NUMERO 24 Quoi de neuf depuis juillet au niveau de l`ANSM?

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2012
NUMERO 24
Ce bulletin est rédigé et diffusé par la Pharmacologie Médicale et le CHU de Montpellier sans aide de l'industrie pharmaceutique.
Quoi de neuf depuis juillet au niveau de l'ANSM?
Adenuric® (fébuxostat) : Risque de survenue de réaction d’hypersensibilité grave, incluant le
syndrome de Stevens- Johnson et des chocs anaphylactiques. Le febuxostat est un inhibiteur de la
xanthine oxydase, enzyme responsable de la synthèse endogène d’acide urique. Il est indiqué dans
le traitement de l’hyperuricémie chronique où un dépôt d’urate s’est déjà produit. Attention aux
potentielles « réactions crisées » avec l’allopurinol.
.http://ansm.sante.fr/S-informer/Actualite/Adenuric-R-febuxostat-Risque-de-survenue-dereaction-d-hypersensibilite-grave-incluant-le-syndrome-de-Stevens-Johnson-et-des-chocs-anaphylactiques-aigus-Lettre-auxprofessionnels-de-sante
Restriction d’utilisation : Syndromes d’hypersensibilité graves et atteintes auto-immunes
Désormais, les spécialités à base de minocycline doivent être réservées, à l’adulte ou l’enfant de plus de 8 ans, dans le
traitement des infections microbiologiquement documentées de souches bactériennes résistantes aux autres cyclines et
sensibles à la minocycline et pour lesquelles aucun autre antibiotique par voie orale ne paraît approprié.
http://ansm.sante.fr/S-informer/Actualite/Minocycline-restriction-d-utilisation-en-raison-d-un-risque-de-syndromes-dhypersensibilite-graves-et-d-atteintes-auto-immunes-Lettre-aux-professionnels-de-sante
Nexen® et génériques (nimesulide) : Restriction d’indication dans le traitement de la douleur aiguë et des dysménorrhées
primaires, en seconde intention, et de courte durée (<15 jours). En effet, si son efficacité et son profil de tolérance sur le plan
gastro-intestinal est comparable à celui des autres AINS, sa toxicité hépatique est plus importante.
http://ansm.sante.fr/S-informer/Actualite/Nimesulide-restriction-des-indications-therapeutiques-suite-a-une-reevaluationeuropeenne-du-rapport-benefice-risque-Lettre-aux-professionnels-de-sante
Protopic pommade 0,03 % et 0,1 % (tacrolimus) : A la suite de la notification de cas de tumeurs malignes, incluant des
lymphomes et des cancers cutanés, chez des patients traités par le tacrolimus pommade et de la publication d'études
épidémiologiques suggérant une augmentation du risque de lymphome chez les patients traités par les inhibiteurs de la
calcineurine topiques, dont le tacrolimus pommade, l’ANSM souhaite rappeler aux professionnels de santé d’importantes
mesures de minimisation du risque concernant le traitement de la dermatite atopique modérée à sévère par le tacrolimus
pommade.
http://ansm.sante.fr/S-informer/Informations-de-securite-Lettres-aux-professionnels-de-sante/Protopic-tacrolimus-0-03-et-0-1pommade-Recommandations-importantes-de-bon-usage-afin-de-minimiser-les-risques-Lettre-aux-professionnels-desante/(language)/fre-FR
Pradaxa®(dabigatran) et Xarelto® (rivaroxaban) : Ces nouveaux anticoagulants oraux, peuvent être une alternative aux
anti-vitamine K (AVK), particulièrement en cas de fluctuations de l’INR en dehors de la zone thérapeutique. A ce jour, il n’y a
pas de surveillance biologique de routine proposée ni d’antidote spécifique. La fréquence des saignements est globalement
similaire sous dabigatran ou rivaroxaban et sous warfarine (COUMADINE). Il n’y a pas d’étude comparative avec la
fluindione (PREVISCAN) ou l’acénocoumarol (SINTROM).
