Journées d’Etudes Internationales Transformer la nature : guérir ou tuer ? Pharmacopées, corps et poisons : pour une éco-anthropologie de la materia medica 15 au 17 septembre 2015 10h-18h Salle Lévi-Strauss rez-de-chaussée Site Cardinal Lemoine - Collège de France 52 rue du Cardinal Lemoine 75005 Paris. Code d’accès 7856A Entrée libre Organisation : Andrea-Luz Gutierrez Choquevilca & Céline Valadeau Ces journées d’études internationales ont pour objectif d’amorcer une réflexion interdisciplinaire sur la notion de pharmakôn, remède ou poison, et sur les ethnothéories des processus physiologiques, techniques et symboliques qui gouvernent la transformation, la guérison ou l’intoxication du corps humain et des organismes vivants. L’enjeu est ici de mettre en regard les perspectives de l’ethnographie, de la linguistique et de l’anthropologie de la nature avec les approches développées en ethnosciences, par des disciplines comme l’ethnopharmacologie, la chimie des plantes et la botanique. Parce qu’il existe plusieurs façon de rendre intelligibles les phénomènes biologiques et la classification du vivant, nous réfléchirons sur les définitions emic et etic de catégories conceptuelles partagées, comme la thérapeutique, la notion de materia medica, et celle de processus physiologique… Qu’est ce qu’un corps ? Quels critères permettent aux sociétés humaines ou animales de distinguer un remède d’un poison ? Comment chaque système articule t-il l’ordre biologique et l’ordre social ? A quelles conditions – contextuelles ou épistémologiques – peut-on parler d’ « efficacité » ? Le recueil de la diversité des théories humaines sur les remèdes contribue à un projet anthropologique plus vaste qui consiste à comparer parmi différentes aires culturelles, les régimes de savoirs et les ethnothéories du pharmakôn : antidote ou poison. Loin de s’épuiser dans l’ethnobotanique ou la biologie du vivant, l’anthropologie des remèdes met en lumière l’articulation des savoirs thérapeutiques et classificatoires avec un continuum de pratiques verbales et non-verbales de transmission culturelle : gloses secrètes associées à la cure, gestes, rituels, performances orales - récits et séquences d’apprentissage. Elle révèle ainsi que la plupart des sociétés humaines intègre le pharmakôn - remède ou substance toxique - dans un processus plus général de transformation de la nature et de construction du savoir thérapeutique et religieux dans un champ commun, réunissant un réseau complexe d’acteurs humains et non-humains. En quoi ces modes de transformation de la nature diffèrent-ils d’une société à l’autre ? De quels outils conceptuels dispose t-on pour confronter pharmacopées humaines et animales ? Comment l’usage des psychotropes vient-il enchâsser le processus de fabrication rituelle des corps dans une forme spécifique de réflexivité ? L’étude du pharmakôn dévoilera dans une perspective sociologique et historique les régimes d’appropriation des pharmacopées au travers de réseaux étendus de transfert de connaissance à l’intérieur et en dehors du monde indigène, dans des contextes locaux ou internationaux… L’ensemble de ces interrogations au cœur d’une réflexion comparative sur la pluralité des formes de transformation de la nature a pour objet de renouer, à travers l’étude anthropologique des remèdes, le dialogue entre sciences de la nature et sciences humaines. Ces journées d’études internationales ont reçu le soutien de l’Ecole Pratique des Hautes Etudes – Sorbonne, de la FMSH (Fondation de la Maison des Sciences de l’Homme), du Laboratoire d’Anthropologie Sociale (LAS- UMR 7130 - Collège de France) et de l’Institut Français d’Etudes Andines (IFEA Umifre 17 - CNRS USR 3337, Bogota) et de l’Association ARPIA (Association pour la Recherche sur les Pharmacopées Indigènes d’Amazonie). Comité scientifique : Florence Brunois (Chercheure CNRS-LAS Collège de France), Andrea-Luz Gutierrez Choquevilca (Maître de conférences à l’Ecole Pratique des Hautes Etudes-Sorbonne, LAS Collège de France / LESC UPO) & Céline Valadeau (Chercheure pensionnaire à l’IFEA-CNRS, Bogota). Contact : [email protected] Illustration : Détail Peinture à l’huile sur toile, Pablo Amaringo « Opération à cœur ouvert » (2006). Mardi 15 septembre 2015 MATIN Nommer le vivant, classer les remèdes : universalisme cognitif ou relativisme ? 10h00-10h30 10h30-11h00 11h00-11h30 Pause café 11h45- 12h15 12h15-13h00 Présentation des journées d’études Andrea-Luz Gutierrez Choquevilca (EPHE, LAS - LESC, Paris) et Céline Valadeau (IFEA - CNRS, Bogota, Colombie). Classifications taxonomiques et ontologie animiste. Marc Lenaerts (Université Libre de Bruxelles - Laboratoire d’Anthropologie des mondes contemporains, Belgique). Sur la distinction entre plantes du sacré et plantes du profane à Madagascar. Gabriel Lefèvre (Ancien Post-Doc Marie Curie, University of Oxford). Les Shipibo-Konibo et les plantes : de bonnes ou de mauvaises rencontres. Jacques Tournon (Chercheur associé CREDAL, Université Paris 3). Table ronde : Florence Brunois (CNRS-LAS, Paris) et Céline Valadeau (IFEA- CNRS, Bogota, Colombie). APRES-MIDI De la perception des espèces : physiologies végétales et humaines 14h30-15h00 15h00- 15h30 Pause Café 16h00- 16h30 16h30-18h00 Aspects ethnopharmacologiques concernant les plantes d´usage thérapeutique dans une communauté amazonienne au Brésil: pour une réflexion interdisciplinaire sur les Pharmacopées. Marlia Coelho Ferreira (Museu Paraense Emilio Goeldi- Ministério de Ciência, Tecnologia e Inovação/MCTI, Belém, Brésil). Plantes à transformation et à disparition : l’invisibilité graduelle chez les seripigari matsigenka (Amazonie péruvienne). Esteban Arias (EHESS-LAS, Paris). De la variabilité des répertoires des plantes à usage : les « pharmacopées hybrides » chez les Yanesha (Haute Amazonie péruvienne) Céline Valadeau (IFEA Umifre 17 – CNRS, Bogota, Colombie). Table Ronde Discutants : Julie Laplante (Anthropologie EESA, University of Ottawa, Québec) et Vincent Roumy (Laboratoire de Pharmacognosie, Université Droit et Santé, Lille II). Mercredi 16 septembre 2015 MATIN Du vivant aux molécules : antidote ou poison ? 