Analyse Complexe Université Paris-Dauphine Licence de Mathématiques Appliquées 2009-2010 C. Imbert 20 septembre 2009 2 Table des matières 1 Séries entières 1.1 Définition d’une série entière . . . . . . . . . . . . . . 1.2 Rayon et disque de convergence . . . . . . . . . . . . . 1.2.1 Définitions . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1.2.2 Calcul du rayon de convergence . . . . . . . . . 1.3 Opérations sur les séries entières . . . . . . . . . . . . 1.3.1 combinaison linéaire de séries entières . . . . . 1.3.2 Produit (de Cauchy) de deux séries entières . . 1.4 Propriétés de la somme d’une série entière . . . . . . . 1.4.1 Série dérivée d’ordre k d’une série entière . . . 1.4.2 Continuité et dérivabilité de la fonction somme 1.4.3 Fonctions développables en séries entières . . . 2 Fonctions analytiques 2.1 Définitions et propriétés . . . . . . . . . . . . . 2.1.1 Definitions et exemples . . . . . . . . . 2.1.2 Holomorphie des fonctions analytiques . 2.1.3 Principes du prolongement analytique et 2.2 Exponentielle et logarithmes . . . . . . . . . . . 2.2.1 Exponentielle complexe . . . . . . . . . 2.2.2 Les fonctions trigonométriques . . . . . 2.2.3 Logarithmes complexes . . . . . . . . . 2.2.4 Autres fonctions usuelles . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1 1 1 1 2 4 4 5 6 6 6 8 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . des zéros isolés . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11 11 11 14 17 24 24 25 27 29 . . . . . . . . . . . . . 31 31 31 32 33 34 34 36 38 41 41 44 45 46 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3 Fonctions holomorphes 3.1 Définition et propriétés . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3.1.1 Rappels . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3.1.2 Premières propriétés des fonctions holomorphes . . . 3.1.3 Différentiabilité et conditions de Cauchy-Riemann . 3.2 Intégration sur des chemins . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3.2.1 Chemins paramétrés . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3.2.2 Intégration sur des chemins . . . . . . . . . . . . . . 3.2.3 Indice d’un point par rapport à un lacet . . . . . . . 3.3 Le théorème de Cauchy pour les fonctions C 1 holomorphes 3.3.1 Analyticité des fonctions C 1 holomorphes . . . . . . 3.3.2 Quelques applications du théorème de Cauchy . . . 3.4 Primitives de fonctions holomorphes . . . . . . . . . . . . . 3.4.1 Ouvert étoilé . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4 TABLE DES MATIÈRES 3.5 3.6 3.4.2 Le théorème de Goursat . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3.4.3 Primitives de fonctions holomorphes dans un ouvert étoilé 3.4.4 Analyticité des fonctions holomorphes . . . . . . . . . . . Singularités et calcul des résidus . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3.5.1 Singularités des fonctions holomorphes . . . . . . . . . . . 3.5.2 Fonctions méromorphes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Le théorème des résidus . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3.6.1 L’intégrale d’une fonction holomorphe sur un lacet . . . . 3.6.2 Notion de résidus d’une fonction méromorphe . . . . . . . 3.6.3 Ordre d’un zéro d’une fonction holomorphe . . . . . . . . 3.6.4 Calcul de résidus . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3.6.5 Théorème des résidus et formule de Cauchy généralisée . 4 Transformées de Fourier et de Laplace 4.1 Rappels sur L1 (R), L2 (R) et L∞ (R) . . . . . . . . . . . . . . 4.1.1 Fonctions intégrables et essentiellement bornées . . . . 4.1.2 Les espaces vectoriels normés Lp (R), p = 1, 2, ∞ . . . 4.1.3 Complétude des espaces Lp (R), p = 1, 2, ∞ . . . . . . 4.1.4 Convolution . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4.2 Transformée de Fourier . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4.2.1 Définition . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4.2.2 Propriétés de la transformée de Fourier . . . . . . . . 4.2.3 Formule de Fourier inverse . . . . . . . . . . . . . . . . 4.2.4 Formule de Bessel-Parseval . . . . . . . . . . . . . . . 4.3 Transformée de Laplace . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4.3.1 Définition et convergence . . . . . . . . . . . . . . . . 4.3.2 Opérations élémentaires sur la transformée de Laplace 4.3.3 Holomorphie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4.3.4 Théorème d’inversion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 46 48 49 49 50 52 53 53 54 55 55 56 59 59 59 60 63 63 64 64 65 66 66 66 67 68 70 71 TABLE DES MATIÈRES i Introduction Ces notes de cours d’analyse complexe sont largement inspirées du cours mis en place par Philippe Gravejat durant les années 2005-2008. Il fait suite au cours d’Analyse 3 de DU2 et est aussi lié (dans une moindre mesure) aux deux cours du tronc commun du premier semestre de la licence MI2E Mention MMPE : le cours d’intégrale de Lebesgue et probabilités et le cours de calcul différentiel et d’optimisation 2. A partir de la notion de séries entières, nous allons voir ce qu’est une fonction analytique et montrer en particulier que ces fonctions sont très régulières. Nous verrons aussi qu’elles sont holomorphes, c’est-à-dire “dérivables au sens complexe”. Nous parlerons notamment d’ensembles connexes ; cette notion est topologique et est donc en lien avec le cours de calcul différentiel. Le troisième chapitre du cours est consacré aux transformations de Fourier et de Laplace ; les outils introduits au début du cours d’intégration de Lebesgue seront alors utilisés. Ce dernier chapitre constitue une introduction au cours “analyse fonctionnelle et initiation à l’analyse de Fourier” du second semestre (tronc commun). Cet Unité d’Enseignement est organisée en 13 séances de cours et 13 séances de travaux dirigés. ii TABLE DES MATIÈRES Chapitre 1 Séries entières Dans ce chapitre, nous rappelons rapidement les définitions et les résultats sur les séries entières vus dans le cours d’Analyse 3 de l’année dernière. 1.1 Définition d’une série entière L’idée très informelle des séries entières est de se donner une suite de nombres complexes (an )n∈N et de lui associer une fonction définie comme la somme d’une série. La principale différence avec l’année dernière est que les séries entières sont cette année des séries de fonctions d’une variable complexe ; en d’autres mots, la variable z pour laquelle on considère la série X an z n est complexe : z ∈ C. Convention. z 0 ≡ 1 pour tout z ∈ C. P zn Exemple 1. On peut considérer la série entière n! . P n Contre-exemple 1. La série de fonction |z|n +1 n’est pas une série entière. La somme de la série définit donc une fonction z ∈ C 7→ +∞ X an z n n=0 dont le domaine de définition sera inclus dans le disque de convergence dont nous rappelons la définition dans le paragraphe suivant. Attention !. Ce n’est pas parce que l’on considère la somme d’une série entière que la série converge. 1.2 1.2.1 Rayon et disque de convergence Définitions Pour définir le disque de convergence de la série entière d’abord définir son rayon de convergence. 1 P an z n , il faut 2 CHAPITRE 1. SÉRIES ENTIÈRES Définition 1 (Rayon de convergence). Soit A le sous-ensemble de R défini comme suit A = {r ≥ 0 : (an rn )n∈N est une suite bornée de C} . P Le rayon de convergence R de la série entière an z n est la borne supérieure de A. On peut remarquer deux choses : – l’ensemble A n’est pas vide car il contient toujours 0 ; – le rayon de convergence peut être infini. Question 1. Tester vos connaissances : qu’est-ce qu’une borne supérieure ? Qu’est-ce qu’une suite bornée ? P n Exemple 2. – La série z a un rayon de convergence de 1. P znentière – La série entière n! a un rayon de convergence égal à +∞. Proposition 1. Pour tout r ∈ [0, R[, la suite (an rn )n∈N est bornée. Ainsi, l’ensemble A est égal à [0, R[ ou [0, R]. On rappelle qu’un disque (ouvert) du plan complexe est défini par son centre et son rayon. S’il est centré à l’origine et que son rayon est ρ, il est noté dans ce cours Dρ . Définition 2 (Disque de convergence). Si R ∈ [0, +∞] désigne le rayon de P convergence d’une série entière an z n , alors DR est appelé son disque de convergence. P n Exemple 3. – Le disque de convergence de z est D1 , le disque unité (ouvert). P zn – Le disque de convergence de n! est C tout entier. Lemme 1 (Lemme d’Abel). Soit R ∈ [0, +∞] le rayon de convergence d’une P série entière an z n et soit z ∈ C. P – Si |z| > R, la série entière an z n est divergente ; autrement dit, z n’est pas dans le domaine de définition P denla somme de la série. – Si |z| < R, la série entière an z est absolument convergente, donc convergente. En particulier, z est dans le domaine de définition de la somme de la série. Remarque 1 (importante). On rappelle que l’on ne peut pas dire si la série entière est convergente ou non sur le bord du disque, autrement dit pour les z dont le module (complexe) vaut R. 1.2.2 Calcul du rayon de convergence Pour déterminer le rayon de convergence d’une série entière, on peut notamment utiliser trois méthodes : – soit utiliser directement la définition de R ; – soit utiliser le principe de comparaison ; – soit utiliser le critère de d’Alembert ou celui de Cauchy. 1.2. RAYON ET DISQUE DE CONVERGENCE 3 Fig. 1.1 – Disque de convergence d’une série entière Nous rappelons ce qu’est le principe de comparaison ainsi que les critères suscités. P P Lemme 2 (Principe de comparaison). Soit an z n et bn z n deux séries entières de rayons de convergence Ra et Rb . S’il existe une constante M > 0 telle que pour tout n ∈ N, |an | ≤ M |bn | , alors Rb ≤ Ra . Exemple 4. Considérons la suite an telle que a2n = 0 et a2n+1 = 1/n pour tout n ∈ N. Alors le principe de comparaison nous dit que son rayon de convergence est plus grand que 1 et la définition de rayon de convergence nous montre qu’il est plus petit que 1. Le rayon est donc exactement 1. Exercice 1. Soit P un polynôme à valeurs complexes et an = P (n). Montrer que le rayon de convergence de la série entière associée est 1. P P Corollaire 1 (Termes généraux équivalents). Soit an z n et bn z n deux séries entières de rayons de convergence Ra et Rb . Si |an | ∼ |bn | lorsque n tend vers +∞, alors Ra = Rb . P Exemple 5. Soit an = n + ln(n) + tan(1/n). Le rayon de convergence de an z n égale 1. Lemme 3 (Critère de d’Alembert). Si la suite an est non-nul à partir d’un certain rang, et si |an+1 | → l ∈ [0, +∞] , |an | 4 CHAPITRE 1. SÉRIES ENTIÈRES alors le rayon de convergence de la série entière particulier, si l = +∞, R = 0. P an z n est égal à 1/l. En Exemple 6. – an = (2n!) (n!)2 . Le rayon de convergence de la série entière associée est 1/4. n – an = nn! . Le rayon de convergence de la série entière associée est 1/e. Contre-exemple 2. a2n = 4n et a2n+1 = 0. Alors R = 1/2 et non 1/4. Ce contre-exemple est aussi valable pour le critère de Cauchy rappelé ci-après. Lemme 4 (Critère de Cauchy). Si la suite an est non-nul à partir d’un certain rang, et si (an )1/n → l ∈ [0, +∞] , P alors le rayon de convergence de la série entière an z n est égal à 1/l. En particulier, si l = +∞, R = 0. n Exemple 7. P – Si an = ( n+1 n ) , alors le rayon de convergence de la série n entière an z est égal à 1. – Si a = (n sin(1/n))n , alors le rayon de convergence de la série entière n P n an z est égal à 1. Attention !. Pour appliquer l’un des deux critères, il faut bien s’assurer que an est non-nul à partir d’un certain rang. 1.3 Opérations sur les séries entières 1.3.1 combinaison linéaire de séries entières P Lemme 5 (Multiplication par une constante). Soit λ ∈ C∗ et an z n une série entière P de rayon de convergence R. Alors le rayon de convergence de la série entière (λan )z n est R et pour tout z ∈ DR , +∞ X (λan )z n = λ n=0 +∞ X an z n . n=0 P n n Exemple 8. – Le rayon de convergence de 2n z est nul. P – Le rayon de convergence de (3.4n )z n est égal à 1/4. P P Lemme 6 (Somme). Si an z n et bn z n sont deux séries entières de rayon de Ra et Rb , alors le rayon de convergence Ra+b de la série entière P convergence (an + bn )z n vérifie Ra+b ≥ min(Ra , Rb ) . (1.1) De plus, si Ra 6= Rb , alors Ra+b = min(Ra , Rb ) . Attention !. Pour avoir égalité, les deux rayons de convergence doivent être distincts. P Exemple 9. – Le rayon de convergence de (2n + 3n )z n est égal à min(1/2, 1/3) = 1/3. P – Le rayon de convergence de (n2 − en )z n est égal à min(1, 1/e) = 1/e. 1.3. OPÉRATIONS SUR LES SÉRIES ENTIÈRES 5 P Contre-exemple 3. Si l’on considère An = 0, le rayon de convergence de An z n vaut +∞. Or on peut P écrire An = Pan −n bn avec an = bn = 1. Les rayons de convergence des séries an z n et bn z sont tous les deux égaux à 1 et leur minimum vaut donc 1. On a bien dans ce cas une inégalité stricte dans (1.1). On en déduit en particulier une estimation du rayon de convergence de la combinaison linéaire de deux séries entières. P P Corollaire 2 (Combinaison linéaire de séries entières). Si an z n et bn z n sont deux séries entières de rayon de convergence RP a et Rb et si λ, µ ∈ C, alors le rayon de convergence Rλa+µb de la série entière (λan + µbn )z n vérifie Rλa+µb ≥ min(Ra , Rb ) et pour tout z ∈ DRλa+µb , on a +∞ X (λan + µbn )z n = λ n=0 +∞ X an z n + µ n=0 +∞ X bn z n . n=0 De plus, si Ra 6= Rb , alors Ra+b = min(Ra , Rb ) . P Exemple 10. Le rayon de convergence de (sin n)z n est 1. En effet, on écrit 1 in (e − e−in ) 2i et on applique le corollaire précédent. sin n = 1.3.2 Produit (de Cauchy) de deux séries entières P P Lemme 7. Soit an z n et bn z n sont deux séries entières de rayon de convergence Ra et Rb . Définissons un nombre complexe cn comme suit cn = n X ak bn−k . k=0 Le rayon de convergence Rc de la série entière P cn z n vérifie Rc ≥ min(Ra , Rb ) et pour tout z tel que |z| ≤ min(Ra , Rb ), +∞ X n=0 cn z n = ( +∞ X n=0 an z n )( +∞ X bn z n ) . n=0 P+∞ Exemple 11. – an = bn = 1. Alors cn = n + 1 et n=0 cn z n = (1 − z)2 . n P+∞ n P+∞ – an = bn = 1/n!. Alors cn = 1/n!2n et donc ( n=0 zn! )2 = n=0 (2z) n! . P Attention !. La somme P de la série P entière (an bn )z n n’est pas égale au produit n des sommes des séries an z et bn z n (même quand ces trois quantités sont bien définies). P+∞ Contre-exemple 4. Si an = 2n et bn = 3n , alors n=0 an z n = (1 − 2z)−1 et P+∞ P +∞ n −1 et n=0 (an bn )z n = (1 − 6z)−1 . Or n=0 bn z = (1 − 3z) 1 1 1 × 6= . 1 − 2z 1 − 3z 1 − 6z 6 CHAPITRE 1. SÉRIES ENTIÈRES 1.4 1.4.1 Propriétés de la somme d’une série entière Série dérivée d’ordre k d’une série entière Définition 3P (Série dérivée). La série dérivée de la série entière série entière ((n + 1)an+1 )z n . P an z n est la Remarque 2. Si on regarde un instant la série comme une série de fonctions de variables réels, alors la série dérivée est en fait obtenue en dérivant terme à terme. Mais pour l’instant, on ne dit rien sur la dérivabilité de la somme ! On ne fait que définir une nouvelle série. Remarque 3 (Importante). On peut aussi vouloir dériver par rapport à la variable complexe z ∈ C. Vous avez vu (ou verrez) en cours de calcul différentiel que l’on peut “différentier” une fonction définie d’un espace de Banach dans un autre. Or C est un espace de Banach. Mais nous reviendrons là dessus. Lemme 8. Une série entière et sa série dérivée ont le même rayon de convergence. P Exemple 12. Par exemple considérer an = 1. Les rayons de convergence de z n P et (n + 1)z n sont égaux à 1. On peut ensuite définir la série dérivée d’ordre k pour tout k ∈ N non nul. Définition 4. Soit k ∈ N, k 6= 0. La série dérivée d’ordre k de la série entière P an z n est la série entière X (n + k)! an+k z n . n! Question 2. Quelle est la série dérivée d’ordre k de la série entière P zn n! ? On déduit le lemme suivant du Lemme 8 par une récurrence immédiate. Lemme 9. Une série entière et sa série dérivée d’ordre k ont le même rayon de convergence. 1.4.2 Continuité et dérivabilité de la fonction somme Dans le paragraphe précédent, nous n’avons fait que définir des séries entières (que l’on a appelé séries dérivées) mais nous n’avons pas justifié cette appelation. En d’autres termes, nous n’avons pas montré que la dérivée de la fonction somme coı̈ncidait avec la série dérivée. Pour l’instant, nous ne savons dériver que par rapport à une variable réelle, nous allons donc considérer la fonction somme S : x ∈ [−R, R] 7→ S(x) = +∞ X an xn . n=0 Attention .! Les nombres an sont toujours complexes, donc la fonction S à valeurs complexes. Si cela vous gène, vous pouvez vous dire qu’elle est à valeurs dans R2 , ou bien encore considérer la partie réelle et la partie imaginaire des nombres an . 