ÉDITO Un ordre très bref, pour une action urgente. J’ai lu quelque part que, pendant le briefing, un moniteur canadien expliquait à son élève : « Si tu entends dans tes écouteurs « Ejecte, Ejecte, Ejecte », seul le premier mot est vrai. Les deux autres ne sont que des échos. Si tu demandes « Pourquoi ? », tu parleras tout seul car, à ce moment là, tu seras le seul pilote dans l’avion ! » . Cette phrase ne peut être qu’une plaisanterie. Jamais un instructeur ne s’éjecterais avant que son élève ne l’ai fait. Mais je l’aime bien quand même, car elle évoque bien l’urgence et la rapidité d’une éjection. Ce n’est jamais de gaieté de cœur qu’un pilote abandonne son avion, surtout qu’il n’ignore pas qu’on lui en demandera des comptes. Lorsqu’il le fait, c’est que la situation est vraiment devenue catastrophique, que tout ce qui pouvait être tenté l’a été, qu’il a atteint la limite au-delà de laquelle il sera trop tard. La dernière seconde. Mais trois secondes plus tard, il se pendra légèrement sous son parachute … Sauvé. La première éjection, c’était il y a 70 ans (en réalité 71, j’avais d’abord trouvé une mauvaise date), en Allemagne. Depuis, plus de 7 400 pilotes lui ont dû la vie, rien que pour les sièges Martin-Baker. Une longue histoire, pour un objet très complexe et très performant. Je vais vous raconter … Bonne lecture à tous ! Jacques DESMARETS Courrier des Lecteurs Récemment, j’ai raconté Félix Baumgartner à ma fille, puis je lui ai fait lire l’article que je lui avais consacré dans le numéro 01 d’Aéro Jack. Alors elle m’a fait remarquer qu’il y manquait une précision intéressante que je lui avais pourtant donnée. Et en effet, je n’ai appris qu’après la rédaction de cet article, dans un excellent reportage télévisé, que Baumgartner avait dû faire face à une grande difficulté pour ce saut. Il portait une combinaison d’astronaute, obligatoire pour survivre à très haute altitude, mais très inconfortable. Impossible de se toucher, de se gratter, de la retirer seul… et il devait la supporter plusieurs heures. Il s’y est entraîné au sol, mais il ne la supportait pas. En fait, à l’intérieur, il faisait une forme de claustrophobie, ce qui est facile à comprendre (pour moi en tout cas). Il a failli abandonner à cause de ça. Il est retourné plusieurs mois en Autriche, prenant du recul pendant que son équipe continuait les préparatifs. Et puis, l’envie de réaliser son exploit l’a aidé à reprendre le dessus, et il est revenu aux USA reprendre son entrainement... En couverture ce mois-ci : Ejection depuis un F-16 au niveau du sol Le Captain Chris Stricklin, de la patrouille Thunderbirds de l’USAF, s’éjecte de son F-16, le 14 septembre 2003, lors d’un meeting à Mountain Home AFB (Idaho). En sortie d’une boucle vers le bas, il s’aperçoit qu’il est plus bas que prévu et qu’il ne pourra pas redresser à temps. L’avion paraît en vol horizontal, mais en réalité il est en train de s’enfoncer rapidement. Il écarte sa trajectoire de la foule et déclenche son éjection. Il vole à 225 kts et n’est plus qu’à environ 50 pieds du sol quand son siège quitte l’avion. Il s’en sortira presque indemne ! La nouvelle trajectoire de l’avion le dirige vers la tour, où se trouve un très bon photographe, avec un très bon appareil et de très bons réflexes … Photo signée SSGT Bennie J. Davis III (photographe de l’USAF), en ligne sur http://www.ejectionsite.com/thunderbird6.htm 2 04 Ejecte ! La première éjection a 71 ans Son histoire est aussi celle de Martin-Baker 11 P. 04 12 14 16 P. 12 17 20 24 P. 18 Et si ça avait été inventé en France Comment ça marche Cas particuliers Une éjection en 5 photos Deux témoignages d’éjections J.F. Fillastre sur SM B-2 et Linda Malloney sur EA6-A, la première femme A l’aide ! Aidez-moi à identifier des avions originaux L’Archaeopteryx le planeur à pattes 26 Les P’tites News 27 Aéroludique P. 24 3 Au départ, je me suis dit : « Siège éjectable égale Martin-Baker. On va donc commencer par la vie de Sir James Martin et du Captain Valentine Baker ». Pas si simple ! D’abord on ne sait pas grand-chose de leurs vies, ensuite l’histoire du siège éjectable commence bien avant eux. James Martin naît le 11 septembre 1893 en Irlande du Nord. En 1929, il crée sa propre entreprise de construction aéronautique, la Martin's Aircraft Works, pour fabriquer des pièces d’avion. Captain Valentine Baker Martin-Baker MB-1 Martin-Baker MB-2 Martin-Baker MB-3 Valentine Baker est né le 24 août 1888 au Pays de Galles. En 1914, il s’engage dans la Royal Navy, où il devient estafette. Cinq mois plus tard, il est blessé d’une balle qui se loge dans son cou. Trop proche de la moelle épinière, elle ne peut être retirée. Il rejoint alors le Royal Welch Fusiliers puis, après son mariage, l’école de pilotage où il est breveté en septembre 1916. Il remporte ensuite plusieurs victoires avant de devenir instructeur. Après plusieurs affectations et promotions, il quitte l’armée en 1921 avec le grade de Capitaine Embauché par Vickers, il part d’abord en Indonésie (alors Indes Néerlandaises) puis au Chili. Il y assure la démonstration des avions et la formation des pilotes. De retour en Grande Bretagne, il ouvre une école de pilotage qui deviendra fameuse. Il aura, entre autres, comme élèves le futur Edouard VIII et Amy Johnson. C’est à cette époque que les deux hommes se rencontrent. Ils deviennent amis et, en 1934, Baker rejoint Martin pour former la Martin-Baker Aircraft Company Ltd, dont Baker devient le pilote d’essais. En effet, l’entreprise se lance alors dans la construction d’avions maison. Ensemble, ils vont mettre au point quatre prototypes, les MB1, 2, 3 et 5. En 1935, le MB1 est un petit biplace de tourisme de 11 m 4 à fabriquer d’envergure, qui se veut simple et à entretenir. Son moteur de 160 ch autorise une vitesse maximum de 200 km/h. Ses ailes sont repliables au sol par une personne seule pour en favoriser le stockage. Le prototype sera détruit au sol dans un incendie en 1938. La même année, Martin-Baker propose à l’armée le MB2 pour répondre à une demande pour un chasseur avec moteur refroidi par air. Cette fois, un moteur Napier de 800 ch le propulse à 480 km/h. Il emporte 8 mitrailleuses. Son train est fixe mais entièrement caréné. Testé par la RAF en 1939, il n’est pas retenu, malgré sa simplicité de fabrication et de bonnes critiques. On lui préfère les Hurricane et Spitfire… Les deux constructeurs développent alors le MB3 dont le premier vol intervient le 31 août 1942. Dérivé du précédent, ses courbes plus souples rappellent celles du Spitfire. Son moteur de 2 000 ch et son train rentrant lui permettent de voler à 670 km/h et de monter à 12 000 m avec ses 6 canons de 20 mm et leurs 1 200 obus qui peuvent être rechargés au sol en cinq minutes. Il est, comme les précédents, conçu pour une fabrication et une utilisation les plus simples possibles. Les premiers vols démontrent une incroyable manœuvrabilité. Mais le 12 septembre, une panne moteur au décollage provoque le crash de l’appareil et la mort de Baker. James Martin est très touché par la mort de son ami, et on dit que ce décès le poussa à travailler désormais à fond vers la sécurité des pilotes. Martin-Baker MB-5 Le prototype du MB3 détruit, il se lance dans l’étude du MB4, MB3 simplement équipé d’un nouveau moteur. Mais il abandonne rapidement ce projet pour un tout nouvel avion, le MB5. La voilure reste identique, mais le fuselage est entièrement nouveau et cette fois, le moteur est un RollsRoyce Griffon refroidi par eau. Un V-12 de 2 340 ch qui le propulse à 740 km/h par le biais de deux hélices contrarotatives pour en diminuer l’effet de couple. Il fait son premier vol le 23 mai 1944. Certains pilotes diront qu’il est supérieur au Spit. Mais il arrive trop tard. La RAF commence maintenant à étudier les avions à réaction pour succéder à ses chasseurs, et le MB5 n’aura pas plus de suite que ses prédécesseurs. L’entreprise ne produira plus d’avions. Pourtant, l’histoire de Martin-Baker n’en est encore qu’à ses débuts. Pendant la guerre, la société Martin-Baker a continué à produire de nombreuses pièces d’avions, et en particulier la verrière éjectable des derniers Spitfire qu’elle a mise au