Prise en charge des pneumopathies infectieuses chez la personne âgée Symposium interdisciplinaire Fribourg mars 2017 C. Petignat D. Héquet Unité cantonale HPCI Vaud 1 Conflits d’intérêt - Intérêts financiers ou de propriété non - Activités pour l'industrie pharmaceutique et autres entreprises de santé non - Fonds fournis par tiers / dons No money non - Relations personnelles non - Autres affiliations non 2 Plan - Généralités - Étiologie - Epidémiologie - Facteurs de risque - Diagnostic - Traitement - Prévention 3 Etiologie infections respiratoires Infections respiratoires basses - Bronchites aiguës - Exacerbations aiguës de BPCO - Pneumopathies aiguës (env 5% des inf resp basses) Pneumopathies aigues - Communautaires - Acquises à l’hôpital = nosocomiales - Acquises en institution (mixte entre communautaire et nosocomiale) 4 Infections respiratoires chez patient âgé Fréquence Inf urinaires > pneumopathies aigues>inf cutanées - Incidence pneumopathie communautaire augmente avec l’âge 60-74 ans :15 cas/1000 > 75 ans: 34 cas/1000 - Favorisée par la vie en institution Cause de mortalité importante - Après 65 ans :30% de décès par infection - 1ère cause de mortalité chez >75 ans - Inf pulmonaires >> inf urinaires > inf cutanées 5 Pneumonie chez la personne âgée - 3-4x plus de pneumonie après 65 ans - Taux d’attaque: 12-14 pour 1000 - 50% des hospitalisations pour maladies infectieuses - Moyenne de séjour est doublée par rapport aux adultes jeunes - 90% des décès par pneumonie sont après 65 ans (dont 45% chez plus de 80 ans) 6 Particularités chez > 65 ans Infections pulmonaires - fréquentes - plus graves - trompeuses - mortalité importante (1ère cause de mortalité chez > 75 ans) - favorisées par la vie en institution Une prise en charge précoce et adaptée peut améliorer le pronostic 7 Mortalité élevée chez sujets âgé - Pneumopathie + grippe: 1ère cause de décès par infection - Mortalité hospitalière des pneumonies chez > 65 ans: 10% - Mortalité à 1 mois chez >65 ans à domicile: 5-33% en institution 20-40% - Déclin fonctionnel fréquent au décours de l’épisode infectieux 8 Déclin fonctionnel 9 Facteurs de risque de pneumopathies bactériennes chez patient âgé (1) Dysrégulation de la fonction immunitaire sur immunosénescence cellulaire et humorale et vieillissement pulmonaire Variable d’un individu à l’autre Lié au patrimoine génétique Avec Altération des macrophages Moindre production d’AC IgG Baisse de la clearance muco-cillaire 10 Facteurs de risque de pneumopathies bactériennes chez patient âgé (2) - Pathologie pulmonaire, mauvais état bucco-dentaire, malnutrition - Trouble de la déglutition, immobilisation - Comorbidités (cardiaque, neurologique, diabète, ) - Médicaments (psychotropes, anticholinergiques,etc) - Institutionnalisation (promiscuité) 11 Aspects cliniques patient âgés - Clinique atypique DD difficile entre bronchite, broncho-pneumonie, pneumonie - Toux absente dans 2/3 des cas - auscultation atypique - Tachypnée >25/min :signe avec la meilleure sensibilité - Signes extra respiratoires au premier plan confusion, désorientation cognitive rapide, inappétence, perte pondérale, incontinence - Paracliniques Rx thorax :infiltrat alvéolaire dans 70-90% des cas 12 Aspects cliniques : spécificités liées à l’âge <80 ans >80 ans p confusion 11% 21% <0.001 frissons 51% 45% NS douleur pleurale 45% 37% <0.007 expectoration purulente 55% 53% ns myalgie 23% 8% <0.001 céphalées 21% 7% <0.001 température à l’admission 38.2 37.9 absence de fièvre 22% 32% <0.001 râles 77% 84% <0.005 Tiré de community-acquired pneumonia in very ederly patients. Fernandez Sabé, medecine 2002 13 Aspects cliniques liés à l’âge en fonction du lieu de résidence Review, Pneumonia in the very old Janssens JP, lancet infectious diseases, 2004 14 Signes cliniques de gravité - Plusieurs scores à disposition (Fine ou PSI ou CRB 65) Confusion Fréquence respiratoire >30/min Fréquence cardiaque >125/min PA< 90 mmHg Température <35° ou >40° - Scores permettant d’évaluer la gravité et améliorer la prise en charge (arbre décisionnel ) 15 Diagnostic clinique - Pas de critère clinique pour orienter vers un pathogène particulier pneumocoque entérobactéries legionella germe atypique (mycoplasme, clamydia, ) 16 Epidémiologie microbienne pneumopathies communautaires Étiologie microbienne Pts < 80 ans Pts >80 ans 51% 44% Streptococcus pneumoniae 23% 23% Legionella 8% 1% Haemophilus influenzae 6% 5% Bacilles gram neg (E.coli, Klebsiella, Enterobacter, Pseudomonas) 