10h00-10h30 Importancia de la Etnofarmacología para el descubrimiento de compuestos antiparasitarios. Lastenia Ruiz Mesia (Universidad Nacional de la Amazonía Peruana, Iquitos, Pérou). 10h30-11h Des recherches en laboratoire aux « pharmacopées » : le concept d’efficacité thérapeutique. Vincent Roumy (Université Lille II Droit et Santé, Laboratoire de Pharmacognosie, Lille). Pause Café 11h15- 11h45 11h45-12h45 Devenir-plante : enlacements vivants en Océan Indien et en Amazonie. Julie Laplante (Anthropologie EESA, University of Ottawa, Québec). Table ronde. Discutants : Nancy Ochoa (EREA/LESC-UPO) et AndreaLuz Gutierrez-Choquevilca (EPHE, LAS - LESC, Paris). APRES-MIDI Pharmakôn aux frontières entre humains et non humains 14h30- 15h00 15h00-15h30 Pharmacopée interspécifique dans le parc Kibale : une approche symétrique de l'usage des plantes par les hommes et les chimpanzés en Ouganda. Sabrina Krief (Muséum National d’Histoire Naturelle, Paris) et Florence Brunois (CNRS, LAS - Collège de France, Paris). De la nécessité d’analyser les pharmacopées dans les catégories et l’ontologie de leurs utilisateurs : exemple des remèdes d’un syndrome culturellement construit « l’ictère-anémie » chez les Gouro de Zuenoula (RCI). Claudie Haxaire (Faculté de médecine de Brest, UBO LABERS - CERMES 3, Brest). Pause Café 15h45- 16h15 16h15- 18h00 Pharmakon/toxikon : une dichotomie pertinente pour réfléchir sur les pratiques thérapeutiques des Huni Kuin et des Shipibo. Patrick Deshayes (EREA/LESC, Université Lyon 2). Présentation et projection du Film Ethnographique sur les Pharmacopées de l’île Java (Indonésie) « Jamu Stories » 1 : 04’ (Julie Laplante, University of Ottawa, Québec). Discussion Jeudi 17 septembre 2015 MATIN Chamanisme et métamorphoses des usages 10h00-10h30 10h30-11h00 Pause Café Généalogie du poison : le pharmakôn amérindien au prisme de l’ethnomédecine et de la linguistique. Andrea-Luz Gutierrez-Choquevilca (EPHE, LAS- LESC, Paris). Circulation et régimes d’appropriation des pharmacopées indigènes dans le cadre des évolutions du curanderismo péruvien : le cas de Takiwasi. David Dupuis (EHESS, Collège de France, Paris). 11h15-11h45 11h45-12h45 La constitution de ‘pharmacies vives’ par les Keswha Lamas en Amazonie Péruvienne. Françoise Barbira Freedman (Department of Archaeology and Anthropology University of Cambridge, Angleterre). Table ronde. Discutants : Marc Lenaerts (Université Libre de Bruxelles) et Samir Boumediene (Department of History, University of Cambridge, Angleterre). APRES-MIDI Histoire et circulation des pharmacopées 14h30-15h00 15h00- 15h30 Pause Café 16h00-16h30 16h30- 18h00 Ethnobotanique awajun (groupe Jivaro), Pérou : remèdes toniques et psychotropes. Sébastien Baud (Chercheur associé à l’Institut d’ethnologie, Université de Neuchâtel & IFEA, Lima, Pérou). Qualités occultes et action du diable. Le discours sur les "psychotropes" et les poisons d'Amérique chez les médecins et les religieux espagnols. Samir Boumediene (Department of History, University of Cambridge, Angleterre). Le jardin ethnobotanique Chaikoni Jonibo. Sanctuaire de la biodiversité et des mythes shipibo (Amazonie péruvienne). Nancy Ochoa (EREA/LESC UMR 7186, Association Lupuna, Paris), Elsa Borujerdi (Fédération Française du Paysage) et Jacques Tournon (chercheur associé CREDAL, Université Paris 3). Table Ronde et clôture des journées d’études. Florence Brunois (CNRSLAS Collège de France, Paris), Andrea-Luz Gutierrez Choquevilca (EPHE, LAS - LESC, Paris) et Céline Valadeau (IFEA-CNRS, Bogota, Colombie). LISTE DES PARTICIPANTS Esteban Arias. Doctorant en Ethnologie – Anthropologie sociale EHESS/LAS - Collège de France, Paris. Françoise Barbira Freedman. Anthropologue, Division of Social Anthropology, Department of Archaeology and Anthropology, University of Cambridge. Sébastien Baud. Ethnologue, chercheur associé à l’Institut d’ethnologie, Université de Neuchâtel & IFEA, Lima, Pérou. Samir Boumediene. Historien & anthropologue, chercheur associé au Département d’Histoire de l’Université de Cambridge, Angleterre. Florence Brunois. Ethnologue, chercheure CNRS-LAS Collège de France UMR 7130, Paris. Márlia Regina Coelho-Ferreira. Botaniste, chercheure au Musée Goeldi (Coordenação de Botânica, Museu Paraense Emílio Goeldi/MPEG), Ministério de Ciência, Tecnologia e Inovação/MCTI, Brésil. Patrick Deshayes. Ethnologue, professeur à l’Université de Lyon II, Directeur du Centre d’Etudes et de Recherche en Ethnologie Amérindienne EREA-LESC UMR 7186. David Dupuis. Doctorant en Ethnologie - Anthropologie Sociale EHESS, Paris. Andrea-Luz Gutierrez-Choquevilca. Anthropologue & ethnolinguiste, maître de conférences à l’Ecole Pratique des Hautes Etudes – Sorbonne, membre du Laboratoire d’Anthropologie Sociale – Collège de France UMR 7130 – chercheur associée au LESC UPO, Paris. Claudie