point. La société a acquis une certaine notoriété dans le domaine de la sécurité. C’est pourquoi James Martin est contacté par le Ministère de l’Air pour étudier un moyen d’assistance aux pilotes qui essaient de quitter leur avion lorsqu’ils sont en difficultés. En effet, en janvier 44, le chef pilote d’essais Davie a du abandonner le tout nouveau Gloster Meteor à réaction. Mais lorsqu’il est sorti du cockpit, il a été choqué par le déplacement d’air et a perdu connaissance. Il s’est tué sans avoir tenté d’ouvrir son parachute ! A cette époque, en effet, les pilotes doivent faire face à cette nouvelle difficulté. Pendant la première guerre mondiale, ils volaient le nez au vent, à des vitesses relativement faibles. Sauter aurait donc pu être relativement facile, mais le parachute n’est pas encore généralisé, essentiellement pour des raisons de poids. Seuls les aéronautes en sont équipés, ainsi que les pilotes allemands à partir de 1918. Par contre il va se généraliser entre les deux guerres. Au fil de la seconde guerre, la chose va se compliquer. Les pilotes doivent maintenant se débarrasser d’une verrière, pas forcément facile à ouvrir si l’avion a été touché. Ensuite, volant à plusieurs centaines de km/h, ils doivent affronter un vent relatif très fort, et des facteurs de charge importants, pour peu que le vol ne soit pas stabilisé, voire que l’avion soit en vrille. Sans compter les conditions de température et de pression qui peuvent régner à très haute altitude. A la fin de la guerre, cela devient extrêmement difficile pour les pilotes des meilleurs avions à hélice. Mais en Allemagne, le problème va être soulevé dès le début de la guerre. En effet, les ingénieurs du Reich travaillent déjà sur les premiers avions à réaction, dont les vitesses sont impressionnantes. Et leur mise au point difficile entraîne de nombreuses pertes de contrôle. Même des Nazis ne peuvent pas accepter de perdre systématiquement leurs meilleurs pilotes. C’est d’ailleurs dès 1939 qu’en Allemagne, Puis de vrais sièges éjectables seront Karl Arnold, Oscar Nissen, Rheinhold installés sur les deux prototypes du Heinkel Preuschen and Otto Schwarz, au nom de 280 et surtout sur le Heinkel 219, premier Junkers, ont, les premiers, déposé un brevet avion de série à en bénéficier. pour un système de siège éjectable (Reichpatent nr. 711045). Et le 13 janvier 1942, lors d’un vol d’essai Mais c’est Heinkel qui, la même année, va du He 280 V1 (premier proto), le pilote Heinkel 176 concrétiser l’idée sur son prototype d’avion d’essai Helmut Schenk largue sa verrière, Heinkel 280 à moteur fusée Heinkel 176. En fait, c’était actionne le siège et est catapulté hors de plutôt tout le son avion par une décharge de gaz mini-cockpit comprimés. Il est le premier pilote de de l’appareil l’histoire à s’éjecter en situation de crash et qui devait être à devoir la vie à cette invention. éjecté. Mais de Avant lui, Busch, avait été le premier à toute façon, s’éjecter en conditions de test. l’appareil ne vola jamais vraiment. 5 Les allemands expérimenteront trois types de sièges, éjectés par un gaz comprimé, comme ce fut le cas pour Schenk, par un ressort, et par une charge explosive. C’est ce troisième type qui équipait le chasseur de nuit He-219 « Uhu » (Grand Duc). Début 1945, Otto Fries et son opérateur radar Arthur Staffa sont les premiers à s’éjecter en situation de combat, leur « Uhu » ayant été touché au moteur droit par un Mosquito. Tous les deux survécurent à la guerre. Siège d’un He-162 à réaction On estime que les pilotes allemands utilisèrent à 60 reprises leurs sièges éjectables pendant la guerre. A noter que le « Grand Duc » est l’avion héros de la bande dessinée éponyme de Yann et Romain Hugault, dans laquelle on voit justement, et de façon détaillée, l’équipage s’éjecter. Mais c’est sur le front russe. Un excellent livre ! Otto Fries Test allemand en 1944 depuis un FW-190 He-219 Grand Duc Dans le même temps, la firme suédoise SAAB (qui à cette époque ne fabrique que des avions ; SAAB signifiant Svenska Aeroplan Aktiebolaget) met également au point un siège éjectable pour équiper en 1943 son SAAB J21 A. En effet, son hélice propulsive, à l’arrière du cockpit, rendait impossible la sortie manuelle. Il sauvera une première vie le 29 juillet 1946. Il avait d’abord été testé en Janvier 1942 sur un SAAB B17 modifié. On voit donc que, quand début 1944, le Ministère de l’Air demande à Martin de réfléchir au moyen d’aider les pilotes à sauter, le siège éjectable existe déjà. Mais avait-il eu connaissance de ces travaux ? Martin-Baker se lance néanmoins tout de suite dans cette même direction de l’éjection de l’ensemble composé par le siège et le pilote. Nous verrons néanmoins que d’autres systèmes seront mis au point, éjectant soit l’ensemble du cockpit, soit le pilote avec seulement son dossier. Aucune recherche n’avait encore été sérieusement menée du côté des alliés sur les effets des g positifs sur le corps humain. Seuls les g horizontaux supportés lors des catapultages sur porte-avions avaient été étudiés. Or, pour que l’éjection soit quasi instantanée, il faut propulser le siège avec une accélération énorme. Jusqu’où peut-on aller ? Martin va donc commencer par étudier cet aspect du problème. Il fait construire un portique de plus de cinq mètres de haut, un trépied dont l’un des mâts supporte des rails sur lesquels un siège va pouvoir monter. Ce siège, propulsé par deux tubes télescopiques contenant une charge explosive, va d’abord recevoir un mannequin. Puis à partir du 24 janvier 1945, c’est l’ingénieur Bernard Lynch qui va supporter les différents essais. 6 Sir James Martin A droite, Bernard "Benny" Lynch assis dans le Meteor de test Un Boulton Paul Defiant P 82 Un Meteor F 3 Benny Lynch et James Martin le 24.07.46 ; Benny s’éjectera une trentaine de fois au cours de sa carrière ! L’ensemble du siège MartinBaker Mk 1 pesait environ 78 kg, dont 64 étaient éjectés. Le parachute était derrière le dos du pilote, et un kit de survie sous ses fesses. Le premier l’expédie à 1m20 de haut. Petit à petit, la charge explosive est augmentée, jusqu’à ce que Lynch atteigne 3 mètres. Mais les efforts subis deviennent insoutenables. Un journaliste qui avait souhaité s’y coller se retrouve à l’hôpital avec un tassement de la colonne vertébrale. Martin fait l’acquisition d’une vraie colonne vertébrale pour continuer les tests et, au final, établit les règles suivantes : Le pic d’accélération ne doit pas dépasser 21 g, et ce pic ne doit pas durer plus d’un dixième de seconde. Le taux d’augmentation des g ne doit pas dépasser 300 g par seconde. Pendant l’accélération, la position du corps doit garantir l’alignement correct des vertèbres. Un nouveau portique de 20 mètres est construit et le siège intègre alors une poignée au-dessus de la tête pour assurer la bonne position de la colonne vertébrale. Parallèlement, les premiers tests en vol avec mannequins sont effectués à partir de mai 45 depuis un Defiant renforcé pour supporter l’effort de propulsion du siège installé à l’arrière, à la place de la tourelle. Mais l’avion, qui date de 1937, ne dépasse pas 500 km/h. Les essais sur portique ayant validé le siège, Martin-Baker obtient un Gloster Meteor F3, plus représentatif des avions moderne de l’époque. Il est modifié pour recevoir le siège éjectable derrière le poste de pilotage, à l’emplacement de la soute à munition. Le premier essai en vol, réalisé en juin 46, est un échec, le parachute étant 7 arraché du siège. Heureusement, c’était encore un essai avec mannequin ! Premier essai en vol sans passager Un premier parachute, plus petit, est ajouté pour stabiliser et ralentir le siège avant l’ouverture du parachute principal. Après de nouveaux essais concluants, le premier essai humain en vol est enfin réalisé le 24 juillet 1946 par Bernard « Benny » Lynch, à 8 000 pieds et 515 km/h. Mais sur cette première version, Benny doit, après que sa descente soit stabilisée, se débrêler, quitter le siège qui reste accroché au parachute principal, et commander l’ouverture de son propre parachute avant de se poser comme une fleur. Aussitôt, l’U.S. Navy s’intéresse au produit et, le second essai d’un