FAIT CLINIQUE ASPERGILLOSE INVASIVE PSEUDO-TUMORALE DE LA FACE A POINT DE DEPART INTRASINUSIEN : A PROPOS D’UN CAS DECELE A L’EXAMEN TOMODENSITOMETRIQUE. (Invasiveaspergillosis pseudo-tumoral of the keft maxillary sinus: a description of a case detected at CT scan.) Diop AD,Bayekola CF, Diop AN, Aidara C, Seck M, Ba Diop S. *Service de radiologie et d’Imagerie médicale du Centre Hospitalier Universitaire Fann, Dakar-Sénégal. RESUME: Nous rapportons un cas de sinusite aspergillaire invasive pseudotumorale de laface à point de départ sinusien chez un adulte de 35 ans,immunocompétent,qui avait consulté pour tuméfaction de l’hémiface gauche évoluant depuis 5 ans. Le scanner avait révélé une masse tissulaire des parties molles sous-cutanées de l’hémiface gauche à point de départ sinusien maxillaire gauche avec lyse de la paroi antérieure.Les examens histologiques et mycologiques sur la pièce d’exérèse ont confirmé le diagnostic d’aspergillose invasive. Le patient fut mis sous traitement médicalspécifique avec une évolution favorable.Mots clés :aspergillose invasive, immunocompétent, pseudotumeur, tomodensitométrie. SUMMARY: . We report a case of pseudotumoralinvasive aspergillosis of the left maxillary sinus in an immunocompetent 35 year old man, whoconsulted for left hemifacial swelling lasting for 5 years. The CT scan revealed a left hemifacialsoft tissue mass starting at theleftmaxillary sinus, with lysis of the anterior wall of the sinus. Histological and mycological examinations of the resected specimen confirmed the diagnosis of invasive aspergillosis. The patient followed a specific medical treatment with a favourable outcome. Keywords: Invasive aspergillosis, Immunocompetent, Pseudotumor, Computed tomography. Correspondance et tirés à part : Dr Abdoulaye Dione DIOP assistant chef de clinique au service d’imagerie médicale du CHU de Fann Avenue cheikh Anta DIOP BP : 5035 Dakar-Sénégal. Tel : +221 77 608 38 82. Email : [email protected] INTRODUCTION : J AfrImagMéd 2013; (5),2: 112-117 A D Diop et al Les rhino sinusites fungiques chroniques comme l’ensemble des infections fungiques connaissent une incidence croissante ces dernières décennies [1,2, 3]. Elles sont caractérisées par un grand polymorphisme clinique. La classification de DHONG et LANZA [4] en a simplifiée l’approche distinguant les formes invasives des formes non invasives. La sinusite aspergillaire invasive indolente est une forme rare survenant habituellement chez les sujets immunodéprimés [5,6]. Son diagnostic est souvent tardif et difficile compte tenu du caractère varié et non spécifique des signes cliniques mais également de son caractère invasif pseudotumoral à l’origine de lyse osseuse orientant plutôt vers un processus malin. Nous rapportons un cas de sinusite aspergillaire invasive pseudotumorale de la face à point de départ sinusien chez un adulte immunocompétent en insistant sur les aspects tomodensitométriques. OBSERVATION : Monsieur A.D âgé de 35 ans sans antécédents particuliers, agriculteur et tailleur a consulté au service de stomatologie du CHU Le Dantec pour tuméfaction de l’hémiface gauche évoluant depuis 5 ans. L’examen clinique retrouvait une asymétrie faciale avec tuméfaction molle non fluctuante, non inflammatoire, mobile par rapport à la peau et au plan profond. Elle était mesurée à plus de 5 cm de grand axe avec effacement du sillon nasogénien, comblement du vestibule refoulement de la pyramide nasale gauche. et A l’examen buccal le palais était libre. Il n’y avait pas de foyer dentaire et l’examen oropharyngé était sans particularité. Devant ce contexte clinique, il nous a été adressé pour un examen tomodensitométrique. Une acquisition volumique a été réalisée sans et après injection de produit de contraste avec reconstructions multi-planaires. Elle révélait une masse tissulaire homogène de l’hémiface gauche mesurée à 6 cm x 5,5 cm x 3,5 cm, modérément rehaussée après injection. Elle prenait naissance dans le sinus maxillaire gauche avec lyse de la paroi antérieure de ce dernier et envahissement des parties molles sous cutanées (figures 1et 2). Devant ce tableau il a bénéficié d’une tumorectomie au service de chirurgie maxillofaciale avec des suites simples. L’analyse anatomopathologique de la pièce opératoire retrouvait une fibrose collagène intense avec inflammation granulomateuse, de nombreux polynucléaires éosinophiles et des thromboses vasculaires. On notait la présence de cellules géantes renferment dans leur cytoplasme des fragments mycéliens de type Aspergillaire prenant le PAS et le Grocott en faveur d’une mycose invasive chronique à Aspergillus flavus sans signe de malignité. L’évolution fut favorable après mise en