Sébastien COULETTE Master 2ème année Foresterie, Agronomie et Génie de l’Environnement Spécialité Conservation et Restauration des Ecosystèmes Rapport de stage, Août 2007 Proposition d’une cartographie de réseau écologique régional pour la Franche-Comté Encadrement : Université Nancy 1 : Daniel EPRON DIREN Franche-Comté : Arnaud PIEL Source des images, de gauche à droite : Google image Document DIREN FC J Carsignol Remerciements Je tiens à remercier, en premier lieu, Monsieur le Directeur Régional de l’Environnement de Franche-Comté ainsi que les chefs du Service du Développement Durable, de l’Evaluation Environnementale et des Paysages (SDDEP) et du Service des Milieux Naturels Aquatiques et Terrestres (SMNAT) pour m’avoir donner l’opportunité de réaliser ce stage dans d’excellentes conditions. Mes remerciements vont également à mon encadrant, Arnaud PIEL, chargé de mission à la DIREN Franche-Comté, qui m’a suivi dans la bonne humeur tout au long de ce stage et avec lequel j’ai énormément appris. J’exprime également ma gratitude à tous ceux qui ont participés en répondant à mes nombreuses questions dans le but d’améliorer mon rendu : Jean Christophe Weidman de la LPO, Virginie Croquet chargée de mission à l’ONCFS et les membres de l’ONCFS 25, Charlette Chandosné de la FDCFC, et enfin Luc Terraz et Sandrine Pivard respectivement chargé de mission et chef du SMNAT. Merci aussi à Sylvain Lethuillier (vacataire) et Alain Moustache (cartographe) qui ont accompli un travail remarquable au niveau de la mise en forme des cartes. Plus généralement, merci à l’ensemble du personnel de la DIREN Franche-Comté qui a contribué à ce que ce stage se déroule dans des conditions idéales. SOMMAIRE SOMMAIRE .............................................................................................................................. 1 Introduction ................................................................................................................................ 2 Présentation de la DIREN de Franche-Comté........................................................................ 3 Contexte et objectifs du stage................................................................................................. 3 Présentation du site d’étude : la Franche-Comté.................................................................... 4 1. Méthodes ............................................................................................................................ 6 1.1. Vocabulaire lié à l’écologie du paysage..................................................................... 6 1.2. Cartographie et tracé du réseau écologique................................................................ 7 1.2.1. Mise en forme des cartes pour interprétation ..................................................... 7 1.2.2. Tracé des corridors et positionnement des points de conflit .............................. 8 1.2.3. Hiérarchisation des éléments constitutifs du RER ............................................. 9 1.2.4. Echelle de travail ................................................................................................ 9 1.2.5. Consultation ..................................................................................................... 10 2. Résultats ........................................................................................................................... 11 2.1. Effets de la hiérarchisation....................................................................................... 11 2.2. Cartographie du réseau écologique de Franche-Comté............................................ 11 3. Discussion ........................................................................................................................ 15 3.1. Discussion autour des décisions prises pour la méthodologie ................................. 15 3.1.1. Espèces utilisées pour l’interprétation des cartes ............................................. 15 3.1.2. Connexion et délimitation des zones nodales .................................................. 16 3.1.3. Efficacité du positionnement des corridors ...................................................... 17 3.2. Interprétation des cartes de synthèse du réseau écologique ..................................... 18 3.2.1. Tendances générales et principaux enseignements de la consultation ............. 18 3.2.1.1. Grands obstacles....................................................................................... 18 3.2.1.2. Passages faunistiques ............................................................................... 19 3.2.2. Le continuum forestier : enjeux et gestion ....................................................... 21 3.2.3. Le continuum agriculture extensive : enjeux et gestion................................... 24 3.2.4. Le continuum aquatique : enjeux et gestion..................................................... 26 3.2.5. Mesures de protections et précautions à prendre pour les 3 continuums ......... 28 Conclusion................................................................................................................................ 29 Bibliographie............................................................................................................................ 30 1 Introduction La convention sur la diversité biologique établie lors de la conférence de Rio en 1992 vise à stopper la destruction des habitats naturels et des écosystèmes et invite les pays contractants à élaborer des stratégies nationales. De plus, les pays membres de l’Europe ont adopté en 1995 une stratégie paneuropéenne pour la diversité biologique et paysagère validant ces objectifs et réaffirmant plus tard la nécessité « d’enrayer la diminution de la biodiversité à l’horizon 2010 et au delà » (Lieutaud, 2007). Or, à l’échelle mondiale, la destruction des habitats et la fragmentation des milieux, la plupart du temps d’origine anthropique, ont été identifiés comme étant les principales menaces pesant sur la biodiversité (Conférence de Rio, 1992 ; Bennett et Mulongoy, 2006) et la durabilité des populations (Baghli, 2006). A long terme, il est insuffisant de maintenir la biodiversité dans des milieux naturels certes protégés, mais isolés les uns des autres (OFEFP, 2001 ; Bennet, 2002). La connexion des habitats, par l’intermédiaire de corridors écologiques*, joue un rôle important dans la viabilité des espèces (Hargrove et al, 2005). Les notions de corridor et de réseau écologique* sont conséquents de la théorie de la biogéographie des îles (Maccarthur et Wilson, 1967 dans Riecklefs et Miller, 2005), du concept de métapopulation (Levins, 1969 dans Riecklefs et Miller, 2005) et d’écologie du paysage (bennett, 2004). Les bénéfices directs et indirects des corridors interviennent dans les domaines de : - l’écologie (principalement sur le long terme) : o En facilitant les déplacements des espèces afin de répondre à l’ensemble de leurs besoins vitaux (Spinelli-Dhuicq, 2005) ; o En augmentant les effectifs par immigration dans une population en déficit démographique (Bennett, 1999 dans Vuilleumier, 2003) ou même en favorisant les recolonisations d’habitats perturbés ou inoccupés (« rescue effect ») (Burel et Baudry, 1999 ; Hargrove et al, 2005) ; o En maintenant les flux génétiques (Bennett, 2004) et donc en diminuant l’érosion génétique qui revêt 2 aspects (Rieckelf et Miller, 2005 ; SETRA, 2005) : La consanguinité, qui caractérise la reproduction entre individus apparentés. Ses conséquences sont la hausse de la mortalité juvénile, la diminution de la fertilisation et une plus grande sensibilité aux agents pathogènes ; la dérive génétique qui survient lorsque l’effectif est trop réduit. La perte d’allèles diminue le pourcentage de gènes polymorphiques et le taux d’hétérozygotie. Ce second aspect est toutefois moins sensible chez les espèces de type r (fécondité élevée, durée de vie courte, maturité précoce, régime alimentaire généraliste) que celles de type K (le contraire) (Rieckelfs et Miller, 2005). D’après les faits énoncés précédemment, les chances de survie des espèces menacées et des espèces spécialistes seront ainsi augmentées (Bennett et Mulongoy, 2006 ; SETRA, 2005). - l’économie, l’écologie du paysage et la pédagogie : o En aidant à la création de « réseaux verts et bleus » ou « infrastructures vertes et bleues » qui mettent en valeur le patrimoine à la fois au niveau biologique mais aussi paysager, favorisant ainsi la qualité du cadre de vie et l’attractivité des agglomérations (DIREN FC, 2002) ; o En donnant des bases de travail pour les nombreuses études traitant des continuités écologiques, procurant ainsi un gain de temps non négligeable ; o Egalement en facilitant la communication sur notre vision qualitative du territoire régional à tous les partenaires par le biais d’une représentation cartographique claire. - la sécurité routière et la santé publique : en permettant une visualisation par cartographie des secteurs à risque pour la circulation automobile et ainsi disposer * Les termes suivis d’un astérisque sont définis en 1.1. 2 judicieusement les panneaux de signalisation. En Isère, il a été démontré qu’autant de chevreuils sont tués par les collisions avec les véhicules que par la chasse (Berthoud et Le Chartier, 2001). C’est dans ce contexte que la Direction Régionale de l’Environnement de FrancheComté (DIREN FC) a lancé une vaste étude visant à mettre en évidence les continuités écologiques dans les paysages ; ceci apparaît aujourd’hui comme indispensable pour limiter et contrer les effets néfastes de la fragmentation. Présentation de la DIREN de Franche-Comté Les DIREN sont des services du Ministère de l’Ecologie, du Développement et de l’Aménagement Durables. Créées en 1992 et placées sous l’autorité du préfet de département, elles ont pour principales missions de : - connaître l’environnement pour mieux le protéger, le gérer et le mettre en valeur. - veiller au respect des lois et règlements relatifs à divers aspects environnementaux. - prendre en compte l’environnement dans les politiques de planification. - promouvoir un partenariat actif avec les collectivités territoriales - Sensibiliser à l’environnement tout type de public. - Soutenir les initiatives tendant vers le développement durable. La DIREN de Franche-Comté emploie 43 personnes réparties en 4 services : Le Secrétariat Général, le Service de l’Eau et des Risques Naturels, le Service du Développement Durable, de l’Evaluation Environnementale et des Paysages et le Service des Milieux Naturels Aquatiques et Terrestres (SMNAT), dans lequel mon stage s’est effectué. Le SMNAT supervise le projet mais travaille en étroite collaboration avec d’autres services sur les aspects d’évaluation environnementale ou encore d’urbanisme. Contexte et objectifs du stage Depuis quelques années, la DIREN FC œuvre à la définition du réseau écologique régional. La région Franche-Comté, espace intermédiaire entre le monde rhénan au nord et la liaison rhodanienne au sud, mais également espace d’articulation entre les massifs des Vosges et les massifs jurassiens et alpins, a un rôle pivot dans la préservation et le développement de la diversité biologique à l’échelle européenne. Depuis 2000, les réflexions et les études se sont succédées tant au niveau régional qu’au niveau national et européen, avec notamment des réalisations de réseaux dans certains pays d’Europe (synthétisées par Bennett et Mulongoy, 2006), ce qui a permis d’accumuler les expériences constructives. En 2003, c’est une approche cartographique par modélisation qui est retenue. Les années qui suivront seront consacrées aux paramétrages et au choix des espèces, pour aboutir en 2006 à des cartes de coût-déplacement de 3 grands groupes faunistiques terrestres inféodés respectivement aux milieux forestier, d’agriculture extensive et aquatique. Les valeurs de coût-déplacement sont déterminées par la résistance plus ou moins forte du milieu aux mouvements des individus dans la mosaïque paysagère. Ces valeurs sont donc propre à chaque espèce. Mais, ne parvenant pas à définir des guildes d’espèces plus spécifiquement adaptées à la Franche-Comté pour ces continuums*, il a été choisi de reprendre les bases d’autres expériences comme le Réseau Ecologique Départemental de l’Isère (Berthoud et La Chartier, 2001). Ce paramétrage est celui retenu par de nombreuses autres applications en cours (Berthoud et al, 2004 ; DIREN Rhône-Alpes, 2005 ; PNR, 2005). * Les termes suivis d’un astérisque sont définis en 1.1. 3 On retrouve entre autre l’emploi de Corine Land Cover comme base de donnée pour la réalisation de ces cartes et ce sont habituellement sur les mêmes continuums que portent les études. Il ne sera pas discuté dans ce rapport de la méthodologie et du paramétrage des coûts déplacement de chaque espèce retenue en 2006. Pour plus d’informations, il est recommandé de consulter le rapport de stage de Ponchon F (2006). Un objectif final de la cartographie du réseau écologique de Franche-Comté est d’apporter une aide à la décision pour les politiques publiques et les aménagements d’infrastructures (ORGFH, 2006) et ainsi tenir compte des enjeux environnementaux en amont des projets d’urbanisme. Pour se faire, il sera obligatoire que cette réflexion à l’échelle régionale puisse se décliner à une échelle plus locale, pour que le passage de la faune et donc sa sauvegarde à long terme soient intégrés dans les schémas de cohérence territoriale (ScoT) voire les plans locaux d’urbanisme (PLU). Les objectifs de ce stage sont de : - définir des hypothèses de corridors à partir des cartes de coût déplacement en déterminant les emplacements d’éventuels points de conflit (sont différenciés les goulets d’étranglement* et les obstacles*) aux passages des groupes faunistiques ciblés. - hiérarchiser ces éléments constitutifs du réseau écologique franc-comtois, suivant une méthodologie bien définie et reproductible, afin de déterminer les secteurs qui ont le plus enjeux pour le déplacement de la faune et plus largement pour la conservation des espèces. - consulter, par la suite, les experts ayant une très bonne connaissance du terrain pour recueillir leurs avis sur la fonctionnalité des corridors principaux et sur les différentes étapes de la méthodologie. - synthétiser et interpréter les résultats obtenus grâce à la modélisation et aux dires d’experts pour proposer une cartographie du réseau écologique régional au 125000ème et décrire les points forts et les faiblesses de la