Les dépenses de santé sont rentables 1/12 Marché et

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1/12
Marché et politique
pharma:ch
Les dépenses de santé sont rentables
En politique de la santé, on débat presque exclusivement des coûts. Ce faisant, on
occulte bien souvent le bénéfice que le système de santé apporte à la société sous forme
d’espérance de vie et de qualité de vie, le bénéfice économique et la contribution
à la place de recherche suisse.
Grâce à notre système de santé performant, l’espérance de vie en Suisse est l’une des plus élevées au
monde. Les Suissesses et les Suisses vivent non seulement plus longtemps, mais ils restent aussi plus
longtemps en bonne santé. Ceci a un prix qui, sous
forme de coûts de santé, fait régulièrement l’objet de
débats. Ce faisant, le prix des médicaments sont une
pomme de discorde particulièrement prisée par les
politiciens de tous bords. Bien que la part des médicaments aux coûts de santé soit en recul régulier
depuis de nombreuses années, il est toujours question de faire baisser leur prix. Ce faisant, la politique
occulte tout simplement le bénéfice économique généré par l’industrie pharmaceutique: une forte valeur
ajoutée et un énorme excédent d’exportations contribuent considérablement à la prospérité de notre pays.
Les Suissesses et les Suisses vivent non seulement plus
longtemps, mais ils restent aussi plus longtemps en bonne santé.
Les dépenses de recherche des entreprises membres
d’Interpharma, à hauteur de quelque six milliards de
çant une activité lucrative travaillaient dans le sys-
francs par an, constituent le plus solide pilier de la
tème de santé; l’an passé, elles étaient déjà plus de
place scientifique suisse. Avec les hautes écoles, les
12%. Dans l’emportement au sujet de la hausse des
entreprises pharmaceutiques suisses forment un
coûts de santé, tout ceci est vite oublié, de même
cluster de recherche unique au monde.
que la contribution apportée par les médicaments
aux progrès de la médecine. Ils abrègent la durée ou
En raison d’une bonne prise en charge médicale et
soulagent les symptômes des maladies. Il n’est pas
d’une industrie pharmaceutique innovante, le secteur
rare que ceci se traduise également par des avan-
économique de la santé est l’une des principales
tages économiques: les médicaments innovants
branches de notre pays. Près d’une personne sur huit
sont sans doute souvent plus onéreux que leurs pré-
y gagne sa vie, soit environ 600 000 employé(e)s.
décesseurs, mais ils contribuent à faire baisser les
L’économie de la santé n’évolue pas en faisant des
coûts en abrégeant par exemple la durée d’hospita-
remous, mais elle connaît une croissance régulière:
lisation, voire en rendant superflues des interven-
au début des années 90, 8% des personnes exer-
tions chirurgicales. Enfin, les dépenses de santé
Dépenses de santé
Les dépenses de santé réduisent
les autres frais de maladie
Une prise en compte exclusive des dépenses de santé peut aboutir à des conclusions
erronées. C’est aussi une approche erronée, car elle néglige une bonne partie des
frais de maladie. Tel est le message clé de l’étude «Dépenses de santé et frais de maladie»
réalisée par Polynomics sur mandat d’Interpharma.
2
Cette conclusion est étayée par le fait que les dé-
• Outre des dépenses financières, la maladie en-
penses de santé ne sont pas simplement une consé-
traîne également une perte de temps productif. Il
quence financière de la maladie. Elles sont engagées
en résulte des absences sur le lieu de travail, et par
en premier lieu pour combattre la maladie, guérir le
là même des coûts indirects par perte de produc-
patient ou l’aider à jouir d’un meilleur état de santé.
tivité tant pour l’employeur que pour le salarié. Les
Les dépenses de santé réduisent par conséquent les
coûts indirects sont également à prendre en
autres frais de maladie, car un meilleur état de santé
compte lorsque des membres de la famille et des
ou une guérison plus rapide entraînent moins de
amis consacrent du temps à soigner eux-mêmes
pertes de productivité, moins de soins informels en
des patients (soins dits informels).
même temps qu’une réduction des douleurs et de la
souffrance. Autrement dit, seule une vue d’ensemble
• Enfin, la maladie entraîne aussi des coûts sous la
de toutes les composantes montre si les dépenses
forme de douleurs et de souffrance ou de qualité
de santé sont justifiées ou non.