1.4. PROPRIÉTÉS DE LA SOMME D’UNE SÉRIE ENTIÈRE 7 Fig. 1.2 – Somme d’une série entière restreinte à l’axe réel Le résultat principal de ce paragraphe est assez simple à montrer mais il est très important. Il repose sur le lemme suivant. P Lemme 10. On considère une série entière an z n dont le rayon de convergence R n’est pas nul. Alors la série entière (vue comme une série de fonctions) est normalement convergente sur tous les disques Dr pour r ∈ [0, R[. P n Attention !. On ne peut rien dire sur le bord du disque. Pensez à z dont la somme est 1/(1 − z). Cette fonction n’est même pas définie en P 1 (donc parler zn de sa continuité est un non-sens). En revanche, la série entière n2 converge partout sur le bord de son disque de convergence. On peut immédiatement en déduire le résultat suivant Corollaire 3. La fonction somme d’une série entière est continue sur le disque de convergence. En particulier lim S(z) = a0 . z→0 Exemple 13. +∞ +∞ n X X 1 z = . z→1 n! n! n=0 n=0 lim Grâce au théorème de dérivation des séries de fonctions, on en déduit donc immédiatement le théorème suivant. Théorème 1. La fonction S : [−R, R] → C est de classe C ∞ sur ] − R, R[ et S (k) (x) = +∞ X (n + k)! n=0 n! an+k xn . On a rappelé qu’on ne peut rien dire de la convergence de la série entière sur le bord de son disque de convergence. Mais si on sait que la série entière converge au point R ∈ D̄R , alors on peut dire quelque chose de la fonction somme. 8 CHAPITRE 1. SÉRIES ENTIÈRES P Théorème 2 (Abel). Si la série entière an z n converge en z = R, alors la fonction somme f : [−R, R] est bien définie en R et est continue à gauche en ce point. 1.4.3 Fonctions développables en séries entières Le dernier paragraphe de ce chapitre de rappels est consacré aux fonctions développables en séries entières. On a vu dans le paragraphe précédent que si on considère la fonction somme d’une série entière et qu’on la restreint à l’axe réel du disque de convergence, alors on obtient une fonction C ∞ sur ] − R, R[. On peut se demander si la réciproque est vraie. Vous avez vu l’année dernière que la réponse est non. On peut s’en convaincre en utilisant le lemme suivant . P Lemme 11. Soit an z n une série entière de rayon de convergence R > 0. Alors pour tout entier n, 1 an = f (n) (0) . n! Vous avez vu que la fonction f (x) = 1 e − x2 0 si x 6= 0 si x = 0 est bien C ∞ et dont toutes les dérivées sont nulles en 0. Nous reverrons cet exemple en séance de travaux dirigés. Remarque 4. Vous retrouverez cette fonction en analyse fonctionnelle au second semestre pour construire une fonction C ∞ “à support compact”. On peut maintenant définir ce qu’est une fonction développable en série entière. Définition 5 (Fonction développable en série entière). Soit f : R → R une fonction de classe C ∞ dont le domaine de définition contient un intervalle I ouvert contenant 0. On dit que f est développable en série entière en 0 s’il existe R > 0 et une suite de nombres réels (an )n∈N telle que pour tout x ∈] − R, R[ f (x) = +∞ X an xn . n=0 Au vu du Lemme 11, on peut utiliser la méthode suivant pour démontrer qu’une fonction C ∞ est développable en série entière. – On calcule les coefficients de Taylor de f : an = 1 (n) f (0) . n! – On calcule le rayon de convergence de la série entière associée. Si celuici est nul, la fonction n’est pas développable en série entière. Sinon, on continue. – On montre que la série entière associée converge effectivement vers f . La dernière étape est importante ; pour s’en convaincre, reprendre l’exemple donné plus haut. 1.4. PROPRIÉTÉS DE LA SOMME D’UNE SÉRIE ENTIÈRE 9 Remarque 5. Si on utilise le vocabulaire que vous avez vu (ou verrez) en calcul différentiel, I est un voisinage du point 0 ∈ R. Nous concluons ce paragraphe (et ce chapitre) par une proposition sur les fonctions développables en série entière. Proposition 2. Soit f et g deux fonctions développables en série entière en 0. Notons an et bn les coefficients de Taylor respectifs. – N’importe quelle combinaison linéaire de f et g est aussi développable en série entière. Précisément, pour tout λ, µ ∈ R, la fonction λf + µg est développable en série entière en 0 et pour tout x ∈] − R, R[ (λf + µg)(x) = +∞ X (λan + µbn )xn . n=0 – Le produit des deux fonctions développables en série entière est aussi développable en série entière et f g(x) = n +∞ X X an−k bn )xn . ( n=0 k=0 – Toutes les dérivées d’une fonction f développable en série entière sont développable en série entière et pour tout x ∈] − R, R[, f (k) (x) = +∞ X (n + k)! an+k xn . n! n=0 – Une primitive F d’une fonction f développable en série entière en 0 est développable en série entière et pour tout x ∈] − R, R[, F (x) = F (0) + +∞ X an−1 n x . n n=1 Remarque 6. Il est rappelé qu’une primitive est toujours définie à une constante près. Voici quelques développements usuels. Fonction exp cos sin ch sh 1 1−x ln(1 + x) (1 + x)α Développlement P xn P n! n x2n (−1) (2n)! P x2n+1 (−1)n (2n+1)! P x2n P (2n)! x2n+1 P (2n+1)! xn P n−1 xn n≥1 (−1) n P α×···×(α−n+1) xn n! Validité x∈R x∈R x∈R x∈R x∈R −1 ≤ x < 1 −1 < x ≤ 1 −1 ≤ x < 1 10 CHAPITRE 1. SÉRIES ENTIÈRES Chapitre 2 Fonctions analytiques Dans le chapitre précédent, on a considéré des séries de fonctions particulières. On a vu que ces séries de fonctions définissaient des fonctions très régulières mais que toute fonction régulière ne pouvait pas forcément s’écrire comme une série entière ; en d’autres termes, une fonction régulière n’est pas forcément développable en série entière en 0. Ici, on va considérer des fonctions développables en série entière mais pas uniquement en 0 : elles pourront s’écrire comme la somme d’une série entière si on les regarde en plaçant l’origine de C à n’importe quel endroit d’un ensemble ouvert Ω. Nous allons maintenant définir tout cela de façon rigoureuse. Dans tout ce chapitre f est une fonction définie sur un ouvert Ω de C. On rappelle que Ω est ouvert si pour tout z0 ∈ Ω, il existe ρ0 > 0 tel que le disque ouvert centré en z0 et de rayon ρ0 , que l’on note D(z0 , ρ0 ), est inclus dans Ω. 2.1 2.1.1 Définitions et propriétés Definitions et exemples Définition 6 (Fonction analytique). 1. Soit z0 ∈ Ω. La fonction f est anaP lytique en z0 s’il existe un réel R > 0 et une série entière an z n de rayon de convergence supérieure ou égal à R tel que – le disque D(z0 , R) est inclus dans Ω ; – pour tout z ∈ D(z0 , R), f (z) = +∞ X an (z − z0 )n . (2.1) n=0 2. La fonction f est analytique sur Ω si elle est analytique en tout point z0 ∈ Ω. Remarque 7. Tout comme la continuité d’une fonction, l’analyticité d’une fonction se définit d’abord en un point puis sur tout un ensemble. Tout comme le voisinage V autour de z0 pour lequel |f (z) − f (z0 )| < ε dans le cas de la continuité, ici le rayon de convergence R0 > 0 de la série entière dépend du point z0 considéré. 11 12 CHAPITRE 2. FONCTIONS ANALYTIQUES Fig. 2.1 – Fonction analytique en un point z0 Attention !. Dans (2.1), bien remarquer la présence du z0 dans le membre de gauche de l’égalité. Exemple 14. La fonction z 7→ 1/z est analytique sur C \ {0}. Pouvez-vous justifier cette assertion ? Le principal exemple de fonctions analytiques est donné par les séries entières. Nous pointons du doigt qu’il n’est pas du tout évident que si une fonction est analytique à l’origine, elle l’est en tout point du disque de convergence. P Théorème 3 (Analyticité des séries entières). Soit an z n une série entière de rayon de convergence R > 0. Alors sa somme S est analytique sur le disque de convergence DR = D(0, R). De plus, pour tout z0 ∈ DR , il existe δ > 0 tel que pour tout z ∈ D(z0 , δ), +∞ X S(n) (z0 ) S(z) = (z − z0 )n n! n=0 où désigne la somme de la série dérivée d’ordre n de la série entière P S(n) an z n . Remarque 8. Dans le théorème précédent, on connait en fait exactement ce que vaut δ : δ = R − |z0 |. Démonstration. Soit z0 ∈ DR . On considère alors le plus grand δ > 0 tel que D(z0 , δ) ⊂ DR . Il est facile de voir que le plus grand δ est R − |z0 |. On écrit 2.1. DÉFINITIONS ET PROPRIÉTÉS 13 ensuite pour z ∈ DR S(z) = = +∞ X an (z0 + z − z0 )n n=0 +∞ X n X n=0 k=0 = +∞ X +∞ X n n−k an z (z − z0 )k k 0 an,k n=0 k=0 où an,k = an n n−k z (z − z0 )k k 0 si k ≤ n et an,k = 0 sinon. On admet le théorème suivant (que vous démontrerez en cours d’intégration sous une forme plus générale). Théorème 4 (de Fubini pour les séries). Soit (an,k ) une famille de nombres P+∞ P+∞ complexes indexée par N2 . Si n=0 k=0 |an,k | < +∞, alors P+∞ – pour tout n ∈ N, la série k=0 an,k est convergente ; notons An sa somme ; P+∞ – pour tout k ∈ N, la série n=0 an,k est convergente ; notons Āk sa somme ; P+∞ P+∞ – et enfin n=0 An = k=0 Āk ce qui peut s’écrire plus simplement +∞ +∞ X X an,k = +∞ X +∞ X an,k . k=0 n=0 n=0 k=0 Vérifions que les hypothèses de ce lemme sont vérifiées. Tout d’abord, +∞ X +∞ +∞ X n X X n |an,k | ≤ an |z0 |n−k |z − z0 |k k n=0 k=0 n=0 k=0 ≤ +∞ X an (|z0 | + |z − z0 |)n . n=0 Or par hypothèse |z0 | + |z − z0 | < R donc la double série est bien absolument convergente. On peut donc intervertir les deux sommes. On obtient alors ( +∞ ) +∞ X X n n−k an z (z − z0 )k S(z) = k 0 k=0 n=k ) ( +∞ +∞ X X 1 n! n−k z0 (z − z0 )k = an (n − k)! k! k=0 n=k ( +∞ ) +∞ X X (m + k)! m 1 = am z0 (z − z0 )k . m! k! m=0 k=0 Si on se souvient la définition de la série dérivée d’ordre k de S, on reconnait alors +∞ (k) X S (z0 ) S(z) = (z − z0 )k . k! k=0 La démonstration est maintenant complète. 14 CHAPITRE 2. FONCTIONS ANALYTIQUES Fig. 2.2 – Composition de fonctions analytiques Nous allons maintenant voir que, tout comme les séries entières, les fonctions analytiques sont stables par combinaison linéaire et par produit. Le lemme suivant est une conséquence immédiate du corollaire 2 du chapitre 1. Lemme 12 (Opérations élémentaires sur les fonctions analytiques). Si f et g sont deux fonctions analytiques sur Ω, – alors n’importe quelle combinaison linéaire λf + µg de f et g (λ, µ ∈ C) est analytique sur Ω ; – le produit f g des deux fonctions est aussi analytique sur Ω. Voici encore un résultat qui permet de construire d’autres fonctions analytiques à partir de celles que l’on connait déjà. Lemme 13 (Composition de fonctions analytiques). Soit f : Ω → C une fonction analytique et g : Ω0 ⊃ f (Ω) → C une autre fonction analytique. Alors g ◦ f est une fonction analytique sur Ω. Nous ne démontrons pas tout de suite ce résultat, nous attendrons d’avoir montré qu’une fonction analytique sur un ouvert est holomorphe sur cet ouvert car la démonstration de ce lemme devient alors très simple. 2.1.2 Holomorphie des fonctions analytiques Dans ce paragraphe, nous allons montrer que les fonctions analytiques sont dérivables par rapport à leur variable complexe. Jusqu’à cette année, vous ne saviez dériver que des fonctions d’une ou plusieurs variables réelles. En cours de calcul différentiel et optimisation, vous allez voir comment dériver une fonction entre deux espaces de Banach. Ici, nous allons en quelque sorte traiter un cas particulier. Pour définir la dérivée d’une fonction h : [a, b] → R en c ∈]a, b[, on étudie la limite de la pente donnée par le taux d’accroissement de h entre c et un x : h(x) − h(c) . x−c Si maintenant x et c sont des vecteurs, même si h est à valeurs réelles, le sens du taux d’accroissement précédent n’est pas clair car on ne sait pas diviser un 2.1. DÉFINITIONS ET PROPRIÉTÉS 15 réel par un vecteur. En revanche, on sait diviser par un nombre complexe. Donc si on considère une fonction f : Ω → C et un point z0 ∈ Ω, on peut définir pour tout z ∈ Ω, f (z) − f (z0 ) (2.2) z − z0 et étudier sa limite. Définition 7 (Holomorphie d’une fonction). Soit f : Ω → C et un point z0 ∈ Ω. La fonction f est holomorphe en z0 si le taux d’accroissement (2.2) admet une limite lorsque z tend vers z0 . On note alors f 0 (z0 ) la limite éventuelle. Exercice 2. Montrer que si f est holomorphe en z0 alors f est continue en z0 . Holomorphie des fonctions analytiques On va maintenant montrer que la fonction somme d’une séries entière est dérivable au sens complexe et que la dérivée complexe de la fonction somme est encore une une série entière. Précisément, on a le lemme suivant P Lemme 14 (Les séries entières sont holomorphes). Soit an z n une série entière de rayon de convergence R > 0 et S : DR → C sa somme. Alors S est holomorphe sur DR et S 0 coı̈ncide avec la série dérivée de la série entière. Remarque 9 (importante). L’année dernière les séries entières étaient définies pour des suites de nombres réels (an ) et une variable réelle x. Cette année elles sont définies pour des suites de nombres complexes (an ) et une variable complexe z variant dans un disque de convergence. L’année dernière, vous avez appris que les séries entières sont C ∞ sur ] − R, R[. Cette année, nous avons vu dans le premier chapitre que si la série entière restreinte à l’axe réel et plus particulièrement restreinte à ]−R, R[⊂ DR est C ∞ . Dans ce chapitre, on montre que cette série entière est en fait dérivable au sens complexe sur le disque de convergence et que sa dérivée est une série entière. On peut alors anticiper sur la suite et comprendre tout de suite que, comme la série dérivée a le même rayon de convergence que la série entière, la somme est en fait dérivable à tout ordre au sens complexe, c’est-à-dire “C ∞ au sens complexe”. Ce résultat est donc une généralisation naturelle de celui que vous avez vu l’année dernière. Nous allons maintenant montrer le lemme 14. Démonstration du Lemme 14. On considère z0 ∈ DR . On a montré (voir l’énoncé du théorème 3 ci-dessus) que δ = R − |z0 |, on a pour z ∈ D(z0 , δ) S(z) = +∞ X S(n) (z0 ) (z − z0 )n . n! n=0 Donc pour h ∈ Dδ , h 6= 0, on a S(z0 + h) − S(z0 ) h = +∞ X S(n) (z0 ) n−1 h n! n=1 = +∞ (n+1) X S (z0 ) n h . (n + 1)! n=0 16 CHAPITRE 2. FONCTIONS ANALYTIQUES Le membre de droite est une série entière et l’on vient de montrer que son rayon de convergence vaut au moins δ > 0. Donc sa limite quand h tend vers 0 est S (1) (z0 ) = S 0 (z0 ) (voir le corollaire 3 du chapitre précédent). Ceci achève la démonstration du théorème. Grâce à ce lemme, nous pouvons maintenant montrer que toute fonction analytique est holomorphe. Théorème 5 (Les fonctions analytiques sont holomorphes). Si f est analytique sur Ω, alors fPest dérivable au sens complexe sur Ω. De plus, si on considère z0 ∈ Ω et si an (z0 )(z − z0 )n est la série entière associée à f en z0 , alors 0 a1 (z0 ) = f (z0 ). Démonstration. Soit z0 P ∈ Ω. Comme f est analytique en z0 , on sait que qu’il existe une série entière P an (z0 )z n et un réel R > 0 telle que pour tout z ∈ +∞ D(z0 , R), on a f (z) = n=0 (z − z0 )n . Ainsi z 7→ f (z0 + z) coı̈ncide avec la somme d’une série entière sur DR et donc f est dérivable au sens complexe en P+∞ z0 . De plus, on sait que f 0 (z0 + z) = n=0 (n + 1)an+1 (z0 )z n ; en particulier f 0 (z0 ) = a1 (z0 ). Dérivabilité à tout ordre des fonctions analytiques Au vu de la démonstration du théorème, on a même un résultat un peu plus fort. Corollaire 4. Si f est analytique sur Ω, alors f est dérivable au sens complexe sur Ω et f 0 est analytique sur Ω. Donc on a envie de dire que f est dérivable à tout ordre au sens complexe. Il faut donner un sens précis à ceci et c’est pour cela que nous introduisons maintenant la définition suivante. Définition 8 (Dérivée k-ème et fonction C k ). Soit k ∈ N, k ≥ 2. – Une fonction f : Ω → C est dérivable à l’ordre k sur Ω si – f est dérivable à l’ordre k − 1 sur Ω et – f k−1 est holomorphe sur Ω. – Une fonction f : Ω → C est C k sur Ω si – elle est dérivable à l’ordre k sur Ω ; – sa dérivée k-ème est continue. On note alors f (k) la dérivée k-ème (au sens complexe) de la fonction f . Le lemme 14 et la propriété 9 du chapitre précédent implique directement P Lemme 15 (Les séries entières sont dérivables à tout ordre). Soit an z n une série entière de rayon de convergence R > 0 et S : DR → C sa somme. Alors S est dérivable à tout ordre au sens complexe. On peut alors montrer Théorème 6. Si f est analytique sur Ω, alors f est dérivable P au sens complexe à tout ordre sur Ω. De plus, si on considère z0 ∈ Ω et si an (z0 )(z − z0 )n est la série entière associée á f en z0 , alors ak (z0 ) = f (k) (z0 ) . k! On déduit en particulier que la série associée en un point à une fonction analytique est unique. Si on veut un énoncé rigoureux, on écrit 2.1. DÉFINITIONS ET PROPRIÉTÉS 17 Corollaire 5. Si f est une fonction analytique sur Ω, alorsPpour tout point z0 ∈ Ω, il existe un réel R > 0 et une unique série entière an z n telle que pour tout z ∈ D(z0 , R), f (z) = +∞ X an (z − z0 )n . n=0 Question 3. Quelle est la différence entre ce corollaire et la définition de l’analyticité de f en z0 ? Plus subtil : le résultat précédent est-il encore vrai si on suppose seulement que f est analytique en un seul point ? 