méthodologie en vue d’une amélioration future. - formuler des premières propositions d’aménagement, et déterminer un ordre de priorité pour les actions à mener afin de perfectionner le réseau écologique après ce stage. Présentation du site d’étude : la Franche-Comté Structuré par l’eau et le relief, l’espace franc-comtois possède une morphologie très contrastée, qui est liée à l’omniprésence des formes karstiques. Les 2 principaux massifs, les Vosges au nord et le Jura au sud-est encadrent les plaines et bas plateau, qui s’ouvrent largement vers le sud-ouest en direction des plaines de la Saône et se resserrent dans la trouée de Belfort. Divisé en 4 départements (Doubs, Haute Saône, Jura, Territoire de Belfort), la Franche-Comté est l’une des plus petites régions françaises tant par sa population (environ 1 117 000 habitants, recensement de 1999) que par sa superficie (16202 km2). La population y est inégalement répartie : sur fond de densité faible, de 20 à 30 habitants par km2, émergent quelques espaces plus fortement peuplés et industrialisés, comme les aires urbaines de Belfort-Montbéliard et de Besançon. Inversement, on trouve des zones particulièrement faibles démographiquement dans le nord ouest de la Haute Saône et le sud du Jura. L’agriculture occupe 46% du territoire régional, une plus forte intensification étant observée à l’ouest de la région et la forêt, qui couvrent 42% du territoire, constitue un élément majeur de l’environnement franc-comtois. La figure 1 est une carte présentant les principales infrastructures et l’hydrologie de la Franche-Comté qui aidera à se repérer tout au long du rapport. * Les termes suivis d’un astérisque sont définis en 1.1. 4 Figure 1 : Carte représentant les zones bâties, les principales infrastructures et l’hydrographie de la région Franche-Comté 5 1. Méthodes 1.1. Vocabulaire lié à l’écologie du paysage L’écologie du paysage est une science en perpétuelle évolution, ce qui a induit une très grande diversité dans les approches et les définitions des différents termes utilisés pour caractériser les éléments constitutifs du réseau écologique. En Franche-Comté, notre définition de ce vocabulaire, tel que nous l’avons employé pour la rédaction de ce rapport, s’est basée sur la figure 2. Figure 2 : Schéma représentant des principaux éléments constitutifs d’un réseau écologique. Le réseau écologique, que nous définissons comme un assemblage cohérent d’éléments naturels et semi-naturels du paysage qu’il est nécessaire de conserver ou de gérer afin d’assurer un état de conservation favorable des écosystèmes, des habitats, des espèces et des paysages. Il comprend : - des zones nodales représentant les principaux écosystèmes naturels ou semi-naturels et hébergeant des populations viables d’espèces importantes ou menacées. Ce sont des zones consacrées essentiellement à la préservation de la biodiversité et bénéficient de ce fait généralement d’un statut de protection. - des corridors écologiques qui sont des milieux assurant une liaison fonctionnelle entre 2 zones favorables aux développements des espèces cibles. Dans notre analyse, nous distinguons : o des corridors principaux qui permettent la liaison, sur de grandes distances, de zones nodales. Ils peuvent couvrir plusieurs dizaines ou centaines de kilomètres et 6 répondent à des enjeux sur le long terme (échanges génétiques, changements climatiques…) mais aussi de court terme pour le déplacement d’espèces à forte mobilité. o des corridors secondaires qui ne participent pas directement à la mise en connexion de zones nodales. Certaines espèces ont des besoins en surface beaucoup plus réduits et le maintien de petits corridors peut suffire à garantir, au moins à court et moyen terme, le développement des populations. Ils peuvent notamment jouer un rôle important dans le désenclavement des milieux naturels menacés d’isolement et/ou améliorer le cadre de vie en rapprochant la nature de milieux fortement anthropisés. - des points de conflit qui regroupent : o les goulets d’étranglement : zones où les corridors écologiques identifiés sont de moindre largeur. Ces zones d’étranglements sont souvent menacées par une disparition ou altération de milieux naturels favorables aux déplacements des espèces (exemple : intensification de l’agriculture), soit directement par l’urbanisation. o Les obstacles qui caractérisent les secteurs infranchissables et entraînent ainsi une rupture de fonctionnalité des corridors. Un continuum écologique est un ensemble de milieux favorables à un groupe d’espèces. Il est composé de plusieurs éléments continus (sans interruption physique) incluant : - une ou plusieurs zones nodales (comme définie précédemment) - les zones d’extension, qui contrairement aux zones nodales, ne constituent des espaces vitaux que partiellement suffisants pour l’accomplissement des phases de développement d’une population. - les zones de coût déplacement faible/moyen/fort partiellement ou temporairement utilisées par le groupe spécifique considéré. A noter que pour le continuum aquatique, nous avons distingué des zones de connexions biologiques c’est à dire des espaces fonctionnels d’échanges biologiques permettant le maintien des biodiversités locales (Ménard et Clergeau, 2001). A l’intérieur de ces zones, on considérera la continuité comme totale. 1.2. Cartographie et tracé du réseau écologique Les grandes étapes de la méthodologie employée en Franche-Comté sont analogues à celles qui ont conduit à la création du Réseau Ecologique Départemental de l’Isère (REDI) (Berthoud, 2001). Plusieurs études se sont également basées sur les travaux du REDI pour développer leur méthodologie (DIREN Rhône-Alpes, 2005 ; PNR, 2005). L’interprétation des cartes brutes issues des calculs de modélisation a nécessité une méthodologie en plusieurs étapes. 1.2.1. Mise en forme des cartes pour interprétation Pour chaque continuum sont différenciées (Berthoud, 2001 ; Berthoud et al, 2004 ; François et al, 2006) : - Les zones nodales : périmètres d’inventaire et de protection dont l’occupation du sol est favorable au continuum étudié. On trouve les zones Natura 2000, Zones de Protection Spéciales (ZPS) et Zones Importantes pour la Conservation des Oiseaux (ZICO), Zones Naturelles d’Intérêts Ecologique Faunistique et Floristique de type 1 (ZNIEFF1), Arrêté de Protection de Biotope (APB), Réserve Naturelle (RN), Réserve Naturelle Volontaire (RNV), Forêt de Protection et Zones Humides. Les ZNIEFF 2 n’ont pas été retenues car les périmètres ont été considérés comme trop peu restrictifs. 7 - les zones d’extensions : zones dont l’occupation du sol est favorable mais non recensées en temps que périmètres d’inventaire et de protection. - les zones de coût déplacement faible et moyen regroupées en une seule classe pour plus de lisibilité. - les zones de coût déplacement fort qui facilitent l’identification des étranglements. 