Document numérique - CRD

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Formation d’adaptation
à l’emploi de chef de
groupement 2013/02
n°27
––
Année 2013
Le « Knowledge Management »,
une opportunité stratégique
pour l’émergence d’une nouvelle culture de gestion des connaissances :
étude comparée des bonnes pratiques transposables aux SDIS
Commandant Armand MORAND
SDIS de l’Ain
Commandant Eric PAGANON
SDIS du Rhône
Commandant Lionel VAYR
SDIS de la Savoie
Commandant Emmanuel VIDAL
Directeur de mémoire
Lieutenant-Colonel Bruno BEAUSSE
Directeur département prospective & professionnalisation ENSOSP
SDIS de la Haute-Savoie
Directeur de recherche
Madame Céline LE CORROLLER
IEP Aix en Provence
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Les opinions exprimées dans ce mémoire sont propres à leurs auteurs et n’engagent par conséquent
ni l’Ecole Nationale Supérieure des Officiers de Sapeurs-Pompiers, ni l’Institut d’Etudes Politiques
d’Aix-en-Provence.
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REMERCIEMENTS
Le présent mémoire s’inscrit dans le cadre de notre formation d’adaptation à l’emploi de chef de
groupement dispensée par l’Ecole Nationale Supérieure des Officiers de Sapeurs-Pompiers
(ENSOSP) en partenariat avec l'Institut d'Etudes Politiques (IEP) d’Aix-en-Provence. Il est le
résultat d’un travail collaboratif de neuf mois, suivi et encadré par :
• Lieutenant-colonel Bruno Beaussé, directeur du département prospective et
professionnalisation de l’ENSOSP, notre directeur de mémoire,
• Madame Sabrina Cervera-Bouet, notre première directrice de mémoire,
• Madame Céline Le Corroller, IEP d’Aix en Provence, chargée du suivi méthodologique.
Nous leur adressons nos sincères remerciements pour les conseils dispensés, l’aide et le temps
qu’ils ont su nous consacrer.
Nous remercions également les personnes qui, en acceptant de répondre à nos sollicitations, ont
enrichi notre réflexion et contribué à la réalisation de ce mémoire :
• Colonel Michel Marlot, directeur départemental - SDIS 71,
• Colonel Yvon Trépos, inspecteur de la Sécurité Civile, initiateur du CAF - DGSCGC,
• Colonel François Vallier, chef du bureau de la formation, des techniques et des équipements
- DGSCGC,
• Lieutenant-colonel Pierre Gamel, chef du groupement formation - SDIS 45,
• Monsieur Jean-Philippe Vennin, sous-directeur des ressources, des compétences et de la
doctrine d’emploi, direction des sapeurs-pompiers - DGSCGC,
• Monsieur Christophe Batier, directeur technique du service Innovation Conception et
Accompagnement pour la Pédagogie, chargé des TICE, coordinateur du projet Spiral
Connect - Université Lyon I,
• Monsieur Jérôme Cernoia, chercheur en éthique appliquée, Laboratoire de Management et
de Pilotage des organisations - ENSOSP,
• Madame Isabelle Detrift, chargée des PATS et de la prospective, groupement formation SDIS 45,
• Madame Aurélie Dudezert, maître de conférences habilitée à diriger les recherches en
sciences de gestion, spécialiste du management des connaissances et des systèmes
d’information, membre du groupe CoP-1 - Ecole centrale Paris,
• Madame Anne-Françoise Fraser, chief of records management unit, UN headquarter,
secrétariat général des Nations Unies, ONU - New York (USA),
• Madame Cécile Gode, professeur des universités, chercheur au centre de recherche de
l’armée de l’air, habilitée à diriger les recherches en sciences de gestion - Université Lyon II,
• Monsieur Thomas Meszaros, chercheur au Centre Lyonnais d’Études de Sécurité
Internationale et de Défense, maitre de conférences - Université Lyon III,
Nos remerciements vont aussi à nos directeurs départementaux, les colonels Jean Marc Chaboud,
Serge Delaigue, Xavier Jouannet et Bernard Romatif, pour la confiance qu’ils nous accordent, ainsi
qu’à l’encadrement FORSUP de l’ENSOSP pour leur disponibilité et la qualité de la formation
dispensée.
Enfin, un grand merci à nos familles pour le soutien apporté durant cette année d’étude.
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TABLE DES ABREVIATIONS
ANDSIS
Association Nationale des Directeurs et directeurs adjoints des Services d’Incendie et
de Secours
BASF
Badisch Anilin und Soda Fabrik (acronyme allemand)
CAF
Cadre d’Auto-évaluation des Fonctions publiques
CdG
Chef de Groupement
CdP/CoP
Communauté de Pratique
CEN
Comité Européen de Normalisation
CIS
Centre d’Incendie et de Secours
CNFPT
Centre National de la Fonction Publique Territoriale
CNIS
Conférence Nationale des services d'Incendie et de Secours
CODIS
Centre Opérationnel Départemental d’Incendie et de Secours
COGIC
Centre Opérationnel de Gestion Interministérielle des Crises
COZ
Centre Opérationnel Zonal
DDASIS
Directeur Départemental Adjoint des Services d’Incendie et de Secours
DDSIS
Directeur Départemental des Services d’Incendie et de Secours
DGSCGC
Direction Générale de la Sécurité Civile et de la Gestion des Crises
EDF
Electricité de France
ELS
Expertise Locator Systems (système de localisation d’expertises)
ENSOSP
Ecole Nationale Supérieure des Officiers de Sapeurs-Pompiers
ETARE
ETAblissement REpertorié
ETL
Extract-Transform-Load (extraire-transformer-charger)
FAE
Formation d’Adaptation à l’Emploi
FAQ
Foire Aux Questions
FI
Formation Initiale
FIA
Formation Initiale d’Adaptation
FILT
Formation Initiale de Lieutenant
FMPA
Formation de Maintien et de Perfectionnement des Acquis
FNSPF
Fédération Nationale des Sapeurs-Pompiers de France
FOAD
Formation Ouverte et A Distance
GARF
Groupement des Acteurs et Responsables de la Formation
GED
Gestion Electronique de Documents
GOC
Gestion Opérationnelle de Commandement
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HTML
HyperText Markup Language (langage de balisage de l’hypertexte)
INFOSDIS
INFOrmation des Services Départementaux d’Incendie et de Secours
INTEROPS INTERopérabilités OPérationnelleS
KM
Knowledge Management
LAMAP
LAboratoire de MAnagement et de Pilotage des organisations
LEDeSC
Laboratoire d'Etudes en Droit de la Sécurité Civile
ONU
Organisation des Nations Unies
ORSEC
Organisation de la Réponse de la SEcurité Civile
OWL
Ontology Web Language (langage web ontologique)
PC
Personal Computer (ordinateur personnel)
PATS
Personnel Administratifs Techniques et Spécialisés
PNRS
Portail Nationale des Ressources et des Savoirs
RADART
Réseau national d’Aide à la Décision et d’Appui face aux Risques Technologiques
RDF
Resource Description Framework (cadre de description des ressources)
SDACR
Schéma Directeur Départemental d’Analyse et de Couverture des Risques
RETEX
RETour d’EXpérience
RH
Ressources Humaines
RSS
Really Simple Syndication (syndication de contenu)
SDIS
Service Départemental d’Incendie et de Secours
SEB
Société d'Emboutissage de Bourgogne
SGC
Système de Gestion des Connaissances
SHC
Système Hyper Complexe
SNA
Social Network Analysis (analyse des réseaux sociaux)
SNCF
Société Nationale des Chemins de Fer
SPIRAL
Serveur Pédagogique Interactif de Ressources d’Apprentissage de Lyon I
SPP
Sapeur-Pompier Professionnel
SPV
Sapeur-Pompier Volontaire
SWOT
Strengths Weaknesses Opportunities Threats (forces faiblesses opportunités
menaces).
TIC
Technologies de l’Information de la Communication
UFPI
Unité Formation Production Ingénierie
XML
eXtensible Markup Language (langage de balisage extensible)
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SOMMAIRE
INTRODUCTION
1
PARTIE 1
GESTION DES CONNAISSANCES: CONCEPT, PROCESSUS ET REPRESENTATION
4
1. Les structures de la connaissance
2. Les processus de gestion des connaissances dans l'organisation
3. Représentation du concept
PARTIE 2
VERS UNE APPROCHE MULTIDIMENSIONNELLE DANS LES SDIS
19
1. Particularités culturelles et opportunités
2. Analyse multidimensionnelle
PARTIE 3
LES BONNES PRATIQUES DE KM POUR LES SDIS 2.0
33
1. Les bonnes pratiques du knowledge management
2. Etat des bonnes pratiques référencées
3. Recommandations et préconisations
CONCLUSION
49
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PROLEGOMENES
Le sujet résulte d’une prise de conscience du département prospective et professionnalisation de
l’ENSOSP de la nécessité d’optimiser la mutualisation des connaissances et des compétences au
sein des Services Départementaux d’Incendie et de Secours (SDIS).
L’objectif est de favoriser l’émergence d’une nouvelle culture de la gestion des connaissances
fondée sur l’acquisition, le partage et l’enrichissement du savoir en vue d’améliorer la performance
individuelle et collective.
Dans un contexte budgétaire de plus en plus contraint, le Knowledge Management (KM) apportera
une plus-value managériale indéniable aux SDIS et constitue dès à présent un enjeu stratégique pour
la profession. Ce postulat de départ, selon lequel la mise en œuvre d’une démarche de KM constitue
une évolution positive pour les SDIS, est appuyé par la réalisation d’un diagnostic de type SWOT
(partie I §3.3 p17).
Ce sujet s’inscrit dans une période d’évolutions majeures. Le développement des systèmes
d’information dépasse le cadre technologique et nous impose de repenser notre mode d’organisation
sociale et culturelle pour tirer le meilleur parti des opportunités de partage de la connaissance.
Pour mémoire, le KM a été conceptualisé il y a 40 ans, s’est développé dans la sphère privée et
n’est apparu qu’au début des années 2000 dans le domaine public.
Dans la mesure où le thème très large de notre sujet n’a jamais été traité au sein de notre profession,
nous faisons le choix :
• de conserver l’anglicisme « Knowledge Management » plutôt que ses deux traductions littérales
« gestion des connaissances » ou « management des connaissances », trop restrictives dans le
champ initial de recherche de notre étude,
• de travailler sur une approche généraliste et multidisciplinaire visant à acculturer la profession à
ce concept méconnu.
Par ailleurs, notre recherche est conduite en mode projet conformément aux enseignements
dispensés à l’ENSOSP. Son champ d’application se limite aux SDIS alors que le champ de notre
étude est élargi aux domaines publics, parapublics et privés.
Tel qu’initialement proposé 1, le sujet ne nous semble pas suffisamment mettre en valeur les enjeux
majeurs liés à la gestion des connaissances. Aussi nous le reformulons de la manière suivante :
Le « Knowledge Management », une opportunité stratégique pour l’émergence d’une nouvelle
culture de gestion des connaissances : étude comparée des bonnes pratiques transposables aux
Services Départementaux d’Incendie et de Secours.
1
« La gestion des connaissances (culture du Knowledge Management) : étude comparée des bonnes pratiques existantes
pour une acculturation réussie au sein des SDIS. »
p
p7
Méthode de recherche :
Au regard du concept très théorique largement documenté, novateur et récent dans le secteur public
territorial, nous allons entreprendre une acculturation à l’ensemble des notions relatives au KM.
Cette acculturation passe par une revue de la littérature (88 articles ou livres) et de la
sitographie (27 sites). Elle est actualisée par une recherche de publications académiques (Google
Scholar) et une alerte sur les contenus web relatifs aux mots clefs de notre sujet.
Afin de structurer notre étude, nous proposons :
• dans un premier temps, de définir le concept de Knowledge Management et les notions
élémentaires essentielles à la compréhension du sujet, mais également les domaines
complémentaires et périphériques avec pour objectif une acculturation autour du concept,
• dans un second temps, de déterminer par une approche culturelle et multidimensionnelle, la
place des connaissances dans cette évolution des SDIS,
• dans un troisième temps, de détailler les bonnes pratiques issues de notre travail de
recherche, identifiées comme transposables à nos organisations, qui aboutiront à un
ensemble de recommandations et de préconisations concrètes destinées à promouvoir une
acculturation des SDIS à la gestion des connaissances.
La conclusion nous autorisera d’une part à mettre en évidence les bénéfices que nous avons su tirer
des neuf mois de travail collectif nécessaires à l’élaboration de ce mémoire et d’autre part à ouvrir
le sujet vers des perspectives plus générales.
Limites de notre étude :
L’étude vise à réaliser un état des lieux des bonnes pratiques et n’a pas pour objectif d’explorer dans
le détail une pratique spécifique du KM.
Cette étude ne s’intéressera pas non plus aux détails du déploiement d’une politique de KM pour un
SDIS en particulier.
Partant du postulat que la mise en œuvre d’une démarche de KM constitue une évolution positive
pour les SDIS, nous n’aborderons pas les critères d’évaluation, de mesure des résultats relatifs à la
mise en place de telle ou telle pratique.
Une approche des coûts relatifs à nos préconisations aurait été prématurée à ce stade d’avant-projet.
Une étude de faisabilité complémentaire à ce premier rapport pourrait être conduite dans chacun des
domaines relatifs à nos propositions en évaluant l’impact financier.
p
p8
INTRODUCTION
« La pensée sur la productivité de la connaissance est à peine naissante. » - Peter Drucker
N
ous pouvons imaginer que l’idée de la connaissance, de son appropriation et de son
transfert est une préoccupation ancienne chez l’Homme. Au-delà de sa transmission orale,
l’histoire de la connaissance humaine est intimement liée à celle des écritures, nées en
Mésopotamie avec les pictogrammes sumériens et en Egypte avec les hiéroglyphes. Les premiers
écrits précolombiens montrent déjà que les Incas ingéraient le cerveau des défunts pour en retirer
leur savoir.
Bien plus tard, Johannes Gutenberg (1400-1468) développe l’imprimerie, offrant ainsi aux hommes
les moyens de stocker, transférer et partager la connaissance. Une première étape majeure est
franchie dans la démocratisation du savoir, rendant accessible au plus grand nombre les écrits qui
étaient jusqu’alors l’apanage des monastères.
Le milieu du XXème siècle voit apparaître les premiers ordinateurs et les mémoires magnétiques
capables de stocker des informations, avant de laisser la place aux puces, mémoires électroniques
beaucoup plus puissantes.
Progressivement, la société évolue vers une période post industrielle dans laquelle l’économie des
services prend le pas sur la production de masse. La valeur de l’entreprise repose de plus en plus sur
des actifs immatériels comme la connaissance. L’idée de gérer la connaissance apparaît en 1958
avec la publication de Jay Wright Forrester sur la théorie de la croissance des entreprises et la
parution du livre de Michael Polanyi sur la connaissance tacite. L’auteur tend à démontrer que toute
forme de savoir est empreint de la subjectivité du sachant et donc que l’objectivité pure dans la
connaissance n’est qu’une illusion, même dans les sciences les plus dures comme la chimie ou les
mathématiques. A l’origine de la distinction entre connaissance explicite et connaissance tacite, il
explique que la première représente une portion congrue du savoir de l’Homme par rapport à la
seconde. Il met l’accent sur la difficulté à mobiliser cette partie du savoir : « nous savons plus que
nous ne pouvons dire » 1.
S’ensuit une série de livres et d’articles, dont la parution des ouvrages de John Kenneth Galbraith
sur la connaissance organisée 2 et de Peter Drucker sur les travailleurs de la connaissance 3. Au
milieu des années 70, le terme de « Knowledge Management ou KM» (management par les
connaissances) apparaît pour la première fois dans les travaux de Nicholas Henry (1974) 4. La
notion de KM évolue entre la fin des années 70 et le début des années 90. Une transition s’opère
petit à petit depuis la gestion et l’utilisation des informations vers une gestion centrée sur la ou les
connaissances, consacrant ainsi l’expression angliciste. Dans le milieu des années 90 et jusqu’aux
années 2000 le concept de KM se généralise et devient progressivement une pratique
professionnelle. Les japonais Ikujiro Nonaka et Hirotaka Takeuchi 5 proposent un modèle dénommé
1
Michael POLANYI, The Tacit Dimension, 1967.
John Kenneth GALBRAITH, Le nouvel Etat industriel, 1967.
3
Peter DRUCKER The age of discontinuity guidlines to our changing society, 1968.
4
Nicholas L HENRY, KM : A new concern for public administration, Public Administration Review 1974.
5
Ikujiro NONAKA et Hirotaka TAKEUCHI, La connaissance créatrice : dynamique de l’entreprise apprenante, 1997.
2
p1
SECI (Socialization, Externalization, Combination, Information), précédant le modèle de Karl Erik
Sveiby (2001), mais faisant encore référence aujourd’hui.
Enfin à partir des années 2000, le KM prend son plein essor, les ouvrages et les publications
scientifiques se multiplient, de nombreuses conférences sur le sujet sont organisées en Europe, les
débats se créent autour des définitions données à ce concept récent. De nombreuses taxonomies
apparaissent dans la littérature. A cette époque, le Conseil Européen de Lisbonne 1 fixe un nouvel
objectif stratégique dans le but de renforcer l’emploi, la réforme économique et la cohésion sociale.
Un projet ambitieux voit le jour : « faire de l'Union Européenne l'économie fondée sur la
connaissance la plus compétitive et la plus dynamique au monde, capable d'une croissance
économique durable accompagnée d'une amélioration quantitative et qualitative de l'emploi et d'une
plus grande cohésion sociale ».
La société de l’information est en marche et les détenteurs de savoirs de plus en plus nombreux.
Elle ne va pas tarder à laisser la place à une nouvelle société « 2.0. » dite apprenante qui marque le
franchissement d’une seconde étape et ouvre une nouvelle ère concernant l’accès, le partage et la
valorisation de la connaissance. Michel Serres affirme que « sans que nous nous en apercevions, un
nouvel humain est né, pendant un intervalle bref, celui qui nous sépare des années 1970 » 2.
Dans le sillage des entreprises, l’ensemble des organisations et services publics prennent conscience
de la valeur de la connaissance. Les collectivités territoriales, ont progressivement évolué vers
l’autonomie financière, décisionnelle, et sont dotées depuis les lois de décentralisation 3 de
compétences propres, et d’un pouvoir d’expérimentation. Les collectivités sont donc devenues des
moteurs de l’action publique et la connaissance leur est apparue cruciale dans le but d’accompagner
les mutations sociales et technologiques qui s’imposent à elles : nouvelles attentes des citoyens,
besoin d’efficience, développement du territoire, transparence...
C’est dans ce contexte que, durant les années 2000, les Services Départementaux d’Incendie et de
Secours (SDIS) sont créés par la loi antérieurement promulguée le 06 mai 1996, après une période
de gestation d’une quarantaine d’années. Ces jeunes établissements publics s’organisent et se
structurent avec la difficulté de fédérer des hommes et des femmes de statuts différents, de cultures
parfois différentes, ancrés dans l’histoire communale. Ces difficultés s’aggravent dans un contexte
de profond changement sociétal, où l’on consomme du secours comme tout autre service ou denrée,
où l’information devient essentielle, voire cruciale, pour permettre des secours adaptés à la nature
de la mission dans des délais raisonnables.
L’ENSOSP a accompagné cette mutation en intégrant le site d’Aix-Les-Milles, se dotant du statut
d’établissement public 4. Le décret fondateur précise ses missions dont « l’animation du réseau des
écoles de sapeurs-pompiers, et notamment la coordination, en liaison avec les préfets de zone, des
formations, des recherches et des actions de coopération assurées par ces écoles » et « la recherche,
les études, l’évaluation, la prospective, la veille technologique ainsi que la diffusion de
l’information y afférent dans les domaines relevant du champ de compétence des services
départementaux d’incendie et de secours ».
1
réunion extraordinaire du Conseil européen de Lisbonne des 23 et 24 mars 2000.
Michel SERRES, Petite Poucette, 2012.
3
Loi DEFFERRE n° 82-213 du 2 mars 1982.
4
Décret n°2004-502 du 7 juin 2004.
2
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Elle a pour mission de faciliter et de coordonner le partage de la connaissance et des savoirs au sein
de la profession et en interservices. Elle se propose d’aider les SDIS à opérer la mutation qui les
conduira vers une organisation 2.0 en se dotant d’outils comme le Portail National de Ressources et
de Savoirs (PNRS) en constante évolution au sein de sa division prospective et professionnalisation.
Souhaitée par les uns, cette culture du savoir est redoutée par les autres qui vivent la connaissance
comme l’objet d’un pouvoir, craignant de perdre dans son partage leurs prérogatives individuelles.
Quelle qu’en soit la perception, elle est source d’une évolution sans précédent qui nous interpelle.
Quel est l’état actuel d’appropriation du concept de KM par les SDIS ? Quels bénéfices peuvent-ils
attendre de la mise en œuvre d’une démarche de KM ? Quelles stratégies doivent-ils mettre en place
pour intégrer cette culture de l’exploitation et de la préservation des connaissances ? Enfin quelles
pratiques du KM les SDIS peuvent-ils mettre en œuvre pour que cette nouvelle culture soit une
réussite partagée ?
De ce questionnement, la problématique générale suivante est posée :
Quelles bonnes pratiques de KM peuvent faire évoluer les SDIS vers une nouvelle culture de
la gestion des connaissances ?
La première partie de ce mémoire est essentiellement dédiée aux concept et processus du KM afin
que le lecteur appréhende les fondamentaux de la gestion des connaissances. Dans ce contexte, une
cartographie du concept matérialise notre propre représentation du sujet. Une veille
environnementale à l’étude, complète notre vision pour poser nos hypothèses de travail.
Dans la seconde partie, nous étudions, à partir d’entretiens exploratoires, la compatibilité de la
gestion des connaissances avec la culture des sapeurs-pompiers. Cette étude est complétée par une
approche multidimensionnelle structurée autour des quatre axes : la stratégie et le pilotage du SDIS,
l’organisation des SDIS, l’homme dans sa dimension individuelle et collective, les technologies de
l’information et les conditions matérielles.
Dans la troisième partie, par le biais d’enquêtes sur les pratiques de terrain sous forme d’entretiens
semi-directifs, nous identifierons :
• l’état des pratiques intrinsèques aux SDIS, à partir d’un échantillon représentatif des différentes
catégories (à l’exception de la 5° catégorie),
• les bonnes pratiques, extrinsèques aux SDIS, recueillies auprès d’organisations ayant développé
des techniques de KM de manière implicite ou explicite.
Cette démarche comparative (benchmarking), nous permettra de déterminer les bonnes pratiques
transposables aux SDIS. Nous terminerons par des recommandations et des préconisations pour une
mise en œuvre facilitant la transition des SDIS vers un mode d’organisation dite « apprenante ».
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PARTIE 1
GESTION DES CONNAISSANCES : CONCEPT, PROCESSUS ET REPRESENTATIONS
« La connaissance s’acquiert par l’expérience, tout le reste n’est que de l’information » - Albert Einstein
L
’approche du concept de « knowledge management » ne peut être dissociée du contexte dans
lequel il s’est développé depuis les années 1970. La connaissance, bien immatériel des
entreprises, est devenue « un actif déterminant sur le marché concurrentiel et une ressource
clé pour les entreprises »1.
En France, à partir des années 1990, les « baby-boomers » quittent le monde du travail en emportant
avec eux les connaissances acquises, à l’image d’EDF qui subit massivement le départ des pionniers
de la production d’électricité d’origine nucléaire. Parallèlement, les nouvelles technologies de
l’information sont utilisées pour capitaliser les connaissances. Il devient alors indispensable de
gérer ces connaissances.
Pour répondre aux besoins de ce marché naissant, les cabinets de conseil développent le concept de
knowledge management 2 permettant aux organisations de faire face au turn-over de leurs
personnels, comme aux problématiques de sous-traitance nécessitant d’identifier et de distinguer les
savoirs transférables (externalisables) des savoirs cruciaux.