1% 3% Germes atypiques (Chlamydiae, Mycoplasma, Coxiella) 7% 1% Pneumopathie inhalation (anaérobe) 5% 10% Virus (Influenza, RSV, Parainfluenza) 7% 8% Fernandez-sabé, Medicine, 2003 17 Epidémiologie microbienne pneumopathies acquises en institution Mal connu car documentation difficile, populations hétérogènes, Streptococcus pneumoniae 10-40% Bacille gram nég (Enterobactéries y compris ESBL, Pseudomonas) 20-45% (colonisation oro-pharyngée ++) Staphylococcus aureus 10-30% (complication de la grippe) Legionella Rare mais grave Germes atypiques rare Virus Fréquents, épidémiques, mais encore peu documentés Influenza, RSV, parainfluenza Résumé de différentes séries publiées 18 Pneumopathies aiguës en institution Chez résidents > 80 ans - 68-114 cas/ 1000 (Leophonte, 2001) - pneumopathies à pneumocoques 3x plus important - 3ème cause d’hospitalisation 19 Rx thoracique indiquée si - Signes évocateurs de pneumonie (confirmation du dg, suivi) - Ou signes peu évocateurs mais Âge >75 ans Comorbidités Vie en institution - Diagnostic des complications (abcès, épanchement pleural, atélectase) Attention interprétation difficile et 1/3 des RX normales 20 Autres examens - Biologie FS, CRP, bilan standard Procalcitonine?? Oxymètrie - Microbiologie (pas systématique) hémocultures Expectorations : pas en première intention • Si bonne technique: bonne sensibilité pur pneumocoque, BG et staph 21 Antigènes urinaires Ag Légionelle - sensibilité 92% (spécifique à L.pneumophilia type 1) - Indications: sévérité clinique, épidémie, mauvaise réponse au TTT, population EMS ?? Ag Pneumocoque - Bonne sensibilité (50-70%) - Excellente spécificité - Diagnostic rapide - Indications: sévérité clinique 22 Antibiothérapies pour les pneumonies chez adulte >65 ans sans signe de gravité Sans comorbidités Avec comorbidités Monothérapie Cibler Pneumocoque +/- Bactéries Gram nég (E.coli, Klebsiella) +/anaérobe Amoxi-ac clavulanique 2g/j pd 7 j Si échec : associer un macrolide Pas de bithérapie d’office Cibler Pneumocoque +/- Bactéries Gram nég (E.coli, Klebsiella) +/anaérobe Amoxi-ac clavulanique 2g/j pd 7 j Ou ceftriaxone iv ou im 2g/j pd 7j Si échec : associer un macrolide ou FQ 23 Antibiothérapies pour les pneumonies chez adulte >65 ans avec signe de gravité Hospitalisation Pneumonie non sévère Pneumonie sévère Amoxi-ac clavulanique ou ceftriaxone Ceftriaxone+ FQ Si échec Légionelle? Si échec ESBL? Cibler les entérobactérie BMR associer FQ Pip-tazo ou ceftazidime 24 Antibiothérapie des exacerbations des BPCO Attention étiologie non infectieuse dans 50% des cas - Si origine infectieuse Virale +++ dont rhinovirus (50% ) Bactérienne (Haemophilus influenza, Moraxella, S.pneumoniae,Chlamydiae, Pseudomonas) Antibiotique non systématique - Uniquement si grave Amoxi-ac clav ou Céphalosporine 2ème -3ème gén orale Macrolides Ceftriaxone (exacerbaction avec critère de gravité) - Attention éviter les FQ 25 Prévention 26 Prévention des pneumopathies d’aspiration - Éviter la sédation - Soins bucco-dentaires ++ - Alimentation adaptée (eau gélifiée, hydratation sous cutanée) - Repas en position assise - Éducation des équipes soignantes +++ 27 Prévention de la légionellose mesures environnementales - En institution: plus rare qu’en soins aigus mais épidémie possible (Loeb, Jam Geriatr soc, 1999) - Directives OFSP 28 Vaccination antipneumococcique - Mortalité élevée du pneumonocoque invasif - Risque d’épidémie en institution long séjour (P Nuorti NEJM, 1998) - Etudes de cohorte et études cas témoins : arguments convainquant pour une efficacité sur les souches invasives chez patients âgés - Rapport cout/ bénéfice chez sujets âgés serait favorable - Vaccin: 23 valent - mais 29 Recommandation OFSP vaccination pneumocoque Vaccination pour les personnes à risque élevé d’infection invasive - système immunitaire est affaibli: déficience soit d’origine congénitale, dû la prématurité (naissance avant la 33e semaine de grossesse ou poids de naissance< 1500g déficience acquise (infection à VIH) ou induite (asplénie anatomique ou fonctionnelle, patients immunosupprimés pour une pathologie auto-immune ou après transplantation) - maladies pulmonaires, cardiaques (insuff cardiaque sévère stade 3 ou 4), rénales ou hépatiques chroniques, d’un cancer hématologique (lymphome, leucémie, myélome) ou d’autres conditions spécifiques. 