INTERVENTION DE Pierre LARNAUDIE, Médecin anesthésiste des hôpitaux de l’Assistance Publique L’Assemblée Générale de l’Association crématiste de Vichy, ses environs et Moulins s’est terminée le 7 avril 2013, par une intervention du Docteur Pierre Larnaudie, qui a généré un échange fructueux avec les personnes présentes. Voici le contenu de cette intervention, qui apporte un éclairage concret aux nombreuses questions que suscite la Loi Léonetti, du 22 avril 2005 : « PRESERVER LA DIGNITE DE LA PERSONNE HUMAINE EN FIN DE VIE : Lorsque le temps d’une médecine curative est dépassé, il reste encore le temps du soulagement, du confort du corps et de l’esprit. Les soins palliatifs ont pris naissance dans les pays anglo-saxons ( Grande Bretagne et Etats Unis), il y a une cinquantaine d’années, mais plus tardivement en France. Partis de la prise en charge, des patients cancéreux dont la phase terminale était la plus longue et la plus pénible, les soins palliatifs se sont progressivement élargis à toutes les fins de vie : - celle des personnes âgées, celles des insuffisants chroniques, cardiaques, respiratoires ou rénaux, celles des maladies neurologiques dégénératives, et même celles des enfants. 1- TROIS DATES A RETENIR : La circulaire du 26 Aoùt 1986 qui autorise la prise en charge de la douleur terminale, du patient qui refuse un traitement La loi du 31 Juillet 1991 qui inscrit le droit d’accès aux soins palliatifs, La loi du 22 Avril 2005 dite loi Léoneti. Cette loi est importante car elle fixe : 1 – POUR LES PROFESSIONNELS DE SANTE : - le droit d’interrompre ou de ne pas entreprendre des traitements inutiles ou disproportionnés, - le devoir de sauvegarder , dans tous les cas, la dignité du patient et d’assurer la qualité de sa fin de vie, - le devoir de respecter la volonté du patient qui refuse un traitement, 1 - Le devoir d’appliquer une procédure collégiale avant l’arrêt d’un traitement, quand le patient est incapable d’exprimer sa volonté. Cette décision motivée sera inscrite dans le dossier comme l’exige l’article 9, - Elle autorise – article 2- la possibilité de mettre en œuvre des traitements visant à soulager la souffrance, même si les doses utilisées risquent d’abréger la vie. 2 – POUR LES PATIENTS : o Elle précise les conditions de la rédaction des directives anticipées qui expriment les souhaits relatifs à sa fin de vie. Ces directives sont un document écrit, daté et signé par le patient. Sa validité est de 3 ans et il peut être modifié à tout moment. Il s’agit d’un véritable testament. o Désignation d’une person du 6 Juin 1999ne de confiance dont le rôle sera d’exprimer les volontés du patient, s’il n’est plus en mesure de le faire lui-même. 2 – QUAND COMMENCENT LES SOINS PALLIATIFS ? : Lorsqu’il n’est plus possible de traiter. La notion de prise en charge palliative a évolué et intéresse toutes les personnes qui présentent une pathologie dont l’évolution est mortelle. Cette prise en charge distingue : o D’une part, les soins de supports, prodigués dès l’annonce du diagnostic et tout au long de l’évolution de la maladie. Ce terme de soins de support correspond à l’ensemble des possibilités médicales, psychologiques, mais aussi familiales, sociales et professionnelles, o D’autre part , les soins palliatifs proprement dits. Le passage de la phase curative à la phase palliative doit se faire sans rupture. L’indication de la poursuite ou de l’arrêt des traitements étiologiques repose sur une bonne appréciation clinique et du pronostic. 3 – QUI DECIDE ? La loi du 6 Juin 1999 reconnaît à toute personne malade dont l’état le requiert, le droit d’accéder aux soins palliatifs, mais la loi Léonetti impose au médecin le devoir de respecter la volonté du patient qui refuse un traitement. 