopolitiques joueront un rôle non négligeable dans l’attribution des Jeux 2012 (Paris est candidate), décision devant intervenir en juillet 2005. En ce sens, le changement de l’équipe gouvernementale en Espagne facilitera-t-elle la candidature de Madrid, qui se différencie désormais de celle de New York ou de Londres ? Paris compte secrètement sur la popularité de sa politique internationale pour emporter la décision finale (8). S’il y a des nations dominantes, on assiste depuis quelque temps à une meilleure répartition des médailles (9). De petits pays peuvent rêver d’exister à l’échelle planétaire le temps d’une finale. On se souvient de Saint-Kitts-et-Nevis, minuscule île-Etat des Caraïbes, projetée sur le devant de la scène Concours d’entrée en 4ème année IEPG – 22 mai 2008 – Dissertation – page 11/15 internationale grâce à la médaille d’or de Kim Collins aux 100 mètres des mondiaux d’athlétisme de 2003. Durant la guerre froide, la rivalité Est-Ouest se retrouvait aussi dans les joutes olympiques, Washington et Moscou espérant prouver la supériorité de leur système par le décompte des médailles. Aux Jeux, il y avait alors une rivalité particulière opposant les deux Allemagnes, tandis que Cuba voyait dans ses succès le résultat de ses politiques éducative et sanitaire performantes. Dès sa deuxième participation, en 1956, l’URSS passe devant les Etats-Unis avec 37 médailles d’or contre 32. Supériorité confirmée en 1960 (43 contre 34). En 1964, les Etats-Unis reprennent le dessus (36 à 30), puis en 1968 (45 à 29). A Munich, il y a une double victoire des pays communistes, l’URSS remporte 50 médailles d’or, les Etats-Unis 33, la RDA 20 et la RFA 13, supériorité confirmée en 1976 et bien sûr en 1980, les Jeux de Moscou étant boycottés par l’Ouest. Les derniers Jeux de la guerre froide, à Séoul, furent encore un triomphe pour les pays communistes. L’URSS arriva en tête (55 médailles d’or) suivie de la RDA (37). Les Etats-Unis terminèrent troisième avec 36 médailles. Comme pour toutes les compétitions sportives, on peut déplorer le chauvinisme que suscitent parfois les Jeux. Consommé avec modération, le sport procure la touche de passion nécessaire lorsqu’il demeure cantonné aux enceintes sportives. Dans ce cadre, l’« autre » est indispensable à la compétition. Car les exploits des champions étrangers font malgré tout vibrer. Sans tomber dans les excès du discours moralisateur du CIO, les JO ouvrent une fenêtre sur le monde et sur les autres peuples. Le sport, c’est peut-être la guerre, mais, comme le voulaient les anciens Grecs, une guerre ritualisée, sans armes, sans versement de sang et sans mort. C’est aussi une éducation à la paix. Les sociologues Norbert Elias et Eric Dunning, à juste titre, l’ont remarqué : « Au niveau international, des manifestations sportives comme les Jeux olympiques ou la Coupe du monde de football constituent, de manière visible et régulière, la seule occasion d’union pour les Etats en temps de paix. Les Jeux olympiques permettent aux représentants des différentes nations de s’affronter sans s’entre-tuer (10). » (1) Lire Stéphane Pivato, Les Enjeux du sport, Gallimard, Paris, 1994, p. 59. (2) Paroxysme de sport-spectacle, on voit les citoyens de chaque pays s’intéresser à des disciplines dont les résultats les indiffèrent d’ordinaire, pourvu que leurs représentants détiennent quelques chances de médailles ou accèdent à l’espace de célébration du podium. Cf. Paul Yonnet, Systèmes des sports, Gallimard, Paris, 1998, p. 50. (3) L’ONU ne compte que 191 Etats membres. (4) Cf. Le Monde, 10 juin 2004. (5) Pierre Arnaud, « La nouvelle donne géopolitique 1919-1939 », Géopolitique, Paris, juillet 1999. (6) L’Allemagne remportera 33 médailles d’or, contre 24 aux Etats-Unis. (7) L’URSS, avec 22 médailles d’or, terminera