Développement: Théorème de structure des polynômes symétriques Adrien Fontaine 3 avril 2013 Référence : Ramis-Deschamps, Odoux, Cours de Mathématiques spéciales, Algèbre 1, p200 1 Préliminaires Définition 1 (poids) Si P = P i∈Nn ai Y1i1 ...Ynin , alors on définit le poids de P et on note Π(P ) : i(P ) = max{i/ai 6= 0, n X kik = m} k=1 Si P est nul, on convient π(P ) = −∞. Proposition 1 Si P ∈ A[Y1 , ..., Yn ] est de poids Π(P ), alors P (Σ1 , ..., Σn ) est de degré au plus Π(P ). Théorème 1 Soit P un polynôme symétrique de A[X1 , ..., Xn ]. P a même degré partiel par rapport à chaque indéterminée. Ce degré partiel s’appelle ordre de P et est noté ω(P ). Démonstration : Si P = 0, il n’y a rien à démontrer. Sinon, si p1 = degX1 (P ), alors P "contient" le monôme X1p1 ...Xnpn . En appliquant la transposition n τ = (1, i), on voit que P contient également le monôme ap Xip1 ...Xτp(n) , donc degXi (P ) ≥ p1 = degX1 (P ). De même, on montre que degX1 (P ) ≥ degXi (P ). Proposition 2 Si P ∈ A[Y1, ..., Yn ] est de degré k, le polynôme symétrique P (Σ1 , ..., Σn ) de A[X1 , .., Xn ] est d’ordre ≤ k. 2 Structure des polynômes symétriques Nous aurons à utiliser le lemme suivant : Lemme 1 Soit P ∈ A[X1 , ..., Xn ] tel qu’en substituant 0 à l’une quelconque des indéterminées dans 1 2 STRUCTURE DES POLYNÔMES SYMÉTRIQUES 2 P (X1 , ..., Xn ), on obtienne le polynôme nul. Alors P est divisible par Σn = X1 ...Xn . P Démonstration : Posons P = i∈Nn ai X1i1 ...Xnin . Pour tout 1 ≤ k ≤ n, associons l’ensemble Ik des n-uplets i = (i1 , ..., in ) de Nn tels que ik = 0. On a l’égalité des polynômes 0 = P (X1 , ..., Xk−1 , 0, Xk+1 , ..., Xn ) = X i i k+1 k−1 ...Xnin Xk+1 ai X1i1 ...Xk−1 i∈Ik Donc, ∀i ∈ Ik , ai = 0. En faisant varier k entre 1 et n, on en déduit que ai est nul pour tout n-uplet i dont l’une des coordonnées est nulle. Autrement dit, ai 6= 0 implique i ∈ (N∗ )n et donc on peut écrire P = X ai X1i1 ...Xnin = X1 ...Xn i∈(N∗ )n X i∈(N∗ )n Théorème 2 A tout polynôme P ∈ A[X1 , ..., Xn ] symétrique, de degré p, on peut associer un polynôme Q ∈ A[Y1 , ..., Yn ] de poids inférieur ou égal p tel que P (X1, ..., Xn ) = Q(Σ1 , ..., Σn ). Démonstration : Si P = 0, alors Q = 0 fonctionne. Il s’agit de vérifier une assertion de la forme An,p avec n ∈ N∗ et p ∈ N. On va pour cela utiliser une double récurrence. An,p : ∀P ∈ A[X1 , ..., Xn ]Sn /deg(P ) = p, ∃Q ∈ A[X1 , ..., Xn ]/Π(Q) ≤ p∧P (X1 , .., Xn )Q(σ1 , ..., σn ) – A1,p est vraie pour tout p : à tout polynôme P (X1 ), on peut associer Q = P . – Soit n ≥ 2. On suppose que An−1,p est vraie pour tout p ∈ N. Montrons par récurrence sur p que An,p est vraie pour tout p ∈ N. – An,0 est évidemment vraie. – Soit p ∈ N∗ . On suppose que An,k est vraie pour tout k < p, et soit P ∈ A[X1 , ..., Xn ]Σn tel que deg(P ) = p. Notons pour 1 ≤ g ≤ n − 1, (Σq )0 le polynôme obtenu en substituant 0 à Xn dans Σq . On a : X Σq = Xi1 ...Xiq 1≤i1 <...<in ≤n Donc, (Σq )0 = X Xi1 ...Xiq 1≤i1 <...<in ≤n−1 Autrement dit, (Σq )0 n’est autre que le q-ième polynôme symétrique élémentaire de A[X1 , ..., Xn−1 ]. Considérons alors P (X1 , ..., Xn−1 , 0). Il est symétrique, de degré au plus p. En utilisant An−1,p , on peut écrire : P (X1 , ...Xn−1 , 0) = Q1 ((Σ1 )0 , ..., (Σn−1 )0 ) où Q1 ∈ A[X1 , ..., Xn−1 ] est de poids au plus p. Posons P1 (X1 , ..., Xn ) = P (X1 , ..., Xn ) − Q1 (Σ1 , ..., Σn−1 ). Alors, P1 est symétrique, de degré au plus p, et par construction P1 (X1 , ..., Xn−1 , 0) = 0. Par ailleurs, puisque P1 est symétrique, pour tout 1 ≤ k ≤ n, P1 (X1 , ..., Xk−1 , 0, Xk , ..., Xn ) = 0. Donc, d’après le lemme, il existe P2 ∈ A[X1 , ..., Xn ] tel que : P1 (X1 , ..., Xn ) = Σn P2 (X1 , ..., Xn ) 2 STRUCTURE DES POLYNÔMES SYMÉTRIQUES 3 P1 et Σn sont symétriques, soit σ ∈ Sn , on a : Σn (P2 (X1 , ..., Xn ) − P2 (Xσ(1) , ..., Xσ(n) )) = 0 D’où, P2 (X1 , ..., Xn ) = P2 (Xσ(1) , ..., Xσ(n) ). De plus, deg(P2 ) ≤ p − n. Ainsi, P2 est symétrique, de degré k tel que k < p. Appliquons à P2 l’hypothèse de récurrence sur p, P2 (X1 , ..., Xn ) = Q2 (Σ1 , ..., Σn ) où Q2 ∈ A[X1 , ..., Xn ] et où Q2 est de poids au plus p − n. Il vient P (X1 , ..., Xn ) = Q1 (σ1 , ..., σn−1 ) + Σn Q2 (Σ1 , ..., Σn ) Le polynôme Q1 (Y1 , ..., Yn−1 ) + Yn Q( Y1 , ..., Yn ) est de poids au plus p et répond manifestement à la question. Remarque 1 – La preuve fournit un algorithme pour calculer Q. – On peut même ajouter dans ce théorème que Q est de degré inférieur ou égal à l’ordre ω(P ) de P , en rajoutant cette propriété à l’assertion An,p . – On a aussi unicité : il suffit de vérifier que si Q ∈ A[Y1 , ..., Yn ] est tel que Q(Σ1 , ..., Σn ) = 0, alors Q = 0. Ce qui se fait par récurrence. 1 .