http://ansm.sante.fr/S-informer/Points-d-information-Points-d-information/Les-nouveaux-anticoagulants-oraux-dabigatran-etrivaroxaban-dans-la-fibrillation-auriculaire-ce-qu-il-faut-savoir-Point-d-Information/(language)/fre-FR
Directeurs de la Rédaction : Dr D.HILLAIRE-BUYS, Dr. V. PINZANI-HARTER
Ont participé à la rédaction de ce journal : Dr C. CONDEMINE-PIRON, Dr C. EIDEN, Dr J.L. FAILLIE, Dr D. GRAU, Dr H. PEYRIERE, Dr
C. PHILIBERT, Dr. V. PINZANI-HARTER, Dr M.A. THOMPSON-BOS
Département de Pharmacologie Médicale et Toxicologie Hôpital Lapeyronie 34295 MONTPELLIER Cedex 5
Tél. : Secrétariat : 04.67.33.67.57 – Internes : 04.67.33.67.56 Fax : 04.67.33.67.51
Mails: [email protected], [email protected],
[email protected], Site internet: http://www.chu-montpellier.fr/fr/vigilance/
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Anticancéreux et dispensation de ville attention aux risques d'erreur,
exemple du Xéloda®
A la suite de la sortie des médicaments de la réserve hospitalière en 2004 et au
développement des hospitalisations à domicile, les patients atteints de cancer se voient souvent
prescrire des anticancéreux oraux dispensés en officine de ville. Or les anticancéreux sont des
molécules complexes qui nécessitent des conditions particulières de prescription, de
manipulation et d'administration. Le pharmacien doit pouvoir s'informer auprès du patient de
son état de compréhension de sa maladie et du traitement proposé ; fournir aux patients des
conseils simples leur permettant de mieux gérer les effets indésirables de la chimiothérapie et disposer de
documentation à remettre au patient.
Le Centre de Pharmacovigilance est régulièrement consulté par le biais de demandes de renseignements sur
des erreurs de délivrance, de compréhension du malade de la posologie ou de la notion de cycle de prises. Ces
mésusages ou erreurs peuvent avoir des conséquences gravissimes en termes d'efficacité et/ou de toxicité. Nous
rapportons ici une expérience d'erreur de délivrance de capécitabine (Xéloda®). Il a été délivré au patient des
comprimés à 500 mg au lieu des comprimés à 150 mg durant 14 jours. Le patient a présenté une mucite grade 4 et
une toxicité médullaire grade 4.
Le Xéloda® est une prodrogue qui se transforme en 5-Fluorouracile dans l'organisme. Ses indications
incluent le cancer du colon,du sein, digestif, ORL… La pharmacocinétique du 5-FU expose le sujet à un surdosage
potentiel lorsqu'il est porteur génétiquement d'un déficit en dihydropyrimidine deshydrogenase (DPD), enzyme clé
de son métabolisme. Les effets secondaires habituels du 5-FU sont hématologiques (leucopénie 54 %), digestifs
(nausées, vomissements 30 %, stomatites 48 %, diarrhées 64 %), cutanés (alopécie, dermatose, acrosyndrome) et
plus rarement neurologiques (ataxie cérébelleuse 3 %), oculaires et cardiaques (ischémie cardiaque). Selon l'EMA
(Agence Européenne du Médicament), un surdosage surviendrait chez environ 0,2 pour 10 000 patients traités en
Europe soit environ 10 000 cas par an (document EMA /COMP /231352/2009). Peu de cas sont notifiés aux
Centres Régionaux de Pharmacovigilance.
Les traitements classiques du surdosage en 5-FU comportent
•
une diurèse forcée, une dialyse, ou une hémoperfusion pour épurer le fluorouracile. Ceci est peu réaliste
pour le 5-FU car sa demi-vie est de 15 mn, plus bénéfique en cas d’intoxication à la capécitabine pour
éliminer les précurseurs du 5FU , en particulier le 5’-DFUR.
•
des facteurs de croissance myéloïde à commencer dès que possible.
Il a été proposé des suppléments glutaminiques par voie orale pour réduire les diarrhées et limiter la toxicité gastro-
intestinale ; des inhibiteurs de l’enzyme de conversion de l’angiotensine (IEC) pour réduire le risque de
dysfonctionnement cardiaque.
L'uridine est un antidote connu du 5-FU mais sa cinétique n'est pas favorable à son utilisation en tant que
telle. La vistonuridine ou triacétate d’uridine est un antidote possible en cas de surdosage aigu ou d’erreur
médicamenteuse. Elle est donnée au patient dans un délai minimum de 3 heures après le surdosage pour ne pas
interférer avec l'activité anti-tumorale du 5-FU. Par contre le délai maximum entre l’intoxication au FU et
l'administration de l’antidote est actuellement fixé à 4 jours dans les diverses publicationss. En France, cette ATU
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nominative permet une délivrance de cet antidote jusqu’à 5 jours après l’intoxication. En ce qui concerne la
capécitabine, ce délai n’a pas été précisé, faute de cas rapportés jusqu’à présent.
