actualité, info avancée thérapeutique Rééduquer au mieux ap Les accidents vasculaires cérébraux (AVC) constituent un chapitre sanitaire de toute première importance. Leur fréquence, la mor­ talité prématurée qui leur est associée (ainsi que les handicaps physiques et cognitifs qu’ils entraînent) ne laissent aucun doute sur leur place et leur poids dans le champ de la santé publique et de l’économie des pays industrialisés. Ils y représentent la troi­ sième cause de décès prématurés et la pre­ mière cause de handicap physique. C’est dire, au­delà de la prise en charge diagnostique et thérapeutique en phase aiguë, l’impor­ tance qu’il faut accorder à la rééducation des personnes touchées. Le temps n’est plus en effet (ou ne devrait plus être) aux «attitudes contemplatives» face à ces accidents vasculaires, au maintien à domicile de certains malades, aux hospitali­ sations tardives, aux retards de prise en charge adaptée, aux absences de structures spécia­ lisées, aux insuffisances dans la prise en charge en milieu hospitalier. La fatalité n’a plus cours. Des moyens thérapeutiques ont prouvé leur efficacité pour réduire la morta­ lité, les séquelles et les récidives. Reste, après l’urgence, la grande question de la rééduca­ tion de la fonction motrice. C’est cette question difficile que vient de prendre à bras­le­corps la Haute Autorité française de Santé (HAS). Cet organisme vient ainsi d’élaborer une «recommandation de bonne pratique» sur les «méthodes de rééducation de la fonction motrice chez l’adulte». Ce document1 est destiné à l’en­ semble des professionnels de santé concer­ nés par la prise en charge des personnes qui ont fait un AVC. Cette recommandation s’ins­ crit d’autre part dans le cadre d’un plan na­ tional «Accidents Vasculaires Cérébraux 2010­ 2014» élaboré par le ministère français chargé de la Santé. D’une manière générale, ces recomman­ dations se fondent sur une certitude : la ré­ éducation motrice doit être mise en place dès que possible, en combinant les différentes méthodes retenues et «sans se limiter à une approche exclusive, quel que soit le stade de la prise en charge». «La mise en place du renforcement musculaire est nécessaire, et travailler sur la rééducation à la marche doit se faire dès que possible» souligne la HAS. Elle recommande «de miser dès le départ sur l’éducation thérapeutique du patient et de son entourage afin d’optimiser et de péren­ 2370 58_61.indd 1 Revue Médicale Suisse – www.revmed.ch – 5 décembre 2012 03.12.12 12:09 ux après un AVC © istockphoto.com/Joseph Pitz niser les résultats de la rééducation. Et elle «insiste sur l’importance de la coordination à chaque transfert, changement d’unité ou lors du retour à domicile du patient». A la phase aiguë de l’AVC, chez le patient ne présentant pas d’activité motrice, il est recommandé de stimuler la fonction sensi­ tive. La rééducation manuelle individuelle est recommandée à tous les stades de la prise en charge. Le renforcement musculaire est et non le moindre, a été de dresser la liste des méthodes qui «n’ont pas encore fait la preuve de leur efficacité». C’est ainsi qu’en l’état actuel des connaissances, rien ne per­ met (selon elle) de conclure sur l’intérêt des techniques d’apprentissage moteur (motor learning) ; d’une méthode neurophysiologique (Bobath, Brunnström, Kabat, Rood) par rap­ port aux autres ; du myofeedback pour amé­ liorer la posture, l’équilibre ou la fonction du membre supérieur. Il en va de même pour l’électrostimulation musculaire lors des pha­ ses subaiguë et chronique de l’AVC ; la sti­ mulation électrique fonctionnelle (SEF) pour la récupération du membre supérieur ; de la répétition de tâches à la phase aiguë de recommandé pour améliorer la force mus­ culaire à la phase chronique de l’AVC, mais pas la fonction. A savoir : le renforcement musculaire après AVC ne renforce pas la spasticité. A la phase chronique, la durée des exercices a un impact favorable sur les per­ formances de la