1.2.2. Tracé des corridors et positionnement des points de conflit Notons tout d’abord que le terme « points de conflit » regroupe à la fois les obstacles à la fonctionnalité d’un corridor, et les étranglements qui n’entravent en théorie pas cette fonctionnalité. Outre ceux dus à l’anthropisation des milieux, des obstacles naturels tels que les falaises et les rivières sont spécifiés sur les cartes brutes. De plus, imperceptible par la modélisation, l’altitude peut également constituer une barrière naturelle. Néanmoins d’après Berthoud et al (2004), ceci n’est vrai qu’à partir de 2100 m d’altitude. Ainsi il n’en a pas été tenu compte en Franche-Comté, le plus haut sommet de la région étant le Crêt Pela (Jura), culminant à 1 495m. Pour chaque continuum, ont été tracés tous les corridors possibles en prenant soin d’indiquer les points de conflit. A ce stade, même les milieux d’intérêt faunistique relativement faible sont interconnectés et valorisés (Berthoud et al, 2004), on ne se limite pas à connecter entre elles les zones nodales. Ces tracés sont réalisés grâce au logiciel de traitement SIG Mapinfo (version 7.8) et l’acquisition à l’écran s’est faite au 1 500ème. Les fiches de présentation des métadonnées des principales tables Mapinfo sont disponibles en annexe 1. Sur les cartes proposées, il faut considérer le tracé des corridors fait à partir de la modélisation comme « une moyenne de ce qui peut se passer dans la réalité ». En effet un animal n’empruntera jamais exactement le trajet proposé, mais il fera des écarts dans les zones d’extension, et aussi dans les zones de coût déplacement faible, moyenne voir forte. Il sera nécessaire de raisonner de manière analogue pour les obstacles positionnés le long des infrastructures routières, ils peuvent être parfois déplacés de plusieurs kilomètres le long de la route. Il est essentiel de les interpréter comme des indications des secteurs où il serait intéressant de voir passer un corridor faunistique, comme l’explique la figure 3. Figure 3 : Schéma explicatif de la méthodologie de positionnement des corridors et des points de conflit. 8 Etant impossible de vérifier tous les secteurs potentiellement problématiques pour le passage de la faune, une hiérarchisation des corridors et des points de conflit s’est imposée. 1.2.3. Hiérarchisation des éléments constitutifs du RER La hiérarchisation répond à un double objectif (François et al, 2006) : - faciliter la consultation d’expert et d’éventuelles vérifications de terrain en limitant leurs nombres par sélection des secteurs ayant le plus fort enjeu écologique. - définir une première priorité d’action pour les corridors. Elle s’est opérée dans un premier temps sur les corridors puis dans un second temps sur les points de conflit positionnés le long des passages considérés comme ayant une grande importance d’un point de vue écologique. Pour se faire, les 3 cartes de continuum pour la Franche-Comté ont été imprimées au 125000ème et les critères suivants ont servi d’aide à la décision : - Les interconnexions de zones nodales ont et doivent constituer une priorité (Berthoud et al, 2004). Pour le continuum aquatique, il a été considéré que relier les zones de connexions biologiques les unes aux autres était de la même importance que pour les zones nodales. Ces corridors seront considérés comme prioritaires et une présomption de rupture de continuité perçue grâce à la modélisation entraînera un fort intérêt pour une vérification terrain ou au moins pour l’instant une consultation d’expert. - Le nombre de points de conflit potentiels influe également sur la hiérarchie des corridors : on privilégiera les voies de passages ayant le plus faible nombre possible d’obstacles et d’étranglements. - Plus le nombre de corridors secondaires (« itinéraire bis ») augmentera, plus le degré de hiérarchisation des points de conflit diminuera. Notons également que des regroupements de plusieurs points de conflit ont été effectués, afin de limiter le travail de consultation. Par exemple, la présence de passages à faune le long des autoroutes n’a fait l’objet que d’une seule question puisque leurs localisations sont supposés être connus des experts. La Ligne à Grande Vitesse (LGV) constitue en théorie une barrière infranchissable au même titre que les autoroutes car entièrement grillagées (OFEFP, 2001). La localisation cartographique des viaducs et des 70 aménagements faunistiques prévus le long de la LGV Branche est (données : Réseau Ferré de France), a été prise en compte en plus de la modélisation dans nos propositions de corridors écologiques. Par ailleurs, il est courant de considérer que les aménagements favorables à la grande faune le sont aussi pour la petite faune (SETRA, 2005), mais il sera nécessaire d’avoir confirmation du bon fonctionnement de ces passages. 1.2.4. Echelle de travail En 2006, les cartes de coût déplacement ont été réalisées sur la base de Corine Land Cover (100 000ème) améliorée par apport d’autres données, principalement sur les falaises, vergers et les zones humides. Au final, il sera considéré qu’en dessous du 50 000ème, un biais trop important sera introduit entre la modélisation et la réalité du terrain (com. pers, ONCFS 25). Pour la hiérarchisation des éléments du réseau écologique, l’échelle de travail qui a été retenue est le 125 000ème, d’une part pour ne pas inclure de biais en travaillant à une échelle 9 trop fine et d’autre part pour des raisons pratiques (possibilité d’imprimer les cartes de la Franche-Comté en 2 feuilles de format A0). 1.2.5. Consultation La consultation a permis de recueillir les avis de : - la Ligue de Protection des Oiseaux (LPO) par l’intermédiaire du directeur Jean Christophe Weidman qui est intervenu sur les aspects méthodologiques. - l’Office Nationale de la Chasse et de la Faune Sauvage (ONCFS). Seul le service départemental du Doubs (25) a été en mesure de donner son avis, notamment sur les points de conflit connus dans ce département. - la Fédération Régionale des Chasseurs de Franche-Comté (FRCFC) qui, grâce à leur très bonne connaissance de l’espace naturel franc-comtois, a répondu de manière complète à l’ensemble des questions sur le continuum forestier et agriculture extensive. - Luc Terraz, chargé de mission au SMNAT et qui a une grande connaissance de ce sujet au niveau méthodologique et du terrain. Sans oublier les nombreux autres commentaires des chargés de mission de la DIREN FC. Le but a été de valider ou non les hypothèses de corridors présentées à partir de la modélisation et ainsi d’affiner la proposition de réseau. Le format de la consultation est un courrier standardisé présentant la méthodologie, les objectifs poursuivis et une série de questions plus ou moins générales sur les points de conflit identifiés pour les 3 continuums (Annexe 2). Les réponses et les suggestions apportées permettront, dans le cadre de ce stage, d’élaborer une cartographie différenciant 3 types de corridors (François et al, 2006) : - les corridors fonctionnels à conserver. - les corridors partiellement fonctionnels à restaurer. - les corridors non fonctionnels à recréer. 10 2. Résultats 2.1. Effets de la hiérarchisation La figure 4 montre que la sélection des points de conflit estimés comme étant importants pour la consultation a été menée de manière radicale. Tout confondu, seulement 226 sur les 893 points de conflit répertoriés ont fait l’objet de questions, soit environ seulement un quart. A noter que ces chiffres ne tiennent pas compte de la multitude d’obstacles induits par la LGV, les autoroutes et les rivières/falaises. Figure 4 : Nombre de points de conflit hiérarchisés par continuum selon leur intérêt pour la consultation. 