Chapitre 4 - Sciences de la Vie et de la Terre, Biologie Géologie

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Chapitre 4 : Un regard sur l’évolution de l’Homme
L’origine de l’humanité ? On sait depuis longtemps par des évidences paléontologique, archéologique et biologique,
que l’homme anatomiquement moderne, Homo Sapiens, est le résultat de l’évolution d’une des branches de l’arbre
de la vie, et qu’il a ainsi des liens de parenté avec les grands singes. De plus, le rameau humain porte plusieurs
espèces aujourd’hui disparues, telles que l’homme de Néandertal ou les australopithèques. Depuis une quinzaine
d’années, la paléontologie humaine s’est enrichie de découvertes nombreuses, associée à la paléogénétique, qui ont
fortement modifié la vision de l’évolution de l’homme.
Homo sapiens peut être regardé, sur le plan évolutif, comme toute autre espèce. Il a une histoire évolutive
et est en perpétuelle évolution. Cette histoire fait partie de celle, plus générale, des primates.
Problème posé : Comment Homo sapiens, en tant que primate, peut-il être regardé scientifiquement sur le
plan évolutif ?
I.
Quelles sont les relations de parenté entre l’Homme et d’autres primates et comment expliquer les
grandes différences phénotypiques entre l’Homme et ces primates ? TP n°6
1. L’Homme primate Hominidé
Le groupe des Primates contient toutes les espèces de Mammifères qui se distinguent par différents caractères
dérivés : le pouce de la main plus court et opposable aux autres doigts rendant la main préhensile, main et pied
possèdent des ongles (et non des griffes), yeux à orbites larges orientés vers l’avant permettant une excellente
vision, cerveau relativement important par rapport au corps avec un cortex bien développé.
L’état dérivé d’un caractère (par opposition à l’état ancestral) est celui apparu le plus récemment au cours des
temps géologiques. Les êtres vivants qui partagent un même caractère dérivé ont un ancêtre commun qui leur est
propre et qui possédait déjà ce caractère.
Le groupe des primates est actuellement peu diversifié avec seulement 190 espèces. La plupart des grands singes
sont en voie d’extinction (territoires réduits, chasse ou braconnage). Néanmoins, les premiers primates fossiles
datent de 65 à -50 millions d'années ( Darwinius masillae Ida –47 Ma). Ces fossiles sont variés et ne sont
identiques ni à l'Homme actuel, ni aux autres singes actuels. La diversité des grands primates connue par
les fossiles permet de dire que ce groupe a été diversifié et que cette diversité est aujourd’hui réduite.
Au sein des primates, l’Homme appartient au groupe des Hominidés qui contient le Gorille, le Chimpanzé (Pan
troglodytes) et le bonobo (Pan paniscus).
Tous les hominidés sont caractérisés par différentes innovations évolutives : des narines rapprochées et une
absence de queue (remplacée par le coccyx). Ils possèdent notamment des modes de locomotion variés (bipédie
imparfaite, knuckle walking …) et des aptitudes à l’apprentissage et à l’empathie (attention envers ses
congénères).
Hominoïdes
2. La proximité entre le Chimpanzé et l’Homme
a. La phylogénie moléculaire
Lorsque les critères morpho- anatomiques ne sont plus suffisants, il est nécessaire de réaliser des phylogénies
moléculaires qui sont basées sur la comparaison des séquences nucléotidiques ou protéiques. La plupart des
séquences analysées montrent que l’Homme et le chimpanzé (+/- Bonobo) sont les espèces les plus proches des
Hominoïdes et partagent un ancêtre commun récent. Malgré le grand nombre de fossiles identifiés, aucun d’entre
eux ne peut être considéré à coup sûr comme un ancêtre de l'homme ou du chimpanzé.
Chez des espèces différentes, on peut rencontrer des molécules homologues. Il s’agit de protéines ou de gènes
dont les séquences montrent des ressemblances importantes, ne pouvant être attribuées au hasard. Les espèces
possédant ces molécules doivent avoir une origine commune. On utilise les homologies moléculaires pour préciser
le degré de parenté entre les espèces : des espèces sont d’autant plus apparentées que les séquences de leurs
molécules homologues sont semblables. En appliquant ce raisonnement aux molécules d’opsines contenues dans les
cônes (1S) ainsi qu’à d’autres molécules (comme le gène BRCA1 électrophorèse TP), on confirme que l’Homme fait
partie des primates, et on démontre qu’au sein des primates hominoïdes son plus proche parent est le chimpanzé
(Chimpanzé au sens large c’est-à-dire : chimpanzé commun et bonobo).
Matrice des pourcentages de différences entre séquences d’acides aminés de la cytochrome oxydase ( enzyme
impliquée dans le chaîne respiratoire mitochondriale) de différentes espèces de primates.
