chapitre iv : la biodiversité (faune, flore et

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Rapport de synthèse sur l’état de l’environnement – 2002
CHAPITRE IV : LA BIODIVERSITÉ (FAUNE, FLORE ET
HABITATS)
Lignes de force
• Conserver et promouvoir la biodiversité sur l’ensemble de la Région
Actions privilégiées
⇒ Assurer le suivi scientifique des sites de haute valeur biologique et des principaux groupes de
plantes, d’animaux et de champignons
⇒ Intégrer la biodiversité dans le projet de ville via le PRD et le PRAS
⇒ Développer le maillage vert et bleu, en particulier le maillage écologique
⇒ Protéger les espèces menacées en préservant leurs habitats
⇒ Lutter contre l’extension des espèces invasives
⇒ Donner un statut de protection légale à tous les sites de haute valeur biologique
⇒ S’intégrer concrètement dans le réseau européen "Natura 2000"
⇒ Gérer les espaces verts de façon différenciée pour conserver ou augmenter leur valeur
biologique
⇒ Améliorer la coordination entre les acteurs
⇒ Poursuivre les actions de sensibilisation
Introduction
Le maintien d’un cadre de vie agréable nécessite un développement urbain cohérent et durable,
qu’il s’agisse d’améliorer la qualité générale du milieu, l’eau, l’air, …, ou d’accroître la quantité et
de la qualité des espaces ouverts, espaces verts et parcs. La prise en compte de la protection de
la biodiversité dans le développement urbain débouche sur une amélioration générale des
conditions environnementales. Les textes juridiques internationaux relatifs à la conservation de
la nature et à la biodiversité ne traitent pas spécifiquement des villes. Cependant, la plupart
d’entre-elles présentent une grande richesse d’espèces et d’écosystèmes et offrent des
opportunités privilégiées à la sensibilisation, à la fois par la densité de la population et la
proximité immédiate des gestionnaires politiques.
En intégrant le concept de Maillage vert et bleu – et par là l’importance de la biodiversité – dans
son Plan régional d’Affectation des Sols et dans son projet de plan régional de Développement, la
Région témoigne d’une approche originale en la matière. La désignation de "zones spéciales de
conservation", en application de la directive "Habitats", témoigne du même souci.
Les plus grandes menaces qui pèsent actuellement, au niveau mondial, sur la biodiversité sont la
dégradation des habitats naturels et leur fragmentation, et la prolifération d’espèces exotiques
invasives. Les proportions relatives des espèces indigènes sur un territoire résultent d’équilibres
successifs, fonction des ressources alimentaires, des habitats disponibles et de l’adaptabilité
des espèces. Les activités humaines, qu’elles soient professionnelles, domestiques, liées aux
loisirs, …, provoquent d’importantes dégradations des habitats naturels. De plus, la multiplication
des déplacements des personnes et des marchandises, la suppression de certaines barrières
naturelles, par exemple par le creusement de tunnels sous les bras de mer, les fleuves ou les
montagnes, et le commerce mondial des espèces animales et végétales se sont traduites par
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l’introduction d’espèces exotiques parmi la flore et la faune. Animaux, plantes, champignons,
bactéries, …, nous suivent dans nos voyages, que nous le voulions ou pas. Beaucoup d’espèces ainsi
déplacées ne se multiplient pas.
Cependant, l’absence de leurs ennemis naturels et une bonne adaptabilité permet à certaines
espèces de proliférer, le plus souvent aux dépends d’espèces indigènes, limitées dans leur
développement par leurs prédateurs et/ou par leur adaptation spécifique aux espèces dont elles
se nourrissent. Plusieurs espèces végétales et animales ont ainsi fait souche et sont devenus
extrêmement communes. Tellement communes que ce sont les mêmes espèces que nous risquons à
terme de rencontrer presque partout. La biodiversité globale risque alors de s’appauvrir, n’étant
plus assurée que par un petit nombre d’espèces banales.