Après avoir défini les notions essentielles liées à la connaissance, nous détaillerons les processus
qui participent à la gestion des connaissances puis resituerons le concept dans son contexte
environnemental afin d’établir nos hypothèses de recherche.
1. LES STRUCTURES DE LA CONNAISSANCE
Le grand dictionnaire terminologique québécois offre depuis 2001 une définition de la gestion des
connaissances : « gestion, par des moyens informatiques, des informations significatives qui sont
acquises par une entreprise et qui y circulent, ainsi que du savoir-faire développé par le personnel,
de manière à créer un système interactif de formation continue qui débouche sur une meilleure
qualité des produits et services, ainsi que sur une plus grande compétitivité de l'entreprise ».
Le dictionnaire de l’information 3, définit le management des connaissances comme « la gestion
organisée, coordonnée et opérationnelle des savoirs et des savoir-faire individuels et collectifs dans
les organisations ». Le management des connaissances ou knowledge management se distingue de la
veille stratégique et de l'intelligence économique. Il « s'intéresse aux informations et aux
connaissances internes, mêmes si celles-ci sont alimentées et enrichies par des apports externes ».
Partant du constat que le knowledge management est un concept complexe, Jean-Yves Prax 4
propose différentes définitions. Nous en retenons deux, faisant référence à des termes largement
empruntés au monde de l’entreprise, mais qui couvrent au mieux le champ de notre étude.
1
Aurélie DUDEZERT, La connaissance dans les entreprises, 2013.
Arthur ANDERSEN, 1996.
3
Serge CACALY, Le dictionnaire de l’information, 2008.
4
Jean-Yves PRAX, Manuel du Knowledge Management, 2012.
2
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p4
Définition opérationnelle : il s’agit de « combiner les savoirs et savoir-faire dans les process,
produits, organisations, pour créer de la valeur ». En d’autres termes, l’amélioration de la
performance d’une entreprise passe par l’association de savoirs (explicites et diffusables) et de
savoir-faire (tacites et non-diffusables).
Définition économique : il s’agit de valoriser le capital intellectuel de l’entreprise, c’est-à-dire
l’ensemble des savoirs et des savoir-faire, d’exploiter les compétences déjà présentes, en vue
d’améliorer sa productivité.
1.1. La donnée et l’information : constituants élémentaires de la connaissance
1.1.1. La donnée
La donnée est « un fait ou principe indiscuté, ou considéré comme tel, sur lequel se fonde un
raisonnement » 1. Elle est le résultat d'une constatation, d'une observation ou d'une mesure. Elle se
veut objective dans le sens où elle ne fait pas l’objet d’une interprétation. Elle est le constituant
élémentaire du processus de création de la connaissance qui repose sur la possibilité d'acquérir, de
stocker et de partager un volume important de données.
1.1.2. L’information
L'information est « une association significative de données portées sur un support selon un code
prédéfini »2. Elle revêt un caractère subjectif dans le sens où l'émetteur organise cet ensemble de
données dans le but de délivrer un message. Robert Reix décrit le lien existant entre les données et
l’information : « passer du monde des symboles à celui du sens, des significations, donc des
données à l’information, n’est pas automatique, mais se réalise par l’intermédiaire de processus
spécifiques d’interprétation, de cognition »3. Il définit le système d’information comme un
« ensemble organisé de ressources : matériel, logiciel, personnel, données, procédures… permettant
d’acquérir, de traiter, de stocker des informations ». Il montre ainsi l’importance du système
d’information au sein des organisations.
Le but de l’information est bien de créer une différence, en modifiant notre vision du monde. Aussi,
l’information doit nous permettre de répondre à la question suivante : « des données, pour quoi
faire ? ».
Peter Drucker décrit ce que doit être un « bon » système d'information : « Il doit l'amener [le
dirigeant] à se poser les bonnes questions, et ne pas se contenter de lui fournir l'information qu'il
attend. Cela suppose [qu’il] sache d'abord de quelle information il a besoin (…) ensuite qu'il
obtienne l'information de façon régulière. Cela implique qu'il tienne compte systématiquement de
cette information lorsqu'il prend des décisions »4.
L'information revêt donc une importance capitale dans le processus du KM dans le sens où elle
constitue réellement le lien qui, à partir de la valorisation de la donnée, nous permet d'accéder à la
connaissance.
1
Dictionnaire de l'académie française.
Norme FD X50-190 Outils de management - Capitalisation d'expérience, 2000.
3
Robert REIX, Systèmes d’information et management des organisations, 2011.
4
Peter DRUCKER, L’avenir du management, 2010.
2
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p5
1.2. Les notions de connaissance, compétence et savoir
Les notions de connaissance, de compétence et de savoir sont étroitement liées à travers un
processus cognitif structuré dans un environnement donné.
1.2.1. La connaissance
L’Académie française considère la connaissance comme un acte de l’esprit par lequel un objet est
représenté, défini ou compris 1. Elle est également « l’ensemble des représentations, idées ou
perceptions acquises par l’étude ou l’expérience » 2. Dans le même esprit, Michel Ferrary et Yvon
Pesqueux 3 mettent en évidence la dualité entre une vision rationaliste où la connaissance s’acquiert
par le raisonnement a priori et une approche empirique où la connaissance s’acquiert par
l’expérience a posteriori. Ils différencient en outre la « connaissance » relevant de l’interaction entre
un individu et une chose ou entre individus, des « connaissances » qui relèvent plus globalement de
la communauté d’individus. Qu’elle soit théorique ou pratique (l’intellect versus les sens), la
connaissance est par essence même cumulative et transférable.
Jean-Yves Prax 4 montre que l’acquisition de la connaissance résulte d’un processus de
réappropriation cognitive par l’homme, d’informations soumises à son interprétation. En traitant ces
informations à travers les filtres de son vécu (expérience, milieu social, professionnel…), il peut se
les représenter, les faire calquer à sa réalité. Ainsi, il leur confère le sens indispensable à leur
assimilation.
Il serait toutefois réducteur de considérer la connaissance comme la simple compilation
d’informations stockées en mémoire. La connaissance doit être construite, ordonnée, pour pouvoir
être activée en fonction du besoin. Elle est indissociable de l’individu et par conséquent subjective.
Deux formes de connaissance cohabitent4 :
• la connaissance explicite réfère au « savoir » : verbalisable, transmissible oralement ou par
l’écriture. Elle peut être on non liée à un contexte, elle est créée par le raisonnement, la
narration, la déclaration ; elle revêt un caractère analytique et tend à être objective ;
• la connaissance tacite réfère au « savoir-faire » : non verbalisable, c’est une connaissance
pratique qui résulte de l’expérience et se traduit par le geste. Elle s’acquiert par le corps, se
transmet par observation, imitation, répétition à travers le tutorat, le compagnonnage,
l’apprentissage, l’entraînement… elle est créée par l’action et revêt un caractère physique et
subjectif.
La connaissance inclut également une forme de connaissance dite « implicite » se référant à
« tout ce qui n’est pas dit parce que cela va de soi »4. En matière de « savoir » comme de « savoirfaire », les non-dits par omission (« on croit que l’autre sait », « on ne sait pas que l’on sait »)
constituent inévitablement une source de malentendus parce que non conscientisés donc difficiles à
verbaliser (en particuliers lorsque la transmission de connaissance émane d’experts).
1
9ème dictionnaire de l’Académie française.
AFNOR, Valoriser la connaissance dans l’entreprise, Afnor Edition, 2011.
3
Michel FERRARY Yvon PESQUEUX, Management de la connaissance, Paris, 2011.
4
Jean-Yves PRAX, Manuel du Knowledge Management, 2012.
2
p6
p6
1.2.2. La compétence
Les compétences « concernent la mise en œuvre intégrée d'aptitudes, de traits de personnalité et
aussi de connaissances acquises, pour mener à bien une mission complexe dans le cadre de
l'entreprise qui en a chargé l'individu, et dans l'esprit de ses stratégies et de sa culture » 1.
La compétence, qui peut être individuelle ou collective est la « mise en action » de la connaissance,
dans un contexte précis qui est celui de l'organisation, et dans un but qui a été fixé. A la différence
de la connaissance, la compétence implique un jugement par les pairs, qui se caractérise par la
capacité à atteindre les objectifs par les connaissances, les aptitudes et les traits de personnalité mis
en œuvre.
1.2.3. Le savoir
Le savoir peut se définir comme un ensemble cohérent de connaissances acquises au contact de la
réalité ou par l'étude 2.
D’ailleurs, Knowledge se traduit à la fois par « savoir » et « connaissance ». Il persiste
communément une confusion entre ces deux termes, le savoir étant plus large que la connaissance.
Toutefois, « la notion de savoir implique des certitudes plus précises ou pratiques, alors que la
connaissance correspond à une compréhension plus globale ou analytique » 3.
Si la connaissance a cette connotation fondamentale, le savoir peut être un savoir-faire, beaucoup
plus pratique et destiné à être projeté dans le monde. Il est dès lors possible de considérer le savoir
comme une application de la connaissance.
En référence aux travaux de Martine Girod-Seville 4, nous identifions trois types de savoirs :
• le savoir déclaratif : « quoi faire ? »… savoirs explicites dans le domaine technique,
scientifique, administratif,
• le savoir procédural : « comment faire ? »… savoir mettre en application dans
l’exercice de son travail (exemple : bureau méthodes),
• le savoir de jugement : « que faire ? »… conduite à tenir, comportement à adopter,
solutions à mettre en œuvre en fonction du contexte.
Le savoir peut être codifié c’est-à-dire formalisé, validé pour être plus facilement réutilisé et enrichi
par l’organisation ou au contraire, informel lorsqu’il échappe au contrôle de l’organisation.
Dans cette même logique, Peter Drucker 5 introduit la notion de « travailleur du savoir », autonome
et responsable de sa propre productivité. La qualité de sa production doit primer sur la quantité,
dans une dynamique d’innovation continue. Dans une démarche personnelle d’apprentissage
permanent, il doit aussi enseigner pour transmettre son savoir. Il œuvre avec conviction pour son
organisation qui le considère comme « un actif et non comme un coût ». Le KM préfigure ainsi
l’entrée de l’homme dans cette nouvelle « société du savoir » ou « société post-capitaliste »
annoncée par Peter Drucker en 1993.
1
Claude LEVY-LEBOYER, La gestion des compétences, 2009.
Définition Larousse.
3
Vincent IACOLARE, Valoriser la connaissance dans l’entreprise, AFNOR Edition, 2011.
4
Martine GIROD-SEVILLE, La mémoire organisationnelle, Revue française de gestion n°105 (thèse), 1995.
5
Peter DRUCKER, L'avenir du management, 1999.
2
p7
p7
1.3. La notion de culture
1.3.1.
Aspect général
Le mot culture revêt de multiples sens (sociétal, idéologique, sociologique, artistique...). Dans sa
définition la plus générale, la culture est « l'ensemble des traits distinctifs, spirituels et matériels,
intellectuels et affectifs, qui caractérisent une société ou un groupe social. Elle englobe, outre les
arts et les lettres, les modes de vie, les droits fondamentaux de l'être humain, les systèmes de
valeurs, les traditions et les croyances » 1.
Dans sa dimension individuelle, elle est appelée « culture générale » et caractérise « l’ensemble
des connaissances qui enrichissent l'esprit, affinent le goût et l'esprit critique ». Elle désigne
également « l’ensemble des connaissances acquises dans un domaine particulier » ou encore, au
sein d’un groupe social, « l’ensemble de signes caractéristiques d’un comportement de
quelqu’un… » 2. La culture est évolutive et variable d’un individu à l’autre.
Dans sa dimension collective, c’est « l’ensemble des phénomènes matériels et idéologiques qui
caractérisent un groupe ethnique ou une nation, une civilisation, par opposition à un autre groupe ou
à une autre nation ». Au delà de la « culture de masse », définie par « l’ensemble des
comportements, des mythes ou des représentations collectives qui sont produits et diffusés
massivement par les médias», il y a la « culture d’entreprise » considérant « l’ensemble des
traditions de structure et de savoir-faire qui assurent un code de comportement implicite et la
cohésion à l'intérieur de l'entreprise… »2. Développer et impulser une culture d’entreprise, c’est en
effet permettre aux agents ou aux salariés de se reconnaître à travers des valeurs, une éthique, une
charte commune et de renforcer la cohésion, le sentiment d’appartenance au groupe. Ils sont incités
à participer activement, chacun à son niveau, à la stratégie générale mise en place par
l’organisation. C’est aussi donner une image de marque valorisant l’entreprise et la profession.
La culture collective, suffisamment enracinée et stable, offre le repère de valeurs communes
permettant au plus grand nombre de s’identifier au sein de la collectivité.
1.3.2.
Culture organisationnelle
La culture organisationnelle est la « façon apprise, partagée et transmise de percevoir, penser et
ressentir parmi les membres organisationnels » 3.
Trois strates composent la culture organisationnelle :
• la première est celle relative aux artefacts culturels, c’est-à-dire aux choses palpables, aux
objets construits par les membres de l’organisation. Ces manifestations tangibles englobent
le langage, les symboles, les pratiques, les cérémonies,
• la seconde, moins visible mais accessible par une bonne lecture du premier niveau, concerne
les valeurs affichées. Elles possèdent un caractère normatif dans le sens où elles fixent le
cadre de ce qui est valorisé ou au contraire de ce qui est perçu comme inacceptable par
l’organisation,
• la troisième décline les principes « tenus pour acquis », les valeurs inconscientes pratiquées,
c'est à dire les orientations qui ne se discutent plus. Elles sont tellement acquises qu’elles ne
1
UNESCO Déclaration de Mexico, Conférence mondiale sur les politiques culturelles, 1982.
Définitions Larousse.
3
Edgar SCHEIN, Organizational Culture and Leadership, 1985.
2
p8
p8
sont plus remises en question mais déterminent inconsciemment les perceptions et les façons
de penser propres à l’organisation.
1.3.3.
Culture de la gestion des connaissances
La culture de l’entreprise constitue un ensemble de codes communs facilitant la communication et
donc le partage des connaissances. C’est également un héritage en perpétuelle évolution qu’il faut
constamment revivifier. A la différence des biens matériels qui s’échangent par possession ou
dépossession, les biens culturels s’échangent eux par enrichissement mutuel. La diversité des
cultures au sein d’une organisation est donc une source d’échanges et d’enrichissements qui
participent au KM. « Le savoir est la seule ressource qui prend de la valeur en la partageant »1.
En même temps, plus une société devient complexe, plus elle a besoin d’avoir une culture forte pour
rester unifiée. Le partage de biens culturels, telles les connaissances, unifie dans le sens où il génère
un bien commun plus fort que l’intérêt commun par sa dimension collective propre au corps social.
La mise en œuvre d’une politique de KM correspond à une culture consciente du savoir. Elle
nécessite dans un premier temps de calquer à la culture d’entreprise et aux cultures associées pour
permettre un changement culturel individuel et collectif profond. La « culture » semble être le
facteur prépondérant pour une gestion des connaissances réussie. Elle influe directement sur les
comportements. Aussi, nous verrons dans la deuxième partie ce que sont les cultures des sapeurspompiers et des SDIS pour comprendre comment réussir la transition vers une organisation centrée
sur la connaissance.
C’est cette nouvelle culture - culture apprenante, culture du partage, culture de la transmission,
culture du savoir - qui doit être transposée sur notre culture organisationnelle traditionnelle.
2. LES PROCESSUS DE GESTION DES CONNAISSANCES DANS L’ORGANISATION
Nous avons vu que le savoir comporte une composante pratique et une composante théorique. La
cohérence des connaissances organisationnelles s’inscrit dans un cercle vertueux « du savoir » qui
constitue un processus intégré.
2.1. Le cycle de vie du savoir
2.1.1. L’identification de connaissances
L’identification de la connaissance existante est un préalable essentiel pour soutenir la prise de
décision dans l’organisation. Cette identification inclut à la fois une analyse fine au sujet de la
connaissance existante mais également une étude de la connaissance manquante pour l’organisation
(caractérisation de l’ignorance). Cela se traduit au niveau organisationnel par la recherche de
connaissances dites stratégiques et au niveau individuel par un enrichissement quotidien à partir des
informations et données circulantes.
2.1.2. La création de connaissances
Ikujiro Nonaka définit quatre états de la connaissance : la connaissance explicite individuelle, la
connaissance explicite collective, la connaissance tacite individuelle, et la connaissance tacite
1
Jean-François BALLAY, Tous managers du savoir !, 2002.
p9
p9
collective 1. Il schématise sous forme de matrice dite « matrice de Nonaka » (cf. figure 1) l’ensemble
des interactions possibles entre ces quatre états par lesquels passe toute création de connaissance. A
l’échelle d’une communauté d’individus, la production de connaissances résulte de l’interaction
entre ses membres dans un contexte défini, ce qui lui confère une dimension organisationnelle.
Cette interaction sociale s’opère par l’apprentissage, par la pratique, par la résolution commune de
problèmes, et le brainstorming.
Figure 1 : spirale de la connaissance
2.1.3. Le stockage des connaissances
Le stockage représente la volonté de capitaliser cette connaissance stratégique ou cruciale après
qu’elle a été identifiée et créée. La capitalisation est l’ensemble des processus par lesquels des
informations et des connaissances sont répertoriées, évaluées, rassemblées, formalisées, codifiées,
classifiées, commentées, synthétisées, de façon à constituer une base de connaissances.
Lorsque les connaissances sont explicites, le savoir peut être récupéré à partir des porteurs de
connaissances. Lorsqu’elles sont tacites, il faut encourager le transfert de connaissances de type
« maître - apprenti » et les réseaux de communication entre les personnes. Ainsi la connaissance
tacite est incorporée dans le groupe ou dans des routines organisationnelles sans avoir été
explicitement décrite et reste disponible et réutilisable par l’organisation.
2.1.4. Le partage des connaissances
Le management des activités et des processus destinés à amplifier l’utilisation et la création de
connaissances par le partage constitue un axe principal du knowledge management dans de
nombreuses publications.
1
I NONAKA et H TAKEUCHI, La connaissance créatrice : la dynamique de l’entreprise apprenante, 1997.
p10
p10
Les gains potentiels escomptés à travers ce partage sont la réduction des erreurs, des redondances,
des coûts de recherche et développement, la résolution plus rapide de problèmes, l’amélioration de
la prise de décision et du service rendu, l’accroissement de l’autonomie des agents.
Au-delà du partage rendu obligatoire par des évolutions conjoncturelles (mutations, départs à la
retraite, sous-traitance, restructurations), le partage peut être intergénérationnel. Il impose donc une
ouverture d’esprit et une évolution culturelle afin d’éviter la perte de savoirs et savoir-faire.
2.1.5. L’utilisation des connaissances
Les connaissances représentent une valeur à compter du moment où elles sont utilisables par
l’organisation. Pour les mettre au service du développement et de l'expansion de l'entreprise, il est
nécessaire de les rendre accessibles selon certaines règles de confidentialité et de sécurité, de les
diffuser, les partager, les exploiter, les combiner pour créer des connaissances nouvelles.
A partir de cette étape, le cycle du savoir est amorcé et il ne pourra se poursuivre que dans des
circonstances particulières relevant des activateurs propices à la gestion des connaissances (cf.
partie 1§2.2.3).
L’utilisation efficace des connaissances est étroitement subordonnée à la mise en œuvre, par
l’organisation, d’une approche pédagogique globale. Elle vise en amont, à insuffler à l’ensemble de
ses membres une vraie dynamique de partage « on ne partage bien que ce que l’on veut partager ».
En effet, quelles que soient les méthodes de partage des connaissances mises en œuvre, si elles
demeurent trop complexes, peu accessibles ou méconnues des utilisateurs, un échec est prévisible.
2.2. Projet de gestion des connaissances
2.2.1. Vision et management stratégique
A l’instar de l’Etat, les collectivités locales en général et les SDIS en particulier n’échappent pas à
la modernisation de l’action publique. La stratégie, doit être repensée pour rester en adéquation avec
les mutations socio-économiques présentes. Stratégie, vision et buts à atteindre ne consistent pas en
une étape unique mais en un processus itératif continu. Ces sujets fondamentaux relèvent de la
responsabilité entière de la direction et motivent généralement les questionnements suivants 1:
• Comment donner une orientation générale au KM ?
• Pourquoi la gestion des connaissances est-elle importante dans l’environnement actuel et
futur ?
• Comment devenir une organisation orientée vers la gestion des connaissances ?
• Quels sont nos buts ?
• Par quoi commencer ?
• Comment l’organisation orientée vers la gestion des connaissances s’inscrira-t-elle dans le
futur ?
• Quelle connaissance mériterait d’être gérée aujourd'hui et dans l’avenir ?
Les dirigeants sont obligés de posséder une forte compréhension des besoins de l’organisation et de
son environnement, pour avoir une bonne vision et définir les bons objectifs. Le contexte pouvant
évoluer, la stratégie doit être concise, développée sur une période de temps assez courte et assortie
d’un contrôle en révision dans le futur1. L’instauration d’un nouveau processus dans l’organisation
1
CEN Workshop Agreement, Guide européen de bonne pratique de gestion des connaissances, chapitre 2, 2003.
p11
p11
oblige préalablement l’équipe de direction à consacrer du temps à l’examen de ces enjeux
stratégiques. C’est le cas pour préparer la mise en œuvre d’une nouvelle pratique managériale
centrée sur la gestion des connaissances. Toujours selon le Comité Européen de Normalisation :
« L’appui actif des cadres supérieurs a été identifié comme un facteur de succès critique. ».
Le KM, en tant que projet complexe, impose une méthode de pilotage global par ses multiples
facettes (conduite du changement, organisation et méthodes, travail de communication,
capitalisation de contenus de toute nature, utilisation d’outils technologiques…).
La mise en œuvre d’une démarche de KM est analysée comme une véritable conduite du
changement, en s’inspirant de la philosophie du « Penser Global, Agir Local » 1. Ce principe est
matérialisé par la notion de « projets de percées ». En effet, si l’on veut motiver des personnes à
partager leurs savoirs et savoir-faire, il faut prendre en compte les facteurs culturels et humains
(confiance, sens, réciprocité, gain et non pas uniquement des outils ou des procédures).
La gestion des connaissances ne se décrète pas, elle s'expérimente. Le KM est un projet qui se
construit aussi par déploiement d'initiatives locales. « Le cercle vertueux du partage est plus facile à
initier sur un petit groupe »2. L’idée de « tribu » concentre les conditions de cet échange : un climat
de confiance, un management de proximité, une notion de « troc implicite », des temps de
rencontre, une territorialité, une reconnaissance par les pairs.
Ces deux approches managériales (dites « top-down » et « bottom-up ») ne sont pas contradictoires.
Elles font l’objet dans la deuxième partie d’un approfondissement pour orienter le choix des SDIS.
2.2.2. Choix tactiques de mise en œuvre du KM
La mise en place d’une démarche de KM peut se faire selon deux approches opérationnelles
complémentaires, la codification et la personnalisation.
La codification ou approche technologique traite la connaissance dans un système d’informations
indépendamment de celui qui la créé ou l’utilise, selon deux finalités distinctes :
• la première plutôt statique ou patrimoniale vise le traitement fonctionnel de la connaissance
depuis sa création jusqu’à sa réutilisation en passant par son stockage,
• la seconde, plus dynamique se focalise sur l’apprentissage organisationnel depuis l’individu
jusqu’à l’organisation.
Le développement du KM au sein de l’organisation s’appuie fortement sur les multiples outils que
proposent aujourd’hui les Technologies d’Information et de Communication (TIC). Ces
technologies semblent offrir, de prime abord, une réponse évidente à une problématique de gestion
des connaissances. Toutefois, cette approche techno-centrée est remise en cause. Ce modèle est
perfectible en particulier pour repérer, expliciter et transférer la connaissance tacite 3. Une bonne
gestion des connaissances tacites, moins formelles et non codifiées, relève avant tout d’échanges
humains directs.