2.2. Cartographie du réseau écologique de Franche-Comté Les figures 5, 6 et 7 sont les cartes de synthèses de la proposition de réseau écologique pour les 3 continuums. Pour des raisons de lisibilité, y figurent exclusivement les corridors principaux et les points de conflit testés lors de la consultation (en rouge sur le graphique ci dessus). Les contours des cartes correspondent à un « buffer » de 10 km autour des limites administratives. Des cartes plus détaillées et permettant une meilleure visualisation des différentes étapes sont disponibles en annexe 3, 4 et 5. A l’inverse, les annexe 6, 7 et 8 sont des représentations schématiques de la proposition du réseau à but de communication. 11 Figure 5 : Carte du réseau écologique de Franche-Comté pour le continuum forestier avec les grandes infrastructures de transport. 12 Figure 6 : Carte du réseau écologique de Franche-Comté pour le continuum agriculture extensive avec les grandes infrastructures de transport. 13 Figure 7 : Carte du réseau écologique de Franche-Comté pour le continuum aquatique avec les grandes infrastructures de transport. 14 3. Discussion 3.1. Discussion autour des décisions prises pour la méthodologie Selon Berthoud (2001), un réseau écologique, construit avec une méthodologie du type de celle utilisée pour la Franche-Comté, reste « une abstraction théorique d’un phénomène très complexe, mais procure un modèle satisfaisant dans la mesure où il permet d’expliquer une majorité d’échanges et d’évolutions dans les populations observées ». Avant de discuter des résultats, il est indispensable de cerner les intérêts et les limites de la méthodologie, qui auront inévitablement des répercussions sur l’analyse des cartes. 3.1.1. Espèces utilisées pour l’interprétation des cartes A l’heure actuelle, la modélisation mise en place par la DIREN Franche-Comté pour le réseau écologique ne porte que sur les déplacements terrestres. Les espèces d’oiseaux ou d’insectes devront faire l’objet d’autres approches car les déplacements de ces individus ne tiennent pas forcément compte de contraintes comme l’urbanisation, le réseau routier ou encore l’engrillagement (Spinelli-Dhuicq et al, 2005). Il a été jugé que les coûts de déplacements de ces espèces étaient décrits par un trop grand nombre de paramètres pour être inclus pour l’instant dans une étude à l’échelle régionale. Même conclusion pour les espèces végétales, ne serait ce parce que leur capacité de dispersion dépend de facteurs abiotiques trop complexes à quantifier et que les déplacements s’appréhendent sur un pas de plusieurs années. D’une manière générale, c’est le manque d’information sur les potentiels de dispersion des espèces dans la matrice paysagère qui nous oblige à restreindre nos objectifs lors de la modélisation : sans valeurs de résistance du milieu pour une espèce cible, pas de calculs de coûts-déplacements. Cependant, notre proposition de réseau mériterait d’être enrichie en explorant des méthodes différentes de celle retenue pour les 3 continuums déjà présentés. Nous pourrions y inclure (Berthoud, 2006 ; Birard, 2006) : - un continuum thermophile : les espèces cibles seraient les lépidoptères, orthoptères et une partie des reptiles. Etant donné l’étendue limitée et la spécificité des milieux concernés, c’est une approche à dire d’expert qui serait retenue, avec toujours le même objectif d’identifier les principaux points de conflit et corridors, conditionnant le maintien et le développement de populations sur le long terme. Afin de délimiter le continuum thermophile, nous pouvons imaginer une cartographie construite en utilisant les bases de données (assez complètes) répertoriant les espèces d’orchidées indicatrices de ce type de milieux. Une fois les zones nodales localisées, la méthode différerait de celle utilisée pour les autres continuums, les connaissances à propos des coûts déplacements des groupes faunistiques thermophiles se révélant insuffisantes. La bibliographie à ce sujet nous renseigne surtout sur les principaux obstacles à ces déplacements, par exemple les zones d’agricultures intensives et les routes bitumées pour les lépidoptères. Le résultat obtenu prendrait la forme d’une carte semblable à celles acquises pour les 3 autres milieux, où seraient distinguées les zones nodales, les secteurs infranchissables et un regroupement des zones d’extension et des zones de coûts déplacements faibles/moyens/forts. Une autre piste mériterait d’être explorée au travers des travaux menés par Hanski et Thomas (1997) et Baguette et al (2000). - un continuum aquatique pour la faune piscicole. Cet ajout semble plus délicat, de part le fait que la diversité faunistique à l'intérieur un cours d'eau est fortement liée à la diversité des habitats et à la qualité des cours d'eau. Les obstacles à la fonctionnalité des corridors pourraient être localisés en répertoriant les portions de cours d’eau les plus pollués où pouvant constituer une barrière thermique, les seuils et les barrages. Il serait intéressant de 15 consulter les recensements d’obstacles produits par l’office national de l’eau et des milieux aquatiques (ONEMA) et par l’Agence de l’eau. Par ailleurs, le réseau aquatique est le résultat obtenu le plus critiquable, ceci pour 2 raisons principales : - la qualité des cours d’eau n’est pas prise en compte. Pourtant, les possibilités de déplacements et de survies des espèces aquatiques y sont fortement corrélées. Par exemple, la répartition de la loutre dépend trop de la qualité des cours d’eau pour affirmer que les corridors tracés sur le continuum aquatique lui seront utiles. Autre illustration, la rivière « l’Arne » qui longe une portion de l’A36 et qui est très fortement polluée : la modélisation laisse apparaître une continuité, mais on peut se poser des questions sur la fonctionnalité de ce corridor aquatique… - plus une espèce a une dispersion lente, plus ses déplacements devront être cartographiés de manière détaillée (Burel et Baudry, 1999). Ainsi il est légitime de se demander si notre large échelle de travail, qui est la même pour ce continuum que pour les 2 autres, permet d’obtenir des résultats suffisamment représentatifs de la réalité. En effet, les échanges d’individus entre 2 zones nodales, pour les espèces d’amphibiens et de reptiles aquatiques, s’effectueront plutôt localement qu’à une échelle régionale. Cependant, c’est pour un raisonnement à long terme que cette approche semble justifiée : les individus se déplacent de zones humides en zones humides (jamais plus de quelques centaines de mètres de dispersion), qui seront alors qualifiées d’habitats « relais », ceci éventuellement sur plusieurs générations. 