route d’un traitement antifongique spécifique. J AfrImagMéd 2013; (5),2: 112-117 A D Diop et al Fig1 : a et b coupes axiales TDM en fenêtre parties molles et en contraste spontané : Masse des parties molles sous cutanées de l’hémiface gauche (flèche) et comblement partiel du sinus maxillaire gauche (tête de flèche). Fig2 : (a)Coupe axiale TDM en fenêtre parties molles après injection de contraste, (b) reconstruction sagittale. DISCUSSION :Depuis le premier cas de sinusite aspergillaire décrit par Houston en 1990 [7], l’incidence des rhinosinusites fongiques est en nette augmentation. Cependant leur diagnostic est souvent sous estimé puisque 13,5 à 28 % des sinusites chroniques sont fongiques ou mixtes (bactérienne et fongique) [1]. L’aspergillose invasive chronique pseudo tumorale est caractérisée par une durée d’évolution d’au moins trois mois [5] ; chez notre patient, le début de la symptomatologie remonte à cinq ans. Elle a été décrite presque essentiellement chez des patients africains immunocompétents, mais deux cas ont été rapportés récemment en France chez des sujets de race blanche [7]. Elle peut survenir autant chez l’homme que chez la femme avec une J AfrImagMéd 2013; (5),2: 112-117 prédominance féminine dans certaines séries [7].Le mode de contamination le plus probable est l’inhalation [8]. L’absence de signes cliniques alarmants ou spécifiques et l’évolution à bas bruit sont souvent à l’origine du retard diagnostique. Ellepeut être totalement asymptomatique de découvertefortuite ou devant : - une extension orbitaire ou méningoencéphalique, - des signes d’envahissement du sinus caverneux mettant en jeu le pronostic fonctionnel et vital - des complications Infectieuses graves à type de sinusite aiguë bactérienne Chez notre patient c’est le syndrome de masse de l’hémi face gauche qui a motivé la consultation. Cette présentation clinique reste exceptionnelle puisque dans les différentes séries les signes de la sphère ORL occupent le devant du tableau [5,8,9]. L’examen endoscopique permet de montrer des secrétions crayeuses, friables blanc grisâtre.La découverte fortuite au cours de l’imagerie TDM reste le mode le plus fréquent de l’aspergillose invasive chronique fongique pseudo tumorale. Elle réalise un comblement hyperdense plus ou moins hétérogène de la cavité sinusienne, qui peut être total, avec des calcifications centrales et un épaississement des parois, témoignant de l’ancienneté des lésions [5,7,9,10]. Les remaniements osseux localisés ou les lyses osseuses importantes [11] sont classiques, comme chez notre patiente. La confusion avec un processus tumoral est possible, mais L’analyse sémiologique des données d’imagerie permet de déterminer d’une part les aspects d’une sinusite chronique et ceux de présomption de l’atteinte fungique. En effet les calcifications intratumorales sont caractéristiques des sinusites mycotiques [9].L’atteinte unilatérale du sinus maxillaire est retrouvée de façon prédominante [5,9,12] bien que d’autres localisations dans les autres sinus soit décrites (sinus sphénoïdal). Chez notre patient l’aspergillose invasive chronique était à point de départ sinusien maxillaire gauche. Elle réalisait un comblement partiel du sinus maxillaire alors qu’un comblement total de celuici est décrit à une fréquence de 54% des cas dans une série de 50 patients [12].Dans les autres études, l’extension du syndrome de masse du sinus maxillaire se fait le plus souvent vers l’ethmoïde, les fosses nasales et le sinus frontal homolatéral [12] réalisant une atteinte pan sinusienne. L’extension vers les parties molles de l’hémiface gauche observée chez notre patient est rare. L’IRM dont n’a pas bénéficié notre patient aurait pu montrer la masse à point de départ sinusien maxillaire gauche en iso ou hypo signal A rapport D Diop avec et al T1 et en très franc hypo signal T2 (en la présence de particules de zinc au sein de la tumeur). Son rehaussant est intense et homogène après injection de contraste. Elle permet également le bilan d’extension intra orbitaire et endocrânienne de ces formes invasives pseudo tumorales. CONCLUSION : L’aspergillose chronique invasive pseudo-tumorale du sinus maxillaire est une infection rare. Son diagnostic est souvent tardif du fait du polymorphisme clinique. L’extension vers les parties molles sous cutanées avec syndrome de masse de l’hémiface fait la particularité de notre observation. L’imagerie TDM est indispensable dans le diagnostic et l’IRM dans le bilan d’extension intra orbitaire et endocrânienne. Le diagnostic de certitude repose sur l’examen anatomopathologique. J AfrImagMéd 2013; (5),2: 112-117 REFERENCES 1. 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