Dr Véronique Pinzani
Molécules anticancéreuses disponibles en ville (non exhaustif)
Cytotoxiques
Methotrexate* (Methotrexate)
Endoxan* (Cyclophosphamide)
Natulan* (Procarbazine)
Purinethol* (Mercaptopurine)
Fludara* (Fludarabine)
Chloraminophène* (Chlorambucil)
Alkeran* (Melphalan)
Hydrea* (Hydroxycarbamide)
Estracyt* (Estramustine)
Cytotoxiques
Myleran* (Busulfan)
UFT* gél. (100g Tegafur et 224 mg Uracile)
Celltop/Vépésidecaps. (Etoposide)
Aracytine* (Cytarabine) IV / SC
Xeloda* (capécitabine),
Navelbine* (vinorelbine),
Xagrid* (anagrélide)
Les thérapeutiques ciblées
Glivec* (Imatinib),
Tarceva* (erlotinib),
Nexavar* (sorafenib),
Sutent* (sunitinib) ,
Sprycel(Dasatinib):
Tasigna* (Nilotinib)
ANTI-HYPERTENSEURS, GROSSESSE ET ALLAITEMENT
Environ 10 à 15% des grossesses se compliquent d'une hypertension artérielle, avec une
morbimortalité maternelle élevée et un risque fœtal et périnatal majoré. L'hypertension artérielle peut
exister chez la future mère avant la grossesse, le traitement devant alors parfois être adapté en
prévision de la grossesse. Elle peut se révéler en cours de grossesse et se compliquer de prééclampsie (hypertension avec protéinurie associée > 0.3 g/24h) et d'éclampsie (pré-éclampsie
accompagnée de crise convulsive). La pré-éclampsie et l'éclampsie résultent d'une maladie placentaire
avec anomalies trophoblastiques entraînant une hypoperfusion placentaire et le relargage de facteurs
responsables d'une dysfonction endothéliale étendue conduisant à une atteinte multi-organique.
Un traitement est donc presque toujours nécessaire. D'une manière générale, un traitement compatible avec la
grossesse ne l'est pas forcément avec l'allaitement, ce qui nécessite d'envisager la possibilité ou non de l'allaitement
maternel pendant la grossesse de façon à adapter éventuellement un traitement avant la naissance de l'enfant. Cependant, en
ce qui concerne les anti-hypertenseurs, la grande majorité d'entre eux peuvent être utilisés à la fois pendant la grossesse et
l'allaitement.
L'administration d'un seul anti-hypertenseur est à privilégier, en s'orientant vers les molécules pour lesquelles on
dispose du plus large recul d'utilisation et/ou les plus étudiés. Au cours de la grossesse, les diurétiques sont à éviter et les
inhibiteurs de l'enzyme de conversion ainsi que les antagonistes de l'angiotensine II sont contre-indiqués, après le 1er trimestre.
Au cours de l'allaitement, la discussion se fait le plus souvent au cas par cas, en fonction :
-
de l’état général du nouveau-né : âge, terme (prématurité, immaturité enzymatique au
cours de la 1ère semaine de vie, donc fonctions de détoxification et d’élimination des
médicaments modifiées), terrain
-
des
caractéristiques
de
la
molécule
:
demi-vie,
biodisponibilité
orale,
pharmacodynamie…
-
des médicaments associés
-
des données spécifiques concernant la mère : prise de médicaments pendant la grossesse, posologie, durée de
traitement
3
Le tableau de synthèse proposé ci après est un petit guide simple, qui contient des informations élaborées grâce à une
synthèse des données disponibles au moment de la rédaction. Des variations interindividuelles peuvent être observées.
Attention, un grand nombre d'anti-hypertenseurs sont sur le marché sous forme d'association de molécules de
classes différentes. Pour toute précision, contacter le Centre Régional de Pharmacovigilance du LanguedocRoussillon.
Classe
médicamenteuse
DCI/Spécialité
Beta-bloquants :
Propranol :
Avlocardyl…
Grossesse
Allaitement maternel
Recommandation
Surveillance fœtale et/ou
néonatale
Recommandation
Surveillance
de l'enfant
Possible
Dans tous les cas
Possible
Exposition très
importante de
l'enfant.
Possibilité
d'hypotension,
bradycardie,
hypoglycémie
- Possibilité de RCIU
Labétalol :
Trandate…
Tous les autres
Centraux :
Alphaméthyldopa :
Aldomet…
Clonidine :
Catapressan..