3.1.2. Connexion et délimitation des zones nodales Etant donné que pour chaque continuum toutes les hypothèses de corridors possibles ont été cartographiées, il sera possible de tester la connectivité globale du paysage, indépendamment de sa valeur écologique, avantage que l’on retrouve dans le Réseau Ecologique National Suisse (Berthoud et al, 2004). On ne se limite pas à interconnecter les zones nodales. La délimitation de ces zones nodales soulève 2 problèmes : - Nous n’avons tenu compte que des sites actuellement protégés mais pas de ceux qui vont être protégés dans un avenir proche, ni de ceux qui mériteraient un statut de protection mais n’en n’ont pas (par exemple le Doubs le long de la frontière franco-suisse). Pour y remédier, des travaux actuellement en cours (sous forme d’un stage) sur la mise en réseau et l’extension des sites Natura 2000 ont été consultés, afin que les corridors soient considérés comme prioritaires dans ces « nouveaux » secteurs à forts enjeux environnementaux. - La taille minimale des secteurs de protection pour détecter les zones nodales a fait l’objet de travaux (OFEFP, 2001 ; SETRA, 2005). Mais nous avons choisi, pour des questions techniques et de temps, de ne pas tenir compte de cet aspect. Un exemple qui illustre bien ce facteur est la fragmentation des taches d’habitat du lièvre : lorsque le biotope du lièvre se réduit, sa densité diminue ; si la surface est inférieure à 30 ha, il disparaît (SETRA, 2005). Cependant, même si elle est trop petite pour assurer l’ensemble des processus vitaux d’un individu, elle jouera tout de même le rôle très important de zone relais. Il reste donc essentiel d’y faire passer les corridors. Il demeure toutefois correct de privilégier les liaisons entre les grandes zones nodales. 16 3.1.3. Efficacité du positionnement des corridors D’une manière générale, le positionnement des corridors n’a pas rencontré de difficultés majeures. La modélisation permet de distinguer des continuités invisibles à l’œil nu sur une carte avec un fond IGN, ce qui est particulièrement probant pour le continuum aquatique (Annexe 9). De plus un bureau d’étude a cartographié les continuités écologiques dans le secteur d’Auxon (25), pour évaluer l’impact de l’implantation de la LGV et de la gare d’Auxon (SOBERCO Environnement, 2006). Il est apparu que leurs résultats, obtenus grâce à une prospection approfondie du terrain, étaient fortement semblables aux nôtres. Pour le continuum agriculture extensive, les zones nodales et d’extension semblent être, à grande échelle, conformes aux connaissances actuelles sur l’extensification et les valeurs environnementales des systèmes agricoles en Franche-Comté (Pointereau et Coulon, 2001). Cependant, les continuités semblent un peu plus importantes que la modélisation ne le laisse paraître, notamment dans les Vosges. Mais il est trop difficile de donner des affirmations plus précises du fait que les indicateurs de diversité d’assolement de SOLAGRO (Pointereau et Coulon, 2001) sont établis sur une base communale. De plus, il s’est avéré d’après la consultation, que Corine Land Cover était sans doute insuffisamment précis pour faire une différenciation entre prairie, polyculture, culture dominante (com. pers JC Weidman) et jachère (com. pers C Chandosné). Cependant, les statistiques agricoles étant confidentielles à l’échelle parcellaire, il paraît très difficile de faire plus précis pour ce continuum, surtout à l’échelle de la Franche-Comté. En outre, la modélisation a induit quelques biais dans le positionnement et la hiérarchisation des corridors : - aux abords des limites administratives de la Franche-Comté, le tracé des corridors était très subjectif, à cause du manque de connaissances sur les continuités dans les régions ou pays limitrophes. Afin de pouvoir les valider (tracé en pointillé sur les cartes), il serait nécessaire dans un premier temps de recenser les zones nodales à la périphérie des limites administrative de la Franche-Comté, étape facilement réalisable en consultant les périmètres d’inventaire et de protection dans ces secteurs. Par la suite, c’est une évaluation de la potentialité de connexion, en établissant la cartographie des zones d’extension, qui s’impose (par exemple, un inventaire des forêts pour le milieu forestier). Ce second objectif, pourtant indispensable à la rigueur de la méthodologie, semble plus délicat à atteindre du fait de la durée assez grande que prendrait ce travail et surtout de la non légitimité de la DIREN FC à cartographier des éléments du paysage en dehors de ses limites régionales… La résolution de ce problème passe donc sans doute par une collaboration avec les services de l’environnement de Rhône Alpes, Bourgogne, Champagne Ardenne, Lorraine, Alsace et de la Suisse. - les ponts et les viaducs ne sont pas pris en compte (sauf pour la LGV). Pourtant, ils peuvent constituer des points de passages privilégiés pour de nombreuses espèces. La consultation a néanmoins permis de localiser certains de ces ouvrages dans les secteurs à enjeu. - c’est la largeur des routes qui est utilisée pour déterminer les valeurs de coût déplacement pour ces infrastructures. Ici nous faisons abstraction de la fréquentation (nombre de véhicules par jour). Cette carence se fait particulièrement ressentir pour le continuum aquatique : si nous prenons l’exemple des amphibiens, il suffit d’une voiture par minute pour décimer 90% des individus traversant lors de déplacements migratoires (Maillet, 2004). En prenant du recul, il faudra peut-être compléter la connectivité pour le continuum aquatique par une étude supplémentaire ciblant les amphibiens. 17 Enfin, certains organismes partenaires souhaiteraient une unique carte synthétique des 3 réseaux établis pour chaque continuum, afin de faciliter la communication autour des résultats finaux. Mais il s’avère que techniquement, ceci est totalement impossible, d’une part puisque de nombreux éléments constitutifs du réseau se superposent, engendrant une perte d’information substantielle et d’autre part parce qu’en toute rigueur, chaque espèce à son propre réseau de corridors écologiques, ce qui est impossible à représenter... C’est pourquoi nous nous en tiendrons à une carte par continuum. En définitive, notre proposition de réseau écologique a de nombreux points communs avec les travaux menés dans d’autres régions et pays. On retrouve effectivement les grandes étapes dans la méthode employée et le résultat semble offrir un bon compromis entre les impératifs fixés et les contraintes inhérentes à un projet d’une telle ampleur. De plus, d’autres avantages de notre approche résident dans la durée et le coût financier pour la conception des cartes qui sont assez faibles. La méthodologie étant calée, il y aura possibilité de modéliser rapidement divers scénarios, par exemple en utilisant d’autres espèces plus exigeantes (notamment le cerf ou le chat forestier pour le continuum forestier) pour obtenir les cartes brutes de coût déplacement : 15 jours pour obtenir des cartes de continuum brutes, 1 mois pour définir le réseau écologique d’un continuum et hiérarchiser ses éléments. La consultation et la phase terrain peuvent en revanche prendre quelques mois suivant les moyens mis en œuvre et le degré de précision souhaité. Ces cartes constituent donc un outil pertinent pour les travaux à grande échelle, puisque nous disposons d’une vision uniforme et objective sur de grands territoires. Cependant l’enjeu majeur à moyen et long terme, qui est de relier les réseaux de plusieurs régions et même plusieurs pays entre eux, sera difficile à atteindre en restant rigoureux scientifiquement, puisque certains points méthodologiques diffèreront malgré les nombreuses ressemblances. 