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ÉDITORIAL
Place du cardiologue en cancérologie
The cardiologist caring for cancer patients
Jean-Jacques Monsuez*, Jean-Jacques Blanc**
U
ne brève enquête auprès des cardiologues sur le rôle qu’ils occupent
dans la prise en charge des cancéreux
donne, par la grande similitude des réponses,
un aperçu assez général de leur implication.
Ils interviennent ainsi à divers stades de la
prise en charge, qu’il s’agisse :
– du bilan préthérapeutique avant chimiot h é ra p i e , p o u r p ré c i s e r d ’é ve n t u e l l e s
contre-indications (anthracyclines, 5-FU),
en particulier chez des malades ayant des
antécédents cardiovasculaires ;
– de la surveillance du traitement avant
l’instauration de nouvelles cures (anthracyclines) ;
– de la recherche de complications (localisations cardiaques, endocardite sur cathéter,
épanchements péricardiques, thrombose
veineuse, embolie pulmonaire).
Tous affirment aussi que l’échographie
cardiaque est le complément quasi
constant de ces évaluations, mais que
ses modalités ont peu évolué malgré le
développement des nouvelles approches
d’analyse de la fonction ventriculaire gauche.
Par ailleurs, nous avons probablement
t o u s d é j à é t é c o n f r o n t é s à l ’e x t r a ordinaire essor des nouveaux médicaments
anticancéreux que sont les antagonistes de
l’angiogenèse et autres inhibiteurs des tyrosines kinases, dont plus d’une dizaine ont
été mis sur le marché et plus d’une centaine
sont en cours de développement. En outre, les
malades qui nous sont adressés présentent
des complications qui sont elles-mêmes
nouvelles et fréquentes.
Ce constat ne suffit probablement pas, et cela
pour deux raisons. Les champs d’implications
du cardiologue, dans le domaine de l’hématocancérologie, concernent principalement la
surveillance, le dépistage, la prévention et
le traitement des complications liées aux
chimiothérapies anticancéreuses et à la
radiothérapie. Or, il semble évident que le
cardiologue ne peut se limiter à l’évaluation
de la fonction cardiaque ou à l’imagerie,
et qu’il doit avoir accès à la terminologie et aux concepts utilisés par la discipline
qui lui demande son avis. Ce qui, avec les
révolutions de la biologie du cancer et de
son traitement, l’entraîne assez loin de la
question des “facteurs de la carcinogenèse”
sur laquelle nombre d’internes ont planché
autrefois, et qui s’est clarifiée aujourd’hui
(1-4). Le concept dérivé du “chromosome
Philadelphie” est devenu un mécanisme
physiopathologique général, complexe,
extrêmement précis, dont l’inhibition par les
antagonistes des tyrosines kinases a bouleversé la chimiothérapie actuelle… mais qui
agit aussi sur les myocytes cardiaques. La
néovascularisation des tumeurs, indispensable à leur croissance, peut maintenant être
prévenue par les inhibiteurs des facteurs de
croissance, tels que le VEGF, qui eux aussi
interfèrent avec notre domaine, puisqu’ils
entraînent HTA et dysfonction ventriculaire
(4-5).
Références
bibliographiques
1. Croce CM. Molecular origins of
cancer: oncogenes and cancer.
N Engl J Med 2008;358:502-11.
2. Fröhling S. Molecular origins
of cancer: chromosomal abnormalities in cancer. N Engl J Med
2008;358:722-34.
3. Finn OJ. Molecular origins of
cancer: cancer immunology.
N Engl J Med 2008;358:2704-9.
4. Kerbel RS. Molecular origins
of cancer: tumor angiogenesis.
N Engl J Med 2008;358:2039-49.
5. Chen MH, Kerkelä R, Force T.
Mechanisms of cardiac dysfunction associated with tyrosine
kinase inhibitor cancer therapy.
Circulation 2008;117:84-95.
La seconde raison, c’est que le cardiologue
est très proche de ses malades – qu’il suit de
longue date – et que l’irruption du cancer va
l’amener à les accompagner dans toutes leurs
inquiétudes et leurs interrogations.
Ce numéro de La Lettre du Cardiologue, bâti
en partie autour de la réunion de FMC cardiologique du CHU de Brest du 15 novembre 2008,
propose donc quelques aspects de l’évolution de cette approche interdisciplinaire :
en clinique (aspects actuels du diagnostic
et du traitement des tumeurs cardiaques et
des complications thrombo-emboliques des
cancers), en imagerie, en particulier avec les
apports récents de la médecine nucléaire dans
la surveillance des malades, en radiothérapie,
avec les complications cardiaques de la radiothérapie et leur meilleure prévention par les
techniques actuelles, et en thérapeutique
médicamenteuse, avec la diversification des
complications liées aux nouvelles chimiothérapies. ■
* Consultation de cardiologie, département des maladies infectieuses et tropicales, médecine interne et addictologie,
hôpital Paul-Brousse, Villejuif.
** Service de cardiologie, CHU de Brest.
La Lettre du Cardiologue • n° 421 - janvier 2009 | 5 
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