siège Martin-Baker est fait le 1er novembre 1946 à Philadelphie depuis un Douglas A-26 Invader. Le concept ayant fait ses preuves, Martin et Lynch vont améliorer le prototype pour en faire le siège Mk 1 qui sera installé à partir de 1947sur les Meteor, Attacker, Wyvern, Canberra et plus tard sur les Sea Hawk et Venom. Le 30 mai 1949, Jo Lancaster est forcé d’abandonner son Armstrong Whitworth AW52. Il est le premier pilote sauvé par son siege Martin Baker. Sept. 1955, première éjection au niveau du sol Doddy Hay avant son éjection en 1961 James Martin félicite Peter Howard en 1962 Quelques statistiques de Martin-Baker : 6 éjections réussies ont eu lieu à vitesse supersonique L’éjection la plus haute se fit à 57 000 pieds (17 000 mètres) en 1958, sauvant les deux membres d’équipage d’un bombardier Canberra Records en nombre d’éjections par période : Année : 494 en 1967 Mois : 63 en juin 67 Jour : 11 le 22 nov. 1969 Sur les 70 premières éjections, seules 50 sauvèrent le pilote, qui avait encore trop de choses à faire lui-même, comme se libérer du siège et ouvrir son parachute personnel, alors que les éjections sont souvent réalisées dans des situations où il n’a plus tous ses moyens. A partir de 1953, les avions sont équipés du nouveau siège Mk 2, qui intègre bon nombre d’automatismes supplémentaires, comme l’unité barométrique interdisant l’ouverture du parachute au-dessus de 10 000 pieds ou la coupure du harnais du pilote. En 1954, la version Mk 3 autorise, grâce à de nouvelles charges explosives et à des sangles rappelant les jambes du pilote contre le siège, des éjections à plus hautes vitesses, mais aussi à faible vitesse (130 kts) et basse altitude (50 pieds). A partir de cette époque également, la commande d’éjection automatise également le largage de la verrière, même si, par défaut, le siège est capable de la traverser si besoin. En 1955, J. S. Fifield réalise la première éjection au niveau du sol, depuis un Meteor roulant à 145 kts. Six secondes après l’avoir déclenchée, il se posait doucement sur le sol. Le mois suivant, il établit un nouveau record en s’éjectant à 40 000 pieds. Le 1er juillet 1960, Doddy Hay expérimente la première éjection sur un siège tourné vers l’arrière de l’avion, depuis un Valiant modifié pour l’occasion. Martin essaie en effet de convaincre la RAF d’installer des sièges éjectables pour tous les membres d’équipages de ses bombardiers Vulcan, Victor et Valiant. Mais malgré le succès de la démonstration, la RAF ne retiendra jamais cette option. En 1961, Martin Baker développe un nouveau type d’éjection assistée par des fusées, qui permet enfin l’éjection 0/0 (0 altitude, 0 vitesse). Il est testé depuis un portique au sol le 1er avril 1961 par Doddy Hay, puis depuis un avion le 13 mars 1962 par Peter Howard. En 1965, James Martin célébrait la 1 000° vie sauvée par ses sièges, en moins de 20 ans ! 8 Aujourd’hui, c’est 7 410 pilotes qui lui doivent la vie dont 670 français. Le dernier est un pilote des Saudi Air Force qui s’est éjecté de son Tornado le 11 février dernier. Depuis 1957, tous les pilotes sauvés sont intégrés dans le Martin-Baker Tie Club. Ils reçoivent lors d’une cérémonie (organisée lors du Salon de l’Aviation du Bourget pour les Français), un diplôme, une cravate, un écusson et un pin’s, qui permet de les identifier en civil comme en uniforme. Plusieurs Meteor viendront compléter et remplacer le premier avion, pour filmer les essais et pour bénéficier des progrès réalisés en matière de vitesse. Les deux derniers en date, qui ont rejoint MartinBaker en 1977 et 2001, sont toujours en service, la société estimant que cet avion est le meilleur et le plus fiable pour ce travail. Il faut dire qu’ils ne volent guère plus de 50 heures par an. Mais d’autres avions seront également utilisés, comme le Hawker Hunter dans les années 60 (uniquement avec des mannequins), afin de tester les adaptations des sièges à différents types d’aéronefs. WL 419 et WA 638 sont les deux Meteor actuels de MartinBaker Concurrence Deux autres compagnies britanniques construiront également des sièges éjectables. ML Aviation, dirigée par le belge Marcel Lobelle, dont les premières versions, manuelles, furent installées sur quelques avions. La firme en cessa la production après un accident en 1951 ayant mis le siège en cause. La Folland Aircraft Company acquis la licence de production du siège suédois pour son appareil Gnat Trainer, mais ne souhaita poursuivre dans ce sens pour ses autres appareils. Siège de Saab J21(1945) Siège de Saab J35 Drakken (1955) En Suède, SAAB améliora son premier siège, surtout lors du développement des jets J35 Drakken, puis J37 Viggen qui reçurent des sièges de plus en plus performants, tout-à-fait comparables aux Martin-Baker. Toutefois, lors du développement du JAS39 Gripen, concurrent du Rafale, qui fit son premier vol en 88, SAAB préféra opter pour un siège Martin-Baker Mk10. Aux États-Unis, on a vu que la Navy s’était rapprochée de Martin-Baker dès le début de leurs travaux. Toutefois, à la fin de la guerre, les américains ayant « récupéré » la science des allemands dans ce domaine commencèrent à développer leurs propres produits. En fait, l’éternelle rivalité entre Navy et Air Force, ainsi que leurs besoins réellement différents (la Navy souhaitait des sièges 0/0 pour pallier aux problèmes lors des catapultages/appontages, quand l’Air Force s’intéressait surtout aux éjections à très haute altitude et très grande vitesse), amenèrent l’USAF à encourager plutôt une fabrication « maison » par les constructeurs américains en collaboration avec son propre service de Recherche et Développement. Coque nue du Tilt Seat, ou Rotational B Seat, que vous voyez lors de son test depuis un F106 sur la photo ci-contre. 9 Plusieurs constructeurs (North American, Douglas, Republic, Lockheed, Grumman, …) développèrent donc leurs propres sièges, sur la base des matériels Heinkel, donc commandés au niveau des accoudoirs et utilisant un parachute standard, porté par le pilote (qui était assis dessus), lequel devait se détacher et s’éloigner seul de son siège après l’éjection. Mais aucun ne put réaliser des éjections 0/0, les meilleurs ne descendant pas en-dessous de 500 ft d’altitude minimum. Le plus aboutit fût le Douglas Escapac. La Navy préféra donc se fournir en avions équipés de Martin-Baker Mk 5, évolution du Mk4 correspondant à ses demandes. L’avènement des Jets supersoniques amena l’USAF à lancer un nouveau programme de siège éjectable, qui fût finalement attribué à Convair en partenariat avec Stanley. Le résultat fût le Convair B Seat (ou Tilt Seat), qui fût testé en juin 1961 sur un Convair F106, à 7 000 mètres et 800 km/h (alors qu’il était prévu pour des vitesses de Mach 2+). Le déclenchement se faisait en deux fois, par la poignée située entre les cuisses. Au premier cran, la verrière était éjectée, les harnais verrouillés, le bas du siège se relevait pour remonter les genoux du pilote au niveau de son torse, et le second cran de poignée se débloquait. Puis, sur une nouvelle traction, le siège était élevé audessus du cockpit, puis basculé en position horizontale, le pilote se retrouvant donc sur le dos, en position fœtale, au moment où le canon éjectait réellement le siège au-dessus de l’avion, cette position devant lui permettre de supporter le vent relatif supersonique … qu’il avait quand même déjà affronté de face avant que le siège ne bascule ! La suite était automatisée et adaptée en fonction de l’altitude. L’ensemble pesait 275 kg. Il fut installé sur tous les F106 jusqu’en 1959 mais ne donna pas satisfaction en opérations, plusieurs morts n’ayant pu être évitées. dérivé du Mk 7 pour répondre aux spécificités demandées par Gruman pour son appareil (la référence reprend les trois premières lettres de l’avionneur). Il fut remplacé à partir de 1963 par un siège plus conventionnel fabriqué par Weber. Et lorsqu’en 64 l’USAF décida d’adopter le F4 Phantom II, développé en 1958 pour la Navy, elle adopta en même temps son siège Martin-Baker. Escapac IE1 sur un S-3 Viking en cours d’entretien Simulateur pour la formation des mécanos au maniement du siège Aces II sur un F-16. Ensemble siege