de vie amoindrie de manière générale, coûts qui
sont supportés par le patient, sa famille et ses
Au total, les frais de maladie sont constitués de trois
ami(e)s. Ces coûts intangibles ne peuvent prati-
composantes: des coûts directs, des coûts indirects
quement pas être chiffrés en francs, de sorte que
et des coûts intangibles.
les études ont tendance à les occulter, alors que
• En ce qui concerne les coûts directs, il s’agit de
la perte de bénéfice réelle est grande pour les
dépenses financières qui doivent être engagées
personnes touchées.
lors de la lutte contre la maladie. Celles-ci peuvent
se situer aussi bien à l’intérieur du système de
Dans les études dites de coûts par pathologie (cost-
santé (par exemple rémunération de médecins ou
of-illness studies), on pratique des évaluations pour
dépenses pour des médicaments) qu’à l’extérieur
des maladies spécifiques. Celles-ci permettent de
(par exemple dépenses consacrées à un logement
déduire l’ampleur des différentes composantes des
adapté à un handicapé ou frais de déplacement
coûts. Sept études publiées en Suisse au cours des
pour se rendre chez le médecin), raison pour la-
dernières années montrent que les dépenses de
quelle on parle de coûts médicaux directs et de
santé représentent en moyenne un tiers des frais de
coûts non médicaux directs.
Suite de la page 1
peuvent réduire les frais de maladie. Une personne
données empiriques permettent de conclure que les
malade entraîne non seulement des coûts pour gué-
dépenses de santé importantes de ces trente der-
rir, mais aussi des coûts indirects. Ces derniers re-
nières années ont été plus que compensées par les
couvrent les pertes de productivité en raison des
bénéfices du progrès médico-technologique qui y
absences au travail, les soins informels dispensés
sont liés.
par les proches ou les amis ainsi que la perte de
temps libre. En ce sens, les investissements de l’in-
En établissant un bilan global, on s’aperçoit facile-
dustrie pharmaceutique dans l’activité recherche et
ment que les dépenses pour la santé sont rentables
développement de nouveaux médicaments génèrent
et que l’économie de la santé – y compris l’industrie
non seulement des emplois, mais sont aussi sources
pharmaceutique – représente un facteur écono-
d’économies par réduction des frais de maladie. Les
mique positif pour la Suisse.
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Dépenses de santé et frais de maladie en Suisse
Dépenses de santé
(coûts médicaux directs)
en mio de CHF/a
Coûts
non médicaux directs
en mio de CHF/a
Coûts
indirects
en mio de CHF/a
Coûts
globaux
en mio de CHF/a
Part des dépenses
de santé
aux frais de maladie
Sclérose en plaques
192
55
273
520
37.0%
Septicémie
355
n.i.
844
1 199
29.6%
Polyarthrite rhumatoïde
790
278
1 332
2 400
32.9%
Démence
3 486
n.i.
2 771
6 257
55.7%
Cancer
3 062
241
4 593
7 655
40.0%
Douleurs lombaires (MCH)1
2 751
1 224
6 316
10 291
26.7%
Douleurs lombaires (MCF) 2
2 751
1 224
3 390
7 365
37.3%
Maladies du cerveau
6 082
2 696
9 831
18 609
32.7%
Source: Polynomics, Dépenses de santé et frais de maladie, 2011.
1
MCH: méthode du capital humain.
2
MCF: méthode des coûts de friction pour calculer les pertes de productivité.
maladie, tandis que deux tiers sont imputables aux
une vue d’ensemble permet d’établir quels coûts doit
coûts indirects tels que perte de productivité au tra-
supporter une économie pour une maladie spéci-
vail et soins informels.
fique.
Considérées sous l’angle économique, les dépenses
Sept études pour la Suisse
de santé ne représentent qu’une partie des coûts.
Les études évaluées pour la Suisse traitent essen-
En économie politique, les coûts sont considérés de
tiellement de maladies chroniques, celles-ci étant de
manière générale comme un manque à gagner. On
plus en plus fréquentes et donc de plus en plus im-
parle en l’occurrence de coûts d’opportunité, qui
portantes en raison du vieillissement démogra-
résultent des possibilités inutilisées auxquelles il faut
phique. Trois travaux calculent les coûts des mala-
renoncer. D’un point de vue social, l’ensemble des
dies du cerveau, dont une étude sur la sclérose en
frais de maladie est déterminant, qu’importe où ces
plaques, une sur la démence et une étude de survol
frais adviennent, pour qui et sous quelle forme. Seule
sur toutes les maladies importantes du cerveau.