2.1.3 Principes du prolongement analytique et des zéros isolés Ce paragraphe est consacré à l’étude de Z, l’ensemble des zéros d’une fonction analytique f définie sur un ouvert Ω. D’une part nous allons voir que si Z contient une petite boule ouverte, alors f est identiquement nulle. D’autre part nous allons voir que si Z contient une suite convergente dont la limite est dans Ω (c’est-à-dire s’il existe une suite de zéros de f qui converge et dont la limite est encore dans Ω), alors f est aussi identiquement nulle. Le lecteur attentif notera que le second resultat est en fait une généralisation du premier. Pour cette étude, nous avons besoin de savoir ce qu’est un ensemble connexe. Ensembles connexes Vous avez vu dans le cours de calcul différentiel et optimisation ce qu’est un espace métrique. Vous avez vu que certains pouvaient être complets, d’autres compacts. Ces notions sont très utiles pour montrer par exemple l’existence de points fixes d’applications ou l’existence de solutions d’un problème d’optimisation. Dans les notes de cours de G. Carlier (en page 22), il est expliqué ce qu’est un ensemble connexe. Cette partie n’est qu’un complément de son cours et il va nous être utile. On considère un sous-ensemble A de C. On sait que C est un espace métrique puisqu’il est muni d’une distance, et l’on peut donc définir une topologie sur C. On peut aussi définir une topologie sur A, induite par le même distance. Attention !. La topologie sur A n’est pas la même que la topologie sur C. En d’autres termes, les fermés de A ne sont pas forcément des fermés de C. Pouvezvous construire un contre-exemple ? Remarque 10. Il est rappelé que la topologie des ensembles métriques peut être étudiée par les suites (page 12 des notes du cours de calcul différentiel et optimisation). On peut maintenant donner la définition d’un ensemble connexe. De façon informelle, on peut dire qu’un ensemble est connexe s’il est “d’un seul tenant”. Commençons par les ensembles connexes par arcs. Définition 9 (Ensemble connexe par arcs). Un sous-ensemble A de C est connexe par arcs si, pour tout couple de points x, y ∈ A, on peut trouver une fonction continue γ : [0, 1] → A tel que γ(0) = x et γ(1) = y. 18 CHAPITRE 2. FONCTIONS ANALYTIQUES Fig. 2.3 – Ensembles connexe et non connexe Fig. 2.4 – Connexité par arcs 2.1. DÉFINITIONS ET PROPRIÉTÉS 19 Ainsi, un ensemble est connexe par arcs si l’on peut relier x à y par un chemin continu qui reste dans A. Question 4. Pourquoi les ensembles convexes sont-ils des ensembles connexes ? Plus généralement, on définit la notion d’ensemble connexe. Définition 10 (Ensemble connexe). Un sous-ensemble A de C est connexe si toute application continue f : A → {0, 1} est constante. Remarque 11. Pour parler de continuité, il faut une topologie sur {0, 1}. On peut par exemple considérer la distance induite par la distance usuelle dans R. Cette définition est abstraite et il n’est pas forcément facile de savoir comment l’utiliser. Nous allons montrer que cette notion est bien une généralisation de la précédente. Théorème 7. 1. Tout ensemble connexe par arcs est connexe. 2. Tout ensemble connexe et ouvert est connexe par arcs. Pour démontrer ce théorème, on aura besoin d’une autre caractérisation des ensembles connexes. Proposition 3. Un ensemble A est connexe si et seulement si les seuls sousensembles de A qui soient à la fois ouvert et fermé sont ∅ et A. Démonstration. Supposons d’abord A connexe et considérons un sous-ensemble B de A qui soit ouvert et fermé. On considère alors la foncton φ : A → {0, 1} qui vaut 1 sur B et 0 sur A \ B. On va montrer que cette fonction est continue. Pour cela, il suffit de montrer que l’image inverse de tout ouvert est ouvert. Or les seuls ouverts qui ne sont pas triviaux de {0, 1} sont {0} et {1}. Et comme φ−1 ({1} = B (qui est ouvert) et φ−1 ({0}) = A)\B (qui est aussi ouvert puisque B est fermé), on en déduit bien que φ est continue. Mais donc φ est constante. Ce qui veut dire B est vide ou B = A. Réciproquement, si l’on considère une fonction continue f : A → {0, 1}, on considère c ∈ f (A) (ensemble image de A par f ). Alors f −1 ({c}) n’est pas vide par choix de c et il est ouvert et fermé car {c} est ouvert et fermé et f est continue. On en déduit que f −1 (c) = A donc f est constante. Nous pouvons maintenant démontrer le théorème 7. Démonstration du théorème 7. Commençons par montrer la première assertion. Raisonnons par l’absurde et supposons qu’il existe un ensemble connexe par arcs qui n’est pas connexe. Il existe donc une fonction continue f : A → {0, 1} qui n’est pas constante. Donc il existe x, y ∈ A tel que f (x) = 0 et f (y) = 1. De plus, comme A est connexe par arcs, il existe une fonction continue γ : [0, 1] → A telle γ(0) = x et γ(1) = y. On en déduit donc que g = f ◦ γ : [0, 1] → {0, 1} est une fonction continue telle que g(0) = 0 et g(1) = 1. Alors par le théorème des valeurs intermédiaires, il existe c ∈ [0, 1] telle que g(c) = 1/2, ce qui est absurde. Montrons maintenant la seconde assertion. On considère donc un ensemble A ⊂ C ouvert et connexe et on veut montrer qu’il est connexe par arcs. On considère donc x, y ∈ A et on veut montrer qu’il existe γ : [0, 1] → A telle que γ(0) = x et γ(y) = 1. On définit ensuite B = {z ∈ A : ∃γ : [0, 1] → A t.q. γ(0) = x, γ(1) = y} . 20 CHAPITRE 2. FONCTIONS ANALYTIQUES On veut montrer que y ∈ B. On sait que B n’est pas vide puisqu’il contient x. On va montrer qu’il est ouvert et fermé. On en déduira que B = A et en particulier y ∈ B. L’ensemble A est ouvert donc il existe une boule B(x, r) (pour un certain r > 0) contenant x et inclus dans A. Les boules ouvertes étant convexes donc connexes, tous les points de B(x, r) sont dans B. Donc B est bien ouvert. On considère maintenant une suite de points zn ∈ B telle que zn → z ∈ A quand n → +∞. Or A est ouvert donc il existe r0 > 0 tel que B(z, r0 ) ⊂ A. Comme la suite zn converge vers z, il existe un entier N ∈ N tel que zN ∈ B(z, r0 ). Alors on a γN : [0, 1] → A tel que γ(0) = x et γ(1) = zN . Et comme précédement, il existe γ 0 : [0, 1] → A telle que γ 0 (0) = zN et γ 0 (1) = z. Il est maintenant facile de construire γ qui rejoint x et z. Donc z ∈ B. La démonstration est maintenant terminée. En guise d’exercice, on pourra montrer la proposition suivante. Proposition 4. Soit A une sous-ensemble de C et f : A → C une fonction continue. Si A est connexe, alors f (A) est aussi connexe. Principe du prolongement analytique Dans ce paragraphe, on considère un ensemble ouvert et connexe Ω ⊂ C. On va montrer que si une fonction f analytique s’annule sur tout une petite boule inclue dans Ω, alors f est identiquement nulle. On en déduira que si deux fonctions f et g analytiques sur Ω coı̈ncident sur une petite boule, alors elles coı̈ncident sur Ω tout entier. Lemme 16. Soit Ω un ouvert connexe, z0 ∈ Ω et f analytique sur Ω. Les trois assertions suivantes sont équivalentes : 1. Pour tout n ∈ N, f (n) (z0 ) = 0. 2. Il existe R > 0 tel que pour tout z ∈ D(z0 , R), f (z) = 0. 3. La fonction f est identiquement nulle sur Ω. Démonstration. Nous allons montrer successivement 1 ⇒ 2, 2 ⇒ 3, 3 ⇒ 1. 1 ⇒ 2 Etant donné que f est analytique en z0 ∈ Ω, on peut utiliser le théorème 3 pour obtenir cette implication. 2 ⇒ 3 On considère le sous-ensemble de Ω suivant Ω0 = {z ∈ Ω : ∃R > 0, ∀z 0 ∈ D(z, R), f (z) = 0} . L’assertion 2 dit précisément que z0 ∈ Ω0 . En particulier, Ω0 n’est pas vide. Nous allons montrer que Ω0 est ouvert et fermé et appliquer la proposition 3 pour déduire que Ω0 = Ω. Soit z ∈ Ω0 . Par définition de l’ensemble Ω0 , on sait qu’il existe R > 0 tel que pour tout z 0 ∈ D(z, R), f (z) = 0. Or pour z 0 ∈ D(z, R/2) on a D(z 0 , R/2) ⊂ D(z, R). Donc pour tout z 00 ∈ D(z 0 , R/2) f (z 00 ) = 0. On en déduit donc que z 0 ∈ Ω0 . Or ceci est valable pour tout z 0 ∈ D(z, R/2). Ainsi Ω0 est ouvert. Si maintenant on considère une suite zn ∈ Ω0 telle que zn → z∞ ∈ Ω, alors on veut montrer que z∞ ∈ Ω0 . Pour cela on se fixe un réel p ∈ N et on sait que f (p) (zn ) = 0 pour tout n ∈ N. On peut alors passer à la limite quand n → +∞ (rappelezvous que f (p) est analytique donc en particulier continue) et obtenir que 2.1. DÉFINITIONS ET PROPRIÉTÉS 21 Fig. 2.5 – Principe du prolongement analytique : si les fonctions holomorphes f et g coı̈ncident sur la petite boule, elles coı̈ncident sur Ω tout entier f (p) (z∞ ) = 0. Ceci étant valable pour tout p ∈ N, on vérifie donc 1. Par ce qui précède, on a donc 2 qui dit précisément que z∞ ∈ Ω0 . Donc Ω0 est fermé. 3 ⇒ 1 Ceci est trivial car Ω est ouvert. A partir de ce lemme, on peut en déduire immédiatement le théorème suivant. Théorème 8. Soit Ω un ouvert connexe. Si f et g sont analytiques sur Ω et s’il existe z0 ∈ Ω et R > 0 tels que pour tout z ∈ D(z0 , R), f (z) = g(z) alors f ≡ g sur Ω. De ce théorème, on peut aussi déduire que s’il existe deux prolongements analytiques d’une même fonction analytique f sur Ω à un ouvert connexe Ω0 plus grand (c’est-à-dire contenant Ω), alors ces deux prolongements sont identiques. Voici un énoncé plus précis. Corollaire 6. Soit Ω un ouvert non vide (non nécessairement connexe) et f une fonction analytique sur Ω. Soit f¯ et f¯ deux fonctions analytiques sur Ω0 ⊃ Ω ouvert et connexe telles que f¯ = f¯ = f sur Ω. Alors f¯ = f¯ sur Ω0 . Démonstration. La fonction h = f¯ − f¯ est analytique sur l’ouvert connexe Ω0 et s’annule sur l’ouvert Ω ⊂ Ω0 . En particulier, h s’annule sur une petite boule. Donc h est identiquement nulle sur Ω0 . Principe des zéros isolés Nous allons montrer dans ce paragraphe que les zéros d’une fonctions analytiques ne peuvent pas être trop proche les uns des autres. Pour donner un sens mathématique précis à cette affirmation vague, il faut introduire la notion de point isolé et de point d’accumulation d’un espace métrique. Définition 11. Soit A un sous-ensemble de C et a ∈ C. – Le point a est isolé dans A s’il existe R > 0 tel que D(a, R) ∩ A = {a}. 22 CHAPITRE 2. FONCTIONS ANALYTIQUES Fig. 2.6 – Principe des zéros isolés : si les fonctions holomorphes f et g coı̈ncident sur une suite dont la limite est dans Ω, alors f et g coı̈ncident sur Ω tout entier – Le point a est un point d’accumulation de A si pour tout R > 0, D(a, R)∩ A \ {a} = 6 ∅. Remarque 12. Remarquer qu’un point isolé de A est forcément dans A. Ce qui n’est pas le cas pour les points d’accumulation. On a alors le théorème suivant. Théorème 9 (Les zéros d’une fonction analytique sont isolés). Soit Ω un ouvert connexe et f une fonction analytique sur Ω qui n’est pas identiquement nulle. Alors les zéros de f dans Ω sont isolés. On peut alors immédiatement déduire de ce théorème le corollaire suivant. Corollaire 7. Soit Ω un ouvert connexe et f une fonction analytique sur Ω. Si Z, l’ensemble des zéros de f , possède un point d’accumulation, alors f est identiquement nulle. On peut aussi obtenir le corollaire suivant. Corollaire 8. Soit f et g deux fonctions analytiques sur C qui coı̈ncident sur R. Alors f et g coı̈ncident sur C. Ordre d’un zéro d’une fonction analytique Pour démontrer le théorème 9, nous avons besoin de démontrer d’abord le lemme suivant. Lemme 17. Soit Ω un ouvert connexe et f une fonction analytique sur Ω et z0 ∈ Ω. Les deux assertions suivantes sont équivalentes : 1. Il existe k ∈ N, k ≥ 1, tel que f (z0 ) = ... = f (k−1) (z0 ) = 0 et f (k) (z0 ) 6= 0. 2. Il existe une fonction analytique g sur Ω telle que g(z0 ) 6= 0 et pour tout z ∈ Ω, f (z) = (z − z0 )k g(z) . 2.1. DÉFINITIONS ET PROPRIÉTÉS 23 A partir du lemme, on peut poser la définition suivante. Définition 12 (Ordre d’un zéro d’une fonction analytique). On dit que z0 est un zéro d’ordre k de la fonction f si l’une des assertions équivalentes du lemme 17 est vraie. Remarque 13. Penser à l’équivalent pour les polynômes. Démonstration du lemme 17. 1 ⇒ 2 On définit la fontion g : Ω → C comme suit ( f (z) si z 6= z0 (z−z0 )k g(z) = f (k) (z0 ) si z = z0 . k! Il est clair que g est analytique sur Ω \ {z0 } et g(z0 ) 6= 0. Il reste donc à montrer que g est analytique en z0 . Or f l’est en z0 donc il existe R0 > 0 tel que pour tout z ∈ D(z0 , R0 ), on a f (z) = +∞ (n) X f (z0 ) (z − z0 )n n! n=0 = +∞ (n) X f (z0 ) (z − z0 )n n! n=k = (z − z0 )k +∞ (n+k) X f (z0 ) (z − z0 )n . (n + k)! n=0 On en déduit donc que pour tout z ∈ D(z0 , R0 ), g(z) = +∞ (n+k) X f (z0 ) (z − z0 )n . (n + k)! n=0 Donc g est analytique en z0 . 2 ⇒ 1 Il suffit de montrer que pour tout j ∈ {0, . . . , k}, il existe une fontion Gj analytique en z0 telle que f (j) (z) = (z − z0 )k−j Gj (z) et Gj (z0 ) 6= 0 pour pouvoir conclure. On peut montrer ce résultat par récurrence. Ceci est clairement vrai pour j = 0. Si cela est vrai pour j ∈ {0, . . . , k − 1}, alors f (j+1) (z0 ) = (k − j)(z − z0 )k−j−1 Gj (z) + (z − z0 )k−j G0j (z) = (z − z0 )k−(j+1) ((k − j)Gj (z) + (z − z0 )G0j (z) . On pose alors Gj+1 (z) = (k − j)Gj (z) + G0j (z). Comme Gj est analytique sur Ω, G0j l’est aussi. En particulier, Gj+1 (z0 ) = (k − j)Gj (z0 ) 6= 0 car j ≤ k − 1. Enfin, f (k) (z) = Gk−1 (z) + (z − z0 )G0k−1 (z) et donc Gk (z0 ) 6= 0. Ceci achève la récurrence et la démonstration. On peut maintenant démontrer le théorème 9. 24 CHAPITRE 2. FONCTIONS ANALYTIQUES Démonstration du théorème 9. Soit z0 ∈ Z. Comme f n’est pas identiquement nulle, on sait par le lemme 16 qu’il existe k ∈ N, k ≥ 1, telle que f (k) (z0 ) = 0 et f (j) (z0 ) 6= 0 pour j ∈ {0, k − 1}. Grâce au lemme 17, on en déduit qu’il existe g analytique sur Ω telle que g(z0 ) 6= 0 et pour tout z ∈ Ω, f (z) = (z − z0 )k g(z). Comme g est analytique, g est continue et donc g 6= 0 sur une petite boule autour de z0 . Donc f 6= 0 sur cette boule privée de z0 . Donc z0 est bien isolé dans Z. 2.2 2.2.1 Exponentielle et logarithmes Exponentielle complexe Dans ce paragraphe, on s’intéresse à la fonction exponentielle. On la définit comme la somme d’une série entière. Définition (Exponentielle complexe). Pour tout z ∈ C, on pose exp z = P+∞ 13 n ez = n=0 zn! . On sait que cette fonction est bien définie car le rayon de convergence de la série entière est infini. Enonçons et démontrons maintenant la propriété fondamentale de cette fonction. Lemme 18. Pour tout z, z 0 ∈ C, exp(z + z 0 ) = exp(z) exp(z 0 ). P zn Démonstration. Il est facile de voir que les séries dérivées de tout ordre de n! P zn sont toutes égales à la série entière n! et on en déduit donc que leurs sommes (S(n) )n∈N le sont aussi : pour tout n ∈ N, S(n) (z) = exp(z) . Considérons maintenant un nombre complexe quelconque a ∈ C. On utilise ensuite le Theoreme 6 pour obtenir que pour tout z ∈ C, exp(a + z) = +∞ +∞ X S(n) (a) n X exp(a) n z = z = exp(a) exp(z) . n! n! n=0 n=0 Le lemme est maintenant démontré. On déduit du lemme précédent plusieurs propriétés importantes. Corollaire 9. 1. Pour tout z ∈ C, exp(z) 6= 0 et exp(−z) = 1 exp(z) . 2. La fonction exp : C → C est holomorphe sur C et pour tout z ∈ C, exp0 (z) = exp(z). 3. Si z = x + iy, alors | exp(z)| = exp(x). En particulier, exp(x) > 0 pour x ∈ R et | exp(iθ)| = 1 pour tout θ ∈ R. Démonstration. Démonstration de 1. 1 = exp(0) = exp(z − z) = exp(z) exp(−z) . En particulier, exp(z) 6= 0. Démonstration de 2. On sait que exp0 (z) coı̈ncide avec la somme de la série dérivée. 2.2. EXPONENTIELLE ET LOGARITHMES 25 Démonstration de 3. On commence par remarquer que exp(x) ∈ R pour x ∈ R et que exp(x) ≥ 0 car exp(x) = (exp(x/2))2 ≥ 0. Soit z ∈ C. Alors exp(z) = exp(z). On en déduit que | exp(z)| = (exp(z) exp(z))1/2 = (exp(z + z))1/2 = (exp(2x))1/2 = exp(x) . Question 5. Dans la démonstration précédente, où a-t-on utilisé le fait que P+∞ P+∞ n=0 An = n=0 An ? Pouvez-vous justifier cela ? On établit maintenant le théorème qui permet de définir le logarithme népérien sur R. Théorème 10. La fonction exp restreinte à R définit un C ∞ -difféomorphisme entre R et ]0, +∞[. Démonstration. On commence par remarquer que (exp)0 (x) = exp(x) > 0 grâce au corollaire précédent. Donc la fonction exp restreinte à R est strictement croissante et C ∞ . Par ailleurs, pour x ≥ 0, exp(x) = +∞ n X x ≥ 1 + x → +∞ n! n=0 and x → +∞. Donc exp(x) → +∞ quand x → +∞. De plus, pour x ≤ 0, exp(x) = 1/ exp(−x) → 0 quand x → −∞. Donc exp définit bien un C ∞ difféomorphisme entre R et ]0, +∞[. 2.2.2 Les fonctions trigonométriques On peut maintenant définir les fonctions cosinus et sinus en termes de fonctions analytiques. Définition 14. Pour tout z ∈ C, on pose cos(z) = +∞ X (−1)n n=0 +∞ X z 2n+1 z 2n et sin(z) = (−1)n . (2n)! (2n + 1)! n=0 On peut alors facilement démontrer la proposition suivante. Proposition 5. Pour tout z ∈ C, exp(iz) = cos(z) + i sin(z) , exp(iz) + exp(−iz) exp(iz) − exp(−iz) cos(z) = et sin(z) = , 2 2i 2 2 cos (z) + sin (z) = 1 , cos0 (z) = − sin(z) et sin0 (z) = cos(z) . Pour démontrer la troisième égalité, il suffit d’écrire 1 = exp(iz) exp(−iz). On peut alors donner une définition analytique du nombre π. Définition 15. π = 2 min{t ∈ [0, 2] : cos(t) = 0}. 