Nuria Kotecki1 Éric Dansin1 Clotilde Descarpentries2 Fabienne Escande2 Géraldine Lauridant1 David Tulasne3 Alexis Cortot4 1 Centre Oscar-Lambret Département de cancérologie générale 3, rue Frédéric-Combemale 59000 Lille France <[email protected]> <[email protected]> <[email protected]> 2 Centre hospitalier régional universitaire de Lille Plateforme de biologie moléculaire 2, avenue Oscar Lambret 59000 Lille France <[email protected]> <[email protected]> IEC RÉSUMÉ L’hyperexpression de MET et l’amplification génique de MET représentent dans le cancer bronchique non à petites cellules respectivement un facteur pronostique négatif et un mécanisme de résistance aux inhibiteurs de tyrosine kinase de EGFR et/ou ALK. Une délétion de l’exon 14 de MET a récemment été identifiée dans le carcinome bronchique sarcomatoïde avec une efficacité du crizotinib et d’autres inhibiteurs de ALK. Ces résultats préliminaires justifient la recherche des mutations de MET et les essais en cours des inhibiteurs de MET dans le carcinome bronchique sarcomatoïde. Mots clés : MET ; carcinome pulmonaire non à petites cellules ; anatomopathologie ; crizotinib. l ABSTRACT MET overexpression and gene amplification in non-small cell lung cancer represent a negative prognostic factor and provides a mechanism of resistance to EGFR and/or ALK tyrosine kinase inhibitors (TKI). A deletion of exon 14 of the MET gene has recently been identified in pulmonary sarcomatoid carcinoma with associated efficacy of Crizotinib and other MET TKI. These preliminary results justify molecular testing for MET mutations and ongoing clinical trials evaluating these compounds in pulmonary sarcomatoid carcinoma. l Key words: MET; non small cell lung carcinoma; pathology; crizotinib. 3 CNRS UMR8161 Institut de biologie de Lille 1, rue du Professeur Calmette 59019 Lille France <[email protected]> L 4 Centre hospitalier régional universitaire de Lille Service de pneumologie 2, avenue Oscar Lambret 59000 Lille France <[email protected]> Remerciements et autres mentions : Nous tenons à remercier particulièrement le Dr Nicolas Penel pour sa relecture et ses conseils. Financement : aucun. Liens d’intérêts : les auteurs déclarent n’avoir aucun lien d’intérêt en rapport avec l’article. Tirés à part : N. Kotecki e traitement des carcinomes sarcomatoïdes primitifs pulmonaires reste un défi pour la pneumooncologie. Ce groupe de tumeurs rares représente environ 1 % des carcinomes bronchiques non à petites cellules (CBNPC) et est composé de cinq sous-types histologiques différents : pléomorphe, fusiforme, à cellules géantes, carcinosarcome et pneumoblastome [1]. Leur présentation clinique n’est pas différente des autres types des CBNPC, mais ils sont néanmoins d’un moins bon pronostic du fait d’une plus grande agressivité et d’une chimiorésistance primaire. La survie à cinq ans est inférieure à 20 % [2]. Jusqu’à présent aucune anomalie moléculaire ciblable n’ayant été identifiée, le recours aux théra- pies ciblées n’était pas possible dans ce type tumoral de CBNPC. La publication de Frampton et la présentation à l’ASCO 2015 (American Society of Clinical Oncology) des travaux de Liu et al. sur les mutations de MET dans le carcinome sarcomatoïde bronchique changent la donne et laissent entrevoir de nouvelles pistes thérapeutiques [3, 4]. MET est un récepteur membranaire à activité tyrosine kinase, dont le ligand est le facteur de croissance hépatocytaire (HGF). La voie HGFMET a une activité mitogénique, motogénique, morphogénique et anti-apoptotique impliquée dans la cancérogenèse. Différentes anomalies de la voie ont été décrites : surexpression du récepteur MET, Pour citer cet article : Kotecki N, Dansin É, Descarpentries C, Escande F, Lauridant G, Tulasne D, Cortot A. Un espoir dans le carcinome sarcomatoïde bronchique ? Innov Ther Oncol 2015 ; 1 : 57-58. doi : 10.1684/ito.2015.0009 Innovations & Thérapeutiques en Oncologie l vol. 1 – n8 2, nov-déc 2015 57 doi: 10.1684/ito.2015.0009 Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 24/05/2017. Is there hope for the treatment of pulmonary sarcomatoid carcinoma? Innovations en cours Un espoir dans le carcinome sarcomatoïde bronchique ? IEC Innovations en cours Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 24/05/2017. N. Kotecki, et al. amplification génique ou mutations de MET [5, 6]. Diverses stratégies thérapeutiques impliquant ces anomalies sont étudiées. Ainsi, dans les tumeurs bronchiques surexprimant MET, les résultats décevants de la phase III comparant l’association erlotinib et onartuzumab, un anticorps anti-MET, à l’erlotinib seul ont entraîné l’arrêt du développement de ce médicament [7]. Dans le cancer