La Suisse en tant que place pharmaceutique et scientifique
n L’industrie pharmaceutique est la principale bran-
avec BAK Basel Economics sur mandat d’Inter-
che d’exportation suisse. Au cours des dernières
pharma.
années, elle a encore augmenté sa valeur ajoutée,
le nombre de ses emplois et sa productivité.
Le nombre de personnes travaillant dans l’industrie
pharmaceutique a augmenté de 3% en 2010, attei-
L’industrie pharmaceutique est responsable de plus
gnant 36 700 collaboratrices et collaborateurs. Si
de 30% des exportations suisses. Sa valeur ajoutée
l’on tient compte des activités qui lui sont liées en
directe et indirecte atteint près de 30 milliards de
amont et en aval, plus de 135 000 emplois dépen-
francs, soit une part de 5.7% du produit inté­rieur
daient de cette branche en 2010. Le secteur phar-
brut nominal. Tandis que la valeur ajoutée nominale,
maceutique affiche en outre une productivité supé-
en raison de la pression croissante sur les prix et
rieure à la moyenne. La valeur ajoutée de 400 000
de l’évolution des taux de change (hausse du franc
francs par personne active et par an ou 232 francs
suisse), perd un peu de vitesse et n’atteint actuelle-
par heure de travail est plus de trois fois supérieure
ment plus les forts taux de croissance qu’elle affi-
à la productivité moyenne de l’économie globale.
chait par le passé, la croissance réelle reste forte et
La branche pharmaceutique est ainsi nettement en
solide, atteignant plus de 4%. C’est ce que montre
tête, devant les assurances (194 francs par heure) et
une étude réalisée par Polynomics en collaboration
les banques (137 francs par heure).
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Par leur effet plus ciblé et plus rapide, les nouveaux traitements réduisent les frais de maladie indirects,
les coûts des soins informels par exemple.
Comme mentionné ci-dessus, les coûts intangibles
indirects (perte de productivité et soins informels).
ne sont pas pris en compte. Au total, outre les mala-
Les coûts globaux par tableau clinique diffèrent par-
dies du cerveau, dont on recense douze patholo-
fois nettement. Ceci est dû au nombre de personnes
gies, les douleurs lombaires entraînent les coûts les
touchées (prévalence) et aux différentes formes de
plus élevés. Mais, avec quelque 6 à 8 milliards de
traitement. Les coûts élevés des maladies du cer-
francs par an, le cancer et la démence représentent
veau et des douleurs lombaires le prouvent en dépit
aussi une lourde charge pour l’économie suisse.
de coûts par patient faibles. La maladie la plus coûteuse par patient est la septicémie, suivie de la dé-
En ce qui concerne les tableaux cliniques de ces
mence et de la sclérose en plaques. La prévalence
sept études, il ne s’agit bien entendu pas d’une sé-
relativement faible de ces maladies aboutit toutefois
lection représentative de toutes les maladies sévis-
à des coûts globalement plus faibles.
sant en Suisse. Avec la polyarthrite rhumatoïde, le
cancer et les maladies du cerveau (dépressions et
Dans le cas de la démence, les dépenses de santé
migraine incluses), on trouve néanmoins dans les
atteignent une proportion supérieure à 50%, ce qui
études quatre des sept maladies chroniques les plus
s’explique avant tout par le fait que la démence
fréquentes en Suisse. De plus, l’étude sur les dou-
touche essentiellement des personnes âgées, les-
leurs lombaires traite des troubles physiques les plus
quelles – pour la plupart – ne se trouvent plus dans
fréquents en Suisse, dont souffre près de la moitié
la vie active. Les pertes de productivité du travail
de la population et qui ne peuvent être imputés direc-
n’ont de ce fait pas été déterminées, ce qui se traduit
tement à une maladie.
