n°29 Juin 2016 La Radiothérapie au CHRV Extension du service de Radiothérapie oncologique Edito Un nouveau service de radiothérapie plus grand, plus cher : pourquoi ? Le cancer est une pathologie fréquente et en augmentation mais depuis des années les progrès sont constants pour lutter contre cette maladie. L’amélioration de la survie et les guérisons sont devenues réalité grâce notamment au développement de l’ensemble des possibilités de traitements. La radiothérapie tient une place importante dans la stratégie thérapeutique et le CHR Verviers dispose depuis plus de 20 ans d’un service de radiothérapie qui prend maintenant en charge près de 1000 patients par an avec des technologies de plus en plus sophistiquées. Pour répondre à ces besoins, il a été nécessaire de repenser l’infrastructure et d’étendre de façon conséquente le service, et de le doter des technologies les plus récentes. Vous verrez dans ce numéro la concrétisation de cette réflexion collégiale et des réalisations qui permettent d’accueillir et de prendre en charge les patients dans les meilleures conditions de qualité et de sécurité. Au-delà des aspects technologiques (3ème bunker, 3ème machine de traitement), un point d’attention particulier a été porté sur l’accueil et l’aménagement des espaces tant pour les patients que pour le personnel. La radiothérapie nécessite la collaboration de professionnels qualifiés et ceux-ci vous sont présentés dans ce numéro. Je tiens à remercier toutes celles et ceux qui de manière directe ou indirecte contribuent à offrir des soins de qualité aux patients et qui ont permis de mettre en place ce nouveau service. Eric Brohon Directeur Médical Le mot du Chef de Service Par rapport à la chirurgie (1500 avant JC) et au médicament (600 après JC), la radiothérapie est une jeune discipline : le rayon X, découvert en 1895 par Röntgen, a à peine plus d’un siècle. Il est donc normal qu’elle reste méconnue, et associée à des préjugés. « Si je reçois des rayons, c’est que je suis inopérable. » Faux… « Si je reçois des rayons, j’ai moins de chances de m’en sortir. » Faux… « Si je reçois des rayons, je vais être gravement brûlé. » Faux… Le mot « cancer » est difficile à entendre pour le patient, pour son conjoint, et pour sa famille. Le premier devoir du radiothérapeute oncologue et de l’équipe soignante est d’expliquer au patient et à ses proches la nature de sa maladie, les thérapeutiques possibles, et l’espoir qu’ils peuvent placer en celles-ci. Car 70% des patients qui poussent la porte du service de radiothérapie y recevront un traitement visant à les guérir, à éradiquer complètement et définitivement la maladie. Tout comme 36.000 autres hommes et femmes, chaque année en Belgique… La radiothérapie permet aujourd’hui de guérir des cancers pulmonaires débutants en à peine une semaine, sans recours à la chirurgie. De réaliser des chirurgies de préservation du sein, évitant des dizaines de mastectomies par an. De traiter des tumeurs de l’intestin sans devoir placer de « poche » de colostomie définitive. Voire de guérir des maladies métastatiques qui, il y a quelques années à peine, auraient été jugées de situations sans espoir. L’espoir, c’est ce que toute l’équipe soignante doit insuffler au patient au fil de son parcours. Elle l’aide à trouver, derrière des machines souvent impressionnantes, la confiance dans cette vie qui reprendra sa place après les longs examens et traitements. L’humain et la machine ne sont pas antinomiques : ils sont complémentaires, armes indispensables au service du patient et de sa guérison. Par une politique d’investissement volontaire et soutenue au fil des ans, collant au plus près à l’évolution technologique en cancérologie, le CHR de Verviers garantit à ses patients un matériel et une qualité de soins optimaux. Guidance par l’image, stéréotaxie, asservissement respiratoire : ces techniques de pointe sont quotidiennement accessibles dans le service de radiothérapie oncologique, où le patient et ses proches trouveront aussi un cadre convivial permettant leur accompagnement par une équipe multidisciplinaire attentive. Médecins radiothérapeutes, physiciens médicaux, infirmières, secrétaires d’accueil, et collaborateurs paramédicaux tels les onco-psychologues et onco-diététiciennes : nous vous invitons à découvrir dans ces pages leur quotidien, au service chaque année de 1.000 patients et familles. Dr Olivier De Hertogh Chef de service - Radiothérapie Oncologique L’extension du service : pourquoi ? Le contexte : On dénombre en Belgique vingt-cinq services agréés de Radiothérapie. La population belge était estimée (au 31 juillet 2008) à 10.403.951 habitants, soit une moyenne de 141.593 habitants par LinAc (accélérateur linéaire) à l’échelon fédéral. L’offre de soins en Région Wallonne est quasi identique. La population wallonne était estimée (au 1er janvier 2008) à 3.456.775 habitants, soit une moyenne de 