Troubles du comportement chez les traumatisés crâniens Quelles options thérapeutiques ? Résumé des recommandations du groupe HAS 2012-2013 E. DURAND Journées des 25 et 26 novembre 2013 Patients concernés • Patients adultes ayant été victimes y compris dans l’enfance d’un TC et présentant des troubles du comportement • Patients TC en post-réanimation • Blessés en situation familiale • Blessés en situation institutionnelle Professionnels concernés • Médecins hospitaliers (toutes spécialités amenées à prendre en charge des TC) • Personnels soignants / de rééducation • Personnels des institutions médicosociales Classement des troubles du comportement • Perturbations des comportements primaires par excès • Perturbations des comportements primaires par défaut • Troubles du comportement secondaires à la dépression, à l’anxiété et la psychose • Tentatives de suicide et suicides Troubles cognitifs, anosognosie évoqués mais pas abordés spécifiquement Perturbations par « excès » • • • • Agitation Agressivité Irritabilité Abus et excès de consommation de substances psycho-actives • Comportements à conséquence médicolégale, délit, crime Opposition, déambulation inadaptée, déshinibition, impulsivité, cris…. Agitation • • • • Incidence moyenne : 46 % (35-70) Souvent en période post-traumatique Habituellement courte durée : 1-14 jours Facteurs facilitateurs : causes environnementales, troubles du sommeil, douleur Agressivité • = verbale, physique, contre soi, les objets, les autres personnes… • Incidence : entre 25 et 39 % selon les études • Colère et confusion fréquentes en cas de troubles exécutifs (contrôle) • Lésion pré-frontale (orbito-frontale) Irritabilité • = réactivité excessive avec accès de colère non justifié • Entre 29 et 71 % selon les études • FDR : sexe masculin, 15-34 ans, perte de travail, isolement social, dépression Abus et excès de consommation Comportement à risque, excessif, dépendant • Avant TC : 18 à 79 % consommaient de l’alcool, 10 à 44 % des drogues • Alcool au moment du TC : 31 à 51 % • Alcool et drogues après TC : Prévalence forte consommation ou dépendance (7-26 %) • FDR de consommation : sexe masculin, faible niveau d’éducation et social, consommation antérieure et dépression Comportements à conséquences médico-légale, délit, crime • Prévalence TC population carcérale supérieure à la population générale • Un ATCD de TC dans l’enfance ou l’adolescence semble associé à un risque accru de troubles psychiatriques et à un risque de criminalité Perturbations par défaut • Apathie Mais aussi athymormie, aboulie, apragmatisme… Apathie • Caractérisée par une réduction des comportements dirigés vers un but • Association entre apathie et dépression fréquente (différence = richesse des affects mobilisés) • Peut survenir à distance du traumatisme. • Entrave la rééducation et retentit sur l’autonomie au domicile, le devenir professionnel et la charge ressentie par la famille. Troubles dépressifs, anxiété et psychose • • • • • Dépression post-traumatique Anxiété Stress post-traumatique Troubles obsessionnels et compulsifs Psychose post-traumatique TS et suicide • RR de suicide après TC sévère = 3 à 4 fois celui de la population générale • Pas de preuve du lien de causalité TC/suicide • Les idées suicidaires seraient un FDR et seraient plus fréquentes en cas de dépression, anxiété et stress post traumatique. Evaluation (1) • Nécessité d’être formé • Evaluation multidisciplinaire et avec les proches • Troubles du comportement à évaluer par rapport à ce qui existait auparavant • Deux priorités : évaluer le risque suicidaire et de violence* *Dangerosité psychiatrique : étude et évaluation des facteurs de risque de violence hétéro-agressive chez les personnes ayant des troubles schizophréniques ou des troubles de l’humeur. HAS 2011. « Parler d’abord des actes de violence dont le patient aurait pu être victime pour aborder ensuite ses propres actes… » Evaluation (2) • Echelles nombreuses • Généralistes • Spécifiques : – Agressivité/agitation (agitated behavior scale) – Apathie (Apathy evaluation scale) – Colère (State-Trait Anger Expression Inventory STAXI-2) – Troubles psychiatriques (MINI) • Qualité de vie Très peu sont validées en français Techniques de soin et interventions non médicamenteuses • Spécifiques : – Approches holistiques et institutionnelles [AE] – Psychothérapies comportementales et cognitivocomportementales [AE] – Approches systémiques familiales [AE] – Psychothérapies psychanalytiques et psychothérapies psychodynamiques (limites ++) – Techniques de prise en charge à médiation corporelle (Tai Chi, Musicothérapie…) • Techniques de soins et approches relationnelles Interventions médicamenteuses • Bêta-bloquants • NRL et antipsychotiques • Anticomitiaux thymorégulateurs et autres anticomitiaux • Antidépresseurs / Benzodiazépines • Amantadine • Autres – Buspirone (Buspar®) – Agents hormonaux (medroxyprogestérone) Bêta-bloquants • Mécanisme pas clair • Propanolol permet dans certains cas d’améliorer l’agressivité après traumatisme crânien • Hors AMM • 40 à 80 mg/J • Débuter progressivement et faire ECG NRL et anti-psychotiques • Pas de preuve de leur efficacité chez le TC sévère • Urgence / Crise d’agitation : Loxapine (Loxapac®) [AE] • Jamais au long cours (plasticité cérébrale) • Rappel : abaissement du seuil épileptogène, préférer NRL atypique, risque CV Anticomitiaux thymorégulateurs et autres anti-comitiaux • Carbamazépine (Tégrétol®) et Valproate de sodium (Dépakine®) recommandés en première intention pour agitation, agressivité, irritabilité et colère • Dose : respectivement 400-900 et 1250 mg • Lamotrigine (LAMICTAL®) : agressivité (hors AMM) • Lévétiracétam (KEPPRA®) à éviter car donne des troubles du comportement et hors AMM [AE] Antidépresseurs • Action indirecte en considérant que dépression et anxiété sont des facteurs favorisants • ISRS et ISRSNA et autres antidépresseurs non imipraminiques non IMAO recommandés • On est toujours hors AMM donc évaluation au cas par cas Benzodiazépines • Pas de preuve d’efficacité • Utile parfois si on peut pas faire autrement en cas de crise • Action sur la plasticité cérébrale [AE] • A proscrire au long cours Amantadine • Pas de preuve suffisante d’efficacité • Une amélioration de l’apathie, de la prise d’initiative ou des troubles de la motivation a été rapportée dans des études de cas (300 mg) • Pas d’AMM L'amantadine, antiviral a été utilisé contre la grippe et pour la maladie de Parkinson (action : augmente libération de dopamine); en cours d'évaluation dans la récupération des traumatismes cérébraux sévères. Autres • Buspirone (Buspar®) sérotoninergique. Effet anxiolytique pourrait agir sur l’agitation : niveau de preuve faible. Etudes nécessaires [AE] • Contraceptif longue durée : Medroxyprogestérone (Depoprovera®) pour les troubles du comportement sexuel. Hors AMM / niveau de preuve faible… Stratégies de prise en charge : troubles du comportement par excès Conclusion • Ces troubles = séquelle majeure • Prise en charge difficile malgré diversité des thérapeutiques proposées • Faible efficacité • Conséquences majeures pour l’entourage et les patients (désinsertion, psychiatrisation…)