2 4 – DIMENSIONS DES SOINS PALLIATIFS – Elles sont d’ordre clinique, psychologique et éthique. o La principale dimension clinique, c’est la prise en charge de la douleur par un traitement antalgique fort, comme la morphine, et l’association de plusieurs antalgiques qui agissent en synergie. - traitement de la douleur par des techniques d’analgies proches de l’anesthésie, péridurale, bloc nerveux, infiltration. Préserver la qualité de la vie, c’est aussi prendre en compte d’autres signes d’inconfort : - par la prévention et le traitement des nausées et des vomissements, par la lutte contre l’encombrement bronchique en utilisant des aérosols, par le traitement des détresses respiratoires et cardiaques, génératrices d’anxiété, par l’hydratation des muqueuses pour limiter la sécheresse buccale. o La dimension psychologique doit prendre en charge les peurs et les craintes du patient, mais également des membres de la famille. o La dimension éthique place le patient au centre des soins, avec : - l’écoute, la communication, le réconfort, le respect de l’autre. 5 – QUI INTERVIENT ? Des professionnels formés aux soins palliatifs , avec une prise en charge pluridisciplinaire, associant des médecins, des infirmières et psychologues, des kinésithérapeutes et les aides soignantes qui sont en fait les plus proches des patients. Les soignants doivent considérer celui qui va mourir comme un être vivant jusqu’à son dernier souffle et continuer des soins même intimes comme maintenir l’hydratation de la bouche. La prise en charge des soins palliatifs peut s’effectuer à différents niveaux : Par des équipes mobiles en soins palliatifs qui se rendent dans les différents service, Dans une unité de lits palliatifs, véritable service autonome où sont hospitalisés les plus difficiles, Même à domicile, dans le cadre des réseaux départementaux faisant appel à l’équipe médicale mobile du centre hospitalier. 3 6 – POSITION DU CONSEIL DE L’ORDRE DES MEDECINS – Dans l’article 37, le Conseil de l’Ordre rappelle que le médecin doit : S’efforcer de soulager les souffrances du patient, S’abstenir de toute obstination déraisonnable, L’assister moralement, Cet article reprend la pensée d’Hippocrate : D’abord ne pas nuire, Soulager toujours, Guérir autant que possible, Et ne jamais abandonner. Le 8 Février dernier, le Conseil de l’Ordre a communiqué sa position de synthèse intitulée « FIN DE VIE, ASSISTANCE A MOURIR » Il envisage par devoir d’humanité, dans des situations exceptionnelles, après avis d’un collège des médecins, d’autoriser de mettre un terme à des souffrances devenues intolérables. 7 – EN CONCLUSION – Personnellement, je pense que la loi Léonetti est bonne, car elle a marqué une grande avancée dans le développement des soins palliatifs et introduit des notions majeures, Pour le patient, avec la possibilité de rédiger les directives anticipées qui devront être respectées, Pour le médecin, la procédure collégiale qui facilite la décision d’arrêter un traitement devenu inutile. Dans son article 2, elle permet même une sorte d’euthanasie passive, par la possibilité d’utiliser des traitements sédatifs à fortes doses qui risquent d’abréger la vie. La mise en place des différentes structures des soins palliatifs permet la prise en charge du confort du patient mais aussi de la famille tout en évitant l’acharnement thérapeutique en phase terminale. Les Ainsi dans la très grande majorité des cas de soins palliatifs assurent au patient une fin de vie paisible. Le récent rapport du Professeur SICARD semble vouloir renforcer la loi Léonetti en insistant sur l’effort de formation nécessaire à réaliser pour renforcer les services de soins palliatifs. Aujourd’hui, la difficulté majeure vient du fait que les dispositions de la loi Léonetti ne sont pas assez connues tant des médecins que des patients. 4 Faut-il aller plus loin en autorisant le recours encadré à l’euthanasie ou au suicide assisté ? POUR PRESERVER LA DIGNITE DE LA PERSONNE HUMAINE EN FIN DE VIE, IL FAUT AIDE,SOUTIEN ET PRESENCE. » Au centre, à la gauche du Président, Martial GUILLIEN, Pierre LARNAUDIE lors de son intervention 5