LA DAME DE LA MER

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LA DAME DE LA MER
D’après Henrik Ibsen
Par le Teatro Malandro
Mise en scène d’Omar Porras
Du mardi 18 au samedi 22 MARS 2014
(Mardi 18 et mercredi 19 à 20h30 / jeudi 20 à 19h30 / samedi 22 à 18h)
Théâtre La Piscine
2H l À partir de 13 ans
Théâtre Firmin Gémier / La Piscine 254, avenue de la Division Leclerc 92290 Châtenay-Malabry - 01 41 87 20 84
www.theatrefirmingemier-lapiscine.fr
Vilhelm Scheel, Henrik Ibsen à Oslo, 1904
Avec
Sophie Botte Bolette
Philippe Cantor l’Etranger
Olivia Dalric Ellida
Paul Jeanson Arnholm
Serge Martin Wangel
Jeanne Pasquier Hilde
François Praud Lyngstrand
Didier Puntos (musicien) Ballested
Equipe artistique
Texte français, adaptation Marco Sabbatini
Assistant à la mise en scène Jacint Margarit
Scénographie Amélie Kiritzé-Topor
Costumes Coralie Sanvoisin
Assistante aux costumes Magali Angelini
Couturière Irène Schlatter
Maquillages et coiffures Véronique Nguyen
Création lumières Mathias Roche
Création son Emmanuel Nappey
Musique Didier Puntos
Coproduction Teatro Malandro, Théâtre de Carouge-Atelier de Genève et Wagner Geneva Festival
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PISTES PÉDAGOGIQUES
I AVANT LE SPECTACLE
1. Sur l’auteur et la pièce. Recherches sur Ibsen et son oeuvre, le théâtre scandinave, la Norvège.
2. Que dit de la pièce le titre La Dame de la mer ?
3. Les thèmes de La Dame de la mer. Quels sont ceux qui peuvent toucher un public de 2013 ?
4. Les personnages (caractéristiques, évolution ). Lesquels nous touchent particulièrement ?
5. La langue : est-elle moderne (pour autant qu’on puisse en juger par une traduction) ? La
comprend- on bien ?
6. Y a-t-il une part de fantastique dans La Dame de la mer ?
7. La Dame de la mer a été présentée dans le cadre du Wagner Geneva Festival, parce que la pièce
d’Ibsen présente des similitudes avec un opéra du compositeur allemand, Le Vaisseau fantôme. Faire
des recherches sur l’opéra. Quels sont ses liens avec la pièce ?
8. Vous semble-t-il qu’il faille adapter la pièce d’une manière ou d’une autre ? Si oui, pourquoi et
comment ?
9. Sur la production (le spectacle). Que savez-vous du spectacle avant d’y aller (lieu de
représentation, personnes qui participent au spectacle, durée, style…) ?
10. Comment imaginez-vous une représentation de La Dame de la mer ? En costumes anciens ou
dans une transposition ? Une transposition à quelle époque, et pourquoi ?
11. La scénographie : quelles sont les différentes sortes d’images ? A quoi peut servir chaque sorte ?
Que voit-on sur le plateau ? Quelles couleurs, quelles formes ? Qu’est-ce que cela vous évoque ? Ces
images correspondent-elles à l’idée que vous vous faisiez de la scénographie ?
12. Les costumes : quelle époque est évoquée ? Quelles couleurs ? Que nous disent ces costumes ?
S’accordent-ils à la scénographie ?
13. Le générique annonce une pièce d’après Ibsen, et non de : qu’est-ce que cela signifie ?
Qu’est-ce qu’un metteur en scène peut être amené à adapter ?
14. Le générique :
a. Détailler les fonctions et les expliquer
b. Compter le nombre d’intervenants.
c. Qui faut-il encore compter comme personnel travaillant sur la production, qui ne figure pas
ici ? (Les permanents du théâtre : techniciens, employés à la communication et à l’administration.)
II APRÈS LE SPECTACLE
15. Partage libre des impressions. Le spectacle a-t-il correspondu à nos attentes ? à notre vision ou
lecture de la pièce ? Qu’avons-nous aimé ? que n’avons-nous pas aimé ? Avons-nous ri, été touchés ?
Pourquoi ?
16. Evaluation de points précis à l’aide de la liste ci-dessous. Pourquoi tel point est-il réussi ou non ?
L’ensemble est-il cohérent ou non ?
17. Si la pièce a été lue préalablement : quels sont les changements frappants entre la pièce d’Ibsen
et l’adaptation d’Omar Porras et de Marco Sabbatini ?
18. Ecriture à tête reposée d’un jugement, d’une critique sur le spectacle (on peut s’aider des critères
figurant dans la liste ci-dessous). On peut évoquer :
a. L’oeuvre et son auteur
b. Les aspects visuels (décor, éclairages, costumes) et sonores
c. Les acteurs, la direction d’acteurs
d. Les aspects positifs, négatifs de la production
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e. Les réactions du public
QUELQUES ÉLÉMENTS CONSTITUTIFS D’UN SPECTACLE
D’après Patrice Pavis, Dictionnaire du Théâtre, Paris, Armand Colin, 2006, s.v. Questionnaire
Acteurs
_ Gestuelle ; changements dans leur apparence
_ Construction des personnages, lien entre l’acteur et les rôles
Scénographie
_ Rapport entre espace du public et espace du jeu
_ Sens et fonction de la scénographie par rapport à la fiction mise en scène
_ Rapport du montré et du caché
_ Comment évolue la scénographie ?
_ Connotations des couleurs, des formes, des matières
Lumières
_ Lien à la fiction représentée, aux acteurs
_ Effets sur les spectateurs
Objets
_ Fonction, emploi, rapport à l’espace et au corps
Costumes, maquillages, masques
_ Fonction, rapport au corps
Son
_ Fonction de la musique, du bruit, du silence
_ A quels moments interviennent-ils ?
Rythme du spectacle
_ Rythme continu ou discontinu
Le spectateur
_ Quelle attente aviez-vous de ce spectacle (texte, mise en scène, acteurs) ?
_ Quels présupposés sont nécessaires pour apprécier le spectacle ?
_ Comment a réagi le public ?
_ Quelles images, quelles scènes, quels thèmes vous ont marqué-e ?
_ Comment l’attention du spectateur est-elle manipulée par la mise en scène ?
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HENRIK IBSEN (1828-1906)
Ibsen par Eilif Petersen (1895)
De par les douze dernières pièces qu’il écrivit, Ibsen créa une véritable révolution théâtrale en
Europe. Il est remarquable que l’un des auteurs les plus importants pour l’évolution du théâtre en
Occident soit issu de la Norvège, pays longtemps dépendant politiquement, qui n’accède à la pleine
indépendance qu’en 1905, dont la langue – du moins celle utilisée par Ibsen – n’est autre qu’une
variante du danois, et qui n’a pas produit une littérature et un théâtre approchant, même de loin,
l’ampleur de ceux de ses voisins méridionaux (Allemagne, France, etc.). Et pourtant, après avoir
commencé au théâtre dans la veine épicoromantique, c’est lui qui introduit le réalisme sur scène,
amenant ainsi une révolution dans la pratique dramatique. Pour Pirandello, Ibsen n’est rien moins
que le plus grand dramaturge après Shakespeare…
Pourtant, il fallait peut-être un pays à la tradition théâtrale très faible pour que surgisse un génie
porteur de cette révolution. On peut supposer que le modèle romantique très fort en Allemagne ou
en France y empêchait son éclosion. De fait, d’autres artisans de ce puissant renouveau du théâtre
viennent aussi de Scandinavie (Strindberg, Bjørnson) ou de Russie (Tchékhov), autre pays moins «
théâtral » que les contrées germaniques ou françaises.
L’apport immense d’Ibsen au monde du théâtre a été reconnu et salué de son vivant même. Il meurt
auréolé de gloire, ses pièces sont montées partout dans le monde, de nombreux écrivains lui rendent
hommage…
Le théâtre ibsénien
Contrairement au théâtre romantique où le drame naît des « chocs causés par une réalité qui frustre
ou bloque les âmes dans leurs aspirations », c’est véritablement, chez Ibsen, « le quotidien, dans sa
dimension sociale et familiale », qui sert de cadre à celui-ci. « Des existences lisses, en apparence
tranquilles, se trouvent mises en question parce que des fautes et des erreurs refont surface,
inexorablement »1. Ainsi, « le drame ibsénien, c’est un peu la tragédie grecque qui se démocratise et
qui frappe la famille bourgeoise »2.
1 Michel Meyer, « Ibsen ou l’invention du théâtre moderne » in Ibsen, Drames contemporains, Le Livre de poche, La
Pochothèque, 2005, p. 6.
2 Ibid., p. 27.
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« Depuis Les Piliers de la société jusqu’à Quand nous nous réveillerons d’entre les morts, toutes sortes
de revenants, vrais-faux fantômes, feront à leur manière de la maison humaine un espace qu’un
troisième personnage peut toujours venir hanter »1. Ces histoires en général volontairement
enfouies resurgissent et créent le drame : ainsi, dans Une maison de poupées, l’une des plus célèbres
pièces d’Ibsen, Nora, mère de famille apparemment heureuse, est poursuivie par un créancier à qui
elle a jadis emprunté de l’argent en secret afin de soigner son époux malade. Le présent est peu à
peu aliéné par le passé, et dès lors, dans une succession implacable de faits, Nora reconsidérera
totalement sa place à l’intérieur de la famille et son rapport à Helmer, son mari. Elle quittera
finalement le domicile conjugal. D’autres pièces, comme Rosmersholm (que beaucoup considèrent
comme le chef-d’oeuvre d’Ibsen), sont basées sur une histoire ancienne encore plus tragique et plus
existentielle.
Ibsen aborde, au fil des douze dernières pièces de sa production – les « drames contemporains » –
des thèmes comme la maladie, l’argent, l’inceste, les rapports parents-enfants, le handicap,
l’hérédité, etc. Les pièces ne résolvent pas forcément les problèmes posés (« questionner est ma
vocation, répondre, non », écrit Ibsen en 1875 dans un poème au critique Georg Brandes 2) ; les
personnages subissent souvent des destins difficiles, allant jusqu’au suicide.
CHRONOLOGIE
1828 : naissance à Skien (Norvège du Sud). Père riche, propriétaire d’une distillerie.
1835 : faillite du père. Déménagement.
1844 : départ d’Henrik Ibsen pour Grimstad, petite ville où il devient garçon apothicaire. A Grimstad,
lectures, écritures ; développement d’une réflexion de type social. La révolution de 1848 marque
Ibsen.
1850 : journaliste indépendant (critique théâtrale, poèmes) ; enseigne à l’Ecole du dimanche des
Associations ouvrières du mouvement de Markus Thrane, fondateur du socialisme en Norvège.
Intense activité littéraire. Peint. Publie Catilina, première pièce éditée, à compte d’auteur. Création
du Tertre du guerrier, pièce romantique-nationaliste, première pièce jouée. Ole Bull, célèbre
violoniste, fait engager Ibsen par le Norske Theater à Bergen (premier théâtre de langue
norvégienne, fondé par Ole Bull lui-même) pour la fonction d’assistant metteur en scène et auteur en
titre (une pièce par an). Il montera au total plus d’une centaine de pièces.
1856 : création à Bergen de La Fête à Solhaug, féerie inspirée des ballades médiévales. Grand succès
public. Fiançailles avec Suzannah Thoresen ; le mariage se fera en 1858.