Haxaire. Anthropologie médicale. Maître de conférences, Faculté de médecine de Brest – UBO LABERS – associée CERMES3. Sabrina Krief. Primatologue, Maître de Conférences et chercheure au Muséum National d’Histoire Naturelle de Paris. Julie Laplante. Anthropologie de la santé, professeure agrégée, EESA, Faculty of Social Sciences, University of Ottawa, Québec. Gabriel Lefèvre. Anthropologue & ethnobotaniste, ancien Post-doc Marie Curie et chercheur associé à l’Université de Oxford. Marc Lenaerts. Anthropologue & ethnobotaniste, maître de conférences à l’Université Libre de Bruxelles, Faculté des Sciences Sociales et Politiques, LAMC (Laboratoire d’anthropologie du monde contemporain). Nancy Ochoa. Anthropologue, chercheure associée à l’EREA-LESC UMR 7186 ; Présidente de l’Association LUPUNA & Elsa Borujerdi. Chargé de mission développement économique, Fédération Française du Paysage. Vincent Roumy. Pharmacognoste - Phytochimiste, Maître de conférences à l’Université Lille II Droit et Santé, Chercheur au Laboratoire de Pharmacognosie de la Faculté de Pharmacie de Lille, président de l’Association ARPIA (Association de Recherche sur les Pharmacopées Indigènes d’Amazonie). Lastenia Ruiz Mesia. Phytochimiste, Directrice de recherche à l’Université Nationale d’Amazonie Péruvienne (UNAP), Laboratorio de Investigación de Productos Naturales Antiparasitarios de la Amazonía, Iquitos, Pérou. Jacques Tournon. Ethnologue & ethnobotaniste, chercheur associé au CREDAL, Université Paris 3. Céline Valadeau. Anthropologue & ethnobotaniste, chercheure pensionnaire à l’Institut Français d’Etudes Andines Umifre 17 – CNRS USR3337, Bogota, Colombie. RÉSUMÉS DES CONFÉRENCES Plantes à transformation et à disparition : l’invisibilité graduelle chez les Seripigari Matsigenka (Amazonie péruvienne). Esteban Arias (EHESS/LAS - Collège de France, Paris) Nous tâcherons dans cette communication de décrire la série de transformations déclenchées par la consommation régulière de plantes à usage psychotrope chez les Matsigenka. Pour ce faire nous établirons la phénoménologie de la transformation telle qu’elle est comprise et pratiquée par les chamanes de ce peuple. Nous verrons que ce qui reste constant entre les récits spécifiques d’intoxication et les parcours vitaux des chamanes s’articule typiquement en fonction de deux continuums : celui de l’opacité et de l’extrême luminosité (voire invisibilité), et celui de la pesanteur et de la légèreté. Les plantes à usage psychotrope ont pour effet, sur le long terme, d’atteindre l’invisibilité et la légèreté et ce grâce à la transformation graduelle du chamane en commensal des esprits purs saankarite. L’ambivalence du terme désignant le chamane (seripigari) nous en fournit déjà un premier indice car il veut dire tout à la fois « celui qui s’intoxique avec du tabac » et « celui qui se transforme/disparait ». Nous parviendrons donc à comprendre ce que veut dire « se transformer » et « disparaître » chez les chamanes matsigenka. Trois plantes à maître feront l’objet de nos analyses : le tabac (le seri, dont le maître est le jaguar), l’ayahuasca (le kamarampi, dont le maître est l’aigle harpie) et le kavuiniri (dont le maître est l’oiseau Furmicarius rufifrons). La constitution de ‘pharmacies vives’ par les Keswha Lamas en Amazonie Péruvienne. Françoise Barbira Freedman (Division of Social Anthropology, Department of Archaeology and Anthropology, University of Cambridge) A partir d’études longitudinales de jardins cultivés ou d’espaces privilégiés de forêt secondaire constituant des ‘pharmacies vives’ (live pharmacies) pour les Keshwa Lamas en Amazonie Péruvienne, mon enjeu est d’examiner l’incorporation des plantes extérieures d’après les principes autochtones qui soutiennent les pratiques shamaniques. Des exemples concrets de plantes introduites pendant la période coloniale et plus récemment permettent d’analyser les catégories conceptuelles locales de plantes innocentes, plantes de pouvoir, plantes enseignantes et plantes dont la classification reste potentielle. Les critères qui servent à définir le placement de plantes extérieures dans la materia medica sont inséparablement d’ordre biologique et social, avec des relations de genre, de distance et des généalogies botaniques. L’articulation dynamique du consensus sur les propriétés thérapeutiques, toxiques ou ambivalentes des plantes est peu étudiée en ethnopharmacologie. Un regard sur l’intégration de plantes extérieures permet une réflexion comparatiste des ethnothéories de la constitution des pharmacopées en Amazonie, plus particulièrement par rapport au double processus de la transmission des savoirs par échanges intra et extra ethniques et de l’expérimentation individuelle empirique et onirique qui réinvente ces savoirs. Ethnobotanique awajun (groupe jivaro), Pérou : remèdes toniques et psychotropes. Sébastien Baud (Institut d’ethnologie, Université de Neuchâtel & IFEA, Lima, Pérou). La topographie accidentée de la région – entre 230 et 750 m d’altitude – où vivent les Awajun (famille linguistique jivaro, Haut Marañón, Pérou) est à l’origine d’une diversité des sols et des forêts, connue et répertoriée par ses habitants. D’une manière générale, le savoir botanique awajún est riche et précis. Dans cette communication, j’aborderai les remèdes connus, sélectionnés et utilisés dans la pharmacopée locale. Plantes sauvages et cultigènes ; plantes médicinales, rituelles et psychotropes ; plantes nouvellement adoptées et « plantes personnes » nous