Les empreintes globales de l'Inde Depuis la fin de la guerre froide, les rapports de force sur la scène internationale ont basculé pour passer progressivement d'un monde bipolaire au multilatéralisme. Ces mouvements ont permis aux pays comme l'Inde de réinventer leur politique étrangère et de faire entendre leur voix au sein des forums internationaux. Etant l’un des plus grands pays au monde et, ne l'oublions pas, la première démocratie en terme d’habitants, l'Inde est regardée de près quant à son rôle dans les relations internationales. Dans ce contexte, l'organisation Vani (Voluntary action network India, groupement d’environ 500 ONG indiennes) a réalisé une étude sur la politique étrangère du gouvernement indien. Elle a pour objectif de permettre à la société civile indienne de comprendre les lignes directrices de cette politique et de mieux s'impliquer autour de ce sujet. Les auteurs de l'étude sont critiques à l'égard du gouvernement indien qui n'encourage en rien le dialogue avec le secteur non-gouvernemental sur les objectifs de la politique étrangère. Ils recommandent, par conséquent, que les valeurs de transparence et de complémentarité soient introduites dans la prise de décisions. Après avoir entamé le processus de libéralisation de l'économie dans les années 1990, l'Inde a enregistré des chiffres impressionnants par rapport aux indicateurs conventionnels de développement économique. La croissance de son PIB a été d'environ 8 % entre les années 2001 et 2011. Même si son poids dans l'économie globale reste modeste (2,4 % en 2011), l'Inde devient un des acteurs majeurs dans les relations internationales. Sa politique étrangère repose sur plusieurs piliers : amélioration des relations bilatérales (notamment avec les pays voisins), renforcement de la coopération régionale dans le cadre de sa politique « Look East » (regard vers l'est), participation active dans les différents forums de l'ONU, coopération Sud-Sud et relations approfondies avec les grandes puissances. La diplomatie indienne semble répondre au principe du pragmatisme : les questions de sécurité guident les relations avec les pays d'Asie du Sud, les intérêts économiques celles avec les Etats-Unis, l’UE et l’ASEAN (Association des nations de l'Asie du Sud-Est), alors que les besoins énergétiques semblent être déterminants pour la mise en place des partenariats avec les pays d'Afrique, d'Amérique Latine et du Moyen-Orient. Forte de sa nouvelle puissance économique et de son poids politique croissant, l'Inde s'engage de plus en plus dans la coopération Sud-Sud. Très active dans le Mouvement des non-alignés sous Jawaharlal Nehru, elle s'implique aujourd'hui notamment dans les forums multilatéraux BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud) et IBSA (Inde, Brésil, Afrique du Sud). Le gouvernement indien a également œuvré pour la création du Forum pour la coopération en matière de développement sous l'égide de l'ONU. A travers les sommets du groupe BRICS, les pays membres visent à créer les espaces de discussion autonome et indépendante de l'influence de l'OCDE, à développer la coopération économique et à encourager les échanges mutuels des expériences et des savoir-faire techniques. En plus de ses trois dimensions, les travaux du forum IBSA ont explicitement pour objectif de promouvoir le dialogue Sud-Sud, élaborer des positions communes sur les sujets d'importance globale et œuvrer ensemble pour l’éradication de la pauvreté au niveau international. Faisant face aux intérêts divergents des pays membres, ses forums multilatéraux ont souvent du mal à atteindre leurs objectifs. Leur capacité d'agir d’une seule voix pour représenter le Sud laisse à désirer. C'est une des raisons pour lesquelles l'Inde s'implique plus énergiquement dans les relations bilatérales, notamment avec les pays de sa région. Son rôle de partenaire de développement des pays voisins ne cesse de prendre de l'ampleur depuis plusieurs années. Les orientations du budget d'état 2003/2004 marquent un vrai changement de cap dans ce sens avec les efforts du gouvernement indien pour consolider son image d'un pays donateur, allant à contrepied de l'image du pays bénéficiaire de l'aide extérieur. Et cela malgré le fait qu'en 2009 plus de 37 % de la population indienne vivait en dessous du seuil de pauvreté de 1,25 USD/jour (défini par la Banque mondiale) et que l'aide extérieure vers l'Inde atteignait 2,5 milliards USD. Le gouvernement indien a attribué la même année 400 millions USD à l'aide publique au développement. Ces ressources sont pour la plupart destinées aux pays voisins (Sri Lanka, Bangladesh, Népal, Bhoutan) et à l'Afghanistan pour les projets d'infrastructures, éducation et santé. Le gouvernement indien prétend s'éloigner des pratiques des pays de l'OCDE quant à la gestion de l'aide au développement et ses représentants préfèrent parler de partenariat pour le développement afin de souligner les rapports d'égalité entre l'Inde et les bénéficiaires de son assistance. Néanmoins, les auteurs de l'étude soutiennent que l'aide indienne est guidée généralement par les intérêts politiques et économiques. L'analyse a également montré que le pays manque de cadre méthodologique ainsi que d'outils de suivi et d'évaluation qui permettraient une mise en œuvre efficace de ces programmes. Par conséquent, les auteurs recommandent au gouvernement de se rapprocher des pays membres du Comité d'aide au développement (dans le cadre de l'OCDE) pour pouvoir bénéficier de leurs expériences dans ce domaine. Parmi les autres recommandations citées dans l’étude, celle de la mise en place d'un dialogue avec la société civile est récurrente. Le gouvernement indien devrait prendre des mesures adéquates pour informer régulièrement les Indiens de ses engagements internationaux et de l'avancée des négociations au sein des différents forums multilatéraux et bilatéraux. Une structure indépendante devrait être créée pour accroître les partenariats en faveur du développement et pour assurer le suivi des projets ainsi que l'évaluation de leurs impacts. Par ailleurs, les ONG indiennes sont riches en expériences dans le secteur. Le gouvernement devrait les prendre plus en considération dans l'élaboration des projets de développement pour les autres pays du Sud. Il est intéressant de noter que même s'ils représentent le secteur associatif indien, les auteurs de l'étude ne remettent pas en cause le modèle de développement tel qu’il est défini par les pays du Nord. La terminologie utilisée dans le texte reste celle des organisations internationales gouvernementales et les termes « pays en voie de développement » et « pays développé » persistent. L'objectif principal de l'étude semble être de dresser le panorama des différentes activités du gouvernement indien en ce qui concerne la politique étrangère sans prendre position quant au concept de développement lui-même. Petra, bénévole pour SOLIDARITÉ Pour consulter l’étude complète de l’organisation Vani, cliquez ici Pour en savoir plus sur nos offres de bénévolat, cliquez ici