Santé connectée : un enjeu sanitaire, social et

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Orange Healthcare
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EXPERTISETIC
Un entretien avec Thierry Zylberberg, directeur d’Orange Healthcare
Santé connectée : un enjeu sanitaire,
social et économique
Allongement de la durée de vie, augmentation des maladies chroniques, désertification médicale,
vieillissement des personnels de soins… les systèmes de santé européens sont structurellement
contraints de s’adapter sous surveillance budgétaire. La maturité actuelle des solutions numériques est
en mesure de contribuer à la résolution positive de cette équation ; mais à condition de lever certains freins…
Orange Healthcare
Journal des Communes durables : Depuis
quelques mois, l’e-santé est au centre
de bien des communications, parfois
de controverses. A votre avis, pourquoi assiste-t-on à cette soudaine mise
en avant ?
Thierry Zylberberg : Avant toute chose,
il faut préciser que la problématique de
la santé connectée dépasse largement
le cadre de la seule dématérialisation ou
d’une simplification administrative. Nous
sommes ici face à un véritable changement de paradigme des pratiques médicales. Pour en prendre la mesure, il faut
tenir compte de plusieurs phénomènes
convergents. Le premier est la désertification médicale de certains territoires qui
touche tant la médecine de ville que certaines spécialités.
Le second est celui d’une hyper spécialisation progressive de l’exercice de la méde-
e-santé & m-santé,
quelle différence ?
L’e-santé
L’e-santé ou télésanté recouvre, selon la définition retenue
par la Commission européenne, les différents instruments qui
s’appuient sur les TIC pour faciliter et améliorer la prévention,
le diagnostic, le traitement et le suivi médicaux ainsi que la
gestion de la santé et du mode de vie.
Cela suppose une interaction avec un professionnel ou le
système de santé et englobe la communication et la transmission de données entre établissements ou praticiens, entre
patients ou professionnels de santé ainsi que les plateformes
d’informations et ressources médicales, les dossiers médicaux
dématérialisés et les services médicaux à distance.
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La m-santé
Le terme de m-santé recouvre pour sa part un ensemble de
services allant du bien-être à la santé dont l’usage est rendu
possible en permanence via un appareil mobile. L’essor de
la m-santé est donc directement lié à la diffusion massive
de smartphones et tablettes. Si les premières applications
disponibles relevaient du conseil de bien-être, de véritables
outils d’aide au diagnostic et au suivi médical ont vu le jour.
Selon des études récentes, 500 millions d’utilisateurs de smartphones et de tablettes devraient utiliser des applications
mobiles liées à la santé en 2015. La m-santé constitue donc à
la fois un gisement potentiel d’économies pour les systèmes
de santé et une véritable filière économique à structurer.
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Pour en savoir plus :
www.healthcare.orange.com
JOURNALDESCOMMUNESDURABLES
N° 2179 - JUILLET 2014
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JCD : L’enjeu est donc aussi économique
TZ : Naturellement ! Et cet enjeu économique est à double détente. La première,
que nous venons d’évoquer, est de parvenir à garantir et pérenniser la qualité des
soins face à une augmentation structurelle
des besoins et à des ressources financières
contraintes. Selon une récente étude menée par Pricewaterhouse Coopers (PwC),
l’Union européenne pourrait réaliser dès
2017 une économie de 99 milliards d’euros
- dont 11,5 milliards pour la France - en
déployant et encourageant des solutions
de m-santé destinées notamment à la prévention et à l’optimisation du suivi des
maladies chroniques.
La seconde est une compétition internationale pour développer des filières innovantes de solutions et d’applications de
santé connectée. Sous cet angle, l’étude
de PwC démontre que l’Union européenne
pourrait parallèlement augmenter son PIB
de 93 milliards d’euros, toujours grâce à
la m-santé. C’est pourquoi les industriels
du numérique dans la santé, dont Orange
Healthcare, ont récemment interpellé les
pouvoirs publics. Les enjeux sont considérables, il n’y a pas de temps à perdre.