par des coûts indirects plus faibles. Inversement, on
peut considérer que la part des coûts indirects dans
Coûts élevés des maladies du cerveau et
les maladies aiguës est nettement plus faible que
des douleurs lombaires
dans les maladies chroniques, car les pertes de pro-
Le tableau en page 3 offre un aperçu des coûts glo-
ductivité se limitent à une période plus brève. Les
balement déterminés dans ces études pour la
coûts indirects de la septicémie sont essentiellement
Suisse. Les coûts globaux se composent en l’occur-
dus au fort taux de mortalité: près de 50% dans
rence pour l’essentiel de coûts médicaux directs et
l’étude. n
de coûts non médicaux directs ainsi que de coûts
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Dépenses de santé
Le progrès médical fait baisser
les frais de maladie
Les innovations réalisées dans le système de santé sont certes coûteuses, mais les
nouveaux appareils, médicaments et procédés sont indispensables pour mieux lutter contre
les maladies. Ils font en effet baisser les coûts indirects et intangibles. Cet aspect
n’est que très insuffisamment pris en compte dans les débats sur l’explosion des coûts.
L’impact des dépenses de santé sur les frais de ma-
aujourd’hui travailler environ deux fois plus vite après
ladie est particulièrement significatif en rapport avec
l’opération et de souffrir nettement moins.
le progrès médico-technologique, de sorte que
nombre d’études se penchent sur ce facteur. En gé-
Dans le secteur des nouveaux médicaments, en par-
néral, les innovations sont plus chères que ce qui
ticulier, il existe un grand nombre d’études, car, dans
existe déjà dans le système de santé. Mais en contre-
la plupart des pays, les autorités d’homologation
partie, elles permettent de soigner les maladies plus
exigent la preuve d’une meilleure efficacité avant
efficacement et plus rapidement. Les exemples sont
d’autoriser la mise sur le marché d’un nouveau pro-
multiples. Ainsi les procédés de chirurgie mini-inva-
duit. Citons à titre d’exemple le progrès technolo-
sive tels que la cœlioscopie ont-ils permis aux pa-
gique enregistré dans le domaine des anticoagu-
tients atteints d’une hernie inguinale de retourner
lants, c’est-à-dire le gros des médicaments utilisés
Economie de la santé
n Le système de santé vient non seulement en aide
Tandis que l’on considérait autrefois l’économie de
aux malades, mais il est aussi un secteur écono-
la santé comme une partie du système de santé,
mique important. Les dépenses de santé traduisent
c’est aujourd’hui l’inverse. Ceci va de pair avec le
en effet également des performances économiques
fait de se détourner d’un financement essentielle-
et des emplois. 16 000 médecins praticiens rédigent
ment fourni par les pouvoirs publics. Les soins de
chaque année 65 millions d’ordonnances qui servent
santé ne sont plus (ou plus uniquement) considé-
à obtenir des médicaments dans 1 700 pharmacies,
rés comme un facteur de coûts, mais comme une
près de 300 hôpitaux réalisent plus de 12 millions de
branche en pleine croissance, offrant de plus en
journées de soins – et ceci ne représente qu’une pe-
plus d’emplois et de nouvelles possibilités de car-
tite partie de l’économie de la santé. Son importance
rière. De ce fait, ce n’est plus l’aspect de la consom-
pour l’économie nationale est patente: les dépenses
mation qui domine les soins de santé, mais les in-
de santé représentent 11% du produit intérieur brut,
vestissements dans la santé servent la croissance
la santé et les médicaments 14% de l’indice des prix
économique et la productivité.
à la consommation. Près d’une personne sur huit
exerçant une activité lucrative travaille dans le sec-
Klaus-Dirk Henke a relevé pour l’Allemagne des
teur de la santé. Ainsi le système de santé est-il l’un
chiffres similaires à ceux de la Suisse. La valeur
des principaux employeurs de Suisse. L’économie
ajoutée brute de l’économie de la santé représente
de la santé n’évolue pas en faisant des remous, mais
environ 11% de l’ensemble de l’économie natio-
elle connaît une croissance régulière: au début des
nale, avec un taux de croissance annuel supérieur à
années 90.8% des employé(e)s travaillaient dans le
10%. Klaus-Dirk Henke indique pour l’économie de
système de santé; l’an passé, ils étaient déjà plus
la santé un multiplicateur direct de 1.41. Cela signifie
de 12%. Cette importance croissante a conduit les
que chaque euro de l’économie de la santé entraîne
économistes à modifier leur regard sur le système de
EUR –,41 de prestations supplémentaires dans
santé. Le professeur Klaus-Dirk Henke (Berlin), qui
d’autres domaines. Si l’on considère également la
observe et étudie la structure et l’évolution de l’éco-
consommation qui découle de ces revenus supplé-
nomie de la santé, parle d’une nouvelle conception.
mentaires, on aboutit à un multiplicateur de 1.81.