La personnalisation ou approche managériale tend vers cet objectif. Si les vingt premières
années ont consacré le KM dans sa dimension techno-centrée, nous assistons depuis quelques
années au développement d’une approche humano-centrée. Cette approche positionne l’individu au
cœur de la démarche et s’appuie sur ses besoins et motivations. Le KM ne peut être réduit à « une
1
Ginette MONTCHO, Ministère de l’économie, de l’industrie et de l’emploi, secteur pétrolier.
Gonzague CHASTENET DE GERY, Ernst and Young Conseils, ancien directeur.
3
I NONAKA et H TAKEUCHI, La connaissance créatrice : la dynamique de l’entreprise apprenante, 1997.
2
p12
p12
simple boîte à outils ». C’est la vision de Jean-Yves Prax : « La disparition progressive de la
frontière entre le professionnel et le privé... sur le plan de la connaissance et des idées, c’est
l’homme qui s’est mis en réseau ! » 1.
Ces deux approches peuvent coexister sous l’appellation « knowledge mix » 2, mais avec une
prédominance marquée de l’une sur l’autre (rapport 20% / 80%). Il appartient aux équipes
dirigeantes de faire ce choix initial. Vouloir développer à part égale celles-ci dans une organisation
est voué à l’échec 3.
Le choix d’un « knowledge mix » va permettre à l’organisation de mettre en œuvre un ensemble
d’actions coordonnées. A ce titre, le CEN entend au sens large par outils de KM, « l’ensemble
générique des outils qui permettent la mise en œuvre de processus de KM. Ceux-ci peuvent être
tantôt les systèmes d’information, tantôt des méthodologies, ou encore des réseaux humains ».
Néanmoins, il est d’usage courant de considérer les outils sur un plan technologique. C’est la raison
pour laquelle nous utiliserons préférentiellement le terme de « pratiques » qui nous semble mieux
représenter les approches technologiques et managériales.
2.2.3. Les activateurs du knowledge management
Au-delà des pratiques dédiées, le CEN a mis en évidence le rôle déterminant de certains facteurs à
travers une enquête auprès de nombreuses sociétés européennes. Ces facteurs de succès d’un projet
de gestion des connaissances sont nommés « activateurs de KM ». Ces activateurs synthétisent
l’ensemble des notions abordées dans la première partie. Ils montrent la complexité du sujet et font
l’objet d’un développement particulier dans la deuxième partie.
50
47
40
30
28
28
27
%
30
20
10
0
culture
d'entreprise
organisation et technologie de compétences
processus
l'information et motivations
soutien de la
direction
Figure 2 : les activateurs de KM (CEN)
1
2
3
Jean-Yves PRAX, Manuel du Knowledge Management, 2012.
Aurélie DUDEZERT, La connaissance dans les entreprises, 2013.
CEN Workshop Agreement, Guide européen de bonne pratique de gestion des connaissances, chapitre 5.
p13
p13
3. REPRESENTATION DU CONCEPT
3.1. Carte heuristique
Notre représentation de la réalité est imparfaite par nature. Une cartographie du concept jointe en
annexe n°1 nous permet de partager notre vision du sujet et montre à la fois son étendue et sa
complexité.
3.2. Veille environnementale
3.2.1. Approche de la complexité
Les vingt dernières années sont marquées par un accroissement considérable des entités et des
interactions, que ce soient celles liées à la mondialisation, ou celles liées à l’avènement et
l’utilisation du web 2.0. Notre conscience évolue vers la multidimensionnalité.
Cette (r)évolution de notre représentation du monde nécessite une nouvelle approche. Si la méthode
cartésienne a permis des progrès scientifiques sans précédent ces deux derniers siècles, elle a
enrichi chaque vision de manière unidimensionnelle, spécialisée, donc parcellaire.
La nouvelle approche multidimensionnelle de l’univers et de sa complexité dépasse les capacités de
notre cerveau. Elle est adaptée à un système dynamique, comportant par là même des
indéterminations, des incertitudes, des aléas, sources de changements permanents et de complexité
croissante.
Selon Edgar Morin 1, « Pour nous aider à penser la complexité du réel, nous avons besoin de macro
concepts et de méta points de vue :
• le premier principe de dialogique nous permet de maintenir la dualité au sein de l’unité. Il
associe deux termes à la fois complémentaires et antagonistes [exemple : de par la nature
même de leur missions, les SDIS oscillent en permanence entre un fort besoin de sécurité et
la nécessaire prise de risques en intervention],
• le deuxième principe est celui de la récursion organisationnelle : un processus récursif est
un processus où les produits et les effets sont en même temps causes et producteurs de ce qui
les produit [exemple : de par la bonne couverture du territoire, les SDIS sont amenés à
réaliser des missions par carence d’autres services ce qui engendre une augmentation de
l’activité générant une sur-sollicitation des moyens et impactant cette couverture du
territoire].
• le troisième principe est hologrammatique : non seulement la partie est dans le tout, mais le
tout est dans la partie [exemple : dans la gestion d’une organisation, faire connaître la vision
stratégique sans qu’il y ait appauvrissement du message au fil de la descente des échelons
hiérarchiques, permet à chaque agent spécialisé sur son poste, de resituer son action
quotidienne dans la perspective globale] ».
1
Edgar MORIN, Introduction à la pensée complexe, Ed. Seuil, 1990.
p14
p14
3.2.2. Contexte périphérique à notre étude
Contexte temporel et institutionnel
Cette ère qui émerge, est basée sur la technologie de publication via internet. Elle évolue à une
vitesse considérable et notre société ne la pense pas. Nous vivons en vingt ans une transformation
comparable à celle qui a mis deux siècles (entre Gutenberg et Voltaire) à démocratiser le savoir
grâce à l’imprimerie.
Or, la vitesse des transformations du monde numérique ne correspond pas à la vitesse des
transformations de nos institutions. Pour atténuer ce décalage, il est nécessaire de mettre en place
des moyens adaptés, de travail, de « recherche-action »1 ; des thèses sur l’impact du numérique dans
tous les domaines. Il est indispensable d’anticiper et de penser fondamentalement la transformation
liée au numérique dans le domaine des SDIS.
Contexte sociétal, générationnel et décisionnel
A titre d’exemple au sein de l’Education Nationale, il existe un décalage entre l’orientation fixée par
le Ministre Vincent Peillon selon laquelle « il faut introduire le numérique à l’école », et la
génération Y.
En effet, le taux d’équipement en moyens numériques et le niveau général de formation de la
population française sont bons. Mais il y a d’après Divina Frau-Meigs 2 « une sclérose totale au
niveau de l’éducation (…) en partie due au fait que nous sommes centralisés… ». Selon elle, « il
faut convaincre nos décideurs qui ont réussi dans un système qui n’était pas celui-là (...). Ils ont du
mal à se projeter dans le futur des jeunes et en sont extrêmement coupés. Les verrous sont les
décideurs peu convaincus du numérique et [qui] font soit la langue de bois (l’inscrivent dans les
textes mais ne mettent pas les ressources à disposition) soit reviennent sur les fondamentaux (savoir
lire et écrire) ».
Cet exemple de décalage dans le monde de l’Education Nationale doit nous inviter à réfléchir sur
nos capacités de mutabilité. Au sein de la Sécurité Civile, nous devons acquérir une vision de
l’avenir de nos savoirs dans le monde numérique en intégrant les différences générationnelles.
Contexte technologique
Le modèle numérique d’aujourd’hui est en développement exponentiel et le web 2.0 va muter. En
effet les données, les métadonnées sont traitées aujourd’hui par indexation ou par annotation. Les
langages informatiques actuels (HTML, XML) manquent de pertinence dans la recherche et le
transfert d’informations ou de connaissances multi supports (audio, vidéo...).
De la même manière, les réseaux sociaux sont extrêmement mimétiques à leur stade actuel de
développement (sans parler de la problématique d’aliénation des données). Ils sont basés sur la
sociographie (points mis en relation entre eux) 3 alors que d’autres modèles de traitement de données
communautaires sont expérimentés.
L’évolution vers un web 3.0 dit « web sémantique » pourrait permettre l’utilisation de nouveaux
langages de programmation permettant de mieux prendre en compte l’architecture des données, des
informations et donc de la connaissance dans l’univers du web (RDF, OWL).
1
Kurt LEWIN, psychologue américain (1890-1947).
Divina FRAU-MEIGS, professeure en sciences de l'information et de la communication, Université de Paris III.
3
Jacob Levy MORENO, Fondements de la sociométrie, PUF, 1970.
2
p15
p15
3.2.3. Un changement de paradigme pour les SDIS ?
Dans ce contexte où les incertitudes augmentent et où les dérèglements apparaissent, nos
organisations SDIS doivent s’adapter constamment. « La seule façon de lutter contre la
dégénérescence est dans la régénération permanente, autrement dit dans l’aptitude de l’ensemble de
l’organisation à se régénérer et à se réorganiser en faisant front à tous les processus de
désintégration » 1.
Habituées jusque-là à un fonctionnement ordonné (répétition, cadrage) où les choses se font par
automatismes, nos organisations SDIS ne peuvent plus rester dans une conception de processus
programmés et donc figés. Elles doivent être capables de « traiter les éléments contribuant à
l’élaboration et au développement de leur stratégie ». Ainsi les SDIS doivent se préparer, en
intégrant dans leur stratégie d’organisation, les aléas pour élaborer leurs scénarios.
Ces scénarios peuvent être construits efficacement grâce à la richesse des connaissances échangées
et transmises si l’établissement fait le choix d’une politique de gestion des connaissances (KM). Ces
connaissances sont ensuite modifiées, enrichies, adaptées par processus itératifs.
Dans cette perspective, les orientations données en la matière par le Cadre d’Auto-évaluation des
Fonctions publiques (CAF) 2006 sont rappelées dans le chapitre « Gérer les informations et les
connaissances » :
a. développer des systèmes pour gérer, conserver et évaluer les informations et les connaissances
dans l’organisation en accord avec les objectifs stratégiques et opérationnels,
b. faire en sorte de se procurer, de traiter et d’exploiter efficacement l’information externe utile,
c. effectuer un suivi permanent des informations et des connaissances de l’organisation, en
s’assurant de leur pertinence, de leur exactitude, de leur fiabilité et de leur sécurité. Veiller à
leur cohérence avec les orientations stratégiques et les besoins actuels et futurs des parties
prenantes,
d. mettre en place des circuits de communication interne pour assurer l’accès de tous les agents
aux informations et aux connaissances pertinentes pour remplir leurs tâches et leurs objectifs,
e. assurer l’accès et l’échange d’informations pertinentes avec toutes les parties prenantes et
présenter informations et données dans un format facile à utiliser,
f. capitaliser, dans la mesure du possible, les informations et connaissances des collaborateurs
qui quittent l’organisation. Attribuer une note en utilisant le tableau d’évaluation des facteurs.
1
Edgar MORIN, Introduction à la pensée complexe, Ed. Seuil, 1990.
p16
p16
Interne
3.3. Etude des forces et faiblesses des SDIS face au KM
Points positifs (Atouts)
Points négatifs (Handicaps)
FORCES
FAIBLESSES
Culture
Forte capacité d’adaptation
Forte contribution de l’ENSOSP
Culture
Culture des sous-groupes
Management
Forte capacité d’adaptation
Amélioration de la prise de décision
Management
Nombreux niveaux hiérarchiques
Méconnaissance du sujet par les cadres
Humain
Responsabilisation des acteurs
Développement confiance/motivation
Humain
Peurs à l’origine des décisions
Rivalités internes et faible confiance
Organisationnel
Résolution plus rapide des problèmes
Diminution des erreurs
Organisationnel
Cloisonnement en silos
Règles nombreuses
Technologique
PNRS
Technologique
Parcellisation des outils
Outils communautaires peu développés
Externe
OPPORTUNITES
MENACES
Culture
Adaptation à l’évolution de la société 2.0
Culture
Profond bouleversement culturel
Management
Enrichissement par apports externes
Management
Faibles stratégies
départementale
Humain
Nouvelle génération Y à considérer
Transmissions intergénérationnelles
Humain
Perte de pouvoir par le savoir
Organisationnel
Mode réseau favorisant les échanges
Organisationnel
Normes et règlements
Technologique
Web 2.0 et ses évolutions
Technologique
Dépendance aux TIC
et
vision
supra
Tableau 1 : le KM dans les SDIS
p17
p17
3.4. Formulation des hypothèses de recherche
Au terme d’une appropriation des bases fondamentales du KM, nous avons construit notre
représentation du concept. Dans le prolongement de cette représentation, nous sommes en mesure
d’établir différentes hypothèses.
A l’issue de la veille environnementale, si nous nous intéressons aux multiples dimensions du sujet,
nous pensons que par une approche multidimensionnelle, le knowledge management permet aux
SDIS de s'adapter à la complexité de leur environnement (hypothèse 1).
En revanche si nous nous focalisons sur la dimension humaine, que ce soit dans sa composante
« individuelle » ou bien « collective », nous avons le sentiment que le knowledge management est
un facteur de confiance et de motivation, sources de cohésion au sein des SDIS (hypothèse 2).
Enfin si nous nous attardons sur la dimension matérielle des SDIS, en perspective des deux
composantes qui la constituent, il nous apparaît probable que les technologies de l’information et
de la communication (TIC) sont essentielles mais non suffisantes pour valoriser le capital
immatériel des SDIS (hypothèse 3).
Ces trois hypothèses de travail vont être éprouvées dans notre seconde partie. La culture des
sapeurs-pompiers et plus largement des SDIS est comparée à la culture de la gestion des
connaissances. Une approche multidimensionnelle du système de gestion des connaissances au sein
des SDIS est menée par le biais de quatre volets évoqués dans les activateurs du KM. Elle apporte
un éclairage complémentaire au volet culturel.
Enfin, la troisième partie confronte nos hypothèses à la réalité du terrain, pour en évaluer la
pertinence.
p18
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PARTIE 2
VERS UNE APPROCHE MULTIDIMENSIONNELLE DANS LES SDIS
« Seule la pensée complexe permettrait de civiliser notre connaissance »
Edgard Morin
D
ans cette deuxième partie, nous allons tout d’abord chercher à mieux appréhender la
culture des Service Départementaux d’Incendie et de Secours. En effet, elle est l’activateur
principal déterminant une démarche de knowledge management réussie. En observant les
particularités de nos organisations et de notre corporation, nous étudions quels changements
découlent de l’instauration d’une culture de la gestion des connaissances au sein de notre
profession. Ensuite, une analyse des autres activateurs nous permet de détailler quatre soussystèmes de la gestion des connaissances. Cette approche permet de cerner tous les aspects d’une
telle démarche dans nos organisations.
1. PARTICULARITES CULTURELLES ET OPPORTUNITES
1.1. La culture des SDIS et des sapeurs-pompiers
Les SDIS se sont construits sur les corps communaux de sapeurs-pompiers, intégrant à minima
comme dénominateurs communs les valeurs de courage et de dévouement. Bien plus vaste,
l’héritage culturel des sapeurs-pompiers représente une composante significative de la culture des
SDIS, reconstruite chaque jour par celles et ceux qui engendrent son évolution. Cet héritage peut
être mis en évidence par un classement des artefacts culturels permettant de caractériser notre
corporation 1 via la tradition (Histoire, Héros, Mythes), les métiers, les valeurs et croyances, les
rituels, les symboles, le mode d’autorité (exercice et distribution), la manière dont les agents se
sentent récompensés, organisés, contrôlés.
Forts de ce patrimoine, certains SDIS ont franchi le pas en affichant des valeurs propres à l’identité
de l’organisation, à travers un projet de service, une charte. A titre d’exemple, le SDIS de la HauteSavoie, prône par la voix de son président « la nécessité de répondre à des valeurs humaines [de
courage et d’honneur] et de posséder les qualités au service de ces valeurs ». Il met en avant
l’ouverture d’esprit, le bon sens, l’écoute, la tolérance, l’exemplarité, l’humilité, le respect, le
professionnalisme, le sang-froid, la chaleur humaine, le désintéressement, l’empathie, la discrétion
et la politesse.
De par la diversité des territoires et de leurs ressources, chaque SDIS est par essence même unique.
Il est par conséquent difficile de modéliser ce que peut être la culture de l’organisation SDIS. Aussi
nous prenons le parti de nous référer au système de valeurs de l’ENSOSP qui intègre à la fois les
aspects culturels des sapeurs pompiers et les aspects propres à leurs organisations, sans pour autant
négliger les phénomènes de groupe.
1.1.1. Système de valeurs de l’ENSOSP
Jérome Cernoïa, éthicien, explicite trente-six « valeurs fondamentales dans la construction de
l’identité de la profession »2. Elles ont fait l’objet d’un travail préalable au projet d’établissement de
1
2
Modèle de Edgar SCHEIN, Organizational Culture and Leadership, 1985.
Jérome CERNOIA, Recueil des valeurs,ENSOSP 2012.
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p19
l’ENSOSP avant d’être revendiquées et affichées. Elles ont été discutées par l’ensemble des
représentants de la gouvernance de l’établissement avant validation par voie délibérative 1. Elles
représentent l’école et la culture professionnelle. Nous pensons que, ces « valeurs humaines,
professionnelles ou républicaines », sous tendues par les artefacts évoqués précédemment, peuvent
constituer le socle d’une culture partagée entre tous les SDIS.
Valeurs
Humaines
Valeurs
Républicaines
Valeurs Professionnelles
Service Public
Esprit de corps
Progrès
Intervention
Altruisme
Adaptabilité
Cohésion
Créativité
Assistance
Liberté
Courage
Continuité
Equilibre
Innovation
Efficacité
Egalité
Dévouement
Equité
Exemplarité
Interdisciplinarité
Sens de la mission
Fraternité
Don de soi
Intérêt général
Loyauté
Modernité
Responsabilités
Engagement
Légalité
Pérennité
Ouverture
Sens du secours
Humilité
Probité
Tradition
Performance
Respect
Transversalité
Transparence
Solidarité
Tableau 2 : valeurs affichées et valorisées par l’ENSOSP
Leur classement thématique nous permet d’entrevoir les différents aspects de la culture des sapeurs
pompiers intimement liée à celle des SDIS.
1.1.2. Culture de groupe
Le socle culturel évoqué mérite une prise en compte des phénomènes de groupes. Chaque sapeurpompier ou agent se rattache à un sous-groupe (centre d’intervention ou service X, équipe de garde
ou spécialité Y, formation d’intégration Z, officier, personnel administratif et technique ou homme
du rang,…). Notre culture aux multiples facettes s’enrichit donc de ces innombrables sous-groupes.
A contrario, leurs croyances bien enracinées provoquent des effets restrictifs. Une présentation des
effets liés à la dynamique de groupe nous éclaire sur les obstacles possibles à une organisation
pleinement consciente de son savoir.
Figure 3 : propriétés contraignantes issues de la pensée de groupe 2
1
Le projet d’établissement de l’ENSOSP, valeurs, finalités, diagnostic stratégique, préconisations et plan d’action,
2009.
2
CEN Workshop Agreement, Guide européen de bonne pratique de gestion des connaissances, 2003.
p20
p20
Ces aspects limitatifs théoriques des groupes sont présents aussi chez les sapeurs-pompiers. Des
artefacts aident à caractériser le phénomène dans l’environnement des SDIS pour en tirer les
représentations limitantes des sous-groupes chez les sapeurs-pompiers :
Représentations limitantes (5)
Artefacts culturels
Non
communication
Langage implicite
Pouvoir
Infaillibilité
Simplisme
Nombrilisme
Hiérarchie marquée
Grades affichés
Mythe du héros ou
surestime de soi
Raisonnement par
analogie
Déconnection de la
population
Ecrire = punir
Abus de pouvoir ou
connivences
Cote de popularité
Mnémotechnie
Esprit communal
Peur de la
sanction
Rapports SPP/SPV
Logique de
valorisation
Généralisation
Faible relation
interservices
Départ d’agents
sans laisser de
trace
Sexisme / Rivalités
Pas d’obligation de
résultat
Permanence des
pensées
Promotion du
particularisme
Acronymes
Influences (syndical
ou associative)
Erreur = faute
Routines
Peu d’interactions
humaines
Tableau 3 : représentations limitantes des sapeurs-pompiers
Cette représentation partielle des aspects limitant de la culture des sapeurs-pompiers laisse entrevoir
ses effets sur les comportements. Ces attitudes adoptées, sont limitatives et s’opposent à la
transition vers une culture de gestion des connaissances. Un changement culturel s’impose en
conséquence à tous les niveaux institutionnels pour décourager ces pratiques rassurantes pour le
groupe.
A titre d’exemple, Cécile Godé 1 explique que le Général Stéphane Abrial 2 a officiellement
« dépénalisé » l’erreur au sein de l’armée de l’air : « (…) je sais que beaucoup d’entre vous œuvrent
pour une plus grande transparence. Je sais aussi que d’autres éprouvent des réticences à s’ouvrir
publiquement, craignant d’être victimes de leur honnêteté, d’être brutalement sanctionnés. Cette
méfiance n’est plus acceptable dans une armée de l’air moderne. C’est pourquoi j’ai décidé
d’engager une démarche de dépénalisation des erreurs (…) je garantis notamment l’impunité à tous
les auteurs (…) quelles que soit le type d’expériences qu’ils relatent. Mon souhait est bien
d’instaurer un climat réel de confiance (…) » 3.
Cet engagement fort, à la hauteur du changement culturel souhaité pour l’armée de l’air est opéré
selon un management de type « top-down » visant à contrer des valeurs d’infaillibilité (erreur =
faute) et de non-communication (peur de la sanction) au sein de l’institution militaire.
Selon une autre illustration, l’ENSOSP a une approche de type « bottom-up ». La mise à disposition
d’un outil tel que le Portail National des Ressources et des Savoirs (PNRS), peut générer des
changements de comportements. Ils induisent progressivement une évolution culturelle en agissant
sur les représentations limitantes que sont la non-communication et le nombrilisme.
Comme évoqué dans la partie 1, les logiques « top-down » et « bottom-up » ne s’opposent
absolument pas dans leur mise en œuvre.
1
Cécile GODE, Chercheur au Centre de Recherche de l’Armée de l’Air.
Général Stéphane ABRIAL, Chef d’Etat Major de l’Armée de l’Air de 2006 à 2009.
3
Préface du Chef d’Etat Major de l’Armée de l’Air, Bulletin de la Sécurité des Vols, 2006.
2
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p21
De manière plus large, les croyances partagées à l’origine d’un processus de KM réussi sont :
• « le temps passé à tisser un réseau (networking) est valable,
• il existe un effet boomerang : il faut donner si l’on veut recevoir,
• ‟la connaissance est le pouvoir” est une tromperie et une idée démodée,
• il existe un besoin de vision et de perspective complète, aussi bien que celui du détail,
• les changements sont considérés comme une norme,
• la surcharge d’informations peut parfois être atténuée avec une combinaison de technologie
de filtrage et des réseaux d’agents ». 1
1.2. Les opportunités de la gestion des connaissances pour les SDIS
Au-delà des représentations limitantes liées aux individus, et pour bien cerner ces opportunités,
nous nous proposons de confronter ci-dessous les deux cultures en tenant compte de multiples
paramètres.
Figure 4 : culture des SDIS versus culture de la gestion des connaissances1
1.2.1. Facilitateurs culturels
Cette mise en parallèle distingue quatre premiers domaines de compatibilité potentielle avec la
gestion des connaissances sur lesquelles pourraient se fonder les organisations apprenantes de
demain.