K-36 DM et combinaison EEI-15. Siège SKS-94 Au fil des années, la Navy comme l’USAF partagèrent leurs clientèles entre MartinBaker et les deux constructeurs américains, Universal Propulsion qui équipe surtout les AV-8B Harrier II, et surtout McDonnell Douglas avec son Advanced Concept Ejection Seat (ACES II), évolution de l’Escapac. En colonne de droite, vous voyez le siège arrière d’un F-14 Tomcat, autrement dit le siège sur lequel meurt « Goose » dans Topgun : un Martin-Baker Mk GRU-7 A, A la fin de la guerre, les américains ne sont pas les seuls à récupérer le fruit de la recherche allemande. Les Soviétiques testent au sol, dès le 24 juin 1947, un siège éjectable installé sur un Petlaykov Pe-2, dessiné par le bureau d’études de Mikoyan. Il est ensuite installé sur un MiG-9 et testé en vol, à 764 km/h, le 16 janvier 1948. Il est rapidement installé sur les MiG-15 et MiG-17, capable d’éjections à partir de 250 m et jusqu’à 700 km/h. Après diverses améliorations de cette première version, Mikoyan développe, en 1962, un nouveau modèle pour les MiG-21 P et PF, portant les seuils à 1 100 km/h et 110 m. Au début des années 80, le bureau d’études Mikoyan cessa de développer ses propres sièges, l’URSS ayant souhaité uniformiser le système en en confiant les développements à une seule société, Zvezda (Etoile). Créée en 1952, elle était déjà spécialisée dans tous les éléments de sécurité aéronautiques et avait mis au point le E-36. Après plusieurs mises à niveau, il devient le K-36 et est intégré dans tous les avions du bloc de l’est. 10 Ses performances actuelles permettent des éjections de 0 à 25 000 mètres, et à des vitesses comprises entre 0 et M 2,5. Zvezda développe également les combinaisons de vol des pilotes ; en fait, c’est même la société qui fabrique celles des cosmonautes, et son siège éjectable équipait également la navette Bourane. Elle a également développé un siège éjectable pour l’aviation générale, le SKS94, qui équipe par exemple les avions acrobatique Su-31M, Su-26M3 et Yak52M. Pesant 27 kg, il est efficace de 60 à 400 km/h, et de 7 à 4 000 m. Su-31M Elle a enfin mis au point le K-37 pour l’hélicoptère de combat Kamov Ka-50. Avant d’éjecter le pilote, il éjecte les pales ! Et si le siège éjectable avait été inventé en France par un Autrichien ? Info extraite du site municipal d’Issy les Moulineaux Grande première au-dessus du champ de manœuvres d'Issy-le-Moulineaux, le 12 décembre 1912 : un mannequin du poids d'un homme, équipé d'un parachute, est éjecté d'un avion en vol à l'aide d'un petit canon. Cette invention vient à point nommé après une année 1911 catastrophique pour l'aviation française. Sur 500 pilotes répertoriés, 34 ont trouvé la mort ! Conquérir le ciel, c'est bien mais pas à n'importe quel prix. Et c'est bien ce que pense alors ce génial inventeur - Dans les hangars de la firme Astra. © Agence Rol. pas très connu - qu'est le baron Odkolek von Ujezd, un Viennois, officier de l'armée austro-hongroise qui a mis au point en 1893 les premières mitrailleuses automatiques. Il s'est installé dans les hangars de la firme de dirigeables militaires Astra, à Issy-lesMoulineaux, profitant des infrastructures en plein essor dans cette banlieue parisienne depuis que, le 13 janvier 1908, Henri Farman a réussi sur un biplan construit par les frères Voisin à effectuer le premier vol au monde motorisé maîtrisé. Il travaille sur son projet en y incluant le parachute, déjà testé : dessiné par Léonard de Vinci en 1488, inauguré par André-Jacques Garnerin au-dessus du parc Monceau, à Paris, le 22 octobre 1797, expérimenté depuis un avion le 1er mars 1912 par le capitaine Albert Berry, au-dessus de SaintLouis, aux États-Unis. Ce 12 décembre 1912, c'est un succès total. Mais il faudra attendre encore trente-cinq ans et l'avion à réaction pour que l'usage de ce siège éjectable soit généralisé, sauvant ainsi la vie de nombreux pilotes. C'est le 9 juin 1948, en effet, que le lieutenant Robert Cartier, parachutiste d'essai de l'armée de l'Air, réalise la première éjection en vol sur le territoire français, à Brétigny. En ce qui concerne l'utilisation du parachute, c'est en 1935 seulement que les premiers militaires français seront équipés et organisés. PCB Les essais. © Agence Rol. Entrainement SECURITE Les pilotes sont formés à l’utilisation du siège éjectable. Ils utilisent pour cela un simulateur reproduisant le cockpit de l’avion (sans la verrière). Ils peuvent déclencher l’éjection. Leur siège est alors propulsé le long de ses rails et s’élève d’un petit mètre (selon certain témoignage, il s’élevait de plusieurs mètres sur le simu de T-33 dans les années 70). Bien entendu, cette propulsion est moins brutale que lors d’une éjection réelle ! Il n’y a pas de charge explosive, sans doute seulement un système à air comprimé. A voir au compteur 7 minutes 15 de la vidéo de l’émission « C’est pas sorcier » visible à l’adresse http://www.youtube.com/watch?v=5FF0B8jJQkc Si un jour vous trouvez un siège éjectable dans la nature, ne touchez à rien. D’abord parce que certaines des charges explosives qu’il contient peuvent ne pas avoir été déclenchées, en fonction du type d’éjection réalisée. Et en touchant, vous pourriez provoquer leur explosion et mettre votre vie en danger. Ensuite parce que l’état des pièces de l’engin peut permettre à l’enquête d’établir les causes de l’accident, et donc d’en tirer des conclusions pour améliorer la sécurité des pilotes. Toute pièce manquante pourrait fausser l’enquête, et donc nuirait à cette sécurité. Ce qu’il faut faire : prévenir la police et interdire la zone. Simulateur Alpha Jet, à Tours 11 Comment ça marche Après de nombreux développements et améliorations, un certain nombre de caractéristiques sont devenues communes à la plupart des sièges installés sur les avions de chasse modernes. Nous allons observer ci-dessous le fonctionnement d’un siège Martin Baker. Sachez que les avions français sont essentiellement équipés de Mk10 (Alpha Jet, Mirage 2000 et F-1) et Mk 16 (Rafale). Ce dernier pèse 90 kg. Désormais, lorsque le pilote tire sur sa poignée d’éjection, il n’a plus rien d’autre à faire avant de se balancer tranquillement sous son parachute. Toutes les phases de l’éjection se succèdent automatiquement, quelles que soient les position, vitesse et altitude de l’avion. Les automatismes savent identifier instantanément la situation et s’y adapter pour permettre au pilote de rejoindre en sol avec le maximum de sécurité. La poignée est située entre les genoux du pilote. A l’origine, Martin l’avait placée au-dessus de la tête. En la tirant à deux mains, le pilote se mettait dans une position qui limitait les traumatismes de la colonne vertébrale en assurant son alignement vertical. En même temps, le pilote se couvrait la tête d’un voile qui le protégeait du vent relatif. Mais dans cette position, beaucoup de pilotes eurent les bras cassés par ce vent, ce qui leur était fatal en cas de chute au-dessus de l’eau. De plus, de très forts g positifs pouvaient les empêcher de l’atteindre. La poignée basse fût d’abord ajoutée au siège en complément, avant de devenir le seul moyen de déclenchement sur les sièges actuels. La traction de la poignée provoque d’abord deux choses : la fragilisation de la verrière au moyen de cordons d’explosifs situés dans l’épaisseur du Plexiglas * (bien que le siège soit équipé de brise-verrière qui la feraient exploser de toute façon), et le rappel des épaules et membres du pilote de façon à les plaquer contre le siège. Le harnais s’occupe des épaules, la combinaison des bras, et des courroies ramènent les pieds. En même temps, elle déclenche l’allumage de la première des charges qui vont extraire le siège de l’avion hors du cockpit en le faisant glisser sur ses rails. Une partie des gaz émis servira à déclencher d’autres mises à feu, comme celles des fusées destinées à poursuivre l’éjection. En effet, une charge primaire plus forte pourrait assurer l’éjection seule, mais en provoquant des accélérations insupportables par le pilote. C’est pour obtenir une accélération plus progressive que des fusées prennent le relais pour finir le travail. Mais d’autres fusées serviront également à redresser le siège en cas d’éjection dans une position nonhorizontale, et à gagner plus de hauteur en cas d’éjection à basse altitude. Sur cette photo, on distingue clairement les sangles (grises) qui ramèneront en arrière les épaules du pilote. Remarquez également l’angle prononcé du dossier (30°), qui facilitera l’encaissement des 12 à 20g provoqués par l’éjection. 