1 Inventaires
1.1 Principaux résultats des inventaires de la faune et de la flore
L’IBGE a développé et soutenu plusieurs projets liés à l’inventaire de la faune et de la flore
bruxelloises, en partenariat avec des associations et des institutions scientifiques :
• AVES asbl (1992 ->) : avifaune ; (1997 ->) : herpétofaune
• RAINNE (1992-1996) : herpétofaune
• Amicale européenne de Floristique - AEF asbl (1992 ->, partiel depuis 1994) : flore
• IRScN (1997-2000) : mammifères
• Jardin botanique national (1996-2000) : fungi et lichens
• ULB (2000-2002) : insectes (études ponctuelles)
• UIA (2001) : écureuil (espèce indicatrice du maillage écologique – étude ponctuelle)
• Institut Pasteur (2000-2002) : renard
• VUB (1998 ->) : biodiversité en Forêt de Soignes (ponctuellement, en lien avec le programme
éducatif)
Le tableau ci-dessous synthétise les principaux résultats de ces études.
Tableau 10 : Bilan des espèces recensées en Région de Bruxelles-Capitale, 2001
Groupe
Plantes supérieures
Nombre d’espèces
± 730 espèces
(50% flore belge)
Bryophytes
223 espèces
Macrofungi
(champignons)
Lichens
913 espèces actuellement
recensées
36 espèces de lichens
arboricoles actuellement
recensées
42 espèces certaines
6 espèces probables
9 espèces disparues
Mammifères
Oiseaux
Reptiles et amphibiens
± 100 espèces d’oiseaux
nicheurs
10 espèces : 3 reptiles, 7
amphibiens
Exotiques
± 20% d’exotiques
densité : de 50 à 300
espèces/km² (centre)
Espèces rares
231 espèces rares et/ou
menacées
116 espèces rares et/ou
menacées
± 730 espèces rares
et/ou menacées
2 exotiques
une dizaine d’exotiques
3 exotiques
39 espèces rares et/ou
menacées
17 espèces de
chiroptères (sur un total
belge de 19 espèces)
38 espèces rares et/ou
menacées
6 espèces rares et/ou
menacées
La richesse floristique présente des variations locales : 50 espèces/ km² au centre, 200 à 250
en périphérie et 300 dans les sites semi-naturels en contact avec un talus de chemin de fer.
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Le nombre potentiel de macro-champignons (> 1 mm) en Région de Bruxelles-Capitale est estimé à
3000 espèces. En fait, 1334 espèces ont pu y être recensées (données historiques et données
récentes). Actuellement ce nombre s’élève à 913 espèces.
Le suivi des mammifères permet les constats suivants :
• 17 des 19 espèces de chauves-souris recensées en Belgique sont observées dans la Région ;
parmi elles, 4 espèces sont reprises dans l’annexe II de la directive Habitats.
• D’autres espèces sont également intéressantes au niveau européen, en terme de populations :
renards, hérissons et écureuils roux en zone urbaine, et chevreuils (estimée entre 50 et 100
individus) en zone périurbaine.
• Les Mustélidés (belette, hermine, putois, …) sont en régression.
L’évolution des espèces d’oiseaux nicheurs est relativement constante.
Tableau 11 : Evolution des espèces d’oiseaux nicheurs
Espèces indigènes
Espèces exotiques
Total
1961-1968
97
3
100
1973-1977
95
5
100
1989-1991
93
7
100
1997-2001
90
9
99
On constate cependant, la disparition d’espèces très menacées (coucou, rossignol, …), la
raréfaction d’autres (hirondelles, moineaux, …) et l’accroissement de la proportion d’espèces
exotiques (Perruche à collier, Ouette d’Egypte, …).
