UE6 - cours 3 Aspects sociétaux et économiques du médicament GENERALITES 2 CONSOMMATION DE MEDICAMENTS EN FRANCE Dans tous les pays développés, la consommation de médicaments progresse structurellement plus que le PIB En 2007, la consommation de soins et biens médicaux a atteint 163,8 milliards d’euros soit 2563 €/habitant, en de 4,7 % par rapport à 2006. Les médicaments correspondaient à 33,5 milliards d’euros soit 552 €/habitant (20 %) en de 4,4 % Les personnes âgées, les malades graves et les non résidents consomment le plus de médicaments Les médicaments innovants plus chers expliquent aussi cette augmentation (x 6,5 en 25 ans) 3 Grandes disparités dans le monde dans le pourcentage du PIB consacré à la santé mais aussi dans le financement de la santé PERCEPTION ET CONSOMMATION DES MEDICAMENTS: EXEMPLE DU SUJET AGE La perception du médicament conditionne l’observance thérapeutique et la consommation La perception du médicament dépend : - du niveau de compréhension du patient de l’implication des médecins prescripteurs du nombre de médicaments prescrit du désagrément rencontré (nombre, goût, taille, conditionnement) de la culture pharmaceutique Tous ces facteurs conditionnent la consommation du médicament et l’observance du traitement (respect de la prescription) L’observance est un aspect méconnu de l’échec thérapeutique, notamment chez la personne âgée Source : Leger S. et al : J. Pharmacie Clinique, 2001, vol 20, n°2 : 110-113 5 EXEMPLES D’ D’ASPECTS SOCIETAUX ET/OU ECONOMIQUE DU MEDICAMENT 6 STATINE ET PREVENTION PRIMAIRE STATINE : MEDICAMENT HYPOCHOLESTEROLEMIANT Hypercholestérolémie : • Trop de cholestérol • Facteur de risque de maladie cardiovasculaire (infarctus, etc…) Prévention primaire Faire baisser le cholestérol AVANT que la maladie ne survienne En théorie, cela devrait faire baisser la mortalité Problème • A quel prix ? • Peut-on traiter à vie une population asymptomatique (coût en France : 500 millions d’euros/an pour quelques milliers de vies sauvées) 7 STATINE ET PREVENTION PRIMAIRE (2) Nos autorités restent ambiguës Les médecins ont du mal à prescrire le traitement à bon escient Les études cliniques montrent des résultats contradictoires Les patients sont mal évalués Les études réalisées en Europe ne sont pas forcément extrapolables en France. Le surcoût pour la collectivité et la mauvaise pratique médicale sont inévitables. Au prix d’une augmentation des effets indésirables 8 Contrôle tensionnel en population : Etude des 3 cités (> 65 y, Bordeaux, Dijon, Montpellier, n=8679) Awareness, knowledge, treatment, and control of hypertension HTA (160/95) HTA (140/90) N % N % Connaissance de l’HTA HTA traitée 5389 68 6776 54 5389 80 6776 64 HTA contrôlée 4330 65 4330 31 (chez les sujets traités) J Hypertens. 2006 ;24:51-8. Le contrôle tensionnel s’améliore en Grande Bretagne Le contrôle tensionnel s’améliore en Grande Bretagne Le contrôle tensionnel s’améliore en Grande Bretagne – Pourquoi ? Devrait-on prescrire les antihypertenseurs le matin, le soir ou indifféremment ? Devrait-on prescrire les antihypertenseurs le matin, le soir ou indifféremment ? MALADIE RARE – MEDICAMENTS ORPHELINS Maladie rare : • 1 personne sur 2000 atteinte au maximum (maxi 30 000 en France) ; 230 000 en Europe des 25) • 5000 à 7000 maladies rares répertoriées soit 3-4 % des naissances, 6 % de la population européenne. • 80 % d’origine génétique, héréditaire • 35 % des décès < 1 an, 10 % entre 1 et 5 ans, 12 % entre 5 et 15 ans Exemples: • • • • Syndrome de Turner (1/2500) Myopathie de Duchenne (1/12000) Mucoviscidose (1/12000) Maladie de Creutzfeld Jacob (1/1 000 000) 15 MALADIE RARE – MEDICAMENTS ORPHELINS (2) Problème : méconnaissance des patients, famille, médecins, professionnels de santé diagnostic tardif, mauvaise prise en charge Stratégie : R & D commune de la part des industriels du médicament Cahier des charges : - Meilleure prise en charge (infos +++) - Innovation thérapeutique, recherche - Eviter l’exclusion sociale - Politique « plan maladie rare » - Référentiel Agence du Médicament +++ Règlement Européen sur les médicaments orphelins (1999) 427 dossiers examinés, 37 nouveaux médicaments 16 MALADIE RARE – MEDICAMENTS ORPHELINS (3) Médicament orphelin : • Diagnostic, prévention, traitement des maladies rares et graves (létales) • Notion économique : orphelin car peu d’intérêt pour l’industrie de les développer (peu rentable) Gouvernement et associations incitation économique pour développer les médicaments