12 Avant la mise en place des sangles de rappel des jambes, les pilotes avaient parfois les jambes cassées par le vent relatif (photo 1952) Notez sur ces verrières les cordons d’explosif destinés à les fragiliser au moment de l’éjection. Les liaisons avec l’avion sont automatiquement coupées, et le pilote est maintenant fourni en oxygène par une bonbonne intégrée au siège. Une balise de détresse est automatiquement déclenchée. Des sondes pitot intégrées au siège en mesurent la vitesse. Un câble fixé au cockpit va, en se tendant, libérer diverses goupilles qui vont déclencher, en particulier, l’allumage d’une charge qui va provoquer le déploiement d’un premier parachute. Appelé « drogue » en anglais, celui-ci est destiné à stabiliser le siège une fois les propulseurs éteints, et à le ralentir. Alors seulement une nouvelle étape est lancée, qui provoque le déploiement du parachute principal (située dans le logement en haut du siège, et relié au harnais du pilote). Dès que celui-ci commence, d’autres charges provoquent le cisaillement des parties du harnais reliant le pilote au siège, en même temps que de puissants ressorts repoussent ce dernier. Bien entendu, cette étape ne se déclenche que lorsque les baromètres intégrés au siège ont vérifié que le pilote était descendu suffisamment bas (réglé entre 16 400 et 19 400 pieds), pour limiter au minimum son séjour dans les conditions infernales régnant à haute altitude. En tout, il y a au moins huit charges différentes qui se déclencheront, au moment adéquat en fonction de la situation, au cours de l’éjection. Le pilote se retrouve enfin à descendre sous son parachute, à une vitesse maximum de 7 m/s. Si l’altitude a permis une séparation immédiate, il s’est écoulé 2,65 secondes depuis que le pilote a tiré la poignée ! Le paquetage de survie, situé dans l’assise du siège, se retrouve pendu sous lui. Il contient une trousse de secours d’urgence, une couverture de survie, des lunettes de soleil, un couteau, une scie filiforme, du fil de laiton et de la drisse, des allumettes de survie, des sachets d’eau, une poche à eau et des comprimés de purification, un tube d’onguent, quelques barres alimentaires, une notice de survie, de la fluorescéine et un canot de sauvetage qui va se gonfler automatiquement avant d’arriver au niveau de la mer. La composition exacte n’a rien d’anecdotique : son contenu répond précisément au risque encouru pendant la mission. Elle doit assurer en priorité la protection contre l’environnement (froid, chaud, eau…), puis le repérage du pilote, et ensuite seulement, l’hydratation et la nourriture (« un homme possède les ressources nécessaires pour survivre au moins quinze jours sans manger »). Mais ce paquetage est également l’assise par laquelle le siège va transmettre au pilote les efforts de l’accélération. Toute déformation irrégulière pourrait provoquer le désalignement de la colonne vertébrale, et donc de graves blessures. Le contenu est donc rangé de façon très précise, de sorte que sa stabilité à l’écrasement soit maximum pendant l’éjection. Lors des missions maritimes, le pilote porte également un gilet de sauvetage, contenant un miroir, une boussole, des fusées de détresse … En touchant la surface bien avant le pilote, le paquetage diminue d’un coup le poids porté par le parachute, et donc réduit la vitesse de descente pour le toucher final. Le siège lui-même va continuer sa descente sous un autre parachute dont l’ouverture se déclenche après la séparation. * : Sur certains appareils, la verrière est éjectée grâce à des boulons explosifs. 13 Quelques cas particuliers Quelques avions, dont le F-104 Starfighter, le B-47 et le B-52, ont été, un temps, équipés de sièges éjectant vers le bas. Pour le F-104, c’était pour éviter plus facilement la haute dérive en T à vitesse supersonique, et pour les bombardiers, cela concernait certains postes d’équipage situés sur le pont inférieur. L’idée a rapidement été abandonnée, car à basse altitude, le résultat était plutôt négatif. Sans compter les g négatifs à supporter ! Cette très rare photo montre le siège du prototype XF-104 En haut, test d’éjection du bombardier sur un B-47 En bas, les russes ont aussi installé de tels sièges sur le Tu-22. Les « sièges » russes K-37 (hélicoptère Ka-50) et SKS-94 (aviation générale), dont nous avons parlé plus haut, arrachent le pilote de l’avion, mais sans emmener le siège. Hélicoptère Ka-50 Hokum Test du SKS 94 sur un Su-29 Pour des avions volant très haut et très vite, comme par exemple les bombardiers B-58 Hustler, B-70 Valkyrie et B-1 Lancer ou le chasseur bombardier F-111 Aardvark, les américains ont repris l’idée du français René Leduc : éjecter carrément le cockpit. On parle alors de capsule éjectable. Comme les Leduc, les F-111 sont équipés en fait d’un cockpit qui se détache entièrement de l’avion avec ses deux occupants, et un morceau de fuselage pour stabiliser sa descente. Mais le poids de l’ensemble est jugé prohibitif. Capsule de F-111 en exposition Capsule de F-111 au bout de son parachute A gauche, test d’éjection de la capsule du B-70 Sur la photo de droite, on peut distinguer au-dessus et en dessous du siège les deux demi coquilles qui vont se refermer devant le pilote 14 A l’origine, en 1960, le Convair B-58 était équipé de sièges éjectables classiques. Mais à vitesse supersonique et très haute altitude, les chances de survie de l’équipage étaient extrêmement minces. Convair lança alors l’étude d’une capsule qui fut mise au point par la société Stanley Aviation Company. Il s’agit d’une capsule individuelle ; chaque membre d’équipage a la sienne. Elle se ferme comme une coquille, du haut vers le bas, et assure la pressurisation. Le B-58 fut alors le premier avion à en être vraiment équipé en 1962. Mais la mise au point de cette capsule nécessitait des tests à vitesse supersonique qui pouvait s’avérer très dangereux pour son occupant. Après un premier test avec mannequin, il fallut bien prendre le risque d’envoyer un être vivant dans le second. Le 21 mars 1962, ce ne fut pas un pilote de l’USAF qui se porta volontaire, mais … une femelle ours prénommée Yogi (comme l’ours du dessin animé de Hanna-Barbera apparu en 1958). C’est elle que vous voyez sur la photo ci-dessous. Volontaire n’est bien sûr pas le mot exact. Elle fut d’ailleurs légèrement endormie, et je me demande encore comment ils s’y sont pris pour l’installer à bord ! Mais elle avait un poids, une stature et une morphologie proche de celle d’un pilote, et convenait donc parfaitement pour le rôle. Elle fut éjectée à 35 000 pieds et 1 400 km/h, et fut récupérée au sol en parfaite santé huit minutes plus tard. Deux semaines plus tard, un autre ours, Big John, recommença l’expérience de 45 000 pieds et à 1 600 km/h avec le même succès. En fait, la capsule fut qualifiée pour des éjections jusqu’à 70 000 pieds et Mach 2,2. Comme tous les systèmes d’éjection, elle assurait à son occupant le retour au sol, mais aussi les moyens de survie nécessaires ensuite ; et elle était en particulier conçue pour flotter si elle tombait à la mer. Le B-58 avait trois capsules, une pour chaque membre d’équipage. Celle du pilote était équipée d’un hublot frontal car, dans certaines situations (dépressurisation par exemple), l’équipage pouvait déclencher leurs fermetures sans pour autant s’éjecter. Le pilote pouvait alors continuer à piloter l’avion. Il faudrait donc admettre que les commandes principales (manche et gaz) restaient accessibles, au moins le temps de ramener l’avion à un niveau de vol « vivable », ce qui ne ressort pas clairement des photos et dessins ci-dessous. Yogi et sa capsule Schéma de la capsule et de son éjection. Remarquez sur l’avion l’emplacement des deux autres membres d’équipage, déjà partis Amusant jeu de mot : En anglais, le mot « Bear » signifie aussi bien « Ours » que « Supporter ». Pourrait-on supporter une éjection à vitesse supersonique ? L’article dont est extraite cette histoire était titré : “B-58 Proves Supersonic Ejection To Be Bear-able” ; « Le B-58 prouve que l’éjection supersonique est supportable » ou « est ours-possible ». SECURITE La procédure de sécurité prévoit qu'afin d’éviter le départ intempestif d’un siège au sol, le mécanicien d’avion place les goupilles de sécurité dès l’arrivée au parking, avant même que le pilote ne sorte de l'avion. Lors du départ, il présente au pilote les goupilles de sécurité qu’il vient de retirer ; ce dernier les compte pour vérifier qu’elles ont bien toutes été retirées. Le pilote doit également relier les sangles de rappel à ses jambes et à ses bras. Il n’y a que dans les films qu’on « saute » à bord de son chasseur ! 