Diurétiques
Furosémide :
Lasilix
Hydrochlorothiazide
: Esidrex
Spironolactone :
Aldactone
Inhibiteurs
calciques
Nicardipine :
Loxen…
Nifédipine :
Adalate…
Vérapamil :
Isoptine…
Inhibiteurs de
l'enzyme de
conversion
Captopril :
Lopril…
Enalapril :
Renitec
Antagonistes de
l'angiotensine II
ou Sartans
Losasartan, :
Cozaar…
Valasartan :
Tareg…
Possible
Possible
Possible si nécessaire (moins de données),
en évitant l'aténolol : Tenormine (risque de
retard de croissance intra-utérin (RCIU) plus
élevé)
- Surveillance les trois premiers jours
de vie :
hypotension, bradycardie,
hypoglycémie
Possible
Possible (2ème intention)
Possible
_
Déconseillé
Dans tous les cas
Déconseillés dans l'HTA
(hypovolémie induite pouvant diminuer la
perfusion placentaire)
Spironolactone : effet anti-androgénique
Contre-indiqués
Hyponatrémie
Hypo/hyperkaliémie
Thrombopénie
(selon les molécules)
Peut diminuer
la sécrétion de
prolactine
chez la mère
Dans tous les
cas
Peu ou Pas de
données
Déconseillés
(sauf posologies
faibles, au cas par
cas)
Le furosémide
peut diminuer
la sécrétion
lactée chez la
mère
Possible
Possible
Possible
Possible
_
Possible
Eviter 1er trimestre par précaution, surtout
pour la nifédipine, la félodipine (anomalies
digitales +/- cardiaques chez l'animal)
Possible
Dans tous les cas
Dans tous les
cas
Contre-indiqués
2ème et 3ème trimestre
(toxicité rénale fœtale : dysplasie tubulaire,
IR, oligoamnios, hypoplasie des os du crâne,
déformations extrémités, hypoplasie
pulmonaire secondaires)
Déconseillés 1er trimestre
Si exposition après le 1er trimestre
:
Arrêt immédiat du traitement
Surveillance de la fonction rénale
fœtale (liquide amniotique,
échographie, beta-2 microglobuline
fœtale)
Bilan rénal, examen clinique
spécifique à la naissance
A éviter en
particulier chez
le prématuré
Dans tous les
cas
Contre-indiqués
Peu de
données mais
le passage
semble
modéré
Toxicité rénale
potentielle, en
particulier
chez le
prématuré et
le nouveau-né
Pas de
données
Toxicité rénale
potentielle, en
particulier
chez le
prématuré et
le nouveau-né
Bibliographie : Jonville-Béra AP et al; Médicaments et grossesse : Prescrire et évaluer le risque, Elsevier Masson 2012
Briggs G et al. Drugs in pregnancy and lactation. Ninth edition, 2011
Hale TW. Medications and mother milk. Fourteenth edition, 2010
Marie-Andrée Thompson-Bos
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Quoi de neuf en phytothérapie? Réglisse et risque de
surconsommation !
En cet période estivale, où il est important de bien s’hydrater, nous voulions
mettre en avant une plante largement consommée dans notre région : la réglisse.
La glycyrrhizine est un terpène extrait de la racine de la réglisse (Glycyrrhiza glabra). Le suc naturel de réglisse en
contient de 5 à 20%. Elle est principalement connue comme édulcorant d'où son utilisation dans les confiseries et
boissons. La teneur en glycyrrhizine des produits "alimentaires" disponibles dans le commerce est extrêmement
variable. Elle dépend de la teneur intrinsèque du suc naturel de réglisse et de la quantité de suc naturel introduite
dans ces produits.
Très utilisée en confiserie, on retrouve la réglisse dans toutes sortes de bonbons et
pastilles ("Cachou Lajaunie", "Zan" contenant de 4.6 à 10% de glycyrrhizine), dans
l’Antésite (boisson la plus concentrée 23 g/l), mais aussi dans les gommes à mâcher
indiquées dans le sevrage tabagique et dans un grand nombre de spécialités contre
l’halitose. Elle entre également dans la composition de liqueurs et de boissons apéritives
comme le pastis en particulier dans le pastis sans alcool (pouvant contenir de 0.057 à 1.27
g/l de glycyrrhizine soit une concentration pouvant être 6 fois plus élevée que celle du pastis avec alcool).
Les intoxications sont, à l’heure actuelle, principalement le fait d’une consommation excessive et
prolongée de confiseries à base de réglisse ou de pastis sans alcool édulcoré à la réglisse. Cette surconsommation
est favorisée par un sevrage tabagique ou éthylique. Le seuil toxique généralement admis serait de 700 mg à 1.4 g
d'apport journalier de glycyrrhizine pendant plusieurs mois mais des intoxications ont été rapportées pour des
consommations moindres durant une période plus courte chez des patients ayant des antécédents d’intoxication
alcoolique (hyperminéralocorticisme, hypokaliémie).