30 Vaccinations recommandées par l’OFSP chez > 65 ans 31 Vaccination anti grippe - Risque épidémique élevé en institution - Efficacité démontrée chez les sujets âgés malgré une moindre réponse Méta-analyse de Gross Ann intern med 1995 Réduction de • 56% des if resp basses • 53% des pneumophathies • 48% des hospitalisations • 68% de la mortalité Méta-analyse de Vu Vaccine ,2002 Réduction de • 35% des syndromes grippaux • 33% des hosp pour pneumonies et grippes • 47% de la mortalité par pneumonie et grippe • 50% de la mortalité de toute cause en période épidémique 32 Efficacité de la vaccination contre la grippe pour prévenir la pneumonie - Vaccination de la grippe diminue de 43% le risque de pneumonie assocée à la grippe (Monto, 2001 2351 résidents ,83 établissements;) - Immunisation des soignants: peu ou pas de bénéfice prouvé sur le nombre de grippe chez les résidents (Cochrane Review 2016: 4 études randomisées et 1 cohorte (N= 12742) et 5896 résidents) mais taux vaccination faible (< 50% sauf 1 étude:68%) - importance majeure de la vaccination des soignants (Carman, Lancet 2000) 33 Recommandations pratiques C. Casey, Common Questions about Pneumonia in NHR, aafp, 2015 34 Infection respiratoire chez les résidents en période de grippe - La saison hivernale est frappée d’un surcroît de mortalité chez les personnes âgées, vraisemblablement dû aux infections par le virus de la grippe - Vus l’âge avancé et la haute prévalence des infections chroniques, les EMS sont un environnement à risque élevé d’infections compliquées - De plus, les résidents vivent dans un environnement fermé avec d’autres résidents et ont des contacts avec le personnel de soins qui peut introduire la grippe de la communauté dans l’EMS Molback et al. Euro Surveill 2015 Sayers et al. Epidemiol Infect 2013 35 Etude sur le fardeau de la grippe en EMS - Grippe cause vraisemblablement une mortalité augmentée mais qu’en est il de la morbidité? - Etudes rétrospectives américaines qui suggèrent que la grippe pourrait avoir une conséquence sur les AVQ des résidents - EMS vaudois invités à participer - Hiver 2016-2017 Méthode - Etude prospective observationnelle - Tous les résidents souffrant d’un syndrome grippal et donnant leur approbation seront inclus dans l’analyse et diagnostiqués par PCR (frottis naso-pharyngé) - 2 groupes: grippe vs pas de grippe Objectifs de l’étude - Evaluer l’impact de la grippe sur la morbidité (activités de la vie quotidienne, hospitalisation) et la mortalité à J0, J30 et J90 après le diagnostic - Déterminer la proportion des syndromes grippaux dus à la grippe - Identifier les facteurs de risque associés avec une grippe - Identifier des signes cliniques en lien avec la grippe - Evaluer le traitement donné (antiviraux, antibiotiques) - Corréler le taux d’infections par la grippe aux taux de vaccination des résidents et du personnel soignant de l’EMS Premières constatations - 370 résidents inclus - Recherche de grippe jamais effectuée en EMS (Genexpert: 90 francs) - Majorité des résidents symptomatiques reçoivent des antibiotiques - Très peu de résidents reçoivent du Tamiflu®, même si le dépistage revient positif (53.80 francs) - A ce jour, 25 résidents ont été hospitalisés - A ce jour, 21 décès Traitement antiviral de la grippe en institution - Inhibiteurs de la neuraminidase - Tamiflu® posologie selon clearance à la créatinine - à prescrire En contexte épidémique Après identification du virus chez 1 ou 2 patients En curatif chez patient quelque soit le statut vaccinal A débuter dans les 48h En prophylaxie chez sujets contacts - Efficacité démontrée Réduction des symptômes, de la durée de l’évolution, du portage viral (limitation de la propagation) 40 41 42 • Réduction des symptômes de 21h • Pas d’effet sur le nombre d’hospitalisation • Quid des complications? Jefferson et al. Cochrane 2012 43 - Revue de 10 études RC (3564 patients) - Chez les adultes et les adolescents, oseltamivir réduit le traitement antibiotiques de 27% (p<0.001) - Incidence des complications du tractus respiratoire inférieur nécessitant des antibiotiques réduites de 55% (p<0.001) - Chez les personnes à risque, 18.5% des patients recevant le placebo et 12.2% des patients recevant oseltamivir ont fait des complications (p=0.2) Kaiser et al. Arch Intern Med 2003 44 Take home message - Diagnostic difficile (FR et saturation) - Intérêt limité des examens complémentaires (Rx thorax) - Proportion non négligeable d’infections virales (PCR grippe et ttt antiviral) - Si critères de gravité: hospitalisation - Antibiothérapie: monothérapie (durée 7j) - Prévention: vaccination grippe, hygiène buccodentaire 45