1857 : déménagement à Christiania suite à l’offre du Christiania Norske Theater : il en devient
directeur artistique.
1858 : grand succès public des Guerriers de Helgeland.
1859 : naissance de Sigurd, unique enfant du couple Ibsen.
1862 : faillite du théâtre. Ibsen, grâce à une bourse, va collecter des légendes populaires en Norvège
occidentale.
1863 : isolé et critiqué de toutes parts, Ibsen se prépare à s’exiler. Obtient une petite bourse ;
Bjørnstjerne Bjørnson (grand auteur romantique, ami d’Ibsen) organise une souscription pour l’aider
à partir. Engagement comme conseiller artistique au Christiania Theater.
1 Monique Borie, Le Fantôme ou le théâtre qui doute, Actes Sud, 1997, cité sur http://www.acte2deux.com/?p=
3659.
2 Cité par Vigdis Ystad, « Le théâtre de Henrik Ibsen », in Ibsen, Drames contemporains, Le Livre de poche, La
Pochothèque, 2005, p. 57.
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1864 : création des Prétendants à la couronne : grand succès public. Départ en avril pour
Copenhague. Obtention d’une bourse pour étudier, pendant un an, l’art, l’histoire et la littérature à
Rome et à Paris. Est à Rome en juin. Se destine, dans ses écrits futurs, à critiquer la lâcheté de ses
compatriotes.
1866 : publication de Brand, « lesedrama » (drame destiné à la lecture). Grâce à Bj. Bjørnson, obtient
une pension viagère de poète qui le met à l’abri du besoin.
1867 : publication de Peer Gynt, second « lesedrama ».
1868 : installation pour sept ans à Dresde.
1872 : parution de Brand en allemand, première traduction étrangère d’une oeuvre d’Ibsen.
1873 : publication d’Empereur et Galiléen qu’Ibsen considérait comme son oeuvre majeure.
Succès public de La Comédie de l’amour.
1874 : séjour à Christiania après dix ans d’absence.
1875 : Bj. Bjørnson publie ses premiers drames contemporains, qui exercent une influence sur
l’inspiration d’Ibsen. Les Ibsen s’installent à Munich jusqu’en 1891.
1876 : création au Christiania Theater de Peer Gynt avec la musique qu’Ibsen a commandée à
Edvard Grieg. Première pièce d’Ibsen (Les Guerriers de Helgeland) donnée à l’étranger (Munich).
1877 : docteur honoris causa de l’université d’Upsala (en Suède). Publication et création à
Odense (Danemark), avec succès, des Soutiens de la société, violente satire sociale.
1878 : Les Soutiens de la société est joué simultanément dans cinq théâtres en Allemagne.
1879 : publication et création à Copenhague d’Une maison de poupée. Scandale.
1880 : les Ibsen s’installent à nouveau à Rome, jusqu’en 1885. Sigurd y fait des études de droit.
1881 : publication des Revenants. En raison des thématiques difficiles qu’elle aborde (maladies
vénériennes, inceste, euthanasie), aucun théâtre scandinave ne l’accepte.
1882 : création de la pièce à Chicago (en norvégien). Publication d’Un ennemi du peuple. Violentes
critiques.
1883 : création de la pièce à Christiania. Création en Norvège des Revenants, à Halden.
1884 : publication du Canard sauvage.
1885 : séjour en Norvège après onze ans d’absence.
1886 : publication de Rosmersholm.
1887 : création de Rosmersholm à Bergen.
1888 : publication de La Dame de la mer.
1889 : premières traductions françaises (Les Revenants, Une maison de poupée). Création de La
Dame de la mer au Christiana Theater.
1890 : publication des OEuvres complètes en anglais. Publication de Hedda Gabler.
1891 : création de Hedda Gabler à Munich. Déménagement et installation définitive à Christiania.
1892 : mort de Hans Jakob Henriksen, fils illégitime qu’Ibsen avait eu avant son mariage. Mariage de
Sigurd avec Bergljot Bjørnson, la fille de l’écrivain. Publication de Solness le constructeur.
1893 : création de Solness le constructeur à Berlin puis à Christiania.
1894 : publication de Petit Eyolf.
1895 : création de Petit Eyolf à Berlin puis à Christiania. A cette époque, Ibsen est déjà un personnage
légendaire.
1896 : création d’une version remaniée d’Empereur et Galiléen à Leipzig. Publication de John Gabriel
Borkman.
1897 : création de John Gabriel Borkman à Helsinki (dans deux théâtres, l’un finnois, l’autre suédois).
1898 : à l’occasion du septantième anniversaire d’Ibsen, les représentations, les publications se
multiplient.
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1899 : les statues d’Ibsen et de Bjørnson sont inaugurées devant le Christiania Theater. Sigurd est
nommé directeur des Affaires étrangères norvégiennes. Publication de Quand nous nous réveillerons
d’entre les morts.
1900 : création de Quand nous nous réveillerons d’entre les morts à Stuttgart. Attaque d’apoplexie :
Ibsen ne peut plus écrire.
1901 : seconde attaque.
1904 : publication de la correspondance d’Ibsen.
1905 : Sigurd est nommé premier ministre de Norvège.
1906 (23 mai) : mort d’Ibsen. Plus de neuf cents représentations de ses oeuvres ont lieu de par le
monde. Le soir de ses funérailles, le Nationaltheatret de Christiania donne Peer Gynt.
Source : Ibsen, Théâtre, éd. et trad. Régis Boyer, Gallimard, Bibliothèque de la Pléiade, 2006, pp. XLIIILVI.
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Affiche pour le Théâtre Ibsen de Vienne,
par Frank Wedekind (1898)
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LA DAME DE LA MER
Fruen fra havet, 1888
La Dame de la mer est une pièce « heureuse » (ce n’est pas la seule pièce d’Ibsen dans ce cas) : le
passé y met en péril le présent, mais les personnages sauront trouver une solution à la crise posée
par la résurgence du passé ; un avenir apaisé pourra se construire.
Notons tout d’abord que, comme naguère Peer Gynt et davantage que les autres « drames
contemporains » d’Ibsen, la pièce est toute tissée de motifs légendaires. Selon Régis Boyer,
Il est tout à fait licite de penser que l’héroïne de La Dame de la mer tout comme l’argument d’ensemble de la pièce
proviennent d’une folkevise ou, en tout cas, en sont une réminiscence : une ondine […] éprise d’un congénère
masculin, qui s’incarne sous forme humaine, essaie de vivre un amour terrestre, mais finit par ne plus être capable de
résister à l’appel magique du surnaturel dont elle est issue, en dépit de tous les efforts des humains – voilà
l’argument de cette pièce […] Le vieux norois elliisi renvoie soit à un type de petit bateau […] soit à une créature
surnaturelle rare et mal définie. Ellida porte donc sans conteste un nom de sirène…1
L’intrigue principale de la pièce est centrée sur Ellida, la « dame de la mer ». Fille d’un gardien de
phare, nommée, on vient de le voir, d’après un type de bateau, elle est fortement attirée par la mer,
qui représente pour elle l’« horrible » ou l’« effroyable » qui à la fois attire et effraie :
Ellida est de l’océan, c’est de là qu’elle vient – et nous pouvons conclure que c’est là, normalement, qu’elle
retournera. Il n’est pas contestable que la nature joue un rôle de premier plan dans ce drame, tant intérieurement
qu’extérieurement. Il y a le fjord, certes, le bras de mer où arrivent les vapeurs, la chaîne de montagnes en face,
comme souvent dans les drames d’Ibsen […] Surtout, les grandes forces instinctives qui mènent l’homme, celles aussi
qui sondent les reins et les coeurs sont sans doute plus actives ici, ou, pour dire la même chose en d’autres termes, la
civilisation (la culture ?) avec ses artifices est peut-être moins présente 2.
Edvard Munch, La Dame de la mer
1 Ibsen, Théâtre, Gallimard, coll. Bibliothèque de la Pléiade, 2006, pp. 1845 sq.
2 Ibid., p. 1846.
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Avant d’être demandée en mariage par le docteur Wangel, elle a connu un marin qui s’est uni à elle
au cours d’un rite d’union symbolique : il a jeté deux anneaux leur appartenant dans la mer.
Accusé d’un meurtre, il a fui tout en jurant qu’il reviendrait chercher Ellida. Elle-même a rompu leur
lien dans des lettres qui sont toujours restées sans réponse, puis s’est mariée avec le docteur
Wangel, un veuf. Elle a eu l’impression de s’être vendue à lui, achetant ainsi sa sécurité. « Sans doute
un mariage est toujours consenti, mais il l’est plus ou moins superficiellement. L’héroïne de La Dame
de la mer déplore précisément que son union ne soit qu’un marché consenti. Peut-on introduire dans
le mariage le consentement profond des époux, même quand celui-ci a manqué au début ? Voilà le
problème de La Dame de la mer 1. » Au cours de la pièce, l’Etranger va réapparaître, réactivant le
dilemme d’Ellida, déchirée entre son époux et le mystérieux marin, entre la terre ferme et la mer,
entre un mariage qu’elle n’a pas totalement choisi et la liberté.
L’intrigue principale, centrée sur Ellida, Wangel et l’Etranger, est entrecoupée, comme un
contrepoint, de l’histoire des filles de Wangel, Bolette et Hilde : la première déjà femme, qui se
morfond dans la petite ville où ils habitent, aimerait découvrir le monde et se montre avide
d’apprendre ; la seconde encore adolescente, ne se construisant pas encore (au contraire de Bolette)
dans une relation amoureuse, mais encore aux prises avec son lien à ses parents, et singulièrement à
sa belle-mère pour qui elle éprouve une sorte d’amour-haine. Bolette trouve dans Arnholm, son
ancien précepteur, un prétendant complaisant ; elle lui accorde sa main : reproduit-elle ce qu’Ellida a
fait autrefois avec Wangel, est-elle en train de se vendre pour conquérir le vaste monde qui lui
manque tant ? Ou est-elle promise à une relation équilibrée avec son futur époux, dans laquelle elle
puisse acquérir la position de femme cultivée qui lui tient à coeur ? Quant à Hilde, elle se préoccupe
beaucoup de Lyngstrand, sans que le texte dise s’il s’agit déjà d’une attirance même inconsciente.
L’attirance d’Ellida pour l’Etranger est dans une certaine mesure maladive, tout comme son rapport
avec la mer : « les puissances de la mer sont là comme puissances de mort mais aussi comme figures
du sans-nom, du sans-borne, cristallisant ce “désir de l’impossible” que Wangel lui-même reconnaît
douloureusement en elle et qui “précipitera [son] âme dans les ténèbres de la nuit”2. » Du reste,
l’Etranger existe-t-il vraiment ? Il peut aussi symboliser simplement l’attirance de l’inconnu – d’une
vie non vécue – et le désir d’ancrer le mariage dans un pacte voulu, dans une décision librement
consentie.