JCD : Quels sont donc ces freins dont vous
vous inquiétez ?
TZ : Si les bénéfices de la m-santé sont
potentiellement très importants, les bar-
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Regards croisés d’élus sur l’e-santé
Très attentifs à l’évolution de la qualité de l’offre territoriale de soins,
les élus locaux accueillent majoritairement avec bienveillance la mise
en œuvre de projets et solutions d’e-santé. Deux parlementaires
proches du dossier ont témoigné de leurs attentes et convictions pour
la dernière édition de « Paroles d’élus ». Extraits.
Bérengère Poletti,
députée des Ardennes
Pascal Terrasse,
député de l’Ardèche
L’e-santé favorise
l’égal accès aux soins
Au croisement de
deux mondes profondément dif fé rents, la médecine et
sa culture millénaire
face aux technologies numériques, la
télémédecine est une nouvelle forme
de pratique médicale entre professionnels de santé distants, qui repose
sur le partage des connaissances
médicales. Elle présente des intérêts
évidents en termes d’organisation et
de coordination des soins, mais également d’aménagement du territoire.
La téléconsultation, la télé-expertise,
la télésurveillance, la téléchirurgie et
la téléformation sont autant de pratiques qui favorisent les avancées médicales et l’égal accès aux soins dans
un pays comme la France, confrontée
dans beaucoup de ses régions, notamment rurales, à une faible densité de
population et à une démographie
médicale décroissante.
Pour un « cloud computing santé »
Les systèmes d’information de santé
ne constitueront jamais seuls un remède
miracle.
Un médecin n’est pas un ingénieur et
la médecine est un art que les technologies ont vocation à servir. Il faut
donc bien dissocier les notions de
processus et de protocole et s’appliquer à toujours mettre le premier au
service du second.
C’est sur la base de ces deux principes
qu’industriels, opérateurs et éditeurs
de logiciels doivent imaginer une solution basée sur une plateforme spécialisée supportant l’ensemble des services
et applications métiers attendus des
professionnels de santé : un « cloud
computing santé » ayant vocation à
offrir un accès simplifié et économique
à des ressources logicielles, au suivi des
patients, à la prise en charge de situations d’urgence jusqu’à la gestion.
DR
DR
cine qui appelle de plus en plus souvent
un avis de second niveau et une chaîne
d’échanges et de concertation entre professionnels de santé. Le troisième est relatif
à l’allongement de la durée de vie et à une
augmentation conséquente des maladies
chroniques et du nombre de patients qui
nécessitent un suivi régulier.
Cette conjonction de facteurs se traduit
déjà par un changement de vocation de
l’hôpital. De lieu central de la chaîne de
soin où il était indispensable de se rendre
et de rester ; il devient un lieu d’intervention, de ressources et de coordination où
l’on s’efforce de limiter les consultations
physiques de routine et les durées de séjour. Pour alléger le poids des dépenses et
garantir une égalité d’accès au parcours de
soins, la tendance de fond est donc à la
médecine à distance et à l’autonomisation
du patient. Cela, c’est la santé connectée
qui le permet.
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Retrouvez l’intégralité de ces contributions sur :
www.parolesdelus.com/collection/tome-9-2013
rières d’ordre réglementaire sont encore
trop nombreuses dans plusieurs pays européens. Il faut urgemment intégrer la médecine connectée aux stratégies nationales de
santé. Cela implique de poser un cadre législatif adapté et d’intégrer ces interventions
dans le système de conventionnement des
actes. Souhaitons que les expérimentations
qui sont actuellement en cours en France
dans neuf Régions pilotes débouchent rapidement sur une perspective de généralisa-
tion avec un modèle économique viable.
Au-delà, nous souhaiterions aujourd’hui
voir se tourner une page : celle d’un foisonnement d’initiatives ministérielles et
d’appels à projets thématiques peu coordonnés. Ce que nous attendons, c’est un
cadre d’expérimentation et d’innovation
stable et cohérent, une « doctrine administrative d’intervention » favorable à l’émergence d’une véritable filière économique
nationale de santé connectée. n
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