4. Synthèse 4.1. Contexte : Justice sociale ou Jungle globale ? « L’avenir que nous voulons » La critique conjointe des aspects sociaux et environnementaux de notre mode de développement a émergé sur la scène internationale il y a plus de 25 ans dans le contexte des travaux de l’ONU, à l’initiative de sociaux-démocrates européens. A la (première) Conférence de Rio, en juin 1992, pour la première fois au niveau mondial, les connaissances environnementales étaient reliées à celles sur le développement socio-économique pour mettre en cause la notion de « développement » et prendre l’engagement d’inventer un mode de développement « durable» pleinement conscient de l’interdépendance de ses dimensions sociale, environnementale et économique. Il est donc urgent de réagir à l’erreur faite en réduisant les questions de développement durable (DD) à leur dimension écologique. Les questions de DD interpellent les responsabilités des gouvernants et celles de producteurs et des consommateurs par rapport aux effets sur l’humanité et sur la planète de la croissance des activités économiques de production et de consommation. Mais les travaux sur le DD ont été maintenus jusqu’ici en marge de la plupart des agendas politiques et trop souvent réduit à du « verdissement ». Le développement est donc loin d’avoir relevé le défi initial de répondre aux besoins des plus démunis aujourd’hui et à ceux des générations à venir. La (seconde) conférence de Rio+20, en juin 2012, a réaffirmé l’« insoutenabilité » des tendances actuelles et de leurs conséquences injustes et lancé des travaux au niveau multilatéral pour définir un ensemble d’Objectifs de développement durables (ODD) à long terme, transversaux, d’envergure mondiale et susceptibles d’être appliqués dans tous les pays, y compris les pays riches. 4.2. L’enjeu : un modèle de développement global guidé par une vision et des objectifs à long terme Peuples, Planète, Participation et Prospérité Partagée sont les véritables mots d’ordre d’un développement durable. Bon nombre 1 d’entreprises ont commencé à réorienter leurs activités au-delà des législations pour partager ce projet mais il arrive trop souvent aussi que le monde des affaires biaise ce concept en remplaçant les trois « p » (Participation & Prospérité Partagée) par un seul : Profit. Or crise écologique et crise sociale sont les deux faces du même désastre, engendré par un système économique qui s’est considérablement affranchi des Etats et des règles démocratiques et qui soutient largement les privilèges des plus riches. La crise économique et financière renforce la crise écologique, laquelle renforce la crise sociale qui renforce ainsi en spirale les effets pervers d’une société largement dominée par une forme d’idéologie libérale obsédée par la dérégulation. Ce modèle est socialement et environnementalement injuste et non viable. Le mode de croissance à court terme qui est la base de ce modèle est focalisé sur l’objectif de garantir les taux de rendement des capitaux exigés par les actionnaires. L’enjeu central est donc de remettre le sens des activités humaines et du développement de la société au centre des préoccupations, au-delà de la croissance et de réussir la transition entre le développement et la (dé)croissance actuels, largement instables et générateurs de crises diverses (alimentaire, énergétique, financière,…), et un mode de développement « durable ». Pour retrouver confiance dans la politique, tant au niveau local qu’au niveau régional, national, européen et mondial, il nous faut une vision de « l’avenir que nous voulons » d’envergure internationale et la possibilité d’être des acteurs solidaires de sa réalisation à tous ces niveaux. 4.3. Propositions concrètes pour une transition juste La transition juste vers une économie durable est basée sur un accroissement de la justice sociale renforçant le développement à long terme grâce l’adoption progressive de modes de consommation et de production générateurs de bien-être pour l’être humain, tout en étant « écologiquement responsables » (cad : respectueuse de la capacité de charge de l’environnement, notamment par une réduction considérable des émissions de gaz à effet de serre). La transition vers une société durable renverse la tendance destructrice des privatisations et de la dérégulation et promeut des investissements dans les secteurs de l’eau, de la santé, du 2 transport, du logement et d’autres services. Elle vise à donner un accès réel à des biens et des services indispensables à la dignité humaine, tels l’accès à l’eau, à une nourriture saine et nutritive, à un seuil de protection sociale de base pour la santé, au logement, à l’éducation et à l’épanouissement culturel, et ce dans le respect des capacités régénératives de la planète. En réponse à la question « Comment organise-t-on cette transition juste pour la rendre socialement et économiquement réalisable ? », nous proposons ici cinq éléments de réponse politique, tout en en nous référant aussi à leurs convergences ou divergences avec des réponses basées sur d’autres approches (y compris treize références croisées sur www.citoyensengages.be) le développement durable n’étant pas un silo précontraint mais un grand chantier ouvert à tous : 3.1 Une politique d’accompagnement et d’inclusion du monde du travail engagé dans la transition 3.2 Des stratégies et politiques plus visionnaires et engagées dans la 3e révolution industrielle 3.2.1 Une configuration des institutions assurant la préparation et l’évaluation des politiques 3.2.2 Une économie durable via le changement des modes de production et de consommation 3.3 Plus d’alliances pour des engagements concrets dans de nombreux secteurs et domaines 3.3.1 Des AEE Alliances emploi-environnement 3.3.2 Une transition énergétique juste, vers une énergie durable pour tous 3.4 Plus de clarté, de contrôle et d’engagement solidaire dans la mobilisation des moyens financiers 3.4.1 Un financement : Taxe sur les Transactions financières (TFF) et justice fiscale 3.4.2 Des Investissements financiers durables 3.5 Un système d’indicateurs plus transparent tendances (non) durables du développement sur les __________________________ 3