15 Claude Parotte (le lecteur du mois dernier) nous a envoyé ces superbes photos prises sur le vif de la perte d’un FA-18 canadien à Lethbridge. La séquence montre le largage de la verrière, l’éjection du pilote et la chute de l’appareil. L’avion est en passage bas et lent quand il entame une vrille suite à l’arrêt d’un moteur. Éjection de la verrière grâce aux fusées d’éjection. Éjection du pilote. Le moteur gauche montre sa tuyère d’éjection complètement ouverte ce qui suppose l’arrêt du moteur. La tête du pilote est tirée vers le bas sous l’effet des « G » subis par l’éjection. Les fusées du siège fonctionnent pendant 2/10 de seconde. C’est suffisant pour éloigner le pilote de la carlingue… et pour redresser le siège expulsé à l’horizontale au départ ! A un millième de seconde de l’éternité pour ce FA-18. Le pilote se désolidarise de son siège. Au moment de l’impact, les flammes jaillissent de la tuyère du moteur gauche. Son dernier chant… Le siège du pilote survole la boule de feu. Le siège rejoint le sol. Notez que sur ce type d’appareil, il n’est pas retenu par un parachute. Ce qui est sans doute généralement le cas, mais j’ai vu sur une vidéo un autre siège ouvrir son propre pépin. Vidéo de ce crash à l’adresse : http://www.youtube.com/watch?v=ZSzk7lDY1iw 16 Voici un extrait du témoignage d’un pilote qui a du s’éjecter. L’histoire se passe en novembre 64, à bord d’un Super Mystère B2, lors d’un exercice de tir à Cazaux . Le texte intégral se trouve à l’adresse ci-dessous … http://www.frenchwings.net/combat/Ejection.pdf RECIT D’UNE EJECTION LIMITE par Jean-Francis Fillastre Le n°3, devant moi, tire, dégage la cible et je m’aligne à mon tour en piqué à 400 kts. Face au soleil couchant et à l’océan, la cible dans le collimateur, j’appuie sur la détente, en haut du manche. Aussitôt, une explosion retentit et secoue l’avion. Instantanément, volant vers 5 ou 600 ft, je cabre et pousse la manette des gaz à fond. Les évènements vont alors se dérouler très rapidement. Dès la mise en cabré, « l’arbre de noël » s’allume: panne hydraulique circuit principal, puis auxiliaire dans la foulée. Reste le circuit secours, mais tout s’éteint : panne électrique totale! Je n’ai même pas le temps d’analyser, que le manche se bloque en piqué. Une seule solution : l’éjection. Le problème, c’est qu’avec la poussée maximum du réacteur, l’avion a accéléré, et quand il part en piqué, la vitesse est proche de 500 kts ; l’altitude est de 4 000 ft environ. L’accélération négative est telle que j’ai la plus grande difficulté à baisser mes bras pour saisir les poignées d’éjection. En effet, l’avion était équipé d’un siège éjectable américain, Republic, à deux commandes placées comme des accoudoirs repliés au niveau du siège, qu’il fallait remonter dans un premier temps, ce qui avait pour but d’empêcher l’écartement des cuisses avec le vent relatif. Les «accoudoirs» ainsi relevés dégageaient leur gâchette. Il fallait alors en serrer au moins une pour déclencher la séquence de l’éjection, et en premier l’éjection de la verrière qui autorisait la mise à feu du siège. Je réussis donc, au prix d’un effort considérable, à saisir et actionner une des deux manettes, tout en plaçant mes pieds sur les étriers. Dans les fractions de seconde qui ont suivi mon action, j’ai réalisé qu’avec la vitesse que j’avais, l’altitude et l’angle de piqué que j’estimais à 60°, il était impossible que je m’en sorte. La séquence étant irréversible, la très fugace pensée qu’il y avait peut-être moyen de débloquer le manche, a été interrompue par le départ de la verrière. Comme j’étais en G négatifs importants, ma tête était soumise à un tel vent qu’elle s’est mise à vibrer latéralement ! Puis le siège est parti. Alors là, je ne vous raconte pas le coup de pied aux fesses! Le siège partait avec plus de 20 G! Ajoutez à cela que du fait de la trajectoire de l’avion, j’étais décollé du siège, ce qui rajoutait des G supplémentaires. Mais ce n’est rien à côté du mur d’air qui m’a frappé à la sortie de l’avion. Je vous confirme que nous ne sommes pas faits pour nous promener dans un fauteuil à 8 ou 900 km/h ! Je me suis mis à tourner rapidement apercevant un coup le ciel, un coup la mer. A ce moment là, j’ai pensé que c’en était fini pour moi ; je n’étais pas triste, je n’avais pas peur; je me disais: c’est cela la mort ? Finalement ce n’est pas si terrible! Je n’ai pas senti la séparation du siège, et m’efforçais vainement de saisir la poignée du parachute, qui du fait de toutes les contraintes, avait glissé vraisemblablement derrière mon épaule. 17 Cette poignée dite «chronobarométrique», comportait deux positions: 0 et 2 secondes. Sur la position 2 secondes où j’étais, le baromètre n’autorisait l’ouverture automatique du parachute qu’en dessous de 10 000 pieds, et il y avait une temporisation de 2 secondes après la séparation du siège. Vu l’urgence, j’aurais dû, normalement, positionner le bouton poussoir sur 0 seconde. La chute inéluctable s’est soudain, brutalement arrêtée, sans que j’aie pu trouver la poignée. A ce moment là, je me suis remémoré un dessin dans «Flight Safety», où l’on voit la main de Dieu sortir d’un nuage pour attraper le parachute en torche d’un pilote malchanceux ! J’ai regardé audessus de moi la corolle du parachute et dessous, se rapprochant, l’océan. Je n’avais plus de casque, de serre-tête, ni de masque, et pourtant, j’avais bien serré la jugulaire, et le heaume était baissé ! Exit, aussi, mon pantalon anti-G. La descente, parachute ouvert, a dû se situer autour de 50 mètres! Je n’ai donc pas eu bien le temps d’apprécier mon premier saut! Mais alors, quel bonheur d’être assis dans ce harnais! Je commence à défaire les boucles des cuissardes, de la poitrine, et plouf!!! Au fait, j’ai un gilet! Je tire la poignée et il se gonfle; plus besoin de nager. J’ai enfin le temps d’analyser la situation. Je suis un peu sonné, mais la fraîcheur de l’eau me fait du bien. Où est donc passé mon dinghy? Il flotte près de moi, toujours dans son paquetage… Et voici le témoignage de la première femme qui s’est éjectée, au moins la première avec un siège Martin Baker. Extrait du site de la marque … http://www.martin-baker.com/images/linda-maloney-ejection-story.pdf LINDA MALONEY par elle-même Le 11 février 1991, Linda Maloney est Navigateur/Opérateur système d’arme à bord d’un Grumman EA-6A Intruder (version de guerre électronique de ce biréacteur datant des années 60) ;sur ce biplace côte à côte, elle est en léger retrait à côté du pilote. Elle totalise alors 394 heures de vol, dont 88 sur ce type d’appareil, lorsqu’avec un second appareil ils décollent pour une mission d’entraînement. Son pilote est le leader de la mission qui doit durer une bonne partie de la journée… Nous décollons de la base de Key West à bord de notre antique EA-6A, chargé avec deux bidons largables de 300 gallons et deux pods de simulation électronique, et nous mettons cap à l’est pour rejoindre le groupe de combat pour l’exercice. Nous devons simuler une attaque électronique et au missile sur le USS Forestall. C’est un magnifique matin ensoleillé, et il n’y a pas un nuage en vue. Après une heure de vol, j’informe par radio le porte-avion que nous sommes prêts pour commencer l’exercice. Il est 12 h 30 lorsque celui-ci prend fin. Nous commandons à notre ailier de