Arbre phylogénétique construit à partir de la matrice des distances pour la cytochrome oxydase de différentes
espèces de primates
b. Analyse des caryotypes
D'un point de vue génétique, l'Homme (46 chromosomes) et le chimpanzé (48 chromosome) sont très proches. Les
séquences nucléotidiques comportent seulement 1,5% de différences (mutations) soit seulement 10 fois plus
qu’entre deux individus humains pris au hasard. Les différences entre les caryotypes sont expliquées simplement
par la position de certains gènes : des remaniements chromosomiques (translocation, fusion), de phénomènes de
duplications géniques (p 27 enzyme AMY1 amylase : le gène de l’amylase est présent en plusieurs exemplaires
(duplication génique) chez l’Homme notamment chez l’individu d’une population ayant un régime alimentaire
riche en amidon (sélection naturelle)), de pertes de séquences génétiques et de mutations ponctuelles.
Homme
Chimpanzé
Gorille
Orang-Outan
Homme
0
1 fusion
1 fusion
1 inversion
1 fusion
2 inversions
Chimpanzé
Gorille
0
1 inversion
0
2 inversions
1 inversion
Orang-Outan
0
Tableau des remaniements chromosomiques entre les chromosomes 2p, 2q de 3 grands singes et 2 de l’Homme
c.
La mise en place du phénotype humain ou simien
Néanmoins, ces proximités génétiques n’expliquent pas les nombreuses différences entre ces deux espèces. En
effet, le phénotype de l’Homme et du chimpanzé se construit au cours du développement pré et post- natal,
sous l’effet de différences dans la chronologie et l’intensité d’expression de mêmes gènes (hétérochronie)
en interaction avec l’environnement (dont la relation aux autres individus). Ainsi la morphologie du crâne des
fœtus humains et de chimpanzés est proche, mais au cours du développement pré et post natal, les variations de
l’expression de gènes homéotiques (s’exprimant à des moments et sur des périodes différentes au cours du
développement) modifient profondément le phénotype.
Ainsi chez Homo sapiens : crâne volumineux, face plane, mâchoire parabolique, absence de crocs, trou occipital
centré, colonne vertébrale avec quatre courbures, bassin court et large, fémurs convergents, membres inférieurs
plus longs que les membres supérieurs (chez le singe adulte mâchoires développées fortement au détriment de la
boite crânienne et ainsi modeste volume de l’encéphale (400-450 cm3). D’autre part, l’environnement joue un
rôle important dans le domaine de l’acquisition du langage (chapitre 2 p50/51 transmission culturelle des
comportements) ou des comportements comme la fabrication d’outil.
Homme seul animal à émettre des sons articulés grâce à un grand pharynx et à un larynx bas contrairement aux
singes.
Evolution du crâne de l’Homme et du
Chimpanzé lors du développement postnatal
Portrait hypothétique de l’ancêtre commun :
Possession de tous les caractères dérivés que se partagent l’homme et les chimpanzés, autour de -7Ma. Taille
moyenne de 1 m pour 30 à 40 kg. Encéphale assez développé. Faculté de se déplacer temporairement uniquement
grâce aux pattes de derrière. Vie essentiellement en milieu arboricole.
Bassins et fémurs de quelques grands primates
II.
Quels sont les caractères propres à la lignée humaine et quelles interrogations pose la reconstitution
précise de l’arbre phylogénétique du genre Homo ? TP n°8
Lignée humaine : totalité de l’histoire évolutive des hominines à partir de l’ancêtre commun chimpanzé-homme
jusqu’à l’être humain actuel, environ 7Ma.
1. Les critères d’appartenance au genre Homo
Le genre Homo regroupe l'Homme actuel et quelques fossiles qui se caractérisent notamment par une face
réduite et un angle facial presque droit, une mandibule parabolique, un dimorphisme sexuel peu marqué sur
le squelette, un volume crânien important (1400 cm3), des adaptations à la bipédie permanente et à la
course à pied avec notamment un trou occipital centré sous le crâne, la présence de courbures sur la colonne
vertébrale, bassin avec des os iliaques courts et larges pour permettre l’insertion de puissants muscles
fessiers indispensables à la station debout, des pieds à orteils courts et pouce non opposable, des bras plus
courts et des fémurs convergents vers les genoux …
La production d'outils complexes et la variété des pratiques culturelles sont associées au genre Homo, mais
de façon non exclusive. La construction précise de l’arbre phylogénétique du genre Homo est controversée
dans le détail.
2. L’existence de stades préhumains.
Les données récentes montrent que les Australopithèques (Lucy) sont les premiers représentants de la lignée
humaine et possèdent seulement une partie des critères du genre Homo. Ces fossiles ont tous été retrouvés en
Afrique (Est rift et australe) et sont datés entre -4,5 et -1 Ma. Ils sont bipèdes (possèdent les caractères dérivés
en rapport avec la bipédie : bassin court et évasé, fémurs convergents, attaches musculaires bassin identiques)
mais ont un volume crânien faible (400 cm3) et l’angle facial est aigu.
Des découvertes récentes ont prouvé que la bipédie est plus ancienne qu'on ne le pensait. Au Tchad découverte
en 1995 d'Abel (A. bahrelgazali) ; en 2001 de Toumaï (Sahelanthropus Tchadensis). Toumaï est âgé d'environ 7
Ma. La lignée humaine serait apparue entre - 7 Ma et - 10 Ma. Plusieurs espèces d'australopithèques ont coexisté.