marche. Il est recommandé d’inclure «l’effet temps» comme une com­ posante importante de la récupération mo­ trice. La rééducation fonctionnelle de la mar­ che est recommandée dès que possible, et doit être poursuivie tout au long de l’évolu­ tion de l’AVC pour améliorer l’indépendance dans les déplacements. L’éducation théra­ peutique du patient et de son entourage est à privilégier dès le début de la rééducation afin d’en optimiser et d’en pérenniser les ré­ sultats. Pour ce qui est des méthodes de rééduca­ tion motrice (méthodes manuelles ou ins­ trumentales) selon les phases de la prise en charge, l’un des aspects du travail de la HAS, l’AVC sur la fonction ; de la répétition de tâches pour le membre supérieur ni pour le transfert assis­debout à la phase subaiguë de l’AVC ; de la répétition de tâches pour le membre supérieur à la phase chronique de l’AVC ; de l’utilisation des plates­formes vi­ brantes dans le cadre de l’AVC. La liste n’est pas close. Ainsi la HAS range­ t­elle dans le même groupe «n’ayant pas fait la preuve de son efficacité» : l’entraînement électromécanique de la marche (quand d’au­ tres techniques d’entraînement à la marche sont possibles, lors des phases subaiguë et chronique) ; l’entraînement électromécanique de la marche à la phase chronique ; la réédu­ cation par mouvements bilatéraux lors des phases subaiguë et chronique post­AVC. Et pour finir l’imagerie mentale de tâches mo­ trices à la phase subaiguë de l’AVC et la ré­ éducation par réalité virtuelle. A noter : la personne victime d’AVC pré­ sente un contexte pathologique complexe qui influe sur la progression de la rééducation «et que la rééducation ne peut négliger». «C’est donc dans un cadre spécifique à cha­ que patient, objectivé par des critères multi­ factoriels, que le rééducateur doit s’adapter, souligne la HAS. Dès le début de l’hospitali­ sation post­AVC, il est nécessaire de débuter le plus rapidement possible les soins asso­ ciant kinésithérapie, ergothérapie, orthopho­ nie ainsi que, selon les besoins, psychologie. L’objectif est d’entreprendre la rééducation dès les premiers jours qui suivent l’AVC, le plus souvent dans les vingt­quatre premières heures, et ce malgré d’éventuels troubles de la vigilance. Les gains n’apparaissent qu’après des temps de rééducation suffisamment longs. La rééducation motrice doit s’inscrire dans une continuité de soins. Cette dernière est favorisée par les informations délivrées par les professionnels de santé pendant ou à l’is­ sue de chaque étape du parcours du patient.» Si aucune méthode n’a su se montrer su­ périeure à une autre, la rééducation a bien sa place dans l’arsenal thérapeutique des con­ séquences neuromotrices de l’AVC. Il im­ porte qu’elle soit commencée tôt, avec des temps de soins conséquents. A cette phase, la plus grande difficulté est d’influer au mieux sur le phénomène de plasticité cérébrale. Une meilleure compréhension de ce phénomène optimisera les réponses thérapeutiques, mais selon la HAS «il faudra probablement en­ core beaucoup de temps pour le prouver de façon fiable». A la phase chronique, les patients ayant un potentiel moteur significatif peuvent bé­ néficier de procédures rééducatives favorisant la récupération motrice. Pour le membre su­ périeur, on peut citer l’imagerie motrice, l’en­ traînement sur robot, la contrainte induite du membre parétique. Pour la marche, les méthodes recommandées sont : le renforce­ ment musculaire, le reconditionnement à l’ef­ fort, l’entraînement sur tapis roulant, l’en­ traînement à la marche au sol ou en système électromécanique (dans le cas où l’entraîne­ ment sur tapis roulant est impossible) en fa­ vorisant les stimulations rythmiques visuel­ les et auditives. Jean-Yves Nau [email protected] 1 www.has-sante.fr/portail/jcms/c_1334330/accidentvasculaire-cerebral-methodes-de-reeducation-de-lafonction-motrice-chez-l-adulte Revue Médicale Suisse – www.revmed.ch – 5 décembre 2012 58_61.indd 2 2371 03.12.12 12:09