L’intoxication par la glycyrrhizine entraîne un pseudohyperaldostéronisme primaire. Elle exerce sa toxicité par le
biais d’une inhibition enzymatique portant sur la 11-ß-hydroxystéroïde déshydrogénase. Le cortisol qui ne peut être
converti en cortisone au niveau rénal, se lie aux récepteurs minéralocorticoïdes reproduisant les symptômes de
l’hyperaldostéronisme (élimination rénale de potassium et rétention hydro-sodée) alors qu'il existe une freination
globale du système rénine-angiotensine-aldostérone plasmatique.
D’un point de vue clinique, les symptômes sont les mêmes que lors de tumeur de la corticosurrénale
sécrétant un excès d’aldostérone : paresthésies pouvant évoluer vers une paralysie
notamment chez un sujet alcoolique, crise de tétanie, myasthénie, polyurie et
polydipsie, HTA avec hypokaliémie. L’hypernatrémie et l’alcalose métabolique sont
plus inconstantes. L’arrêt de l’intoxication est suivi d’une normalisation de la tension
artérielle et de la kaliémie en quelques semaines mais la suppression de l’axe réninealdostérone peut persister plusieurs mois. Le traitement par les IEC est inefficace en
raison du faible niveau d’activité rénine plasmatique, les diurétiques sont à proscrire car
ils peuvent aggraver l’hypokaliémie.
La concentration exacte en glycyrrhizine des confiseries et boissons n'étant jamais mentionnée, la législation
française impose certains repères permettant de guider le consommateur, mais aussi le médecin confronter à
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l'évaluation étiologique d'une symptomatologie évocatrice. Les fabricants doivent apposer la mention « réglisse »
sur tout produit contenant de la glycyrrhizine à une concentration supérieure ou égale à 100 mg/kg ou 10 mg/l, et
doivent y ajouter une "alerte", destinée aux personnes hypertendues, lorsque cette concentration est supérieure ou
égale à 4 g/kg pour les confiseries et à 50 mg/l pour les boissons contenant moins de 1.2% en volume d'alcool (pour
les boissons alcoolisées, cette alerte n'est requise que pour des concentrations en glycyrrhizine supérieure ou égale
à 300 mg/l).
En pratique, la consommation de réglisse (sous toutes ses formes) doit rester occasionnelle chez le
sujet hypertendu ou souffrant d’un syndrome du QT long congénital (hypokaliémie).
Christelle Philibert
1-CAUMES JL et al. Hyperminéralocorticisme secondaire à la consommation de très faibles quantités de"pastis sans alcool". Gastroenterol Clin Biol
2004;28:917-8.
2- LUCHON L et al. Hypokaliémie sans hypertension artérielle par intoxication à la réglisse. Néphrologie 1993;14:177-181.
3- Vigitox 2009, N°39:1-2.
4- BRAHIMI M, LESPERRES B. Hypertension artérielle par intoxication à la réglisse. Correspondance en risque cardiovasculaire.2004;2 (2):87.
Pioglitazone et risque de cancer de la vessie : le point de vue d'un
épidémiologiste
La pioglitazone (ACTOS®, COMPETACT®) est un médicament de la classe des thiazolidinediones
(TZD), utilisées dans le traitement du diabète de type 2. Le mécanisme d'action des TZD passe par l'activation des
récepteurs nucléaires PPAR qui jouent un rôle dans l'expression des gènes impliqués dans le métabolisme des
lipides et du glucose. Contrairement à la metformine, l'efficacité clinique de la pioglitazone sur la réduction de
survenue d'événements cardiovasculaires n'a pas été clairement mise en évidence mais il a été montré qu'elle
réduisait de manière significative le taux d'HbA1c. La pioglitazone a été autorisée sur le marché Européen en 2000,
l'exposition à la pioglitazone a été estimée à plus de 20 millions de patients-années dans le monde. A la suite d’une
alerte de l'Agence Nationale de Sécurité du Médicament et des Produits de Santé (ANSM) concernant un risque de
cancer de la vessie chez les patients traités, la pioglitazone a été suspendue en France et en Allemagne depuis juin
2011. A ce jour, le rapport bénéfice/risque est toujours qualifié de favorable par l'Agence Européenne des
Médicaments (EMA) et par la Food and Drug Administration (FDA) aux Etats-Unis.
Dans une étude récemment publiée dans le British Medical Journal,
Azoulay et ses collègues ont constaté que l'exposition quotidienne de plus de
deux ans à la pioglitazone doublait le risque de cancer de la vessie. Ils ont également constaté une association
entre le cancer de la vessie et à la fois la dose et la durée du traitement par pioglitazone. Par rapport aux
précédentes études, les auteurs soulignent de nombreux avantages méthodologiques. Cette étude permet donc de
tirer des conclusions fiables et de confirmer l'existence d'un risque de cancer de la vessie associée à la prise
prolongée de pioglitazone.