3.2. Interprétation des cartes de synthèse du réseau écologique 3.2.1. Tendances générales et principaux enseignements de la consultation 3.2.1.1. Grands obstacles Nous le verrons par la suite, le travail réalisé à partir de la modélisation et la consultation sont riches en enseignements et ont permis d’établir des premières priorités d’action. Cependant, tous les partenaires qui ont été consultés sont unanimes : étant donné le fort degré de précision avec lequel les points de conflit ont été localisés, c’est un important travail de terrain sur l’ensemble de la région qui s’impose pour lever définitivement les interrogations sur la fonctionnalité de la plupart des corridors. Ceci devra donc sans doute passer par un partenariat encore plus actif avec ces organismes. D’une manière générale, tous les points d’obstacles identifiés grâce à la modélisation concordent sur fond de carte IGN avec les principaux points de conflit induis par les infrastructures et les falaises/rivières. Pour les obstacles naturels, il s’avère que la grande faune forestière les franchit aisément. Pour les espèces inféodées au continuum agriculture extensive, les falaises peuvent ponctuellement poser problèmes, mais restent assez facilement franchissables quand il n’y a pas eu intervention de l’Homme (souvent aux abords des voies ferrées ou des routes, les falaises sont dénaturées pour éviter les éboulements). Les rivières sont un peu plus délicates à franchir pour cette faune, cela dépend du débit et de la largeur du 18 cours d’eau. Enfin, pour les espèces aquatiques comme les amphibiens, les falaises sont considérées comme infranchissables et le lit mineur des cours d’eau équivaut aux zones d’extension. Dans l’ensemble, les continuités pour les 3 continuums s’organisent le long des vallées, principalement selon un axe nord-est / sud-ouest, c’était déjà une des conclusions d’une première ébauche de réseau écologique en Franche-Comté (DIREN FC, 2004). Les possibilités de connexion entre le nord et le sud de la région, et pour parler plus largement entre Vosges et Jura, sont reconnues comme d’intérêt majeur par tous les experts. Hors de multiples obstacles se dressent contre l’établissement de corridors fonctionnels : - une urbanisation intense le long de l’axe Belfort – Montbéliard – Besançon – Dole. L’augmentation de la périurbanisation de ces villes amplifie ce phénomène (INSEE FC, 2006). - des rivières à fort débit tel que le Doubs ou plus au nord l’Ognon et ses affluents qui, même s’ils ne constituent pas de réels obstacles pour la plupart des espèces sont néanmoins un sévère frein à leur passage. - des infrastructures routières très développées avec en permanence une nationale à fort trafic qui longe le Doubs, et en parallèle l’autoroute A36 qui, de l’avis de tous, est une barrière très peu perméable. En effet, cette autoroute, construite dans les années 1970, n’est dotée d’aucun passage à faune spécifique… Certains représentants de la grande faune ainsi que le chat forestier notamment parviennent tout de même à passer, mais en nombre très limité (quelques collisions avec des véhicules ont été relevées). Le lynx ne semble pas être capable de traverser, il reste bloqué au sud de l’autoroute. Il est recommandé de contacter la société d’autoroute pour obtenir des compléments d’information sur les collisions. Pour les autres espèces, il a été considéré que l’A36 était infranchissable, ce qui demanderait confirmation par des visites sur le terrain. - des réseaux ferroviaires eux aussi étendus d’est en ouest. On trouve tout d’abord la voie Belfort – Besançon – Dijon qui longe le Doubs, avec de nombreux escarpements difficilement franchissables par endroit. Et plus au nord, c’est la LGV qui sera mise en service fin 2011 mais qui a déjà été incluse dans notre réflexion : il s’agit une fois de plus d’une infrastructure qui scindera le territoire en deux sur la totalité de sa largeur. L’autoroute A39, en séparant la Bresse du reste de la région, est un obstacle qui a également retenu notre attention dans le Doubs et le Jura pour les 3 continuums. Mise en service à la fin des années 1990, elle a bénéficié de la création d’assez nombreux passages faunistiques, puisque dans sa partie jurassienne, on dénombre 17 passages aménagés pour la grande faune (mixte et spécifiques), 10 ouvrages pour la petite et 30 ouvrages hydrauliques de grandes dimensions (com. pers FDCFC). Les localisations exactes ne nous ont toutefois pas été communiquées. Les viaducs qui enjambent le Doubs et la Loue semblent néanmoins être des points de passage privilégiés pour toute la faune terrestre. De plus le lynx a été repéré dans le Dijonnais et la probabilité qu’il soit passé au travers de l’A39 est très forte. Connaissant la très grande prudence dont fait preuve cette espèce, cela tend à confirmer que l’autoroute est relativement perméable, au moins dans certains secteurs. 3.2.1.2. Passages faunistiques Pour les infrastructures entièrement grillagées telles que la LGV et les autoroutes, 3 types de passages sont possibles par l’intermédiaire de différents aménagements ou ouvrages d’art conçus par l’Homme : 19 - les franchissements au dessus des tunnels (Figure 8). Le meilleur exemple est le tunnel de Chavanne (pour la LGV) qui se situe à une dizaine de kilomètres de l’aire urbaine Belfort Montbéliard et mesure près de 2 km de long. Il constitue un secteur stratégique et primordial pour le passage de la faune, notamment pour celle vivant en milieu forestier et agriculture extensive. Il est préconisé le long de ces 2 kilomètres, d’éviter au maximum l'augmentation de l’urbanisation et des parcelles cultivées intensivement et aménager le site en larges îlots boisés entrecoupés par des milieux ouverts extensifs. La modélisation laisse apparaître des enjeux moindres pour les espèces aquatiques. - les passages sous les ouvrages d’art tels que les viaducs et les ponts (figure 9). Ils peuvent être très efficaces, à condition que les recommandations des experts à propos de la végétalisation à mettre en place sous ces ouvrages soient rigoureusement appliquées. De plus, il faudra un continuum de végétation pour inciter la faune à suivre l’itinéraire voulu. Le long de la LGV, un effort particulier devra être apporté au niveau du viaduc de la Veze d’Ougnet (au dessus de la forêt de chaud), puisqu’on y distingue des corridors prioritaires pour les 3 continuums. - les passages à faune (figures 10 et 11). Il existe des aménagements mixtes, qui peuvent être utilisés par plusieurs groupes faunistiques. On en différencie également des spécifiques, qui servent uniquement à la faune sans accès aux activités humaines. Ils sont très complexes à mettre en œuvre puisqu’il faut tenir compte des données liées à l’habitat, des espèces concernées, et des fonctions qu’on souhaite lui attribuer (SETRA, 2005). On trouve des aménagements soit supérieurs (passent au dessus de l’obstacle) soit inférieurs ; chacun peut prendre de nombreuses configurations qui ne seront pas détaillées. Il est souvent considéré dans la littérature que seuls les passages spécifiques sont réellement efficaces et offrent une bonne opportunité de franchissement de l’obstacle pour une espèce donnée. C’est pourquoi nous n’avons pris en compte que ceux ci dans notre étude. Figure 8 : Tunnel Source : www.canalmidi.com Figure 9 : Viaduc LGV Source : D.Lucien Figure 10 : Passage à faune supérieur Source : L Rothan Figure 11 : passage à faune inférieur mixte Quel que soit le type d’ouvrage concerné, Source : J Carsignol l’optimisation de son efficacité est possible en aménageant de manière adéquate les milieux en amont et en aval dans le but d’inciter les animaux à suivre le trajet souhaité. Il sera également essentiel de les entretenir et d’inspecter leur bon usage régulièrement, puisque dans ce domaine c’est la qualité qui l’emporte largement sur la quantité. 