nous rejoindre et nous mettons le cap sur Patrick Air Force Base, à environ 200 miles. Le contrôle nous autorise la montée à 15 000 pieds. Alors que nous entamons la montée, l’avion semble instable et le pilote, préoccupé, modifie ses réglages. J’ai l’impression que l’appareil bat de la queue, comme si nous traversions des jets à haute pression. Je remarque que l’avertisseur général s’est allumé sur son écran, ainsi que l’indicateur de pression hydraulique de secours. Je contrôle les manos et remarque que ceux du système hydraulique de vol sont à zéro. Je sors la PCL (Pocket Checklist) de l’avion, et je commence la procédure pour une simple panne hydraulique. L’avertit le pilote de sécuriser le pilote automatique. Il réduit également les gaz puisque nous sommes alors à 300 kt. Il appelle notre ailier qui avait remarqué nos problèmes. Ils décident que nous allons rejoindre la Naval Air Station de Cecil Field, pour bénéficier de ses câbles d’arrêt version Navy, 18 préférables aux barrières version Air Force de Patrick AFB, ainsi que de leurs ateliers mieux adaptés. Le A-6 est équipé de deux systèmes hydrauliques, plus un système de secours. Si l’un des systèmes principaux est en panne, plusieurs fonctions peuvent ne pas fonctionner, mais l’avion peut continuer à voler et se poser avec la crosse d’appontage. Mon pilote ordonne à son ailier de rejoindre Patrick AFB pour refueler comme prévu et de continuer la mission. J’appelle le contrôle pour prévenir de nos ennuis et demander une clearance pour un atterrissage barrière à Cecil Field. Je discute avec le pilote de notre plan. Nous devons éliminer suffisamment de carburant pour alléger notre avion pour ce type d’atterrissage, surtout en tenant compte des 3 000 livres de nos pods. Nous projetons une approche directe, réduisant jusqu’à 180 kts pour sortir les volets avec le système électrique de secours. Nous devrons également sortir à 150 kts le train et la crosse. Je me souviens d’avoir été très contente d’être vivante et que le siège ait fonctionné comme prévu. Je m’inspecte rapidement inspectée à la recherche d’une éventuelle blessure. Je saigne au menton, et je me souviens que la poignée a heurté mon visage. Mais mains et poignets sont également L’indicateur de panne principal coupés, mais je ne semble souffrir de s’allume à nouveau, ainsi que celui du rien d’autre. Je ne vis toujours pas mon gouvernail. Je ne peux pas le croire. Et pilote et espère qu’il est O.K.. Je les manos de pression hydrauliques complète la procédure d’éjection IROK sont maintenant tous à zéro. Presque (Inflate Life Preserver Unit, Release aussitôt, l’avion entame un tonneau sur raft, Options, release parachute Koch la gauche et le nez tombe sous fittings upon water entry [gonfler le l’horizon. Le pilote tente aussitôt de gilet, libérer le radeau, options, contrer au manche, mais cela ne donne déboucler le harnais du parachute rien. Il enfonce alors le palonnier à avant l’entrée dans l’eau]) que j’ai droite sans plus de résultat. Alors qu’il atteint 60° d’inclinaison à gauche et 20° de pente, il annonce « Je n’ai plus le contrôle. Éjecte! » Je le regarde, surprise, et il répète « Éjecte! » Tout semble alors aller au ralenti. Je tire la poignée haute et mon siège eexplose la verrière. J’ai le souvenir d’une formidable explosion alors que le siège monte le long de ses rails, et d’une sensation de confettis jaunes remplissant le cockpit. Ma planchette de genou, pleine de papiers jaunes, est en train de se répandre. Mon pilote s’éjecte une seconde plus tard. Je perds brièvement conscience, et apprise à l’entraînement. Je me prépare quand je reviens à moi, je suis pendue au contact avec la surface et à monter sous mon parachute, descendant vers dans le canot. Je suis rassuré de le voir l’océan. D’habitude, je porte des se balancer en-dessous de moi et lentilles, mais ce jour-là je porte les commencer à se gonfler lunettes que je viens d’acheter. La automatiquement. Bien que nous visière de mon casque a été arrachée soyons en février, l’eau en Floride est à par la force de l’éjection, et mes environ 10°. Je me souviens que je me lunettes aussi. Ma vue n’étant que de suis entraînée à ne pas dégrafer le 20/200, tout ce qui est loin est flou. Je parachute avant que mes pieds ne ne vois ni l’avion ni le pilote. Je ne touchent l’eau. Mais j’ai toujours eu distingue que l’océan et le ravage au peur de me retrouvée emmêlée dans le loin. Plus tard, le pilote me dira qu’il a parachute et je décide de me détacher vu l’avion continuer à rouler et plonger dès que je penserais pouvoir « sauter » droit dans l’eau, dans un immense dans l’eau. Ensuite je me hisse splash, laissant une large marque vert rapidement dans le canot. Dans ma brillant à la surface. hâte, j’oublie de dégrafer mon assise, qui risque d’abimer le raft et qui en Alors que nous montons à 15 000 pieds et ralentissons à 270 kt, nous continuons calmement les procédures de secours. Nous sommes conscients du sérieux de la situation, mais aucun des deux ne s’attend à ce qui va suivre. 19 plus est lourde. Dieu merci, elle n’a rien abimé et je peux m’en défaire. Je m’assieds et examine ma situation, enlève ma combinaison, allume quelques fusées, libère de la fluorescéine qui teinte l’eau en orange. Je sors ma radio et essaie de l’allumer, mais elle est H.S., sans doute du fait de tous les essais lors des prévols. Un Orion en route vers les Bermudes s’est détourné pour rechercher les survivants. Je sais qu’il m’a vue car il fait un huit en battant des ailes. Je me sens si rassurée ! Dans l’heure qui suit, plusieurs hélicoptères arrive. L’un d’eux se positionne au-dessus de moi et un sauveteur en descend. Approchant du radeau, il me demande si ça va, et quand je lui réponds, pouce levé, que tout va bien, je vois sa surprise de constater que je suis une femme. Un autre hélico récupère le pilote, et nous sommes emmenés vers l’hôpital naval de Jacksonville. Aucun de nous deux n’est sérieusement blessé. Mes coupures aux mains sont dues à ma mauvaise habitude de retirer mes gants en vol. J’en souffrirais pendant deux semaines. J’apprendrai plus tard que je suis la première femme à s’être éjectée. D’ordinaire, lorsqu’un gars s’éjecte avec un siège Martin-Baker, il reçoit une cravate. Un commercial de la marque m’a contacté pour me dire que je recevrai une épinglette. Quelques mois plus tard, je serais invitée à un gala à Washington pour fêter la 6 000) vie sauvée par la marque. Je continuerai à voler ensuite sur EA6B Prowler, affectée sur le porte-avions USS Abraham Lincoln. Je quitterai la Navy en 2004 après vingt ans de service. Aujourd’hui, je suis mariée et mère de deux enfants, je travaille et j’ai écrit un livre … grâce à Martin-Baker ! a l aide ! i Je profite de ce numéro, plus léger pour cause de congés, pour mettre vos connaissances à l’épreuve. En effet, j’ai une belle collection d’images représentant des avions improbables et mal connus, et qui mériteraient certainement que leurs histoires soient contées, au même titre, par exemple, que les Flying Pancakes (Vought V-173, cicontre) dont je vous ai parlé il y a quelques mois. Mais encore faudrait-il que je connaisse au moins leur nom. Or, mes images ne sont pas légendées. Alors je réclame votre aide pour les identifier. Si vous avez le moindre élément d’identification, même incertain, communiquez-le-moi, et je ferais l’enquête. Ce mois-ci, je vous soumets cinq photos, mais je vous en proposerais d’autres régulièrement … Et d’ailleurs, si vous-même avez des photos à nous faire identifier, n’hésitez-pas ! Merci d’avance de votre collaboration ! Avion n° 1 : 20 Avion n° 2 AVION N° 3 21 AVION N° 4 AVION N° 5 22 23 Archaeopteryx, le planeur de vol libre « Maman, les p’tits avions qui vont dans l’ciel, ont-ils des jambes ? - Mais oui mon gros bêta, s’ils n’en avaient pas, ils ne marcheraient pas ! » Vous connaissiez, vous, l’Archae optéryx ? Moi, non. Pourtant, il paraît qu’après plusieurs années de développement et de tests, il est commercialisé depuis 2010. C’est une œuvre de la société suisse d’Ernst Ruppert, Ruppert Composite. Ce planeur pèse à peine 60 kilos, grâce à l’emploi de matériaux ultra modernes, ultra