Ils ont des caractères en commun : des bourrelets sus-orbitaires, une face allongée et un front fuyant.
A. afarensis Lucy
3. L’émergence du genre Homo
Les premiers représentants fossiles du genre Homo sont datés de -2,5 Ma et ont été découverts en Afrique. Le
genre Homo a connu une très grande diversification (Homo habilis, Homo erectus, Homo neandertalis …). La
construction précise de l'arbre phylogénétique du genre Homo est controversée dans le détail.
Homo habilis
Il est le premier du genre Homo. Il est apparu il y a 2,5 Ma et s'est éteint il y a 1,5 Ma. Apparition en Afrique de
l'Est et du Sud.
Il se distingue de l'australopithèque par :
- sa face réduite
- une capacité endocrânienne plus importante
- une dentition plus réduite
- une utilisation d'outillages lithiques
On retrouve encore des bourrelets sus-orbitaires (moins prononcés). Ils sont de petite taille et ne maîtrisent
pas encore tout à fait la bipédie.
La grande nouveauté, c’est l'utilisation systématique d'outils en pierre. Ce sont des galets sur lesquels on dégage
quelques éclats de façon à obtenir un tranchant : c'est ce qu'on appelle la culture oldowayenne (Oldovaï en
Tanzanie).
Homo erectus
Il est apparu il y a 1,9 Ma en Afrique (Nord, Sud et Est). Par rapport à Homo habilis, l’Homo erectus présente :
- une augmentation de la capacité crânienne.
- Réduction de la face (angle facial presque droit)
- Aires cérébrales associées au langage
- Dimorphisme sexuel peu marqué.
- un corps parfaitement dressé avec une bipédie parfaite.
- Des bourrelets sus orbitaires toujours prononcés
- Un menton fuyant.
L'outil utilisé par Homo erectus est plus évolué : il est taillé sur les deux faces, d'où son nom de biface ; c'est
l'industrie acheuléenne + FEU. Il quitte le berceau africain et va conquérir le Moyen-Orient, l'Asie et l'Europe.
Il construit des campements.
Comme pour de nombreux groupes d’êtres vivants, la diversification de ce groupe s’est faite sur un modèle
buissonnant. De nombreux rameaux d’espèces du genre Homo se sont formés et ces espèces ont même souvent
coexisté. C’est le cas entre Homo neandertalis et Homo sapiens qui ont coexisté entre -150 000 et – 30 000 ans.
Actuellement, on suppose que l’espèce neanderthalis s’est retrouvée fragmentée à cause des glaciations
successives en Eurasie et se seraient éteints vers -30 000 ans.
L’Homo sapiens serait également issu d’Afrique il y a environ 200 000 ans. Les modalités de l’expansion de cette
espèce sont encore soumises à de nombreux débats. Cependant, plusieurs espèces d’hominines se sont succédées
au cours du temps depuis 6 à 7 millions d’années. Il est extrêmement difficile d’établir une phylogénie précise
des hominines car elle dépend des découvertes d’ossements et d’activités qui se font au gré des fouilles et
selon le degré de conservation des vestiges. La plupart des fossiles humains ne sont connus que par un crâne ou
des fragments crâniens, calotte, mandibules et dents. Cette phylogénie est donc révisable selon les fossiles
nouvellement découverts.
Crânes et capacités crâniennes de quelques grands primates fossiles
vu des points communs entre H.sapiens et les Néandertaliens, il n’est pas surprenant que des études génétiques
aient montré l’existence de croisements entre ces deux groupes d’humains, croisements assez fréquents pour que
les génomes des non-africains actuels contiennent 1 à 4% de matériel génétique néandertalien. Et comme
différentes personnes portent différents fragments d’ADN néandertaliens, le total du matériel génétique
néandertalien qui persiste dans les populations humaines d’aujourd’hui est bien supérieur : au moins 20% selon des
calculs récents. H. sapiens s’est hybridé non seulement avec les Néandertaliens, mais aussi avec les Denisoviens
(forme identifiée via l’ADN récupéré d’un fragment d’os de doigt datant de 40 000 ans et trouvé dans une grotte
sibérienne). Ces croisements avec des hominines archaïques semblent avoir bénéficié à H. sapiens, qui a ainsi acquis
des gènes l’aidant à survivre : par exemple, de l’ADN hérité des Néandertaliens semble avoir renforcé son système
immunitaire et, une variante de gène provenant des Denisoviens aide les Tibétains à supporter les hautes altitudes.
Pour la Science novembre 2014
H.Sapie
nens
Chimpa
nzé
Art/peint
ures
H.Néanderthalensis
H.Floresien
sis
H.Habilis
Culte
des
H.Erectus
morts
Réductio
n de la
Australopith
èque
Volume crânien élevé/maitrise
du
1es outils
TOUMAI
Innovations évolutives
Innovations évolutives
non connues
Orrorin
tugenensis
??
Ancêtre commun
(7/8 Ma)
Bipédie
franche/Modifica
Vie
Données
moléculaires
Le caractère buissonnant de la lignée humaine.
feu/langage
Evolution buissonnante de la lignée
humaine (version simplifiée)
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