20 Il est estimé que plus de 50% des passages à faune sont inefficaces ou inadaptés (com. pers Carsignol, Centre d’Etude Techniques de l’Equipement de l’Est, 2007). Dans l’idéal, il est donc préconisé de « mettre à plat » toutes les connaissances sur les localisations de ces passages et de lancer une grande étude faisant l’inventaire de l’existant dans la région, en précisant le niveau de fonctionnalité et le type de faune concerné. Ceci aiderait fortement à déterminer efficacement où porter nos actions. 3.2.2. Le continuum forestier : enjeux et gestion La forêt a une emprise si énorme sur le territoire franc-comtois qu’il ne serait pas surprenant qu’après un travail de terrain, les seuls grands obstacles infranchissables restants pour ce continuum (à quelques exceptions près) soient les autoroutes, les villes et les canaux dont les berges souvent trop abruptes ne permettent pas aux animaux de sortir de l’eau. Des suggestions, principalement pour relier le nord et le sud de la région, sont proposées dans le tableau 1 qui renvoie à la figure 12. Remarques : Pour les tableaux 1, 2 et 3, il est supposé qu’à proximité des aménagements proposés, aucune structure permettant le franchissement n’existe à l’heure actuelle. Une confirmation terrain sera nécessaire. Afin de permettre une lecture simple et rapide des tableaux, nous avons mis en place une typologie pour les actions à mener : - A : nouvel aménagement. - S : aménagement qui doit être mis en place, mais à surveiller. - U : maîtrise de l’urbanisation. - T : complément terrain nécessaire. Tableau 1 : Identification et aménagements possibles des principaux points de conflit détectés grâce à la modélisation et la consultation pour le continuum forestier. CONTINUUM FORESTIER N° 1 2 3 Source du conflit Enjeux et objectifs Relier le massif de la Serre à la Bourgogne et à la Bresse en utilisant en complément les 2 passages à faunes Autoroute A 36 sous l’A36 et l’A39 quelques kilomètres au sud de l’échangeur entre ces 2 autoroutes. Etablir un corridor fonctionnel reliant la forêt de Chaux au massif de la Serre. A Autoroute A 36 l’heure actuelle cette connexion est et canal du Rhône inexistante. au Rhin. Autoroute A 36 Connecter à une échelle locale le nord et le sud de la forêt de Chailluz. A l’échelle régionale, nous avons à faire à une très bonne possibilité de liaison entre le nord et le sud de la FrancheComté. Au nord de l’A36, possibilité de franchissement de la LGV par le viaduc de Buthier. Typologie des actions A A A S Recommandations de gestion ou de protection - Passage à faune supérieur après vérification qu’aucun aménagement inférieur n’existe déjà. - Améliorer l’existant coûtera moins cher et sera plus facile à mettre en œuvre. Passage supérieur au dessus de l’autoroute + aménagement en pente douce d’au moins une partie des berges du canal (possibilité aussi de mettre une passerelle, étudier les coûts par rapport à l’efficacité) - Existence d’un passage à faune inférieur dans ce secteur ! Le rendre spécifique s’il ne l’est pas et s’assurer de son parfait fonctionnement. - Veiller au bon aménagement du viaduc de Buthier. Urgence d’action Moyenne Moyenne Forte 21 4 5 6 - Bonne possibilité de connexion nord/sud . La rivière (le Doubs) et la route nationale sont assez facilement franchissables, mais comme toujours l’autoroute est très peu perméable. La Autoroute A 36 LGV pourra être aisément franchie au niveau du tunnel de Chavanne, 25km au nord est du point de passage souhaité sur l’A36. - Enjeux forts également pour la petite faune… Connexion nord/sud. Accès presque Autoroute A 36 direct au tunnel de Chavanne. Pression et canal du Rhône de l’urbanisation plus forte qu’en 4. au Rhin - Zone très urbanisée. Volonté forte de préserver tout le secteur à l’est de l’aire Autoroute A 36 urbaine Belfort - Montbéliard estimé et canal du Rhône d’intérêt européen. au Rhin - Possibilité de connexion entre le Sundgau et les Vosges. 7 Autoroute A 39 8 LGV Relier le quart sud est de la FrancheComté et la Suisse avec la Bresse et la Bourgogne. Liaison stratégique entre le massif de la Serre et le nord de la région. Liaison stratégique entre le massif de la Serre et le nord de la région. 9 LGV Enjeux forts également pour la petite faune et les espèces aquatiques. 3 routes Etablir une liaison directe entre les bois 10 départementales : situés de part et d’autre de la D474 qui D29, D12, D474 relie Vesoul à Gray. - Maintenir un corridor fonctionnel entre le massif de la Serre et le nord de Gare d’Auxon, la forêt de Chailluz, malgré pression l’implantation de la LGV et le financière et 11 développement de la gare, des dessertes passage à 2X2 et projets associés. voies de la RN - Enjeux sur les amphibiens également : 57. présence de rainette verte. - Nouvelle route pour le contournement 12 ouest de Lons-leSaunier. - Autoroute A 39 Etablir une autre possibilité de liaison entre la Franche-Comté et la Bourgogne en plus de celle de la Bresse. A T U A U A U T S S T A T - Passage à faune supérieur spécifique à la grande faune et qui pourra être utilisé par la petite faune. - Vérifier au préalable que le Doubs, les falaises et la RN 83 sont effectivement franchissables entre Baume-les-Dames et Clerval. - Projet sans conteste plus coûteux qu’en 4, puisqu’il faut franchir le canal et l’autoroute. - Stopper l’urbanisation. - Canal : Aplanissement des berges. - A 36 et LGV : Profiter de la mise en place de la LGV pour négocier un passage à faune supérieur ambitieux qui enjamberait en même temps la LGV et l’A36 (au niveau de l’aire de repos du Haut - Bois). Recensement des passages à faune et réaménagement éventuel pour rétablir leur fonctionnalité. Veiller à la parfaite fonctionnalité du passage grande faune spécifique qui à été prévu par RFF. Excellente opportunité de franchissement sous le viaduc d’Ougnet-Douvot. Nécessité d’un très bon aménagement, voir 3.2.1.2. Nécessité d’une vérification supplémentaire sur le terrain. - Etudier l’impact de la RN 57 sur les grands axes de déplacement qui sont à l’heure actuelle fonctionnels. - Imposer la mise en place de passages à faune spécifique en cas de rupture de continuité par les nouvelles infrastructures. - Inciter les partenaires à coopérer activement ensemble. - Prendre en compte l’impact de cette nouvelle route sur le corridor écologique qu’elle va couper. - Travail de terrain pour trouver un passage à faune sous l’A 39. Très Forte Faible Forte Forte Forte Très forte Moyenne Très forte Moyenne Les actions à mener en priorité pour ce continuum sont surtout centralisées sur les 3 grandes infrastructures qui découpe le territoire franc-comtois : les 2 autoroutes et la LGV. Un intérêt d’aménager des passages à grande faune est qu’ils pourront être également utilisés par la petite faune (SETRA, 2005). 22