En réalité, ce risque était suspecté depuis bien longtemps. En effet, les données précliniques sur la pioglitazone
signalaient l'apparition de cancers de la vessie chez les rats mâles. Cette observation avait comme explication
avancée par le fabricant la formation de cristaux urinaires entrainant l'irritation chronique de la vessie chez les rats,
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et était considérée comme spécifique à cette espéce. Les études cliniques bien souvent trop courtes et non adaptées
n'ont pas évalué ce type d'effet indésirable. Le produit a donc été mis sur le marché, les données de carcinogenèse
animale ayant été ajoutées au Résumé des Caractéristiques du Produit dans la section "Sécurité Préclinique", mais
aucune recommandation n'avait été adressée aux prescripteurs, en particulier pour la sélection et le suivi des
patients potentiellement à risque.
Aucune modification réglementaire n’a été effectuée entre 2000 et 2011 alors que le faisceau d'arguments en faveur
de l’existence de ce risque se resserrait :
- des études animales montraient que le risque carcinogène concernait également d'autres espèces que le rat et que
l'hypothèse des cristaux urinaires ne pouvait pas à elle seule rendre compte de l’hyperplasie;
- dans l'essai clinique randomisé PROactive publié en 2005, qui a comparé la pioglitazone à un placebo, une
augmentation non significative des cancers de la vessie était signalée. Il s'avèrera plus tard que le nombre de
cancer dans le groupe placebo était erroné et que de ce fait la différence devenait significative;
- les autorités américaines et européennes enregistraient un nombre croissant de déclarations spontanées de cas de
cancer de la vessie ;
- les résultats d'études épidémiologiques devenaient inquiétants : une cohorte prospective américaine (la cohorte
Kaiser Permanente Northern California) montrait un risque significatif pour une durée d'exposition supérieure à
deux ans (HR 1,4 IC95%: 1,03-2,0) et une cohorte rétrospective de la base de données d'assurance maladie
française suggérait un risque global augmenté de 22% (HR 1,22 IC95%: 1,03-2,0), les
résultats de cette dernière a étude ayant conduit à la suspension de la pioglitazone en
France et en Allemagne en Juin 2011.
En décembre 2011, soit plus de 10 ans après l'autorisation de mise sur le marché,
l'Agence Européenne des Médicaments a jugé que le rapport bénéfice/risque de la
pioglitazone restait favorable (le produit est toujours commercialisé dans les autres pays
européens) mais les prescripteurs ont été informés et le RCP actualisé avec les recommandations suivantes : la
pioglitazone est contre-indiquée pour les patients atteints d'un cancer de la vessie en cours ou présentant des
antécédents de cancer de la vessie ou une hématurie macroscopique. Il est également conseillé de commencer le
traitement avec la dose la plus faible disponible et de vérifier l'adéquation de la réponse au traitement (sur la
réduction du taux d'HbA1c) 3 à 6 mois après l'initiation du traitement. Des mesures équivalentes ont été prises aux
Etats-Unis et au Canada.
Quel que soit le devenir de cette molécule sur le plan réglementaire international, nous pouvons d'ores et
déjà retenir plusieurs leçons de cette affaire.
Il semble clair qu'en 2000, avant la commercialisation, le doute sur un risque de cancer de la vessie existait.
Devant ce doute, le respect du principe de précaution aurait du amener à restreindre initialement la
prescription aux patients ne présentant pas de facteurs de risque. En 2005, une analyse correcte de l'essai
PROactive aurait du conduire aux mêmes conclusions. Il a fallu attendre 2011 pour que les éléments en
faveur du risque soient suffisamment nombreux et probants afin que les restrictions de prescription soient
ordonnées. Pendant ce délai, des patients ont été exposés et de nombreux cas sont survenus.
7
Aujourd'hui, l'augmentation du risque de cancer de la vessie associée à la prise de pioglitazone est désormais
clairement mise en évidence. Cependant le risque absolu reste relativement faible. Le risque basal de cancer
de la vessie chez le patient diabétique est estimé à 50 à 100/100 000 personne-années c'est à dire inférieur à 1
cas pour 1000 patients traités pendant une année. Un doublement de ce risque basal dû à l'exposition à la
pioglitazone ne semble donc pas, à première vue, représenter un impact majeur en terme de santé publique.