26 CHAPITRE 2. FONCTIONS ANALYTIQUES Fig. 2.7 – La fonction exp est 2iπ périodique Vérifions que ce minimum est bien défini. Il faut justifier que l’ensemble n’est pas vide puis utiliser la continuité de cos pour en déduire que la borne inférieure est atteinte. On remarque que cos(0) = 1 et cos(2) est la somme d’une série alternée. Donc cos(2) est plus petit que ses sommes partielles d’ordre impaire donc cos(2) ≤ 1 − 2 + 2/3 = −1/3 < 0. La fonction cos étant continue, on en déduit qu’il existe t ∈ [0, 2] tel que cos(t) = 0. Nous allons maintenant démontrer une formule importante. Lemme 19. exp(iπ/2) = i. Démonstration. Par définition de π, cos(π/2) = 0. De plus, cos(t) > 0 pour tout t ∈ [0, π/2[ ; en effet cos ne s’annule pas sur cet intervalle, il a donc un signe constant. Et on sait que cos(0) = 1. De plus, la fonction sin restreinte à R est à valeurs réelles et elle est (strictement) croissante sur [0, π/2[ car sa dérivée est cos. On utilise alors la proposition 5 pour en déduire que sin(π/2)2 = 1 et donc que sin(π/2) = 1. On déduit de ce lemme le corollaire suivant. Proposition 6. La fonction exp : C → C est 2iπ périodique. Et donc les fonctions cos et sin sont 2π périodiques. On s’intéresse maintenant à l’image réciproque d’un nombre complexe par la fonction exponentielle. Lemme 20. Pour tout z, z 0 ∈ C, exp(z) = exp(z 0 ) ⇒ ∃n ∈ Z / z − z 0 = 2inπ . Démonstration. Grâce aux propriétés de exp montrées plus haut, il suffit de montrer le résultat pour z 0 = 0. Soit donc z = x + iy ∈ C tel que exp(z) = 1. Donc exp(x) = 1. Or on a vu que exp restreinte à R est un difféomorphisme et exp(0) = 1. Donc x = 0. Ainsi exp(iy) = 1. Etant donné que la fonction exp est 2iπ périodique (Proposition 6), il suffit de montrer que si y ∈ [0, 2π[ est tel que exp(iy) = 1, alors y = 0. Raisonnons par 2.2. EXPONENTIELLE ET LOGARITHMES 27 l’absurde. Supposons que y 6= 0. Alors y/4 ∈]0, π/2[, et donc c := cos(y/4) 6= 0 (par définition de π) et s := sin(y/4) 6= 0 (car sin(0) = 0 et sin est strictement croissante sur [0, π/2[). Ainsi, on a (c + is)4 = 1, ce qui donne, en séparant les parties réelles et imaginaires 4cs(c2 − s2 ) = 0 4 c − 6c2 s2 + s4 = 1 . La première équation implique que c2 = s2 et comme c2 + s2 = 1, on a s2 = c2 = 1/2. Mais la seconde équation donne alors −4/4 = 1 ce qui est faux. Nous continuons notre étude de la fonction exponentielle en étudiant sa surjectivité. Théorème 11. La fonction exp : C → C \ {0} est surjective. Démonstration. Soit z0 ∈ C\{0}. On a vu précédemment que exp : R →]0, +∞[ est un difféomorphisme donc en particulier, il existe donc x0 ∈ R tel que |z0 | = exp(x0 ). Ainsi, |z0 / exp(x0 )| = 1. Il suffit alors de montrer le lemme suivant. Lemme 21. Pour tout z1 ∈ U = {z ∈ C : |z| = 1}, il existe t1 ∈ R tel que z1 = exp(it1 ). Démonstration du lemme. On commence par écrire z1 = c1 + is1 avec c1 , s1 ∈ R (partie réelle et imaginaire usuelles). Comme c21 + s21 = |z1 |2 = 1, on en déduit c1 , s1 ∈ [−1, 1]. On commence par justifier le fait que pour tout t ∈ R, 1 | exp(it)| = 1. Il suffit de remarquer que exp(it) = exp(−it) = exp(it) . Ensuite, on utilise le lemme 19 pour obtenir exp(iπ) = −1. Ceci implique que exp(i(t+π)) = − exp(it). Ainsi, on peut se ramener à c1 ∈ [0, 1]. Puis on utilise le fait que z1 = c1 − is1 pour se ramener à s1 ∈ [0, 1]. De plus, on a vu précédemment que sin : [0, π/2] → [0, 1] est une bijection donc s1 = sin(t1 ). Donc c21 = 1−sin2 (t1 ) = cos2 (t1 ). De plus, on a c1 > 0 ; donc c1 = cos(t1 ). Ainsi z0 / exp(x0 ) = exp(it1 ) et donc z0 = exp(x0 + it1 ). Ceci achève la démonstration du théorème. Dans ce qui précède, nous avons notamment démontré le résultat suivant. Corollaire 10. La fonction exponentielle exp : [0, 2π[→ U est une bijection. 2.2.3 Logarithmes complexes Il s’agit ici d’inverser la fonction exponentielle exp qui est surjective sur C \ {0}. Mais exp n’est pas injective. Commençons par énoncer précisément ce que l’on cherche à construire. Notion de détermination du logarithme sur un ouvert Définition 16 (Déterminations du logarithme). Soi Ω un ouvert de C \ {0}. Une détermination du logarithme dans Ω est une fonction continue f : Ω → C telle que pour tout z ∈ Ω, exp(f (z)) = z . 28 CHAPITRE 2. FONCTIONS ANALYTIQUES Attention !. – Une telle fonction n’existe pas forcément ! Cela dépend de Ω. – S’il existe une telle fonction, alors il en existe une infinité. Nous allons développer ces deux points. Lemme 22. Il n’existe pas de détermination du logarithme sur C \ {0}. Démonstration. Soit f : C \ {0} → C une détermination du logarithme sur it C\{0}. Posons θ(t) = f (ei ) pour tout t ∈ R. Par définition d’une détermination du logarithme, on a pour tout t ∈ R, eiθ(t) = eit . Donc pour tout t ∈ R, il existe n(t) ∈ Z tel que θ(t) = t + 2iπn(t). Ainsi, n : R → Z est une fonction continue de R dans Z. Cela implique que cette fonction est constante. Donc θ(t + 2π) = θ(t) + 2iπ. Mais par définition de θ, on a θ(t + 2iπ) = θ(t). D’où une contradiction. Lemme 23. Soit Ω un ouvert connexe de C \ {0}. Si f est une détermination du logarithme sur Ω, alors l’ensemble des déterminations du logarithme sur Ω est l’ensemble des fonctions f + 2inπ pour n ∈ Z. Démonstration. Soit g une autre détermination du logarithme sur Ω. Alors (f − g)/(2iπ) est une fonction continue de Ω dans Z. Donc cette fonction est constante. Ceci achève la démonstration. Détermination principale du logarithme On a vu plus haut que exp restreinte à R est une bijection entre R et ]0, +∞[. On peut donc considérer sa fonction réciproque. Définition 17 (Logarithme népérien). Le logarithme népérien est la fonction réciproque de exp : R →]0, +∞[. On la note ln. On commence par prolonger analytiquement f à D(1, 1). Lemme 24. La fonction ln :]0, +∞[→ R se prolonge en une fonction analytique sur D(1, 1). Démonstration. On commence par considérer la fonction analytique L sur D(1, 1) n−1 P dont le développement en série entière autour du point 1 est n≥1 (−1)n z n . Ainsi pour tout z ∈ D(1, 1) L(z) = +∞ X (−1)n−1 (z − 1)n . n n=1 On sait alors que la fonction exp ◦L est analytique sur D(1, 1). On va montrer qu’elle coı̈ncide avec z 7→ z. Ainsi L coı̈ncide avec la fonction réciproque de exp sur l’axe réel en particulier et donc L est le prolongement analytique que l’on cherchait. Pour montrer que f = exp ◦L coı̈ncide avec z 7→ z sur D(1, 1), on montre qu’elle coı̈ncide avec x 7→ x sur l’intervalle ]0, 2[ de l’axe réel. Pour voir cela, on n−1 P P commence par remarquer que la série dérivée de n≥1 (−1)n z n est n≥O z n donc la somme est 1/1 + z. Donc L0 (z) = 1/z sur D(1, 1). Donc g 0 (z) = g(z) z pour tout z ∈ D(1, 1). Après avoir remarqué que g > 0, on en déduit que pour tout x ∈]0, 2[, on a (ln g)0 (x) = (ln x)0 et g(1) = 1. Donc g(x) = x sur ]0, 2[. Comme g est analytique, on en déduit que g(z) = z sur le disque D(1, 1) tout entier. 2.2. EXPONENTIELLE ET LOGARITHMES 29 On peut maintenant définir alors la détermination principale du logarithme. Lemme 25. La fonction exp est une bijection entre Σ = {z ∈ C : −π < =(z) < π} sur Σ̃ = C\]−∞, 0]. La réciproque exp−1 est donnée par la formule suivante : pour tout ρ > 0 et t ∈] − π, π[ exp−1 (ρ exp(it)) = ln ρ + it où ln est le logarithme népérien (donc défini sur ]0, +∞[ uniquement). Avant de démontrer ce lemme, on donne une définition. Définition 18. L’application réciproque de exp : Σ → Σ̃ est appelée détermination principale du logarithme. On convient de la noter exp−1 . Démonstration. Grâce au lemme 20, on déduit l’injectivité de exp une fois restreinte à Σ. Pour ce qui est de la surjectivité sur Σ̃, on sait déjà par le Théorème 11 que la fonction exp est surjective sur C \ {0}. Ainsi pour tout z̃ ∈ Σ̃, il existe z ∈ C tel que exp(z) = z 0 . De plus, par périodicité de la fonction exponentielle (Proposition 6), on peut choisir z = x + iy avec y ∈ [−π, π[. Si y = −π, alors z̃ = exp(z) = − exp x < 0 ce qui est absurde car z̃ ∈ Σ̃. Ainsi la fonction exp : Σ → Σ̃ est bien injective et surjective donc bijective. Analyticité des déterminations du logarithme Nous expliquons enfin que n’importe quelle détermination du logarithme sur un ensemble ouvert Ω ⊂ C \ {0} est analytique. Ce résultat est admis. Théorème 12. Soit Ω un ouvert de C \ {0} et f : Ω → C une détermination du logarithme. Alors f est analytique sur Ω et f 0 (z) = z1 . De plus, si z0 ∈ Ω, alors f se prolonge en une fonction analytique f˜ sur D(z0 , |z0 |) de la façon suivante : pour tout z ∈ D(z0 , |z0 |), f˜(z) = f (z0 ) + 2.2.4 +∞ X (−1)n−1 (z − z0 )n . n n=1 Autres fonctions usuelles La plus part des fonctions usuelles (tan, arcsin, arccos, arctan, tanh . . . ) se prolongent en fonctions analytiques sur C ou sur un “grand ouvert” de C. Nous allons traiter le cas de cosh, sinh et les fonctions puissances. Définition 19. Pour tout z ∈ C, on pose +∞ X z 2n cosh(z) = (2n)! n=0 et sinh(z) = +∞ X z 2n+1 . (2n + 1)! n=0 On peut alors démontrer les propriétés suivantes. – Pour tout z ∈ C, on a cosh(z) = exp(z)+exp(−z) et sinh(z) = 2 exp(z)−exp(−z) . 2 – Pour tout z ∈ C, on a cosh2 (z) − sinh2 (z) = 1. Lemme 26. 30 CHAPITRE 2. FONCTIONS ANALYTIQUES – Les fonctions cosh et sinh sont holomorphes sur C et cosh0 = sinh et sinh0 = cosh. La démonstration de ce lemme est laissé en exercice. Définition 20. Soit α ∈ C. Notons f la détermination principale du logarithme sur C\] − ∞, 0]. On définit alors une fonction fα par la formule suivante : pour tout z ∈ C\] − ∞, 0], fα (z) = exp(αf (z)) . On appelle cette fonction la fonction puissance α. Cette définition est cohérente avec celle du cas réel. Précisément, étant donné que si exp et f sont réduits à l’axe réel, elles coı̈ncident avec la fonction exponentielle et le logarithme népérien, on en déduit que fα restreint à {x > 0} coı̈ncide avec xα si α est réel. On peut aussi montrer les propositions suivantes. Lemme 27. Soit α ∈ C. la fonction fα est analytique sur C\] − ∞, 0] et on a fα0 = αfα−1 (z) ∀z ∈ D(1, 1), fα (z) = +∞ X α × · · · × (α − n + 1) (z − 1)n . n! n=0 La démonstration de ce lemme est aussi laissée en exercice. Chapitre 3 Fonctions holomorphes Dans ce chapitre, on considère de nouveau un ensemble ouvert Ω de C et on étudie les fonctions f : Ω → C qui sont holomorphes sur Ω. Nous avons vu au chapitre précédent que les fonctions analytiques sont holomorphes. On se pose maintenant la question de savoir s’il y en a d’autres. Et nous allons voir que la réponse est non. 3.1 3.1.1 Définition et propriétés Rappels Nous commençons par rappeler la définition de l’holomorphie. On rappelle que Ω est un ensemble ouvert. Définition 21 (Holomorphie d’une fonction). Soit f : Ω → C et un point z0 ∈ (z0 ) Ω. La fonction f est holomorphe en z0 si le taux d’accroissement f (z0 +h)−f h admet une limite lorsque z tend vers z0 . On note alors f 0 (z0 ) la limite éventuelle. La fonction f est holomorphe sur Ω si f est holomorphe en tout point z0 ∈ Ω. Une fonction f est C 1 holomorphe sur Ω si f est holomorphe et f 0 est continue. Attention .! Quand on dit d’une fonction de la variable complexe qu’elle est C 1 , on dit un peu plus que le caractère C 1 d’une fonction de deux variables réelles. Nous allons revenir sur ce point un peu plus bas. Nous avons déjà signalé qu’une fonction holomorphe était continue. Nous avions laissé cela en exercice, soyons maintenant précis. Lemme 28. Si f est holomorphe en z0 ∈ Ω, alors f est continue en z0 . Démonstration. Il suffit de remarquer que f (z0 + h) = f (z0 ) + h f (z0 + h) − f (z0 ) . h (z0 ) Comme le taux d’accroissement f (z0 +h)−f a pour limite f 0 (z0 ), on en déduit h (z0 ) que h f (z0 +h)−f tend vers 0. Ainsi f (z0 + h) tend vers f (z0 ). h 31 32 CHAPITRE 3. FONCTIONS HOLOMORPHES 3.1.2 Premières propriétés des fonctions holomorphes Commençons par démontrer des résultats que nous avons en fait un peu utilisés dans le chapitre précédent. Proposition 7. Soit f et g deux fonctions holomorphes sur Ω. – Pour tout λ, µ ∈ C, λf +µg est holomorphe sur Ω et (λf +µg)0 = λf 0 +µg 0 . – La fonction f g est holomorphe sur Ω et (f g)0 = f 0 g + g 0 f . Si maintenant f est holomorphe sur Ω et g est holomorphe sur Ω0 ⊃ f (Ω), alors g ◦ f est holomorphe sur Ω et (g ◦ f )0 (z) = g 0 (f (z))f 0 (z) pour tout z ∈ Ω. Démonstration. Si on écrit le taux d’accroissement de λf + µg, on trouve f (z0 + h) − f (z0 ) g(z0 + h) − g(z0 ) (λf + µg)(z0 + h) − (λf + µg)(z0 ) =λ +µ . h h h Il est alors facile de montrer que la limite du membre de gauche de l’égalité existe et vaut λf 0 (z0 ) + µg 0 (z0 ). Passons maintenant au produit f g. f (z0 + h) − f (z0 ) g(z0 + h) − g(z0 ) (f g)(z0 + h) − (f g)(z0 ) = g(z0 ) +f (z0 +h) . h h h Il est alors facile de conclure en utilisant que les deux taux d’accroissement ont une limite et en utilisant la continuité de f en z0 . Si maintenant, on écrit g ◦ f (z0 + h) − g ◦ f (z0 ) g(f (z0 + h)) − g(f (z0 )) = h h g(f (z0 + h)) − g(f (z0 )) f (z0 + h) − f (z0 ) × → g 0 (f (z0 )) × f 0 (z0 ) . = f (z0 + h) − f (z0 ) h On a utilisé la continuité de f en z0 pour dire que f (z0 + h) − f (z0 ) tend vers 0 quand h tend vers 0. Voici une autre propriété élémentaire qui nous sera utile plus tard. Lemme 29. Soit f : Ω → C. Si f est holomorphe en z0 ∈ Ω et f (z0 ) 6= 0, alors il existe r > 0 tel que 1/f : D(z0 , r) → C est holomorphe en z0 et (1/f )0 (z0 ) = − f 0 (z0 ) . f (z0 )2 Démonstration. Etant donné que f est continue en z0 et f (z0 ) 6= 0, on en déduit qu’il existe r > 0 tel que f (z) 6= 0 sur D(z0 , r) (exercice : justifier ça dans les moindres détails). On peut alors considérer 1/f sur ce disque. Puis on écrit (1/f )(z0 + h) − (1/f )(z0 ) f (z0 + h) − f (z0 ) =− . h hf (z0 )f (z0 + h) Il est maintenant facile de passer à la limite. 3.1. DÉFINITION ET PROPRIÉTÉS 3.1.3 33 Différentiabilité et conditions de Cauchy-Riemann Si l’on voit C comme R2 , Ω est un ouvert de R2 et f : Ω ⊂ R2 → R2 est une fonction de deux variables réelles f (x, y) = (P (x, y), Q(x, y)). Une autre façon de définir les fonctions P et Q est de poser P (z) = <f (z) , Q(z) = =f (z) . On peut alors exprimer ce que veut dire que la fonction est holomorphe en termes de conditions sur les deux fonctions P et Q. Dire que f est holomorphe en z0 veut exactement dire que lim h→0 f (z0 + h) − f (z0 ) − lh = 0. h (3.1) Si on regarde maintenant f comme une fonction de deux variables réelles, on écrit le produit de nombre complexe l ∈ C et h ∈ C de la façon suivante lh = (l1 h1 − l2 h2 ) + i(l2 h1 + l1 h2 ) . Si on écrit cela comme l’égalité de deux vecteurs dans R2 , on en déduit l1 h1 − l2 h2 l1 −l2 h1 lh = = . l2 h1 + l1 h2 l2 l1 h2 Ainsi, on peut écrire l’équation (3.1) sous la forme 1 P (x0 + h1 , y0 + h2 ) P (x0 , y0 ) lim − Q(x0 + h1 , y0 + h2 ) Q(x0 , y0 ) (h1 ,h2 )→0 |h| l1 −l2 h1 − = 0 . (3.2) l2 l1 h2 Ainsi, on vient de démontrer le lemme suivant. Lemme 30. Si f est holomorphe en z0 ∈ Ω, alors f = (P, Q) : Ω ⊂ R2 → R2 est différentiable en (x0 , y0 ) avec x0 = <z0 et y0 = =z0 et l1 −l2 h1 df (x0 , y0 ) · h = (l1 h1 − l2 h2 , l2 h1 + l1 h2 ) = . l2 l1 h2 En particulier, on en déduit le corollaire suivant Corollaire 11. Si f est holomorphe en z0 , alors les fonctions P et Q définies sur Ω ⊂ R2 sont différentiables en (x0 , y0 ) et ( ∂P ∂P 0 0 ∂x (x0 , y0 ) = <(f (z0 )) , ∂y (x0 , y0 ) = −=(f (z0 )) , ∂Q ∂Q 0 0 ∂x (x0 , y0 ) = =(f (z0 )) , ∂y (x0 , y0 ) = <(f (z0 )) ce que l’on peut réécrire de la façon suivante f 0 (z) = ∂f (z) ∂x et if 0 (z) = ∂f (z) . ∂y En particulier, on remarque que les conditions suivantes sont vérifiées ∂P ∂Q (x0 , y0 ) = (x0 , y0 ) ∂x ∂y et ∂P ∂Q (x0 , y0 ) = − (x0 , y0 ) . ∂y ∂x (3.3) 34 CHAPITRE 3. FONCTIONS HOLOMORPHES Remarque 14. Les conditions (3.3) sont appelées conditions de CauchyRiemann. On peut maintenant remarquer que les conditions (3.3) sont en fait suffisantes pour qu’une fonction différentiable soit holomorphe. Précisément, on a le lemme suivant Lemme 31. Si (P, Q) : Ω → R2 est différentiable en (x0 , y0 ) ∈ Ω et si les dérivées partielles de P et Q vérifient (3.3), alors f = P + iQ est une fonction holomorphe en z0 = x0 + iy0 ∈ Ω ⊂ C. Démonstration. Dire que (P, Q) est différentiable en (x0 , y0 ) veut dire qu’il existe une application linéaire L de R2 dans R2 telle que 1 P P h1 ((x0 , y0 ) + (h1 , h2 )) − lim (x0 , y0 ) − L = 0. Q Q h2 (h1 ,h2 )→0 |h| (3.4) De plus, on sait que la matrice de l’application linéaire L est exactement égale à ! ∂P ∂P ∂x (x0 , y0 ) ∂y (x0 , y0 ) . L= ∂Q ∂Q ∂x (x0 , y0 ) ∂y (x0 , y0 ) Si on pose maintenant l1 = ∂P ∂x (x0 , y0 ) L= et l2 = l1 l2 −l2 l1 ∂Q ∂x (x0 , y0 ), on voit que L s’écrit . (3.5) Si maintenant on combine (3.4) et (3.5), alors on obtient exactement (3.2) qui exprime l’holomorphie de f en z0 = x0 + iy0 . Un corollaire des lemmes 30 et 31 est la proposition suivante. Proposition 8. Soit Ω un ouvert de C et f : Ω → C. Notons f = P + iQ avec P, Q ∈ R. Alors f est holomorphe en z0 = x0 + iy0 ∈ Ω si et seulement si P et Q sont des fonctions différentiables en (x0 , y0 ) ∈ Ω et si leurs dérivées partielles vérifient (3.3). Nous finissons ce paragraphe par une remarque sur les fonctions C 1 holomorphes. Proposition 9. Une fonction f : Ω ⊂ C → C est C 1 holomorphe sur Ω si f = (P, Q) : Ω ⊂ R2 → R2 est différentiable sur Ω, les dérivées partielles de P et Q sont continues et vérifient (3.3). 3.2 3.2.1 Intégration sur des chemins Chemins paramétrés Définition 22 (Chemin et lacet). Une fonction γ : [a, b] → C est un chemin sur [a, b] si γ est continu et de classe C 1 par morceaux : il existe des points a = t0 < t1 < · · · < tm = b tels que les restrictions γi de γ à [ti , ti+1 ] sont continues et C 1 sur ]ti , ti+1 [. Une fonction γ : [a, b] → C est un lacet si c’est un chemin tel que γ(a) = γ(b). 