Dans cette pièce où Ellida se débat entre des désirs contradictoire, le langage ne manque pas d’être
sollicité pour exprimer précisément ce qui repose au plus profond de l’individu ; mais les limites s’en
font sentir :
Ellida évolue sans cesse aux confins de l’indicible, l’effort que nous dirons de maïeutique auquel se livre son mari est
d’avance voué à l’échec […] Wangel et Ellida ne se parlent pas, ils se parlent à eux-mêmes, si l’on peut dire, ils ne se
répondent pas directement, ils suivent chacun un monologue intérieur dont ils livrent des bribes qui peuvent, ou
non, coïncider avec le discours ambiant […] Les grandes images, ou les souvenirs obsédants, les sentiments profonds,
les idées essentielles qu’ils véhiculent restent proprement ineffables, ils doivent donc trouver non seulement des
métaphores, mais aussi de timides approches, des tremblements de sensitives qui pourraient, à la rigueur, traduire
leur propos du moment. Jamais, sans doute, Ibsen n’a été plus maître de sa langue…3
1 W. Berteval, Le Théâtre d’Ibsen, Perrin, 1912, p. 242.
2 Monique Borie, ibid.
3 Régis Boyer, in Ibsen, ibid., p. 1845 sqq.
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PERSONNAGES
Les numéros de pages renvoient à l’édition du théâtre d’Ibsen dans la Bibliothèque de la Pléiade.
En regard de la description des personnages selon Ibsen figurent les maquettes des costumes, par la
costumière du spectacle, Coralie Sanvoisin.
Ballested : « un homme d’âge moyen, en vieux veston de velours, chapeau d’artiste à large bord » (p.
1249) ; il peint, mais est aussi coiffeur et barbier (p. 1252), guide pour les touristes (p. 1270),
musicien (p. 1317) ; arrivé dans la ville voici 17 ou 18 ans, avec la compagnie théâtrale de Skive (p.
1251). Personnage en marge des autres : il ne participe pas à proprement parler à l’action. « Cet
homme officieux, qui semble parodier l’idée de la pièce, estime que le secret du bonheur est de
savoir s’acclimater. Ibsen lui fait encore prononcer ce verbe avec un défaut, pour attirer plus
sûrement l’attention 1. »
Hans Lyngstrand : « un jeune homme mince, modestement mais correctement habillé, l’air chétif »
(p. 1250) ; malade des poumons ; désire être sculpteur (p. 1251). A été autrefois marin et a fait
naufrage dans la Manche, où il a contracté son mal (p. 1265). Ses idées sur le mariage – en particulier
dans un couple dont l’homme est un artiste – sont très traditionnelles : la femme doit soutenir le
mari. « Le fait de savoir que, quelque part, il y a une femme jeune, jolie et silencieuse qui rêve de
vous… » (p. 1327). Bolette et surtout Hilde l’entourent de prévenances (non sans une certaine
ambiguïté de la part de Hilde), sachant que sa maladie lui laisse probablement peu de temps à vivre.
Ellida : fille d’un gardien de phare, seconde épouse de Wangel et belle-mère de Bolette et d’Hilde.
Fascinée par la mer, elle s’y baigne chaque jour, sans s’occuper de la maison. Pour Ballested, il ne
s’agit rien moins que d’une « sirène à moitié morte » qui « s’est égarée en sortant de la mer et [qui]
n’arrive pas à retrouver son chemin » (p. 1250). Ce sont les gens de la ville qui l’appellent la Dame de
la mer (p. 1258). Le pasteur de Skjoldviken, où elle habitait chez son père, gardien de phare,
l’appelait « la païenne » car son prénom est un nom de bateau (ellidi est un type de bateau en
norrois) et non un nom chrétien. Elle aurait de la peine à expliquer pourquoi elle a épousé Wangel (p.
1260). Reconnaît en Arnholm le meilleur ami qu’elle avait à Skjoldviken (p. 1261).
Bolette : première fille de Wangel, de son premier mariage. Conciliante vis-à-vis de sa belle-mère (p.
1269). A été amoureuse d’Arnholm quand jadis il lui donnait des leçons (p. 1273). S’occupe de la
maison à la place de sa belle-mère (p. 1286). Aimerait quitter la petite ville où elle se morfond,
apprendre « quelque chose sur tout » (p. 1287). Mais en même temps, a peur de quitter son père, de
le laisser seul avec Ellida (p. 1288).
1 W. Berteval, Le Théâtre d’Ibsen, Perrin, 1912, p. 243.
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Hilde : seconde fille de Wangel, de son premier mariage. Encore adolescente (p. 1248). N’aime
(apparemment) pas sa belle-mère (pp. 1269, 1273). Provocatrice : « C’est bien ce que je veux [être
une salle fille]. Par défi ! » (p. 1273).
Arnholm : 37 ans. A été le professeur de Bolette (p. 1255) ; « élégante tenue de ville, lunettes dorées
et canne fine » (p. 1256) ; revient après huit ou neuf ans (ibid.). A connu Ellida dans un précédent
poste, à Skjoldviken, où elle vivait chez son père, gardien de phare (pp. 1257-8). A voulu autrefois
l’épouser (p. 1260).
Dr Wangel : père de Bolette et d’Hilde, époux d’Ellida. Vit dans la ville depuis longtemps ; il y était
déjà au temps de son premier mariage (p. 1257). A eu un fils avec Ellida, qui est mort à 4-5 mois
(ibid.). Peu d’énergie (il le dit luimême p. 1305), parfois faible, il n’a vraiment prise ni sur ses filles, ni
sur sa femme. Il se trouve emprunté entre ses filles et sa femme, qui se parlent peu, situation dont «
tout le monde s’accommode » selon Ellida (p. 1260). « Wangel est très bien. Si honnête ! Si
foncièrement bon et gentil envers tout le monde… […] mais il doit être infiniment différent [d’Ellida]
» (p. 1260).
L’Etranger : au moment où il arrive à Skjoldviken en tant que second du bateau dont le capitaine a
été assassiné, il se fait appeler Friman (= « homme libre »). Ensuite (dans ses lettres) : Alfred
Johnston.
RÉSUMÉ ET EXTRAITS
Les numéros de pages se rapportent à l’édition du théâtre dans la Bibliothèque de la Pléiade.
Acte premier
La famille Wangel habite dans une petite ville au bord d’un fjord. Le père, médecin, est marié en
secondes noces à Ellida, une femme étrange, fascinée par la mer et la liberté (c’est la fille d’un
gardien de phare)1. Le docteur a également deux filles d’un premier mariage, Bolette et Hilde.
Ballested, un homme aux multiples métiers, ainsi que Lyngstrand, jeune peintre, sont des familiers de
la famille. S’ajoute au groupe Arnholm, l’ancien précepteur de Bolette. Des années auparavant, la
jeune fille était alors amoureuse de lui, mais Arnholm convoitait Ellida, pas encore mariée à Wangel.
« Clair matin d’été, chaud et rayonnant » (p. 1249). De retour de sa baignade quotidienne, Ellida
discute avec Arnholm et lui confie qu’à l’époque de leur fréquentation, elle a aimé un autre homme.
Lorsque Lyngstrand les rejoint pour une visite de courtoisie, il leur confie son désir d’être sculpteur et
leur raconte son projet de créer une oeuvre d’après une histoire qu’il a vécue : alors qu’il était marin,
il a fait la connaissance d’un Américain – qu’on nomme aussi dans la pièce l’Etranger – qui travaillait
sur le même bateau que lui et un soir, il l’a vu en pleine crise de jalousie, parce qu’il avait lu dans le
journal que la femme qu’il aimait venait d’en épouser un autre.
1 Au début de la pièce, Ballested peint le fjord dans lequel se situe la petite ville où se passe la pièce. Il désire placer
au premier plan « une sirène à demi morte » (p. 1250). Or, sirène se dit en norvégien havfru, de hav (la mer) et fru (la
dame) ; « le titre de la pièce [Fruen fra havet] décompose donc ce mot en ses deux éléments » (Régis Boyer, note à La
Dame de la mer, in Ibsen, Théâtre, Gallimard, Bibliothèque de la Pléiade, 2006, p. 1848).
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Après quoi, le bateau fit naufrage, Lyngstrand s’en sortant avec une maladie de poitrine latente qui
lui interdit tout effort violent, et le marin étant considéré pour mort. Pourtant, Ellida n’est pas
rassurée et semble avoir beaucoup à dire sur son passé.
Extraits
WANGEL : […] elle [a] été plutôt nerveuse, ces dernières années. C’est-à-dire, de temps en temps.
En fait, je ne saisis pas bien ce qui ne va pas chez elle. Mais prendre des bains de mer, autant dire
que c’est toute sa vie, voyez-vous. (p. 1257)
L’Etranger (l’Américain) dans la bouche de LYNGSTRAND : […] elle est mienne, et mienne elle restera.
Et elle me suivra, quand même je devrais revenir au pays et aller la chercher comme on tire un noyé
de la noire mer. (p. 1267)
ELLIDA : Car je vis aussi dans quelque chose… une chose en dehors de laquelle sont les autres. –
ARNHOLM : Vous ! Faut-il donc comprendre que… ? Vous… Vous n’aimez pas vraiment votre mari ? –
ELLIDA : Mais si… si… j’en suis venue à l’aimer de toute mon âme ! Et c’est précisément pour cela que
c’est tellement épouvantable… tellement inexplicable… tellement impensable ! (p. 1268)
Acte II
La famille est en promenade, au Point de vue. Nuit claire. Hilde prend plaisir à torturer
Lyngstrand à cause de sa maladie et se fait réprimander par sa soeur, qui lui reproche sa
méchanceté, puis les deux soeurs débattent de la place qu’occupe Ellida dans leur famille : Bolette l’a
acceptée, mais Hilde est critique.
L’histoire de Lyngstrand a fait remonter les souvenirs à la surface pour Ellida, qui confie à son
mari, comme elle l’avait fait avec Arnholm, que dix ans auparavant, elle a aimé un autre homme, qu’il
s’agit de l’Américain de l’histoire de Lyngstrand et qu’elle craint son retour vengeur, tout en se
sentant irrésistiblement attirée par lui. D’autant plus qu’avant son départ, l’Américain et elle ont fait
une cérémonie de mariage officieuse (en lançant leurs bagues jointes dans la mer) et que, malgré les
lettres de rupture d’Ellida, l’Américain n’a jamais renoncé à elle. Et trois ans auparavant – au
moment même où Lyngstrand faisait naufrage sur le bateau où était aussi ce mystérieux étranger –,
Ellida a commencé à sombrer dans une sorte de paranoïa, allant jusqu’à trouver les yeux de cet
homme étranger à l’enfant qu’elle a eu de Wangel et qui est décédé en bas âge. C’est la raison pour
laquelle elle refuse toute vie commune avec son mari : sa moralité n’est pas digne de lui ; elle a peur
que son attirance pour cet homme ne passe jamais.
Extraits
WANGEL : […] tu ne peux supporter l’environnement ici. Les montagnes t’oppressent et te pèsent. Il
n’y a pas assez de lumière pour toi non plus. Pas assez de vaste ciel autour de toi. Pas assez de
puissance et de plénitude dans l’espace. – ELLIDA : Tu as totalement raison ! Nuit et jour, hiver
comme été, elle est sur moi… cette nostalgie de la mer.
ELLIDA : Nous parlions [avec l’Etranger] surtout de la mer. – WANGEL : Ah !… De la mer, donc ? –
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ELLIDA : De la tempête et du calme plat. Des nuits noires sur la mer. De la mer les jours scintillants de
soleil aussi. Mais surtout, nous parlions des baleines, des marsouins et des phoques qui ont coutume
de rester allongés sur les rochers dans la chaleur de midi. Et puis, nous parlions des mouettes, des
aigles de mer et de tous les autres oiseaux de mer, que tu connais… Pense donc… est-il étrange que,
lorsque nous parlions de ces choses, l’idée me venait que les animaux marins et les oiseaux de mer
lui étaient apparentés. – WANGEL : Et toi ?… – ELLIDA : Eh bien ! il m’aurait presque semblé que moi
aussi j’étais apparentée à eux tous. (p. 1279)
WANGEL : Et une fois qu’il [l’Etranger] a été bien parti ?… – ELLIDA : Oh ! tu peux bien imaginer que
j’ai bientôt repris mes esprits. Que j’ai compris à quel point tout cela avait été fou et absurde. (p.