Le partage des responsabilités
Le partage des responsabilités fait partie intégrante de notre culture opérationnelle. Les
responsabilités des « commandants des opérations de secours » varient en fonction de l’importance
de l’intervention. A l’instar de cette pratique opérationnelle, nos organisations doivent apprendre à
moduler et adapter les responsabilités sur le plan fonctionnel. En tendant vers la coresponsabilité à
tous les niveaux, chacun peut se sentir un peu plus acteur de la vie de l’établissement public.
1
CEN Workshop Agreement, Guide européen de bonne pratique de gestion des connaissances, 2003.
p22
p22
L’importance de la place de la formation
L’organisation des formations représente une composante forte. Elle peut faciliter une démarche de
transition vers la gestion des connaissances. L’évolution actuelle des stratégies pédagogiques 1 va
dans le sens de l’accompagnement nécessaire, pour rapprocher les comportements des agents du
modèle centré sur les connaissances.
La gouvernance politique
Les SDIS sont gérés administrativement par le président du conseil général et commandés sur le
plan opérationnel par le préfet. Ce principe de double tutelle offre jusqu’à présent une certaine
autonomie dans la gestion de l’établissement public. Au-delà du risque potentiel d’influence
politique locale, les sapeurs-pompiers disposent d’une certaine marge de manœuvre. Le principe de
la libre administration des collectivités territoriales donne aux SDIS la possibilité d’évoluer vers
une organisation centrée sur les connaissances.
L’attention multi fonctionnelle
En raison de la nature même de leurs missions et de l’obligation de moyens qui s’impose aux
sapeurs-pompiers, les SDIS bénéficient de la part du conseil d’administration de décisions fondées
sur une attention multicritères (risques, population, volontariat) et non sur une attention purement
financière. Une attention éclairée par la connaissance, à l’exemple du SDACR, permet d’orienter le
choix des décideurs sur des critères pertinents.
1.2.2. Marges de progrès
Ce face à face des deux cultures nous montre dans sept domaines les axes d’évolution possibles
pour accéder au changement culturel souhaité, propice à des comportements nouveaux : ceux de
« l’agent du savoir ».
Le rapport au pouvoir
Avec l’avènement du web 2.0, le savoir n’est plus le pouvoir et seule la connaissance confère
l’autorité. Ainsi le pouvoir n'appartient plus à celui qui détient l'information. Il appartient à celui qui
sait la traiter et l’utiliser pour mieux décider et à celui qui sait la transmettre.
L’enjeu est de déterminer des logiques de pouvoir différentes basées sur l’exemplarité (valeur) et un
sens du rapport à l’autre moins hiérarchique. Un changement culturel pourrait s’opérer à l’échelon
national en évoluant progressivement d’un modèle de « type pyramidal » vers un modèle de « type
réseaux ».
Peur du risque
Sur le plan opérationnel, notre organisation est confrontée en permanence à de fortes incertitudes,
avec des risques plus élevés que dans d’autres professions pouvant conduire à un danger de mort. Il
existe un paradoxe : cette prise de risque acceptée en service commandé l’est moins dans les
domaines organisationnels, managériaux ou administratifs. Ces peurs « de mal faire, de se tromper,
de la judiciarisation, de la réaction des élus » sont autant de freins potentiels. Lorsque la peur
gouverne nos décisions, elle bloque la compréhension intelligente de l’environnement. L’audace et
la créativité sont des qualités que nos institutions pourraient valoriser pour permettre à des
connaissances nouvelles d’émerger.
1
Arrêté du 08 aout 2013 relatif aux formations des SPV.
p23
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Structure organisationnelle
L’organisation bureaucratique des SDIS 1 dans le prolongement des collectivités de tutelle, ne
facilite pas structurellement le partage des connaissances.
Les SDIS font cohabiter plusieurs statuts travaillant à des rythmes et sur des échelles de temps très
différents. Ils fonctionnent en grande partie sur une ressource humaine particulière, les sapeurspompiers volontaires, très diverse dans ses origines socioprofessionnelles et difficile à fidéliser.
Mode de fonctionnement
Les SDIS s’organisent autour d’unités opérationnelles réparties sur l’ensemble du territoire
départemental nécessitant de maintenir une cohésion et une cohérence. Notre mode de
fonctionnement répond en outre à des obligations réglementaires incontournables. Néanmoins, pour
tout ce qui a trait à la gestion fonctionnelle de l’établissement public, un fonctionnement basé sur
des principes (et non sur des règles), déclinés et détaillés localement, permettrait de mieux s’adapter
aux innombrables particularités.
Niveaux hiérarchiques
Le fonctionnement des SDIS repose sur une organisation hiérarchique. Empruntée au modèle
militaire, elle affiche clairement les grades d’une partie seulement des agents qui servent cet
établissement public. Elle est également cloisonnée, ne facilitant pas vraiment le partage des
connaissances.
Ainsi, le nombre de niveaux hiérarchiques de sapeur à colonel (supérieurs à 10) a tendance à
générer une forme de rivalité entre les agents, renforcée par la coexistence de plusieurs statuts1.
Cela va à l’encontre de la complémentarité souhaitée dans une démarche de KM. Outre
l’organisation traditionnelle qui gêne les échanges transversaux, les niveaux hiérarchiques freinent
quant à eux les échanges verticaux. Privilégier les niveaux d’emplois (d’équipier à directeur), moins
nombreux peut être un préalable culturel. Les différences affichées seraient atténuées et
faciliteraient les changements comportementaux souhaités en gestion des connaissances.
Principes de communication
La mise en place de systèmes de communication accessibles et ouverts à tous doit permettre, par la
modération exercée par le groupe et l’identification toujours possible des individus, de partager
complètement le savoir. Cette distribution large des accès à l’information ouverte à l’intérieur et à
l’extérieur de la profession est aussi un préalable à la transition vers la société de la connaissance.
Faire évoluer notre modèle, le rendre plus innovant, plus informel (notamment par la mise en
réseaux de nos nombreuses communautés de pratiques), et l’institutionnaliser, serait un signal fort
de changement vers « l’établissement apprenant ».
Intelligence émotionnelle, culturelle et influence des réseaux
Le fonctionnement de notre profession, de par son histoire et la culture qu’elle a développée, se fait
de façon relativement autosuffisante. Parfois refermée sur elle-même, elle peut éprouver quelques
difficultés à s’ouvrir sur l’extérieur et connaît « un esprit de clocher » que la départementalisation
n’a pas totalement effacé. Elle présente la particularité de réaliser la majorité de ses missions très
variées dans un domaine de compétence partagée avec d’autres services publics et dispose d’une
compétence exclusive sur seulement 10 % de ses missions. Elle se situe à l’interface de très
nombreux services nécessitant une transversalité par la mise en réseaux.
1
S. CHEVRIER (MANA) et J.Y. DARTIGUENAVE (LARES), L’avenir du dispositif de volontariat chez les SP, 2008.
p24
p24
Dans le prolongement de la confrontation entre la culture des SDIS et la culture du KM, nous allons
opérer une analyse du système « gestion des connaissances » au sein des SDIS selon plusieurs
dimensions et composantes.
2. ANALYSE MULTIDIMENSIONNELLE
Outre les aspects culturels développés précédemment, la gestion des
connaissances dans les SDIS mêle également des aspects humains,
techniques, organisationnels ou managériaux caractéristiques d’un
système complexe. L’analyse multidimensionnelle nous semble être
l’approche la plus adaptée pour intégrer les quatre aspects structurants
illustrés ci-contre.
2.1. La dimension managériale
2.1.1. La composante stratégique
Cette dimension est capitale dans la mise en œuvre d’un projet de gestion des connaissances. Le
KM est un outil de management au service d’une vision stratégique des SDIS. La mise en œuvre
doit faire l’objet d’un portage et d’un accompagnement par les décideurs. L’équipe de direction, les
chefs de groupements fonctionnels et territoriaux doivent susciter l’adhésion d’un grand nombre de
collaborateurs dans les centres de secours et services fonctionnels.
Le KM est un pari sur l’avenir. Les bénéfices ne seront pas significatifs et visibles immédiatement
et nécessitent une communication spécifique au sein du SDIS pour entretenir et faire vivre cette
démarche novatrice tenant compte de plusieurs facteurs :
• elle est ambitieuse et doit viser des objectifs stratégiques de l’établissement clairement
identifiés dans le projet d’établissement ou de service dans le cadre d’un leadership unifié,
• elle doit mettre en avant des réalisations concrètes locales dans les centres et les services,
apportant des résultats pas forcément mesurables mais visibles à court terme aux agents du
SDIS qui vont y contribuer,
• elle relève d’une conduite du changement qui nécessite d’apprendre à partager ses pratiques,
de mutualiser ses expériences, d’écouter, de former, de capitaliser, et impose un
accompagnement,
• les ressources humaines et financières sont limitées, et les acteurs déjà très chargés. De plus,
il faut souvent commencer par donner avant de recevoir. Une démarche itérative et
incrémentale est donc nécessaire, avec des rendez-vous pour déterminer le niveau
d’appropriation.
Malgré tout, il convient d’identifier un obstacle culturel au sein des SDIS dans le rapport au pouvoir
que confère le lien hiérarchique.
2.1.2. La composante « pouvoir »
En ce qui concerne la relation du savoir avec le pouvoir, « L’information est un enjeu de
pouvoir. »1. Les SDIS n’échappent pas à cette règle.
1
Ronald COASE, The nature of the firm, 1937.
p25
p25
Le pouvoir se définit « comme la capacité ou la possibilité de faire quelque chose, d’accomplir une
action, de produire un effet », mais également comme « l’autorité, la puissance, de fait ou de droit,
détenue sur quelque chose ou sur quelqu’un » 1. Le pouvoir peut être hiérarchique ou informel. Dans
ce second cas, il est lié à la maîtrise de « zones d’incertitudes », 2 non clairement définies et
précisément limitées dans l’entreprise. Ainsi, pour un supérieur comme pour un subalterne, chercher
à accroître son pouvoir, c'est étendre la zone au sein de laquelle il peut avoir un comportement
imprévisible ou indéterminé.
Quatre grandes sources de pouvoir correspondent aux différents types de sources d'incertitudes
particulièrement pertinentes pour les SDIS :
• le pouvoir lié à l'expertise : on fait croire ou on démontre que l'on possède une compétence
rare (services informatiques, référents de spécialités au sein des SDIS),
• le pouvoir lié aux entrées ou aux sorties des organisations : on retrouve des spécialistes, des
intervenants ponctuels qui font partie de plusieurs organisations (les SPV insérés dans le
tissu associatif, politique, économique local),
• le pouvoir lié à l'information : canaux officiels et officieux de communication,
• le pouvoir lié à l'utilisation des règles organisationnelles (l’agent sédentarisé).
2.2. La dimension organisationnelle
2.2.1. La composante structurelle
L’organisation désigne « la façon dont un ensemble est organisé, dont il est agencé pour son
fonctionnement ». Les SDIS, se sont structurés dès leur création autour d’une organisation
classique, dite bureaucratique, sur le modèle des collectivités territoriales dont ils dépendent. Cette
organisation se caractérise, précise Max Weber 3 : « par une division des tâches, axée sur la
spécialisation des fonctions, une hiérarchisation des postes, un dispositif de règles et de procédures
écrites très détaillées définissant l’autorité, les responsabilités et les tâches ». Elle est rationnelle
puisque des moyens sont mis en face des risques pour atteindre des buts spécifiques dans un objectif
de couverture opérationnelle fondé sur une approche déterministe (obligation de moyens).
Les SDIS, de par leur spécificité et leur raison d’être, évoluent dans un environnement dynamique
mais également complexe.
Ce constat pourrait nous amener à penser que l’organisation traditionnelle des SDIS n’est pas
toujours adaptée à leurs missions au sens large, et nécessiterait d’évoluer vers une organisation plus
systémique. Le colonel Michel Marlot (DDSIS de la Saône-et-Loire) nous explique que développer
le KM dans les SDIS, c’est prendre en considération l’homme et ses initiatives, participant à la vie
de la structure en apportant sa connaissance. Le KM est d’après lui le reflet du sens donné à
l’organisation. Rendre accessible, partager, mutualiser et enrichir les connaissances permet à chaque
acteur d’agir librement en coresponsabilité.
1
Dictionnaire Larousse de 2001.
Michel CROZIER et Erhard FRIEDBERG, L’acteur et le système, Ed. Le Seuil, 1977 .
3
Max WEBER, sociologue allemand, 1864-1920.
2
p26
p26
2.2.2. La composante fonctionnelle
Selon Peter Senge 1, les organisations apprenantes « portent leurs efforts sur la qualité de
raisonnement des individus, sur leurs visions partagées, sur leur aptitude à la réflexion, à
l’apprentissage en équipe, et à la compréhension des problèmes complexes de la vie des affaires ».
Il propose cinq axes disciplinaires pour parfaire cet apprentissage. La maîtrise des trois premières
disciplines est indispensable à l’équipe de direction. La pratique des deux dernières relève du
groupe ou de l’organisation : « penser systémique, acquérir la maîtrise personnelle, clarifier et
remettre en cause les modèles mentaux, construire une vision partagée, apprendre en équipe ».
Pour faire évoluer l’organisation des SDIS, les décideurs doivent au préalable avoir une perception
globale et multicritères des différents problèmes. C’est accepter une certaine perte de pouvoir au
profit du partage de la connaissance et se convaincre du bien-fondé de la démarche. Cela nécessite
selon lui « de laisser parler les subordonnés, d’encourager les initiatives, de déléguer le pouvoir, de
responsabiliser les collaborateurs, de soutenir les autres, de témoigner de l’intérêt, de faire preuve
de confiance et d’honnêteté quand il s’agit d’échanger des idées, de s’engager dans un dialogue,
d’établir un consensus ».
2.3. La dimension humaine
Nous constatons que la place de l’individu dans le monde du travail a considérablement évolué
depuis un siècle.
2.3.1. La composante individuelle
Alain Touraine 2 distingue trois phases attribuant successivement l’expertise, la connaissance et le
savoir :
• au travailleur, avec l’avènement de l’industrialisation : l’ouvrier maîtrise sa machine et sa
propre production,
• à l’ingénieur, avec le taylorisme : l’ouvrier exécute des tâches répétitives, séquencées et perd
son savoir-faire au profit d’une production de masse,
• au bureau d’études, avec l’automatisation : l’ouvrier assure la maintenance de l’outil de
production.
Ces étapes traduisent une déresponsabilisation progressive de l’agent, son avilissement au profit
d’un système, qui peut se prolonger par une baisse de motivation et un sentiment de mal être au
travail (exemple : externalisation de prestations de maintenance réalisées auparavant dans les
centres d’incendie et de secours).
Partant du principe que « Le travailleur du savoir est propriétaire de ses moyens de production,
c'est-à-dire de son savoir. »3, il ne partage que ce qu’il veut bien partager. Aussi, en l’absence de
confiance, il ne peut y avoir de conviction et d’engagement personnel fort dans le transfert de
connaissances (exemple : l’institutionnalisation de la formation en lieu et place des formateurs de
proximité). Le partage reste aléatoire, peu performant, tout au mieux superficiel.
1
Peter SENGE, La cinquième discipline et La danse du changement ; également directeur du Center for Organizational
Learning (centre pour les organisations apprenantes).
2
Alain TOURAINE, Sociologue, « l’évolution du travail ouvrier dans les usines Renault » (thèse), 1955.
3
Peter DRUCKER, L’avenir du management, 1999.
p27
p27
Selon une étude (2006-2011) menée dans plusieurs pays (dont la France) par la société Steelcase 1,
quatre générations se côtoient et chacune d’entre elles développe des attitudes, des attentes et des
comportements différents :
• les traditionnalistes, nés avant 1945 ont un désir de conformité et placent une grande
importance dans le travail. Ils recherchent des espaces de travail très traditionnels comme un
bureau par personne pour pouvoir s’isoler,
• les baby-boomers, nés entre 1946 et 1965 revendiquent un esprit d’aventure et sont en quête
de technologies simples à utiliser,
• la génération X née entre 1966 et 1977, préfère des espaces de collaboration,
• les enfants du millénaire ou génération Y, nés après 1978, privilégient les technologies
facilitant le nomadisme.
Ce constat s’appuie sur les travaux de Geert Hofstede 2, décrivant le comportement et les réactions
des individus dans différents types d’espaces, illustrés par le schéma suivant :
Figure 5 : diversité culturelle dans l’entreprise
2.3.2. La composante collective
Les SDIS se doivent de créer les conditions propices pour instaurer la confiance comme un élément
moteur dans la performance individuelle et collective. Pour cela, Jean-Yves PRAX 3 suggère de
respecter, lors de tout partage des connaissances :
• la réciprocité dans les échanges : gagnant /gagnant (je donne, tu donnes),
• la paternité de la production : identité / reconnaissance (je donne, je suis reconnu),
• la rétroaction : essai / erreur (je prends une initiative, mes erreurs sont admises et
communiquées, je recommence, je progresse),
• un sens commun : unité de langage / de valeurs dans la transmission du message verbal
ou non-verbal (je communique, je suis compris).
1
revue 360, Steelcase.com.
Geert HOFSTEDE, psychologue néerlandais né en 1928.
3
Jean-Yves PRAX, Manuel du Knowledge Management, 2012.
2
p28
p28
Ce climat de confiance mutuelle initie une démarche de bienveillance dans les rapports aux autres
qui encourage la mobilisation volontaire des membres du groupe. La transparence de l’institution
favorise par ailleurs la performance à tous les niveaux en éliminant les zones d’ombre, les non-dits,
les suspicions. Le sentiment que l’on nous cache quelque chose, de ne détenir qu’une information
parcellaire nuit à l’efficience. De même la compétition entre individus est plus destructrice qu’une
saine émulation.
L’appartenance à un même corps entraîne des solidarités morales et matérielles. Une confiance
réciproque s’établit dans le partage des connaissances. Elle facilite le transfert des flux, la
transversalité des échanges, les initiatives, la créativité et maintient le lien entre les membres de
l’organisation. Chacun se sentant autonome et responsable de sa propre production, tous peuvent
agir librement en co-investissement et en coresponsabilité.
Le rapport qu’entretient l’individu avec l’organisation est d’ordre contractuel. Il s’agit de respecter
le « contrat psychologique » qui le lie à l’organisation (je dois à l’organisation, l’organisation me
doit) sans pour autant qu’il ne perde sa propre identité. La création d’une communauté de pratique
apporte une réponse à ce dilemme. Elle donne à ses membres la possibilité de se reconnaître à
travers une identité commune tout en préservant leur propre identité, conditions nécessaires à
l’engagement de chacun. La qualité du partage de connaissances dépend étroitement du lien de
confiance tissé entre les individus au sein de leur propre communauté, mais également avec les
autres communautés 1.
D’autres techniques non-exhaustives, reposant sur la mise en commun de réflexions individuelles
en vue d’enrichir la réflexion collective, peuvent être considérées comme des pratiques de KM : les
techniques de récit, l’accompagnement, le guidage ou mentorat, le tutorat (voir annexe n°2).
Des quatre dimensions explorées dans cette analyse, la dimension humaine est certainement la plus
importante en termes de gestion ou de partage des connaissances. Elle oscille en permanence entre
les attentes et besoins du groupe et ceux des individus qui le composent dans leur grande diversité.
Développer le KM au sein des SDIS, c’est réaffirmer que l’homme n’est pas un simple rouage de
l’établissement mais au contraire une valeur essentielle sur laquelle elle doit impérativement miser.
Par une « focalisation progressive de l'entreprise sur l'individu », l’organisation devient dépendante
de l’homme et de sa connaissance. L’entreprise 2.0 émerge, le « Knowledge entrepreneur »
(entrepreneur du savoir) d’Aurélie Dudezert succède au « Knowledgeworker » (travailleur du
savoir) de Peter Drucker. Non plus attaché à l’organisation mais à son réseau de partage de
connaissances, l’entrepreneur du savoir est auto-entrepreneur de son capital connaissance,
autonome, égal à l’autre dans une dynamique de collaboration productive. L’homme retrouve ainsi
une place centrale au sein de l’organisation.
Le sapeur-pompier comme le personnel administratif et technique peut enrichir le SDIS de ses
connaissances, compétences et de ses expériences, à condition que l’institution sache qu’elles
existent et qu’elle les ait recensées. Cela est d’autant plus marqué dans notre profession que les
sapeurs-pompiers volontaires drainent de nombreuses connaissances et compétences que notre
profession ne détient pas forcément intrinsèquement.
1
CEN Workshop Agreement, Guide européen de bonne pratique de gestion des connaissances, chapitre 2, 2003.
p29
p29
2.4. La dimension technologique et matérielle
2.4.1. Les technologies de l’information et de la communication
L’explosion des Technologies de l’Information et de la Communication (TIC) a profondément
modifié nos façons de travailler ces vingt dernières années. Ancrées dans nos modes de
communication, bien que non dédiées au KM, les TIC s’imposent aujourd’hui comme le support
incontournable en matière de gestion et de partage des connaissances. Elles contribuent au
développement d’une nouvelle forme « d’intelligence collective » profitable à la productivité de
l’organisation qui encourage, facilite l’interconnexion de ses membres en réseaux collaboratifs.
Les SDIS n’échappent pas à ce constat et disposent pour leur gestion courante d’une multitude de
logiciels ou d’applications dites « métier » plus ou moins interconnectés entre eux. En revanche,
peu de SDIS sont équipés d’un outil informatique dédié faisant converger dans une interface
« homme machine » unique, l’ensemble des « outils » qui contribuent à la gestion de cette
connaissance. La plupart ont développé un ou plusieurs produits classiques comme un Intranet, une
gestion électronique des documents sans lien direct entre eux.
Parce qu’ils associent un concept de cognition, les outils technologiques de gestion des
connaissances se différencient de fait des outils classiques de gestion d’informations. S’il existe de
nombreuses approches technologiques du KM, toutes contribuent à formaliser, faciliter les échanges
en réseaux, à structurer, capitaliser et transmettre les connaissances. Ces outils sont le plus souvent
regroupés au sein d’un Système de Gestion des Connaissances (SGC), lui-même intégré au système
plus général d’information développé par l’organisation (au côté du système de Gestion des
personnels et des compétences, de gestion de la production, de la clientèle…). Le SGC regroupe les
« technologies de l'information développées pour soutenir et améliorer les processus de création,
stockage, transfert et utilisation/exploitation de la connaissance »1. Depuis 2008, avec le
développement considérable des réseaux sociaux, le SGC est la « technologie support des
interactions et relations autour de la connaissance ». L’établissement SDIS « centré connaissances »
ou « organisation 2.0 » va devoir « principalement travailler à entretenir les relations et interactions
entre acteurs » 2.
Il existe de nombreuses classifications des technologies support du KM. Nous retiendrons
l’approche de Jean-Yves Prax 3 qui distingue quatre grandes familles de technologies de
l’information suivant leur utilité (cf. annexe n°3) :
• Les applications du Web 2.0 traduisent à l’échelle mondiale l’évolution technologique de
l’internet, d’un concept de stockage d’information (Web 1.0) vers un concept de
flux dynamiques d’informations, avec : les localisateurs d’expertise ou ELS (Expertise
Locator Systems), les analyseurs de réseaux sociaux ou SNA (Social Network Analysis), les
blogs d’entreprise, les Wikis,
• les applications collaboratives visent à produire, déclarer collectivement des
connaissances et échanger des informations de manière synchrone ou asynchrone : les
groupware, les workflows,
1
Maryam ALAVI et Dorothy LEIDNER, KM and KM Systems : Conceptual Foundations and Research Issues, 2001.
Aurélie DUDEZERT, La connaissance dans les entreprises, 2013.
3
Jean-Yves PRAX, Manuel du Knowledge Management, 2012.