3.2. INTÉGRATION SUR DES CHEMINS 35 Fig. 3.1 – Chemin dans un ouvert Exemple 15. Etant donné deux nombres complexes z1 et z2 , le chemin le plus simple qui les relie est γ : [0, 1] → C définie par γ(t) = (1 − t)z1 + tz2 . Attention !. Un chemin (ou un lacet) est une fonction. Il faut notamment faire la différence avec l’image de l’intervalle [a, b] par le chemin (ou le lacet) qui est une “courbe” dans C. On fait donc bien la différence entre l’objet analytique (le chemin) et l’objet géométrique (la courbe). L’exemple suivant illustre la mise en garde précédente. Exemple 16 (fondamental). Quand nous avons démontré qu’une fonction C 1 holomorphe est analytique en z0 ∈ D(0, R), nous avons introduit une intégrale faisant intervenir γ : [0, 2π] → C définie (pour r ∈]0, R[) comme suit γI (t) = z0 + reit . On peut remarquer que ce chemin est un lacet car γ(0) = z0 + r = γ(2π). L’image de [0, 2π] par le chemin est le cercle de centre z0 et de rayon r. Si maintenant on considère pour n ∈ N, γII (t) = z0 + reint . Il s’agit toujours d’un lacet et l’image de [0, 2π] par le chemin est encore le même cercle. En revanche, quand t décrit l’intervalle [0, 2π/n], γ est déjà revenu en z0 + r et à t = 2π, le chemin a décrit le cercle n fois : ce chemin fait n tours autour du point z0 dans le sens trigonométrique. Si maintenant on considère γIII (t) = z0 + re−int , alors le chemin va tourner n fois autour de z0 mais dans l’autre sens, dans le sens anti-trigonométrique. On peut aussi parcourir une même courbe le même nombre de fois mais à des “vitesses” différentes. Exemple 17. Par exemple, on peut considérer γ : [0, π] → C γIV (t) = z0 + re2it . 36 CHAPITRE 3. FONCTIONS HOLOMORPHES Fig. 3.2 – Lacet : l’exemple fondamental Dans ce cas, le chemin n’a bien parcouru le cercle qu’une fois car on s’est arrêté à t = π. Pourtant, ce n’est pas la même fonction que t ∈ [0, 2π] 7→ z0 + eit . On a tout de même envie de dire que les deux chemins se ressemblent, se valent. On introduit donc la définition suivante. Définition 23 (Chemins équivalents et chemins opposés). Soient γ1 et γ2 deux chemins sur deux intervalles [a1 , b1 ] et [a2 , b2 ]. – Les deux chemins γ1 et γ2 sont équivalents s’il existe une bijection ϕ continue, croissante et de classe C 1 par morceaux de [a2 , b2 ] dans [a1 , b1 ] telle que pour tout t ∈ [a2 , b2 ], γ2 (t) = γ1 (ϕ(t)). – Les deux chemins γ1 et γ2 sont opposés s’il existe une bijection ϕ continue, décroissante et de classe C 1 par morceaux de [a2 , b2 ] dans [a1 , b1 ] telle que pour tout t ∈ [a2 , b2 ], γ2 (t) = γ1 (ϕ(t)). Exercice 3. Montrer que les chemins γI et γIV sont équivalents et que les chemins γII et γIII sont opposés. 3.2.2 Intégration sur des chemins Maintenant que l’on sait ce qu’est un chemin, on peut intégrer une fonction f : Ω → C continue (par exemple) du moment que l’image du chemin est inclue dans Ω. Définition 24 (Intégration sur un chemin). Soit γ : [a, b] → C un chemin et f : Ω → C une fonction continue. On suppose que γ([a, b]) ⊂ Ω. L’ intégrale de f sur γ est définie comme suit Z Z b f (z)dz = f (γ(t))γ 0 (t)dt . (3.6) γ a Remarques 1. Il est utile de faire ici trois remarques. – On rappelle qu’un chemin n’est pas C 1 mais seulement C 1 par morceaux. Ainsi, il faut comprendre la formule (3.6) de la façon suivante Z m−1 X Z ti+1 f (z)dz = f (γ(t))γ 0 (t)dt . γ i=0 ti 3.2. INTÉGRATION SUR DES CHEMINS 37 – Chacune des intégrales de la formule précédente sont bien définies car f ◦γ est continue donc bornée sur les intervalles bornés [ti , ti+1 ]. – Intégrer la fonction à valeurs complexes f ◦ γ × γ 0 sur [ti , ti+1 ] signifie en fait intégrer ces parties réelles et imaginaires. Précisément, si f (γ(t))γ 0 (t) = M (t) + iN (t) , avec M, N : [a, b] → R continu par morceaux, alors Z Z b Z b f (z)dz = M (t)dt + i N (t)dt γ a a Exemple 18. On peut considérer Ω = C \ {0} et γ = γI (avec z0 = 0) défini plus haut. Alors Z 2π Z 1 1 ireit dt = 2iπ . = it z re 0 γI R Exemple 19. Soit z1 et z2 deux nombres complexes. On calcule alors [z1 ,z2 ] ez dz. Z Z 1 Z 1 ez dz = e(1−t)z1 +tz2 (z2 − z1 )dt = (z2 − z1 )ez1 e(z2 −z1 )t dt . [z1 ,z2 ] 0 0 R1 Ainsi, il faut calculer 0 eαt dt pour α ∈ C. On a envie de dire que cela vaut 1 α α (e − 1) mais ceci est à justifier. Pour cela on écrit α = β + iγ avec β, γ ∈ R et donc eαt = eβt (cos(γt) + i sin(γt)) . R1 R1 Il faut donc calculer 0 eβt cos(γt)dt et 0 eβt sin(γt)dt. Ceci peut se faire en intégrant par parties par exemple. On peut alors vérifier que Z ez dz = ez2 − ez1 . [z1 ,z2 ] Nous allons maintenant voir que l’intégrale sur un chemin ne dépend pas de sa paramétrisation. Lemme 32. Soit γ1 et γ2 deux chemins sur [a1 , b1 ] et [a2 , b2 ] respectivement, soit Ω un ouvert de C tel que γi [a, b] ⊂ Ω pour i = 1, 2. et soit f : Ω → C une fonction continue. Alors R R – Si γ1 et γ2 sont équivalents, alors γ1 f (z)dz = γ2 f (z)dz. R R – Si γ1 et γ2 sont opposés, alors γ1 f (z)dz = − γ2 f (z)dz. Démonstration. On ne montre que la première propriété, la démonstration de la seconde étant tout à fait similaire (exercice : l’écrire en détail). Soit donc ϕ : [a2 , b2 ] → [a1 , b1 ] une bijection continue croissante et C 1 par morceaux telle que γ2 (t) = γ1 (ϕ(t)). Donc γ20 (t) = γ1 (ϕ(t))ϕ0 (t). Nous allons alors appliquer la formule du changement de variables sur de “petits” intervalles [c1 , d1 ] et [c2 , d2 ] tels que c2 = γ(c1 ) et d2 = γ(d1 ) et sur lesquels γ1 et γ2 sont respectivement C 1. Z d1 Z d1 Z d2 f (γ2 (t))γ20 (t)dt = f (γ1 (ϕ(t)))γ20 (t)dt = f (γ1 (s))γ10 (s)ds c1 c1 0 c2 où s = ϕ(t) donc ds = ϕ (t)dt. Puis, on peut trouver une suite t0 = a2 < t1 < · · · < tm = b2 telle que γ2 est C 1 sur ]ti , ti+1 [ et γ1 est C 1 sur ]ϕ(ti ), ϕ(ti+1 )[ et on applique l’égalité précédente pour conclure. 38 CHAPITRE 3. FONCTIONS HOLOMORPHES Les propriétés usuelles pour l’intégrale sur un intervalle réel sont encore vraies pour l’intégrale le long d’un chemin. C’est notamment le cas de la relation de Chasles. Lemme 33. – Soit γ un chemin sur [a, b] et c ∈ [a, b]. On note alors γ1 (t) = γ(t) pour t ∈ [a, c] et γ2 (t) = γ1 (t) pour t ∈ [c, b]. Alors γ1 et γ2 sont des chemins sur les intervalles [a, c] et [c, b] et pour toute fonction continue f : C → C, Z Z Z f (z)dz = f (z)dz + f (z)dz . γ γ1 γ2 – Soit γ1 et γ2 deux chemins sur [a, c] et [c, b] et tels que γ1 (c) = γ2 (c). On pose γ(t) = γ1 (t) pour t ∈ [a, c] et γ(t) = γ2 (t) pour t ∈ [c, b]. Alors γ est un chemin et pour toute fonction continue f : C → C, Z Z Z f (z)dz = f (z)dz + f (z)dz . γ γ1 γ2 La démonstration est très simple et est laissée au lecteur. Exemple 20. Soit z1 , z2 , z3 ∈ C, distincts. On considère alors le triangle z1 , z2 , z3 et le chemin associé qui parcourt ce triangle une fois : par exemple si t ∈ [0, 1] , (1 − t)z1 + tz2 (1 − (t − 1))z2 + (t − 1)z3 si t ∈ [1, 2] , γ(t) = (1 − (t − 2))z3 + (t − 2)z1 si t ∈ [2, 3] . Alors Z ez dz = (ez2 − ez1 ) + (ez3 − ez2 ) + (ez1 − ez3 ) = 0 . γ Dans l’exemple suivant, on illustre une nouvelle fois que même si deux chemins ont des images de leurs intervalles sur lequels ils sont définis, les intégrales sur les deux chemins peuvent être différentes. Exemple 21. On considère un lacet γ quelconque défini sur [0, 1]. On va maintenant parcourir deux fois la même courbe en considérant γ̃(t) = γ(2t) si t ∈ [0, 1/2] et γ̃(t) = γ(2t − 1) si t ∈ [1/2, 1]. Alors Z Z 1 f (z)dz = f (γ̃(t))γ̃ 0 (t)dt γ̃ 0 1/2 Z f (γ(2t))2γ 0 (2t)dt + = 0 1 f (γ(2t − 1))γ 0 (2t − 1)dt 1/2 Z = Z 2 1 f (γ(t))γ 0 (t)dt . 0 Ainsi R 3.2.3 γ̃ f (z)dz = 2 R γ f (z)dz. Indice d’un point par rapport à un lacet Définition 25 (Indice d’un point par rapport à un lacet). Soit γ un lacet sur [a, b] et z0 ∈ C qui n’est pas sur l’image de γ : z0 ∈ / Γ = {γ(t) : t ∈ [a, b]}. L’ indice du point z0 par rapport au lacet γ est le nombre Z dz 1 . Indγ (z0 ) = 2iπ γ z − z0 3.2. INTÉGRATION SUR DES CHEMINS 39 Fig. 3.3 – Indices d’un point par rapport à un lacet Exemple 22 (important). On considère le lacet γI défini dans l’exemple fondamental 16 avec z0 = 0. Alors Z Z 2π dz ireit 1 = dt = 1 . IndγI (0) = 2iπ γI z reit 0 Si on considère γII avec toujours z0 = 0, on peut vérifier que IndγII (0) = n. L’exemple précédent illustre le fait que l’indice compte le nombre de fois que le lacet tourne autour de z0 . Définition 26 (Composantes connexes d’un ouvert). Soit Ω un ouvert de C. La composante connexe de Ω contenant z0 est le plus grand ensemble connexe inclus dans Ω contenant z0 . Lemme 34. Un ensemble ouvert est la réunion de ses composantes connexes. Lemme 35. Soit γ un lacet sur [a, b] et Ω = C \ Γ où Γ = {γ(t) : t ∈ [a, b]}. Alors Ω a une seule composante connexe qui n’est pas bornée. Démonstration. L’ensemble Γ est l’image du compact [a, b] de R par la fonction continue γ. C’est donc un ensemble compact de C (voir votre cours de calcul différentiel et optimisation). Donc il est borné : il existe R > 0 tel que Γ ⊂ D(0, R). Ainsi, C \ D(0, R) ⊂ C \ Γ. Or C \ D(0, R) est connexe. On peut donc considérer la composante connexe de l’un de ces points. Alors toutes les autres composantes connexes sont forcément inclues danss D(0, R). En particulier, elles ne sont pas bornées. Théorème 13. Soit γ un lacet sur [a, b] et Γ = {γ(t) : t ∈ [a, b]}. La fonction Indγ est continue sur C \ Γ, elle est à valeurs entières (relatives), constante sur chaque composante connexe de C \ Γ et nulle sur l’unique composante connexe non bornée de C \ Γ. Ce théorème est illustré par la figure 3.7. Démonstration. On considère la fonction ϕ : [a, b] → C définie par Z t γ 0 (s) ds . ϕ(t) = exp a γ(s) − z0 40 CHAPITRE 3. FONCTIONS HOLOMORPHES Fig. 3.4 – Voisinage d’une courbe On remarque tout d’abord que ϕ ne s’annule pas. On peut alors calculer ϕ0 (t) : ϕ0 (t) = ϕ(t) γ 0 (t) . γ(t) − z0 ϕ est nulle. Ainsi, pour tout On en déduit que que la dérivée de la fonction γ−z 0 t ∈ [a, b], ϕ(t) ϕ(a) = . γ(t) − z0 γ(a) − z0 Etant donné que γ est un lacet, γ(b) = γ(a) et donc Z exp(2iπIndγ (z0 )) = exp a b ! γ 0 (s) ds = ϕ(b) = ϕ(a) = 1 . γ(s) − z0 On en déduit que 2iπIndγ (z0 ) ∈ 2iπZ et donc Indγ est bien à valeurs dans Z. Par ailleurs, on peut appliquer le théorème de continuité d’une intégrale dépendant d’un paramètre (le paramètre est z0 dans notre cas) : on peut donc affirmer que Indγ : C \ Γ → C est une fonction continue. Pour démontrer ceci proprement, on pose Vε (Γ) = {z ∈ C : d(z, Γ) < ε} (voir la figure 3.4) avec d(z, Γ) est la distance du point z à la courbe Γ qui, on le rappelle, est défini comme suit d(z, Γ) = inf{|z − z1 | : z1 ∈ Γ} . On peut alors appliquer le théorème de continuité des intégrales dépendant d’un paramètre sur l’ensemble Vε (Γ) et l’on déduit que Indγ est continue sur Vε (Γ). Ceci étant vrai pour tout ε > 0, on en déduit que Indγ est continue sur ∩ε>0 Vε (Γ) = Γ. Si maintenant on considère une composante connexe C de C \ Γ, alors Indγ : C → Z est une fonction continue, définie sur un ensemble connexe et à valeurs dans un ensemble discret. On en déduit donc que cette fonction est constante. On peut utiliser le lemme suivant dont la démonstration est laissée au lecteur. Lemme 36. Soit f : E → Z continue et E connexe. Alors f est constante. 3.3. LE THÉORÈME DE CAUCHY POUR LES FONCTIONS C 1 HOLOMORPHES41 On peut démontrer ce lemme en raisonnant par l’absurde. Il nous reste à montrer que Indγ est nulle sur l’unique composante connexe de C\Γ qui n’est pas bornée. Ceci est une conséquence du théorème de convergence dominée (exercice : écrire les détails de cette affirmation : exhiber la fonction L1 indépendante du paramètre que l’on va faire tendre vers +∞ etc.). 3.3 Le théorème de Cauchy pour les fonctions C 1 holomorphes Nous allons montrer que les fonctions C 1 holomorphes sont analytiques et établir une formule qui explicite les coefficients du développement en séries entières en un point z0 comme des intégrales sur des cercles centrés sur z0 . 3.3.1 Analyticité des fonctions C 1 holomorphes Dans ce paragraphe, nous allons voir que si une fonction f est holomorphe sur un ouvert Ω et que f 0 est continue, alors f est analytique sur Ω. Nous commençons par montrer le lemme suivant. Lemme 37. Supposons que f est C 1 holomorphe sur D(0, R). On pose alors pour tout n ∈ N et r ∈]0, R[, Z f (z) 1 dz an (r) = 2iπ C + (0) z n+1 où C + (0, r) est le chemin reit pour t ∈ [0, 2π], c’est-à-dire Z 2π 1 f reit e−int dt . an (r) = n 2πr 0 1. Soit n ∈ N. Le nombre complexe an (r) ne dépend pas de r ∈]0, R[. On le notera donc simplement an . P 2. La série entière an z n a un rayon de convergence supérieur ou égal à R et pour tout z ∈ D(0, R), on a f (z) = +∞ X an z n . n=0 Remarque 15. La conclusion du lemme est que la fonction f est analytique en 0 et son DSE est valable sur D(0, R) et donc f analytique sur D(0, R). Grâce à la remarque précédente, on déduit aisément de ce lemme le théorème suivant. Théorème 14 (de Cauchy). Si f est C 1 holomorphe sur un ouvert Ω ⊂ C, alors f est analytique sur Ω. De plus, si z0P∈ Ω et R > 0 tel que D(z0 , R) ⊂ Ω, +∞ alors pour tout z ∈ D(z0 , R), on a f (z) = n=0 an (z0 )(z − z0 )n avec, pour tout n ∈ N et tout r ∈]0, R[, Z 1 f (z) dz an (z0 ) = 2iπ C + (z0 ,r) (z − z0 )n+1 42 CHAPITRE 3. FONCTIONS HOLOMORPHES Fig. 3.5 – Calcul de f (z0 ) par une intégrale sur un cercle centré sur z0 où C + (z0 , r) est le chemin z0 + reit pour t ∈ [0, 2π], c’est-à-dire Z 2π 1 an (z0 ) = f z0 + reit e−int dt . n 2πr 0 En particulier, f est holomorphe à tout ordre sur Ω et pour tout z ∈ D(z0 , R) ⊂ Ω, tout r ∈]0, R[, Z n! f (z) f (n) (z0 ) = dz 2iπ C + (z0 ,r) (z − z0 )n+1 Z 2π n! = f (z0 + reit )e−int dt . 2πrn 0 Démontrons maintenant le lemme. Démonstration du lemme 37. Soit r ∈]0, R[ et z ∈ D(0, r). On définit alors une fonction Γ : [0, 1] → C par la formule suivante : pour tout h ∈ [0, 1], Z 2π f ((1 − h)z + hreit ) − f (z) it re dt . Γ(h) = reit − z 0 R 2π Ainsi, on peut écrire Γ(h) = 0 γ(h, t)dt avec γ : [0, 1] × [0, 2π] → C définie par la formule suivante : pour tout h ∈ [0, 1], t ∈ [0, 2π], γ(h, t) = f ((1 − h)z + hreit ) − f (z) it re . reit − z La fonction Γ est bien définie car γ est bornée. En effet, |γ(h, t)| |r| |reit − z| |r| . ≤ 2 sup{|f (z 0 )| : z 0 ∈ D(0, r)|} r − |z| ≤ 2 sup{|f (z 0 )| : z 0 ∈ D(0, r)|} On veut maintenant appliquer le théorème de dérivation sous le signe somme que vous avez vu dans le cours d’intégrale de Lebesgue. Il faut d’abord étudier 3.3. LE THÉORÈME DE CAUCHY POUR LES FONCTIONS C 1 HOLOMORPHES43 la dérivabilité de l’intégrande γ. On affirme alors que cette fonction γ de deux variables réelles est de classe C 1 et ∂γ (h, t) = f 0 ((1 − h)z + hreit )reit . ∂h Par ailleurs, on utilise le fait que f 0 est continue pour affirmer que f 0 est borné sur la boule ouverte D(0, r) et ceci implique que la dérivée partielle de γ qui nous intéresse est bornée : ∂γ (h, t) ≤ sup{|f 0 (z 0 )| : z 0 ∈ D(0, r)}r . ∂h On en déduit que Γ est dérivable et que Z 2π ihΓ0 (h) = f 0 ((1 − h)z + hreit )reit dt . 0 L’intégrande de l’intégrale précédente est en fait la dérivée de la fonction t 7→ (ih)−1 f ((1 − h)z + hreit ) et on en déduit donc que Γ0 (h) = f ((1 − h)z + hrei2π ) − f ((1 − h)z + hr) = 0 . On en déduit donc que Γ est constante sur [0, 1] et vaut Γ(0) = 0. Z 2π f (reit ) − f (z) it 0 = Γ(0) = Γ(1) = re dt reit − z 0 Z 2π Z 2π reit f (reit ) it re dt − f (z) dt = it re − z reit − z 0 0 donc 2π Z reit f (re ) it dt = f (z) re − z it 0 Z 2π 0 reit dt . reit − z (3.7) On affirme maintenant que le lemme suivant est vrai. Lemme 38. Pour tout z ∈ D(0, r), Z 2π reit dt = 2π . reit − z 0 Démonstration. On utilise |z| < r pour écrire +∞ n X 1 z −int reit = = e . reit − z 1 − ze−it /r n=0 rn (3.8) De plus, il est clair que la convergenceR de cette série de fonctions de t est normale. On peut donc intervertir l’intégrale et la somme Σ dans les deux membres de (3.7). On obtient alors Z 0 2π Z 2π +∞ X 1 reit −int dt = e dt zn . n reit − z r 0 n=0 On remarque que le seul terme qui ne soit pas nul dans la série du membre de droite est le premier qui vaut 2π. 44 CHAPITRE 3. FONCTIONS HOLOMORPHES En utilisant de nouveau (3.8), on déduit du lemme et de (3.7) la formule suivante : pour tout z ∈ D(0, r), Z 2π +∞ X 1 it −int f (re )e dt zn . f (z) = n 2πr 0 n=0 On reconnait alors an (r) et on obtient ainsi pour tout z ∈ D(0, r) f (z) = +∞ X an (r)z n . n=0 Ainsi, on vient de montrer que f est analytique en 0. Par unicité des coefficients du développement d’une fonction analytique (Corollaire 5 du chapitre précédent), on enP déduit que an (r) ne dépend pas de r et que le rayon de convergence de la série an z n est plus grand que r > 0. Etant donné que l’on P a choisi r ∈]0, R[ arbitraire, on en déduit que le rayon de convergence de an z n est plus grand que R. Ceci achève la démonstration. Exemple 23. On peut considérer par exemple la fonction f (z) = z 2 . On peut alors calculer Z 2π Z 2π 1 1 2 2it −int an (r) = r e e dt = r2 e(2−n)it dt 2πrn 0 2πrn 0 0 si n 6= 2 , = 1 si n = 2 . On peut remarquer que nous avons en fait démontré un peu plus que ce qui est dit dans le lemme. Nous avons en particulier le corollaire suivant. Corollaire 12. Si f est C 1 holomorphe sur D(0, R), alors pour tout z1 ∈ D(0, R) et tout r ∈]|z1 |, R[, Z Z 2π 1 f (z) reit 1 f (z1 ) = f (reit ) it dz = dt . 2iπ C + (0,r) z − z1 2π 0 re − z1 Si maintenant, on se place au voisinage d’un point quelconque z0 d’un ouvert Ω, on obtient le corollaire plus général suivant. Corollaire 13 (Formule de Cauchy). Si f est C 1 holomorphe sur un ouvert Ω et z0 ∈ Ω, alors pour tout z1 ∈ D(z0 , R) ⊂ Ω et tout r ∈]|z1 |, R[, Z Z 2π 1 f (z) 1 reit f (z1 ) = dz = f (z0 + reit ) it dt . 