deuxième derrière les Etats-Unis, 40 médailles d’or. (8) Moscou est la cinquième ville restant en compétition. Leipzig, La Havane, Rio et Istanbul ont été éliminées, le CIO reflétant ainsi un choix Nord-Sud, dicté par des considérations plus financières que politiques. (9) A Sydney, 80 pays en ont reçu. (10) Norbert Elias, Eric Dunning, Sport et civilisation, la violence maîtrisée, Fayard, Paris, 1995, p. 307. Concours d’entrée en 4ème année IEPG – 22 mai 2008 – Dissertation – page 12/15 Document n°8 Chine–Tibet, des identités communes Le Monde Diplomatique, mercredi 30 avril 2008, par Martine Bulard La dictature de l’émotion a encore frappé. Des hommes de foi, tout d’orange vêtus, frappés par des soldats en kaki, matraque au poing… Impossible de rester indifférent, sauf à avoir un cœur de pierre, ou, pire, une sympathie cachée pour le nouvel empire du Mal – la Chine. De Bernard-Henri Lévy à André Glucksmann en passant par des tibétologues plus ou moins autoproclamés, la mobilisation parisienne fut totale. M. Robert Ménard, président de Reporters sans frontières, transformé l’espace de quelques semaines en ministre des affaires étrangères de la France, dicte la seule conduite acceptable au pays des droits de l’homme : le boycottage des Jeux olympiques ou, à tout le moins, de la cérémonie d’ouverture ; la mise au pied du mur des sportifs, appelés à protester ou, à défaut, à arborer un badge vengeur. A sa suite, une secrétaire d’Etat, Mme Rama Yade, édicte ses « conditions » à Pékin pour que le président de la République française – lequel se dit fort hésitant – consente à faire le déplacement jusqu’à la capitale chinoise, avant de réaliser que les affaires sont les affaires. Les autorités chinoises n’entendant pas se laisser humilier publiquement, les contrats sont menacés. Du coup, M. Ménard est illico presto remplacé par MM. Christian Poncelet et Jean-Pierre Raffarin, respectivement président du Sénat et ex-premier ministre. On ne gagne pas au change. Les émissaires font alors ce que l’on appelait, du temps de l’empereur, acte d’allégeance. Dans les deux cas, c’est indigne d’un pays comme la France, qui voit sa politique étrangère ballottée au gré des bons sentiments et de l’excitation médiatique… A propos du Tibet, il faut quand même rappeler que les images-choc les plus répandues étaient des faux. La photographie de moines affreusement matraqués se déroulait en fait… au Népal. Même Le Monde la publiera en « une », sous le titre : « Répression chinoise au Tibet » (il fallait lire la légende, en dessous, pour savoir que cela se passait de l’autre côté de l’Himalaya). Bild n’aura même pas ces scrupules… En revanche, les photos et les reportages témoignant de la violence des moines tibétains sont quasiment passés sous silence (lire James Miles, « Fire on the roof of the world », The Economist, 14 mars 2008 ; ou encore le reportage d’Adrian Geiges dans Die Stern : « Le dalaï-lama n’est pas un ange » - « Der Dalai Lama ist kein Unschuldsengel », 10 avril 2008). Après tout, ces maisons brûlées, ces magasins pillés et ces chasses à l’homme ne concernent que des Chinois – Hans ou Huis (musulmans). Des « colons », de surcroît. Comparaison n’est pas raison, mais on imagine la réaction si de tels actes s’étaient déroulés dans les territoires occupés de Palestine (voir le blog d’Alain Gresh). De toute façon, et pour prévenir toute indignation à rebours, a circulé sur Internet une photographie de soldats chinois portant sous le bras l’uniforme des moines tibétains, juste avant qu’ils ne se déguisent… et commettent les exactions citées plus haut, nous disait-on. En réalité, le cliché date de 2003, et il s’agit de soldats se préparant pour le tournage d’un film (Michelcollon.info). Dans le même temps, l’histoire du Tibet et de la Chine