Les 7 espèces d’amphibiens recensées se répartissent entre crapauds, grenouilles et triton (1
espèce probablement présente). La petite grenouille verte a disparu. Les deux populations de
Crapaud accoucheur qui se maintiennent résultent probablement d’introductions.
3 espèces de reptiles ont été recensées : lézard vivipare, orvet, couleuvre à collier (cette
dernière probablement introduite).
1.2 Sites de haute valeur biologique
D’après les photographies aériennes de l’ensemble de la Région, si l’on tient compte des jardins
privés, plus de 8.000 ha, soit 50% de la superficie régionale, sont non bâtis. Parmi eux, 2.540 ha
présentent une haute valeur biologique (petits jardins privés exclus), soit plus de 15% de la
superficie régionale.
En 2000, la partie de la "Carte d’Evaluation biologique" qui intéresse directement la Région de
Bruxelles-Capitale et ses alentours (feuille IGN 31) a été finalisée à l’échelle du 1/10.000 ème.
Bien que la méthodologie utilisée ne soit pas adaptée aux spécificités du milieu urbain, cette
feuille fait état de nombreux sites de haute valeur biologique.
2 Intégration de la biodiversité dans le PRAS et le PRD
Il ressort de l’ensemble des inventaires que la Région comporte une grande diversité
d’écosystèmes et de sites de haute valeur biologique et présente une grande richesse faunistique
et floristique.
Au niveau de la Région de Bruxelles-Capitale, la prise en compte de la biodiversité dans le
développement régional et dans son cadre légal s’est traduit, en 2001, par une importante
modification de la typologie des espaces verts au PRAS (Plan régional d’Affectation des Sols),
avec l’introduction dans la typologie des "espaces verts à fonction écologique dominante" (carte
de situation existante de fait) et des "zones vertes de haute valeur biologique" (carte de
l’affectation des sols).
Plus récemment, le PRD comprend la notion (et la carte) de "maillage écologique", inclus dans le
programme "Maillage vert et bleu".
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Figure 13 : Maillage écologique
Le renforcement du cadre légal de protection de la biodiversité implique sa prise en compte dans
les commissions de concertation, les permis d’urbanisme, des permis d’abattage, …, et lors des
aménagements de sites, dont les espaces verts. Ce nouveau cadre légal a permis également le
rapprochement des acteurs institutionnels concernés : IBGE, AATL, AED, Communes, SNCB, …
Une étude récente a montré l’intérêt du suivi des écureuils roux pour l’évaluation de la qualité du
maillage écologique. En effet, l’existence de deux populations distinctes d’écureuils, l’une ayant
son territoire de base en forêt de Soignes, l’autre probablement au Domaine royal de Laeken,
souligne l’impact des barrières physiques – ici le canal et les zones fortement urbanisées qui le
bordent - sur la dispersion des populations. Grâce à l’existence des nombreux espaces verts
boisés (publics et privés) qui constituent la base du maillage écologique, la présence d’écureuils
roux a été constatée assez profondément dans le tissu urbain. L’écureuil roux pourrait servir
d’indicateur qualitatif d’un maillage écologique fonctionnel.
3 Transposition de la directive "Habitats" et réseau "Natura
2000"
La directive "Habitats" (92/43/CEE du 21 mai 1992) vise à assurer la biodiversité en définissant
un cadre commun pour la conservation des habitats naturels et la protection de la faune et de la
flore sauvages sur le territoire européen des États membres. Pour atteindre cet objectif, elle
impose la mise en œuvre du réseau écologique européen dénommé "Natura 2000", constitué de
"zones spéciales de conservation" à désigner par les États membres. Cette désignation
s’effectue sur base de deux types de critères : la présence d'habitats naturels d'intérêt
communautaire, dont la liste figure en annexe I de la directive, et/ou celle d’espèces animales ou
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végétales d'intérêt communautaire, inventoriées en annexe II. La désignation s’effectue en trois
étapes.
• Chaque Etat membre compose une liste de sites abritant des habitats naturels et des espèces
animales et végétales sauvages.