2iπ C + (z0 ,r) z − (z1 − z0 ) 2π 0 re − (z1 − z0 ) 3.3.2 Quelques applications du théorème de Cauchy Dans ce paragraphe, on va utiliser le théorème de Cauchy pour montrer un certain nombre de résultats. On commence par expliquer ce que sont les inégalités de Cauchy. Lemme 39. Soit f une fonction C 1 holomorphe sur Ω et z0 ∈ Ω. Soit R > 0 tel que D(z0 , R) ⊂ Ω. Alors pour tout n ∈ N, tout r ∈]0, R[, on a |f (n) (z0 )| ≤ n! sup{|f (z0 + reit )| : t ∈ [0, 2π]} . rn 3.4. PRIMITIVES DE FONCTIONS HOLOMORPHES 45 La démonstration de ce lemme est très simple et est laissé au lecteur. Il est important de remarquer que l’ensemble des points z de la forme z0 + reit avec t ∈ [0, 2π] est en fait le cercle de centre z0 et de rayon r. Ainsi, toutes les dérivées de f en z0 sont contrôlées par les valeurs de la fonction f elle-même sur n’importe quel petit cercle centrée sur z0 et inclus dans Ω. Exemple 24. Si on applique le lemme précédent à la fonction exponentielle, on obtient la formule suivante : pour tout z0 ∈ Ω et tout r > 0, | exp(z0 )| ≤ n! n! sup{| exp(z0 + reit )| : t ∈ [0, 2π]} = n ex0 +r . n r r Cette inégalité n’est pas très intéressante : pourquoi ? On peut maintenant démontrer le théorème de Liouville. Théorème 15 (de Liouville). Soit f une fonction C 1 holomorphe sur C. Si f est bornée sur C alors f est constante. Démonstration. On utilise les inégalités de Cauchy pour déduire que pour tout n ∈ N, tout r > 0, on a |f (n) (z0 )| ≤ n! n! sup{|f (z0 + reit )| : t ∈ [0, 2π]} ≤ M n . n r r En faisant r → +∞, on en déduit que f (n) (z0 ) = 0 si n ≥ 1. En particulier f 0 = 0 sur C. Ceci implique que f est constante ; on utilise en effet le fait que si la différentielle d’une fonction est identiquement nulle sur C = R2 , la fontion est constante. On montre maintenant le théorème de d’Alembert-Gauss. Théorème 16 (de d’Alembert-Gauss). Soit P un polynôme à coefficients complexes. Si P n’est pas constant, alors P a au moins un zéro : il existe z0 ∈ C tel que P (z0 ) = 0. Démonstration. Pour démontrer ce théorème, on raisonne par contraposition. On suppose donc que P ne s’annule pas et on veut montrer que P est nécessairement constant. Or P est holomorphe sur C. Donc par le lemme 29, on en déduit, que 1/P est holomorphe sur C. De plus, il est facile de montrer que |P (z)| se comporte comme (est équivalent à) |an ||z|n quand |z| → +∞. Donc |P (z)| → +∞ quand |z| → +∞. Puisque P est continue, ceci implique que 1/P est borné sur C donc constante par le théorème de Liouville. Q.E.D. Exercice 4. Ecrire tous les détails de cette démonstration. 3.4 Primitives de fonctions holomorphes et leur analyticité Dans cette partie du chapitre, on explique rapidement pourquoi il est inutile de supposer que f 0 est continue pour montrer qu’une fonction holomorphe est analytique. Ceci est une conséquence de l’existence de primitives dans des boules (par exemple). Beaucoup de résultats seront admis. 46 CHAPITRE 3. FONCTIONS HOLOMORPHES Fig. 3.6 – Exemple d’ouvert étoilé par rapport à un point z0 3.4.1 Ouvert étoilé On introduit maintenant la notion d’ouvert étoilé. Définition 27 (Ouvert étoilé). Soit A un sous-ensemble de C et z0 ∈ A. On dit que A est étoilé par rapport à z0 si pour tout z ∈ A, le segment [z0 , z] = {(1 − t)z0 + tz : t ∈ [0, 1]} est inclus dans A. Une illustration graphique est donnée par la figure 3.6 Pour donner une idée plus précise, voici un résultat dont la démonstration est laissée en exercice au lecteur. Proposition 10. Soit A un sous-ensemble de C. – Si A est convexe alors A est étoilé par rapport à chacun de ces points. – Si A est étoilé alors A est connexe par arcs. Exercice 5. Montrer que C\] − ∞, 0] est étoilé. 3.4.2 Le théorème de Goursat Quand nous allons étudier les primitives de fonctions holomorphes, nous allons avoir besoin de montrer que l’intégrale d’une fonction holomorphe sur un triangle (qui est une chemin particulier) est nulle. Ce théorème s’appelle le théorème de Goursat et voici ce qu’il dit précisément. Théorème 17 (Goursat). Soit Ω un ouvert et z1 , z2 , z3 trois points tels que le triangle T de sommets z1 , z2 , z3 soit inclus dans Ω. Alors Z f (z)dz = 0 . T R Remarque 16. T signifie qu’on intègre sur le bord du triangle. Il faut donc choisir un sens. Un chemin est notamment donné dans l’exemple 20. Démonstration. Notons T0 le rectangle T et découpons-le en 4 sous-rectangles en considérant le milieu de chacun des trois cotés (voir la figure ??). On choisit le 3.4. PRIMITIVES DE FONCTIONS HOLOMORPHES 47 Fig. 3.7 – Découpe successive d’un triangle en quatre triangle T1 parmi les 4 nouveaux triangles S et tel que | Alors Z Z 1 f (z)dz| . | f (z)dz| ≥ | 4 T0 T1 R S f (z)dz| est maximal. On peut itérer cette construction et obtenir ainsi une suite de triangles emboités {Tn }n tels que Z Z 1 f (z)dz| ≥ | | f (z)dz| . 4 Tn Tn+1 De plus, diam Tn = 21n diam T0 → 0 quand n → +∞. En effet, le diamètre d’un triangle est la longueur de son plus grand coté et pour tout n ≥ 0, diam Tn+1 /diam Tn est constant et vaut 21 . Alors par le théorème des fermés emboités, on sait qu’il existe un point z∞ qui est dans tous les triangles Tn . En particulier, z∞ ∈ Ω. Or f est holomorphe sur Ω donc pour tout ε > 0, il existe ρε > 0 tel que pour tout z ∈ D(z∞ , ρε ), |f (z) − f (z∞ ) − f 0 (z∞ )(z − z∞ )| ≤ ε|z − z∞ |2 . (3.9) On se fixe donc ε > 0 et on choisit nε ∈ N de sorte que pour tout n ≥ nε , on a Tn ⊂ D(z∞ , ρε ). On peut alors écrire pour tout n ≥ nε , Z Z f (z)dz = [f (z) − f (z∞ ) − f 0 (z∞ )(z − z∞ )]dz + Rn (3.10) Tn Tn avec Rn défini par Z [f (z∞ ) + f 0 (z∞ )(z − z∞ )]dz . Rn = Tn Or l’intégrande est clairement la dérivée (holomorphe) de Fn (z) = f (z∞ )z + 1 0 2 2 f (z∞ )(z − z∞ ) . Donc Z Rn = a b Fn0 (γ(t))γ 0 (t)dt Z = a b (Fn ◦ γ)0 (t)dt = Fn (γ(b)) − Fn (γ(a)) = 0 48 CHAPITRE 3. FONCTIONS HOLOMORPHES car γ est un lacet. Ainsi, comme Rn = 0, on peut combiner (3.9) et (3.10) pour obtenir que pour tout n ≥ nε , on a Z 1 | f (z)dz| ≤ ε(diam Tn )2 = ε(diam T0 ) n . 4 Tn Enfin, puisqu’à chaque itération, on a choisi le triangle qui maximise l’intégrale f (z)dz, on a S Z Z n | f (z)dz| ≤ 4 | f (z)dz| ≤ ε(diam T0 ) . R T0 Tn Etant donné que ε > 0 est quelconque, la démonstration est terminée. 3.4.3 Primitives de fonctions holomorphes dans un ouvert étoilé Définition 28 (Primitive de fonction holomorphe). Soit Ω un ouvert étoilé par rapport à un point z0 . Soit f : Ω → C une fonction holomorphe. Alors F : D(z0 , ρ) → C est une primitive de f sur D(z0 , ρ) si F est holomorphe sur D(z0 , ρ) et si F 0 = f sur D(z0 , ρ). Voici le théorème. Théorème 18. Soit Ω un ouvert étoilé par rapport à un point z0 . Soit F (z) = R f (z )dz 1 1 . Alors F est une primitive de f et F est analytique sur D(z0 , ρ). [z0 ,z] R Remarque 17. Nous avons déjà utilisé la notation [z0 ,z1 ] f (z)dz. On rappelle que cela signifie que l’on considère l’intégrale de f sur la courbe γ : [0, 1] → C définie par γ(t) = (1 − t)z0 + tz1 . Démonstration. Pour montrer que F est une primitive de f , il suffit de montrer que F est holomorphe et que sa dérivée holomorphe est bien f . Ceci est une conséquence du théorème de Goursat comme nous allons le voir maintenant. Montrons que F est holomorphe en z1 ∈ Ω et que sa dérivée est f (z1 ). Pour cela, on commence par utiliser le fait que Ω est ouvert pour dire qu’il existe ρ > 0 tel que D(z1 , ρ) ⊂ Ω. On utilise ensuite le fait que Ω est étoilé par rapport à un point z0 pour dire que les triangles de sommets z0 , z1 , z1 + h sont inclus dans Ω quand h ∈ D(0, ρ). Enfin, le théorème de Goursat nous dit donc que l’intégrale de f sur ces triangles est nulle. En reformulant ce résultat en terme de fonction F , on obtient au vu de sa définition la relation suivante Z Z 1 1 1 (F (z1 + h) − F (z1 )) = f (z)dz = f (z1 + th)dt . h h [z1 ,z1 +h] 0 On utilise maintenant le fait que f est continue en z1 pour dire que, pour tout ε > 0, on peut choisir ρε < ρ de sorte que |f (z1 + H) − f (z1 )| ≤ ε pour tout H ∈ D(z1 , ρε ). On en déduit alors que Ceci finit de Alors F 0 appliquer le Donc f l’est 1 | (F (z1 + h) − F (z1 )) − f (z1 )| ≤ ε . h démontrer la première partie du théorème. = f et f est holomorphe. Donc F 0 est continue. On peut alors théorème de Cauchy 14 pour en déduire que F est analytique. aussi. 3.5. SINGULARITÉS ET CALCUL DES RÉSIDUS 3.4.4 49 Analyticité des fonctions holomorphes Dans ce paragraphe, on donne un résultat important dont la démonstration sera admise. Il s’agit de l’analyticité des fonctions holomorphes. Théorème 19 (Analyticité des fonctions holomorphes). Soit Ω un ouvert et f : Ω → C une fonction quelconque. Alors f est holomorphe si et seulement si f est analytique. Démonstration. On a vu dans le chapitre précédent que les fonctions analytiques sont holomorphes et il faut donc juste justifier que les fonctions holomorphes sont analytiques. Ensuite, on a vu qu’une fonction C 1 holomorphe (c’est-à-dire une fonction f holomorphe telle que f 0 est continue) est analytique (voir le théorème de Cauchy 14). En fait, ce théorème est encore vrai si f n’est que holomorphe. Ceci est une conséquence immédiate du théorème 18. Grâce à ce théorème, on peut réénoncer le théorème de Cauchy sous des hypothèses plus faibles. Théorème 20 (de Cauchy). Si f est holomorphe sur un ouvert Ω ⊂ C, alors f est analytique sur Ω. De plus, si zP 0 ∈ Ω et R > 0 tel que D(z0 , R) ⊂ Ω, alors +∞ pour tout z ∈ D(z0 , R), on a f (z) = n=0 an (z0 )(z −z0 )n avec, pour tout n ∈ N et tout r ∈]0, R[, Z 2π 1 f z0 + reit e−int dt . an (z0 ) = 2πrn 0 On peut réécrire cette égalité sous la forme Z 1 f (z) dz an (z0 ) = 2iπ γ0 (z − z0 )n+1 où γ0 : [0, 2π] → C est le chemin défini par γ(t) = z0 + reit . En particulier, f est holomorphe à tout ordre sur Ω et pour tout z ∈ D(z0 , R) ⊂ Ω, tout r ∈]0, R[, Z 2π Z n! n! f (z) (n) it −int f (z0 ) = f (z0 + re )e dt = dz . 2πrn 0 2iπ γ0 (z − z0 )n+1 3.5 Singularités des fonctions holomorphes et calcul des résidus Nous avons vu précédemment que la fonction z1 est holomorphe sur C \ {0}. Il est naturel de se poser la question suivante : peut-on trouver une fonction holomorphe sur C tout entier dont la restriction à C \ {0} soit holomorphe ? On peut aussi considérer la fonction (1−z)12 (z−2) . On voit bien que la fonction n’est pas bien définie en 1 et 2. Le point commun entre les deux fonctions que l’on vient de considérer est qu’elles “explosent” respectivement en 0 et en 1, 2. C’est aussi le cas de exp(1/z) que nous avons étudié en travaux dirigés. Le but de cette partie du cours est de définir, décrire et classifier les singularités des fonctions holomorphes. On rappelle que dans tout ce chapitre, Ω est un ensemble ouvert quelconque. 50 CHAPITRE 3. FONCTIONS HOLOMORPHES 3.5.1 Singularités des fonctions holomorphes Commençons par définir la notion de singularité isolée. Définition 29 (Singularité isolée). Soit z0 ∈ Ω. Si f est une fonction holomorphe sur Ω \ {z0 }, on dit que f a une singularité isolée au point z0 . Exercice 6. Quelles sont les singularités isolées de 1 z et de sin z z ? Il arrive parfois que l’on puisse facilement éliminer la singularité, que la singularité soit artificielle. Soyons précis. Définition 30 (Singularité artificielle). Soit f : Ω \ {z0 } → C une fonction holomorphe. On dit que la singularité isolée z0 est artificielle s’il existe une fonction holomorphe g : Ω → C qui coı̈ncide avec f sur Ω \ {z0 }. Ces singularités-là ne sont pas très intéressantes, du moins elles n’ont rien à nous apprendre. Pour décrire les deux autres types de singularités, on a besoin de la notation suivante. Définition 31 (Disque épointé). Soit z0 ∈ C et r > 0. Alors le disque (ouvert) épointé de centre z0 et de rayon r est le disque (ouvert) D(z0 , r) privé de son centre. On le note D∗ (z0 , r). de On veut ensuite pouvoir considérer les singularités qui sont du type de celles et de (z−1)12 (2−z) . Ces singularités sont appelées des pôles. Soyons précis. 1 z Définition 32 (Pôle). Soit f : Ω \ {z0 } une fonction holomorphe. On dit z0 est un pôle d’ordre n pour un certain entier naturel n ≥ 1 s’il existe des nombres complexes a1 , . . . , an tels que : – an n’estPpas nul et n ai – f (z) − i=1 (z−z i a une singularité essentielle en z0 . 0) Il est clair qu’une singularité articielle ne peut pas être un pôle et qu’un pôle ne peut pas ètre une singularité articielle. Mais il existe un troisième type de singularités, celui des singularités de exp(1/z). Définition 33 (Singularité essentielle). Soit f : Ω \ {z0 } une fonction holomorphe. Alors z0 est une singularité essentielle de f si, pour tout réel ρ > 0 tel que D(z0 , ρ) \ Ω, l’image du disque épointé D∗ (z0 , ρ) par f est dense dans C. Exercice 7. Montrer que 0 est une singularité essentielle de exp(1/z). Il est ici peut-être un peu moins clair que cette notion est bien distinctes des deux autres. C’est pourquoi nous énonçons le lemme suivant. Lemme 40. Soit f : Ω \ {z0 } une fonction holomorphe. – Si z0 est une singularité articielle, ce n’est ni un pôle ni une singularité essentielle. – Si z0 est un pôle, ce n’est ni une singularité artificielle ni une singularité essentielle. – Si z0 est une singularité essentielle, ce n’est ni un pôle ni une singularité artificielle. 3.5. SINGULARITÉS ET CALCUL DES RÉSIDUS 51 Démonstration. Si z0 est une singularité articielle, alors f s’étend en une fonction g : Ω → C qui est holomorphe donc continue. En particulier elle est bornée au voisinage de z0 . Ceci n’est pas le cas pour les pôles et les singularités essentielles. Si z0 est un pôle, f n’est pas borné au voisinage de z0 donc ce ne peut être une singularité artificielle. Dans le cas d’un pôle, non seulement la fontion f n’est pas borné au voisinage de z0 mais elle tend vers +∞. Donc pour ρ > 0 assez petit, on sait que |z − z0 | < ρ ⇒ |f (z)| ≥ 1 . Donc f (D∗ (z0 , ρ)) ⊂ C \ D(0, 1) et en particulier l’image du disque épointé n’est pas dense dans C. La dernière remarque permet aussi permet aussi de montrer que si z0 est une singularité essentielle, alors cela ne peut être un pôle. Cela ne peut pas non plus être une singularité artificielle car dans ce cas, f (D∗ (z0 , ρ)) est borné car f se prolonge en une fonction continue (holomorphe en fait). Le théorème important est qu’il n’existe pas d’autres types de singularité. Précisément, on a le résultat suivant. Théorème 21. Soit f : Ω \ {z0 } une fonction holomorphe. Alors soit z0 est une singularité artificielle, soit c’est un pôle, soit c’est une singularité essentielle. Avant de démontrer ce théorème, nous allons montrer le lemme suivant. Lemme 41. Soit z0 ∈ Ω et ρ > 0 tel que D(z0 , ρ) ⊂ Ω. Soit f est holomorphe sur Ω\{z0 }. Si f est borné sur D∗ (z0 , ρ), alors z0 est une singularité artificielle. Démonstration. On pose g(z) = (z − z0 )2 f (z) si z ∈ Ω \ {z0 } et g(z0 ) = 0. Alors g(z)−g(z0 ) = (z − z0 )f (z) et donc pour tout z ∈ D(z0 , ρ), z−z0 g(z) − g(z0 ) z − z0 ≤ M |z − z0 | où M = supD∗ (z0 ,ρ) |f | qui est fini par hypothèse. Ainsi, g est holomorphe en z0 . Et il est clair que g est holomorphe sur Ω \ {z0 }. Donc g est analytique en z0 (Théorème 19) et il existe donc une suite de nombres complexes (an )n tels que pour tout z ∈ D(z0 , ρ), g(z) = +∞ X an (z − z0 )n . n=0 Or g(z0 ) = g 0 (z0 ) = 0. Ainsi g(z) = (z − z0 )2 f˜(z) avec f˜(z) = +∞ X an+2 (z − z0 )n . n=0 Alors f se prolonge en une fonction holomorphe f˜ sur Ω. Donc z0 est une singularité artificielle. On peut maintenant démontrer le théorème. 52 CHAPITRE 3. FONCTIONS HOLOMORPHES Démonstration du théorème 21. Supposons que z0 n’est pas une singularité essentielle et montrons que c’est soit une singularité artificielle soit un pôle. Comme z0 n’est pas une singularité essentielle, il existe un point ω de C, une distance δ > 0 et un rayon ρ > 0 tel que pour tout z ∈ D∗ (z0 , ρ), |f (z) − ω| ≥ δ > 0 . On peut alors considérer la fonction g(z) = (f (z) − ω)−1 . Cette fonction est holomorphe sur D∗ (z0 , ρ) et est bornée par δ −1 sur D∗ (z0 , ρ). On utilise alors le lemme pour dire que g se prolonge en une fonction holomorphe sur D(z0 , ρ) tout entier. On distingue alors deux cas. Supposons d’abord que g(z0 ) 6= 0. Alors on peut choisir ρ0 ∈]0, ρ[ et trouver 0 δ > 0 tels que pour tout z ∈ D(z0 , ρ0 ), |g(z)| ≥ δ 0 > 0. On en déduit aisément que pour tout z ∈ D∗ (z0 , ρ0 ), |f (z)| ≤ |ω| + (δ 0 )−1 . Ainsi, f est une fonction holomorphe sur Ω \ {z0 } qui est bornée sur D(z0 , ρ0 ). Par le lemme, on en déduit que z0 est une singularité artificielle de f . Supposons maintenant que g(z0 ) = 0. Etant donné que g n’est pas identiquement nulle, on sait mettre la reference qu’il existe un entier m ≥ 1 tel que g(z) = (z − z0 )m g̃(z) avec g̃ holomorphe et g̃(z0 ) 6= 0. Alors on sait aussi que h(z) = g̃1 est une fonction holomorphe sur D(z0 , ρ00 ) pour ρ00 ∈]0, ρ[ assez petit. On peut donc écrire pour tout z ∈ D(z0 , ρ00 ), h(z) = m X n an (z − z0 ) + n=0 +∞ X n an (z − z0 ) = n=m+1 avec a0 6= 0 et H(z) = z ∈ D∗ (z0 , ρ00 ), f (z) P+∞ n=1 = = = m X an (z − z0 )n + (z − z0 )m H(z) n=0 an+m (z − z0 )n . On en déduit que pour tout 1 g(z) h(z) ω+ (z − z0 )m a0 ω+ + · · · + H(z) . (z − z0 )m ω+ Ainsi z0 est un pôle d’ordre m de la fonction f . 