Les conversions à l'islam radical inquiètent la police française LE MONDE | 12.07.05 | 14h34 • Mis à jour le 12.07.05 | 14h34 Le nombre des Français convertis à l'islam est impossible à établir avec précision. Leur pratique religieuse est généralement sans histoire. Néanmoins, le phénomène connaît un tel essor, ces dernières années, que les Renseignements généraux (RG) y prêtent une attention particulière. D'autant que des convertis sont apparus dans de nombreux dossiers terroristes instruits en France depuis le 11 septembre 2001. Dans un rapport remis au ministre de l'intérieur, Nicolas Sarkozy, à la fin du mois de juin, la direction centrale des RG (DCRG) présente les conclusions d'une étude fouillée qui n'a pas "valeur de recensement" sur 1 610 convertis. Ceux-ci ont été détectés par les policiers en raison de leur prosélytisme actif, de leurs activités délinquantes ou bien de leurs relations douteuses avec des radicaux. Près d'un tiers ont des antécédents judiciaires ou sont "connus défavorablement des services de police" . Parmi eux, 3 % "appartiennent ou gravitent autour de la mouvance islamiste combattante" , selon la DCRG. Qui sont-ils, où vivent-ils ? Les convertis étudiés par les RG constituent une population jeune, principalement masculine. La prison, un terreau fertile Les renseignements généraux (RG) s'intéressent depuis plusieurs années à L'âge moyen est de 32 ans, les femmes représentent 17 % du total. la recrudescence des conversions en prison. Selon le rapport remis à la fin La carte des convertis établie par les policiers indique une du mois de juin au ministre de concentration dans les zones fortement urbanisées où vit une l'intérieur, parmi les convertis qui ont importante communauté maghrébine pratiquante. L'Ile-dedes antécédents judiciaires ou sont France, Rhône-Alpes, le Nord - Pas-de-Calais, Provence-Alpesconnus des services de police, un peu Côte d'Azur et l'Aquitaine sont les régions les plus concernées. plus de 10 % ont découvert l'islam en prison. Le prosélytisme y est surtout le Dans l'Est, malgré une importante immigration de confession fait de détenus de droit commun plutôt musulmane, mais à majorité turque, les convertis sont peu que de personnes impliquées dans des nombreux. affaires terroristes. Facteurs de conversion. Jeune Blanc des banlieues sous influence, personne fragile, révolté à la recherche d'une cause, Ce prosélytisme se manifeste essentiellement dans un rapport de opportuniste : il n'existe pas de profil type du converti. Dans 37 % forces avec les autorités pénitentiaires des cas étudiés, l'environnement social et les fréquentations sont à ou les autres détenus. Les croyants demandent parfois l'aménagement l'origine de l'apprentissage de l'islam. C'est essentiellement vrai d'une salle de prière, des repas halal ou pour les jeunes gens nés en France, dont un ou deux parents sont une aumônerie. Ils peuvent aussi originaires d'un pays du Maghreb et qui vivent dans les cités s'estimer victimes d'actes discriminatoires. Une fois en liberté, sensibles. Près de 44 % d'entre eux optent pour un islam près de 17 % des convertis à l'islam en d'inspiration salafiste. "C'est le degré zéro de la religion, une prison ont intégré des groupes succession de postures rigoristes sans distance critique", souligne islamistes radicaux ou leurs structures le chercheur Jean-Luc Marret, qui a dirigé un ouvrage de référence de soutien logistique. intitulé Les Fabriques du jihad (PUF, 2005). [-] fermer Le mariage et le concubinage arrivent en deuxième position (27 %) dans le choix de l'islam, suivi du prosélytisme (15 %). La conversion lors d'un séjour en prison représente 4 % des cas. Les convertis originaires d'Europe du Sud en particulier du Portugal sont fortement représentés (9 %). Parmi eux, 60 % ont épousé une conception rigoriste de la religion, celle des tablighis ou des salafites. Les Antillais représentent 5 % des convertis étudiés. Parcours et emploi. Les conversions concernent en priorité des personnes jeunes, en rupture avec l'éducation nationale. 49 % d'entre eux n'ont aucun diplôme. Chez les 15-19 ans, seulement 20 % sont étudiants ou lycéens, alors que la moyenne nationale est proche de 95 %. Chez les 20-24 ans, seuls 6 % des convertis étudient, contre un Français sur deux dans cette tranche d'âge. En revanche, à partir de 50 ans, le pourcentage s'inverse : les convertis à l'islam ont fait plus d'études que la moyenne nationale (24 % contre 15,6 %). La précarité sociale constitue une circonstance récurrente de conversion