1280)
ELLIDA : Tout à coup, je peux le [l’Etranger] voir soudain devant moi, en chair et en os. Ou en fait, un
peu de côté. Il ne me regarde jamais. Il est là, voilà tout. (p. 1283)
ELLIDA : Les yeux de cet enfant changeaient de couleur selon l’état de la mer. Si le fjord était paisible
et ensoleillé, les yeux de l’enfant l’étaient de même… S’il y avait une tempête, c’était pareil… (p.
1284)
Acte III
« Une partie écartée du jardin du docteur Wangel. L’endroit est humide, marécageux et
immergé dans l’ombre de vieux grands arbres. Sur la droite, on voit la rive d’un étang verdâtre […]
Fin d’après-midi, début de soirée » (p. 1285). Arnholm a une longue conversation avec Bolette, qui lui
révèle avoir envie de quitter la maison pour découvrir le monde et étudier ; son père n’a jamais le
temps de s’occuper d’elle, trop accaparé par sa femme et par le désir que la maison soit gaie.
Lorsque Ellida rentre de promenade, « inquiète et agitée » (p. 1289), elle aperçoit un bateau qui est
récemment entré dans le fjord. C’est celui de l’Etranger. Plongeant Ellida dans l’angoisse, il vient
justement la récupérer. Mais le nouveau venu se heurte à Wangel, décidé à protéger sa femme.
L’Etranger pose alors un ultimatum à Ellida : si elle ne le suit pas le lendemain, il disparaîtra pour
toujours. Confrontée à un dilemme, Ellida demande à son mari de la sauver.
Extraits
BOLETTE : A quoi nous sert-il que le vaste monde étranger passe par ici en cours de route pour
regarder le soleil de minuit ? Nous n’en sommes pas, nous. Nous ne voyons même pas le soleil de
minuit. Oh non ! nous vivons gentiment ici, dans notre étang aux carpes. (p. 1287)
BOLETTE : Pauvre père… Il dit tant de choses. Mais quand il s’agit d’en venir au fait… Il n’y a pas
beaucoup de véritable énergie chez père.
WANGEL la regarde, angoissé : Ellida, je soupçonne… qu’il y a quelque chose derrière cela. – ELLIDA :
Derrière, il y a l’attirance. – WANGEL : L’attirance ?… – ELLIDA : Cet homme [l’Etranger] est comme la
mer. (p. 1298, fin de l’acte)
Acte IV
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Dans le salon d’été du Dr Wangel, Lyngstrand discute avec Bolette et lui confie sa vision du
mariage, où la femme s’épanouit en servant son mari et en ne pensant qu’à lui. Bolette le qualifie
d’égoïste.
Le docteur Wangel discute avec Arnholm pour avoir son avis sur le moyen de guérir sa
femme qui, terrifiée par le choix qui l’attend, s’enferme dans un monde intérieur, paradoxal et
paranoïaque, ayant peur d’elle-même et de l’attirance qu’exerce sur elle l’Etranger : « Cet homme
est comme la mer », a-t-elle confié, aussi horrible, c’est-à-dire attirant et effrayant que la mer.
Arnholm apprend alors que Wangel l’a fait venir dans le but de guérir la nostalgie de sa femme,
sachant combien elle était attachée à lui. Lors d’une longue et dramatique conversation entre elle et
son époux, Ellida lui réclame sa liberté afin de pouvoir choisir entre lui et l’Etranger quand, la nuit
venue, celui-ci viendra la reprendre. Selon elle, Wangel l’a achetée en lui proposant de l’épouser
pour remplacer sa première épouse décédée ; elle-même s’est vendue, et au fond, ils ont vécu
mariés sans que leur union soit moralement un vrai mariage. Wangel, désespéré, se rend compte
qu’il n’a jamais vraiment connu sa femme. Pour autant, il demande à Ellida d’attendre encore. Les
jeunes gens reviennent de promenade. Wangel évoque la possibilité qu’Ellida aille vivre pour un
certain temps à Skjoldviken. Hilde le prend mal et il faut que Bolette explique à sa belle-mère que sa
petite soeur a besoin de tendresse de sa part.
Extraits
LYNGSTRAND : […] ce qui compte, c’est que [la femme qui épouse un artiste] puisse l’aider à créer…
qu’elle puisse lui faciliter le travail en s’occupant de lui, en le choyant, en le soignant bien et en lui
rendant la vie vraiment agréable. Il me semble que ce doit être absolument délicieux pour une
femme. – BOLETTE : Oh ! vous ne vous rendez pas compte à quel point vous êtes égoïste !
(p. 1301)
WANGEL : […] derrière toutes ses humeurs [les humeurs d’Ellida], il y a quelque chose de caché qu’il
m’est impossible d’élucider. Et puis, elle est tellement instable, tellement imprévisible, elle change si
soudainement. – ARNHOLM : Cela doit tenir à son état mental maladif. – WANGEL : Pas seulement.
Au plus profond d’elle-même, c’est inné. Ellida appartient aux gens de la mer. Voilà l’affaire. –
ARNHOLM : Qu’est-ce que vous voulez dire, en fait, cher docteur ? – WANGEL : N’avez-vous pas
remarqué que les gens qui vivent au bord de la vaste mer constituent un peuple à part ? C’est
presque comme s’ils menaient la vie même de la mer. Il y a la houle – et le flux et le reflux aussi – à la
fois dans leur façon de penser et dans leur sentiments. Et puis, ils ne se laissent jamais transplanter.
Oh ! j’aurais dû y réfléchir avant. Ç’a été pur péché envers Ellida que de l’emmener de là-bas et de la
conduire ici, à l’intérieur du fjord. (p. 1305)
WANGEL : Hum, cher ami… il y a des aspects de cette affaire qui ne se laissent pas expliquer. –
ARNHOLM : Quelque chose qui, en soi, est inexplicable, vous voulez dire ? Totalement inexplicable ?
– WANGEL : En tout cas inexplicable jusqu’à nouvel ordre. – ARNHOLM : Vous croyez à quelque chose
de ce genre ? – WANGEL : Je ne crois ni ne récuse. Je ne sais pas, voilà tout. C’est pourquoi je m’en
tiens là. – ARNHOLM : Oui, mais dites-moi une chose. Cette affirmation étrange, effrayante, sur les
yeux de l’enfant… ? – WANGEL, avec ardeur : Cette histoire d’yeux, je n’y crois absolument pas ! Je
ne veux pas croire une pareille chose ! Ce doit être pure imagination de sa part. Rien d’autre. –
ARNHOLM : Avez-vous prêté attention aux yeux de cet homme lorsque vous l’avez vu hier ? –
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WANGEL : Mais oui. – ARNHOLM : Et vous n’avez pas trouvé une quelconque ressemblance ? –
WANGEL, évasivement : Hum… Seigneur Dieu, que dois-je répondre ? Il ne faisait pas très clair
lorsque je l’ai vu. En outre, Ellida avait tellement parlé déjà de cette ressemblance… Je ne sais
simplement pas si j’étais en mesure de le regarder sans idée préconçue. (p. 1306)
ELLIDA : Je vois que la vie que nous menons l’un avec l’autre… au fond, ce n’est pas un mariage. –
WANGEL, amèrement : Là, tu as dit vrai. La vie que nous menons à présent n’est pas un mariage.
(p. 1311)
ELLIDA : […] on ne peut jamais écarter ce fait… qu’une promesse libre est absolument aussi
contraignante qu’un mariage. (p. 1312)
WANGEL : […] C’est un divorce – un divorce en bonne et due forme – que tu veux ? – ELLIDA :
Bien cher, tu me comprends si peu. Ce ne sont pas les bonnes et dues formes qui me préoccupent.
Parce que ce n’est pas de ces choses extérieures qu’il s’agit. Ce que je veux, c’est que toi et moi nous
soyons parfaitement d’accord pour nous séparer. – WANGEL, amer, faisant lentement un signe de
tête : Résilier le contrat… oui. (p. 1312)
ELLIDA : Je ne veux pas m’abriter derrière le fait que je suis la femme d’un autre. Pas m’abriter
derrière le fait que je n’ai pas le choix. Sinon, il ne serait pas question de décision. (p. 1313)
WANGEL : Je ne t’ai jamais vraiment connue, finalement. Jamais à fond. Je commence à m’en rendre
compte à présent. – ELLIDA : Et c’est pour cela aussi que tu dois me donner ma liberté ! Me délivrer
de toute relation avec toi et avec les tiens ! Je ne suis pas celle que tu as crue. Tu le vois bien toimême maintenant. Nous pouvons nous séparer en bonne intelligence… et de notre plein gré.
(p. 1314)
Acte V
Le lendemain, de nouveau près de l’étang aux carpes ; le crépuscule descend. Ellida se rend
au jardin avec Wangel, pour attendre l’Américain. Elle est décidée à le suivre, même si Wangel ne l’y
autorise pas, pour vivre enfin la vie qui aurait dû être la sienne depuis longtemps. Arnholm retrouve
Bolette et lui annonce qu’il est prêt à l’aider pour ses études et même pour voyager. Pour étayer sa
promesse, il la demande en mariage, tandis que Hilde et Lyngstrand parlent peinture et chiffons et
que Lyngstrand se complaît dans la promesse que lui a faite Bolette de penser à lui tout le temps qu’il
serait absent pour se soigner.
L’Etranger arrive. Wangel finit par rendre à Ellida sa liberté : ainsi libre et responsable, elle
choisit de rester avec lui, laissant l’Américain s’en retourner. Délivrée de sa fascination, elle
apprendra à s’adapter à sa nouvelle famille.
Extraits
ELLIDA : Et puis il n’y a absolument rien qui puisse s’y opposer. Ici, n’est-ce pas, il n’y a strictement
rien qui m’attire et me lie. Je n’ai aucune racine dans ta maison, Wangel. Les enfants ne sont pas à
moi. Je ne possède pas leur coeur, je veux dire. Je ne l’ai jamais possédé… Quand je m’en irai… si je
pars, donc… que ce soit avec lui cette nuit… ou pour Skjoldviken demain, je n’ai pas une seule clef à
remettre… pas un ordre à laisser derrière moi, à quelque sujet que ce soit. Je suis tellement sans
racines dans ta maison. J’ai été tellement en dehors de tout dès le premier instant. – WANGEL : C’est
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toi-même qui l’as voulu ainsi. – ELLIDA : Non, je ne l’ai pas voulu ainsi. Je ne l’ai ni voulu ni pas voulu.