permettront de saisir une pensée du végétal. Savoir familial et savoirs spécialisés, manière de dire et manière de faire nous aideront pareillement à comprendre une relation, dont l’acmé est un « devenir plante ». Qualités occultes et action du diable. Le discours sur les "psychotropes" et les poisons d'Amérique chez les médecins et les religieux espagnols. Samir Boumediene (Département d’Histoire de l’Université de Cambridge). Entre le XVIe et le XVIIIe siècle, les Espagnols rencontrent en Amérique un nombre considérable de plantes inconnues des Anciens. Parmi ces plantes, certaines réactivent les doutes et les désaccords légués par les corpus médicaux et botaniques de l'Antiquité. Il s'agit, en particulier, des plantes qui troublent l'imagination - coca, peyotl, ololiuhqui ou tabac - et des poisons qu'utilisent les Indiens contre les conquérants ou les maîtres espagnols. Aux yeux des médecins et des religieux, ces différentes plantes que manipulent les guérisseurs et les sorcières présentent un point commun : leur mode d'action met en jeu des qualités occultes, des propriétés invisibles, qui ne peuvent être entièrement déterminées à l'aide des causes naturelles. Intervient ainsi la tentation d'attribuer cette action à l'oeuvre du démon. Et cette tentation est d'autant plus grande que l'usage de ces plantes en Amérique est liée à des croyances qui pour les Espagnols signent l'influence du malin. Dans le même temps, les médecins et les religieux espagnols sont peu enclins à considérer que le diable intervienne effectivement lors d'une hallucination, d'une possession ou d'un empoisonnement. Comment donc expliquer l'action de ces substances ? Le doute que soulèvent ces plantes diaboliques et leurs effets invisibles, en vient ainsi à questionner la nature même du pharmakôn; de ce qu'est une propriété thérapeutique, de ce que signifie l'action d'une substance sur un organisme, et en définitive des enjeux que revêt la connaissance des plantes. Pharmacopée interspécifique dans le parc Kibale: une approche symétrique de l'usage des plantes par les hommes et les chimpanzés en Ouganda. Florence Brunois (CNRS-LAS Collège de France) et Sabrina Krief (Muséum d’Histoire Naturelle de Paris). Abstract - Aspects ethnopharmacologiques des plantes d´usage thérapeutique dans une communauté amazonienne au Brésil: pour une réflexion interdisciplinaire sur les Pharmacopées Márlia Regina Coelho-Ferreira (Museu Paraense Emílio Goeldi/MPEG, Ministério de Ciência, Tecnologia e Inovação/MCTI, Brésil) Ce travail a pour origine une étude ethnobotanique/ethnopharmacologique menée dans une communauté cabocla située sur la côte atlantique en Amazonie brésilienne, dont le but était de valoriser les plantes d´usage thérapeutique. Mères de famille et spécialistes traditionnels ont été sélectionnés d’après le rôle qu’ils accordent aux soins de santé primaire en contexte domestique, et d’après la reconnaissance qui leur est octroyée en tant que détenteurs de savoirs associés tant aux plantes médicinales qu’à d´autres ressources de la médecine traditionnelle pratiquée localement. On s´intéressera, d’une part, à la manière dont ces plantes sont perçues et sélectionnées, d’autre part, à la perception des maladies/symptômes. Il s’agira ici de mettre en évidence les aspects culturels associés à l’efficacité thérapeutique de ces plantes (228 espèces) et/ou remèdes (508 recettes) qui composent la phytopharmacopée locale. Pharmakon/toxikon : une dichotomie pertinente pour réfléchir sur les pratiques thérapeutiques des Huni Kuin et des Shipibo. Patrick Deshayes (EREA/LESC UMR 7186-Université de Lyon II) Nous connaissons le sens du pharmakon et nous l’utilisons souvent voire le détournons à notre usage. Celui du toxicon est moins fréquent. Il me semble pourtant qu’il pourrait en complément du pharmakon rendre compte d’un aspect de la pratique thérapeutique chamanique (en particulier celle des Huni Kuin et des Shipibo) qui prend en compte les attaques par fléchettes. A côté d’une description ethnographique, nous essaierons de réfléchir à un élargissement de la question de la guérison et de la métamorphose en jeu et de son extension au-delà de ces deux sociétés Pano. Circulation et régimes d’appropriation des pharmacopées indigènes dans le cadre des évolutions du curanderismo péruvien : le cas de Takiwasi David Dupuis (EHESS-LAS, Paris) Fondée en 1992 par un médecin français, Takiwasi est à la fois une clinique de traitement des addictions et l’un des principaux centres du “tourisme chamanique” en Amazonie Péruvienne. Depuis sa création, l’institution a développé un dispositif à visée thérapeutique caractérisé par la réappropriation d’éléments de la pharmacopée indigène (quechua Lamista) tels que les plantes émétiques ou l’ayahuasca. Nous montrerons ici comment le transfert de cette pharmacopée s’est accompagné d’une profonde transformation des représentations taxinomiques qui accompagnent son usage et esquisserons la théorie étiologico-thérapeutique originale dans laquelle s’inscrit désormais l’usage de ces végétaux. L’examen de ce cas ethnographique sera ainsi l’occasion d’interroger de manière plus générale les ressorts de la circulation et des régimes d’appropriation des pharmacopées occasionnée par l’internationalisation du vegetalismo péruvien. Généalogie du poison : le pharmakôn amérindien au prisme de l’ethnomédecine et de la linguistique. Andrea-Luz Gutierrez-Choquevilca (EPHE – Sorbonne, Laboratoire d’Anthropologie Sociale – Collège