2
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p30
• Les moteurs d’indexation et outils de gestion documentaire (Gestion Electronique de
Documents) sont destinés à structurer l’information et faciliter sa recherche,
• Les portails sont des lieux virtuels de partage, d’échange propre à une communauté de
pratique. Présentés sous forme de plates-formes métiers, ils fédèrent les membres de la
communauté autour de référentiels et de centres d’intérêts communs propices au travail
collaboratif. L’internaute y retrouve les annuaires, contacts, forums, veilles, informations,
documentations, processus, projets, actualités, réglementations, normes, bonnes pratiques,
liens propres à son activité. Le développement de plates-formes dédiées au e-learning (ou
e-formation) lui facilite l’accès à la formation à distance donc à une meilleure gestion de
son propre « capital connaissances ». Ce type de pédagogie, complémentaire aux modes
d’apprentissage traditionnel de type « présentiel », a l’avantage d’ouvrir le transfert des
connaissances au plus grand nombre.
2.4.2. Les espaces matériels
Confronté à un environnement technologique virtuel souvent impersonnel, l’individu a besoin de
retrouver des repères matériels et émotionnels dans sa relation à l’autre. Les outils non
technologiques rétablissent cet équilibre. Ils visent à renforcer l’empathie, le dialogue, à entretenir
un climat de confiance, de respect, en « humanisant » les rapports directs entre les individus, les
groupes, dans un environnement propice à la productivité intellectuelle et à la transmission du
savoir, en particulier tacite.
L’organisation doit veiller à mettre à disposition de ses personnels des espaces adaptés aux échanges
directs formels (de type salle de réunion) et informels (de type « coin café »). Les face à face
formels (groupes projets, groupes d’experts) comme informels entre les membres de communautés
de pratique ou d’intérêts partageant les mêmes valeurs et un langage commun encouragent chacun à
donner un avis, un conseil, à proposer une aide, à prendre des initiatives. Plus l’adhésion au groupe
est forte, plus le partage des connaissances est libre, volontaire et spontané, au bénéfice de la
collectivité.
Les lieux de discussions informelles favorisent la créativité et l’innovation. Le terme
« Knowledgecafe » désigne d’ailleurs les discussions (échanges non structurés) sciemment
organisées en vue de partager un maximum de connaissances sur de vrais sujets d’importance. Bien
entendu, parce qu’il nécessite des efforts d’écoute et de compréhension, le dialogue (échanges
structurés) reste un mode d’interaction entre individus propice au partage des connaissances.
Enfin une attention toute particulière doit être portée à l’espace de travail. Le monde du travail a
énormément évolué ces dernières années, y compris pour les personnels des SDIS. Nous sommes
passés de l’ère communale à l’ère départementale avec des relations entre individus très différentes
et nous évoluerons peut-être vers une organisation supra-départementale impliquant par la même
occasion de nouvelles interactions.
Auparavant, les salariés effectuaient la majeure partie de leurs tâches derrière un bureau.
Aujourd’hui, ils se déplacent et utilisent l’espace plus librement pour échanger leurs connaissances
de façon formelle ou non : ils improvisent des réunions, des séances de brainstorming, prolongent
des discussions professionnelles dans des lieux de détente ou encore s’isolent pour s’entretenir en
privé. Ils peuvent passer une bonne partie de leur temps de travail en dehors du bureau, ou même
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travailler à distance, voire à domicile. L’espace de travail s’est donc profondément modifié selon les
besoins et les attentes des différentes générations qui se succèdent.
Malgré des différences générationnelles, une tendance se dégage inexorablement : les salariés
d’aujourd’hui ont tous besoin d’échanger plus rapidement, de collaborer davantage pour faire
preuve de réactivité en réponse à la complexité du monde moderne en perpétuelle évolution. Les
espaces de travail deviennent multiformes, pour favoriser, selon leur conception, la confiance entre
individus et optimiser la collaboration.
Ce constat vaut pour l’univers des sapeurs-pompiers, dans les environnements très administratifs
que sont la direction ou les sièges de groupements territoriaux, ou bien encore dans les centres de
secours qui maillent le territoire départemental. Ces unités doivent être pensées, lorsque des projets
de construction nouvelle ou de réhabilitation lourde sont envisagés, pour s’adapter à ces nouveaux
besoins et favoriser le partage de la connaissance. Les espaces de travail intérieurs dans les casernes
ne peuvent plus être conçus uniquement sur le plan fonctionnel au regard des flux physiques, mais
doivent intégrer les échanges relatifs à la connaissance.
« Nos modes de travail ont été profondément transformés par de nouveaux modèles de création de
savoir. Les informations sont créées via des collaborations, dans une grande diversité d’espaces à
travers le monde. Cependant même si les technologies de l’information ont valorisé le monde
virtuel, l’espace physique reste essentiel pour générer de la confiance, de la créativité, le partage
d’informations (ou de connaissances) et la construction d’une identité pour les entreprises » selon
Catherine Gall 1. Cette approche n’est pas nouvelle, elle correspond certes aux aspirations des
nouvelles générations mais fait écho à un concept décrit notamment dans la littérature orientale, qui
définit l’espace d’échange interrelationnel favorisant le transfert des connaissances sous le terme
« Ba » (場).
Au terme de cette seconde partie, enrichie par une vision multicritère, se dessine une démarche
d’intelligence collective ayant pour but de qualifier les SDIS d’« organisations apprenantes ». Agir
sur la culture de groupe, sans négliger les aspects individuels ou collectifs limitants, s’appuyer sur
des supports technologiques et matériels en gardant à l’esprit la primauté de la dimension humaine,
afficher une volonté managériale forte et garantir le portage par les décideurs sont autant de pistes à
suivre pour atteindre cet objectif stratégique.
Aussi, dans une troisième partie, par une démarche d’enquêtes nous identifierons les bonnes
pratiques de KM transposables à nos organisations de nature à faciliter leur mutation vers des SDIS
2.0.
1
Catherine GALL, responsable de recherche Steelcase Workspace Future, revue 360, 2012.
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PARTIE 3
LES BONNES PRATIQUES DE KNOWLEDGE MANAGEMENT POUR LES SDIS 2.0
« Le savoir est la seule matière qui s’accroît quand on la partage »
Socrate
D
ans cette dernière partie, nous présentons une liste des bonnes pratiques référencées. A
partir d’une série d’enquêtes nous identifions celles transposables aux SDIS avant de
développer les plus pertinentes au travers de recommandations puis de préconisations.
1. LES BONNES PRATIQUES DU KNOWLEDGE MANAGEMENT
1.1. Notion de bonnes pratiques
Les bonnes pratiques, selon le terme consacré, sont des façons de procéder, d’agir ; des
comportements, des processus, reconnus par les pairs et jugés indispensables pour la profession.
Elles sont généralement regroupées dans des documents de référence appelés « guides des bonnes
pratiques » conçus par des professionnels pour des professionnels et pouvant aller au-delà des
obligations légales. Ces guides, souvent élaborés via une « démarche qualité », dans une logique
d’amélioration continue, visent à aider les agents concernés à atteindre leurs « objectifs métiers »
dans le respect du cadre réglementaire. Ils sont publiés et référencés dans le domaine professionnel
concerné.
En matière de gestion des connaissances, une bonne pratique est une pratique reconnue par
l’entreprise elle-même, répondant aux critères suivants 1 :
• performance durable,
• prouvée par l’expérience,
• documentée,
• réplicable sur d’autres sites,
• mesurable en termes d’indicateurs,
• acceptable sur le plan financier.
1.2. Listes de référence
Des centaines d’articles et d’études sont publiées dans le monde sur telle ou telle pratique de
management des connaissances, reconnue par telle ou telle organisation. Toutefois certains
documents font référence, notamment le « Guide Européen de bonne pratique de gestion des
connaissances ». Cent onze contributeurs (dont Aurélie Dudezert) issus de vingt-huit pays de
l’Union Européenne ont coopéré à son élaboration au sein de l’atelier « la gestion des
connaissances » du CEN. L’analyse de plus de cent quarante structures de gestion de connaissances
dans le monde permet d’identifier les pratiques les plus utilisées dans les organisations ayant une
démarche de knowledge management. Certaines d’entre elles, dont l’efficacité est reconnue, ressort
incontestablement. Nous en présentons 32 en annexe n°2 issues de 4 documents 2/ 3/ 4/ 5.
1
A. PERRIN, Pratiques des gestionnaires des connaissances en entreprise : analyse par le système d’activité, 2007.
Direction Générale de l’Administration et de la Fonction Publique Française, La transmission des savoirs, 2007.
3
Service Public Fédéral Belge – Direction gestion des connaissances, Gérer les connaissances dans son équipe, 2010.
4
CEN Workshop Agreement, Guide européen de bonne pratique de gestion des connaissances, chapitre 3, 2003.
5
Improvement Service, Partenariat des fonctions publiques écossaises, 2009.
2
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2. ETAT DES BONNES PRATIQUES REFERENCEES
Les 32 bonnes pratiques retenues sont présentées dans le tableau de
synthèse ci-dessous. Ces pratiques sont organisées selon quatre
dimensions (partie 2 §2). Chacune d’elles est classée en fonction de
leur niveau d’appropriation par les SDIS tel que nous l’avons perçu lors
des entretiens réalisés. Le détail du classement apparaît dans la légende
ci-contre.
LEGENDE
Organisée et systématique
Organisée et non systématique
Existante mais non organisée
Globalement inexistante
2.1. Pratiques internes aux SDIS
L’étude des bonnes pratiques réalisée au chapitre précédent montre que le KM repose sur un
ensemble de dispositifs d’ordre managérial, organisationnel, humain et technologique qui revêtent
des formes très diverses (cf. annexe n°2).
32 BONNES PRATIQUES DU KM REFERENCEES
Managériales (6)
Organisationnelles (9)
Humaines (10)
Valeurs
Retour d’expériences
Tutorat
Confiance
E-Learning / FOAD
Café de la connaissance
Intranet / Portail
Partenariats externes
Communautés de pratiques
Dialogue
Technologies
collaboratives
Stratégie
Transfert de connaissances
Débriefing
Web 2.0 / Wikis
Engagement et soutien de
la direction
Identification et partage de
pratiques
Vision
Banque des savoirs
Accompagnement
(coaching)
Annuaire de compétences /
d’experts
Examen après action
Motivation/
Reconnaissance
Centre support de KM
Guidage
(mentoring)
Audit des Connaissances
Parrainage
Technologiques (7)
Gestion électronique de
l’information
Web 2.0 / réseaux sociaux
Web 2.0 / flux RSS
Web 2.0 / Taxonomie
Etude de cas narrative ou
technique de récit
Tableau 4 : synthèse des bonnes pratiques du KM et niveaux d’appropriation par les SDIS
Nous constatons que les SDIS ne sont pas restés hermétiques à ces pratiques même si la mise en
œuvre s’est faite parfois de manière empirique. Sans être nécessairement inscrites dans une
démarche globale, bon nombre d’entre elles présentent des intérêts pour améliorer la gestion des
connaissances dans les SDIS, dès lors qu’elles sont conduites en conscience.
En accord avec l’ENSOSP, notre étude au sein des SDIS résulte essentiellement d’une série
d’entretiens semi-directifs réalisés auprès d’un échantillon de treize SDIS (1ère à 4ème catégorie),
mais aussi de personnes qualifiées exerçant à l’ENSOSP, à la DGSCGC (journal de bord en annexe
n°4, questionnaire semi-directif en annexe n°5, liste des entretiens en annexe n°6). Le choix
d’élargir nos investigations aux organisations supra SDIS s’est imposé à nous comme une évidence,
dans le respect des principes d’ouverture, de partage, de collaboration, de transparence édictés par
le concept même du KM.
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En outre, le mode d’entretien retenu présente les avantages suivants :
• nos interlocuteurs étant fréquemment peu acculturés au concept du KM, nous avons pu
réduire le risque d’incompréhension des questions ou les biais dans les réponses apportées,
• nous nous sommes adaptés en permanence à nos contributeurs en précisant, affinant voire
réorientant les questions posées avec pour objectif énoncé, d’extraire au mieux les savoirs
dans leurs domaines de compétences respectifs,
• la conduite des entretiens a pu nous permettre de mettre à jour des pratiques existantes qui
pour certaines présentent un intérêt direct à l’image du « café de l’information ».
Parmi les premières constatations, il ressort que le niveau global d’acculturation des SDIS au
concept de KM est plutôt homogène et peu développé, même si un certain nombre de pratiques sont
utilisées. Hormis au sein du SDIS 71, du groupement formation des SDIS 45 et 69 ou auprès des
personnels de l’ENSOSP, les termes KM et de gestion des connaissances n’étaient pas ou peu
connus de nos interlocuteurs.
2.1.1. Pratiques managériales
En termes de vision et de stratégie, quelques SDIS interrogés ont réalisé un projet de service sans
pour autant faire référence explicitement à la mise en œuvre d’un système de management des
connaissances. Néanmoins, certains objectifs fixés comme « cultiver un climat de confiance
réciproque », « reconnaître les compétences et emplois tenus par les SPV en dehors du SDIS »
(SDIS 74), ou encore « faire accompagner chaque recrue par un parrain » (SDIS 01) sont des
orientations favorables à un partage des connaissances.
Quatre d’entre eux, soit une minorité ont également rédigé un socle de valeurs. Parmi celles du
SDIS 74 : l’ouverture d’esprit, l’écoute, l’empathie, peuvent participer à une acculturation du KM.
Le développement de la confiance entre les membres de l’organisation est difficilement évaluable.
Toutefois, une majorité des SDIS reconnaît qu’au sein de l’encadrement, « culturellement, tout le
monde n’est pas prêt à la transversalité ». La notion de « pouvoir qui ralentit le dispositif », est
notamment citée, sans qu’un engagement formel de la direction ne soit ressenti pour susciter un
partage organisé de la connaissance.
Une sollicitation de partenaires extérieurs est observée (plus couramment au sein des SDIS de 1ère
et 2ème catégorie) dans des domaines identifiés comme étant hors du champ des connaissances
disponibles en interne. Cette démarche n’est en revanche pas systématique et concerne
majoritairement les domaines de la formation dans les SDIS interrogés : travail avec un ergonome
(SDIS 38), emploie d’un sociologue (SDIS 71), recours au Centre National de la Fonction Publique
Territoriale (CNFPT) pour une analyse de besoins particuliers de formation (SDIS 69).
2.1.2. Pratiques organisationnelles
Concernant l’identification des connaissances importantes, le DDSIS de l'Ain résume un sentiment
partagé : « Le départ d'un agent peut-il nous fragiliser ? La réponse est oui. ». Son ressenti porte sur
« les connaissances liées au métier et les connaissances culturelles, collectives, liées à l'histoire de
l'établissement public ». La majorité des personnes interrogées complète : « La mobilité est un frein
très important à l'identification des savoirs. ». Elle rend les méthodes de transfert des
connaissances difficiles à mettre en œuvre, compte-tenu des règles liées aux mutations dans la
fonction publique et aux difficultés de fidélisation des SPV.
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Les retours d'expériences (RETEX), dans la culture des sapeurs-pompiers, concernent
exclusivement « l'apprentissage expérientiel » lié aux opérations de secours. Ils font l’objet de
documents de référence élaborés par la DGSCGC 1/ 2. L'ENSOSP mène également, depuis plusieurs
années des travaux en vue de développer les pratiques de RETEX au sein des SDIS. Le lieutenantcolonel Beaussé dresse un « constat d'échec depuis cinq ans ». Madame Morel-Senatore qui mène
des travaux sur le volet juridique des RETEX au sein du LEDeSC, précise que « Ce qui fait le plus
peur, ce sont les conséquences financières liées aux assurances. Le risque pénal est beaucoup plus
maigre que ce que l'on pourrait croire. ». Pourtant, elle souligne l'importance du RETEX : « C'est un
cercle vicieux, il est difficile d'avoir des données auprès des SDIS, (…) il est compliqué d'en sortir
une tendance pour prévenir ce risque [juridique] d'une manière coordonnée. ». Elle ajoute « Le
RETEX est un investissement. ».
A la lecture des entretiens au sein des SDIS, plusieurs grandes tendances apparaissent :
• le RETEX est pratiqué dans une majorité de SDIS, de manière peu formelle,
• il concerne aujourd'hui essentiellement les interventions d'ampleur ou ayant mis à jour des
contraintes particulières,
• les RETEX sont peu portés à connaissance des unités opérationnelles ; c’est le cas
également à l’échelle des SDIS pour ceux relatifs aux accidents en service commandé
(faible articulation nationale/départementale),
• un frein culturel est fréquemment opposé : « Il faut accepter le je ne sais pas » et « nous
sommes trop dans l'esprit de sanction. » selon le colonel Marlot (SDIS 71).
Concernant les examens après action, qui peuvent être le parallèle du RETEX pour les expériences
non opérationnelles, ils sont très peu développés, et identifiés comme un manque par plusieurs
interlocuteurs : « Nous n'avons jamais fait de RETEX sur des situations de management difficiles,
alors que ça aurait été utile dans certains cas. ».
Le nombre de SDIS ayant recours à la formation ouverte à distance est en constante
augmentation. Plusieurs SDIS ont développé un portail e-learning sur la plate-forme SPIRAL.
Lorsqu'il est développé, le e-learning est considéré principalement comme un outil servant la
« formation institutionnelle » pilotée par les écoles départementales de sapeurs-pompiers.
Les communautés de pratiques sont présentes de manière informelle au sein des SDIS. Les
équipes spécialisées en sont une bonne illustration, tout comme les « familles de formateurs »
identifiées au sein du SDIS 45. Elles ne sont en revanche pas systématisées à l'ensemble des
composantes de l'établissement. Dans les SDIS interrogés, seul le SDIS 71 aménage, par exemple,
« des espaces de concertation des chefs de centres ». Aucun des SDIS sollicités n'a déclaré avoir
formalisé un volume horaire ou des espaces dédiés à leur animation.
Aucun SDIS n'a identifié un « centre support de KM ». Cette solution n'est pas privilégiée au sein
du SDIS 71 qui possède d’ailleurs la stratégie de gestion des connaissances la plus aboutie des
SDIS interrogés. Le lieutenant-colonel Gamel, du SDIS 45 pose la question : « Faut-il qu'il y ait un
KM manager ? ». Mme Detrift confirme en précisant qu’« un responsable KM a sa place en tant que
1
2
DDSC Guide méthodologique, La conduite du retour d’expérience, éléments techniques et opérationnel, 2006.
DDSC, La conduite du retour d’expérience : éléments de culture professionnelle. 2006.
p36
p36
chef de projet à condition qu'il y ait des outils, des moyens, une inscription dans le projet
d'établissement. Sinon le responsable KM est inutile ».
Enfin, d'autres pratiques sont globalement inexistantes, telles que les banques des savoirs,
l'identification et le partage de pratiques, sans qu'un besoin ne se soit fait sentir lors des entretiens.
2.1.3. Pratiques humaines
Concernant les pratiques du KM se référant à la composante humaine, le tutorat suscite une
attention particulière. Non généralisé actuellement, il intéresse les services formation de nombreux
SDIS, du fait notamment de la refonte de la formation des SPV1. Au SDIS de l'Ain, certaines
activités sont dorénavant enseignées au sein même du centre d'incendie et de secours, sous la
responsabilité du tuteur, alors que l'ensemble des activités était réalisé sous l'égide de l'école
départementale. L'effet attendu est résumé par le lieutenant-colonel Gamel : il faut « redonner aux
petits CIS une responsabilité dans le domaine de la formation. Il faut accompagner la démarche,
proposer des fiches de référence pour les tuteurs ». Ce dispositif ne concerne actuellement que les
formations d'intégration des SPV, il n'est pas généralisé notamment dans les domaines fonctionnels.
Le parrainage, en revanche, n'est globalement pas formalisé dans le sens où les valeurs et la
culture de l'organisation ne sont que partiellement définies (voir §2.1.2).
Les CIS disposent de lieux de convivialité : les foyers. Ils peuvent être, sous certaines conditions, le
support idéal de la pratique du « Café de la connaissance ». En revanche, de nombreux sites en
sont dépourvus (état-major, centres techniques...). Cette pratique n'est ni généralisée, ni
institutionnalisée. Le SDIS 45 organise néanmoins un « café de l'information » d'une durée d’une
heure destiné aux cadres permettant « de se réunir, de diffuser de l'information et d'aborder les
grandes problématiques internes et externes ».
Les portails intranet comportent en général une fonction d'annuaire partagé, mais aucun SDIS
interrogé n'a développé un annuaire de compétences. Si les compétences d'experts « métiers » des
sapeurs-pompiers sont utilisées de manière plus ou moins formalisée, il existe en revanche peu
d'initiative visant à systématiser le référencement des compétences et expertises, par exemple, des
sapeurs-pompiers volontaires (en cours au SDIS 69). Le dispositif d'officier « expert » est par
exemple utilisé par le SDIS 01 (compte-tenu de son emploi au sein de la SNCF, un officier de SPV
a acquis le statut d'expert en risques ferroviaires et est sollicité, par exemple, dans l'élaboration des
plans ETARE). Au-delà des conseillers techniques des spécialités opérationnelles, les CODIS n'ont
en général pas de moyen organisé de solliciter l'appui opérationnel d'un membre de l'organisation
détenteur d'une compétence ou d'un vécu particulier.
Le développement des aptitudes aux techniques du dialogue, au débriefing, à l'accompagnement
est pris en compte partiellement par plus de la moitié des SDIS interrogés, sans toutefois être
systématisé. Les SDIS 38 et 69 ont formé leurs formateurs aux techniques d'explicitation qui leur
permettent d'identifier les démarches cognitives accomplies par les stagiaires pour résoudre les
problèmes posés lors des mises en situations. Le SDIS 45 envisage de former les futurs sousofficiers au débriefing post-intervention « pour faire en sorte que les compétences du groupe
s'améliorent ». Plusieurs SDIS, à l'image du SDIS 69, ont défini des objectifs de formation à
destination des cadres en fonction des responsabilités qui leur sont confiées (exemple de la
1
Arrêté du 08 Aout 2013 relatif aux formations des sapeurs-pompiers volontaires.
p37
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« formation professionnalisante des adjudants chefs de garde et chef d'agrès sur le principe du
développement par les compétences », le principe étant de « dépasser le cadre réglementaire de la
formation »).
Concernant le guidage (mentoring), l'activité n’est pas répandue. Aucun SDIS n'a déclaré avoir mis
en œuvre un accompagnement d'agents en difficulté par d'autres plus expérimentés, au-delà des
activités développées localement.
2.1.4. Pratiques technologiques
Les pratiques d'ordre technologique constituent un appui au développement des pratiques du KM.
Tous les SDIS interrogés sont dotés d'un réseau Intranet reliant les différents sites de travail.
Néanmoins, le portail web support des applications mises en œuvre diffère d'une structure à l’autre.
Ceci étant, l’accès à une boîte mail par des identifiants personnels n’est pas systématisé dans les
SDIS interrogés.
Les technologies collaboratives sont peu présentes dans les SDIS en appui du portail intranet. Leur
exploitation est partielle et il ressort que leur mise en place s'est réalisée soit lors de l'acquisition
d'un ensemble de « briques informatiques » incluses dans le portail, soit à la suite de demandes
ponctuelles effectuées en dehors d'un projet coordonné et global. Les plus couramment utilisées
sont les messageries (moyens de communication majeurs dans l'ensemble des SDIS mais très
limités en matière de gestion des connaissances), l'agenda partagé actif dans la moitié des SDIS
interrogés.
Un interlocuteur nous fait remarquer : « J’aimerais pouvoir utiliser les réseaux sociaux car la
diffusion par mail ne fonctionne pas, ne touche plus les jeunes. ». Alors que les problématiques de
la diffusion d'information par messagerie électronique sont souvent évoquées, les technologies du
web 2.0 ne sont en effet pas développées au sein des SDIS (blogs, wiki, réseaux sociaux).
Les outils destinés à faciliter les pratiques liées à l'organisation et à l'humain (communautés de
pratiques, annuaires de compétences, FOAD,...) sont très peu présents sur les portails. Le SDIS 69
utilise la solution Microsoft SharePoint© à destination de son équipe de direction. Plusieurs SDIS
utilisent SPIRAL, outil collaboratif, sous un angle essentiellement tourné vers la formation comme
nous avons pu le constater (§2.1.2).