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Dépenses de santé
pour fluidifier le sang. Ici, un nouveau principe actif
soins aux patients souffrant de la maladie d’Alzhei-
– le rivaroxaban – a permis d’abaisser d’environ la
mer générerait globalement plus de bénéfice que de
moitié le risque de thrombose après des interven-
coûts. Dans le cas d’une telle solution, les proches
tions orthopédiques importantes.
pourraient faire appel à du personnel soignant professionnel quelques semaines par an à la charge de
6
Quand des dépenses de santé accrues
l’assurance-maladie pour se décharger eux-mêmes.
se justifient-elles?
Cela reviendrait à un transfert de coûts indirects via
Du fait de ces interactions entre frais de maladie di-
des soins informels vers des coûts directs sous la
rects et indirects, voire intangibles, l’augmentation
forme de dépenses plus élevées pour des soins pro-
des dépenses de santé – en raison, par exemple, des
fessionnels.
progrès médico-technologiques – ne constitue pas
de prime abord un problème. La question qui se
Allongement de l’espérance de vie –
pose est plutôt celle de savoir quand des dépenses
mais à quel prix?
de santé importantes se justifient, ou comment se
La complexité de cette thématique apparaît claire-
présente l’effet global entre dépenses de santé im-
ment si l’on prend l’exemple du vieillissement démo-
portantes et les autres composantes de coûts qui
graphique. Tout le monde est d’accord pour dire que
s’en trouvent réduites. Les données empiriques per-
la hausse des dépenses de santé des 30 dernières
mettent aujourd’hui de conclure que les dépenses
années dans les pays industrialisés est allée de pair
de santé importantes de ces trente dernières années
avec une croissance remarquable de l’espérance de
ont été plus que compensées par le bénéfice du pro-
vie des personnes de plus de 60 ans. Cependant,
grès médico-technologique qui y sont liées, autre-
deux points de vue opposés s’affrontent: le point de
ment dit que les frais de maladie ont donc globale-
vue statique considère les dépenses de santé avant
ment plutôt diminué.
tout comme une composante des frais de maladie,
le point de vue dynamique les voit comme un apport
Il existe ainsi quelques études qui attestent que la
pour une meilleure santé. En d’autres termes, si l’on
hausse des dépenses de santé dans les pays indus-
ne luttait pas contre les maladies, on n’aurait pas
trialisés a contribué de manière significative à l’aug-
besoin d’engager des ressources dans le système
mentation de l’espérance de vie. Par ailleurs, di-
de santé. A cet égard, on peut comprendre la pré-
verses études scientifiques menées aux Etats-Unis
vention comme une lutte contre la maladie avant son
ont montré que chaque dollar investi dans le système
apparition.
de santé au cours des années 1980 à 2000 a généré
un «bénéfice» de USD 1,50 à USD 2,–, et ce sous la
forme d’une espérance de vie accrue et d’une meilleure santé. Certes, ces études ne peuvent pas être
transposées directement à la Suisse. De plus, elles
font abstraction de la question de savoir si des améliorations en termes d’efficacité n’auraient pas permis d’obtenir un bénéfice encore supérieur. Cependant, elles donnent clairement à penser que le pro-
«Les dépenses de santé impor­
tantes de ces trente dernières
années ont été plus que compensées par les bénéfices du
progrès médico-technologique
qui y sont liés.»
grès technologique et les dépenses de santé importantes qui y sont liées ont été également justifiés en
Des dépenses de santé plus élevées se justifient à
Suisse, compte tenu du fait que les Etats-Unis sont
partir du moment où le bénéfice qui en découle est
le pays dont le système de santé est le plus coûteux
supérieur. Tel est le cas si les frais de maladie
au monde.
s’avèrent plus faibles malgré les dépenses de santé
plus élevées, de sorte que le recul des coûts indi-
Pour la Suisse, on citera par exemple l’étude de No-
rects et des coûts intangibles est supérieur à l’aug-
cera et al. (2002 et 2003), dans laquelle a été réalisée
mentation des dépenses de santé. En revanche, une
une analyse coût-bénéfice relative à différents pro-
réduction des dépenses de santé ne se justifie que
grammes de lutte contre la maladie d’Alzheimer. Les
si elle donne lieu à des améliorations dans l’efficacité
auteurs arrivent à la conclusion qu’un programme
du système et si aucune prestation générant un gros
destiné à décharger les proches dispensant des
bénéfice n’est supprimée.