J’ai simplement laissé toutes choses dans l’état où je les ai trouvées le jour où je suis arrivée. C’est
toi… et personne d’autre… qui l’as voulu ainsi. – WANGEL : Je pensais agir pour le mieux, pour toi. –
ELLIDA : Mais oui, Wangel, je le sais parfaitement ! Mais il y a un revers à cela. Quelque chose qui se
venge. Car maintenant, il ne se trouve ici aucune puissance contraignante… aucun soutien… aucun
secours… aucune attraction vers tout ce qui aurait dû être notre propriété commune. (pp. 1318-9)
WANGEL : […] tu as besoin que ton mari… qui est ton médecin aussi… t’ôte tout pouvoir et agisse à ta
place. (p. 1319)
ARNHOLM : […] votre hésitation à… cela ne m’effraie pas ! Si je n’ai pas pleinement votre cœur
maintenant, je saurai le conquérir. Oh ! Bolette, je vais vous choyer ! – BOLETTE : Et je pourrai voir le
vaste monde. Je pourrai vivre ma vie. Vous me l’avez promis. – ARNHOLM : Et je le maintiens. –
BOLETTE : Et je pourrai apprendre tout ce dont j’ai envie. – ARNHOLM : Je serai moi-même votre
professeur. Tout comme avant, Bolette. (p. 1325)
ELLIDA, éclatant : Oh… cette attraction, cette tentation, cette séduction… pour pénétrer dans
l’inconnu ! Toute la puissance de la mer est rassemblée en ce seul mot, « inconnu » ! (p. 1330)
ELLIDA, de plus en plus agitée : […] Tu peux bien me retenir ici ! […] mais mon esprit… toutes mes
pensées… tous mes désirs et mes aspirations… tu ne pourras les attacher ! Ils soupireront et se
précipiteront vers l’inconnu… pour lequel j’ai été créée… et dont tu m’as exclue ! – WANGEL, dans
une douleur muette : Je le vois bien, Ellida ! Pas à pas, tu t’éloignes de moi ! le besoin de l’illimité et
de l’infini… et de l’inaccessible… cela finira par entraîner ton esprit tout entier dans les ténèbres de la
nuit. – ELLIDA : Oh oui ! oui… je le sens… comme des ailes noires et silencieuses au-dessus de moi. –
WANGEL : Cela n’ira pas jusque-là. Il n’y a pas d’autre salut possible pour toi. En tout cas, je n’en
aperçois pas d’autre. Et c’est pourquoi… c’est pourquoi je… résilie immédiatement le contrat…
Maintenant, donc, tu peux choisir ta voie… dans une totale… totale liberté. – ELLIDA le contemple un
moment comme privée de parole : Est-ce vrai… vrai… ce que tu dis ? Le penses-tu… du fond du coeur
? […] Et tu en es capable ! Tu peux laisser faire cela ! – WANGEL : Oui, je le peux. Je le peux… parce
que je t’aime tant. – ELLIDA, doucement et en tremblant : Je serais parvenue si près… et si
profondément près de toi ! – WANGEL : C’est l’effet des années et de notre vie commune. – ELLIDA,
battant des mains : Et moi… qui ai si peu vu cela ! – WANGEL : […] tu peux choisir en toute liberté. Et
sous ta propre responsabilité. – ELLIDA, prenant sa tête entre ses mains et regardant fixement
Wangel : En toute liberté… et sous ma propre responsabilité ! Sous ma propre responsabilité aussi
?… Quel… changement… en tout cela ! (pp. 1330-1)
ELLIDA : Oh ! tu ne comprends pas que ce revirement est venu… que ce revirement devait venir… à
partir du moment où je pouvais choisir en toute liberté ? (p. 1332)
WANGEL : Je commence à te comprendre… peu à peu. Tu penses et tu sens en images… et en
représentations visibles. Ton désir et ton aspiration vers la mer… ton attirance pour elle… pour cet
étranger… c’était l’expression d’une exigence naissante et croissante de liberté en toi. Rien d’autre.
(p. 1332)
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LES MISES EN SCÈNE
Quand Ibsen publie en 1888 La Dame de la mer, il est déjà mondialement connu. Au moment
de paraître, chacune de ses pièces provoque partout une excitation fébrile. Des bulletins
télégraphiques communiquent le jour où le manuscrit a été envoyé à l’éditeur, celui où l’on a
commencé à l’imprimer et la date de la mise en vente.
Cette pièce, écrite peu après Rosmersholm, devance Hedda Gabler de deux ans. Ibsen est
exilé volontaire depuis 24 ans, et, fait remarquable, sa pièce est créée simultanément le 12 février
1889 en Norvège, au Christiania Theater, et en Allemagne, au Hoftheater de Weimar. Pourtant, elle
est aujourd’hui quasi inconnue du grand public.
Créée en français en 1892 par Aurélien Lugné-Poe au Cercle des Escholiers à Paris, elle fut le
point de départ de l’interprétation symboliste de l’oeuvre d’Ibsen en France.
Pour beaucoup de lecteurs, avant la représentation de La Dame de la mer chez Lugné-Poe,
Ibsen est à ranger aux côtés de Zola au panthéon des écrivains naturalistes et réalistes. N’avait-il pas,
dans Les Revenants, installé, tout comme Zola, la source moderne du tragique du côté de l’hérédité ?
Une opinion qui prévaut en France mais aussi dans les pays scandinaves eux-mêmes.
Tout autre fut la lecture de Lugné-Poe, et son influence fut déterminante. Il mit l’accent sur
les éléments mystérieux de la pièce comme la relation d’Ellida à la mer, la figure énigmatique de
l’Etranger, les fiançailles symboliques. Tout cela permettant d’intégrer des éléments symbolistes
dans sa mise en scène. La souffrance d’Ellida n’est plus une névrose mais la représentation d’un mal
de vivre, le désir de fuite hors de la réalité. Le couple qu’elle forme avec l’Etranger allant jusqu’à
préfigurer Pelléas et Mélisande. Il appliqua à Ibsen ce jeu nouveau, désincarné, monotone et
solennel propre au Théâtre d’Art, créant une atmosphère de mystère autour des personnages. Le
succès de La Dame de la mer vint cimenter le malentendu et constitua Ibsen prisonnier des
symbolistes français.
Cette pièce ne fut jamais montée en Suisse romande, contrairement aux autres pièces écrites
à la même époque, et il faudra attendre 72 ans pour qu’elle soit reprise en France, cette fois par
Sacha Pitoëff, le 17 mars 1964, au Théâtre de l’OEuvre à Paris. S’ensuit une mise en scène de JeanLouis Thamin en 1977 avec Silvia Monfort dans le rôle titre au Centre d’animation culturelle de Paris,
ainsi qu’en 1989 une mise en scène de Jean-Claude Buchard avec entre autre Anne Alvaro. Plus
récemment, la chanteuse Camille a joué le rôle d’Ellida aux Bouffes du Nord dans une mise en scène
de Claude Baqué.
Une histoire, on le notera, bien modeste pour un texte qui forgea l’un des plus grand
contresens de l’histoire théâtrale, étiquetant durablement Ibsen comme auteur symboliste. Une
pièce qui pourtant inspira à l’étranger les plus grands metteurs en scène comme Robert Wilson en
1998 ou encore Frank Castorf en 1993. Montée plus de 80 fois en Allemagne et plus de 30 fois en
Angleterre, cette oeuvre reste à découvrir pour le public francophone.
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BIBLIOGRAPHIE
Editions du théâtre
Ibsen, Théâtre, éd. et trad. Régis Boyer, Gallimard, coll. Bibliothèque de la Pléiade, 2006.
Ibsen, Drames contemporains, trad. comte Moritz Prozor, Pierre Bertrand et Edmond de
Nevers, Le Livre de poche, coll. La Pochothèque, 2005.
Sur Ibsen, sur la pièce
Régis Boyer, Histoire des littératures scandinaves, Fayard, 1996
Régis Boyer dir., Ibsen, revue Europe n° 840, avril 1999
Jacques de Decker, Ibsen, Gallimard, coll. Folio biographies, 2006
Maurice Gravier, D’Ibsen à Sigrid Undset. Le Féminisme et l’amour dans la littérature
norvégienne (1850-1950), Les Lettres modernes, 1968
Maurice Gravier, Ibsen. Textes, points de vue critiques, témoignages, chronologie,
bibliographie, illustrations, Seghers, coll. Théâtre de tous les temps, 1973
Hans Heiberg, Henrik Ibsen, Nyon, Esprit ouvert, 2003
Michel Meyer, « Ibsen ou l’invention du théâtre moderne » in Ibsen, Drames contemporains,
coll. La Pochothèque, 2005
Jacques Robichez, « L’Introduction de l’oeuvre d’Ibsen en France, 1887-1889 », Revue
d’histoire du théâtre n° 9, 1957, pp. 23-35
Sur http://www.acte2deux.com, site de la compagnie de Claude Baqué, articles et entretiens
vidéo consacrés à La Dame de la mer (Théâtre des Bouffes du Nord, 2012)
Sur Omar Porras
Collectif, Omar Porras & le Teatro Malandro, éd. Joca Seria, coll. Les Carnets du Grand T,
2010
Luz María García, Béatrice Picon-Vallin éd., Omar Porras, Actes Sud, coll. Mettre en scène,
2011
Collectif, Teatro Malandro et Omar Porras, Villegas Editores, 2007
Miruna Coca-Cozma, Omar Porras, sorcier de la scène, documentaire produit par PointProd
et la Télévision suisse romande, 2007
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LA SCÉNOGRAPHIE
Dessins par Amélie Kiritzé-Topor, scénographe
Storyboard
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Dessin de la maison
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Maquette de la maison
Maquette de la scénographie
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L’ADAPTATION DU TEXTE
D’après des propos de Marco Sabbatini
Dans les collaborations avec Omar Porras, il y a de toute manière une adaptation, sans doute avant
tout pour être plus fidèle à l’esprit du texte. Ici se pose déjà un problème de temps théâtral : la durée
théâtrale n’est pas ressentie de la même manière au XIXe siècle et la pièce dure, jouée
intégralement, trois heures environ. Nous aimerions atteindre deux heures sans entracte. La
structure en cinq actes est abandonnée. Les séquences peuvent s’agencer différemment que dans le
texte original. On vise à plus de continuité, de linéarité ; à estomper les ellipses.
Un travail préalable sur l’espace a été fait par le metteur en scène et la scénographe : il faut donc
pouvoir raconter l’histoire dans la scénographie imaginée, c’est une condition essentielle de
l’adaptation.
Une spécificité de La Dame de la mer est que cette pièce contient peu d’action mais beaucoup de
discours. Elle est très difficile à abréger, des motifs reviennent, s’entrelacent. Si l’on coupe, on doit le
faire sur de longues séquences.
Plusieurs principes guident notre adaptation. D’abord, un noyau de personnes sont liées par leur
passé (Ellida, Wangel, Bolette, Hilde, Arnholm) ; quant à Lyngstrand, il est marginal, et Ballested vient
de l’extérieur. L’idée est de profiter du statut particulier de Ballested pour en faire une sorte de
Monsieur Loyal, figure de l’auteur, qui prendrait en charge certaines didascalies : plutôt que de le
laisser en marge, d’exploiter son statut. Quant à Lyngstrand, c’est – pour le metteur en scène – un
personnage qui a un pied dans les légendes du Nord, une sorte de troll, de lutin, de faune ; sa
maladie est une couverture, son statut réaliste sera estompé. Autre principe : dans la pièce se font et
se défont des couples (Wangel-Ellida, Ellida-l’Etranger, Bolette-Arnholm, Hilde- Lyngstrand) : dans le
dernier tiers de la pièce, nous voudrions mettre en évidence le parallélisme entre ces couples. A cet
égard, la dernière scène, où tout le monde se rejoint, a un côté très explicatif quant aux événements
qui viennent de se passer : elle sera coupée au profit de la scène précédente avec l’Etranger, qui
terminera la pièce.