de France – LESC UPO) Un taxon unique désigne en quechua l’art de la guérison et celui qui consiste à administrer un poison, la racine verbale /ampi/. Tribut de cette ambivalence, l’effet toxique ou l’action létale de certaines substances issues de la pharmacopée indigène des peuples Runa des Basses Terres péruviennes se voient attribuer une valeur positive, volontairement recherchée dans les activités afférentes à la chasse et auto-infligée dans un contexte initiatique. En nous interrogeant sur la nature, la classification et les usages contextuels des substances toxiques, il est possible de mettre en évidence un gradient de pratiques ordonnées d’après des modes relationnels distincts entre humains et nonhumains. De la mort symbolique à la mise à mort intentionnelle et effective, l’efficacité accordée au pharmakôn amérindien interroge les modalités d’action sur le vivant, mêlant inextricablement efficacité biologique et agentivité culturelle. Si la mort biologique des humains est le plus souvent imputée à la sorcellerie, certaines substances sélectionnées pour leurs qualités chimiques, morphologiques, leur insertion dans un réseau de relations écologiques, discursives et/ou leur action sur l’organisme vivant viennent prendre place parmi les espèces « à maîtres », susceptibles de faire l’objet d’une maîtrise amuyana, souvent fragile et équivoque, liant des acteurs humains et non humains. Guérison et agression constituent ainsi la face et l’envers d’une même relation, fondamentalement asymétrique et réversible, associée à l’usage du pharmakôn. Nous examinerons à partir de matériaux linguistiques et ethnobotaniques la valeur de cette relation en interrogeant la possibilité et les limites d’une perspective épistémologique située au delà du « grand partage » entre sciences de la nature et sciences humaines. De la nécessité d’analyser les pharmacopées dans les catégories et l’ontologie de leurs utilisateurs : exemple des remèdes d ‘un syndrome culturellement construit « l’ictère-anémie » chez les Gouro de Zuenoula (RCI). Claudie Haxaire (Faculté de médecine de Brest – UBO LABERS – associée CERMES3) Pharmacienne et botaniste, je me suis retrouvée pour mon terrain de thèse en Centrafrique dans une équipe pluridisciplinaire comportant des ethnolinguistes, au moment où le débat autour des folk taxonomies animait la communauté scientifique ; mes compagnons défendant la pertinence de catégorisations périphériques à visées utilitaires. Forte de leurs discussions, j’entamai une enquête sur la pharmacopée familiale Gbaya dans une autre perspective que celle attendue par mes disciplines d’origines, en cherchant à dégager les catégorisations construites par mes interlocuteurs, des objets naturels certes, mais aussi des « maladies » et donc des perturbations du corps, sans encore aborder la notion de personne. C’est ce que je fis par la suite, chez les Gouro de Zuénoula, où mes premiers entretiens auprès d’interlocuteurs désignés comme « sages » m’introduisirent d’emblée dans une « vision du monde » où visible et invisible, empirique et étiologique, devaient être pris en compte indissociablement. Les soins, les acteurs du soin, les techniques et parmi celles-ci les usages de la pharmacopée relevaient de catégories certes précises mais fondées sur des principes « émiques » et selon une logique que je vais tenter de présenter. Plus qu’une « ethnopharmacologie » cette recherche relève d’une anthropologie du remède, remède étant défini comme ce qui vient combler l’écart entre un état perçu comme pathologique et celui considéré comme normal dans les termes de l’interlocuteur et étant donné l’expérience qu’il en a, replacée dans son contexte. Dans l’exemple gouro la matérialité du remède peut protéger d’altérations des entités invisibles de la personne au même titre que le font des puissances invisibles, tandis que ces dernières doivent préserver l’activité, l’efficacité des remèdes empiriques. Recueillir toutes les recettes qui nous étaient confiées, mon assistant de recherche gouro et moi même, autant de fois qu’elles nous étaient données, et cela in extenso avec, adjoints au processus opératoire, les commentaires qui renvoyaient à « l’allant de soi » entre gouro, donnait accès à la logique implicite de la pharmacopée. Bien entendu ceci prenait sens à mesure que s’approfondissait ma compréhension des relations humains – non humains, vivants-ancêtres, de ce qui les relie et les sépare, des homologies par lesquelles on les pense. L’ontologie « analogique » selon Descola des Gouro de Zuénoula, laisse en effet se déployer tout un réseau de correspondances entre corps, personne, nature et société. En exemple de la méthode, je déploierai les recettes curatives et préventives d’une maladie culturellement construite, « l’ictère-anémie », conséquence d’une rupture d’interdits dont les ancêtres sont les garants, au regard de l’ethno-sémiologie gouro et en tentant de situer les effets de chaque plante entrant dans la composition (d’un point de vue émique) par l’analyse de ses autres usages (selon le corpus recueilli d’un millier de recettes). Du point de vue « étique », biologique, les propriétés pharmacologiques d’une partie de ces plantes sont connues, (certaines étant poison). Nous tenterons de mettre en regard les usages gouro et les propriétés biologiques de ces plantes, et montrerons qu’ils ne peuvent se répondre que si l’on tient compte du mode d’action attendu dans la perspective émique (selon l’ethno-sémiologie). Devenir-plante : enlacements vivants en Océan Indien et en Amazonie. Julie Laplante (Anthropologie EESA, Faculty of Social Sciences, University of Ottawa, Québec) Percevoir un médicament, un remède ou une drogue comme objet pouvant nuire ou guérir selon une logique causale est possible selon un positionnement de l’extérieur. Si l’on se place au milieu des choses, ou entre l’humain et le non-humain dans l’agencement-vie qui émerge entre les deux, il n’y a plus ni objet, ni sujet, mais un devenir. Voilà le lieu qu’occupent maints chamanes et guérisseuses pour mieux connaitre comment guérir avec les plantes, certaines de ces plantes étant communément nommées « drogue » ou « biomédicament » lorsque reconnues selon leurs propriétés biopharmaceutiques ou biomoléculaires. Dans cet exposé, je vise montrer en quoi l’approche horizontale de guérisseurs en Océan Indien et en Amazonie se comprend mieux par une approche phénoménologique rhizomique que par une approche généalogique de l’arborescence sur laquelle repose en grande partie l’approche scientifique actuelle. Trois études de cas démontrent respectivement en quoi devenirplante se fait par le mouvement/repos, le rêve et l’affect. L’approche phénoménologique rhizomique en anthropologie ici proposée, et qui emprunte en partie à Deleuze & Guattari (1980), permet de mieux comprendre comment il est possible d’entretenir des relations fructueuses avec les plantes. Une telle approche amène à privilégier un savoir obtenu par proximité plutôt qu’à poser un regard de la distance typique du laboratoire qui extrapole la plante de ses contextes, voire d’elle-même, et s’intéresse le plus souvent à l’une des molécules de la plante plutôt qu’à ses synergies activées dans-la-vie. Sur la distinction entre plantes du sacré et plantes du profane à Madagascar. Gabriel Lefèvre (Ancien Post-doc Marie Curie, associé à l’Université de Oxford). Dans le sud-ouest de Madagascar, les représentations sur les plantes médicinales sont dominées par une distinction, inlassablement répétée par les informateurs, entre deux classes de plantes, correspondant à deux types de soins. Ces deux classes de plantes sont représentées généralement par des mots de la langue raven-kazo et volohazo qui se traduisent littéralement par « feuilles d’arbres » et par « espèces de bois ». Les feuilles correspondent aux maux du quotidien, dont les causes sont annoncées comme plus ou moins matérielles, tandis que les bois correspondent aux maladies d’origine sociale, qui sont aussi les plus graves. Mais cette distinction n’est pas seulement une distinction indigène. Il se trouve qu’elle est aussi transposée à la fois dans la vision scientifique, celle du biologiste et du pharmacien, et dans la vision religieuse, celle du prédicateur chrétien. La première classe végétale, celle des « feuilles d’arbres », correspond à ce qu’on peut appeler « les plantes du pharmacologique », celles dont le biologiste ou le pharmacien dit : « c’est ça qui est efficace ». La deuxième classe, celle qui est appelée « espèces de bois », correspond à ce qu’on peut appeler les « plantes du symbolique », celles dont le biologiste ou le pharmacien dit : « ce sont des croyances ». Pour le prédicateur, la répartition reste en gros la même : la médecine par les feuilles représente ce qui est permis, ce qui ne s’oppose pas à la vrai foi parce que c’est l’utilisation de l’« œuvre de Dieu ». En face, la médecine par les bois, relève de la superstition, c'est-à-dire de la fausse croyance, c’est ce qui est interdit, parce que c’est l’« œuvre du Malin ». Des cas d’utilisations de plantes montrent cependant que cette distinction doit être nuancée. Ces contre-exemples dévoilent d’une part le décalage qui intervient parfois entre discours et faits observés ; d’autre part ils laissent entrevoir des hypothèses sur les mécanismes qui sous-tendent ces décalages. Classifications taxonomiques et ontologie animiste. Marc Lenaerts (Université Libre de Bruxelles, LAMC). Les Ashéninka de l’Ucayali procèdent à des classifications taxonomiques étonnantes. Tout d’abord, dans les classifications animales, ils n’utilisent à peu près aucun terme générique, et il en va de même pour les grands arbres de la forêt. Par contre, la terminologie concernant les autres plantes sylvestres est soumise à une extraordinaire polynymie et polysémie. Ensuite, lorsqu’on analyse associations libres et « covert categories », on est souvent très loin des regroupements par caractères morphologiques généraux que les tenants des ethnosciences prétendent retrouver partout – ce qui pose évidemment la question des effets induits par leurs méthodes de recherche. Ces particularités ont évidemment à voir avec le perspectivisme et l’ontologie animiste, mais il reste à savoir à quelle profondeur cela se joue. Je crois pour ma part que c’est à un niveau très élémentaire, et que c’est le produit d’un jeu d’inhibition sélective des réactions des (très) jeunes enfants. Cela pose aussi la question de l’apparition du perspectivisme et de l’animisme. Différents exemples montrent qu’ils peuvent naître dans des contextes qui ne sont absolument pas amérindiens. Le jardin ethnobotanique Chaikoni Jonibo. Sanctuaire de la biodiversité et des mythes shipibo (Amazonie péruvienne). Nancy Ochoa (EREA-LESC UMR 7186 ; Association LUPUNA) et Elsa Borujerdi (Chargé de mission développement économique, Fédération Française du Paysage). Les populations amazoniennes possèdent une connaissance très riche de l’environnement, en