• Sur cette base, la Commission arrête une liste des sites d'importance communautaire.
• Dans un délai maximal de six ans suivant la sélection d'un site par la Commission, l'État
membre concerné désigne ce site comme zone spéciale de conservation.
Dans ces zones, l’État membre doit prendre toutes les mesures nécessaires pour garantir la
conservation des habitats et en éviter la détérioration.
Le Gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale a transposé cette directive par l’adoption de
l’arrêté du 26 octobre 2000 relatif à la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune
et de la flore sauvages. Cependant, la Commission européenne a introduit le 28 août 2001 une
requête en constatation de manquement contre le Royaume de Belgique en ce qu’il n’aurait pas
pris toutes les mesures pour assurer une transposition complète et correcte de cette directive.
Pour pallier aux manquements constatés par la Commission, le Gouvernement a donc pris, le 28
novembre 2002, l’AGRBC modifiant l’AGRBC du 26 octobre 2000.
La Région bruxelloise a finalisé une première proposition de sites Natura 2000 en 1996. Elle était
ainsi la première région belge à remplir ses obligations légales en la matière.
L’approfondissement de la connaissance scientifique du terrain bruxellois s’est traduite par une
proposition de modification de cette liste. Celle-ci, qui prévoit entre autres l’ajout de quelques
sites, est actuellement en discussion au niveau bruxellois.
En Région de Bruxelles-Capitale, c’est principalement la présence d’espèces de chauves-souris qui
a permis de déterminer les périmètres à inscrire dans ce réseau international.
Un projet LIFE-Nature 1998-2002 vise l’aménagement des zones spéciales de conservation
(désignées en 1996), entre autres pour le maintien des espèces de chauves-souris. Il s’est traduit
concrètement par une gestion adaptée des espaces verts urbains (gestion différenciée impliquant
l’accroissement du nombre de prairies fauchées, maintien in situ d’une certaine quantité de bois
mort, gestion écologique des étangs, …), les plans de gestion pour les zones spéciales de
conservation dont la forêt de Soignes (clairières, réserves intégrales, …) et la restauration de
bâtiments. Le choix des chauves-souris comme "symboles" de la protection de la biodiversité se
justifie par deux raisons : leurs exigences en matière de qualité et de diversité du milieu :
espaces boisés, pelouses fleuries, gîtes d’hiver et d’été, arbres creux, eau pure, insectes, …, et
leurs place relativement élevée dans les chaînes alimentaires. En bref, la présence de chauvessouris implique celle de beaucoup d’autres espèces, et donc un bon niveau de biodiversité général.
4 Acteurs diversifiés, de plus en plus souvent complémentaires
La directive "Habitats" s’est également concrétisée par la mise au point de plans de gestion pour
les sites semi-naturels et les réserves naturelles de la Région.
Indirectement, elle a facilité la rencontre et la mise en oeuvre d’un travail concerté entre divers
acteurs de la biodiversité urbaine : les protecteurs de la nature, les forestiers et les jardiniers
employés dans les espaces verts publics.
En 2001, une équipe d’éco-cantonniers a été créée. Principalement chargés de la conservation de
la nature, ils interviennent dans la gestion des cours d’eau (Maillage bleu), ainsi que dans
l’entretien des réserves naturelles et dans la gestion différenciée des parcs (Maillage vert).
• Une expérience de gestion spécifique a été organisée, en accord avec la SNCB, sur deux talus
de haute valeur écologique, situés l’un à Haeren et l’autre à Neerpede. Elle implique la
réalisation concertée des plans de gestion et de leur mise en œuvre.
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Un partenariat a également été établi entre gestionnaires et utilisateurs de la forêt de Soignes,
formalisé par la création d’une "plate-forme participative". Elle a pour but d’assurer le maintien
harmonieux des diverses fonctions assurée par la forêt.
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