La traduction utilisée est celle du comte Prozor, contemporain d’Ibsen qui était en relations
épistolaires avec lui. Cette version a très bien – c’est-à-dire très peu – vieilli ; le langage simple
(lexique, syntaxe) demande peu d’adaptations. Il faut un bon équilibre entre notre langue et la
poésie que contient le texte d’Ibsen, en évitant d’employer un langage littéraire ou trop
contemporain (qui serait artificiel). D’autres traductions sont ponctuellement mises à contribution.
Le travail d’adaptation se fait avant le début des répétitions – une version préalable est alors établie
–, puis pendant : j’assiste à un certain nombre de répétitions, où des improvisations révèlent des
sens, des directions possibles. Quand les choses se dessinent un peu plus précisément, j’essaie
d’enregistrer les options retenues. Interviennent alors coupures, déplacements de séquences,
reformulations, en détail ou sur de plus larges portions de texte. Le travail est progressif et se fait par
des allées et venues entre la table d’écriture et le plateau (à l’aide de l’assistant). Comme une
tentative d’improvisation ne suffit en général pas pour fixer la direction d’une scène, plusieurs
versions naîtront. Au total, les comédiens auront sûrement plusieurs fascicules successifs entre leurs
mains pour le travail sur le plateau.
Le dramaturge est le garant de la cohérence et de l’homogénéité du texte
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OMAR PORRAS
Né à Bogotá en Colombie, Omar Porras se forme à la danse et au théâtre au cours de diverses
expériences artistiques. A Paris, il suit des cours à la Sorbonne, travaille à la Cartoucherie de
Vincennes ; à Pontedera (Italie), il fréquente le Work Center de Grotowski. Au cours de ces années
d’apprentissage, où il se consacre avec succès au théâtre de rue, il accumule un savoir pratique et
théorique qu’il continuera de développer. C’est en 1990 qu’il fonde à Genève le Teatro Malandro,
centre de création, de formation et de recherche où il développe une
démarche créative très personnelle. Sa technique théâtrale, axée sur le corps
du comédien, sa projection dans l’espace et l’utilisation de masques, s’inspire
à la fois de la tradition occidentale comme la biomécanique, et orientale
(théâtres balinais, indien et japonais). Nourri de culture sud-américaine et de
connaissance des pratiques du jeu masqué du monde entier, formé à la
danse et à la musique, il a développé un type de théâtre qui se rapporte à un
« étrange et merveilleux voyage » : celui de la création d’un personnage
masqué, à travers une histoire riche et complexe, au service d’un texte écrit.
Cette énergie est produite par les acteurs eux-mêmes métamorphosés,
transformés en créatures inventives, humaines et plus qu’humaines, qui rapportent des événements
simples, drôles ou tragiques, rendus extraordinaires et ultra-théâtralisés par le truchement du
masque et du geste. Entouré par ses acteurs ainsi transformés, Omar Porras explore les grands
mythes comme les Bacchantes, Don Quichotte, Faust ou encore Don Juan en les abordant par sa
multi-culturalité, à la fois sud-américaine et européenne. S’il est fondé sur le texte, le théâtre d’Omar
Porras ne se met pas pour autant servilement à son service : l’adaptation joue un rôle central dans le
processus de création du Teatro Malandro. Le texte, pour faire l’objet de libres explorations de la
part des comédiens et du metteur en scène, doit s’émanciper de tout carcan littéraire et s’ouvrir à
l’improvisation, désacralisant la lettre pour mieux jurer fidélité à l’acte théâtral.
Mises en scène
D’Ubu Roi (le Garage, Genève, 1991) à Roméo et Juliette (2012), Omar Porras mêle l’art de l’acteur,
de la marionnette, la danse et la musique ; il place le mouvement au centre de ses recherches
théâtrales, dans un travail d’harmonisation entre l’acte et la parole. Dès ses débuts, le metteur en
scène se tourne vers les grands textes, en explorant aussi bien les auteurs du passé – Faust de
Marlowe (1993), Othello de Shakespeare (Comédie de Genève, 1995), Les Bakkhantes d’Euripide
(2000), Ay ! QuiXote d’après Cervantès (Théâtre de Vidy-Lausanne, 2001) et aussi Pedro et le
Commandeur de Lope de Vega (Comédie-Française, Paris, 2006), Maître Puntila et son valet Matti de
Bertolt Brecht (Théâtre Forum Meyrin, avril 2007), Les Fourberies de Scapin de Molière (2009) – que
les modernes et les contemporains – La Visite de la vieille dame de Friedrich Dürrenmatt (1993 et
2004), Strip-tease de Slawomir Mrozek, Noces de sang de Federico García Lorca (1997). Il a signé la
mise en scène d’El Don Juan d’après Tirso de Molina en japonais avec la troupe japonaise du SPAC au
Shizuoka Performing Art Center. Bolivar, fragments d’une rêve de William Ospina (2010), célèbre le
bicentenaire de l’indépendance et les vingt ans de la compagnie. A l’occasion du World Theater
Festival under Mt. Fuji 2011 qui se déroule à Shizuoka, Omar Porras présente Solo Bolivar, un solo
qu’il interprète accompagné sur scène de quatre comédienschanteurs japonais. En 2011-2012, Omar
Porras signe deux nouvelles créations avec le Teatro Malandro : L’Eveil du printemps d’après Frank
Wedekind et une collaboration avec la compagnie de danse Alias : Les Cabots. Il met en scène Roméo
et Juliette avec les artistes du Shizuoka Performing Arts Center (2012, à Genève en 2013).
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La méthode Omar Porras
Comme l’athlète, l’acteur doit entraîner son corps et en étudier la plastique, grâce à une large palette
d’exercices. Des exercices qui visent à une meilleure connaissance des mécanismes et des capacités
de récupération de l’organisme humain. S’il est fondé sur le mouvement, le théâtre d’Omar Porras
n’en néglige pas pour autant la parole. Le texte a même, en tant que matière première, une place
privilégiée dans sa recherche. L’oeuvre sélectionnée, libérée de tout carcan littéraire, est d’abord
soumise à l’improvisation des comédiens pour mieux explorer ses potentialités théâtrales. Tout au
long de cette longue phase préparatoire, la mise en scène et l’adaptation subissent des modifications
plus ou moins radicales, en fonction du travail effectué sur le plateau ; et ce, jusqu’aux dernières
répétitions, parfois jusqu’à la générale et même au-delà. Le texte ainsi obtenu entre en totale
symbiose avec la création théâtrale dont il résulte et il ne peut plus en être dissocié. Le stage,
l’atelier, le laboratoire deviennent, dans un tel contexte, les instruments essentiels de la formation et
de la recherche.
Démarche
Le metteur en scène place au centre de sa recherche créative les artisans du spectacle et leur
inventivité : l’adaptation du texte, la mise en scène, la scénographie, la conception des costumes et
des lumières, la musique, l’interprétation sont conçus directement – organiquement – sur les
planches.
Une telle démarche n’est possible que si tous les artisans du spectacle mettent réellement leurs
compétences en commun : qu’ils soient comédiens, techniciens ou musiciens, ils assistent en
principe à toutes les répétitions, dans la mesure où chacun peut apporter une contribution parfois
décisive au spectacle qui est en train de se construire. Comme Omar Porras aime à le rappeler, le
travail de compagnie se fait en compagnie.
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ENTRETIEN AVEC OMAR PORRAS SUR LA DAME DE LA MER
Comment avez-vous abordé le travail autour de La Dame de la mer ?
Omar Porras : J’ai découvert La Dame de la mer en rentrant du Japon, et c’est peut-être aussi pour
cela que j’accueille l’oeuvre comme si elle me parlait depuis longtemps. Quand je lis un texte, je
travaille par associations. J’écoute une musique qui me vient par une didascalie parfois. La lecture se
fait alors en musique. Mes notes sont souvent des dessins, des esquisses, des explosions d’image et
c’est très rare que j’écrive. Depuis Roméo et Juliette, je fais l’exercice d’écrire ces impressions. Dans
ce cas précis, dès la première lecture j’ai voulu relire La Bergère et le Ramoneur d’Andersen. J’ai
pensé aux objets qui vivent. En lisant, les objets ne cessaient de me parler. Ils étaient désespérés de
ne pas être à leur propre place. Je les entendais crier. Les fenêtres avaient froid. Et les lampes
excédées par la chaleur transpiraient et se plaignaient de la lourdeur de l’ambiance. Et le bateau au
loin ne pouvait plus pleurer parce qu’il n’avait plus de larmes.
Pour écrire La Dame de la mer, Ibsen s’est inspiré du Vaisseau fantôme de Wagner. Votre mise en
scène a-t-elle un point de départ musical ?
O. P. : Oui. Cette pièce a la résonance d’une symphonie réduite. En la lisant, j’ai eu l’impression
d’entendre un quatuor à corde. La matière sonore des instruments qui composent un tel ensemble
me rappelait les personnages de la pièce, cette famille, leurs enfermements, la « matière » dans
laquelle ils vivent, ce qu’ils produisent comme sensation. Ce qui est certain, c’est que je lis cette
pièce à la manière d’une partition musicale. Dans mon langage comme dans ma manière de lire
coexistent deux mondes, celui de la raison et celui de la sensation, de l’indicible. Ma relation avec la
musique n’est pas opportuniste. Elle ne cherche pas à remplir un espace ou un abîme. La musique est
un personnage important qui doit se rajouter et qui manque au théâtre, contrairement à l’opéra. Par
exemple, si je monte un opéra, je me laisse emporter par la force de la rivière, qui est la musique, et
qui m’amène sur la rive, le texte. La musique est ainsi fondamentale à mon travail, ne serait-ce que
par la possibilité qu’elle offre de pouvoir entrer dans l’œuvre.
Wagner influence-t-il votre travail ?
O. P. : Bien sûr, il y a le parallèle absolu entre La Dame de la mer et Le Vaisseau fantôme. On ne peut
pas s’empêcher d’entendre l’opéra qui est quasi la version musicale de ce texte. Wagner et Ibsen,
deux exilés, ont tous deux creusé dans les légendes de leur culture. Tout deux sont à la recherche de
leurs origines, de leurs mythologies. Peut-être les éloignements qu’ils vivent les y ont ramenés plus
profondément encore… Ibsen atteint son apogée avec Peer Gynt, Wagner avec le Ring : un monde de
trolls, féerique et mythologique que l’on retrouve chez les deux auteurs.
Qu’est devenu ce quatuor à cordes que vous disiez entendre à la lecture de la pièce ?
O. P. : Peut-être prendra-t-il la forme d’un concert pour piano. Il est encore trop tôt pour dire ce qui
restera de cette impression de départ. Ce qui est certain, c’est que la musique traversera le spectacle
comme une charrue dans la mer. Elle vient révéler des choses. D’ailleurs, comment ne pas imaginer
qu’une charrue traversant la mer ne laisserait pas de traces ? Cette pièce, c’est ça : des personnages
traversés par quelque chose d’invisible. Il y a dans La Dame de la mer comme une pensée scandée,
ces silences musicaux qui créent des creux, des absences qui sont remplies de vent, de solitude,
d’angoisse, de mystère. C’est ça aussi la force de ce texte. Ce n’est pas psychologique, c’est une force
mystérieuse, spirituelle, un état d’avant la raison. Chez Ibsen, les personnages ont un parcours quasi
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mystique, comme des créatures qui ne doivent pas traverser l’architecture construite par les
hommes, mais doivent vivre dans un espace peut-être surnaturel. Ils sont obligés de respirer l’air
d’un autre monde peuplé d’ombres fantastiques où le vent souffle sur leurs pieds, ils vivent devant
un miroir brumeux. Et c’est devant ce miroir que nous pouvons découvrir la dimension de nos peurs
et de notre permanente métamorphose. Ces personnages sont perdus dans un rêve ; ils sont confus,
comme dans une forêt enchantée ; ils sont en proie à une insatiable nostalgie ; ils sont isolés dans
leur étrangeté. Tel Don Quichotte, ils cherchent, habillés d’une peau qui n’est pas la leur. Tout
comme l’enfant qui découvre un nouveau monde.