De plus, la majorité des cas associés à la pioglitazone présentaient des lésions de bas grade, souvent curables
et avec une bonne survie à 5 ans. En réalité, ce risque n'est pourtant pas acceptable car il semble, la plupart
du temps, évitable sans une grande perte de chance pour le patient. En effet, à ce jour, aucune étude n'est
venue confirmer le bénéfice réel de la pioglitazone sur le plan cardiovasculaire. Face à un produit dont
l'efficacité est faible ou au mieux variable selon les sujets, les médecins qui engagent leur responsabilité dans
leurs choix thérapeutiques doivent pouvoir traiter le patient bon répondeur / bon tolérant et ne pas prescrire
dans les autres cas. Sans que leur soit donné tous les éléments nécessaires à l'évaluation de ce rapport
bénéfice/risque, cette tâche n'est pas facilitée.
Dr JL Faillie
Antenne Médicale de Prévention du dopage
L'AFNOR (Agence Française de Normalisation) vient de publier en juin 2012 une nouvelle norme
relative aux compléments alimentaires et autres denrées alimentaires destinés aux sportifs, la norme
NF V94-001. La norme NF V94-001 « Prévention du dopage dans le sport - Compléments
alimentaires et autres denrées alimentaires destinés aux sportifs - Bonnes pratiques de développement
et de fabrication visant l'absence de substances dopantes » résulte d’un travail conduit par le
Ministère des Sports, en collaboration avec des institutions publiques, des représentants du secteur industriel, des
professionnels de santé et du monde sportif.
Ce document spécifie un cadre de bonnes pratiques dont l'objectif est d'assurer la conformité du produit aux
exigences de la réglementation anti-dopage à sa date de libération. Le document peut servir de base à une démarche
de certification, ou d'auto-certification par le fabricant lui-même qui s'engage à en respecter les spécifications.
Parmi les exigences clés de la norme, l’industriel s’engage à conserver les échantillons des produits finis pour aider
les autorités compétentes, en cas de suspicion de non-conformité.
La norme propose également des bonnes pratiques pour sélectionner les ingrédients, choisir les fournisseurs et
organiser la fabrication des produits. Elle aide aussi à prévenir toute contamination fortuite, lors de la fabrication et
du transport des ingrédients et des produits finis. La norme NF V 94-001 permet aux industriels qui garantissent
l'absence de produits dopants dans leurs compléments alimentaires d'en faire mention écrite sur le conditionnement
du produit : « le produit est conforme à la date de libération du lot, à la norme AFNOR NF V 94-001 ». Un
développement de cette norme au niveau européen, porté par AFNOR (2ème contributeur au niveau du Comité
Européen de Normalisation - CEN), pourrait être envisagé, à la demande du Ministère des Sports.
Dr Claire Condemine-Piron
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ADDICTOVIGILANCE
Baclofène point sur les effets indésirables et le potentiel
d'abus et dépendance notifiés dans le sevrage alcoolique
(indication hors AMM)
Dans l'attente d'une évaluation clinique dans le cadre de son utilisation dans le sevrage alcoolique,
la prescription de baclofène pour son effet anti-craving (réduire l'envie) reste hors-AMM en addictologie.
Les résultats du suivi national de pharmacovigilance en vigueur depuis début 2011, ont montré un profil
d’effets indésirables typique des molécules GABAergiques (principalement sédation, somnolence,
myorelaxation, ataxie, anxiolyse, troubles mnésiques).
Cependant il s’en distingue par :
• Un risque convulsif en cours de traitement
• Un syndrome des jambes sans repos
• Des troubles musculaires paradoxaux
• Un risque d'accumulation en cas d'insuffisance rénale
• Des troubles cardio-vasculaires
• Un syndrome de sevrage (non dose-dépendant, attention peut-être confondu avec un sevrage
en alcool), avec un risque de syndrome sérotoninergique
• Abus, pharmacodépendance, désinhibition, euphorie, recherche d'effet plaisant
Depuis 2008, 20 000 patients seraient traités par baclofène pour une dépendance à l'alcool en France, 100
cas d'effets indésirables ont été décrits dans le cadre de la notification spontanée (69 cas d'effets
indésirables dont la moitié jugés graves par le clinicien). Il existe donc une sous-notification (< 0,5%) qui
ne permet pas à l'heure actuelle d'évaluer précisément le risque. Dans la littérature, peu de données sont
disponibles concernant ces effets indésirables. Une poursuite de la surveillance est donc nécessaire.
Effets indésirables du baclofène dans le traitement des addictions - suivi national pharmacovigilance
(24/04/2012) :
http://ansm.sante.fr/var/ansm_site/storage/original/application/264282cafe82f9e1f08323df4722fda1.pdf.
Patients abuseurs de Kétamine : pensez aux complications urinaires!
