D o c t e u r q u ’est- ce q u e N e u ro l o g i e . c o m 20 09 ; 1 ( 4 ) : 1 - 2 La psycho-oncologie ....................................................... .... .... Agnès Perpère a psycho-oncologie a pour objet de .... .... prendre en charge les répercussions Nathalie Jouniaux-Delbez .... .... .... .... Services de radiothérapie émotionnelles, psychiques, compor.... .... et de neuro-oncologie, tementales et familiales des maladies .... .... Groupe hospitalier .... .... la Pitié-Salpêtrière, Paris cancéreuses. . . .................................................... . <[email protected]> ..... Les acteurs de la psycho-oncologie sont principa- L Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 24/05/2017. lement le psychiatre et le psychologue, appelés « psycho-oncologues ». Leur présence au sein de l’équipe soignante symbolise aux yeux des patients la reconnaissance de leur souffrance psychique. Ces derniers sont à la disposition des patients mais aussi des familles et des proches. Si tous les patients ne consultent pas de psychooncologue, certains ressentent néanmoins le besoin de pouvoir parler avec une personne extérieure à leur entourage, souvent pour protéger ce dernier. De manière tout à fait parallèle, il arrive que l’entourage fasse la même démarche pour protéger son proche malade et ne pas lui faire part de ses propres difficultés. D’autre part, certains patients ne veulent pas expliquer leurs doutes ou de leurs craintes à leur médecin oncologue, ou ont peur de « lui faire perdre du temps ». HISTORIQUE DE LA PSYCHO-ONCOLOGIE Cette discipline est relativement récente. Voici quelques dates clés. – 1998 : Premiers États Généraux du Cancer : patients, familles et soignants expriment un besoin non satisfait de soutien psychologique. Ces demandes sont formalisées dans le Livre Blanc réalisé par la Ligue Nationale contre le Cancer [1] ; – Septembre 1999 : Création du programme EPAC « Ensemble parlons autrement du cancer », dont un des axes est l’indispensable soutien psychologique ; – 2000 : Deuxièmes États Généraux du Cancer. Les patients et les familles réclament « que les chercheurs cherchent, que les cancérologues soignent et que des psychologues soient présents pour nous entendre » ; – 2003 : Le Plan Cancer stipule (mesure 42) : « il faut accroı̂tre les possibilités pour les patients de bénéficier (…) de soutien psychologique et social ». (http://www.sante.gouv.fr/htm/dossiers/ cancer/plaquette_cancer.pdf). LE PSYCHO-ONCOLOGUE, QUI EST-CE ? C’est un psychiatre ou un psychologue. DOI : 10.1684/nro.2009.0079 Le psychiatre est médecin. Il est donc qualifié pour diagnostiquer les troubles psychiques qui peuvent être associés à une tumeur cérébrale qu’ils soient : – révélateurs de la tumeur cérébrale, du fait de sa localisation dans le cerveau ; – des symptômes neurologiques secondaires de la maladie ou des traitements (certains traitements de chimiothérapie, les anticonvulsivants ou les corticoı̈des peuvent modifier l’humeur des patients) ; – réactionnels à l’annonce du diagnostic (surtout anxiété et/ou dépression) ; – préexistants à la tumeur cérébrale. Le psychiatre est habilité à prescrire des médicaments si cela s’avère nécessaire en étant attentif aux traitements que vous recevez déjà. Le psychologue a suivi un cursus en sciences humaines. Il est habilité à faire un diagnostic des troubles psychologiques (parfois à l’aide de questionnaires ou de tests, ou simplement en vous posant des questions) et son travail est focalisé sur la compréhension des mouvements psychiques qui s’effectuent immanquablement chez tous les patients atteints de maladies graves. Tous deux vous proposeront une prise en charge psychologique qui répondra à votre souffrance et à votre demande. LE PSYCHO-ONCOLOGUE, POURQUOI? L’annonce d’un cancer : – est déstabilisante, toujours traumatique ; – rend fragile et vulnérable ; – fait perdre l’illusion d’immortalité ; – bouleverse le sentiment d’identité ; – désorganise le schéma corporel (perception de son propre corps) ; – peut laisser craindre au patient qu’il va peutêtre devoir dépendre des autres ; – fait perdre confiance, perdre le contrôle et marginalise ; – peut même, dans certains cas, culpabiliser le patient de faire vivre ces moments difficiles à ceux qu’il aime. Dans les services accueillant des patients atteints de tumeurs cérébrales, le psychooncologue s’adresse à ceux qui souffrent : les patients, les familles et les proches. L’annonce, et même l’hypothèse, d’une maladie cancéreuse telle qu’une tumeur cérébrale est toujours vécue comme un traumatisme auquel chacun réagit différemment selon sa personna- neurologie.com | vol. 1 n°4 | avril 2009 1 lité, son vécu, son entourage familial et social, sa culture et le moment de sa vie. Il ne faut pas sous-estimer ce que l’on pourrait appeler l’histoire naturelle de la maladie. Le temps fait beaucoup dans la modification des perceptions, car le traumatisme du diagnostic s’atténue, et notre fonctionnement psychique explore des ressources qui nous étaient parfois inconnues. Les répercussions du diagnostic évoluent donc au fur et à mesure que le temps passe en vivant avec la maladie. Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 24/05/2017. LE PSYCHO-ONCOLOGUE, COMMENT ? Vous connaissez souvent sa présence par l’intermédiaire d’une plaquette d’informations, d’un carnet de suivi, ou encore d’un affichage où figurent tous les numéros de téléphone dont vous pourriez avoir besoin au cours du suivi de votre maladie. L’équipe infirmière et aide-soignante, toujours au plus près des patients et de leur famille, est le premier soutien dans la prise en charge de cette maladie, et si elle le juge opportun, elle vous proposera de rencontrer le psycho-oncologue. Le psycho-oncologue vous propose un suivi psychologique. Cela peut consister en de simples entretiens de soutien, ou bien être un peu plus actif, et voir avec vous ce qui vous fait souffrir, à quelle façon de voir les choses est attachée cette souffrance et décider avec vous ce que l’ont peut en modifier pour que vous puissiez vivre ce moment de la maladie le mieux possible. Ensemble vous pourrez mettre en lumière quels sont les comportements et pensées qui vous réussissent le mieux à vous en particulier, vous soutiennent et vous accompagnent. Le psycho-oncologue est là pour proposer une aide supplémentaire et non pour l’imposer. Il est un professionnel de santé, donc soumis au secret professionnel, qui sera, en prenant le temps, un tiers qui n’est pas affectivement mêlé aux conséquences de la maladie sur votre vie et peut donc vous aider à mettre évidence ce qui est le plus important pour vous et à relativiser certaines choses. Vous pouvez donc, sans aucune crainte de jugement, exposer vos difficultés à penser votre vie, apprendre à parler de la maladie à ce moment où tout est bouleversé. LE PSYCHO-ONCOLOGUE, POUR QUI ? Pour tous ceux qui sont touchés de près ou de loin par la maladie : les patients évidemment, mais aussi les conjoints qui peuvent se sentir complètement démunis, qui ne savent pas s’ils font « bien ». Parfois un simple entretien rassurant suffira. Pour les enfants de patients malades, parce qu’il est plus facile de poser ses questions à quelqu’un en blouse blanche qu’on ne connaı̂t pas : on n’aura pas peur de lui faire du mal ou de le mettre mal à l’aise. Qu’est ce que le psycho-oncologue apporte aux patients/ familles ? – Du temps et un temps de pause ; – Une meilleure gestion des émotions. – Un éclairage sur les réactions des autres patients/de l’entourage/de la société en général ; 2 neurologie.com | vol. 1 n°4 | avril 2009 – Un « filet de sécurité » en cas d’urgence ; – Un relais, « huile dans les rouages » entre la famille et l’équipe soignante ; – Un rôle d’orientation : kiné, sexologue, sophrologue, etc ; – Un rôle de conseil ponctuel « comment annoncer à mes enfants…? » ; – Une aide à la préservation du lien familial ; – Un suivi psychothérapique si nécessaire. LE PSYCHO-ONCOLOGUE, QUAND? Dans la plupart des cas, les patients/familles consultent aux moments cruciaux de la maladie : – après l’annonce de la maladie et avant le début du traitement ; – quelques jours avant la fin du traitement ; – en cours de rémission, en particulier au moment des contrôles ; – au moment d’une récidive ; – en cas de dépression ou d’anxiété importante. Mais aussi : – quand un soignant vous le propose, souvent il vous connaı̂t bien et connaı̂t bien la maladie ; – quand vous ressentez cette longueur de la prise en charge médicale, que vous avez le sentiment de ne pas en voir le bout ; – quand venir à l’hôpital devient difficile, ou quand on pense avoir envie de tout arrêter ; – quand on ne perçoit que les inconvénients des traitements et plus les conséquences bénéfiques qui viendront à plus long terme ; – quand on ne parvient plus à parler de la maladie à ses proches et que l’on peut avoir le sentiment de ne pas être compris. Cette sensation peut être accentuée chez les patients qui ont une maladie silencieuse : les autres ne voient pas qu’ils ont une maladie si grave et, pensant bien faire, sur-stimule les patients ou font comme si la maladie n’existait pas, alors que la personne malade peut avoir, à ce moment, besoin d’être soutenue et entendue dans sa lassitude douloureuse de vivre avec une maladie et des traitements si lourds et si envahissants dans la vie quotidienne ; – quand on se pose des questions auxquelles on ne trouve pas de réponse satisfaisante ou que l’on n’a pas envie de les exposer à ses proches ; – quand on se sent fatigué, las, épuisé, stressé, anxieux, triste ; – et surtout quand vous en avez envie, quand vous vous sentez prêt. Référence 1. Les malades prennent la parole. In : Livre blanc des Premiers E´tats généraux des malades du cancer. Réalisé par la Ligue contre le cancer. Éditions Ramsay, 1999.