Et pourtant, Ellida fait le choix d’un amour raisonné, raisonnable. Elle renonce à ce monde «
d’avant la raison », pour reprendre votre expression ?
O. P. : Ibsen crée cette alternative, qui nous semble contradictoire : rester dans le connu plutôt que
choisir l’inconnu. Mais pourquoi cela est-il irrationnel ? Et si Ellida (cf. le titre, La Dame de la mer)
était venue d’ailleurs, d’une autre espèce ? Elle ressemble à tous les autres personnages de la pièce,
mais pourtant elle leur reste étrangère. Cela est accentué par son nom, celui d’un bateau, le nom
d’un esprit voyageur de la mer. Et si cette étrangère était un animal qui s’est laissé piéger, puis
acheter, puis enfin apprivoiser par un homme ? Et si elle s’était domestiquée ? Peut-être que son
propre mari est l’inconnu, l’étranger. Le choix de la raison serait alors comme celui de cet animal
enfin libéré, libre, devenu un autre, donnant naissance à une autre espèce. Il ne faut pas limiter la
pièce à un drame psychologique basé sur choix d’Ellida de quitter ou de ne pas quitter son mari. Il
s’agit ici d’un drame d’un niveau supérieur, presque géologique, un drame de l’évolution. C’est toute
une espèce qui est en transformation.
Ellida serait-elle le Hollandais volant du Vaissseau fantôme de Wagner, cet homme condamné à
errer pour l’éternité à moins qu’une femme ne l’aime d’une manière absolue ?
O. P. : Mais qui n’est pas un Hollandais volant dans cette pièce ? Certains se sont résignés à ne plus
croire au merveilleux, comme le mari parce qu’il gère le langage des hommes. Pourtant, il finit par
comprendre et croire que l’homme abrite en lui-même toutes les possibilités humaines et le
merveilleux. Il découvre alors un amour qui libère plutôt qu’il ne possède. Je relisais les impressions
de Stefan Zweig pendant son séjour à Panama et ses réflexions sur ces deux océans qui ont tout fait
pour se rencontrer, allant jusqu’à faire trembler la terre. Et comment ils ont toujours échoué. Il
faudra attendre la force et la volonté de l’homme pour qu’existe un canal qui permette cette
rencontre. Il y a de cela dans cette pièce. Il y a une force tellurique qui pousse deux natures à se
rencontrer, deux créatures marines à se rassembler. Alors l’homme intervient, et en creusant des
chenaux, en bâtissant des ponts, il empêche cette rencontre et crée une autre espèce. De même, on
ne peut pas centrer la pièce sur la commodité bourgeoise. L’écrivain Alberto Savinio dit qu’il y a en
Ibsen un poète épique et un poète bourgeois. C’est sans aucun doute l’Ibsen bourgeois qui demeure
et qui restera. Mais cette pièce cache en elle une très grande force épique, dans les visions et les
apparitions, les révélations.
Comment opérez-vous la jonction entre l’univers d’Ibsen (ces forces telluriques ancrées dans les
légendes populaires), le vôtre (vous qui avez traversé la mer pour quitter la Colombie et rejoindre
la Suisse) et celui du Japon qui transparaît de plus en plus dans votre travail, notamment depuis
que vous avez créé pour des acteurs nippons ?
O. P. : Plus que jamais, je pense que l’art et le théâtre en particulier sont devenu le terrain du
métissage, comme un vivier de nouvelles cultures. Dans mon théâtre, on ne peut pas parler
d’identité, mais d’identités. À une époque, j’utilisais beaucoup le mot de métissage, et puis de
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créolisation. Mais je pense au fond qu’il s’agit de quelque chose de moins lié à la pensée, c’est-à-dire
d’hybridation : cette possibilité de laisser les pores de notre peau ouverts pour être pénétrés de tout
ce qu’on respire, de tout ce qui contamine. À aucun moment je n’essaie de représenter ma culture.
Mais je ne l’ai jamais cachée. Elle apparaît par exemple dans mon accent. C’est une qualité sonore
particulière qui ressort quand je lis Ibsen. Mon travail consiste alors à répondre à cette question :
comment digérer, synthétiser tout cela en lui donnant une forme lisible aux yeux de tous ?
Propos recueillis par Delphine de Stoutz
12 février 2013
Albert Pinkham Ryder, The Flying Dutchman (environ 1896)
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LE TEATRO MALANDRO : QUI FAIT QUOI ?
Metteur en scène : Omar Porras
Le metteur en scène est à l’initiative du projet. Il choisit la pièce, les comédiens, les décors, les
costumes, les maquillages, la musique, la lumière, les mouvements, les déplacements, et donne le
rythme de l’ensemble du spectacle. Il est à l’initiative du projet et rassemble autour de lui toutes les
personnes qui vont l’accompagner dans le temps de cette création. Il choisit les comédiens selon des
critères différents, après les avoir rencontrés et auditionnés. Il est présent tous les jours de
répétitions et dirige celles-ci. Il les amène à créer leurs personnages, les guide dans leur travail. Il doit
défendre son idée et faire en sorte que les différents collaborateurs réussissent à comprendre son
envie pour qu’ils puissent, ensemble, réaliser une vision de la pièce. Il orchestre le spectacle pour lui
donner la forme et le rythme qu’il a rêvés. Puis il suit celui-ci lors des différentes représentations et il
accompagne et encadre les comédiens dans l’évolution du spectacle.
Assistant à la mise en scène : Jacint Margarit
Pendant la création de la pièce, il apporte un point de vue complémentaire à la mise en scène.
Dès que le choix de la pièce est fixé, il collabore avec le metteur en scène afin d’organiser les
rencontres et de planifier les répétitions des comédiens et musiciens. Présent à toutes les
répétitions, il note toutes les indications du metteur en scène – déplacements des comédiens,
changements de décor, effets son, effets lumière –, ceci dans le but de construire la pièce et de se
servir des notes pour mémoriser et déléguer les tâches à chaque corps de métier. Il suit
régulièrement la tournée.
Adaptation et dramaturgie : Omar Porras, Marco Sabbatini
Le dramaturge effectue un travail de recherche sur l’oeuvre et son histoire. Il permet de nourrir le
travail de préparation du metteur en scène et donne des informations précieuses sur l’auteur et son
époque. Il aide à cerner les thèmes, les points d’ancrages littéraires, historiques et politiques de
l’oeuvre. Il assiste ensuite aux répétitions en tant qu’adaptateur et dramaturge, aide à saisir les sens,
enjeux et articulations propres à chaque scène. Il entreprend parfois des modifications et des
adaptations (coupes, inversion des scènes, suppression de rôles…) conformes aux besoins du plateau.
Il prépare ainsi la version « jouée » de l’oeuvre dans sa forme adaptée et se porte garant de sa
validité littéraire.
Comédiens et musiciens : Sophie Botte, Philippe Cantor, Olivia Dalric, Paul Jeanson, Jeanne
Pasquier, François Praud, Serge Martin, Didier Puntos
Ils sont choisis plusieurs mois avant le début des répétitions sur des critères définis par le metteur en
scène. L’organisation d’entrevues puis de stages permet de sélectionner les comédiens et les
musiciens. Le travail se fait en plusieurs étapes : lecture du texte, mémorisation, capacité de le
réciter avec des intonations et des émotions différentes, d’y ajouter des mouvements, des
déplacements.
Scénographie : Amélie Kiritzé-Topor
L’espace scénique naît de l’échange d’idées entre le metteur en scène, l’assistant, l’accessoiriste et la
scénographe. Selon l’interprétation de l’oeuvre par le metteur en scène, la forme du décor, des
éléments de décor, des couleurs, des matières prennent vie au fur et à mesure de cette recherche. Le
décor et les accessoires sont dessinés par la scénographe. Elle en définit les volumes, les couleurs, les
matières à utiliser. Elle fabrique une maquette représentant ce cadre et sur cette base, le décor est
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construit par les constructeurs et les accessoires par l’accessoiriste. Le scénographe est présent lors
des répétitions afin d’adapter le décor et les accessoires en fonction des besoins de la pièce. Il
travaille également en étroite collaboration avec l’ingénieur son et l’ingénieur lumière.
Créatrice de costumes : Coralie Sanvoisin
A partir des discussions, des envies et des propositions échangées avec le metteur en scène, la
créatrice des costumes met à disposition pour les répétitions une certaine quantité d’éléments
vestimentaires judicieusement sélectionnés qui seront utilisés librement par les comédiens au
moment où la naissance des personnages s’opérera lors de ces sessions. Les répétitions et
discussions permettent d’échanger des idées sur le spectacle, de définir les personnages, les enjeux à
défendre, les choses que l’on veut dire, montrer, l’époque à laquelle on veut situer l’histoire, les
matières et les couleurs des costumes. Dès ce moment, les personnages créés représentent la
rencontre entre un comédien et un masque, imposant une silhouette, une voix, une démarche, et ces
informations sont nécessaires à la confection d’un costume. Sur la base de dessins indiquant la
forme, la couleur, une maquette des costumes est fabriquée et c’est au cours des répétitions que les
costumes sont confectionnés afin de pouvoir les modifier en fonction des nécessités de la mise en
scène. Les couturières sont chargées de confectionner les costumes. Une fois terminés, ils sont pris
en charge par l’habilleuse qui va en assurer l’entretien et le suivi.
Coralie Sanvoisin explique la création des costumes :
Comme toujours, la création des costumes de La Dame de la mer est partie de discussions avec Omar Porras, et le
projet de scénographie était quasiment achevé quand j’ai fait des propositions pour les costumes. Omar aime
répandre beaucoup de signes sur les éléments visuels, mais il nous a semblé que pour ce projet, il fallait purifier,
épurer l’image pour laisser plus de place au jeu des comédiens et au texte d’Ibsen, en restant très simple et essentiel.
Nous cherchons à créer un équilibre entre le réalisme, le concret des personnages, rattaché à la famille Wangel, et un
aspect plus légendaire et mystérieux, rattaché au personnage de l’étranger. Wangel, Hilde et Bolette constituent une
famille, et les rappels de couleurs (inspirées du photographe tchèque Saudek) et de motifs géométriques (damier,
carreaux) de leurs costumes les intègrent à leur intérieur.
L’Etranger vient de loin ; d’ailleurs, c’est un voyageur, un homme de la mer.
Lyngstrand a connu ce monde de la mer mais n’en fait plus partie, c’est un personnage maladif, simple, qui fréquente
la famille Wangel.
Ellida est une fille de marin, et a épousé le Dr Wangel, elle est déchirée entre le monde du Dr Wangel et celui de
l’Etranger.
Arnholm est un homme coincé, d’une élégance un peu ratée.
Ballested a l’allure d’un pianiste de concert aux vêtements élimés, c’est un personnage à part. Dans la pièce, des
événements étranges se passent mais les costumes partent du réel. Il y a comme une torsion du réel.
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Habilleuse
Elle veille aux changements de costumes des comédiens, à ce que tout soit prêt et que rien ne
manque avant et pendant toutes les représentations. Elle est en charge des costumes et de leur
entretien selon les indications données par la créatrice des costumes : lavage, repassage, mais
également retouches, rangement et transport.