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Conclusions
des patients aux coûts, coupes dans le catalogue
En règle générale, le débat mené en Suisse au sujet
des prestations ou la liste des spécialités pour les
de la politique de la santé ne porte que sur les dé-
médicaments). Actuellement, tous les autres frais de
penses et les coûts engagés directement dans le
maladie sont pour elles secondaires. Contrairement
système de santé. La «cherté» globale de la santé
à l’assurance-accidents, il n’existe pas d’assurance
pour l’économie est bien souvent occultée. Or, les
obligatoire d’indemnités journalières, de nature à atti-
études sur les frais de maladie qui ont été analysées
rer l’attention des assureurs ne serait-ce que sur une
ont révélé que les frais de maladie indirects dé-
partie des pertes de productivité sur le lieu de travail.
passent nettement les dépenses de santé en Suisse.
Comme celles-ci ne représentent qu’environ un tiers
En dépit des interactions entre dépenses de santé et
de l’ensemble des frais de maladie, l’approche
frais de maladie, la politique de la santé prend sur-
consistant à vouloir réduire essentiellement les dé-
tout des mesures destinées à faire des économies
penses de santé est vouée à l’échec.
au niveau des dépenses de santé. Ceci peut s’expliquer par le fait que les effets à long terme sur les
Il est difficile de faire prévaloir une vue d’ensemble,
coûts globaux sont plus difficiles à faire comprendre
car les intérêts des différents acteurs du système de
et se situent souvent au-delà de l’horizon temporel
santé suisse (prestataires, assureurs, milieux poli-
dans lequel les responsables politiques souhaitent
tiques, population) sont extrêmement différents.
être réélus…
Pour ce qui est des prestataires, on peut distinguer
deux groupes:
La population est concernée
1. Les médecins exerçant en cabinets, les hôpitaux
par tous les facteurs de coûts
et les pharmacies s’efforcent surtout de rétablir et
Tandis que les acteurs mentionnés jusqu’à présent
d’améliorer l’état de santé du malade. Compte
ont une forte tendance à avoir une vision partielle, la
tenu de l’assurance-maladie globale, celui-ci ne
population est concernée par tous les facteurs de
contribue directement que pour une part infime
coûts: que ce soit en tant que patient ou que proche
aux coûts médicaux directs. Les fournisseurs de
d’un malade, en tant que personne touchée par les
prestations ne sont donc que peu incités à
coûts intangibles, en tant que membre d’une caisse-
prendre en compte les dépenses de santé dans
maladie ou en tant que contribuable. D’un point de
leurs décisions relatives au traitement. L’obligation
vue économique, il y aurait donc intérêt à considérer
de contracter réduit encore cette incitation, dans
de manière égale toutes les composantes des coûts.
la mesure où les caisses-maladie sont tenues de
rembourser toutes les prestations exécutées, in-
En résumé, on constate que, dans le système suisse
dépendamment de leur volume et de leur qualité.
de santé actuel, les incitations à considérer les différentes composantes des coûts chez les acteurs im-
2. Il en va de même pour les «innovants», c’est-à-dire
portants s’avèrent très variables, de sorte qu’il est
les entreprises pharmaceutiques ou de technolo-
difficile de mener une politique de santé susceptible
gie médicale pratiquant la recherche. Le patient
de rallier une majorité et qui soit surtout durable. La
assuré a droit au meilleur médicament disponible.
remarque vaut en particulier dans la perspective que
Les entreprises peuvent donc mieux s’imposer
les maladies chroniques continueront à progresser
sur le marché si elles élaborent de nouvelles
dans les prochaines années, pour une bonne part en
formes de traitement générant un «plus» en
raison du vieillissement démographique. Il en résulte
termes de santé.