144.032 habitants par LinAc. Il existe néanmoins des disparités. En 2010, moment où l’extension du service de Radiothérapie oncologique a été conçue, seuls deux hôpitaux wallons possédaient une expérience en routine clinique des traitements de radiothérapie complexes: la CMSE de Namur, et le CHR de Verviers. Ces traitements, dits de « modulation d’intensité » (ou « IMRT »), sont particulièrement indiqués pour la prise en charge de tumeurs fréquentes, tels que les cancers de prostate, du poumon, du sein avec extension ganglionnaire et de la sphère ORL. Ils sont pratiqués au CHRV depuis près de dix ans maintenant (février 2007), et l’étaient déjà depuis 4 ans à l’époque de la décision d’extension. Pendant cette période, plus de 8.000 patients ont été pris en charge au sein du service de Radiothérapie Oncologique. La population de l’arrondissement administratif de Verviers, estimée à près de 280.000 habitants, justifiait l’existence depuis 1975 d’un service de Radiothérapie doté de 2 LinAcs avec une moyenne de 137.000 habitants par LinAc. L’expertise des traitements radiothérapiques complexes acquise par le CHRV explique que 25% des patients traités proviennent aujourd’hui d’autres arrondissements administratifs, soit une base de population d’environ 364.000 habitants. Le nombre d’habitants par LinAc implanté au CHRV atteignait ainsi 182.000 personnes, excédant nettement la moyenne belge et wallonne, et motivait la construction d’un troisième bunker pour implantation d’un nouveau LinAc à Verviers. Extension ou remplacement de machine dans les locaux existants: pourquoi fallait-il voir plus grand ? L’étude préliminaire réalisée par le bureau d’architecture Emile Verhaegen (Bruxelles) a démontré une utilisation optimale des surfaces bâties par le service de Radiothérapie Oncologique. Un accroissement de l’activité clinique (en l’occurrence par la mise en fonction d’un nouveau LinAc) était impossible à envisager dans la situation architecturale actuelle, sans nuire à la qualité des soins. Preuve en est que la surface bâtie, d’environ 550 m², plaçait le service nettement sous la moyenne wallonne et belge en termes de mètres carrés rapportés au nombre de patients traités et à l’activité clinique. L’extension projetée du service de Radiothérapie Oncologique, consistant en la construction d’un troisième bunker pour accueillir le nouveau LinAc et de deux bureaux de consultation supplémentaires pour répondre à la croissance d’activité de consultation, constituait dès lors une réponse raisonnable et équilibrée aux besoins du service. Cette extension devait permettre un maintien de la politique de qualité des soins aux patients atteints de cancer et adressés au CHRV, en tant qu’institution de référence dans l’Est de la Belgique. Depuis lors, la croissance d’activité s’est poursuivie, validant ainsi la décision prise. En 2015, 931 patients ont été pris en charge, soit une augmentation de 20% par rapport au moment où l’extension a été décidée. Cette croissance ininterrompue a amené le service à franchir le seuil d’agrément pour trois appareils de radiothérapie, validant ainsi le choix stratégique fait en 2010 par l’Institution de procéder à une extension du service de Radiothérapie pour répondre à la demande. De même, la progression du nombre de consultations, qui s’est accru de 50% par rapport à 2010 et a doublé sur les huit dernières années, confirme le besoin en matière de soins oncologiques et donc, la nécessité d’étendre les capacités d’accueil et de traitement du service. Afin de répondre à ce besoin, les 3 médecins radiothérapeutes du service sont présents dans 12 COM sur 6 sites hospitaliers dont tous les hôpitaux de l’Est de la Belgique (CHRV, CHC SainteElisabeth, Eupen, Malmedy, Saint Vith). L’engagement d’un médecin supplémentaire est à présent envisagé, l’extension du service permettant au nouveau collaborateur de disposer d’un espace de consultation et d’un appareillage à même de lui laisser développer son activité. Le chantier d’extension du service de radiothérapie oncologique Le chantier de redéploiement du service a débuté le 7 avril 2014 et a duré près deux ans, comprenant une phase d’extension et une phase de modernisation des appareils de traitement. En résumé, la phase d’extension architecturale représente un doublement de la surface utile du service, passant de 550 à près de 1.000 m². Outre la construction d’un troisième bunker pour héberger une machine de traitement supplémentaire, elle visait aussi à créer : des espaces d’attente plus grands et conviviaux ; de nouveaux cabinets de consultation pour les médecins et l’accompagnement paramédical des patients, car la prise en charge des patients est complexe et implique la participation multidisciplinaire de nombreux professionnels de santé, dont les oncopsychologues, les diététiciennes et les assistantes sociales ; des espaces de travail adaptés par leur ergonomie et