bronchique porteur d’une mutation du gène EGFR, l’amplification de MET est un mécanisme de résistance connu au traitement par inhibiteur de l’activité tyrosine kinase d’EGFR [5]. Enfin la délétion de l’exon 14 de MET conduit à une protéine MET dépourvue d’une partie de son domaine cytoplasmique juxtamembranaire entraînant un défaut de dégradation de MET à l’origine d’un phénomène oncogénique dans le cancer bronchique [4]. À l’ASCO 2015, Liu et al. ont présenté une série de 36 carcinomes sarcomatoïdes pulmonaires. Le séquençage à haut débit a permis de mettre en évidence une série de mutations conduisant à la délétion de l’exon 14 de MET chez huit patients. Parmi ces huit patients, un patient a tiré un bénéfice clinique impressionnant d’un traitement par crizotinib [4]. La sensibilité au crizotinib des tumeurs mutées sur l’exon 14 de MET est aussi confortée par deux publications récentes. Sur une série de quatre patients porteurs d’un adénocarcinome bronchique muté au niveau de l’exon 14 de MET, trois répondaient au crizotinib et un au cabozantinib [8]. Dans une autre série de trois patients porteurs de tumeur sarcomatoïde pulmonaire, une réponse était rapportée respectivement sous crizotinib et capmatinib, un autre inhibiteur de MET [3]. Ces données sur les mutations de MET dans les carcinomes sarcomatoïdes bronchiques élargissent le champ de traitement du crizotinib, efficace sur les cancers bronchiques présentant un réarrangement d’ALK (c’est le cadre de son autorisation de mise sur le marché – AMM) et dont l’efficacité a été montrée plus récemment sur les cancers présentant une translocation de ROS1 ou une amplification de MET [9, 10]. Dans ce cadre, le programme « basket » Acsé crizotinib, mené sous l’égide de l’INCa et d’Unicancer et qui permet l’accès au crizotinib des patients atteints de cancer en situation d’échec thérapeutique porteurs d’une altération génétique d’au moins une des cibles du crizotinib (ALK, ROS1 ou MET), apportera encore des données complémentaires1. Que retenir de ces constatations ? Elles offrent une opportunité pour l’amélioration de la prise en charge de ces tumeurs rares et agressives. Depuis juin 2015, le programme Acsé a étendu la recherche de mutations de MET au cancer bronchique. Les résultats présentés cette année sur l’efficacité du crizotinib en cas de mutation touchant l’exon 14 de MET justifient, notamment en cas de carcinome sarcomatoïde bronchique, le screening moléculaire de ces patients auprès des plates-formes régionales de génétique moléculaire coordonnées par l’INCa (Institut national du cancer). RÉFÉRENCES 1. Zehani A, Ayadi-Kaddour A, Marghli A, et al. Sarcomatoid carcinoma of the lung: retrospective study of 28 cases. Ann Pathol 2014 ; 34 : 124-9. 2. Ouziane I, Boutayeb S, Mrabti H, et al. Sarcomatoid carcinoma of the lung: a model of resistance of chemotherapy. North Am J Med Sci 2014 ; 6 : 342-5. 3. Frampton GM, Ali SM, Rosenzweig M, et al. Activation of MET via diverse exon 14 splicing alterations occurs in multiple tumor types and confers clinical sensitivity to MET inhibitors. Cancer Discov 2015 ; 5 : 850-9. 4. Liu X, Jia Y, Stoopler MB, et al. Next-generation sequencing of pulmonary sarcomatoid carcinoma reveals high frequency of actionable met gene mutations. J Clin Oncol 2015. 5. Furlan A, Kherrouche Z, Montagne R, Copin MC, Tulasne D. Thirty years of research on met receptor to move a biomarker from bench to bedside. Cancer Res 2014 ; 74 : 6737-44. 6. Montagne R, Berbon M, Doublet L, et al. Necrosis- and apoptosis-related Met cleavages have divergent functional consequences. Cell Death Dis 2015 ; 6 : e1769. 7. Spigel DR, Edelman MJ, O’Byrne K, et al. Onartuzumab plus erlotinib versus erlotinib in previously treated stage IIIb or IV NSCLC: results from the pivotal phase III randomized, multicenter, placebo-controlled METLung [OAM4971g] global trial. J Clin Oncol 2014 ; 32 : 5s [abstract]. 8. Paik PK, Drilon A, Fan PD, et al. Response to MET Inhibitors in patients with stage IV lung adenocarcinomas harboring MET mutations causing exon 14 skipping. Cancer Discov 2015 ; 5 : 842-9. 9. Moro-Sibilot D, Faivre L, Zalcman G, et al. Crizotinib in patients with advanced ROS1-rearranged non-small cell lung cancer (NSCLC). Preliminary results of the ACSé phase II trial. J Clin Oncol 2015 ; 33 [abstract]. 10. Vassal G, Ledeley MC, Tournigand C, et al. Activity of crizotinib in relapsed MET amplified malignancies: results of the French AcSé Program. J Clin Oncol 2015 ; 33 [abstract]. 1 http://www.e-cancer.fr/Professionnels-de-la-recherche/Recherche-clinique/Le-programme-AcSe2/AcSe-crizotinib 58 Innovations & Thérapeutiques en Oncologie l vol. 1 – n8 2, nov-déc 2015