que le système de santé suisse est amené en permanence à relever de nouveaux défis en matière de
Les prestataires s’intéressent donc en premier lieu à
financement, défis qui réclament des propositions
l’état de santé des patients. Ils s’efforcent de propo-
de solutions conçues pour le long terme. Ce faisant,
ser des traitements adéquats et des innovations de
il s’agit aussi d’identifier les possibilités d’améliorer
nature à réduire les frais de maladie indirects et intan-
l’efficacité du système de santé pour pouvoir faire
gibles. Les caisses-maladie font exactement l’in-
face, par un engagement plus efficace des res-
verse: leur objectif principal est de réduire les dé-
sources, à l’augmentation des dépenses de santé
penses de santé. Elles soutiennent donc les efforts
inéluctablement générée par le progrès médico-
en ce sens (p. ex. augmentation de la participation
technologique. n
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7
Impressum
Editeurs: Thomas B. Cueni, Roland Schlumpf
Rédaction: Interpharma
Maquette: Continue AG, Bâle
Photos: Barbara Jung
Interpharma
Case postale, 4003 Bâle
Téléphone 061 264 34 00
Téléfax 061 264 34 01
[email protected]
www.interpharma.ch
«Pharma:ch» est le bulletin d’Interpharma, l’association des entreprises
de recherche pharmaceutique suisses Actelion, Merck Serono, Novartis,
Roche, Amgen, Bayer, Boehringer Ingelheim, Janssen-Cilag, UCB et
Vifor. En proposant une information différenciée, ce bulletin entend contribuer à la compréhension de l’activité de recherche et de développement
médico-pharmaceutique menée en Suisse.
Pour consulter les informations de fond et les prises de position, prière de
se reporter au site web www.interpharma.ch.
Revitalisation de la place de recherche
L’industrie pharmaceutique suisse est un leader mondial. Ses matières premières sont
les connaissances: recherche et développement dans les hautes écoles. Il faut revitaliser
la place de recherche pour maintenir cette position.
conditions cadres à l’activité recherche et développement. Mais à cet égard, l’enthousiasme est hélas
limité. La Suisse a certes atteint une bonne position,
mais des processus longs et compliqués remettent
ces acquis en question. Pour ce qui est des médicaments, tel est le cas pour l’autorisation de mise sur
le marché et le remboursement par les assureursmaladie.
Thomas Cueni, secrétaire général d’Interpharma
Les études cliniques se débattent également avec
Les scientifiques de l’industrie pharmaceutique tra-
des conditions cadres qui se sont dégradées. Leur
vaillant dans la recherche et le développement
nombre est depuis des années en recul, et la Suisse
mettent régulièrement de nouveaux médicaments
est en passe de perdre l’un de ses meilleurs atouts
sur le marché. Trois conséquences importantes en
au niveau de la recherche pharmaceutique.
découlent:
•
L es médicaments guérissent les malades ou
Il ne s’agit pas ici en premier lieu de se lamenter, mais
aident à soulager la souffrance. Les médicaments
notre devoir est d’attirer l’attention sur les points où
apportent un bénéfice personnel à l’individu, qui
le bât blesse du point de vue de l’industrie pratiquant
se traduit pour la société par un allongement de
la recherche. En effet, trop de choses dépendent
l’espérance de vie et une augmentation du nombre
des conditions cadres:
d’années de vie en bonne santé.
•le bien des patientes et des patients
•Les coûts de santé augmentent. En même temps,
les coûts économiques liés à la maladie baissent.
•la position de pointe de l’industrie pharmaceutique
suisse à l’échelon international
A noter que les économies réalisées dépassent
•la principale branche d’exportation suisse
largement le surcroît de dépenses, comme le
•un cluster unique au monde regroupant l’industrie
montre clairement cette publication.
•Le secteur économique de la santé connaît une
et les hautes écoles
•des emplois
croissance. Plus il y a de possibilités thérapeutiques et plus celles-ci sont différenciées, plus
Il faut s’occuper de tout cela pour le sauvegarder.
cette branche économique – entre-temps la plus
Rien n’est définitivement garanti: il faut toujours re-
grande de Suisse – en bénéficie.
prendre l’ouvrage et le modifier. Tel est également le
cas pour les conditions cadres de la place de re-
C’est donc tout bénéfice, et on pourrait penser que
cherche qu’est la Suisse. Elle a besoin d’un élan de
la Confédération fait tout pour fournir les meilleures
revitalisation.
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