leur convivalité aux multiples intervenants qui travaillent en radiothérapie oncologique, car le service ne s’arrête pas, évidemment, à des soins médicaux… (cf. la radiothérapie en 5 métiers) La deuxième phase, visant à la modernisation du « parc » d’équipement, a permis : L’installation d’un 3ème accélérateur linéaire dans le bunker nouvellement construit. Cet appareil, de type Elekta VersaHD, est le premier appareil de ce type installé en Belgique. Outre sa capacité à délivrer des traitements complexes (IMRT) et guidés par l’image (IGRT), son débit de dose est plus de 5 fois supérieur à celui d’un appareil traditionnel (2.200 unités/ minute, contre 400 pour les appareils tout-venant). Cette vitesse d’exécution n’est pas une coquetterie : elle permettra des traitements en respiration bloquée. Quel intérêt ? Dans les cancers du sein gauche, cela écarte la zone mammaire traitée du cœur, dont la protection est ainsi optimale. Et pour des tumeurs pulmonaires particulièrement mobiles, elle permet de les immobiliser et mieux épargner le poumon sain. le remplacement du 2ème accélérateur linéaire, machine la plus ancienne du service, par un appareil de type Elekta Synergy. Son installation a été finalisée au mois de mars 2016, permettant à présent au service de radiothérapie de fonctionner sur un plateau technique complet. Dans cette configuration qui a nécessité un investissement global de l’ordre de 6.500.000 euros HTVA (pour l’infrastructure et l’équipement), le service de Radiothérapie sera à même d’absorber jusqu’à 30% d’accroissement d’activité dans les années à venir. Il pourra aussi développer des techniques de traitement complexes et novatrices, mais plus coûteuses en temps, telles que le contrôle respiratoire et ce, au bénéfice des patients. La radiothérapie en 5 métiers : Le chantier de redéploiement du service ne peut cependant pas être réduit au descriptif des machines y étant installées, ni au montant d’investissements consentis… même si celui-ci démontre toute l’importance accordée au CHRV et au pôle prioritaire qu’est la prise en charge du cancer. Une importante réflexion a porté sur l’implantation des différentes fonctions que le service héberge, et sur la perception qu’en auront les patients. Depuis la séance de mesure préparatoire au traitement ou « simulation », qui se fait sur un scanner dédié, jusqu’aux traitements eux-mêmes délivrés dans des bunkers, tout se passe dans des lieux clos. Ce relatif enfermement ne pourrait qu’augmenter l’angoisse des patients à l’idée du cancer, des rayons, du pronostic de la maladie… De plus, la partie nouvellement construite du service est close sur trois de ses côtés, entre les habitations voisines sur deux côtés et la partie préexistante du service sur un troisième. Tout a été pensé pour donner, au contraire, une impression d’ouverture vers l’extérieur et de liberté : de la clarté et des perspectives sont amenées par le jardin intérieur comme par les nombreuses baies zénithales, tant dans les espaces dévolus aux patients que dans les locaux professionnels. Plusieurs collaborateurs oeuvrent en effet dans ces espaces, et sont indispensables à la prise en charge des patients : les secrétaires et assistantes administratives Elles accueillent les patients et leurs proches, dans un contexte difficile pour eux : angoisse des résultats, diagnostic de cancer, crainte par rapport à un traitement qui ne leur a pas encore été expliqué, angoisse du seul mot « rayons ». Elles les aideront également dans l’organisation pratique de leurs rendez-vous d’examens, de consultations et de traitements. les disciplines paramédicales Diététiciennes et psychologues, elles assurent la prise en charge du patient et de ses proches dans le contexte (physique et psychique) particulier que représentent le cancer et ses soins. Car bien des choses qui nous semblent anodines peuvent se révéler problématiques. Que faire quand prendre un repas devient un défi, quand la nourriture change de goût ou quand avaler fait mal ? Que faire quand on n’a pas envie de sortir de chez soi, de voir des amis, de parler de sa maladie ou au contraire de la taire ? Elles accompagnent patient et proches pendant le traitement, et bien au-delà à travers leur convalescence. les infirmières Elles ne se contentent pas de délivrer les séances de rayons quotidiennes. Elles font la connaissance du patient au moment de la simulation et lui réexpliquent les différentes étapes du traitement qui ont été abordées lors de la consultation médicale… et oubliées entre-temps car il y a tant d’informations et tant de stress à gérer. Pour le patient et ses proches, une bonne compréhension de ce qui va se passer, et comment, est le meilleur moyen de vaincre l’angoisse du cancer et de l’inconnu. Chaque jour, elles accueilleront le patient, délivreront son traitement, et s’assureront de sa tolérance à celui-ci. Au moindre problème décelé, elles le