orphelins COMP : Comité pour les Médicaments Orphelins • • • • Crée en 2000 au sein de l’agence européenne (EMEA) Examine les dossiers Conseille la commission européenne Siège à Londres, 1 président, 1 vice-président, 25 membres, 3 représentants de patients, 3 membres désignées par l’Agence Européenne du médicament 17 EXEMPLE DE CAMPAGNE D’ D’INFORMATION: « LES ANTIBIOTIQUES, C’ C’EST PAS AUTOMATIQUE! » Antibiotiques : – Très nombreux médicaments – Usage courant ou spécifique Mésusage, surconsommation, automédication Sélection de bactéries résistantes Campagne d’information (2002, CNAMTS, pouvoirs publics) – La France : championne d’Europe du mésusage – Réduire la consommation d’antibiotiques et donc le coût – Cibles : les infections fréquences en ville, virales 18 EXEMPLE DE CAMPAGNE D’ D’INFORMATION: « LES ANTIBIOTIQUES, C’ C’EST PAS AUTOMATIQUE! » (2) Les messages de cette campagne: • Rhumes, angines, otites: virus • Infections virales: pas d’antibiotique • Infections bénignes de l’enfant: Idem • Pas d’effet sur la fièvre et la douleur • Vaccination +++ • Respect des prescriptions +++ • Pas d’automédication • Toxicité +++ Objectif non atteint car: • Pénicillines, macrolides • Fluoroquinolones • Résistance bactérienne continue d’augmenter (pneumocoques, tuberculose, haemophilus) 19 ACCES AUX ANTIRETROVIRAUX DES PAYS EN VOIE DE DEVELOPPEMENT (1) Enjeu international; défis multiples (Prix +++); mortalité +++ Obligation morale de mettre la trithérapie anti VIH à disposition des pays pauvres Médicaments antirétroviraux : • Chers à développer • Bon marché à produire • Protégés par des brevets • Rentabilisés dans les pays riches Intérêt de les « génériquer » et de standardiser (simplifier) les traitements 20 ACCES AUX ANTIRETROVIRAUX DES PAYS EN VOIE DE DEVELOPPEMENT (2) Mise de fonds importante (Banque Mondiale +++) • 5-10 milliards d’euros/an • 10 fois la somme de fonds ATM de lutte contre SIDA, paludisme, tuberculose Conseil national du SIDA (organisme consultatif créé en 1989) Une seule pandémie mais inégalité d’accès aux soins Mise en commun de toutes les volontés • • • • • * ** OMS, ONU SIDA OGG (FSTI*, MSF) LEEM** Associations de patients Congrès Fond de Solidarité Thérapeutique International Les entreprises du Médicament 21 ACCES AUX ANTIRETROVIRAUX DES PAYS EN VOIE DE DEVELOPPEMENT (3) Engagement de 5 firmes pharmaceutiques de baisser leurs prix Limites de la démarche • • • • • • • • Manque de transparence Place des génériques non définie Incapacité des systèmes de santé de PVD à faire face Absence de segmentation du marché du médicament par les firmes pharmaceutiques (prix selon le niveau économique) Décalage culturel en matière d’observance et de prévention Absence de volonté politique, adhésion des gouvernements Statut de la femme spécifique à chaque pays Stigmatisation des personnes contaminées 22 ACCES AUX ANTIRETROVIRAUX DES PAYS EN VOIE DE DEVELOPPEMENT (4) Limites (suite) • Crainte de marchés parallèles Sud Nord (« trafics » déjà existants) • Pertes de revenu des firmes au détriment de la recherche • Crainte du développement de fortes industries concurrentes dans les pays du Sud Cinq raisons d’agir sans délai • Mortalité croissance (4ème cause dans le monde; 2ème cause en Afrique) • Ecart Nord-Sud croissant • Echec de la prévention au Sud • Risque démographique à court terme (population jeune) • Risque de perdre la maîtrise de l’épidémie au Nord 23 LES MEDECINES ALTERNATIVES: UN PHENOMENE DE SOCIETE 24 MEDECINES ALTERNATIVES (1) Ou non conventionnelles (1990) : variété de méthodes de traitement non fondées sur une méthode expérimentale ni scientifique Selon les pays, elles sont courantes (Danemark, Allemagne, Suisse, Angleterre), tolérées (France, Espagne..) ou interdites Relation de confiance avec le patient Phénomène de société, quête croissante d’un cadre de soin hors de la médecine moderne. Pratiques non reconnues, non validées, non évaluées, non diplômées 25 MEDECINES ALTERNATIVES (2) Autres appellations : Médecine douce, complémentaire, parallèle, naturelle, holistique (« globale ») Exemple : • Acupuncture (médecine « énergétique » d’influx) • Homéopathie (soigne le terrain) • Ostéopathie (soigne le mécanique) Dissocie l’explication théorique de l’efficacité thérapeutique Serment d’Hippocrate : le médecin doit respecter le patient (état et conviction ) il peut donc utiliser une médecine alternative si nécessaire ou à sa demande. Utilisation étendue aux paramédicaux 26 MEDECINES ALTERNATIVES (3) Diversité des pratiques tentative de réglementation et de contrôle Médecines non remboursées, ne générant d’ailleurs aucune économie de santé (étude anglaise de 1999 à 2005) L’amélioration de l’état de santé du patient reste indiscernable de la guérison naturelle… Mais les médecines alternatives répondent à une lacune de la médecine allopathique en termes d’amélioration de la qualité de la vie des patients complémentaire ? 