est ramenée à un livre de contes pour enfants, où l’ogre est souvent chinois – parfois tibétain, selon le camp que l’on choisit. Or le Tibet n’a été indépendant – au sens moderne du terme – que durant de courtes périodes dans la longue histoire. « Un des ministres du cabinet tibétain convoqué à Pékin à la fin du XVIIe siècle se décrit comme un sujet de l’empire mandchou », note Eliott Sperling, directeur des études tibétaines au département des Central Eurasia Studies, à l’université Indiana (« Don’t know much about Tibetan history », New York Times, 13 avril 2008). De la même manière, la souveraineté de la Chine sur le Tibet « n’est qu’une souveraineté en ligne brisée », rappelle-t-il. Chacun prend le bout de l’histoire qui valide sa thèse, oubliant les influences multiples (des descendants de Gengis Khan aux empereurs mandchous) qui ont façonné le Tibet autant que la Chine. Les peuples, fort heureusement, ne se réduisent pas à une seule identité, qui se figerait à un moment de l’histoire. Autant prendre en compte cette réalité avant de prôner l’indépendance du Tibet, avec parfois des arguments à faire frémir. « Ce mouvement [à Lhassa], écrit la tibétologue Alexandra Morin, redonne en réalité sa visibilité à l’espace ethniquement et culturellement homogène du Grand Tibet dont les gouvernements chinois successifs, depuis le premier quart du XXe siècle [y compris Taïwan – NDLR], ne souhaitent pas entendre parler et dont la pertinence se manifeste clairement depuis deux semaines. » (Libération, 31 mars 2008). Un espace ethniquement homogène ? On s’étonne que pas une voix ne s’élève contre cet appel à l’épuration ethnique digne d’un Slobodan Milosevic. Ajoutons que, dans ce « grand Tibet » prétendument pur et qui forme entre 20 et 25 % du territoire chinois, les « minorités » sont plus nombreuses que les Tibétains de souche. On imagine le vacarme médiatique si pareil propos avait été tenu par un « serbologue » à propos de l’ex-Yougoslavie ... Concours d’entrée en 4ème année IEPG – 22 mai 2008 – Dissertation – page 13/15 Que la Chine mène une politique d’arasement de la culture tibétaine, et que les autorités manient la répression aussi sûrement que la langue de bois, cela ne fait nul doute. Qu’elle réduise au folklore la culture tibétaine n’est guère plus contestable (lire Slavoj Žižek, « Le Tibet pris dans le rêve de l’autre », Le Monde diplomatique, mai 2008, en kiosque le 30 avril). Ce n’est pas une raison pour transformer toute manifestation religieuse des moines et des nonnes en défilé pacifique, et le dalaï-lama en ange modernisateur. Sa conception de la démocratie, ou des droits des femmes et des homosexuels, pour ne prendre que ces exemples, ne retire rien à sa défense de l’autonomie tibétaine, mais n’en fait pas pour autant un responsable politique progressiste. Il est évident que l’avenir passe par une autonomie vivante – et pas seulement formelle, comme actuellement – du Tibet. Dans cette hypothèse, le dalaï-lama devrait pouvoir retourner à Lhassa et y vivre. Si Pékin vient d’annoncer la possibilité d’un dialogue, la « concession » n’a rien d’original, puisque le dialogue s’est noué en 2002 et a déjà donné lieu à six séances de négociations – sans résultats tangibles jusqu’à maintenant. Rappelons que les Nations unies n’ont jamais inclus le Tibet dans les pays à décoloniser (avant comme après 1971 – date du remplacement de Taïwan par la Chine populaire) et qu’aucun pays n’a reconnu le « gouvernement » tibétain en exil et donc la possibilité d’une indépendance. Même New Delhi, qu’on ne saurait soupçonner d’être antitibétain – le dalaï-lama y est accueilli depuis 1959 - a accepté la souveraineté de la Chine sur la région autonome du Tibet, Pékin ayant reconnu celle de l’Inde sur la région du Sikkim, jusqu’à présent contestée (lire « L’Inde reprend son rang », Le Monde diplomatique, janvier 2007). En fait, les autorités chinoises sont obsédées par une éventuelle sécession, inacceptable aux yeux du Parti communiste, de l’armée mais aussi de l’ensemble des Chinois – très sensibles au maintien de l’intégrité du territoire, symbole du respect international retrouvé. Il ne faut jamais oublier que le dépeçage du territoire, du XIXe siècle jusqu’au milieu du XXe siècle, a marqué à jamais les esprits comme le signe suprême de l’humiliation nationale. Dans ce contexte, les campagnes occidentales ont déjà fait des gagnants : les membres les plus rétrogrades du Parti communiste, qui pointent du doigt les ouvertures, même timides, des actuels dirigeants. Quant aux militants des droits humains qui veulent se mobiliser, au Tibet comme sur l’ensemble du territoire chinois, on ne saurait trop leur conseiller de se tourner vers les investisseurs et dirigeants économiques français et européens. L’exemple de la loi sur le travail, adoptée en juin 2007, est significatif du double langage. Cette loi vise à réduire le nombre de salariés sans contrat, à faire payer les heures supplémentaires, à obtenir des négociations salariales, au moins dans les grandes entreprises … Elle a d’ailleurs fait l’objet d’une discussion publique (encadrée, mais réelle) en Chine. Mais la pression est venue de la Chambre de commerce américaine, qui trouvait les dispositions sociales trop avancées. De son côté, la Chambre de commerce européenne, par la voix de son président d’alors Serge Janssen de Varebeke, a estimé que la loi, trop stricte, pourrait amener les sociétés étrangères à « reconsidérer leurs nouveaux investissements ou la continuation de leurs activités en Chine », en raison de possibles « augmentation des coûts et réduction de la flexibilité » (« China wrestles with a labor law overhaul », The Wall Street Journal, New York, 7 mai 2007). Certains principes de la loi, malgré ce chantage, ont été maintenus, mais d’autres dispositions ont disparu. Ce qui n’empêche pas les mêmes, ou leurs collègues, de dénoncer sur les plateaux de télévision, ou dans les journaux occidentaux, le manque de législation sociale qui, selon eux, fausse la concurrence mondiale. Dès lors qu’il s’agit de limiter le dumping social en donnant un minimum de droits aux salariés chinois, les voilà qui reprennent l’antienne du chantage à la délocalisation, mais à l’envers. On suggèrera donc à M. Ménard et à ses amis de passer des sportifs aux hommes d’affaires. Les droits humains y gagneraient, assurément. La morale aussi. Concours d’entrée en 4ème année IEPG – 22 mai 2008 – Dissertation – page 14/15 Document n°9 Brève histoire du boycott, Jean-Louis Legalery, 03 avril 2008 A l'heure où l'Europe occidentale fait mine de découvrir, avec effroi, une information disponible depuis plus de six ans, à savoir que les prochains jeux olympiques d'été vont avoir lieu dans un pays qui foule au pied les droits de l'homme et du citoyen depuis des décennies, un néologisme étrange a refleuri dans plusieurs titres de "une" des médias français, boycottage. Ce qui est surtout étrange c'est l'ajout inattendu d'un suffixe français –age, qui exprime un résultat, au nom commun anglais boycott. Cette suffixation est d'autant plus surprenante qu'elle est relativement limitée. D'autres mots ont traversé la Manche sans aucune adjonction, c'est le cas de kidnap, par exemple, puisqu'on a gardé la forme verbale kidnapping et on n'a jamais, à ce jour, parlé de kidnappage. De plus, en l'occurrence l'économie linguistique adaptée au discours journalistique conduit plutôt à privilégier rapt. Mais boycott continue sa carrière seul également. C'est certainement l'éponyme, c'est-à-dire le nom propre devenu nom commun, le plus célèbre de la langue