réorienteront en consultation auprès des médecins. les physiciens médicaux et le qualiticien Ces travailleurs de l’ombre, le patient ne les rencontrera peut-être jamais, ou il les croisera au détour d’un couloir sans comprendre leur importance. Ils sont responsables, avec le médecinchef, de la sécurité de tous les traitements délivrés dans le service. Non seulement ces collaborateurs hautement qualifiés, de niveau Bac +7, assurent le calcul de toutes les doses de rayons de tous les traitements, mais ils garantissent aussi le calibrage des machines de traitement et le respect des normes de radioprotection. Pour assurer un fonctionnement optimal en toute sécurité, un qualiticien est présent en permanence dans le service. Si tout se passe bien, et avec toutes les garanties de sécurité, c’est grâce à eux… les médecins Ce sont des radiothérapeutes oncologues, c’est-à-dire des oncologues dont l’arme de traitement est le rayon ionisant. En tant que cancérologues, ils assureront l’annonce du diagnostic, la planification des examens complémentaires et la décision de traitement. Mais surtout ils accompagneront le patient tout au long de son parcours en radiothérapie, et bien au-delà. Pendant un traitement parfois long, pouvant prendre jusqu’à deux mois, ils feront en sorte que la tolérance du patient soit la meilleure possible et que le traitement se déroule sans encombres ni interruptions, meilleure garantie de succès. Ils entendront les difficultés du patient et de ses proches, les guideront et feront tout pour les soulager. Et dans les semaines, mois et années qui suivront, ils feront en sorte que la vie reprenne sa place, tout en garantissant un suivi optimal du patient. La radiothérapie oncologique aujourd’hui... 60 % La radiothérapie oncologique intervient dans le traitement de 60% des patients atteints d’un cancer. 60.000 Sur 60.000 patients diagnostiqués en Belgique chaque année, 35.000 environ recevront de la radiothérapie. 70% Au CHRV, de par son expertise dans les techniques de pointe que sont l’IMRT et la stéréotaxie, près de 70% des patients accueillis en radiothérapie sont traités à visée curative. 50% Au cours des 10 dernières années, le nombre de patients traités a progressé de près de 50%. 20% Plus près de nous, depuis 2010, le nombre de patients traités a augmenté de 20%. 50% 1.000 6 Le nombre de consultations a augmenté de 50%. Le nombre de patients traités chaque année en radiothérapie oncologique au CHRV approche les 1.000 patients. Les médecins spécialistes, radiothérapeutes oncologues, sont présents sur 6 sites hospitaliers à travers l’arrondissement de Verviers. La Radiothérapie au CHRV en 7 dates clés 1973 Ouverture du service de Radiothérapie. 1995 L’appareil de Cobalt est démantelé. Les appareils de traitement sont tous des « accélérateurs linéaires », d’une grande sécurité puisqu’ils ne contiennent plus d’isotope radioactif. 2005 Alors que son service de Radiothérapie traite de l’ordre de 550 à 600 patients par an, le CHRV prend conscience grâce au Docteur Christine Lefèvre, médecin-chef de service de l’époque, de l’importance de soins du cancer innovants. Il investit dans un appareil de TomoTherapy, à ce point précurseur qu’il reste encore aujourd’hui, dix ans après, l’un des tout meilleurs pour les traitements de radiothérapie complexe. 2007 Pour garantir la précision des traitements, le Docteur De Hertogh, médecin-chef de service, met sur pied un programme de formation théorique et pratique des infirmières à l’utilisation des images de scanner en cancérologie (ou « IGRT » : radiothérapie guidée par l’image). Ce programme a depuis lors été dispensé dans de nombreux centres de cancérologie en Europe, dont plusieurs universités. 2011 Le service de radiothérapie oncologique acquiert, pour le ciblage de ses traitements, un scanner dédié de type Toshiba AquilionLB. Son arceau extra-large permet d’imager le patient dans toutes les positions exigées par le traitement, quel que soit l’organe traité. Son système 4D permet d’acquérir les images de tumeurs mobiles (comme le poumon) dans toutes les positions du cycle respiratoire, garantissant une personnalisation des traitements. 2012 La radiothérapie stéréotaxique, traitement délivré à très haute dose sur des tumeurs de petit volume, est appliquée en routine dans le service sous la supervision du Docteur Devillers. Elle offre une alternative non-invasive et curative à des procédures comme la chirurgie et la radiofréquence, avec la même efficacité et sans « toucher » le patient. 2016 Le service de Radiothérapie oncologique du CHRV traite près de 1.000 patients par an, dont 70% à visée de guérison. Plus de 20 collaborateurs veillent quotidiennement à la qualité des traitements, sur un plateau technique moderne et complet qui permet de les personnaliser au mieux. Editeur responsable : Eric Brohon, Directeur Médical. Rue du Parc, 29 - 4800 Verviers. www.chrverviers.be