27 MEDECINES ALTERNATIVES (4) Médecine « douce » ou « naturelle » : respecte le fonctionnement naturel du corps ; utilise des techniques manuelles ou des substances naturelles non synthétiques. Compléments alimentaires, plantes, massothérapie, magnétothérapie Phénomène de société : • Recours à la nature (certains éléments « naturels » sont parfois mortels) • Respect des « traditions » (surtout chinoises ou égyptiennes) 45 – 75 % des Français utilisent les médecines douces (OMS 2002), surtout les femmes. 28 CONSEQUENCES SOCIOSOCIO-ECONOMIQUES DES EFFETS INDESIRABLES MEDICAMENTEUX 29 SOCIO--ECONOMIQUES CONSEQUENCES SOCIO DES EFFETS INDESIRABLES MEDICAMENTEUX Effets indésirables graves : • 1 à 25 % des hospitalisations • 2 à 35 % des patients hospitalisés • Prolongation d’hospitalisation Définition européenne : « évènement entraînant la mort, une hospitalisation ou une prolongation d’hospitalisation, un handicap ou une incapacité durable, une malformation congénitale ». • Evolution moyenne : 37 jours, 4 % de séquelle, 7 % de décès Etude sur 115 cas : • 13 Arrêts de travail, 9 plaintes, 5 séquelles • Coût 610 110 € soit 530 €/évènement (97 % des dépenses totales) • Coût des séquelles : 27 470 €, coût des décès 18 387 € Source : Apretna E et al. Presse Médicale, 2005, 34 : 271-76 30 Effets indésirables graves: le cas « Isoméride » Effets indésirables graves: le cas « Rimonabant » Rimonabant: depression and suicide. Prescrire Int 2009 Feb; 18(99):24. Pharmacovigilance has revealed hundreds of reports of neuropsychiatric disorders and several deaths by suicide. Effets indésirables graves: le cas « Aspirine » Effets indésirables graves: les cas Isomeride, Rimonabant, et Aspirine. • Dans les 3 cas : effets mortels • L’Isomeride et le Rimonabant ont été retirés du marché, pas l’Aspirine • Pourquoi ? • Est-ce en raison du rapport bénéfices/risques défavorable chez les 2 premiers, favorable chez le 3éme ? • Le rapport bénéfices/risques doit-il être évalué individuellement ou de façon collective ? MEDICAMENTS GENERIQUES 35 GENERIQUES : AVANTAGES ET INCONVENIENTS Principe actif : Substance pharmaceutique exerçant l’effet thérapeutique (le médicament +++). Ex. Oméprazole Spécialité : Médicament mis sur le marché sous une dénomination spéciale ou un conditionnement particulier (ex. MOPRAL®) Générique : Même composition qualitative et quantitative en principe actif, même forme pharmacocinétique, bioéquivalent à un médicament original dont le brevet a expiré (ex. Oméprazole Biogaran®, Oméprazole Arrow®, etc…). Multitude de noms commerciaux 36 GENERIQUES : AVANTAGES ET INCONVENIENTS (2) Autre exemple : Piroxicam (CDI : Substance active anti inflammatoire) Médicament breveté : FELDENE® Génériques : • Merck Piroxicam® • Piroxicam Sandoz® • Piroxicam Teva® • Piroxicam Ratsopharm® 37 GENERIQUES : AVANTAGES ET INCONVENIENTS (3) Peut-on faire confiance aux génériques ? Oui • Bioéquivalence démontrée (obligatoire) • Médicaments surveillés • Certains sont produits par la même firme que celle du produit original • Retour à la prescription en DCI (plus pharmacologue, plus scientifique mais commerciale) Mais … • Acceptation par le patient • Accompagnement difficile par les médecins/pharmaciens • Garantie de qualité (?) 38 GENERIQUES : AVANTAGES ET INCONVENIENTS (4) Les génériques tuent-ils la recherche ? Oui • Les génériques ne font pas de recherche • Réduisent l’investissement des firmes (moins chers, dont moins rentables) • Poussent les firmes vers la recherche sur les médicaments très couteux et/ou difficilement « généricables » (cancer, médicaments orphelins, biothérapies) Non • Plusieurs « génériqueurs » sont des filiales des firmes de produits originaux • L’industrie du médicament ne connaît pas la crise…. 39 CONCLUSION GENERALE Médicament: Phénomène de société Médicament: Indicateur économique Stigmatisation du décalage Nord-Sud de la planète (exemple du VIH) Effets indésirables: contribution majeure à la perception du médicament et au surcout pour la collectivité 40 MERCI DE VOTRE ATTENTION 41