particulier du monde végétal qui leur a permis de cultiver, de le transformer et de l’utiliser pour leur consommation et la thérapie des maladies, mais la rencontre avec le monde occidental les a conduit à adopter de nouvelles formes d’appréhension de la nature. Depuis plusieurs décennies les populations amazoniennes ont créé des espaces de conservation et de transmission des savoir-faire traditionnels, tels que des jardins, des parcs, etc. Notre intervention consistera donc à présenter le jardin ethnobotanique Chaikoni Jonibo, son histoire, son évolution et son rôle actuel pour la conservation des plantes, la transmission des savoirs-faires traditionnels et de la culture shipibo dans le cadre d’un programme de sensibilisation. Le jardin ethnobotanique Chaikoni Jonibo constitue l’une des dernières forêts protégées de la communauté shipibo de San Francisco de Yarinacocha, en Amazonie péruvienne. Dans cette zone particulièrement touchée par les phénomènes de déforestation et d’acculturation, accentués par la proximité de la ville de Pucallpa, la deuxième plus grande ville d’Amazonie péruvienne (200 000 habitants), les membres de cette communauté, et plus particulièrement l’association ACOMACISHICON, se sont investis depuis plus de 15 ans pour la préservation de cette forêt. Ils sont ainsi parvenus à conserver les arbres et plantes, mais aussi à replanter plusieurs centaines d’espèces médicinales utiles, transformant cet espace naturel en véritable jardin ethnobotanique. Nous aimerions présenter notre expérience, mais aussi nous interroger sur la place des médecines traditionnelles face à la médecine occidentale. Comment assurer la transmission de ces savoir-faires traditionnels ? Quelle durabilité et quelles possibilités de développement pour un projet de conservation et de sensibilisation face aux enjeux économiques ? Des recherches en laboratoire aux « pharmacopées » : le concept d’efficacité thérapeutique. Vincent Roumy (Université Lille II Droit et Santé, Laboratoire de Pharmacognosie, Faculté de Pharmacie). Si le concept d’efficacité thérapeutique a connu une grande évolution au courant du siècle dernier du point de vue de sa définition en médecine clinique (notamment concernant l’effet placebo), il n’en va pas de même dans le contexte des médecines traditionnelles. En effet, les outils scientifiques dont on dispose en laboratoire à l’heure actuelle pour évaluer l’activité biologique d’un remède traditionnel sont encore souvent inadéquats et ne rendent compte que très partiellement de l’efficacité observée dans un contexte d’immersion culturelle. Dans cet exposé, nous interrogerons les définitions possibles du concept d’efficacité thérapeutique dans le cadre des médecines traditionnelles. Nous soulignerons les limites ou faiblesses des techniques scientifiques permettant l’évaluation de l’activité thérapeutique de ces remèdes en phytochimie, pour enfin discuter de l'amélioration possible des méthodes d’analyse disponibles en laboratoire. Importancia de la Etnofarmacología para el descubrimiento de compuestos antiparasitarios. Lastenia Ruiz1 (Universidad Nacional de la Amazonía Peruana, Laboratorio de Investigación de Productos Naturales Antiparasitarios de la Amazonía, Iquitos – Perú) avec Wilfredo Ruiz1, Leonor Arévalo1, Jean Pierre López1, Ericka Ricopa1, Matias Reina2, 3Azucena Gonzales)1. Las plantas medicinales constituyen para el poblador amazónico una alternativa para el tratamiento de sus enfermedades, principalmente en aquellas comunidades donde no existen centros de salud para ser atendidos de sus enfermedades. A partir de la información etnofarmacológica, mediante encuestas en las comunidades de Llanchama, Nina Rumi, Santa María del Alto Amazonas y la comunidad de Tarapoto, se identificó que las especies vegetales: Aspidosperma cruentum, A. desmanthum, y Remijia peruviana fueron reportadas como especies vegetales de mayor frecuencia de uso para el tratamiento de malaria, leishmaniasis y mal de chagas El estudio fitoquímico bioguiado de estas especies nos condujo al aislamiento e identificación de los compuestos: Aspidospermina, 12-hidroxi-N-Acetilaspidospermidina, Aspidocarpina, Aspidolimina, Obscurinervina, Obscurinervidina, Quinina , Cinchonina y Quinidina, que presentaron actividad antiparasitaria. !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!! 1 !1Universidad Nacional de la Amazonía Peruana, Laboratorio de Investigación de Productos Naturales Antiparasitarios de la Amazonía, Iquitos - Perú, 2 Instituto de Productos Naturales y Agrobiología de Canarias ( CSIC), La laguna, Tenerife- España, 3Instituto de Ciencias Agrarias (CSIC), Madrid- España. ! Les Shipibo-Konibo et les plantes : de bonnes ou de mauvaises rencontres. Jacques Tournon (chercheur associé CREDAL, Université Paris 3) Les Shipibo-Konibo, groupe indigène de langue Pano comptant près de 35 000 individus, vivent sur les berges du fleuve Ucayali, aux eaux blanches, dans des milieux inondables et non inondables (R. Bergman 1974, J. Tournon 1988, 2002). L’exposé portera d’abord sur les systèmes Shipibo-Konibo de classification des végétaux basés sur leur morphologie, puis sur les « rao » ou plantes considérées actives, thérapeutiques ou étiologiques. Les plantes auraient deux modes d’existence, matériel et spirituel, les spécialistes onanya, meraya (« les chaman ») invoquent leurs esprits pour les manipuler et les mettre à leur service, les spécialistes raomis ou végétalistes, utilisent les plantes rao sous