Les plates-formes de gestion électronique de documents sont présentes dans la grande majorité
des SDIS. Elles présentent toutes des caractéristiques similaires : mise en ligne de documents ayant
fait l'objet d'une validation institutionnelle par un nombre d'interlocuteurs limité possédant les droits
d'accès. A contrario, les personnes interrogées citent un certain nombre de limites partagées : « C'est
un vieil outil très fermé, il n'y a pas de recherche possible, il est dur de mettre des documents
dessus » ou encore « il y a un problème de mise à jour des documents », « c'est un système
descendant haut-bas ». Aucun outil de taxonomie, permettant de rendre les informations plus
aisément identifiables, n’est recensé.
Par ailleurs, plusieurs SDIS se dotent progressivement d'un ETL, appelé couramment infocentre,
qui a pour but d'extraire des données produites dans les différentes bases de données afin de fournir
de l'information aux chefs de centres et personnels d'encadrement du SDIS.
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L'exemple du SDIS 71, qui a développé une plate-forme comportant une suite d'outils totalement
intégrés permettant un partage des connaissances, peut être cité. Un espace ayant l'architecture d'un
blog est dédié à chaque CIS. Chaque personnel de l'organisation, quelle que soit sa position
hiérarchique, possède un droit d'écriture. « Il existe une autorégulation du fait de l'identification de
celui qui publie. » nous confirme le colonel Marlot. Autre exemple, un SDIS présente sur la page
d'accueil de son portail un lecteur de flux RSS qui diffuse les nouvelles d'un quotidien et les
prévisions météorologiques mais n'est pas exploité dans une fin de partage de connaissances de
l’organisation même.
2.1.5. Les pratiques dans l’environnement des SDIS
Il nous est apparu important de considérer avec intérêt le partage des connaissances tel qu'il existe
aujourd'hui dans l’environnement des SDIS. Même si aucune politique globale de gestion des
connaissances n'est engagée, plusieurs actions sont initiées en vue d'un meilleur partage des
connaissances.
L'ENSOSP a démarré un programme important de partage des connaissances par le biais du PNRS1
lancé en 2007. Il s'agit, selon le colonel Mené, d’un « espace de management des connaissances
[qui] présente une triple vocation : livrer de l’information, animer des communautés de métier des
SDIS et organiser des rencontres nationales »1, autour de douze communautés. Il s’agit d’un outil
technologique unique, socle essentiel au partage des connaissances au niveau national, qui dispose
d’un fort potentiel de développement vers l’animation des communautés de pratiques.
Dans un autre domaine, le colonel Berthelot, DDSIS de Loire Atlantique a initié le Club des SDIS
partie intégrante du réseau « Idéal connaissances » en réponse aux attentes de directeurs
départementaux. Il précise qu'à l'origine de la démarche, sa messagerie « était polluée par des mails
de tous niveaux et qui témoignaient de la nécessité de partager les connaissances ». Il précise :
« Chacun pose des questions dans son domaine d'expertise, c'est une personne autorisée qui peut
répondre. » mais « globalement, ce sont toujours les mêmes qui contribuent, beaucoup lisent et peu
font les réponses ». Les SDIS sont très majoritairement adhérents au réseau (hormis douze d'entre
eux ayant arrêté la collaboration pour des raisons économiques). Une personne interrogée indique
par ailleurs que son SDIS étant inscrit, il ne participe pas « car toute question ou réponse doit être
validée par le DDSIS » ce qui ne semble pas correspondre à l'esprit initial du réseau. Le colonel
Berthelot conclut par un bilan de la pertinence des informations qui sont échangées : « Une
modération a été nécessaire une ou deux fois, mais cela est resté anecdotique comparé au nombre de
connexions. ».
Un autre partage de connaissances s'opère par le biais de l’Inspection de la Défense et de la Sécurité
Civile (IDSC). Le colonel Trépos a utilisé le Cadre d'Auto évaluation des Fonctions publiques
(CAF) pour structurer deux cent cinquante pratiques professionnelles non encore diffusées, issues
des inspections des SDIS.
La FNSPF joue également un rôle dans le partage des connaissances, par l'animation de réseaux,
notamment les groupes techniques régionaux actifs dans certains domaines : technique, formation.
D'autres initiatives sont également développées par la DGSCGC à visée directement opérationnelle,
telles que le portail ORSEC de portée interministérielle et comportant des annuaires de crises et une
1
Portail national des ressources et savoirs, http://pnrs.ensosp.fr.
p39
p39
base de documents, le projet INTEROPS qui vise à un meilleur partage des moyens disponibles
entre SDIS et avec les COZ et le COGIC, ou encore le réseau RADART 1.
2.2. Pratiques externes aux SDIS
L’état des pratiques de KM dans les SDIS comparé aux bonnes pratiques référencées permet
d’entrevoir la marge d’évolution et les orientations à adopter pour aller vers des organisations plus
apprenantes.
Complémentaires aux entretiens réalisés auprès de treize SDIS, onze entretiens ont été conduits
dans des structures diverses (ONU, EDF, BASF, Tefal, SteelCase, Conseil Régional, Gendarmerie,
Mairie), habituées au KM ou à des pratiques de KM reconnues. Ces organisations sont représentées
par des personnes qualifiées, dont les entretiens ont été complétés par des universitaires, des
chercheurs ou experts reconnus (Thomas Meszaros, Cécile Godé, Aurélie Dudezert, Christophe
Batier) – cartographie des contacts en annexe n°7.
Ainsi une partie des trente deux pratiques référencées a été illustrée de façon plus concrète et plus
vivante. Si les revues de sites et de littérature sont largement documentées et suffisantes pour
comprendre et expliciter les pratiques les plus reconnues, ces échanges ont facilité une forme de
transmission « tacite » des représentations et des pratiques du KM en fonction des organisations.
Les entretiens conduits sur un échantillon limité ne permettent ni de caractériser toutes les
pratiques, ni d’en découvrir de nouvelles. Le verbatim recueilli nous confirme que celles
référencées en annexe n°2 sont actuelles, efficaces et confortent un peu plus nos orientations.
2.2.1. Pratiques managériales
Cette dimension importante touche avant tout au socle culturel où « une culture de la diffusion du
savoir est une culture où l’homme a le droit de faire des erreurs pour pouvoir innover (Conseil
Régional Rhône Alpes) ». Ce socle commun par le partage des valeurs, permet de « donner du
sens à ce que chacun fait au sein de l’organisation » en orientant les comportements (Mairie de
Villeurbanne). Nos organisations doivent avoir le courage de suivre les idées audacieuses en
établissant des partenariats externes. L’Unité de Formation Production-Ingénierie avec l’aide de
l'Institut Français de l'Education a radicalement modifié sa pédagogie : « avant, interdiction des PC
dans les amphis / maintenant, les PC sont encouragés avec des travaux en réseau » (EDF). Enfin,
EDF « connaît le changement intergénérationnel » et considère qu’il serait « une erreur de ne pas le
prendre en compte » dans la vision relative à la gestion des connaissances. La motivation au sein
de la gendarmerie est organisée en encourageant l’émergence de bonnes pratiques. Les idées
novatrices remontent au niveau national, sont centralisées et analysées par un jury interne. Les
meilleures sont primées par l’Atelier de la Performance (ADP) pour être diffusées.
2.2.2. Pratiques organisationnelles
Au niveau des organisations, les pratiques reconnues sont nombreuses pour améliorer la gestion des
connaissances. La formation chez EDF va au-delà du e-learning avec des développements qui font
l'objet obligatoirement d’un cahier des charges et d’un dossier pédagogique comme les vidéos
apprenantes, les « serious-games », le multimédia activité professionnelle (MAP : vidéo apprenante
qui filme un geste professionnel), la réalité virtuelle. Toujours chez EDF, le RETEX traite chaque
1
Réseau national d’aide à la décision et d’appui face aux risques technologiques - DSC/SDGR/BRM/n°161 du 25 mai
2010.
p40
p40
évènement significatif sous l'angle technique et sous l'angle de la formation. Le traitement est
national avec des spécialistes « métiers » qui analysent et animent des réseaux de correspondants
dans chaque unité avec également un aspect curatif de portée nationale. Les communautés de
pratiques à l’ONU utilisent Microsoft SharePoint® pour disposer de technologies collaboratives
avec un animateur par communauté. L’enjeu est de capitaliser l’information échangée car selon
Aurélie Dudézert « Les gens qui se connaissent mieux arrivent à échanger de l’information plus
pertinente. ». Les mails, très utilisés, sont des puits perdus de données, d’informations ou de
connaissances échangées. Air Force Knowledge Now est une plate-forme contributive de tout le
personnel de l'armée de l'air américaine où les forums, les wikis, les « chats » sont enregistrés et
capitalisés.
2.2.3. Pratiques humaines
Les pratiques humano-centrées sont privilégiées pour partager ou transmettre des connaissances. Si
au sein des SDIS le principe de tutorat a été introduit pour les SPV mineurs, il est systématique
dans plusieurs organisations (BASF, Gendarmerie). Lorsque le transfert de compétences est
nécessaire, c’est le guidage (mentoring) qui est utilisé comme dans le groupe SEB avec un « contrat
de génération » obligatoire. Le parrainage à l’ONU ou dans la Gendarmerie a vocation à
transmettre « la culture (…), les règles de fonctionnement, le comportement et les valeurs... ».
Le dialogue, lui, reste la base des échanges en face à face et BASF promeut un dialogue fondé sur
l’honnêteté, le respect et la confiance mutuelle. BASF a également expérimenté les cafés de la
connaissance en unité de production pharmaceutique (ritualisés dans un espace dédié) : « en
s'arrêtant 1/4h toutes les semaines pour discuter de ce que vous voulez en relation avec le travail
(échange de bonnes pratiques), [cela] a permis d'augmenter le rendement de 20% des opératrices ».
Sans aller jusqu’à un RETEX, les débriefings appelés « Causeries » par BASF permettent en 5 min
de discuter d’une situation dangereuse et de prévoir les solutions à mettre en œuvre.
2.2.4. Pratiques technologiques
Les technologies de l’information facilitent le déploiement d’une gestion des connaissances. Une
conséquence de la taille du groupe BASF suite à son internationalisation est : « il est plus pratique
de laisser travailler les gens où ils sont puis de mettre en commun les données plutôt que de tout
centraliser ». L'avancée des technologies collaboratives (chat, plate-forme d'échanges, blogs,
possibilité de créer un groupe de travail sur un thème donné) offre désormais des fonctionnalités
étendues aux traditionnels portails intranet en matière de gestion des connaissances. La société
Steelcase a mis à disposition de ses salariés toutes les technologies collaboratives sur son portail
intranet. Toutefois, la mairie de Villeurbanne nous rappelle que tous les agents ne disposent pas
d’un accès intranet (presque la moitié du personnel) excluant ainsi des catégories attachées au
terrain et utilisant des savoirs tacites ou moins explicites. Le secrétariat de l’ONU nous interpelle
sur le fait que, l'information est créée partout mais n'est pas archivée avec les communications
électroniques classiques type mails. Il faut un système intégré adossé à des CdP et des utilisateurs
formés à la taxonomie. Au secrétariat de l’ONU, chaque document est défini selon un plan de
classement, et une durée de conservation. Les « best practices » sont gérées par les départements et
mises en ligne par eux-mêmes sur des sites web. Le but de mettre en ligne les bonnes pratiques est
de les transmettre à la population et aux autres agences de l'ONU.
Parmi les trente deux pratiques évoquées précédemment, dix-huit nous apparaissent déterminantes
pour s’inscrire dans un projet de gestion des connaissances adapté aux SDIS et faire l’objet de
p41
p41
préconisations. Sept sont pertinentes et intègrent les recommandations générales développées dans
le dernier chapitre, les six autres ne sont pas retenues comme pratiques pour nos organisations.
LES 32 BONNES PRATIQUES REFERENCEES
Organisationnelle
Humaine
Technologique
GED
Intégrées
Préconisations
(18)
Recommanda-tions (7)
Non stratégiques (6)
BONNES PRATIQUES TRANSPOSABLES
Managériale
Intranet
Partenariats externes
Retour d’expériences
Tutorat
Stratégie
Examen après action
Debriefing
Engagement et soutien
de la direction
Valeurs
Communautés de
pratiques
Centre support de KM
Annuaire de
compétences/d’experts
Parrainage
Etude de cas narrative /
récit
Café de la
connaissance
Confiance
E-Learning/FOAD
Vision
Portail
Technologies
collaboratives
Web 2.0 – réseaux
sociaux
Web 2.0 – Taxonomie
Web 2.0 - Wiki
Web 2.0 – flux RSS
Dialogue
Audit des
Connaissances
Transfert de
connaissances
Identification et
partage de pratiques
Motivation/
reconnaissance
Accompagnement
(coaching)
Guidage
(mentoring)
Banque des savoirs
Tableau 5 : synthèse des bonnes pratiques transposables aux SDIS
2.3. Retour sur les hypothèses de recherche
En l’état actuel d’avancement de notre étude, nous sommes en capacité de confronter nos
hypothèses de recherche à la réalité constatée.
Ainsi, nous vérifions notre première hypothèse selon laquelle le knowledge management permet
aux SDIS de s'adapter à la complexité de leur environnement (hypothèse 1) à la condition que
la gestion des connaissances fasse l’objet d’une démarche pluridisciplinaire.
Nous complétons la seconde hypothèse selon laquelle le KM est un facteur de confiance et de
motivation, sources de cohésion au sein des SDIS (hypothèse 2). En effet, un préalable culturel
favorisant la confiance et la motivation est nécessaire pour initier une démarche de KM ellemême produisant de la confiance et de la motivation (récursion organisationnelle – cf. partie 1
chapitre 3.2.1). Les expériences de terrain ont confirmé l’importance de la culture d’entreprise
facilitant l’intégration des personnes dans le cercle vertueux du partage et de l’enrichissement des
connaissances.
p42
p42
Enfin, nous confirmons que les technologies de l’information et de la communication (TIC) sont
essentielles mais non suffisantes pour valoriser le capital immatériel des SDIS (hypothèse 3).
Le KM relève d’un assemblage harmonieux entre des bonnes pratiques centrées sur l’Homme et des
pratiques technologiques. Les TIC sont des outils supports incontournables, mais visant
essentiellement à faciliter et amplifier le processus de gestion des connaissances individuelles et
collectives.
Notre perception de la gestion des connaissances par une approche théorique, multidimensionnelle
et exploratoire nous permet d’édicter, à ce stade de notre étude, des recommandations et des
préconisations à l’attention des SDIS mais intéressant également l’échelon national visant à
instaurer une dynamique de knowledge mix de type humano-centré (cf. annexe n°8).
3. RECOMMANDATIONS ET PRECONISATIONS
3.1. Recommandations générales :
La gestion des connaissances n’est pas une fin en soi, mais une démarche puissante pour
l’amélioration des résultats de l’organisation intimement dépendante de la performance des
individus qui l’animent. Aussi la mise en œuvre réussie d’une démarche de KM, en infra comme en
supra SDIS, suppose comme préalable que les équipes de direction s’inscrivent dans une démarche
globale et gardent à l’esprit les dix principes fondamentaux suivants :

commencer simultanément une implantation du KM de manière « bottom-up » et « topdown » que ce soit au sein des SDIS ou à l’échelon supra-départemental,

développer une stratégie qui priorise la profondeur au lieu de l’étendue, par l’élaboration
d’un ensemble complet de connaissances dans un domaine particulier avant de la déployer
dans d’autres domaines,

privilégier une politique de KM qui s’appuie prioritairement sur des entités culturellement
plus favorables au partage des connaissances (domaine opérationnel, formation, sécurité des
personnels) et sur des relais internes existants,

favoriser une vision à long terme : le KM ne se décrète pas, le changement culturel doit être
progressif et accompagné pour être accepté,

s’appuyer dans un premier temps sur le socle des processus existants, connus, maîtrisés
pour ne pas modifier globalement et rapidement les habitudes de travail (perte de repères),
avant d’introduire progressivement des pratiques plus novatrices,

privilégier autant que possible les contacts humains à l’interface technologique en
encourageant la transversalité des échanges, notamment dans des espaces informels de type
café de la connaissance afin d’instaurer un climat de confiance indispensable au partage,

développer constamment les motivations des personnels au partage des connaissances par
des critères d’intéressement et la reconnaissance par le partage des bonnes pratiques évaluées
positivement,
p43
p43

valoriser et exploiter pleinement les connaissances tacites, capital le plus difficile à partager,

partager de façon dynamique des connaissances à jour est toujours préférable à l’archivage
de connaissances obsolètes (exemple : le flux RSS est mieux adapté aux communications
extérieures vers des cibles ayant besoin d’informations synthétiques, susceptibles de
remplacer avantageusement les BRQ en élargissant la diffusion (Maires, Médias, Chef de
CIS, Préfectures…),

offrir un soutien technique aux utilisateurs (formation ouverte à distance, outils
technologiques) mais aussi un accompagnement managérial (comprendre les enjeux) et
pédagogique (se former aux techniques de dialogue, …).
3.2. Préconisations intra SDIS
Les six préconisations suivantes font référence à des pratiques déterminantes, reconnues,
transposables. Elles sont complémentaires pour déployer la démarche dans ses quatre dimensions.
Préconisation 1
Pourquoi
Comment
Freins/Obstacles
Pratiques en jeu
Préconisation 2
Pourquoi
Comment
Freins/Obstacles
Pratiques en jeu
Inscrire la gestion des connaissances dans les axes stratégiques du SDIS
avec des valeurs compatibles et un engagement fort de la direction.
Le KM est une démarche qui participe au système de management global de
l’établissement.
Défendre les valeurs du service en alignant la pratique sur le discours (en
encourageant ou dissuadant des comportements) pour modifier ainsi la culture
du groupe.
Par un plan de communication approprié à la démarche.
Par une déclinaison « penser global, agir local ».
Dans le cadre des projets de service ou d’un travail sur les valeurs, les SDIS
doivent veiller à intégrer celles qui participent au KM (échange, partage,
transmission…).
Nécessite une adhésion collective aux valeurs.
Résistance aux changements culturels.
Stratégie, valeurs, engagement de la direction.
Systématiser le tutorat (pour toute évolution professionnelle importante) et
le parrainage (pour chaque nouvelle recrue).
Le tutorat permet le transfert interne des connaissances et compétences en
redonnant l’expertise au terrain dans un souci de continuité et de qualité.
Pour les nouvelles recrues, le tutorat doit être complété par un
parrainage (transmettre un état d’esprit, une culture, les valeurs communes).
En identifiant et formalisant les connaissances tacites et explicites à transférer.
En accompagnant les binômes tuteur/apprenant dans l’atteinte des objectifs.
En valorisant le rôle de tuteur (temps dédié, compétences reconnues par sa
hiérarchie, prise en compte dans son évaluation, …).
En faisant de la titularisation un symbole fort par lequel le SDIS reconnaît que
l’agent a acquis le socle des valeurs de l’institution.
Nécessité de dégager du temps, d’intégrer le tutorat dans l’activité de l’agent, de
suivre, de contrôler les acquisitions, de valoriser la mission.
Tutorat, parrainage.
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p44
Préconisation 3
Pourquoi
Comment
Freins/Obstacles
Pratiques en jeu
Promouvoir, préparer et accompagner la mise en réseau des SDIS, entre
eux et avec les partenaires externes.
Pour mutualiser les connaissances entre SDIS à moindre coût.
Pour créer des synergies avec nos partenaires en interservices.
Pour s’ouvrir vers l’extérieur et bénéficier d’expertises et de savoir-faire
nouveaux.
En systématisant l’élaboration de protocoles d’accord, conventions…
En s’inspirant des initiatives existantes comme le réseau Idéal, les groupes
techniques zonaux, le réseau RADART, mais aussi l’INFOSDIS, le portail
ORSEC, le projet INTEROPS ou le PNRS.
En mutualisant et en maillant les ressources « informatique et communication ».
Par un rapprochement avec les universités, le monde de la recherche, qui voient
dans notre profession un terrain d’études très riche.
Par des échanges avec les industriels pour capter des expertises et améliorer nos
techniques opérationnelles.
Sentiment d’autosuffisance, crainte de la comparaison, de la remise en question.
Faible collaboration « inter-SDIS », incompatibilités des outils, iniquité du
partage, coût de mise en œuvre, libre administration des collectivités.
Partenariats externes, intranets.
Préconisation 4
Favoriser l’émergence et le développement des communautés de pratiques
via les technologies collaboratives.
Les communautés de pratiques existent de manière informelle et partielle. Les
Pourquoi
généraliser et leur donner une existence et des moyens de fonctionnement
permet de faire évoluer l’établissement vers une organisation en réseau.
Limiter les échanges d’information par messagerie électronique, par nature
non organisés et non valorisés.
En déployant des outils collaboratifs parallèlement à la mise en réseau des
Comment
SDIS, et en animant chaque communauté de pratiques.
En facilitant leur ouverture sur d’autres SDIS ou experts reconnus.
En mettant à disposition du temps, des technologies collaboratives (réseaux
sociaux, forum, wiki, visio, data, RSS), des « community managers », des
annuaires de compétences et d’experts associés à une taxonomie…
Freins/Obstacles Crainte de perte de pouvoir et de perturbations dans le fonctionnement de
l’organisation (réseaux parallèles informels, autogestion discordante…).
Système régalien (décision prise au niveau central) s’appuyant sur un mode de
communications descendantes (« top-down »).
Pratiques en jeu Communautés de pratiques, technologies collaboratives, annuaires d’expert.
p45
p45
Préconisation 5
Pourquoi
Comment
Freins/Obstacles
Pratiques en jeu
Préconisation 6
Pourquoi
Comment
Freins/Obstacles
Pratiques en jeu
Faire évoluer les systèmes d’information des SDIS vers un outil intégré
avec portail favorisant le travail collaboratif.
Faciliter la collecte, le transfert, le partage, la diffusion, par l’appropriation, de
connaissances à partir d’un site ergonomique intuitif et collaboratif : partages
d’informations, échanges organisés, gestion de projets en interservices, travail à
distance, veille environnementale interne « terrain » (technique, managériale,
sociale), externe (technologique, juridique…)
Par un accès unique aux différentes applications, une utilisation facile, sans
perte de repères pour les utilisateurs :
o outils collaboratifs orientés « métiers » (cf. annexe n°3),
o mise en réseau des intranets avec accès pour tous,
o gestion électronique de documents privilégiant la constitution de
mémoires dynamiques, vivantes et réactualisées pour une capitalisation
plus pertinente (cycle de vie), associée à une taxonomie adaptée.
Par une formation suivie des personnels aux fonctionnalités de l’outil.
Coût de conception et de mise en œuvre, approches trop novatrices souvent
perturbantes pour les utilisateurs.
Technologies collaboratives (réseaux sociaux, groupware, taxonomie), intranets,
web 2.0 wiki
Clarifier et segmenter la logique du retour d’expériences par différentes
pratiques.
Pratique utilisée uniquement dans le domaine opérationnel, pour les
interventions significatives, alors qu’il trouve un réel intérêt dans la captation
des savoirs expérientiels, opérationnels, et fonctionnels.
En mettant en œuvre les pratiques référencées, que sont :
o le débriefing : pour l’opérationnel « non significatif »,
o la technique de récit : capitalisation des savoirs expérientiels
opérationnels,
o l’examen après action : capitalisation des savoirs expérientiels
fonctionnels,
o le RETEX : opérationnel significatif (accidents, presque accidents).
En constituant des bases de données expérientielles sous forme multimédia
avec une taxonomie adaptée afin de valoriser nos savoirs pratiques.
En les diffusant et les partageant en libre accès.