Perruques et postiches : Véronique Nguyen
Lors des premières répétitions, la créatrice des perruques et postiches met à disposition pour les
comédiens des masques, postiches, nez, oreilles, perruques déjà existants. Elle intervient
ponctuellement lors des répétitions afin de définir les souhaits et de voir l’évolution de la recherche
des personnages par rapport à ces divers éléments, et dessine les futurs perruques et postiches. Elle
crée les postiches en effectuant un moulage du visage de chacun des comédiens et y ajoute
différents éléments : perruques, sourcils, maquillage, etc. Les perruques et postiches sont des
éléments très importants pour les comédiens. Ils reflètent les personnages qu’ils ont créés tout au
long des répétitions et font naître à chaque représentation.
Accessoiriste et régisseur accessoires : Laurent Boulanger
Il construit et fabrique les accessoires nécessaires au spectacle, selon les indications du scénographe.
Il a en charge la forme, la couleur ainsi que l’aspect des objets à réaliser. Il prépare également les
effets spéciaux (pétards, feu, fumée), et en assure le fonctionnement. Il est responsable de l’endroit
où se trouvent les accessoires, veille à ce qu’ils soient disponibles pour les comédiens et en assure la
réparation en cas de besoin.
Constructeur du décor : Jean-Marc Bassoli
Le constructeur du décor fabrique les décors à partir des plans du scénographe. Ils décident
ensemble des matières à utiliser et réfléchissent aux contraintes de montage, démontage, transport
et stockage imposées par les différents lieux de tournée.
Directeur technique : Olivier Lorétan
Le directeur technique gère l’équipe technique afin que chacun puisse effectuer ses tâches. Il est en
relation directe avec l’administratrice pour l’achat du matériel, ainsi qu’avec la responsable logistique
pour le transport du décor et le matériel technique.
Régisseur plateau : Laurent Boulanger
Il participe à la construction du décor et des accessoires, au montage et démontage du décor lors de
la tournée. Le régisseur plateau est chargé, lors des représentations, des changements de décors et
de tous les mouvements qui ont lieu sur le plateau.
Compositeur : Didier Puntos - Créateur son : Emmanuel Nappey
Lors des répétitions, le compositeur accompagne musicalement les comédiens. Il joue, arrange,
modifie des morceaux existants ou compose des morceaux de son répertoire, selon les souhaits du
metteur en scène. Ces inventions et improvisations sont enregistrées par l’ingénieur du son puis
retravaillées, remixées avec des ajouts d’effets sonores pour créer les musiques, les chansons du
spectacle. Dans La Dame de la mer, le compositeur, Didier Puntos, est aussi l’un des acteurs de la
pièce.
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Régisseur son
Lors des répétitions, il réagit aux demandes du metteur en scène en fournissant instantanément des
sons divers et en accompagnant les comédiens de bruits tels que des claquements de porte ou
encore une bouteille qui se casse, ceci afin de créer l’univers sonore du spectacle. Il note
scrupuleusement toutes les interventions sonores et musicales à insérer durant le spectacle et
procède à l’enregistrement de la bande son. En collaboration avec le reste de l’équipe technique, il
assure le montage des éléments qui concernent le son ainsi que sa diffusion. Lors de la tournée, il
doit adapter le son et sa diffusion en fonction de la salle de spectacle et faire des essais ainsi que des
raccords pour offrir une bonne acoustique aux spectateurs.
Créateur lumière : Mathias Roche
En collaboration avec le metteur en scène ainsi que le scénographe, le créateur lumière va créer les
effets de lumière du spectacle, à l’aide des projecteurs, en tenant compte des contraintes et des
besoins du décor et de la mise en scène. Il va enregistrer sur une console informatique des effets et
des directions de lumière, une ambiance, et créer une atmosphère au spectacle. C’est ensuite le
régisseur lumière qui sera chargé à chaque représentation de suivre les directives du créateur
lumière.
Régisseur lumière
Collaborant avec le metteur en scène, il est présent lors des répétitions afin de définir les moments
de lancement d’effets de lumière. Lors de la tournée dans chaque théâtre, il est responsable du
matériel technique relatif à la lumière, à commencer par son installation. Présent à toutes les
représentations, il est chargé d’envoyer au bon moment les effets lumineux préalablement
enregistrés sur la console informatique, en restant attentif aux impératifs techniques et aux souhaits
artistiques du metteur en scène. Les rôles de créateur et régisseur lumière peuvent être assurés par
la même personne ou par deux personnes différentes.
Administratrice du Teatro Malandro : Florence Crettol
Elle a en charge le budget, qui concerne la production de la création, les co-productions ainsi que la
vente du spectacle aux plans national et international. Elle gère tout le fonctionnement administratif
et financier de la compagnie et est constamment en lien avec l’ensemble des membres des équipes
artistique, technique et administrative.
Presse et communication : Eva Cousido
En accord avec le directeur de la compagnie, elle s’occupe de l’image de la compagnie, de la
coordination et du suivi administratif de la communication (relations entre les médias, les artistes et
les théâtres d’accueil), de la réalisation de divers supports de promotion et de communication
(papillon, dossier de presse, revue de presse, dossier de présentation de la compagnie, photos et
captation vidéo du spectacle, etc.) en relation avec le graphiste, le photographe, l’imprimeur, etc., de
la gestion du contenu et de l’actualisation du site Internet ainsi que de l’organisation de divers
événements liés au directeur ou à la compagnie.
Logistique : Lucie Goy
Elle organise les déplacements et la résidence de la troupe pour la tournée, et d’une manière
générale, tous les détails d’organisation nécessaires à la vie de chacun en période de répétitions ou
de représentations. Elle s’occupe donc, en coordination avec les théâtres d’accueil et
l’administratrice de la troupe, de superviser le transport des personnes ainsi que du matériel (décor),
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de l’hébergement, et veille aux défraiements de chacun durant les jours de travail. Elle établit des
feuilles de route pour chacun avec des plans d’accès, les adresses utiles, etc. Lors des
représentations, elle assure le lien entre l’équipe de tournée (comédiens et techniciens) et les
théâtres d’accueil.
Comptabilité : Pierre-Alain Brunner
Il a en charge toutes les transactions financières de la compagnie, de manière à connaître à chaque
instant la position et les possibilités budgétaires de la compagnie. Cela passe par toutes les dépenses
(fournitures de bureau, paiement des salariés, achats de matières premières…), ainsi que par les
entrées d’argent (subventions, mécénat…). Le comptable est en contact avec tous les services pour
mener à bien sa mission.
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LA DAME DE LA MER
Avant le spectacle
Préparer les élèves avant le spectacle permet de donner envie, de se mettre en appétit, de présenter
le spectacle vivant au jeune public. Différentes étapes peuvent être réalisées avant d’aller au spectacle.
 Le spectacle auquel les élèves vont assister :
- Que dit le titre ? Hypothèses sur le contenu, le thème, ce qu’on peut en déduire.
- Collecter et étudier l’affiche du spectacle permettant de faire des hypothèses.
- Etudier le synopsis ou le résumé du spectacle.
- Travailler sur le dossier du spectacle et/ou dossier pédagogique.
- Etudier le dossier de presse pour travailler sur la critique, le texte argumentatif.
- Regarder et étudier des extraits du spectacle en vidéo.
Cette étape permet de déterminer à quel genre (discipline, type, …) appartient le spectacle auquel les
élèves vont assister et permet de se faire une idée de l’histoire générale du spectacle, de découvrir les
différentes sources d’inspiration du spectacle vivant (texte de théâtre, littérature, thèmes d’actualités, autres
arts comme la peinture,…).
Pendant le spectacle
Lors de la sortie, le spectacle doit capter l’attention des élèves. L’enseignant partage avec sa classe un moment
d’art tout en veillant au respect des codes du spectateur par les élèves. Le théâtre prend vie pour les élèves
dans le fait qu’il y a une sortie en dehors des murs quotidiens de l’école. L’enseignant et les accompagnateurs
ont des places exonérées ou gratuites. Pendant le spectacle, ils ne sont pas déchargés de leurs responsabilités.
Leur rôle est d’accompagner et d’encadrer le groupe pour veiller à ce qu’il n’y est pas d’incident pendant le
spectacle.

L’entrée en salle est un moment particulier : c’est le moment où les élèves deviennent spectateur. Il
faut respecter leur rythme et les faire rentrer par petits groupes. L’installation est d’autant mieux
réalisée qu’elle est effectuée par les membres du théâtre, ce qui donne davantage l’impression aux
enfants d’être spectateurs et non plus élèves.

Les élèves peuvent utiliser ce qu’ils connaissent, avant que le spectacle ne commence, et reconnaître
quelques éléments sur lesquels ils ont pu travailler au préalable lors de la visite de la salle par
exemple : la place de la régie, l’ouverture des rideaux,…

Le spectacle : les élèves doivent pouvoir apprécier le spectacle grâce à leur sensibilité et ne doivent
pas être assaillis de commentaires ce qui pourrait leur gâcher le spectacle. Il faut que les élèves
apprécient le spectacle sans qu’il y ait une demande pédagogique immédiate.

L’élève : bien insister sur le fait qu’il ne doit pas parler à son voisin à haute voix ni s’adresser aux
artistes, sauf si ceux-ci l’invite à parler. L’élève est là pour en profiter et ouvrir grand ses yeux et ses
oreilles.
Avant ou en fin de spectacle, il faut encourager les élèves à prendre des programmes du spectacle (ils
sont gratuits) ou des tracts présentant brièvement le spectacle, son metteur en scène, les acteurs, etc.

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Après le spectacle
Un retour sur l’œuvre est nécessaire en classe après la représentation. Cette étape initie les élèves à une parole
critique argumentée, mais la prise de parole n’est pas nécessairement immédiate, il faut respecter le ressenti
de chacun. Si l’œuvre a profondément touché un élève, il peut ne pas en parler. De même, la compréhension
totale de l’œuvre ne doit pas forcément être exprimée oralement par les élèves, car chacun ne la comprend
pas nécessairement de la même manière.

Pour parler de l’œuvre, on peut partir de ce qui a été vu, puis croiser les intentions artistiques du
spectacle et les sentiments des spectateurs.

Différents angles peuvent être utilisés pour traiter du spectacle en classe :
 Angle critique : les élèves doivent argumenter pour exprimer leur opinion sur le spectacle. Il ne suffit
pas ici de dire « j’aime » ou « je n’aime pas », il faut trouver des éléments de réponse justifiant son
choix. Cela permet le développement de l’esprit critique et de la sensibilité des élèves.
 Angle analytique : Se remémorer des moments du spectacle afin d’en dégager des éléments
spécifiques : le choix des costumes, le nombre de personnages, le choix des décors, l’éclairage, le jeu
des acteurs,…
 Angle général : Essayer de situer l’histoire dans le temps, situer son époque de rédaction, la comparer
avec d’autres œuvres du même genre, du même auteur,… Ceci participe à la construction d’une
culture commune grâce à l’acquisition de repères culturels.

Un travail plus personnel peut être proposé aux élèves : pour garder une trace de ce moment, l’élève
peut écrire ou dessiner. Mais ce genre de travail doit rester un travail facultatif, il ne faut pas tomber
dans l’exigence pédagogique.
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N’hésitez pas à contacter l’équipe des relations
publiques du Théâtre Firmin Gémier / La Piscine
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