La cellule cancéreuse pour les nul(le)s Quels médicaments pour quelles cibles ? Pr Jean-Emmanuel Kurtz Département d’Hématologie et d’Oncologie Hôpitaux Universitaires de Strasbourg Institut Régional du Cancer Préambule: Avant c’était simple, ! mais c’était avant. JE Kurtz 2006 Hippocrate et Galien • 4ème siècle avant JC • Hippocrate: squirrhe: tumeur dure, non inflammatoire, avec tendance à la récidive et à la généralisation, amenant une issue fatale • 1er siècle après JC: • Galien: l'étiologie du cancer à un déséquilibre de la bile noire, qui constitue avec le sang, la bile jaune, et le phlegme, les quatre humeurs du corps humain Fin ème 19 ère 1 et moitié du ème 20 siècle • Théorie embryonnaire: des reliquats de tissu embryonnaire qui reprendraient leur «énergie prolifératrice» après une phase de latence • Théorie irritative: (Virchow): doctrine de «l’irritation conduisant au cancer»; (Lumière): «une maladie des cicatrices» Fin ème 19 ère 1 et moitié du ème 20 siècle • Théorie infectieuse: • Bactérienne: très en vogue au début du 20 siècle. Plusieurs micro-organismes découverts «le microbe du cancer !» Rapin (1896), Scheurlen (1887), Doyen (1902), etc... ème • Virale: Borrel (1906), Bittner (1936): un facteur cancérigène «viral» transmis par le lait de certaines souris à leur descendance ! (pourtant on admet à cette époque que le cancer n’est pas contagieux) L’ébauche de l’explication • Théorie de la mutation: • Envisagée dès 1914 (Boveri) «altération du complexe chromosomal des cellules somatiques» «Destruction de substances chimiques nécessaires au fonctionnement normal des cellules» (Laborde 1951) Pourtant Charles Oberling (partisan de la théorie virulente): «les mutations sont rares chez les mammifères et n’affectent que les caractères secondaires» • En 1951 «Il n’existe aucune preuve expérimentale de la théorie mutationiste du cancer» (Laborde) Fiat lux ! L’origine du cancer Mutagènes environnementaux Terrain patrimoine génétique Hasard évènements aléatoires Le rayonnement UV JE Kurtz 2009 pas bien ? bien ? La cellule cancéreuse • Un proto-oncogène est un gène, qui normalement activé régule positivement la croissance cellulaire. Sous l’effet d’une altération, il devient trop activé, et se transforme en oncogène • Un oncogène : est un gène anormalement régulé/ exprimé qui stimule en permanence la croissance cellulaire • Un gène suppresseur de tumeurs (ou anti-oncogène) est un gène dont le rôle physiologique est de freiner la croissance cellulaire JE Kurtz 2009 S P O R A D I Q U E Gènes suppresseurs de tumeurs N Mutation n°1 Mutation n°2 N MM N N NN NN NN NN Cancer F A M I L I A L Gènes suppresseurs de tumeurs Mutation unique MM MM MM N N N N Cancer La cellule cancéreuse • • • Croissance stimulée de façon non physiologique • • • Capacité de se diviser de façon illimitée JE Kurtz 2009 Perte du contrôle de la prolifération cellulaire Echappement à l’apoptose (mort cellulaire programmée) Induction de la néo-angiogenèse Invasion et métastases ! Histoire naturelle (et moléculaire) du cancer • Comment comprendre qu’une cellule tumorale puisse tuer un individu ? • Le cancer n’est pas uniforme dans le temps ni dans l’espace • Une maladie à plusieurs étapes: moléculaires et cliniques, qui évoluent en même temps • • Lésions « précancéreuses » et cancer JE Kurtz 2009 Maladie locale, locorégionale et générale Histoire naturelle du cancer Maladie locale Expansion clonale, angiogenèse Sous clone « métastatique » Invasion de la membrane basale et de la matrice extracellulaire Intravasation Epithélium “normal” Hyperplasie atypique CCIS Emboles de cellules tumorales Adhésion à et franchissement de la