En référençant les détenteurs d’expériences clés, identifiés et mobilisables si
besoin.
En déculpabilisant l’erreur (processus normal d’apprentissage).
Peur du jugement de valeur (frein à la diffusion), sentiment de culpabilité
(amalgame fréquent entre erreur, faute et indiscipline).
Souvent limité à une analyse technique négligeant le facteur humain.
Absence de réseau de partage articulé (national/zonal/départemental).
Retex, debriefing, examen après action, technique de récit, taxonomie
p46
p46
3.3. Préconisations supra SDIS
Il ressort de nos investigations, qu’une véritable politique de gestion des connaissances organisée et
systématisée ne peut essaimer au sein de la profession qu’avec une dynamique globale. En effet, le
principe de libre administration territoriale permet à n’importe quel SDIS de commencer une
démarche de KM, mais rien ne l’y oblige. Il est donc nécessaire qu’une volonté soit affichée au
niveau national pour institutionnaliser et coordonner la démarche.
Aussi, pour conduire les SDIS vers un statut reconnu « d’organisation apprenante » dite 2.0, la
vision stratégique globale participant à un leadership unifié nous a conduit à élargir nos
préconisations à la dimension supra SDIS. Les trois préconisations ci-après s’inscrivent dans cette
logique.
Préconisation 1
Pourquoi
Comment
Freins/Obstacles
Pratiques en jeu
Préconisation 2
Pourquoi
Comment
Freins/Obstacles
Pratiques en jeu
Présenter le projet de gestion des connaissances selon une formule
commune porteuse, pour que le concept soit compris et accepté dans les
SDIS.
Le knowledge management est généralement un langage de cadres supérieurs. Il
convient donc de ne pas employer ces termes afin que la politique managériale
soit plus explicite pour tous.
Le projet doit être perçu comme une démarche collective, simple, abordable et
facilement accessible par les futurs acteurs.
En excluant le barbarisme et l’aspect technocratique de l’appellation anglosaxonne. Privilégier une formulation du type « partager nos savoirs » ou
« partage des pratiques » ou « SDIS 2.0 »…
Quelques exemples d’appellations :
o SNCF : gestion documentaire,
o Bouygues : partage des connaissances,
o SEB Téfal : tutorat d’expertise.
Aucun, le concept KM étant très peu connu en ces termes.
Stratégie
Anticiper, préparer et conduire dans le cadre d’un leadership cohérent et
convergent (DGSCGC, ENSOSP, SDIS) le projet SDIS 2.0.
Le passage à la gestion des connaissances implique un processus de
changement à moyen et long terme nécessitant un pilotage national pour
impulser une dynamique commune aux SDIS.
Par un travail introspectif mené en mode projet.
Par un engagement de la DGSCGC via de nouveaux indicateurs INFOSDIS et
le déploiement d’un outil d’auto-évaluation à destination des SDIS intégrant
« les bonnes pratiques de gestion des connaissances ».
Par un soutien de l’ENSOSP qui, en introduisant le KM dans la formation des
cadres (FI LT, FI CNE, FAE CdG, FAE DDA, FMPA des Directeurs…),
affirmerait une prise en compte nationale pour inciter la démarche à l’échelon
local (à l’instar de la diffusion de la culture GOC).
Peur du changement, méconnaissance générale du concept de KM, crise
économique imposant d’autres priorités, décalage intergénérationnel.
Stratégie, engagement et soutien de la direction.
p47
p47
Préconisation 3
Pourquoi
Comment
Freins/Obstacles
Pratiques en jeu
Développer une ressource technologique et collaborative d’envergure
supra-départementale en soutien des projets SDIS 2.0.
Pour faciliter l’appropriation du concept par les SDIS (conseils, expertise) et
organiser l’accompagnement.
Pour centraliser et diffuser par le biais d’un guichet unique la connaissance
d’intérêt national.
Pour faciliter l’animation des différentes communautés de pratique d’envergure
nationale.
En créant un centre support animé et piloté par un groupe projet, en capacité
d’impulser une dynamique, de soutenir les initiatives locales et d’accompagner
les SDIS.
En déployant un outil intégré de portée nationale visant à favoriser l’émergence
d’une culture de gestion des connaissances (dans le prolongement du PNRS).
Manque de communication sur les objectifs, risque d’ingérence, financement.
Centre support, communautés de pratiques, technologies collaboratives,
stratégie.
3.4. Projet de gestion des connaissances
A ce stade, notre étude peut être le point de départ du projet de KM au sein des SDIS. Ce mémoire
correspond à la phase d’avant-projet. Les recommandations formulées permettront d’appuyer la
démarche en guidant les équipes aux différentes étapes du projet. Quant à nos préconisations, elles
orientent déjà la phase d’organisation du projet.
A court terme, les préconisations n°1 (intra SDIS ou supra SDIS) qui déterminent la stratégie à
appliquer, sont des préalables indispensables à la mise en œuvre globale du projet.
A moyen terme, tout ou partie des autres préconisations peut faire l’objet des phases de conception
et de réalisation en fonction des objectifs retenus selon l’illustration ci-dessous.
Figure 6 : diagramme de Gantt du projet de gestion des connaissances
Chacune d’elles nécessite des études complémentaires relatives à la conception puis à la mise en
œuvre, par des équipes projets. Les étapes décisionnelles seront primordiales pour concrétiser
l’ensemble de la démarche (exemple en annexe n°9). Le processus décisionnel doit être organisé par
la constitution d’un comité de pilotage, validant ou réorientant les propositions des responsables de
projets à chaque étape ().
p48
p48
CONCLUSION
« La culture, c'est ce qui relie les savoirs et les féconde. »
Edgar Morin
D
ans le cadre de la modernisation de l’action publique engagée par le gouvernement, le
Premier Ministre a décidé d’évaluer les politiques publiques, dont « la politique territoriale
d’incendie et de secours » à partir de cette année.
Plus récemment le Ministre de l’Intérieur, faisant allusion à un « pacte de sécurité civile » entre
l’état et les élus, a évoqué le « rôle déterminant » de l’ENSOSP dans le développement d’une
véritable culture du management du volontariat et la transmission des valeurs telles que
« l’exemplarité, le dévouement, le courage et l’altruisme »1.
Parallèlement, il a chargé la DGSCGC, en collaboration avec l’inspection générale de
l’administration et l’assemblée des départements de France, de faire des propositions à la fin de
l’année 2013 pour que le gouvernement puisse faire évoluer positivement la politique territoriale
d’incendie et de secours.
Ces grandes orientations nous confortent dans l’idée que la sécurité civile et plus précisément notre
profession ne peut faire l’économie de la gestion de ses connaissances pour respecter l’engagement
politique qui vise à rationaliser le service public en général et les services d’incendie et de secours
en particulier.
Mieux encore, une démarche de knowledge management bien menée pourrait préparer les
mentalités à une éventuelle réorganisation territoriale des SDIS dans un cadre supra-départemental
en induisant la mutation culturelle indispensable à ces changements organisationnels.
Il a fallu une bonne décennie aux nouveaux établissements publics d’incendie et de secours pour
asseoir la départementalisation et entrevoir malgré tout, vis à vis de l’évolution des risques,
certaines limites à ce cadre plus cohérent que le cadre communal. Il s’agit donc pour les SDIS, mais
également pour l’échelon central, de franchir un nouveau palier en saisissant l’opportunité
stratégique du KM. Cette nouvelle culture permettra l’instauration d’une « nouvelle donne »
adaptée à l’évolution sociétale.
Ce travail de recherche nous a été confié alors que, à l'image de notre profession, nous n'avions
aucune représentation du concept. Le présent mémoire a donc pour objectif affiché de faciliter
l’acculturation des cadres supérieurs aux enjeux du KM tout en les aidant à organiser leur réflexion
pour préparer stratégiquement la transition vers des organisations apprenantes, collaboratives,
pluridisciplinaires et maillées.
Du point de départ aux perspectives suscitées, nous avons cherché à contextualiser notre étude dans
l’espace et dans le temps. En effet, les écueils possibles sont nombreux et les particularités
culturelles des sapeurs-pompiers en général, et des SDIS en particulier, se devaient d’être prises en
compte. Dans cette logique, nous avons fait le choix d’une investigation large, bien que non
exhaustive, en proposant un socle de mesures plutôt que le développement arbitraire de l'une ou
l’autre d’entre elles. Ceci étant, une littérature abondante donne la possibilité d'approfondir au
besoin un domaine particulier, en fonction des développements spécifiques propres à chaque projet.
Au-delà de la production du mémoire, les nombreux échanges avec des experts, des pratiquants, des
initiés ou des novices, que ce soit au niveau des institutions nationales, des collectivités territoriales,
1
ENSOSP, Le sabre et la plume n°18, 2013.
p49
p49
de l’entreprise, de l’enseignement supérieur, de la recherche ou des SDIS, ont rendu notre approche
vivante, riche et plus explicite.
Grâce au travail de groupe accompli, nous avons appris à partager des points de vue parfois
différents pour en tirer une synthèse non seulement acceptée mais réellement partagée par tous. Il
nous a fallu créer notre propre communauté de pratique, identifier nos ressources clés, nous mettre
en réseau, utiliser des outils de travail collaboratif, en quelque sorte concrétiser par l’application les
connaissances acquises sur le sujet.
Dans la continuité de cette première approche par la profession du concept de KM, il sera possible
pour des recherches futures, et à titre d’exemple, de concevoir un système de gestion des
connaissances ou encore de développer et projeter une ou plusieurs bonnes pratiques pouvant être
mises en œuvre dans un SDIS déjà engagé dans une telle démarche.
Aujourd’hui plus que jamais, la vitesse d’évolution du monde numérique nous interpelle. Elle rend
possible à la fois une parcellisation de la connaissance sur le sujet du fait de sa complexité et une
forme de fracture générationnelle (X versus Y) que nos organisations SDIS ne peuvent accepter par
l’enjeu même du volontariat, pilier majeur de la sécurité civile en France.
Nombreux déclarent que nous sommes à la croisée des chemins, entre subir ce bouleversement ou
l'accompagner, et alors que nous proposons une stratégie pour tendre vers un SDIS 2.0, déjà se
profile à une échéance de quelques années le web 3.0.
Nous devons donc préparer par des moyens adéquats cette (r)évolution technologique qui
engendrera une mutation sociétale dont nous mesurons difficilement la portée, même si nous
pressentons des changements importants.
Ces moyens, reposant essentiellement sur les potentialités existantes, sont avant tout des
investissements basés sur des synergies, des mutualisations, des partages et des mises en réseau.
Cela se traduit clairement par un repositionnement de l’Homme au centre de nos préoccupations, ce
qui pourrait être un paradoxe alors même que nous évoquons une (r)évolution technologique. Il est
dès lors considéré non plus comme une « ressource humaine », mais comme détenteur d’un capital
qui participe à la valorisation du service public. Il y consacre son temps de travail, plus qu’il n’y
appartient. Cela se conçoit avec le corollaire de replacer l’humain au cœur des technologies de
l’information et de la communication pour construire les futures technologies de l'intelligence
collective.
Ces différentes nuances peuvent paraître subtiles, voir insignifiantes alors qu’elles sous-entendent
une profonde remise en question allant jusqu’à un véritable changement de paradigme au sein de
notre profession.
Le KM peut alors se présenter, au-delà des enjeux de rationalisation ou d’évolution du service
public envisagées par nos dirigeants politiques, comme un outil stratégique de management par la
qualité, capable non seulement de préparer, mais aussi et surtout, d’accompagner cette évolution
culturelle.
p50
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REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
A
-
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Loi constitutionnelle n° 2003-276 du 28 mars 2004 relative à l’organisation décentralisée de la
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http://www.wikiterritorial.cnfpt.fr
http://wise-touch.com
p53
p53
TABLE DES ILLUSTRATIONS
Tableau 1 : le KM dans les SDIS
Tableau 2 : valeurs affichées et valorisées par l’ENSOSP
Tableau 3 : représentations limitantes des sapeurs-pompiers
Tableau 4 : synthèse des bonnes pratiques du KM et niveaux d’appropriation par les SDIS
Tableau 5 : synthèse des bonnes pratiques transposables aux SDIS
17
20
21
34
42
Figure 1 : spirale de la connaissance
Figure 2 : les activateurs de KM (CEN)
Figure 3 : propriétés contraignantes issues de la pensée de groupe
Figure 4 : culture des SDIS versus culture de la gestion des connaissances
Figure 5 : diversité culturelle dans l’entreprise
Figure 6 : diagramme de Gantt du projet de gestion des connaissances
10
13
20
22
28
48
p54
p54
TABLE DES MATIERES
TABLE DES ABREVIATIONS
PROLEGOMENES
INTRODUCTION
1
PARTIE 1
GESTION DES CONNAISSANCES : CONCEPT, PROCESSUS ET REPRESENTATION
4
1. LES STRUCTURES DE LA CONNAISSANCE
4
1.1. LA DONNEE ET L’INFORMATION : CONSTITUANTS ELEMENTAIRES DE LA CONNAISSANCE
1.1.1. LA DONNEE
1.1.2. L’INFORMATION
1.2. LES NOTIONS DE CONNAISSANCE, COMPETENCE ET SAVOIR
1.2.1. LA CONNAISSANCE
1.2.2. LA COMPETENCE
1.2.3. LE SAVOIR
1.3. LA NOTION DE CULTURE
1.3.1. ASPECT GENERAL
1.3.2. CULTURE ORGANISATIONNELLE
1.3.3. CULTURE DE LA GESTION DES CONNAISSANCES
5
5
5
6
6
7
7
8
8
8
9
2. LES PROCESSUS DE GESTION DES CONNAISSANCES DANS L’ORGANISATION
9
2.1. LE CYCLE DE VIE DU SAVOIR
2.1.1. L’IDENTIFICATION DE CONNAISSANCES
2.1.2. LA CREATION DE CONNAISSANCES
2.1.3. LE STOCKAGE DES CONNAISSANCES
2.1.4. LE PARTAGE DES CONNAISSANCES
2.1.5. L’UTILISATION DES CONNAISSANCES
2.2. PROJET DE GESTION DES CONNAISSANCES
2.2.1. VISION ET MANAGEMENT STRATEGIQUE
2.2.2. CHOIX TACTIQUES DE MISE EN ŒUVRE DU KM
2.2.3. LES ACTIVATEURS DU KNOWLEDGE MANAGEMENT
9
9
9
10
10
11
11
11
12
13
3. REPRESENTATION DU CONCEPT
14
3.1. CARTE HEURISTIQUE
3.2. VEILLE ENVIRONNEMENTALE
3.2.1. APPROCHE DE LA COMPLEXITE
3.2.2. CONTEXTE PERIPHERIQUE A NOTRE ETUDE
3.2.3. UN CHANGEMENT DE PARADIGME POUR LES SDIS ?
3.3. ETUDE DES FORCES ET FAIBLESSES DES SDIS FACE AU KM
3.4. FORMULATION DES HYPOTHESES DE RECHERCHE
14
14
14
15
16
17
18
p55
p55
PARTIE 2
VERS UNE APPROCHE MULTIDIMENSIONNELLE DANS LES SDIS
19
1. PARTICULARITES CULTURELLES ET OPPORTUNITES
19
1.1. LA CULTURE DES SDIS ET DES SAPEURS-POMPIERS
1.1.1. SYSTEME DE VALEURS DE L’ENSOSP
1.1.2. CULTURE DE GROUPE
1.2. LES OPPORTUNITES DE LA GESTION DES CONNAISSANCES POUR LES SDIS
1.2.1. FACILITATEURS CULTURELS
1.2.2. MARGES DE PROGRES
19
19
20
22
22
23
2. ANALYSE MULTIDIMENSIONNELLE
25
2.1. LA DIMENSION MANAGERIALE
2.1.1. LA COMPOSANTE STRATEGIQUE
2.1.2. LA COMPOSANTE « POUVOIR »
2.2. LA DIMENSION ORGANISATIONNELLE
2.2.1. LA COMPOSANTE STRUCTURELLE
2.2.2. LA COMPOSANTE FONCTIONNELLE
2.3. LA DIMENSION HUMAINE
2.3.1. LA COMPOSANTE INDIVIDUELLE
2.3.2. LA COMPOSANTE COLLECTIVE
2.4. LA DIMENSION TECHNOLOGIQUE ET MATERIELLE
2.4.1. LES TECHNOLOGIES DE L’INFORMATION ET DE LA COMMUNICATION
2.4.2. LES ESPACES MATERIELS
25
25
25
26
26
27
27
27
28
30
30
31
PARTIE 3
LES BONNES PRATIQUES DE KNOWLEDGE MANAGEMENT POUR LES SDIS 2.0
33
1. LES BONNES PRATIQUES DU KNOWLEDGE MANAGEMENT
33
1.1. NOTION DE BONNES PRATIQUES
1.2. LISTES DE REFERENCE
33
33
2. ETAT DES BONNES PRATIQUES REFERENCEES
34
2.1. PRATIQUES INTERNES AUX SDIS
2.1.1. PRATIQUES MANAGERIALES
2.1.2. PRATIQUES ORGANISATIONNELLES
2.1.3. PRATIQUES HUMAINES
2.1.4. PRATIQUES TECHNOLOGIQUES
2.1.5. LES PRATIQUES DANS L’ENVIRONNEMENT DES SDIS
2.2. PRATIQUES EXTERNES AUX SDIS
2.2.1. PRATIQUES MANAGERIALES
2.2.2. PRATIQUES ORGANISATIONNELLES
2.2.3. PRATIQUES HUMAINES
2.2.4. PRATIQUES TECHNOLOGIQUES
34
35
35
37
38
39
40
40
40
41
41
p56
p56
2.3. RETOUR SUR LES HYPOTHESES DE RECHERCHE
42
3. RECOMMANDATIONS ET PRECONISATIONS
43
3.1.
3.2.
3.3.
3.4.
43
44
47
48
RECOMMANDATIONS GENERALES :
PRECONISATIONS INTRA SDIS
PRECONISATIONS SUPRA SDIS
PROJET DE GESTION DES CONNAISSANCES
CONCLUSION
49
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
51
REFERENCES LEGISLATIVES ET REGLEMENTAIRES
53
REFERENCES SITOGRAPHIQUES
53
TABLE DES ILLUSTRATIONS
54
TABLE DES MATIERES
55
p57
p57
ANNEXES
TABLE DES ANNEXES
Annexe 1 :
Carte heuristique du concept
Annexe 2 :
Bonnes pratiques du KM
Annexe 3 :
Technologies de l’information
Annexe 4 :
Journal de bord
Annexe 5 :
Questionnaire semi directif
Annexe 6 :
Liste des entretiens
Annexe 7 :
Cartographie des contacts
Annexe 8 :
Cartographie possible de la dynamique des acteurs
Annexe 9 :
Illustration possible d’un projet de KM
p58
p58
ANNEXE 1
CARTE HEURISTIQUE DU CONCEPT
p1
Permettre aux cadres et acteurs clés de se
projeter à t+x années
Décliner en étapes assorties d’objectifs
intermédiaires
Proclamer
les
valeurs,
soutenir
les
comportements définis par ces valeurs,
décourager les comportements qui violent ces
valeurs
Doit être basée sur la compétence et sur des
rapports respectueux
Etablir des liens avec des partenaires, des
universités, des instituts de recherche
Expliciter l’organisation dans le futur
Savoir comment atteindre la vision
retenue
Entrainer les individus dans des
comportements plus appropriés
Déterminer le niveau de qualité du
partage
Ouvrir et partager des connaissances à
l’extérieur de l’organisation
Vision
Stratégies
Confiance
Nécessité de réciprocité
Respecter et mettre en évidence
en même temps la diversité
Difficulté à discerner projection
et ambition
Observations
Partenariats externes
Nécessité de bien identifier les
savoirs cruciaux à protéger des
savoirs partageables
Engagement et soutien Encourager les pratiques de KM et les Récompenser et stimuler les participations de Nécessite l’engagement des
changements culturels
différentes manières, même modestes et partager cadres
de la direction
les erreurs sans stigmatiser
Mettre en place un système de
reconnaissance du partage de la
connaissance
Valeurs
Comment
Utiles pour
Pratiques
ANNEXE 2
LES BONNES PRATIQUES DU KNOWLEDGE MANAGEMENT
Dimension managériale
Analyser retrospectivement un projet ou
une étape clef
Examen après action
d’un
Transmettre des savoirs explicites sans
contrainte de temps et de distance
qui
a
besoin
des Quelqu’un
savoir/savoir faire/savoir être
Comprendre l'environnement de la
connaissance d'une organisation
Quel est l'état des connaissances dans
l'organisation
Pour une meilleure objectivité
E-learning/FOAD
Marché
connaissances
Utiles pour…
Observations
La personnalité et le rôle du
« community
manager »
est
essentiel, son choix est déterminant,
il doit y trouver un intérêt et le
temps est parfois long pour obtenir
des résultats
Faire un inventaire des actifs de connaissances Accepter et mettre en œuvre les
disponibles et des ressources d'informations au changements suggérés
moyen d'enquêtes, de processus, de Donner suite
cartographies, d’analyse des compétences.
Carte des flux d'informations importantes pour
l’organisation – identifier les points où les
informations sont rassemblées ou disséminées
et comment ils sont ou pas connectés à d'autres
Réaliser la connexion entre individus ayant Mise à jour indispensable de
relevé des lacunes et individus ayant des l’annuaire de compétences
connaissances et/ou expertise à partager
Organiser la mise à disposition et les Nécessite des supports adaptés
validations des séquences
(vidéo, diapo, mises en situation..),
économie de temps présentiel
Discussion sur la méthode et les progrès Difficulté à admettre les choses qui
réalisés
ne vont pas du fait de la Culture
Evaluation structurée des personnes impliquées organisationnelle
pour résumer les connaissances acquises
Nécessite de laisser du temps à la
réflexion.
Comment ?
de Regrouper des individus avec des projets Faciliter la collaboration « en ligne » et « en
communs nécessitant de partager des face à face »
pratiques et de trouver des solutions
communes
Audit des connaissances
Communauté
pratiques (CoP)
Pratiques
LES BONNES PRATIQUES DU KNOWLEDGE MANAGEMENT
Dimension organisationnelle
Retour d’expériences
Banque des savoirs
Transfert
connaissances
Utiles pour…
Observations
Capturer et diffuser largement pour réutilisation.
Joindre des détails sur les pratiques qui ont fait
leurs preuves pouvant être considérées comme «
modèles » pour adoption ou adaptation aux
conditions locales.
Limite culturelle importante liée à
la perception de l’erreur (erreur ≠
faute) et aux peurs associées
(judiciarisation)
Mise à jour des données
Accès facilités aux données
Utilisable par tout le monde
Difficulté de rendre l'information
accessible, consultable et utilisable
dans des formats appropriés
Gain de temps et de ressources
Le modèle de réussite peut être une
motivation pour les équipes
Peut être une source d'innovation.
Utilisation d’un protocole structuré pour capter Capture intelligente prenant en
les connaissances, expériences, contacts
compte la nécessaire synthèse du
poste et le mode prévu de diffusion
Comment ?
Mettre en place une équipe support
pluridisciplinaire reconnue pour son leadership,
pour soutenir la collecte, le partage des
connaissances par des conseils, de la
coordination et des compétences reconnues
Offrir un accès facile et permanent Référentiels de connaissances captées de
aux savoirs
différentes manières, entreposés et partagés par
le web
Favoriser l’amélioration continue et Guide du RETEX
éviter de reproduire les mêmes erreurs L’organisation doit intégrer l’erreur comme
source d’apprentissages
de Risque de perte de connaissance pour
l’organisation quand une personne
clef quitte son poste (retraite,
mutation…)
Identification et partage Réfléchir sur de nouvelles méthodes
pour faire les choses dans une logique
de pratiques
d'amélioration en fournissant un outil
pour l'adaptation, la réflexion et
l'expérimentation.