3.5.2 Fonctions méromorphes Pour définir la notion de fonctions méromorphes, nous avons tout d’abord besoin de la notion d’ensemble discret. Définition 34 (Sous-ensemble discret de C). Soit X un sous-ensemble de C. On dit que X est discret si tout point de X est un point isolé de X. On peut maintenant introduire la définition suivante. Définition 35 (Fonctions méromorphes). Soif Ω un ouvert de C et f : Ω → C une fonction quelconque. On dit que f est méromorphe sur Ω s’il existe un ensemble discret F de Ω tel que – f est holomorphe sur Ω \ F , 3.6. LE THÉORÈME DES RÉSIDUS 53 – et tout point de F est un pôle de f . Exemple 25. – Toute fonction associée à une fraction rationelle à coefficients complexes est une fonction méromorphe. – La fonction sin(z) est méromorphe sur C. z3 – Toute fonction holomorphe sur Ω est méromorphe sur Ω (choisir F = ∅). On peut construire d’autres fonctions méromorphes grâce à des opérations élémentaires. Lemme 42. Soit f et g deux fonction méromorphe sur Ω. Alors – si λ, µ ∈ C, λf + µg est une fonction méromorphe sur Ω ; – la fonction f g est méromorphe sur Ω ; – si Ω est connexe et g n’est pas identiquement nulle sur Ω, alors méromorphe sur Ω. f g est Attention .! La composition de deux fonctions méromorphes n’est pas méromorphe en général. Penser à la fonction exp(1/z). Démonstration. a completer 3.6 Le théorème des résidus Le théorème des résidus permet de calculer l’intégrale d’une fonction méromorphe sur un lacet en comptant le nombre de tour que fait le chemin autour de chaque pôle (indice du pôle) et en multipliant cet entier par le “résidu” du pôle. Avant de définir cette notion de résidu et de montrer le théorème associé, on peut essayer de voir ce qui se passe pour les fonctions holomorphes qui sont en quelque sorte des fonctions méromorphes particulières, à savoir des fonctions méromorphes sans pôle. 3.6.1 L’intégrale d’une fonction holomorphe sur un lacet Soit Ω un ouvert étoilé et f : Ω → C une fonction holomorphe. On a vu plus haut que l’intégrale d’une fonction holomorphe sur un triangle est nulle (Théorème 17 de Goursat). On peut se demander si ce résultat est encore vrai sur un lacet quelconque. La réponse est oui comme le dit le théorème suivant. Théorème 22 (Cauchy). Soit Ω un ouvert étoilé et soit f : Ω → C une fonction holomorphe. Si γ est un lacet à valeurs dans Ω, alors Z f (z)dz = 0 . γ Ce théorème est une conséquence de l’existence de primitives pour les fonctions holomorphes sur un ouvert étoilé (Théorème 18). Plus généralement, on peut montrer le lemme suivant Lemme 43. Soit Ω un ouvert étoilé et soit f : Ω → C une fonction holomorphe. Si γ est un chemin sur [a, b] à valeurs dans Ω, alors Z f (z)dz = F (γ(b)) − F (γ(a)) . γ 54 CHAPITRE 3. FONCTIONS HOLOMORPHES Démonstration. On écrit simplement Z Z b Z b f (z)dz = F 0 (γ(t))γ 0 (t)dt = (F ◦ γ)0 (t)dt γ a a = F (γ(b)) − F (γ(a)) . 3.6.2 Notion de résidus d’une fonction méromorphe Pour définir les résidus d’une fonction méromorphe, nous avons besoin du lemme suivant. Lemme 44. Soit f une fonction méromorphe sur Ω et p ∈ Ω un pôle de f . Alors il existe un unique entier mP ∈ N et une unique suite finie de nombres m complexes {a1 , . . . , am } tels que f − i=1 ai (z−p)−i a une singularité artificielle en p. Bien évidemment, la seule chose importante dans ce résultat est l’unicité de l’ordre du pôle et des nombres complexes associées. Démonstration. Supposons par l’absurde qu’il existe m1 ≥ 1, a1 , . . . , am1 ∈ C et m2 ≥ 1, b1 , . . . , bm2 ∈ C vérifiant les conditions du lemme. Ceci implique alors qu’il existeP un entier m ≥ 1 et des nombres complexes m cn c1 , . . . , cm (avec cm 6= 0) tels que n=1 (z−p) n a une singularité artificielle en p. Ceci implique en particulier que cette fonction est bornée en p ce qui est absurde. Nous noterons désormais P l’ensemble des pôles de la fonction méromorphe f sur Ω. Grâce au lemme, on peut poser la définition suivante. Définition 36. Soit f : Ω → C une fonction méromorphe et P l’ensemble de ces pôles. – L’entier m est l’ ordre P du pôle p ; m an – la fraction rationnelle n=1 (z−p) n est la partie principale de f ; – enfin a1 est le résidu de f en p. On le note Res (f, p). Nous allons démontrer plus loin un théorème (appelé théorème des résidus) qui permet de calculer l’intégrale d’une fonction méromorphe sur un lacet en fonction des résidus de la fonction méromorphe en ses pôles et l’indice de chaque pôle par rapport au lacet. Il est donc bon de pouvoir calculer les résidus d’une fonction méromorphe. Une remarque qui sera utile plus tard est que les pôles d’une fonction méromorphe sur un ouvert ne peuvent “s’accumuler” qu’au bord de Ω. Ceci est en fait une propriété de n’importe quel sous-ensemble discret d’un ouvert. Lemme 45. Soit Ω un ouvert de C et f une fonction méromorphe sur Ω. Pour tout ε > 0, il n’existe qu’un nombre fini p de pôles de f qui sont au moins à une distance ε > 0 du bord de Ω, c’est-à-dire, Vε (∂Ω) = {z ∈ Ω, d(z, ∂Ω) > ε} contient un nombre fini de pôle de f . 3.6. LE THÉORÈME DES RÉSIDUS 3.6.3 55 Ordre d’un zéro d’une fonction holomorphe rappel du chapitre 2 : A completer 3.6.4 Calcul de résidus Nous commençons par donner un lemme qui permet théoriquement de calculer le résidu d’un pôle d’une fonction méromorphe. Lemme 46. Soit f une fonction méromorphe sur Ω et p un pôle de f d’ordre m. Il existe ρ > 0 tel que la fonction h définie pour tout z ∈ D∗ (p, ρ) par h(z) = (z − p)m f (z) se prolonge de manière analytique à D(p, ρ) en une fonction h̃ et vérifie Res (f, p) = h̃(m−1) (p) . (m − 1)! Un corollaire immédiat de ce lemme est Corollaire 14 (Résidu d’un pôle d’ordre 1). Soit f une fonction méromorphe sur Ω et p un pôle de f d’ordre 1. Alors Res (f, p) = lim (z − p)f (z) . z→p Le lecteur attentif pourra aussi démontrer directement ce corollaire à partir de la définition d’un pôle d’ordre 1. Montrons maintenant le lemme. Démonstration duP lemme 46. Notons f˜ le prolongement analytique de la foncm an tion z 7→ f (z) − n=1 (z−p) n sur D(p, ρ). On peut donc dire que pour tout z ∈ D(p, ρ), on a h(z) = (z − p)m f˜(z) + m X an (z − p)m−n . n=1 Ainsi h est bien définie et h(p) = am et h(m−1) (p) = m−1 X k=0 = m−1 (z − p)m−k f˜(k) (p) + (m − 1)!a1 = (m − 1)!a1 k (m − 1)!Res (f, p) . Dans le lemme et le corollaire précédent, on doit avoir déterminé l’ordre du pôle pour pouvoir calculer le résidu, ce qui n’est pas toujours facile. Or il se trouve que les fonctions méromorphes sont en général des quotients de fonctions holomorphes. On va donc montrer comment calculer le résidu d’un quotient de fonctions holomorphes. 56 CHAPITRE 3. FONCTIONS HOLOMORPHES Lemme 47 (Résidu d’un quotient de fonctions holomorphes). Soit f et g deux fonctions holomorphes sur Ω qui ne sont pas identiquement nulles et soit p ∈ Ω un zéro commun à f et g. Notons m l’ordre du zéro de f et n l’ordre du zéro de g et supposons que n > m. On considère alors les fonctions f¯ et ḡ définies par f (z) = (z − p)m f¯(z) et g(z) = (z − p)n ḡ(z) . Par définition de l’ordre d’un zéro d’une fonction holomorphe, on sait que f¯(p) 6= 0 et ḡ(p) 6= 0 et f¯, ḡ sont holomorphes sur Ω. ¯ Alors les fonctions h = fg et h̄ = fḡ sont méromorphes sur Ω et présentent respectivement un pôle d’ordre n−m et une singularité artificielle en p. De plus, h̄(n−m+1) (p) f . Res ( , p) = g (n − m + 1)! Démonstration. Par le lemme sur les opérations élémentaires sur les fonctions méromorphes, les fonctions h et h̄ sont méromorphes sur Ω. De plus, comme ḡ(p) 6= 0, on en déduit que h̄ est borné au voisinage de p donc p est une singularité artificielle de h̄. Soit maintenant ρ > 0 tel que h̄ est holomorphe sur D(p, ρ), donc analytique en p. On peut donc écrire pour tout z ∈ D(p, ρ) h(z) = h̄(z) . (z − p)n−m Ainsi h a un pôle d’ordre n − m et par le lemme 46, on a Res (h, p) = h̄(n−m−1) (p) . (n − m − 1)! Corollaire 15. Soit p ∈ Ω et f, g deux fonctions holomorphes non identiquement nulles sur Ω. On suppose que f et g ont un zéro commun d’ordre respectif m et m + 1. Alors fg est méromorphe sur Ω et p est un pôle d’ordre 1. De plus, f f (m) (p) Res ( , p) = (m + 1) (m+1) . g g (p) Démonstration. On pose encore une fois f¯(z) = (z − p)−m f (z) et ḡ(z) = (z − (m) (m+1) (p) . Il p)−m−1 g(z). Alors on a vu reference que f¯(p) = f (p) et ḡ(p) = g m! (m+1)! est maintenant facile de conclure. 3.6.5 Théorème des résidus et formule de Cauchy généralisée Pour donner une idée de ce que dit le théorème des résidus, voici tout d’abord un lemme. Lemme 48. Soit p ∈ C, n ∈ Z et γ un lacet sur [a, b]. On suppose que p ∈ /Γ= γ([a, b]). Alors Z dz 0 si n 6= 1 = n 2iπIndγ (p) si n = 1 . γ (z − p) 3.6. LE THÉORÈME DES RÉSIDUS 57 Démonstration. Il suffit de traiter le cas n 6= 1. Dans ce cas, (n − 1)−1 (z − p)1−n est une primitive de f sur C \ {p}. Alors Z Z b γ 0 (t) dz = dt n n a (γ(t) − p) γ (z − p) Z b = ((n − 1)−1 (γ − p)1−n )0 (t)dt a (n − 1)−1 ((γ(b) − p)1−n − (γ(a) − p)1−n ) . = Il suffit maintenant d’utiliser le fait que γ(a) = γ(b) pour conclure. On peut maintenant énoncer le théorème des résidus. Théorème 23. Soit Ω un ouvert étoilé par rapport à un point z0 , γ un lacet sur [a, b] á valeurs dans Ω et f une fonction méromorphe sur Ω. Notons P l’ensemble des pôles de f et Γ = γ([a, b]). On suppose que P ∩ Γ = ∅. Alors – L’ensemble Pγ des pôles dont l’indice par rapport à γ n’est pas nul est fini. – Si Pγ 6= ∅, alors Z X f (z)dz = 2iπ Indγ (p)Res (f, p) ; γ Si Pγ = ∅, alors R γ p∈Pγ f (z)dz = 0. Démonstration. Le fait que Pγ est fini est une conséquence du lemme suivant sur les ensembles étoilés contenant un ensemble discret et un lacet. Lemme 49. Soit Ω un ouvert étoilé par rapport à z0 . Les ensembles Ωε,R définis pour tout ε > 0, R > 0 par Ωε,R = {z ∈ Ω ∩ D(z0 , R) : ∀t ∈ [0, 1], d(tz + (1 − t)z0 , C \ Ω) > ε} sont ouverts et étoilés par rapport à z0 . De plus, si γ est un lacet sur [a, b] à valeurs dans Ω, alors il existe ε(γ) > 0, R(γ) > 0 tel que γ([a, b]) ⊂ Ωε(γ),R(γ) . Enfin, si F est un sous-ensemble discret de Ω, alors F ∩ Ωε(γ),R(γ) est fini et pour tout p ∈ F \ Ωε(γ),R(γ) , Indγ (p) = 0. Démonstration. a completer. (voir la figure 3.8). Par ailleurs, par la définition pour tout p ∈ Pγ , il existe mp et Pmp d’un pôle, ap1 , . . . , apmp tels que f (z) − i=1 ai (z − p)−i a une singularité essentielle en p. Il P Pmp est alors clair que f (z)− p∈Pγ i=1 ai (z −p)−i a un nombre fini de singularités essentielles et se prolonge donc R en une fonction analytique g sur l’ouvert étoilé Ωε(γ),R(γ) . On sait donc que γ g(z)dz = 0. Il vient donc, grâce au lemme 48, que f vérifie Z Z mp X X dz f (z)dz = ai (z − p)i γ γ p∈Pγ i=1 X = 2iπa1 Indγ (p) p∈Pγ = X p∈Pγ 2iπRes (f, p)Indγ (p) . 58 CHAPITRE 3. FONCTIONS HOLOMORPHES Fig. 3.8 – Localisation des singularités “enlacées” Ceci achève la démonstration du théorème des résidus. Chapitre 4 Transformées de Fourier et de Laplace La transformée de Fourier est une généralisation des séries de Fourier. Elle est très utile pour essayer de reconstruire un signal à partir d’une information partielle. D’une point de vue numérique, une méthode très efficace, appelée “transformée de Fourier rapide” ou FFT (fast Fourier transform). Nous n’aborderons pas ce point. En revanche, nous présenterons ensuite la transformée de Laplace qui est une sorte de généralisation de la transformée de Fourier. Elle est par exemple utile lorsque l’on veut reconstruire des signaux “causaux”, c’est-àdire des signaux f (t) définis par exemple uniquement pour t > 0. 4.1 4.1.1 Rappels sur L1 (R), L2 (R) et L∞ (R) Fonctions intégrables et essentiellement bornées Avant de rappeler ce qu’est une fonction intégrable, nous avons besoin de rappeler ce qu’est la tribu borélienne et ce que sont les fonctions mesurables. Définition 37 (Tribu borélienne). La tribu borélienne est la plus petite tribu qui contient les intervalles de R. On la note B. Définition 38 (Fonctions mesurables). Une fonction f : R → R est mesurable si pour tout intervalle I de R, f −1 (I) est un borélien de R. Vous avez ensuite vu en cours d’intégration de Lebesgue que l’on peut définir l’intégrale de n’importe quelle fonction positive. En revanche, c’est intégrale peut être infinie. Les fonctions intégrables sont les fonctions f dont l’intégrale de |f | est finie. Définition 39 (Fonctions intégrables). Soit f : R → R une fonction mesurable. La fonction f est intégrable si Z |f (x)|dx < +∞ . R Exemple 26. La fonction tion ? ln x 1+|x|2 est intégrable. Pouvez-vous justifier cette asser- 59 60 CHAPITRE 4. TRANSFORMÉES DE FOURIER ET DE LAPLACE 4.1.2 Les espaces vectoriels normés Lp (R), p = 1, 2, ∞ Dans ce paragraphe, on munit notamment l’espace vectoriel des fonctions intégrables d’une norme. On rappelle donc ce qu’est une norme sur un espace vectoriel. Définition 40 (Norme et espace vectoriel normé). Soit E un espace vectoriel et N : E → R une fonction. Alors N est une norme sur E si – Pour tout e ∈ E, N (e) ≥ 0. – Pour tout e, f ∈ E : N (e + f ) ≤ N (e) + N (f ) (inégalité triangulaire). – Pour tout λ ∈ R et e ∈ E, N (λe) = |λ|N (e) – N (e) = 0 ⇔ e = 0. Alors (E, N ) est un est espace vectoriel normé. Les fonctions intégrables Commençons par noter l’ensemble des fonctions numériques sur R qui sont intégrables de la façon suivante L1 (R) . On voudrait munir cet espace d’une norme. Il est naturel de vouloir considérer la norme suivante Z kf k1 = |f (x)|dx . Lemme 50. Soit f, g deux fonctions mesurables et λ ∈ R. Alors kf + gk1 ≤ kf k1 + kgk1 kλf k1 = |λ|kf k1 kf k1 = 0 ⇔ ∃N ∈ B : ∀x ∈ / N, f (x) = 0 . Ainsi, si l’on veut pouvoir munir l’espace des fonctions intégrables de cette norme, il faut identifier des “paquets” de fonctions entre elles. Définition 41 (Fonctions équivalentes). Soit f, g : R → R deux fonctions mesurables. On dit que f est équivalente à g s’il existe un ensemble N de mesure nulle tel que f (x) = g(x) pour tout x ∈ R \ N . On note alors f ∼ g. Lemme 51. Si f ∈ L1 (R) et g ∼ f alors g ∈ L1 (R). Ainsi, on peut définir les classes d’équivalence de l’espace L1 (R). Définition 42 (Classes d’équivalence). Soit f ∈ L1 (R). Alors la classe d’équivalence de f est l’ensemble des fonctions g qui sont équivalentes à f . Exemple 27. Les fonctions suivantes n si x = n ∈ N f1 (x) = 0 sinon. exp(n) si x = n ∈ N f2 (x) = 0 sinon. exp(x) si x ∈ Q f2 (x) = 0 sinon. sont dans la classe d’équivalence de la fonction identiquement nulle. 4.1. RAPPELS SUR L1 (R), L2 (R) ET L∞ (R) 61 Ainsi, on peut définir l’espace L1 (R) comme l’ensemble des “classes d’équivalence” de L1 (R) et obtient ainsi un espace vectoriel normé. Ainsi, on déduit immédiatement du lemme 50 le lemme suivant Lemme 52. L’espace (L1 (R), k · k1 ) est un espace vectoriel normé. On rappelle enfin une propriété importante des fonctions intégrables que vous avez vu en cours d’intégration. Lemme 53. Soit f ∈ L1 (R). Alors la fonction τ 7→ f (x + τ ) est une fonction continue de R dans L1 (R). En particulier, Z lim |f (x + τ ) − f (x)|dx = 0 . τ →0 Les fonctions de carrés intégrables On peut maintenant définir les fonctions de carrés intégrables. Définition 43 (Fonctions de carrés intégrables). Soit f : R → R une fonction mesurable. On dit que f est de carré intégrable si f 2 ∈ L1 (R). On peut alors définir sZ kf k2 = |f (x)|2 dx . Voici une inégalité qui va être très utile. Lemme 54 (Inégalité de Cauchy-Schwarz). Soit f et g deux fonctions mesurables. Alors sZ sZ Z |f (x)g(x)|dx ≤ |f (x)|2 dx |g(x)|2 dx . En particulier, si f et g sont de carrés intégrables, alors le produit f g est une fonction intégrable. Démonstration. On commence par supposer que f et g sont positives. Ensuite, on remarque tout d’abord que Z Z Z 1 |f (x)g(x)|dx ≤ ( |f (x)|2 dx + |g(x)|2 dx) . 2 Ceci est une conséquence de l’inégalité ab ≤ 21 (a2 + b2 ) valable pour n’importes quels réels a, b ∈ R. R Soit t ∈ R. On sait alors que |f (x) + tg(x)|2 dx ≥ 0. Or Z Z Z Z |f (x) + tg(x)|2 dx = t2 g 2 (x)dx + 2t f (x)g(x)dx + f 2 (x)dx . On dit donc qu’un polynôme de degré deux est toujours positif. Cela veut dire que son discriminant est négatif ou nulle. Et on obtient exactement l’inégalité désirée. 62 CHAPITRE 4. TRANSFORMÉES DE FOURIER ET DE LAPLACE On rencontre alors la même difficulté que pour les fonctions intégrables : cette norme n’en est en fait pas tout à fait une et il faut identifier un certain nombre de fonctions pour obtenir un espace vectoriel normé. Définition 44. L’espace L2 (R) est l’espace des classes d’équivalence des fonctions de carrés intégrables. Lemme 55. L’espace (L2 (R), k · k2 ) est un espace vectoriel normé. Démonstration. On veut d’abord montrer que L2 (R) est un espace vectoriel. Pour cela, il faut notamment montrer que si f, g ∈ L2 (R), alors f + g ∈ L2 (R). C’est d’ailleurs la seule chose difficile. Pour cela, il faut utiliser l’inégalité de Cauchy-Schwarz (on peut faire sans mais on gagne du temps pour la suite). On écrit Z Z Z Z 2 2 (f + g) (x)dx = f (x)dx + 2 f (x)g(x)dx + g 2 (x)dx Par l’inégalité de Cauchy-Schwarz, on sait que f g est intégrable et Z |f g|(x)dx ≤ kf k2 kgk2 . En combinant cette inégalité et l’égalité précédente, on obtient Z Z Z 2 2 (f + g) (x)dx ≤ f (x)dx + 2kf k2 kgk2 + g 2 (x)dx = kf k22 + 2kf k2 kgk2 + kgk22 = (kf k2 + kgk2 )2 . En prenant la racine carrée de cette inégalité, on en déduit que f + g est de carré intégrable et que kf + gk2 ≤ kf k2 + kgk2 . Ainsi, on a aussi montré que l’inégalité triangulaire est vérifiée pour k · k2 . Il est alors aisé de montrer que k · k2 est une norme. Les fonctions essentiellement bornées On veut maintenant parler des fonctions mesurables bornées et munir l’ensemble de ces fonctions d’une norme. Au vue de la discussion des paragraphes précédents, il est naturel de considérer la classe de chaque fonction mesurable bornée. Les fonctions qui sont dans cette classe ne sont alors plus bornées, en revanche elles sont bornées si on enlève un ensemble de mesure nulle. Ce sont des fonctions essentiellement bornées. Voici une définition précise. Définition 45 (Fonctions essentiellement bornées). Soit f : R → R. La fonction f est essentiellement bornée s’il existe un ensemble de mesure nulle et une constante C > 0 tel que ∀x ∈ / N, |f (x)| ≤ C . (4.1) On peut alors considérer l’ensemble L∞ (R) des fonctions essentiellement bornées et le munir de la norme suivante kf k∞ = inf{C > 0 : ∃N tel que (4.1) est vraie} . Alors 4.1. RAPPELS SUR L1 (R), L2 (R) ET L∞ (R) 63 Lemme 56. L’espace (L∞ (R), k · k∞ ) est un espace vectoriel normé. La seule chose à justifier dans ce lemme est l’équivalence suivante kf k∞ = 0 ⇔ ∃N ∈ B : ∀x ∈ / N, f (x) = 0 . Et ceci est clair à partir de la définition de k·k∞ (exercice : écrire tous les détails de cette dernière assertion). 