Une augmentation du nombre de notifications spontanées d'abus, de dépendance et d'usage détourné de
kétamine a été constatée par le réseau des Centres d'Addictovigilance [1]. La kétamine, molécule de la
famille des arylcyclohexylamines, est un anesthésique général non barbiturique d'action rapide qui
entraîne une anesthésie dite dissociative. Elle possède des indications thérapeutiques chez l'homme et est
également utilisée en tant qu' anesthésique vétérinaire. Réservée à l'usage hospitalier ou aux situations
d'urgence, elle est détournée de son utilisation et consommée à des fins récréatives. Dans ce contexte, son
administration se fait majoritairement par voie nasale et une polyconsommation est souvent retrouvée.
Parallèlement, depuis 2007, de nombreux cas de symptômes urologiques (principalement dysurie,
pollakiurie, hématurie et altération de la fonction rénale) secondaires à l'usage chronique de kétamine,
sont rapportés dans la littérature. Les auteurs décrivent une vessie érythémateuse et très inflammatoire,
pouvant être associée à une cystite ulcérante [2,3]. Ces troubles urinaires semblent être liés à la dose ainsi
qu'à la fréquence de la consommation de kétamine [3]. Le mécanisme physiopathologique reste encore
méconnu.
A ce jour, aucun cas de complication urologique liée à la consommation/abus de kétamine n'a été déclaré
au réseau français des Centres d'Addictovigilance.
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[1] Actualisation des données sur l'abus, la dépendance et l'usage détourné de la Kétamine. CEIP de Marseille.
Comité technique des CEIP Compte rendu du 24 mai 2012
[2] Shahani R. et al. Ketamine-associated ulcerative cystitis: a new clinical entity. Urology. 2007,69:810-2.
[3] Winstock AR et al. The prevalence and natural history of urinary symptoms among recreational ketamine
users. BJU Int. 2012.
Actualités en Addictovigilance
Détournement des bombes-aérosol
L'usage détourné de bombes-aérosol (dépoussiérants informatiques, déodorants, laques…) par les
adolescents qui recherchent une euphorie, semble être une pratique en augmentation.
Les solvants organiques présents dans ces conditionnements agissent sur le système nerveux central,
provoquant un syndrome ébrio-narcotique avec sensation d'ivresse, d'excitation, d'euphorie et effets
hallucinogènes. Une toxicité cardiaque, marquée par certains solvants chlorés, est également rapportée.
Ces effets sont rapidement réversibles quand l'exposition cesse. En cas d'exposition chronique,
une encéphalopathie, voire en cas de consommation massive, une détérioration intellectuelle avec signes
neurologiques déficitaires peuvent apparaître.
La toxicomanie aux solvants doit alerter sur des troubles psychologiques sous-jacents et
d'éventuelles consommations associées. Dans la plupart des cas, cette pratique reste transitoire et le
passage à une véritable addiction avec les substances volatiles demeure rare [1].
[1]. Vigitox 2007; 34: 4.
Modification des conditions de prescription du Stablon
 (tianéptine)
Les données actualisées de l'enquête d'addictovigilance de la tianeptine (Stablon) a montré la
persistance de cas d'abus et de pharmacodépendance malgré les mesures qui avaient été mises en place en
2007 (modification de l'information médicale du Stablon avec mise en garde des professionnels de santé
et des patients contre ce risque). La fréquence du risque d'abus et de pharmacodépendance a été estimée à
1 cas pour 1000 patients traités. La Commission d’AMM du 2 février 2012 a considéré que le rapport
bénéfice/risque de Stablon® restait favorable sous réserve de la mise en place d’actions de minimisation
du risque afin de limiter le risque d’abus et de pharmacodépendance.
Les mesures proposées comprennent notamment le renforcement et la sécurisation des conditions
de prescription et de délivrance du Stablon® et des actions de communication et d’information vers les
professionnels de santé et les patients pour les sensibiliser sur le risque de pharmacodépendance
Dans ce contexte une modification des conditions de prescription à partir de septembre 2012 sont à
prévoir, avec notamment une prescription sur ordonnance sécurisée, en toutes lettres, pour une
durée maximale de 28 jours.
Actualisation de l'enquête d'addictovigilance du Stablon (Tianeptine). CEIP de Nancy Commission Nationale des
Stupéfiants et Psychotropes. Compte rendu du 14 février 2012.
Delphine Grau, Céline Eiden & Hélène Peyrière
La déclaration d’un effet indésirable médicamenteux (EIM) ou d'une dépendance est une obligation légale qui permet
de détecter et d'évaluer la fréquence de survenue de ces effets (Décret du 13 mars 1995). Il faut considérer cette
déclaration obligatoire non pas comme une contrainte administrative, mais comme un devoir de santé publique dont
les patients et le corps médico-pharmaceutique sont les bénéficiaires directs
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