Rapprocher ceux ayant des lacunes, et
ceux reconnus et expérimentés en
interne et en externe.
Eviter de réinventer la roue
Assurer le déploiement des activités
Centre support de KM
de KM
Pratiques
LES BONNES PRATIQUES DU KNOWLEDGE MANAGEMENT
Dimension organisationnelle
Dialogue
Debriefing
Café de la connaissance
Guidage (mentoring)
Accompagnement
(coaching)
Etude de cas narrative
ou technique de récit
Développer
le
potentiel
et
les
compétences d’un individu ou d’une
équipe
Aider un agent en difficulté sur son poste
par une relation d’apprentissage
Actualiser des connaissances dans un
environnement changeant. Comprendre
par le débat
Etablir un consensus
Évaluation rapide d'un événement où il
serait utile d'identifier ce qui peut être
amélioré pour la prochaine fois
Former les agents aux règles de conduite
d’un dialogue réussi
Disposition (cercle, ..), Expliquer le but général,
Présentation et but personnels, règle de l’échange,
contraindre les dominant et encourager les
introvertis, viser la compréhension mutuelle,
partager les cultures individuelles
Utiliser des questions à la fin d'un événement d'une
manière rapide et facile.
L’accompagnant facilite le changement afin
d’atteindre un objectif professionnel avec leurs
propres solutions
Une personne expérimentée de l’organisation donne
des conseils, partage et aide au transfert des savoirs
Rassemblement dans un contexte informel où
peuvent se tenir des conversations ouvertes à visée
créative
Enregistrer sous forme narrative en expliquant le
QQOQCP et ce qui aurait pu être fait différemment
Faciliter l’intégration d’un nouvel arrivant dans le
groupe par l’attribution d’un parrain porteur des
valeurs
En le plaçant sous la responsabilité d’un tuteur
référent chargé d’encadrer, de suivre et d’évaluer
Transférer les valeurs et la culture de
l’entreprise
Faire acquérir à l’apprenant des
compétences identifiées en situation
professionnelle
Partager de l’expérience avec d’autres de
manière vivante
Lié à la cartographie des compétences
Identifier des individus ressources ou
experts en matière de connaissances et
compétences
Annuaire de
compétences ou
d’experts
Parrainage
Tutorat
Comment ?
Utiles pour…
Pratiques
Boucle de rétroaction nécessitant une
relation de confiance et l’absence de
jugement de valeur
Eviter la discussion, permettre que les
choses difficiles soient révélées, passées
en revue sans blâme ni jugement.
Avoir le temps et l’espace pour le faire
Nécessite d’être ritualisé (à faire
régulièrement)
Nécessite de créer une base de données
d’expérience avec un mode de classement
permettant de retrouver aisément les
connaissances
S’inscrit généralement dans le cadre d’un
contrat (professionnalisation, alternance)
Le parrain doit être extérieur à l’équipe de
travail
Optimisation de la ressource humaine
Observations
LES BONNES PRATIQUES DU KNOWLEDGE MANAGEMENT
Dimension humaine
Utiles pour…
Comment ?
Observations
Web 2.0 - Wikis
Collaborer, créer collectivement, Logiciels appropriés pour créer des pages liées Difficulté
à
encourager
la
contribuer à une procédure ou à un où les informations sont modifiables
participation de tous
guide
Mise à jour constante
Pertinence et véracité variable
Problème d’aliénation des données,
Web 2.0 – réseaux sociaux Etablir des relations en capitalisant Elaborer un réseau social d’entreprise
sur les liens faibles (2° niveau)
Maintenir ses pages à jour et être ouvert et de distraction, de blocages par les
réceptif aux sollicitations
parefeux avec Facebook, LinkedIn,
Twitter
Agréger des informations en un seul Nécessite un lecteur de flux RSS, gain de temps Problème d’amoncellement (Set
Web 2.0 – flux RSS
endroit
par l’aperçu
RSS) ou de perte d’information lors
des phases hors ligne
Etiqueter de façon intuitive des Encourager le marquage des ressources à l’aide Problèmes de compréhension faute
Web 2.0 - Taxonomie
ressources d’information pertinentes
de logiciels labels pour les localier à l’avenir et d’ontologies (vers web 3.0 ?)
partager ce balisage
Communiquer des informations de Via un réseau et des technologies de Risque de clivage par les accès.
Intranets
l’organisation vers l’agent
l’information
Nécessite que la conception soit
alignée
avec
la
stratégie
d’organisation
Travailler
ensemble pour
des Web social, groupware, workflow, messagerie Apparente anarchie mais grande
Technologies
personnes
ou
des
équipes
instantanée
production
de
données.
collaboratives
indépendamment du temps et de la
Exploitation des données à
distance
organiser
Gestion électronique de Documenter les décisions, les Zones de stockage appropriées et accès partagés Contrôle de version, structuration
connaissances
nécessaire
de
l’information,
l’information
ontologies, règles
Pratiques
LES BONNES PRATIQUES DU KNOWLEDGE MANAGEMENT
Dimension technologique
ANNEXE 3
LES APPLICATIONS TECHNOLOGIQUES FACILITANT LE KM
Web 2.0 :
Groupeware (ou collectiques):
pour produire, déclarer collectivement méthodes et outils de travail en réseau
des connaissances, échanger des
informations de manière synchrone ou Workflows (ou flux de travail) :
asynchrone
outils électroniques développés pour gérer
automatiquement les processus métier
Applications collaboratives:
pages web, « recueil vivant de connaissances »
constamment mis à jour (Wikipédia, Wikilinks…)
Wikis :
pages de communication informelle
Blogs d’entreprises:
traduit à l’échelle mondiale l’évolution localisateurs d’expertise de type réseaux sociaux
technologique de l’internet, d’un
publics (Linkedln, Viadeo, Facebook…) ou
concept de stockage d’information
professionnels (experts déclarés…)
SNA (Social Network Analysis) :
(Web 1.0) vers un concept de flux
analyseurs de réseaux sociaux.
Avec Quoi ?
ELS (Expertise Locator Systems) :
Quoi ?
Pourquoi ?
Comment ?
Identifier les personnes-hub (les plus connectés),
les leaders d’opinion (les plus consultés), les acteurs
clés (interface entre réseaux d’influences),
l’évolution des réseaux
Favoriser les interactions spontanées et
autorégulées entre les membres de l’organisation
Mutualiser, partager librement les connaissances,
même si leur pertinence n'est pas toujours établie
(sources non vérifiables)
Permettre à un groupe de travailler à distance de
façon asynchrone , sans vocation de stockage à
long terme de données
Expliciter, partager, faciliter les enchaînements de
tâches opérationnelles contribuant à une production
En structurant les interactions transversales
entre les différents acteurs du processus
En apportant « la bonne information à la
bonne personne et au bon moment »
Messageries, agendas partagés, forum,
e-conférences (chats, visioconférences)
En exprimant librement son opinion sous forme
de commentaires, Foire Aux Questions (FAQ)
En permettant à chaque consultant d'enrichir
rapidement le contenu en libres co-écritures
En cartographiant les liens relationnels
entre individus par la visualisation
de l'analyse structurale du réseau
Identifier, localiser une personne ressource déclarée En consultant le profil individuel de la
et la mettre en relation avec le demandeur pour
personne ressource à partir de mots clés
apporter une réponse à ses besoins
LES OUTILS TECHNOLOGIQUES
Optimiser la gestion du capital connaissance
individuel, ouvrir le transfert de connaissance au
plus grand nombre, s'adapter aux contraintes des
apprenants
E-learning (ou e-formation):
Plates-formes métiers:
formation électronique à distance (initiale,
maintien et perfectionnement des acquis...)
lieux virtuels de partages, d’échanges propre à une communauté de pratique, offrant
diverses fonctionnalités partir d'un accès unique
Portails:
documentation de toute nature (bureautique,
structurent l’information, facilitent les image, vidéo, audio…)
Moteur d’indexation:
recherche
associé à la GED
Outils de gestion documentaire
et moteurs d’indexation :
Pourquoi ?
Stocker des ressources "vivantes" utiles à
l'organisation en vue d’optimiser leur réutilisation
ultérieure
Référencer l’ensemble des documents pour une
recherche rapide, une consultation aisée en ligne et
une exploitation facilitée
Fédérer les membres de la communauté autour de
référentiels et de centres d’intérêts communs
propices au travail collaboratif
Avec Quoi ?
Gestion Electronique de Documents (GED) :
Quoi ?
En identifiant les ressources cruciales
En suivant leur cycle de vie (création, mise
à jour, destruction)
En réalisant les requêtes par mots clés
(auteurs, thèmes, dates, contenu…)
Par des fiches de synthèses descriptives
Par l'accès aux annuaires, contacts, forums,
veilles, informations, documentations,
processus, projet, actualités, normes,
réglementations, bonnes pratiques, liens...
propres à l'activité de la communauté
En diversifiant, modernisant les modes
d'apprentissage, en complément d'un
apprentissage en présentiel
En réduisant les contraintes spatiotemporelles
et organisationnelles
Comment ?
LES OUTILS TECHNOLOGIQUES
ANNEXE 4
JOURNAL DE BORD
ANNEXE 5
QUESTIONNAIRE SEMI DIRECTIF
TRAME D’ENTRETIEN SEMI-DIRECTIF
Etat des lieux relatif à la gestion des connaissances
Le contexte
Date : / /
Lieu :
Durée :
La personne
L’établissement
Civilité :
Raison sociale :
Nom :
Prénom :
Nature :
Fonction :
Statut :
Adresse :
Légitimité (parcours, vécu, expérience) :
Dimensionnement :
Armand Morand
Les enquêteurs
Eric Paganon
Lionel Vayr
Emmanuel Vidal
Hypothèse 1 : Par une approche multidimensionnelle, le know ledge m anagem ent
permet aux SDIS de s'adapter à la complexité de leur environnement.
1.1 La stratégie et le pilotage du SDIS (projet de service, projet d’établissement) :
Projet de service :
•
Q1 : Avez-vous identifié le besoin de mieux partager les connaissances
? Pourquoi ? Lesquelles ? Dans quels domaines ?
•
Q2 : Avez-vous intégré la gestion des connaissances comme un objectif
de votre projet de service ? Sous quelle forme ? A quelle échéance ?
Missions/valeurs :
•
Q3 : Est-ce que les valeurs de l’organisation ont étés définies ? Quelles
sont-elles ? Jusqu’à quel niveau ont-elles été diffusées ? Sont-elles partagées et
défendues ?
Leadership :
•
Q4 : Est-ce que l’encadrement est convaincu de la nécessité de gérer
les connaissances ? Jusqu’à quels niveaux hiérarchiques ?
p11
•
Q5 : Comment valorisez-vous la contribution des individus à la gestion
des connaissances ?
•
Q6 : Quels comportements/actions avez-vous adoptés pour favoriser la
gestion des connaissances ?
•
Q7 : Pensez-vous qu’une organisation hiérarchique de type pyramidale
soit un frein à la mise en œuvre du KM ? Si oui, pourquoi et vers quel type
d’organisation pensez-vous qu’il puisse être souhaitable d’évoluer ?
-
Stratégie et planification :
•
Q8 : Avez-vous défini des axes stratégiques pour améliorer la
gestion des connaissances de manière à soutenir les objectifs de votre organisation
? Lesquels ?
•
Q9 : Avez-vous identifié de nouvelles connaissances à développer
au sein de votre organisation ? Si oui, lesquelles ?
•
Q10 : Avez-vous budgété des actions en matière de gestion des
connaissances ? A hauteur de quel montant ? A quelle échéance ?
1.2 La cartographie des connaissances
•
Q11 : Quelles sont les connaissances capitales dont la perte pourrait avoir un
impact négatif majeur sur votre organisation ? Par quels moyens avez-vous
pérennisé ces connaissances ?
•
Q12 : Un responsable est-il identifié pour assurer ce suivi ? Si oui, quelles sont ses
attributions ? Quelle est sa position au sein de l’organisation ?
Hypothèse 2 : Le know ledge m anagem ent est un facteur de confiance et de
motivation, sources de cohésion au sein des SDIS.
2.1 L’organisation des SDIS, les communautés de pratiques, les groupes projet et la
dimension collective (services, groupements, réseaux…)
•
Q13 : Quels moyens mettez-vous à disposition des communautés de pratiques (équipes
spécialisées, groupe de référents ou disposant d’une expertise, réseau d’expert, etc.…)
pour faciliter leur activité et le partage de leurs connaissances ?
o Du temps dédié ou identifié ?
o Des espaces de travail appropriés ?
o Un annuaire thématique ?
o Une systématisation de leur consultation dans leur domaine de
compétence ?
•
Q14 : Le retour d’expérience fait-il l’objet d’une formalisation ? Dans quels domaines ? Sous
quelle forme ?
o Une procédure écrite ?
o Une base de données de recueil d’expérience ?
o Un encouragement de la pratique ?
2.2 L’Homme et la dimension individuelle
•
Q15 : Avez-vous développé une gestion prévisionnelle des emplois et des compétences ?
•
Q16 : Si oui, avec quels outils avez-vous pris en compte la nécessité d’assurer le transfert
de la connaissance lors des recrutements ou des mobilités?
o Accompagnement et tutorat (compagnonnage) ?
o Tuilage et transfert des connaissances critiques ?
o Explicitation des savoirs et savoirs faire (mémo, guide…) ?
o …
•
Q17 : Dans les programmes de construction ou de réhabilitation des bâtiments de votre
organisation, de quels espaces les agents disposent-ils pour favoriser la collaboration et les
rencontres ?
o Coin machine à café ?
o Espace de détente ?
o Salle de réunion ?
o Espace de rassemblement ?
o …
•
Q18 : Avez-vous pris des initiatives stimulant la créativité et l’innovation ? Lesquelles ?
o Boite à idées ?
o Formation des personnels aux techniques de Réflexion créative
(brainstorming) ?
o Encouragement, valorisation, récompense ?
o …
•
Q19 : Avez-vous
Lesquelles ?
o
o
o
•
pris des initiatives favorisant la communication interpersonnelle ?
Formation à la conversation et au dialogue
Technique de récit
…
Q20 : Pensez-vous disposer au sein de votre organisation de conditions favorisant :
o La motivation ?
o L’ouverture d’esprit ?
o La confiance ?
o La crédibilité des individus ?
o …
Hypothèse 3: Les technologies de l’information et de la communication (TIC)
sont essentielles mais non suffisantes pour valoriser le capital immatériel des
SDIS.
3.1 Les outils technologiques, les méthodes et procédures associées
•
Q21 : Quelles technologies de l’information avez-vous mis en œuvre pour identifier, créer,
stocker, partager et utiliser la connaissance ? Selon quels droits d’accès ? A quels niveaux
hiérarchique et territorial ?
•
Q22 : Parmi les différents services disponibles sur un Intranet, quels sont ceux mis en
œuvre par votre organisation et leur niveau de développement ?
o Annuaires ?
o Messagerie électronique ?
o Agenda partagé ?
o Mise en ligne de documents (formulaires, textes) ?
o Foire Aux Questions ?
o Workflow ?
o Flux RSS ?
o Wiki ?
o Forum ou réseaux sociaux ?
o Moteur de recherche ?
o Gestion électronique des documents et archivage ?
o Extract Transform Load ?
o Moteur d’indexation ?
o Système d’Information Géographique ?
•
Q23 : Dans quelles prestations destinées à faciliter l’acquisition et le partage des
connaissances votre organisation a-t-elle investi ?
o Centres de documentation ?
o Visioconférence ou audioconférence ?
o Formation à distance (e-formation) ?
o Portail ou plate-forme de ressources et savoirs ?
o Affichage dynamique par écran piloté ?
o Veille pour l’amélioration des informations et des connaissances ?
3.2 Les outils non technologiques
•
Q24 : Selon vous les outils des technologies de l’information sont-ils suffisants pour
valoriser le capital connaissance de votre organisation ?
•
Q25 : Si non, quels autres moyens mettez-vous en œuvre pour faciliter votre démarche de
knowledge management ?
ANNEXE 6
LISTE DES ENTRETIENS
SDIS ou
organisme
Cat. Personne entretenue
Qualité
Date
SDIS de l'Ain
2e
Col B. ROMATIF
DDSIS
23/05/13
SDIS de l'Ardèche
3e
Cdt JM. CHALANCON
DRH
25/09/13
SDIS de l'Isère
1e
Lcl S. DUCHET
Chef du groupement formation
16/07/13
Cdt D. FERRAND
Adjoint au
formation
chef
du
groupement
SDIS de la Haute-Loire
4e
Lcl F. PIGNAUD
DDASIS
9/08/13
SDIS de Loire-Atlantique
1e
Col P. BERTHELOT
DDSIS et initiateur du réseau idéal 19/06/13
connaissances
SDIS du Loiret
2e
Lcl P. GAMEL
Chef du groupement formation
Mme I. DETRIFT
Chargée des
formation
PATS
17/05/13
prospective
SDIS de Haute-Marne
4e
Lcl J. PETITPOISSON
DDASIS
16/08/13
SDIS du Rhône
1e
Lcl D. DREVET
Chef du groupement formation
01/08/13
Lcl S. CLERC
Chef du groupement CCAR
01/08/13
SDIS de Saône et Loire
2e
Col M. MARLOT
DDSIS
02/04/13
SDIS de la Savoie
2e
Col JM. LANGLAIS
DDASIS
18/09/13
SDIS de la Haute-Savoie
1e
Col JM. CHABOUD
DDSIS
12/08/13
SDIS du Tarn et Garonne
4e
Lcl LM. DAOUDAL
DDASIS
28/05/13
SDIS des Vosges
3e
Col H. DEREGNAUCOURT
DDSIS
28/05/13
M. JP. VENNIN
Sous-directeur
des
ressources, 21/06/13
compétences et doctrine emploi
Col Y. TREPOS
Inspecteur de la sécurité
initiateur du référentiel CAF.
Col F. VALLIER
Chef du bureau de la formation, 30/08/13
techniques et équipements
CBN G. MOULBACH
Initiateur portail INTEROPS
DGSCGC
ENSOSP
Mme
A.
SENATORE
civile, 05/06/13
21/06/13
MOREL- Responsable du laboratoire d'études de 19/06/13
droit de la sécurité civile
Lcl B. BEAUSSE
Directeur du département prospective 13/03/13
et professionnalisation
M. J. CERNOIA
Responsable
du
laboratoire 04/06/13
management
et
pilotage
des
organisations (LaMaP)
Entreprise ou organisme Personne entretenue
Centre lyonnais d'études de Thomas MESZAROS
sécurité internationale et de
défense
Université Lyon III
Qualité
Date
Maître de conférences en droit et sciences 26/03/13
politiques.
Mairie de Villeurbanne
Isabelle
BREZIAT- Ingénieur territorial
Direction
des
systèmes BOGLAENKO
Conseillère de projet web
d'information
16/05/13
Groupe SEB – TEFAL
17/05/13
Université
Lyon I
Claude
Justine STEFANSKI
Bernard Christophe BATIER
Laboratoire de génie industriel
Ecole centrale de Paris
Centre de recherches
l'Armée de l'Air
Aurélie DUDEZERT
de Cécile GODE
Groupe Steelcase
Agencement
intérieur
mobilier
Responsable formation
Directeur technique du service innovation 21/05/13
conception et accompagnement pour la
pédagogie.
Coordinateur du projet SPIRAL-connect.
Maître de Conférences HDR en sciences de 22/05/13
gestion.
Responsable du Knowledge Management
Research Group.
Membre du groupe COP-1
Membre de l'équipe de Management des 22/05/13
organisations de défense
Maître de conférences HDR en sciences de
gestion à l'université Lyon II
Natacha BOUYON
Chef de marché régional Rhône-Alpes
23/05/13
Conseil régional Rhône-Alpes
Patrick LOUIS
Conseiller régional Rhône-Alpes
12/06/13
Ancien député européen.
Professeur agrégé d'économie et de gestion
à l'université Lyon III.
Docteur en sciences politiques
BASF Pharma France
Usine de Saint-Vulbas
Eric LARDENOIS
Directeur technique du site
Fabrice OGE
Responsable environnement et sécurité au
travail
Philippe BEYRAND
Chargé de sécurité incendie
et
11/07/13
Secrétariat général des Nations Anne-Françoise FRASER
Unies
Chief of records management unit in UN
headquarter
Unité de Formation Production Jean-Luc NICOLET
Ingénierie
Gilbert POMMET
Division production nucléaire
EDF
Laurent CANET
Fonction
appui
professionnalisation
Groupement de gendarmerie Lcl Erwan LE FLOC'H
départementale du Rhône
Commandant en second du groupement de 06/08/13
gendarmerie
Cdt Patrice BONAL
Responsable
service
professionnalisation
pédagogique
conseil
11/07/13
et 12/07/13
en
Adjoint au commandant de groupement,
responsable
opérations,
emploi,
renseignement
ANNEXE 7
CARTOGRAPHIE
DES ENTRETIENS
ANNEXE 8
CARTOGRAPHIE POSSIBLE DE LA DYNAMIQUE DES ACTEURS
ANNEXE 9
ILLUSTRATION POSSIBLE D’UN PROJET DE KM
RESUME
Les connaissances sont devenues un actif déterminant pour une organisation, que la gestion des
connaissances ou knowledge management vise à valoriser.
Que ce soient des données, de l’information, des connaissances explicites ou des connaissances tacites, les
savoirs d’une organisation s’inscrivent dans un processus intégré allant de l’identification et de la création, à
l’utilisation et au partage, en passant par le stockage. Un tel projet comporte une vision, des stratégies, et un
management dont les facteurs de succès sont la culture de l’entreprise, le soutien de la direction, les
processus organisationnels, la technologie de l’information, les compétences et motivations des agents.
Les structures des SDIS sont multidimensionnelles avec des cultures variées nécessitant d’aborder la gestion
des connaissances selon chacune des dimensions suivantes : culturelle, managériale, organisationnelle,
humaine ou technologique.
Parmi 32 bonnes pratiques issues de la littérature, une enquête menée auprès de SDIS comme à l’extérieur
confirme que 25 d’entre elles sont transposables à nos organisations. Elles peuvent permettre une évolution
de nos pratiques professionnelles pour intégrer la gestion des connaissances dans les SDIS. Outre des
recommandations d’ordre général pour le déploiement du KM, 6 préconisations sont formulées à l’attention
des SDIS et 3 à l’attention de l’échelon supra-départemental.
Elles peuvent constituer une réponse à la complexité croissante de notre environnement et à l’évolution
culturelle que constitue l’avènement de l’ère numérique dans nos sociétés modernes.
MOTS CLES
Bonnes pratiques, connaissances, culture, gestion, KM, management, organisations, SDIS
Le «Knowledge Management», une opportunité stratégique pour l’émergence d’une nouvelle culture
de gestion des connaissances : étude comparée des bonnes pratiques transposables aux SDIS
ABSTRACT
The knowledge has become a key asset for an organization, and is being enhanced by Knowledge
Management.
Whether it be data, information, explicit or tacit knowledge, the organization's knowledge is part of an
integrated process, including identification and creation, storage, use and sharing.
Such a project implies an outlook, some strategies, and a management of which success factors are the
company's culture, senior management's support, the organizational processes, the information technologies,
agents' skills and motivations.
Structures of the SDIS are multidimensional with various culture and imply a knowledge management in
each of the following scopes : cultural, managerial, organizational, human or technological.
Among the 32 best practices issued from literature, an enquiry carried out inside and outside the SDIS
confirms that 25 of them can be transposed into our structures. They can allow our professional customs to
progress in order to integrate knowledge management in the SDIS.
In addition to general recommendations for the spreading of KM, 6 guidelines are directed to the SDIS, and
3 to the attention of national level.
They can constitute an answer to the growing complexity of our environment and to the cultural evolution
induced by the avent of digital era in our modern societies.
KEYWORDS
Best practices, culture, knowledge management, KM, organization, SDIS
- 2013 -
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