leur mode matériel. Les activités biologiques de plus de 300 rao déterminés au niveau du genre botanique, n’ont pas été prouvées. Mais d’une part des évidences taxonomiques sont présentées sur leur activité biologique, d’autre part des essais in vitro des activités dermatologiques et anti-inflammatoires menés par G. Serrano, pharmacologue de l’UNMSM (Universidad Nacional Mayor de San Marcos), ont donné des résultats positifs. Nous en concluons que les critères et activités phyto-chimiques sont à la base de la sélection des espèces rao par les Shipibo-Konibo. Pour avoir une mesure de la biodiversité des arbres présents dans les communautés, une étude botanique et ethnobotanique a été conduite dans deux communautés du Haut Ucayali, les arbres présents dans quatre parcelles dans des forêts primaires ou secondaires, inondables ou non, ont été inventoriés. Les résultats montrent une grande diversité des arbres, aux niveaux des familles, genres et espèces botaniques. Près de 90% des individus sont reconnus par les Shipibo-Konibo, ainsi que leurs usages alimentaires, médicinaux, pour l’artisanat. Ceci démontre l’importance de préserver les différents milieux forestiers présents dans les communautés indigènes. De la variabilité des répertoires des plantes à usage : les « pharmacopées hybrides » chez les Yanesha (Haute Amazonie péruvienne). Céline Valadeau (IFEA Umifre 17 – CNRS USR 3337, Bogota, Colombie) La longue période de migration du peuple Yanesha a été marquée par différents événements fondateurs qui ont contribué à la répartition des villages en deux zones d’occupation sur les flans du piémont amazonien des Andes centrales du Pérou : les hautes terres montagneuses et les basses terres amazoniennes. Dans cette configuration, les territoires yanesha sont confinés au sein de différents écosystèmes renfermant des flores partiellement dissemblables. Un long travail ethnobotanique a permis de mettre en lumière les divergences qui existent entre les répertoires des plantes à usage connus en altitude et ceux appréhendés dans les plaines. A partir de ce matériel ethnobotanique enrichi d’éléments ethnographiques et historiques choisis, cet exposé centrera son attention sur quatre catégories végétales largement répandues et dont les usages sont souvent maintenus discrets. Ces plantes sont les piments des pieds de palissades, les souchets des jardins, les fougères des sous-bois et les caladions des rives et des clairières. Les savoirs qui leur sont associés permettent de rendre intelligible une forme de circulation interethnique des connaissances enveloppant ces plantes et dans laquelle la forme végétale peut être amenée à changer. Alors, comment un jeune caladion recueilli au bord d’une rivière peut-il devenir un souchet domestique ? L’argumentaire centrera son attention sur les réseaux de correspondances assemblant différents critères tels les indications d’usage, les particularités écologiques, les morphologies végétales, ou encore les savoirs mythologiques. A l’aide d’une réflexion comparative sur ces « plantes à usage discrets », les discussions s’ouvriront vers l’existence des « usages sans support » et des relations végétales. FILM ETHNOGRAPHIQUE Ethnographic film | 2015 | 104 minute| Indonesia | Javanese and English Directed and presented by Julie Laplante (University of Ottawa, Canada). Jamu Stories shows places where jamu medicine emerges in the everyday life of Yogyakarta and its surroundings, in the Island of Java, Indonesia. Jamu practices are followed during the month of Ramadan in 2013 as they unfold in homes, streets, spas, clinics, markets, gardens and cafés through diverse layouts of Javanese, Islamic, Hindu, Buddhist and scientific heritage. The film is oriented through a rhizomatic phenomenological approach in anthropology that attunes attention to the space improvised between plants and people with hopes in healing or in maintaining and pursuing healthy lives. Numerous women prepare between 4 to 9 elixirs on a daily basis through rolling, pounding and pressing rhizomes, barks, fruits and spices in repetitive rythmic sounds and movements. A yellow-orange stain left on the hands from pressing curcumas and tamarind attest to the freshness and authenticity of their jamu, also insuring their clients that it contains no chemicals. Others mix training in martial arts or studies in agrotourism to improvise a new jamu-becoming or line of flight. The objective of the film is to show how plant-human proximities through cohabitation and deepened knowledge in aims to heal, passes through a molecular-becoming, or enmeshment between human and plant life forms, that is often fortuitious. The film shows 9 'jamu stories', beginning with a traditional jamu café run according to a fifth generation jamu tradition that emerged in link to the Sultan of Yogya. Stories 2 through 5 traces how jamu is made in homes, how it is carried to the streets on the back (jamu gendong), by bicycle or sold in a semi-permanent stall. The film afterwards moves to Malioboro market where many of the rhizomes, plants, fruits, barks and spices used to prepare the beverages are sold, making up the sixth story. The seventh story introduces a well known dukun in Yogyakarta and the ways he prepares jamu for clients visiting him in his clinic. The eighth story shows how jamu appears in a women’s spa and the ninth story moves to the outskirts of Yogya, near Merapi volcano to show how these practices take on new life forms in agrotourism.