La psycho-oncologie - John Libbey Eurotext

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D o c t e u r q u ’est- ce q u e
N e u ro l o g i e . c o m 20 09 ; 1 ( 4 ) : 1 - 2
La psycho-oncologie
.......................................................
....
.... Agnès Perpère
a psycho-oncologie a pour objet de
....
....
prendre en charge les répercussions
Nathalie
Jouniaux-Delbez
....
....
....
.... Services de radiothérapie
émotionnelles, psychiques, compor....
.... et de neuro-oncologie,
tementales et familiales des maladies
....
.... Groupe hospitalier
....
.... la Pitié-Salpêtrière, Paris
cancéreuses.
.
.
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..... Les acteurs de la psycho-oncologie sont principa-
L
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lement le psychiatre et le psychologue, appelés
« psycho-oncologues ». Leur présence au sein de
l’équipe soignante symbolise aux yeux des
patients la reconnaissance de leur souffrance
psychique.
Ces derniers sont à la disposition des patients
mais aussi des familles et des proches.
Si tous les patients ne consultent pas de psychooncologue, certains ressentent néanmoins le
besoin de pouvoir parler avec une personne extérieure à leur entourage, souvent pour protéger
ce dernier. De manière tout à fait parallèle, il
arrive que l’entourage fasse la même démarche
pour protéger son proche malade et ne pas lui
faire part de ses propres difficultés.
D’autre part, certains patients ne veulent pas
expliquer leurs doutes ou de leurs craintes à
leur médecin oncologue, ou ont peur de « lui
faire perdre du temps ».
HISTORIQUE DE LA PSYCHO-ONCOLOGIE
Cette discipline est relativement récente.
Voici quelques dates clés.
– 1998 : Premiers États Généraux du Cancer :
patients, familles et soignants expriment un
besoin non satisfait de soutien psychologique.
Ces demandes sont formalisées dans le Livre
Blanc réalisé par la Ligue Nationale contre le
Cancer [1] ;
– Septembre 1999 : Création du programme
EPAC « Ensemble parlons autrement du cancer »,
dont un des axes est l’indispensable soutien psychologique ;
– 2000 : Deuxièmes États Généraux du Cancer.
Les patients et les familles réclament « que les
chercheurs cherchent, que les cancérologues soignent et que des psychologues soient présents
pour nous entendre » ;
– 2003 : Le Plan Cancer stipule (mesure 42) : « il
faut accroı̂tre les possibilités pour les patients
de bénéficier (…) de soutien psychologique et
social ». (http://www.sante.gouv.fr/htm/dossiers/
cancer/plaquette_cancer.pdf).
LE PSYCHO-ONCOLOGUE, QUI EST-CE ?
C’est un psychiatre ou un psychologue.
DOI : 10.1684/nro.2009.0079
Le psychiatre est médecin. Il est donc qualifié
pour diagnostiquer les troubles psychiques qui
peuvent être associés à une tumeur cérébrale
qu’ils soient :
– révélateurs de la tumeur cérébrale, du fait de
sa localisation dans le cerveau ;
– des symptômes neurologiques secondaires de
la maladie ou des traitements (certains traitements de chimiothérapie, les anticonvulsivants
ou les corticoı̈des peuvent modifier l’humeur
des patients) ;
– réactionnels à l’annonce du diagnostic (surtout anxiété et/ou dépression) ;
– préexistants à la tumeur cérébrale.
Le psychiatre est habilité à prescrire des médicaments si cela s’avère nécessaire en étant attentif
aux traitements que vous recevez déjà.
Le psychologue a suivi un cursus en sciences
humaines. Il est habilité à faire un diagnostic
des troubles psychologiques (parfois à l’aide de
questionnaires ou de tests, ou simplement en
vous posant des questions) et son travail est focalisé sur la compréhension des mouvements psychiques qui s’effectuent immanquablement chez
tous les patients atteints de maladies graves.
Tous deux vous proposeront une prise en charge
psychologique qui répondra à votre souffrance
et à votre demande.
LE PSYCHO-ONCOLOGUE, POURQUOI?
L’annonce d’un cancer :
– est déstabilisante, toujours traumatique ;
– rend fragile et vulnérable ;
– fait perdre l’illusion d’immortalité ;
– bouleverse le sentiment d’identité ;
– désorganise le schéma corporel (perception de
son propre corps) ;
– peut laisser craindre au patient qu’il va peutêtre devoir dépendre des autres ;
– fait perdre confiance, perdre le contrôle et
marginalise ;
– peut même, dans certains cas, culpabiliser le
patient de faire vivre ces moments difficiles à
ceux qu’il aime.
Dans les services accueillant des patients
atteints de tumeurs cérébrales, le psychooncologue s’adresse à ceux qui souffrent : les
patients, les familles et les proches.
L’annonce, et même l’hypothèse, d’une maladie
cancéreuse telle qu’une tumeur cérébrale est
toujours vécue comme un traumatisme auquel
chacun réagit différemment selon sa personna-
neurologie.com | vol. 1 n°4 | avril 2009 1
lité, son vécu, son entourage familial et social, sa culture et
le moment de sa vie.