anglaise. Charles Cunningham Boycott est né, en 1832, et mort, en 1897, en Angleterre. Capitaine dans l'armée britannique, il prit sa retraite comme régisseur des terres du comte d'Erne, dans le comté de Mayo. En 1880, année où le mot boycottage apparut dans la presse française selon le dictionnaire étymologique Bloch et Wartburg, Charles Boycott fut mis en quarantaine par l'Irish Land League, qui regroupait les métayers irlandais et qui demandait une réduction des loyers aux gentlemen-farmers, dont Boycott faisait partie de fait, puisqu'il représentait les intérêts de son comte de patron. Boycott refusa et fut mis en quarantaine de telle manière qu'il n'eut d'autre issue que de fuir vers l'Angleterre. La notion de boycott, aujourd'hui, répond essentiellement à trois acceptions : le boycott entre Etats, le boycott commercial qui concerne les entreprises et le boycott social. Dans la première catégorie, l'exemple le plus récent est celui du boycott commercial de l'Irak, à la suite de l'invasion du Koweit, en 1990. En remontant dans le temps, on retrouve deux pays qui font la "une" aujourd'hui : la Rhodésie tout d'abord, actuel Zimbabwe, qui fit l'objet d'une décision de boycott par le conseil de sécurité de l'ONU, en décembre 1966, après que le premier ministre de l'époque, Ian Smith, fit une déclaration unilatérale d'indépendance, UDI, par rapport à la couronne britannique, sans en avoir, donc, informé le premier ministre conservateur, Harold MacMillan ; la Chine ensuite, qui, en 1905, loin de subir comme aujourd'hui, mit en place un boycott à l'égard des Etats-Unis pour protester contre les mesures législatives qui restreignaient l'immigration chinoise. Entre temps, il y eut, en 1948, le boycott décidé par lespays arabes contre Israël, afin de manifester leur opposition à la création de cet Etat. Dans la deuxième catégorie, l'exemple le plus probant est certainement celui d'Edouard Leclerc, qui, en 1959, a en quelque sorte boycotté les intermédiaires pour faire baisser les prix des produits alimentaires. En 2008, les méthodes de la grande distribution peuvent parfois se situer entre boycott et chantage, selon les associations de consommateurs. Quant au boycott de l'industrie du disque lancé par plusieurs groupes et associations, il prend pour cible le présumé racket dont les major sont accusées. La troisième catégorie concerne le boycott social et professionnel. Il a pris un tour systématique dans la presse française, notamment dans l'audiovisuel, sous la cinquième république, et a pris le nom de "placardisation". Lorsqu'un journaliste est jugé trop indépendant, trop libre, bref trop enclin à faire dignement son travail, il est boycotté par le pouvoir en place et mis au placard, c'est-à-dire confiné dans des tâches subalternes, qui ne correspondent ni à ses compétences, ni à ses aspirations, et empêché de s'exprimer. En 1979, lorsque Margaret Thatcher, si émue par les frasques de son fils et si peu par la conviction des militants irlandais, a supprimé, dans l'industrie britannique, le système du closed shop, qui empêchait tout employeur d'embaucher si le candidat n'était pas membre d'un des syndicats locaux, les réactions ont été unanimement positives. Cette procédure ne semblait, en effet, ni limpide ni démocratique, mais sa suppression a conduit à un véritable boycott des organisations syndicales. Dans les quelques mois qui viennent, si les gouvernements des pays membres de l'Union Européenne ne mettent pas plus d'ardeur à dénoncer les excès du régime chinois, nous pourrions voir surgir de pittoresques oxymores tels que boycott bienveillant ou boycott amical. Source : http://www.mediapart.fr/club/blog/jean-louis-legalery/030408/breve-histoire-du-boycott Concours d’entrée en 4ème année IEPG – 22 mai 2008 – Dissertation – page 15/15