membrane basale Dépôt métastatique Angiogenèse et croissance JE Kurtz 2009 Maladie générale Carcinome invasif Angiogenèse/micro-environnement Foie normal Vascularisation normale Vascularisation tumorale (diamètre irrégulier, Hépatocarcinome JE Kurtz 2012 branchements anormaux) Semela & Dufour, J Hepatol 2004 TRANSDUCTION DU SIGNAL JE Kurtz 2006 Ras pathway EGF VEGF P P P P SOS Grb2 Ras GDP Prolifération cellulaire Transcription Ras GTP Raf ERK MEK fos jun « Mutation Addiction » ! • La présence d’une mutation (ou anomalie génomique) est suffisante à l’apparition du phénotype cancéreux • Le cancer n’est pas uniforme dans le temps ni dans l’espace • Il y a des passagers clandestins d’autres mutations, silencieuses (ou pas !) JE Kurtz 2014 L’exemple de la LMC Y177 Y 1294 p210 Trans-autophosphorylation P PI3K PH GTP PIP3 Ras PIP2 Grb2 SOS GDP adapté de Nature Cancer Rev 2005; 5: 172-183 Akt Ras • Prolifération cellulaire • Différenciation monocytaire • Survie cellulaire • Adhésion cellulaire De nombreux inhibiteurs de RTK VEGFR-1 VEGFR-2 VEGFR-3 EGFR PDGFR-α FGF Tous les ‘ibs’ SOS Grb2 Ras SOS Grb2 Ras SOS Grb2 Ras SOS Grb2 Ras SOS Grb2 Ras SOS Grb2 Ras GTP GTP GTP GTP GTP GTP Raf Raf Raf Raf Raf Raf MEK MEK MEK MEK MEK MEK ERK ERK ERK ERK ERK ERK ne sont pas équivalents ni en efficacité ni Pazopanib JE Kurtz 2011 Erlotinib Gefitinib Nintédanib en toxicité V600E BRAF après 15j de BRAF melanoma!patient!PET!scan!at!baseline!and! 720mg dayPLX4032 day!+15!after!PLX4032!treatment!at!720!mg!BID +15 after PLX4032 treatment at 720 mg BID V600E! Day!0 JE Kurtz 2010 Day 15 Abstract!9000 Flaherty et al., Abtract 9000, ASCO 2009 V600E BRAF après 15j de BRAF melanoma!patient!PET!scan!at!baseline!and! PLX4032 720mg day +15 after PLX4032 treatment at 720 mg BID day!+15!after!PLX4032!treatment!at!720!mg!BID V600E! Day!0 JE Kurtz 2013 Day 15 Abstract!9000 Kurtz JE et al. 2013/.TEP-TDM assessment in Alsacian mannele. An exploratory trial Voies d’activation ErbB PIP2 PIP3 P P P P P P SOS Grb2 Ras GTP Akt Raf P TSC2 MEK mTOR Survie cellulaire Synthèse protéique ERK Prolifération Différenciation Pro-prolifération PH Pro-survie PI3K P P Le rôle de mTOR PIP3 PH Akt TSC1 TSC2 P P Rheb mTOR rictor JE Kurtz 2006 mTOR raptor Sirolimus (rapamycine) Everolimus (Afinitor) Temsirolimus (Torisel) P S6K 4EBP Traduction Le darwinisme tumoral… Que se passe-t-il dans la tumeur sous l’effet de la pression de sélection liée au traitement ? (et sous l’effet du hasard ?) JE Kurtz 2013 Conséquences des mutations RAS anti EGFR Mab activation permanente P P P P SOS Grb2 Grb2 GTP Ras GDP SOS Grb2 Ras GTP Raf Raf Raf MEK MEK MEK ERK ERK ERK Prolifération Différenciation JE Kurtz 2009 SOS Ras Plus de transduction du signal ras sauvage Echec des inhibiteurs EGFR “extracellulaires” ras muté Le « Darwinisme» tumoral JEJEKurtz Kurtz 2014 2013 Limites d’un traitement basé sur l’analyse moléculaire d’un seul fragment de la tumeur primitive ! … rentre en action • Détection des allèles mutés dans le plasma par méthodes «sensibles» • Apparition des allèles mutés avant la progression biologique (ACE) et radiologique ! JE Kurtz 2013 Misale S et al. Nature 2012; 486:532-6 Conséquences pour le traitement • • Connaissance des mécanismes de cancérogenèse • • • Choix des cibles = choix des armes ? JE Kurtz 2014 ! Valeur diagnostique et théranostique de l’anayse des profils mutationnels Trouver toutes les cibles avec le NGS ? Et puis après ? Comprendre, c’est déjà apprendre • • • Nouvelles thérapies en oncologie • • Attention aux comorbidités JE Kurtz 2014 Voies de signalisation Effets secondaires liés aux conséquences du blocage de telle ou telle voie Rester humble