légers et ultra résistants. Grâce à eux, l’appareil, qui peut comme tout planeur être remorqué par un avion, un ULM ou être treuillé, peut aussi décoller sans aide depuis une pente, comme un deltaplane. Accroché dans le cockpit par son harnais, le pilote peut courir sur ses jambes qui sortent sous le fuselage. Dès que l’avion est en vol, il rentre ses jambes et les pose sur les palonniers. Accessoirement, il peut aussi être catapulté à l’élastique. Une fois en vol, c’est un planeur ordinaire, plutôt performant et très maniable, avec une finesse de 28. Testé par Philippe Bernard, celui-ci avait commenté son vol ainsi : « C’est la plus confortable, la plus géniale et la plus aboutie de toutes les ailes qui ont été fabriquées jusqu’à présent ! On peut enrouler, donc tourner dans les ascendances, comme on le ferait avec un parapente; dans des petits rayons, tout près de la pente. Ensuite, on décolle et on atterrit dans les mêmes terrains et les mêmes conditions que les ailes delta. Finalement on peut penser et gérer son vol comme un pilote de planeur, avec des très grandes balades de 200 à 300 km par jour. » L’atterrissage se fait sur un train monotrace, mais peut accessoirement se faire aussi sur les seules jambes du pilote. C’est dire qu’on peut se poser très court ! Une fois au sol, il se démonte très facilement et se range dans sa remorque. Bien entendu, l’utilisation de ces matériaux a quand même un défaut : le prix. J’ai lu dans un article de 2010 qu’il coûtait 100.000 francs. Suisses bien sûr ! Donc 81.000 euros. Quand même ! Allez voir les photos et surtout la magnifique vidéo sur le site du constructeur. Vous n’en reviendrez pas ! http://ruppert-composite.ch/fr/flugzeug/portrait.html ou http://player.vimeo.com/video/39325401 24 Nouveau : AIR ULM PARIS Le Véliplane vous propose désormais une boutique de vente en ligne, Air ULM Paris, dans laquelle vous trouverez tout le matériel dont le pilote a besoin. Et chacun sait la compétence de Serge et de Geneviève Bouchet dans ce domaine ! Retrouvez leurs offres sur leur nouveau site : http://www.ulmparis.com/ 25 Les P’tites News Le dernier film d’Almodovar vous mène en avion Sorti sur les écrans français le 27 mars, « Les amants passager » est un conte qui se passe à bord d’un avion de ligne qui, pour une raison technique, ne peut pas atterrir. Passagers et équipage, tous plus hauts en couleurs les uns que les autres, vont devoir vivre ensemble des heures qui pourraient bien être les dernières. Que vont-ils bien pouvoir en faire ? Sur fond de comédie débridée et morale, tous les personnages passent le temps en faisant des aveux sensationnels qui les aident à oublier l’angoisse du moment. Les maitres-mots de la bande annonce : « Vous pensiez avoir peur en avion ? Vous n’avez encore rien vu ! Pédro Almodovar est aux commandes. Attachez vos ceintures et détendez-vous ! » Project Zéro d’AW : Faut-il y croire ? Pour être beau, il est beau ! Ce démonstrateur d’hélicoptère convertible est présenté à l’occasion d’Héli Expo par Agusta Westland, l’un des géants de l’hélicoptère. Donc une boîte sérieuse. Et pourtant ? Entièrement en carbone, et entièrement électrique : superbe ! Pour le reste, pas si révolutionnaire que ça. Et ce n’est qu’un projet, né d’un groupement de bureaux d’études, dont les caractéristiques techniques ne sont sans doute pas encore définitives. Mais est-ce un projet viable ou un simple coup de com ? Pour plus d’infos, je vous renvoie au site Aérobuzz. Gil Roy vous présente très bien l’engin, et ses amis de forum vous disent encore mieux ce que l’on peut en penser ! http://www.aerobuzz.fr/spip.php?article3271 Meeting exceptionnel pour les 60 ans de la Patrouille de France Le 26 mai 2013, la PAF fêtera son 60ème anniversaire par un meeting gratuit à Salon de Provence, son aérodrome de résidence. Pour l’occasion, elle a invité les patrouilles les plus célèbres d’Europe et même de plus loin. Seront présents les Red Arrows (GB), les Frecee Tricolori (Italie), les Aguilas (Espagne), la Patrouille Suisse (CH), la Marche Verte (Maroc), les Iskri (Pologne), les Red Devils (Belgique) et la Kril Oluje (Croatie). La patrouille Russe Striji et ses MIG 29 n’a pas encore confirmé sa venue, mais l’Armée de l’Air et l’ALAT présenteront également leurs appareils en vol (Rafale et EC 665 Tigre). Pour l’occasion, la PAF arborera toute l’année un logo spécial L’A-350 motorisé Rafale : après l’Inde, la Malaisie La Malaisie serait sur le point de signer une commande de 18 Rafale. Il est encore en compétition avec l’Eurofighter, le F-18 et le Grippen, mais la décision Indienne, non encore signée, pourrait bien influencer lourdement le choix Malais. La Malaisie négocierait actuellement le montage local de ces appareils. Le premier A-350 vient d’être équipé de ses deux réacteurs Rolls Royce Trent XWB. Chacun de ces bébés pèse plus de huit tonnes. Ils sont positionnés sous l’appareil au moyen de lasers, puis l’engin qui les amène est lui-même soulevé verticalement jusqu’au contact avec le mât qui va le soutenir. Avant que toutes les connections (électricité, hydraulique, carburant, commandes …) soient établies, ce qui va prendre plus de six heures, le réacteur est d’abord solidement fixé au moyen de quelques gros boulons ! Une attache à l’avant, et une à l’arrière. Premier vol d’ici trois mois, après quelques heures d’essais au point fixe. 26 Les Hawks des Red Arrows de la RAF Les F-5 de la Patrouille Suisse Le jeu des 7 erreurs Devinettes Sept différences se sont glissées entre les deux versions de cette photo exceptionnelle de deux F-16 des Thunderbirds de l’USAF. A vous de les découvrir ! (Remarquez au passage que ces deux pilotes ne se voient pas !) 1/ : Quel point commun réunit Alice K. Moore, Kristin Goodwin, Jenn Jeffords et Jennifer Wilson (photo ci-dessous) ? Et qu’est-ce qui différencie cette dernière des trois autres ? 2/ : Quel est le point commun entre le Hawker Hunter F-4, le CM-170 Fouga Magister et le SIAI SF-260 Marchetti (photo ci-dessous)? Kézakaéro Que représentent les deux images ci-dessous ? (Solutions en dernière page). A- B27 Les Solutions Jeu des sept erreurs : Concernant l’avion du haut, la pointe avant est plus longue, le Sidewinder est plus court, la cocarde sous la dérive a reculé, et sur la dérive il y a une étoile en plus en bas et une étoile à la place de l’Aigle centrale. L’avion du bas a perdu l’antenne dorsale qui se trouvait juste devant la dérive, et il vole désormais pour la Sunites States Air Force. Kézakaéro : A : les sondes pitots à la pointe avant d’un Boeing 747, avec leurs ombres portées B : l’arrière du cockpit d’un bomrdier B-1. Remarquez les trappes des sièges éjectables des deux membres d’équipage arrière. Devinettes : 1/ Ces trois femmes sont pilotes sur le bombardier furtif B-2. La dernière l’a même piloté en mission de combat en Iraq. 2/ Ce sont les avions sur lesquels a évolué la patrouille militaire belge, les Red Devils (respectivement de 59 à63, de 65 à 77 et de 2011 à ce jour). Photo du mois dernier La photo du mois dernier représentait l’aéroport d’Anglet (les angles des lignes jaunes) – Biarritz - Bayonne (64). A deux pas de la frontière espagnole, au bout d’une plage de 200 km, celle qui longe les Landes, et à la fois en France et au Pays Basque (deux pays en même temps). Elle était signée Marguerite Despature. Quatre bonnes réponses seulement ce mois-ci, envoyées par Martine Rangée, JeanRémy Ragaru, Christophe Nommay, et Frédéric Velsch. Nous les félicitons tous ! La photo d’Avril : Si la tour qui domine ce village fait référence à Rome, elle évoque aussi l’Auvergne par le nom des seigneurs qui y ont régné lors de ses plus belles heures, dont un célèbre maréchal qui mourut glorieusement mais non sans trembler, si l’on en croit la légende. Avant d’être vendu au Roi pour payer les dettes de jeu de son seigneur, cette vicomté bénéficiait d’une quasi autonomie et s’étendait sur plusieurs départements. Aujourd’hui, ce n’est plus qu’un joli petit village de 800 âmes… Quelle est cette ville ? Réponse par retour de mail, comme d’habitude ! (Photo en ligne sur www.survoldefrance.fr, le nom du photographe avec la solution le mois prochain.) 28