4.1.3 Complétude des espaces Lp (R), p = 1, 2, ∞ Avant d’énoncer le théorème de Riesz-Fréchet, on rappelle ce que sont une suite de Cauchy et un espace complet. Définition 46 (Suites de Cauchy). Soit (E, | · |E ) est espace vectoriel normé. Une suite (xn )n d’éléments de E est une suite de Cauchy si pour tout ε > 0, il existe N ∈ N tel que pour tout n, m ≥ N , |xn − xm |E < ε . Définition 47 (Espace complet). Un espace vectoriel normé est complet si toute suite de Cauchy est convergente. Voici le théorème important. Théorème 24 (de Riesz-Fréchet). Les trois espaces fonctionnels Lp (R), p = 1, 2, +∞ sont complets. La démonstration de ce théorème n’est pas très difficile. Ceci dit, cela a déjà été évoqué dans le cours d’intégration et vous reverrez tout cela très en détail au second semestre dans le cours d’analyse fonctionnelle. 4.1.4 Convolution Définition 48 (Convolution). Soit f, g : R → R deux fonctions mesurables. La fonction convolée f ? g est définie pour x ∈ R par la formule Z f ? g(x) = f (x − y)g(y)dy . Proposition 11. Soit f et g deux fonctions mesurables. – Si f ? g est bien définie en x ∈ R, alors Z f ? g(x) = f (y)g(x − y)dy . – Si f ∈ L1 (R) et g ∈ L∞ (R), alors f ? g est bien définie sur R tout entier, f ? g ∈ L∞ (R) et kf ? gk∞ ≤ kf k1 kgk∞ . – Si f, g ∈ L2 (R), alors f ?g est bien définie sur R tout entier, f ?g ∈ L∞ (R) et kf ? gk∞ ≤ kf k2 kgk2 . 64 CHAPITRE 4. TRANSFORMÉES DE FOURIER ET DE LAPLACE 4.2 Transformée de Fourier Dans cette partie du chapitre, nous définissons la transformée de Fourier des fonctions intégrables. Nous verrons aussi une propriété intéressante des fonctions qui sont à la fois intégrables et de carrés intégrables. L’année prochaine, vous verrez que la transformée de Fourier s’étend en fait “naturellement” à l’ensemble des fonctions de carrés intégrables. 4.2.1 Définition Définition 49 (Transformée de Fourier). Soit f ∈ L1 (R). La transformée de Fourier de f en ξ ∈ R est Z 1 f (x)e−ixξ dx . fˆ(ξ) = √ 2π Remarque 18. En probabilités, la notion de fonction caractéristique d’une variable aléatoire est très proche de la notion de transformée de Fourier. Attention tout de même au détail car les probabilistes prennent en général d’autres conventions. Exemple 28 (Transformée de Fourier de la “fonction porte”). Soit Π(x) la fonction qui vaut 1 si x ∈] − 1, 1[ et 0 sinon est r 2 sin(ξ) . Π̂(ξ) = π ξ Exemple 29 (Transformée de Fourier de fractions rationnelles). On a vu à la fin du chapitre précédent comment calculer la transformée de Fourier de fractions rationnelles grâce au théorème des résidus. Exemple 30 (Transformée de Fourier de e−|x| ). A titre d’exercice, vous pouvez montrer que la transformée de Fourier de e−|x| est r 1 2 . π 1 + |ξ|2 On peut tout d’abord se demander si fˆ est bien définie. La réponse est donnée par le lemme suivant. Lemme 57. Si f ∈ L1 (R), alors fˆ est une fonction continue et telle que 1 kfˆk∞ ≤ √ kf k1 . 2π Enfin, fˆ(ξ) tend vers 0 quand |ξ| → +∞. Démonstration. Le fait que fˆ est bornée est une conséquence plus ou moins immédiate de la définition de la transformée de Fourier. La continuité de fˆ résulte quant à elle du théorème de continuité d’une intégrale dépendant d’un paramètre. Pour démontrer le fait que fˆ tend vers 0 à l’infini, on commence à écrire Z Z 1 π 1 −iξ(x+ π ) ˆ ξ f (ξ) = − √ f (x)e dx = − √ f (u − )e−iξu du ξ 2π 2π 4.2. TRANSFORMÉE DE FOURIER 65 On a utilisé le fait que eiπ = −1. Ainsi, on peut écrire que fˆ est la demi-somme des deux formules que l’on a maintenant à notre disposition : Z π 1 ˆ [f (x) − f (x − )]e−iξx dx f (ξ) = 2 ξ et donc 1 |fˆ|(ξ) ≤ 2 Z |f (x) − f (x − π )|dx . ξ On peut alors utiliser le lemme 53 et déduire que quand |ξ| → +∞, on a bien fˆ(ξ) tend vers 0. 4.2.2 Propriétés de la transformée de Fourier Voici une première propriété de la transformée de Fourier. Proposition 12 (Linéarité de la transformée de Fourier). Soit f, g ∈ L1 (R) et λ, µ ∈ R. Alors λf\ + µg = λfˆ + µĝ. Ceci est relativement évident à partir de la définition. Voici d’autres propriétés de la transformée de Fourier. On va voir qu’on peut lire sur la transformée de Fourier un certain nombre de propriété de la fonction de départ. On peut d’abord énoncer les résultats de façon informelle : – si on translate le signal, alors on module en fréquence sa transformée de Fourier. – Plus un signal est étalé, plus sa transformée de Fourier est concentrée. – plus un signal est régulier (c’est-à-dire plus il a de dérivées), plus sa transformée de Fourier décroit rapidement. Pour pouvoir énoncer ces propriétés de façon rigoureuse, on commence par définir les fonctions suivantes. Définition 50 (Translatée et dilatée d’une fonction). Soit a ∈ R et f : R → R. On définit alors la translatée τa f : R → R de f par la formule suivante τa f (x) = f (x − a) . On définit aussi la dilatée fa : R → R de f la formule suivante fa (x) = 1 x f( ) . a a Proposition 13. Soit f ∈ L1 (R) et a ∈ R. – (dualité translation/modulation) Pour tout ξ ∈ R, τd a f (ξ) i(·)a f (ξ) e\ = e−iξa fˆ(ξ) = τa fˆ(ξ) – (dualité concentration/étalement) Pour tout ξ ∈ R, fˆa (ξ) = a(fˆ) a1 (ξ) . 66 CHAPITRE 4. TRANSFORMÉES DE FOURIER ET DE LAPLACE – (dualité régularité/décroissance) Supposons que f soit dérivable de dérivée intégrable. Alors pour tout ξ ∈ R, fˆ0 (ξ) = iξ fˆ(ξ) . En particulier, fˆ décroit alors à l’infini plus vite que la fonction 1 |ξ| . Supposons maintenant que f et x 7→ xf (x) soit intégrable. Alors fˆ est dérivable et \ (fˆ)0 (ξ) = −i(·)f (·)(ξ) . 4.2.3 Formule de Fourier inverse Voici le premier résultat important que nous admettrons. Théorème 25 (Inversion de Fourier). Soit f ∈ L1 (R) telle que fˆ ∈ L1 (R). Alors Z 1 fˆ(ξ)eixξ dξ . f (x) = √ 2π En utilisant la linéarité de la transformation de Fourier, on déduit alors immédiatement du théorème précédent le corollaire suivant Corollaire 16. Soit f, g deux fonctions intégrables telles que fˆ, ĝ sont intégrables. Si fˆ et ĝ sont égales, alors f et g le sont aussi. 4.2.4 Formule de Bessel-Parseval Voici le second résultat important que nous admettrons. Théorème 26 (Egalité de Bessel-Parseval). Soit f ∈ L1 (R) ∩ L2 (R). Alors fˆ ∈ L2 (R) et kf k2 = kfˆk2 c’est-à-dire Z 2 f (x)dx = Z |fˆ|2 (ξ)dξ . En particulier, grâce à la linéarité de la transformation de Fourier, on en déduit immédiatement le corollaire suivant Corollaire 17. Soit f et g deux fonctions dans ∈ L1 (R) ∩ L2 (R). Alors fˆ et ĝ sont de carrés intégrables et kf − gk2 = kfˆ − ĝk2 En particulier, si deux fonctions de L1 (R) ∩ L2 (R) ont la même transformée de Fourier, elles sont égales. 4.3 Transformée de Laplace Comme annoncé au début de ce chapitre, la transformation de Laplace est une opération sur les fonctions qui ne sont définies que sur R+ , c’est-à-dire pour les fonctions f : R+ → R. Autre différence importante : alors que la transformée de Fourier est définie sur R, on va définir la transformée de Laplace sur le plan complexe. On va alors voir que l’on définit une fonction holomorphe. Ceci explique et justifie la présence de ce dernier chapitre dans ce cours d’analyse complexe. 4.3. TRANSFORMÉE DE LAPLACE 4.3.1 67 Définition et convergence Définition Définition 51. Soit s ∈ C et f : R+ → R. On suppose que t 7→ f (t)e−st est une fonction intégrable sur R+ . La transformée de Laplace de la fonction f au point s ∈ C est définie par la formule suivante Z +∞ L(f )(s) = f (t)e−st dt . 0 Exercice 8. Calculer la transformée de Laplace des fonctions suivantes : exp, 2 cos, sin, cosh, sinh, t 7→ tn , t 7→ e−t . La dernière transformée de Fourier pourra être exprimée en utilisant la fonction de répartition de la gaussienne centrée réduite. Abscisse et demi-plan de convergence absolue Nous commençons par faire deux remarques. Remarque 19. Une première remarque importante est que l’abscisse de s joue un rôle important dans la convergence de la transformée de Laplace, alors que son ordonnée n’en joue pas. En effet, si L(f )(s) est bien définie, alors L(f )(s0 ) l’est aussi pour tout nombre complexe s0 qui a la même partie réelle que s. Remarque 20. Une autre remarque importante est que si s0 est un nombre complexe tel que <(s0 ) ≥ <(s) et que L(f )(s) est bien définie, alors L(f )(s0 ) est aussi bien définie. Ceci est une conséquence de l’inégalité suivante 0 |f (t)e−s t | ≤ |f (t)e−st | . Ainsi, ces deux remarques permettent de conclure que le domaine de définition de la transformée de Laplace d’une fonction f est nécessairement un demi-plan “tourné vers la droite”. Définition 52 (Abscisse et demi-plan de convergence absolue). On considère A le sous-ensemble de R suivant A = {s ∈ R : e−st f (t) ∈ L1 (R+ )} . L’ abscisse de convergence absolue de Lf est alors définie par ξ(f ) = inf A . Le demi-plan de convergence absolue de Lf est défini par Π(ξ(f )) = {s ∈ C : <(s) > ξ(f )} . Cette définition est illustrée par la figure ?? Grâce aux deux remarques précédentes, on peut obtenir le lemme suivant Lemme 58. Soit f : R+ → R. – Il existe un nombre complexe s0 ∈ C telle que e−s0 t f (t) est intégrable sur R+ si et seulement si inf A < +∞. – Dans le cas où inf A < +∞, alors pour tout s ∈ Π(f ), e−st f (t) est intégrable sur R+ . 68 CHAPITRE 4. TRANSFORMÉES DE FOURIER ET DE LAPLACE Fig. 4.1 – Abscisse et demi-plan de convergence absolue Remarque 21 (importante). On ne sait pas en général si la transformée de Laplace est bien définie sur le bord du demi-plan. On rencontre la même incertitude que sur le bord du disque de convergence d’une série entière. En effet, tout peut se produire sur la droite d’abscisse de convergence absolue. Calcul de l’abscisse de convergence absolue Dans ce paragraphe, on explique comment calculer l’abscisse de convergence absolue d’une transformée de Laplace. Soit on utilise la définition, soit on utilise un principe de comparaison. Proposition 14. Soit f, g : R+ → R deux fonctions mesurables. – S’il existe M > 0 telle que pour tout t > 0 , |f (t)| ≤ M |g(t)|, alors ξ(f ) ≥ ξ(g). – Si f et g sont continues et si f ∼ g quand t → +∞, alors ξ(f ) = ξ(g). Exercice 9. Démontrer la proposition précédente. 4.3.2 Opérations élémentaires sur la transformée de Laplace Pour énoncer les effets des différentes opérations que l’on peut faire sur les fonctions et voir leur effet sur les transformées de Laplace, il est utile d’introduire la notation suivante. Définition 53. Soit ξ ∈ R ∪ {−∞}. L’ensemble Lξ (R+ ) est composé de toutes les fonctions numériques mesurables sur R+ d’abscisses de convergence absolue ègales à ξ. On commence par voir l’effet d’une combinaison linéaire. Nous allons voir que les choses sont tout à fait analogue avec ce qui se passe pour les séries entières. 4.3. TRANSFORMÉE DE LAPLACE 69 Commençons par voir ce qui se passe lorsque l’on mutliplie une fonction par une constante. Lemme 59 (Multiplication par une constante). Soit λ ∈ R et f ∈ Lξ (R+ ) pour un certain ξ ∈ R ∪ {−∞}. Alors λf ∈ Lξ (R+ ) et ∀s ∈ Π(ξ), L(λf )(s) = λLf (s) . Lemme 60 (Addition). Soit f ∈ Lξ (R+ ) et g ∈ Lξ0 (R+ ) avec ξ, ξ 0 ∈∈ R ∪ {−∞}. Alors ξ(f + g) ≤ max(ξ(f ), ξ(g)) et ∀s ∈ Π(max(ξ(f ), ξ(g))), L(f + g)(s) = Lf (s) + Lg(s) . De plus, si ξ(f ) 6= ξ(g), alors ξ(f + g) = max(ξ(f ), ξ(g)). Ensuite, on peut voir l’effet des translations et des dilatations sur les transformées de Laplace. Lemme 61 (Translation et dilatation). Soit f ∈ Lξ (R+ ) pour un certain ξ ∈ R ∪ {−∞}. – Si on pose τa f (t) = f (t − a) si t > a et 0 sinon, alors ξ(τa f ) = ξ(f ) et pour tout s ∈ Π(ξ(f )), L(τa f )(s) = e−as Lf (s). – Soit a ∈ R. L’abscisse de convergence de t 7→ e−at f (t) est ξ(f ) − a (avec la convention −∞ − a = −∞) et pour tout s ∈ Π(ξ(f ) − a), L(t 7→ e−at f (t)) = Lf (s + a) . – Soit a ∈ R+ . On rappelle que fa (t) = a1 f ( at ). Alors ξ(fa ) = aξ(f ) et pour tout s ∈ Π(aξ(f )), on a L(fa )(s) = Lf (as) . Convolution, dérivation et multiplication On commence par définir le produit de convolution de deux fonctions définies sur R+ . Définition 54 (Produit de convolution). Soit f ∈ Lξ (R+ ) et g ∈ Lξ0 (R+ ) pour Rt certains ξ, ξ 0 ∈ R ∪ {+∞}. La fonction h : t 7→ 0 f (t − u)g(u)du est le produit de convolution de f et g. On le note f ? g. On cherche alors à connaı̂tre le domaine de définition de f ? g. Lemme 62 (Estimation de l’abscisse de convergence absolue de f ? g). Soit f ∈ Lξ (R+ ) et g ∈ Lξ0 (R+ ) pour certains ξ, ξ 0 ∈ R ∪ {+∞}. Le produit f ? g est défini presque partout et mesurable sur R+ . De plus, ξ(f ? g) ≤ max(ξ, ξ 0 ). Remarque 22. Cette définition est cohérente avec la définition du produit de convolution donnée dans la partie consacrée à la transformée de Fourier. En effet, on peut vérifier que cela revient à convoler sur R est fonctions f 1R+ et g1R+ où 1R+ (x) = 1 si x ≥ 0 et 0 sinon. 70 CHAPITRE 4. TRANSFORMÉES DE FOURIER ET DE LAPLACE Rt Démonstration. On va montrer que h(t) = 0 |f (t − u)g(u)|du est finie presque partout. Tout d’abord, cette fonction à valeurs positives (éventuellement infinies) est bien mesurable pour la mesure produit. De plus, pour s > max(ξ, ξ 0 ), Z +∞ Z +∞ ( |f (t − u)|e−s(t−u) du)|g(u)|e−su du = L(|f |)(s)L|g|(s) < +∞ . 0 0 Ainsi s > ξ(h). Ceci étant valable pour tout s > max(ξ, ξ 0 ), on en déduit que ξ(h) ≤ max(ξ, ξ 0 ). Il est maintenant facile de conclure. On peut maintenant énoncer le théorème important. Au vu de la démonstration du lemme précédent, c’est une simple application du théorème de FubiniTonelli. Théorème 27. Soit f ∈ Lξ (R+ ) et g ∈ Lξ0 (R+ ) pour certains ξ, ξ 0 ∈ R∪{+∞}. Alors pour tout z ∈ Π(max(ξ, ξ 0 )), on a L(f ? g)(s) = Lf (s)Lg(s) . Les deux lemmes qui suivent permettent de calculer les transformées de laplace d’une primitive et d’une dérivée. Lemme 63 (Transformée de Laplace d’une primitive). Soit f ∈ Lξ (R+ ) pour Rt un certain ξ ∈ R ∪ {−∞}. On pose F (t) = 0 f (s)ds pour tout t > 0. Alors F est bien définie et ξ(F ) ≤ max(0, ξ) et pour tout s ∈ Π(max(0, ξ)), on a LF (s) = Lf (s) . s Démonstration. Appliquer le résultat sur le produit de convolution avec g = 1R+ . Lemme 64 (Transformée de Laplace d’une dérivée). Soit f ∈ Lξ (R+ ). On suppose de plus que f ∈ C 1 ((0, +∞)) et que f 0 ∈ Lξ0 (R+ ). Alors ξ ≤ max(0, ξ 0 ) et pour tout s ∈ Π(max(0, ξ 0 )), on a Lf 0 (s) = sLf (s) . Démonstration. Il suffit de remarquer que f (t) = f (0)+ les résultats sur : – la transformée de Laplace d’une primitive et – la transformée de Laplace d’une somme. 4.3.3 Rt 0 f (s)ds et d’appliquer Holomorphie Nous allons ici voir que la transformée de Laplace est holomorphe sur son demi-plan de convergence absolue. Théorème 28 (Holomorphie de la transformée de Laplace). Soit f ∈ Lξ (R+ ) pour un certain ξ ∈ R ∪ {−∞}. Alors la transformée de Laplace est holomorphe sur son demi-plan de convergence absolue. De plus, pour tout s ∈ Π(ξ), Z +∞ (Lf )0 (s) = − tf (t)e−st dt . 0 4.3. TRANSFORMÉE DE LAPLACE 71 Fig. 4.2 – Inversion de la transformée de Laplace Démonstration. Il suffit d’appliquer le théorème de dérivation sous le signe somme et de vérifier que les conditions de Cauchy-Riemann sont bien satisfaites. 4.3.4 Théorème d’inversion La formule d’inversion de la transformée de Laplace résulte de la formule d’inversion de la transformée de Fourier. En effet, on peut écrire √ Lf (s) = 2πF(e−<(s)(·) f (·))(=s) . En utilisant cette remarque, on peut facilement démontrer le théorème suivant. Théorème 29 (Théorème d’inversion pour la transformée de Laplace). Soit f ∈ Lξ (R+ ) pour un certain ξ ∈ R ∪ {−∞}. On suppose qu’il existe s1 ∈ R tel que la fonction s2 7→ Lf (s1 + is2 ) ∈ L1 (R). Alors Z 1 f (t) p.p. t > 0 (t+is2 )t e Lf (t + is2 )ds2 = (4.2) 0 p.p. t < 0 . 2π R Pour dire les choses simplement, il faut retenir que si Lf est intégrable sur une ligne verticale du demi-plan de convergence absolue, alors on peut reconstruire f pour presque tout t > 0. Etant donné qu’on a vu plus haut que Lf est holomorphe sur son demi-plan de convergence absolue, on peut reformuler ce résultat en terme d’intégrale sur un “chemin” (un chemin de longueur infini en fait). On pose γ(u) = s1 + iu et on réécrit (4.2) sous la forme Z 1 f (t) p.p. t > 0 etz Lf (z)dz = 0 p.p. t < 0 . 2iπ γ Ceci est illustré par la figure 4.2.