Il ne faut pas sous-estimer ce que l’on pourrait appeler
l’histoire naturelle de la maladie. Le temps fait beaucoup
dans la modification des perceptions, car le traumatisme
du diagnostic s’atténue, et notre fonctionnement psychique explore des ressources qui nous étaient parfois
inconnues. Les répercussions du diagnostic évoluent donc
au fur et à mesure que le temps passe en vivant avec la
maladie.
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LE PSYCHO-ONCOLOGUE, COMMENT ?
Vous connaissez souvent sa présence par l’intermédiaire
d’une plaquette d’informations, d’un carnet de suivi, ou
encore d’un affichage où figurent tous les numéros de téléphone dont vous pourriez avoir besoin au cours du suivi de
votre maladie. L’équipe infirmière et aide-soignante, toujours au plus près des patients et de leur famille, est le
premier soutien dans la prise en charge de cette maladie,
et si elle le juge opportun, elle vous proposera de rencontrer le psycho-oncologue.
Le psycho-oncologue vous propose un suivi psychologique.
Cela peut consister en de simples entretiens de soutien, ou
bien être un peu plus actif, et voir avec vous ce qui vous
fait souffrir, à quelle façon de voir les choses est attachée
cette souffrance et décider avec vous ce que l’ont peut en
modifier pour que vous puissiez vivre ce moment de la
maladie le mieux possible.
Ensemble vous pourrez mettre en lumière quels sont les
comportements et pensées qui vous réussissent le mieux
à vous en particulier, vous soutiennent et vous accompagnent.
Le psycho-oncologue est là pour proposer une aide supplémentaire et non pour l’imposer. Il est un professionnel de
santé, donc soumis au secret professionnel, qui sera, en
prenant le temps, un tiers qui n’est pas affectivement
mêlé aux conséquences de la maladie sur votre vie et
peut donc vous aider à mettre évidence ce qui est le plus
important pour vous et à relativiser certaines choses. Vous
pouvez donc, sans aucune crainte de jugement, exposer
vos difficultés à penser votre vie, apprendre à parler de la
maladie à ce moment où tout est bouleversé.
LE PSYCHO-ONCOLOGUE, POUR QUI ?
Pour tous ceux qui sont touchés de près ou de loin par la
maladie : les patients évidemment, mais aussi les conjoints
qui peuvent se sentir complètement démunis, qui ne
savent pas s’ils font « bien ». Parfois un simple entretien
rassurant suffira.
Pour les enfants de patients malades, parce qu’il est plus
facile de poser ses questions à quelqu’un en blouse blanche
qu’on ne connaı̂t pas : on n’aura pas peur de lui faire du
mal ou de le mettre mal à l’aise.
Qu’est ce que le psycho-oncologue apporte aux patients/
familles ?
– Du temps et un temps de pause ;
– Une meilleure gestion des émotions.
– Un éclairage sur les réactions des autres patients/de l’entourage/de la société en général ;
2 neurologie.com | vol. 1 n°4 | avril 2009
– Un « filet de sécurité » en cas d’urgence ;
– Un relais, « huile dans les rouages » entre la famille et
l’équipe soignante ;
– Un rôle d’orientation : kiné, sexologue, sophrologue,
etc ;
– Un rôle de conseil ponctuel « comment annoncer à mes
enfants…? » ;
– Une aide à la préservation du lien familial ;
– Un suivi psychothérapique si nécessaire.
LE PSYCHO-ONCOLOGUE, QUAND?
Dans la plupart des cas, les patients/familles consultent
aux moments cruciaux de la maladie :
– après l’annonce de la maladie et avant le début du traitement ;
– quelques jours avant la fin du traitement ;
– en cours de rémission, en particulier au moment des
contrôles ;
– au moment d’une récidive ;
– en cas de dépression ou d’anxiété importante.
Mais aussi :
– quand un soignant vous le propose, souvent il vous
connaı̂t bien et connaı̂t bien la maladie ;
– quand vous ressentez cette longueur de la prise en
charge médicale, que vous avez le sentiment de ne pas
en voir le bout ;
– quand venir à l’hôpital devient difficile, ou quand on
pense avoir envie de tout arrêter ;
– quand on ne perçoit que les inconvénients des traitements et plus les conséquences bénéfiques qui viendront
à plus long terme ;
– quand on ne parvient plus à parler de la maladie à ses
proches et que l’on peut avoir le sentiment de ne pas être
compris. Cette sensation peut être accentuée chez les
patients qui ont une maladie silencieuse : les autres ne
voient pas qu’ils ont une maladie si grave et, pensant
bien faire, sur-stimule les patients ou font comme si la
maladie n’existait pas, alors que la personne malade
peut avoir, à ce moment, besoin d’être soutenue et entendue dans sa lassitude douloureuse de vivre avec une maladie et des traitements si lourds et si envahissants dans la
vie quotidienne ;
– quand on se pose des questions auxquelles on ne trouve
pas de réponse satisfaisante ou que l’on n’a pas envie de
les exposer à ses proches ;
– quand on se sent fatigué, las, épuisé, stressé, anxieux,
triste ;
– et surtout quand vous en avez envie, quand vous vous
sentez prêt.
Référence
1. Les malades prennent la parole. In :
Livre blanc des Premiers E´tats généraux
des malades du cancer. Réalisé par la
Ligue contre le cancer. Éditions Ramsay,
1999.
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